Iraq Report Summary October 2003
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Iraq Report Summary October 2003
Hearts and Minds: Post-War Civilian Casualties in Baghdad by US Forces 21 octobre 2003 Resume Ce rapport apporte des informations et des analyses sur les pertes civiles causées par l’armée américaine, à Bagdad depuis la déclaration de la fin des hostilités en Irak par le Président George W. Bush, le 1er mai 2003. Ce rapport s’appuie sur des recherches conduites à Bagdad du 18 au 30 septembre ainsi que sur des recherches supplémentaires menées les 5 et 9 octobre. Au cours de cette période, Human Rights Watch a interrogé des témoins d’incidents ayant entraîné des pertes civiles, des membres des familles des personnes décédées, des victimes n’ayant pas été touchées de façon mortelle, des policiers irakiens, des avocats, des militants des droits humains, des soldats américains, des officiers du Judge Advocate General Office (JAG) de l’armée américaine et des membres de l’Autorité Provisoire de la Coalition (CPA) conduite par les Etats Unis, responsable de gouverner l’Irak. L’armée américaine qui a la responsabilité de la sécurité à Bagdad ne prend pas délibérément pour cibles des civils. Mais elle ne fait pas non plus suffisamment pour minimiser les torts causés aux civils comme l’exige le droit international. L’Irak constitue de toute évidence un environnement hostile pour les troupes américaines, avec des attaques quotidiennes menées par des Irakiens ou par d’autres personnes opposés à l’occupation des Etats Unis et de la coalition. Mais un tel environnement n’exempte pas l’armée de son obligation de recourir à la force avec retenue, de façon proportionnelle et sélective et seulement lorsque cela est strictement nécessaire. L’armée américaine ne tient aucune comptabilité des pertes civiles, affirmant à Human Rights Watch qu’il [lui] était « impossible de maintenir un comptage exact. » Une telle attitude suggère que les pertes civiles ne font pas partie des préoccupations les plus importantes. Sur la base d’entretiens conduits avec des témoins et des membres des familles, Human Rights Watch a confirmé la mort de vingt civils irakiens dans des circonstances légalement discutables, entre le 1er mai et le 30 septembre. Dixhuit de ces morts sont détaillées dans ce rapport. De plus, Human Rights Watch a recueilli des données sur les pertes civiles causées par les forces américaines en consultant la police irakienne, des organisations de défense des droits humains, des médias occidentaux et les déclarations de l’armée américaine sur le sujet. Au total, Human Rights Watch estime que l’armée américaine a tué quatre-vingt-quatorze civils dans des circonstances discutables. Human Rights Watch n’a pas procédé à la vérification de chacun de ces cas individuels mais pris dans leur ensemble, ils mettent en évidence un ensemble de décès présumés illégaux qui méritent une investigation. A la date du 1er octobre 2003, l’armée américaine a reconnu avoir mené à leur terme cinq enquêtes seulement dépassant le niveau de la division et portant sur des meurtres de civils présumés illégaux. Dans quatre de ces incidents, il a été conclu que les soldats avaient opéré dans le cadre « des règles d’engagement » de l’armée américaine. Dans le cinquième cas, un pilote d’hélicoptère et son commandant risquent une action disciplinaire pour avoir tenté de déchirer une bannière chiite à al-Sadr City, un incident qui a conduit à un affrontement armé avec des manifestants. Une sixième enquête est en cours : le meurtre de huit policiers irakiens et d’un garde jordanien par des soldats de la 82ème Division aéroportée à al-Falluja, le 12 septembre. Les cas individuels de pertes civiles détaillés dans ce rapport mettent en évidence un schéma qui repose, pour les forces américaines, sur une tactique trop agressive, des tirs non sélectifs dans des zones résidentielles et un recours rapide à une force meurtrière. Dans certains cas, les forces américaines étaient confrontées à une menace réelle qui leur donnait le droit de répondre par la force. Mais cette réponse a parfois été disproportionnée par rapport à la menace ou mal ciblée, contribuant à blesser des civils ou à les mettre en danger. A Bagdad, les pertes civiles se répartissent en trois catégories principales d’incidents. Premièrement, on trouve les décès survenus pendant les raids de l’armée américaine sur les maisons, à la recherche d’armes ou de combattants résistants. L’armée américaine affirme avoir commencé à utiliser une tactique moins agressive et elle emmène de plus en plus de policiers irakiens avec elle pour ces raids. Cependant, les habitants de Bagdad continuent de se plaindre de comportements agressifs et impétueux, d’abus physiques et de vols perpétrés par les troupes américaines. Lorsque des soldats américains se sont heurtés à une résistance armée de la part de familles qui pensaient agir en état de légitime défense contre des voleurs, les soldats ont parfois eu recours à une force écrasante, tuant des membres de la famille, des voisins ou des passants. Dans la seconde catégorie se trouvent les pertes civiles causées par des soldats américains ayant répondu de façon disproportionnée et non sélective, après avoir été victimes d’une attaque à des postes de contrôle ou sur la route. Human Rights Watch a recueilli des informations sur des cas où, après l’explosion d’un engin explosif improvisé aux abords d’un convoi américain, des soldats ont tiré avec des armes de gros calibre dans de multiples directions, blessant et tuant des civils qui se trouvaient là. Dans la troisième catégorie, on trouve les meurtres commis aux postes de contrôle lorsque des civils irakiens ne se sont pas arrêtés. Les postes de contrôle