paysages d`éleveurs - Chambres d`Agriculture de Bretagne
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paysages d`éleveurs - Chambres d`Agriculture de Bretagne
Environnement Paysages d’élevages, paysages d’éleveurs L’habitude de vivre dans le même cadre nous fait parfois oublier les charmes de nos campagnes. Une lecture des paysages ruraux apporte des éléments d’histoire et de géologie. Les paysages ne sont pas immuables ; l’urbanisation, les grands aménagements, les évolutions des systèmes d’exploitation génèrent des impacts forts et les bouleversent. A contrario, les élevages de bovins ont un rôle essentiel sur le maintien du bocage et la non-fermeture des milieux. C’est un atout à valoriser. e façon générale, hormis dans certaines zones de montagne, jusqu’au XVIIIème siècle l'élevage reste en France une activité productive secondaire. Les animaux gardés par les enfants vagabondent en forêt, pâturent les jachères. Les haies observées sur les peintures de l’époque protégent les cultures des troupeaux. Ce type d’élevage n’imprime pas une marque significative sur les paysages. Après la révolution française, dans la plupart des régions, le développement de l’élevage et l’introduction des plantes sarclées permettent de supprimer la jachère. Les landes laissent place En Bretagne, un paysage de bocage entretenu par un éleveur laitier à la prairie qui devient une composante essentielle des paysages ses et dynamiques, capables de naturels humanisés qui accorruraux et de leur attrait. Les payvaloriser si bien les ressources dent une grande place à la prairie, sans, devenus propriétaires, pour naturelles particulières à chaque à l’arbre, à l’eau. Ces modèles certains, trouvent les meilleurs région. Les modèles paysagers continuent d’influencer notre moyens de tirer profit de leurs qui sous-tendent ces projets conception du beau et constiterres. Cela renforce les spéciproviennent de la riche campatuent un atout pour les éleveurs. ficités productives, gne anglaise dont les Ceux-ci peuvent s’appuyer sur paysagères et gastrobocages ont été mis cette reconnaissance historique nomiques de chacune Eleveurs et en scène par des peinde leur savoir-faire paysager pour des très nombreuses tres paysagistes dès le proposer de nouvelles référenpaysages, une régions agricoles frances paysagères issues de modes çaises. longue histoire XVIIIème siècle. En France, l’évolution des d’élevage contemporains, en La pensée paysagère paysages inspire et phase avec un développement agronomique indique trouve un écho dans durable des territoires. que l’harmonie des paysages doit la peinture, la musique (avec les refléter la richesse créée et l’harpastorales) ou dans les descripmonie sociale dans les campaIdentifier les tions littéraires. Ces productions gnes. A la fin du XIXème siècle, menaces sur le se rattachent à différents coula France acquiert la réputation rants artistiques (romantisme, paysage pour mieux d’être le jardin de l’Europe. Les naturalisme, impressionnisme...). les surmonter voyageurs toujours plus nomElles vont toutes contribuer à breux, qui préfigurent le touAujourd’hui ces paysages d’élevaforger des références esthétiques risme de masse du XXème siècle, ges souvent remarquables reprévalorisant la présence de l’animal admirent la qualité du travail sentent un patrimoine reconnu, domestique dans des paysages de ces sociétés rurales nombreumais fragile. En effet ils sont Mars 2007 - N°12 17 Environnement Un exemple de lecture régionale : le pays de Locminé (Morbihan) Au nord de Vannes, le pays de Locminé se situe dans une dépression bordée au sud par les landes de Lanvaux et au nord par le plateau de Rohan. Cette région se caractérise par des élevages de vaches laitières, souvent associés à d’autres productions animales de porcs ou de volailles. Collines des Landes de Lanvaux La forêt recouvre ces collines pauvres et acides ponctuées de chaos granitiques. Les sous-bois constituent un abri naturel parfois utilisé pour protéger les animaux du vent en hiver et du soleil en été. Coteau Sur cette zone de transition entre les deux plateaux, les nombreuses fermes, situées à l'abri des vents dominants du Sud Ouest, sont entourées par les prairies sur lesquelles pâturent d’importants troupeaux. Des bâtiments agricoles imposants, n’ayant pas toujours bénéficié d’une grande attention architecturale ou paysagère indiquent une forte concentration de l’élevage. Une lecture d’un paysage breton Plateau de Rohan Sur de grandes parcelles agricoles aux formes géométriques, les cultures annuelles, en particulier le maïs, dominent dans le fond du plateau offrant un paysage ouvert et assez plat, où subsistent quelques bosquets et haies résiduelles de l’ancien maillage bocager. parfois soumis à des dynamiques contradictoires qui peuvent s’entremêler sur un même territoire et rompre l’équilibre des activités humaines qui les ont créés. Banalisation du paysage par la simplification des systèmes de production Le paysage devient banal quand il est difficile à situer géographiquement. Les phénomènes de banalisation du paysage sont liés à l’agrandissement de la taille des parcelles, à la simplification des rotations, à l’homogénéisation des pratiques et des systèmes de production agricoles conçus sans lien avec les spécificités de chaque territoire. La standardisation de l’architecture des bâtiments d’élevage participe à ce phénomène. L’élimination de nombreux motifs agro-paysagers (arbres isolés, haies, talus, murs, Le bocage en Bretagne, pour s'abriter du vent... 18 Mars 2007 - N°12 bosquets...) qui participent à l’identité des régions accentuent cette banalisation. La suppression de nombreux chemins ne permet pas toujours la fréquentation du paysage à l’allure du promeneur. L’adaptation des systèmes de production, la restauration des éléments fixes du paysage, l’adoption de règles harmonieuses pour les nouvelles constructions permettent bien souvent de concilier agriculture dynamique et identité paysagère régionale contemporaine. Fermeture du paysage en lien avec l’extension de la friche, de la forêt. De nombreuses régions d'élevage ont subi un fort exode rural qui s’est traduit par l’abandon des parcelles les moins riches dans les bas-fonds humides ou sur les pentes les plus raides. N'étant plus fauchées ni pâturées, ces terres se ferment donc progressivement en laissant place à la Jean Yves Blanchin, Institut de l’Elevage jean-yves.blanchin@inst-élevage.asso.fr Bernard Le Lan – Chambres d’agriculture de Bretagne [email protected] cation ou des zones d’activité, les infrastructures touristiques ou sportives brouillent le paysage traditionnel sans toujours assurer un cadre de vie de qualité. Les agriculteurs doivent donc prendre leur place dans l’élaboration des documents d’urbanisme et faire reconnaître leur rôle pour un aménagement harmonieux du territoire. ... ou s'abriter du soleil friche dans un premier temps, puis à la forêt. C'est en observant les impacts visuels de la déprise agricole que l'on a pris conscience du rôle de l'agriculture dans la qualité des paysages. Dans ces régions, l’élevage est le dernier rempart face à l’extension de la forêt. Les politiques agricoles favorables au maintien de l’élevage ont un rôle positif sur le maintien de paysage ouvert. Brouillage du paysage lié à l’étalement urbain L'espace rural est soumis à une concurrence très forte entre les différentes activités qui occupent le territoire. L'étalement urbain et le repeuplement des communes les plus proches des villes génèrent des constructions au détriment des terres agricoles. La création de grands équipements de transport, le développement mal maîtrisé de l’urbanisation le long des voies de communi- Des paysages de qualité aident à donner une belle image de l’agriculture, pour mieux vendre ses produits, pour favoriser l’accueil en milieu rural. Les choix de systèmes fourragers, les constructions de bâtiments, les aménagements parcellaires doivent être imaginés avec un œil de paysagiste Haies et bovins vont de paire Les résultats d’une enquête sur la biodiversité, menée en Bretagne dans les fermes des Réseaux d’Elevage, montraient que haies et talus représentaient en moyenne un linéaire de 126 mètres par hectare SAU. Les écarts entre exploitations (de 16 à 370 mètres par hectare SAU) étaient, en grande partie, liés à l’historique du territoire, notamment au remembrement. Les agriculteurs indiquaient que le maintien des haies et les nouvelles plantations étaient expliqués par l’élevage bovin : séparation des parcelles, protection des animaux. Leur entretien permettait de produire du bois de chauffage, mais générait un travail hivernal assez pénible. Les éleveurs évoquaient que des haies auraient été abattues si l’exploitation s’était orientée vers plus de cultures annuelles. Paysages d’élevages, paysages d’éleveurs C’est le titre d’une plaquette qui est issue des travaux engagés par l’Institut de l’Elevage, soutenus par le Ministère de l’Agriculture et de la Pêche en lien avec les Chambres d’agriculture et les collectivités territoriales. 39 pages, 1er trimestre 2006, 15 € Commander à Technipel – 149, rue de Bercy – 75595 Paris Télécharger sur : http://www.inst-elevge.asso.fr/ html1/article.php3?id_article=9277 Mars 2007 - N°12 19