américains se déplacent constamment dans tout Bagdad et ne sont pas toujours bien délimités même si la visibilité de la signalisation est en voie d’amélioration. Un manque d’interprètes arabes et une mauvaise compréhension de la gestuelle irakienne causent une certaine confusion, avec des conséquences parfois fatales pour les civils. Des soldats crient parfois des instructions contradictoires en anglais, l’arme levée : « Restez dans la voiture ! » ou « Sortez de la voiture ! ». Dans tous ces scénarios, les soldats américains peuvent se révéler arrogants et injurieux. Ils ont été vus mettant leur pied sur la tête d’Irakiens qu’ils détenaient ce qui représente une offense très insultante. Des soldats hommes touchent parfois des Irakiennes ou procèdent même à leur fouille, un acte tout aussi culturellement inacceptable. Bien évidemment, tous les soldats ne se comportent pas ainsi. Human Rights Watch a rencontré de nombreux membres de l’armée qui s’adressaient avec respect aux Irakiens et travaillaient dur pour former la police irakienne, pour assurer la garde de certaines installations et pour poursuivre les criminels. Certains de ces soldats ont exprimé leur frustration quant au manque de sensibilité dont faisaient preuve leurs collègues. « Il faut du temps pour se débarrasser des comportements à la Rambo, » a déclaré un officier à Human Rights Watch. En général, la police militaire américaine à Bagdad semble mieux adaptée aux tâches qu’exige une occupation militaire et qui consistent à faire respecter les lois, après un conflit. La situation est plus problématique avec les unités de combat comme la 82ème Division aéroportée et la 1ère Division blindée, appelées pour fournir des services pour lesquels elles ne sont pas correctement formées ou ne savent pas quelle attitude adopter. Human Rights Watch a recueilli des informations sur huit incidents survenus à Bagdad impliquant ces deux divisions au cours desquels seize civils ont trouvé la mort. Nombre de ces soldats ont dû combattre pour entrer en Irak et on leur demande maintenant de passer sans préparation valable d’un rôle de guerriers à celui de policiers devant contrôler les foules, poursuivre les voleurs et stopper les rebelles. Des responsables de l’armée ont affirmé à Human Rights Watch qu’ils étaient conscients du problème et fournissaient une formation supplémentaire. Le but avoué est de transmettre les fonctions de police aux forces irakiennes de sécurité mais ces institutions sont encore en cours de formation. Un problème central est le fait que les soldats et commandants américains présents en Irak ne soient pas tenus pour responsables de leurs actes. Selon le règlement numéro 17 du CPA, les tribunaux irakiens ne peuvent poursuivre en justice les soldats de la coalition. Il est donc de la responsabilité des pays participant à la coalition d’enquêter sur les allégations de recours à une force excessive ou de meurtres illégaux et de tenir pour responsables de leurs actes les soldats et commandants ayant violé les codes militaires nationaux ou le droit international humanitaire. L’absence d’enquêtes approfondies, conduites dans des délais adéquats sur de nombreux incidents discutables a créé une atmosphère d’impunité, dans laquelle de nombreux soldats pensent qu’ils peuvent appuyer sur la gâchette sans en subir de conséquences. Human Rights Watch salue les cinq enquêtes conduites à ce jour mais exprime des réserves sur certaines de leurs conclusions. Deux de ces cinq cas sont détaillés dans ce rapport et les preuves suggèrent que des soldats américains ont eu recours à une force mortelle excessive. Il y a également de nombreuses pertes civiles discutables pour lesquelles aucune enquête n’a été lancée. L’exemple le plus frappant est le meurtre de vingt personnes au moins par la 82ème Division aéroportée à al-Falluja les 28 et 30 avril, détaillé dans un rapport de Human Rights Watch publié en mai, Violent Response: the US Army in alFalluja. En même temps, des mesures ont été prises pour réduire les pertes civiles. Les postes de contrôle sont plus clairement signalés et certaines troupes de combat ont reçu une formation supplémentaire sur les tâches de police. La police irakienne escorte plus fréquemment les soldats américains pendant les raids. Mais davantage d’initiatives sont nécessaires. Une formation de base à la langue et à la culture afin d’enseigner aux soldats les gestes de la main que font et comprennent les Irakiens ainsi que quelques mots et expressions essentiels d’arabe réduiraient la confusion aux postes de contrôle ou pendant les raids. Les soldats devraient savoir que mettre un pied sur la tête d’une personne forcée à s’allonger au sol est une insulte grave. Les troupes de combat devraient recevoir une formation supplémentaire sur les tâches de police, après un conflit comme ceci a été proposé à la 1ère Division blindée. Les règles d’engagement ne sont pas rendues publiques pour des raisons de sécurité. Cependant, les civils irakiens ont le droit de connaître les directives concernant un comportement sans risque. La coalition devrait clairement signaler les postes de contrôle, par exemple et informer les Irakiens par le biais d’une campagne de service public sur la façon d’approcher les postes de contrôle et de se comporter pendant les raids. Il est d’une importance capitale que des enquêtes rapides soient conduites sur tous les recours inappropriés ou illégaux à la force et que de tels actes soient punis, comme l’exige le droit international. Les soldats américains opèrent actuellement dans une quasi-impunité en Irak. Savoir qu’ils seront tenus pour responsables de leurs actes sera une façon efficace de limiter les recours excessifs, non sélectifs ou impétueux à une force meurtrière.