100316_BCE_ La BCE renforce de nouveau son

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100316_BCE_ La BCE renforce de nouveau son
Zone Euro : La BCE renforce de nouveau son action
En Bref
La Banque centrale européenne (BCE) a annoncé une intensification drastique de son assouplissement
monétaire à l’issue de sa réunion en parallèle de la publication de projections d’inflation et de croissance
révisées nettement à la baisse jusqu’à l’horizon 2018.
Le volet de mesures mis sur la table par les gouverneurs de l’autorité monétaire se compose d’une action sur les
taux directeurs, dont le principal, le taux de refinancement passe de 0,05% à 0%, d’une expansion du
rythme d’achat d’actifs dans son programme dit APP passant de 60 à 80Mds€ par mois, d’un élargissement
des titres éligibles dans le cadre de ce programme, comprenant désormais les obligations d’entreprises nonfinancières de la catégorie « investissement » (dont la notation est supérieure à BBB-) et d’un
renouvellement des opérations de refinancement à long terme ciblées, sous l’appellation TLTRO 2, offrant
de la visibilité jusqu’en 2020 et une incitation supplémentaire à la production de crédit en termes de taux
d’intérêt. Le vote en faveur de ces mesures ne s’est pas fait à l’unanimité mais à une large majorité des membres
du Conseil des gouverneurs.
Lors de la conférence de presse, M. Draghi a défendu l’action de l’institution en insistant sur la synergie entre
les mesures prises, dont la finalité est d’améliorer la transmission de la politique monétaire à l’économie
réelle, de prévenir un resserrement indu des conditions financières, de stimuler la distribution du crédit et
in fine de soutenir l’activité et redresser la trajectoire d’inflation vers sa cible de moyen-terme.
Dans le Détail :
A – Une action sur la palette complète des taux directeurs
Le principal taux directeur, à savoir le taux de
Taux de la Banque Centrale Européenne
refinancement des institutions financières auprès de la
Taux de facilité de dépôt
Taux de Refinancement
BCE, voit son niveau abaissé de 0,05% à 0% (graphique
Taux de facilité de prêt marginal
ci-dessous). La BCE n’avait plus effectué d’ajustement sur ce 6
taux depuis septembre 2014.
5
Le taux sur la facilité de dépôt, qui avait franchi le seuil
4
symbolique de 0% pour la première fois en juin 2014, a
été de nouveau abaissé de 10 points de base, à -0,4%. Un 3
taux négatif sur cette facilité signifie, dans la pratique, que les 2
banques doivent verser une rémunération de 0,4% sur la 1
0,25
liquidité excédentaire déposée auprès de la BCE. Ainsi la
0
0
BCE a décidé d’abaisser ce taux malgré les critiques émises,
-0,4
ici et là, sur les effets néfastes de cette politique au regard de -1
la profitabilité du secteur bancaire et ses répercussions 1999 2001 2003 2005 2007 2009 2011 2013 2015 2017
200
ultimes sur les agents économiques. M. Draghi et son viceprésident y ont répondu par la négative indiquant que, d’un
point de vue agrégé, le secteur bancaire avait connu une
0
amélioration du revenu net moyen sur les marges d’intérêt en
1999
2001
2003
2005
2007
2009
2011
2013
2015
2017
2015 (première année complète en taux négatif), une
Evolution du Corridor (en points de base)
réduction des coûts de financement, et des gains en capital Sources : Covea Finance, Thomson
Reuters, BCE
sur les titres à leur bilan attribuable à la diminution de
l’ensemble de la courbe des taux.
M. Draghi a toutefois concédé que toutes les banques n’étaient exposées de la même manière à un environnement
de taux négatif selon leur structure de financement. Il a notamment suggéré, sans la quantifier avec exactitude,
l’existence d’une limite basse au-delà de laquelle les taux négatifs pourraient être contreproductifs.
Enfin, le taux sur la facilité de prêt marginal a lui été réduit à 0,25%. C’est à ce taux qu’une institution financière
pourra désormais emprunter à la BCE de la liquidité au jour le jour.
Une des nouveautés du communiqué introductif de la BCE est la présence d’un élément de langage signalant la
volonté du Conseil des gouverneurs de maintenir les principaux taux d’intérêts directeurs au niveau actuel ou plus
bas sur une période de temps prolongée et « bien au-delà de l’horizon des achats nets d’actifs ». Cette nouvelle
formule fournit de nouvelles indications prospectives sur l’évolution des taux (forward guidance).
B – La BCE augmente la cadence de son programme d’achat d’actifs (APP)
L’autre décision majeure prise par le Conseil des
Bilan Eurosystème : Total actif (Mds€)
gouverneurs est relative à l’augmentation du rythme
Projection 60Mds€/mois jusqu'en mars 2017
mensuel du programme d’achat d’actifs dit APP, qui
Projection 80Mds€/mois jusqu'en mars 2017
passera à partir du 1er avril 2016, de 60Mds€ à 80Mds€. 4000
Cela équivaut à une progression annuelle du bilan de la BCE 3500
de 960Mds€ sur une année pleine (contre 720Mds€ 3000
précédemment, graphique ci-contre). Ainsi, le bilan de la
BCE devrait atteindre, dans l’état actuel des choses, 2500
2000
3880Mds€ à la fin du mois de mars 2017.
Le programme d’achat d’actifs (APP) se voit également 1500
compléter d’un nouveau programme, intitulé CSPP pour 1000
corporate sector purchase program, qui rendra éligible aux
achats de la BCE des titres obligataires d’entreprises non- 500
0
financières dont la notation est supérieure à BBB- en
01
03
05
07
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11
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15
17
accord avec les règles existantes de l’Eurosystème sur les Sources 99
: Thomson Reuters, BCE, Covea Finance
actifs éligibles comme collatéral.
M. Draghi a indiqué que des précisions sur les critères d’éligibilité seront apportées au fil de l’eau afin que les
premiers achats puissent prendre place à la fin du deuxième trimestre 2016. D’ores et déjà, la BCE exclut, de
ces achats futurs, les titres obligataires des institutions de crédit et des entités en lien avec une maison mère
appartenant à un groupe bancaire. Aucune précision n’a encore été donnée sur la nouvelle répartition des achats
entre titres publics et privés (y compris ABS et obligations sécurisées) dans le cadre de l’APP. De plus, M. Draghi
ne s’est pas non plus prononcé sur le montant total estimé de titres obligataires d’entreprises non-financières
éligibles dans le cadre de ce nouveau programme CSPP.
Enfin, concernant le programme d’achat d’actif de titres publics (PSPP), des ajustements ont été apportés afin
d’augmenter la part maximal possible que peut détenir la BCE à son actif d’un émetteur et d’une souche d’émission,
de 33% à 50%, uniquement pour les titres des organisations internationales éligibles (autrement dit les agences
supranationales) et les banques multilatérales de développement. Cette limite par émetteur et par souche reste fixée
à 33% pour les titres obligataires souverains.
Selon M. Draghi, l’introduction du programme CSPP et le relèvement de la limite de détention de titres émis par les
agences supranationales et les banques de développement permettra à la BCE d’atteindre sans contrainte
opérationnelle le nouvel objectif de 80Mds€ par mois.
C – Plus de visibilité et d’attractivité sur la politique de fourniture en liquidité à travers les opérations TLTRO2
Le troisième levier d’action sur lequel la BCE a souhaité agir
BCE : montant alloué lors des opérations TLTRO1 (Mds€)
concerne la politique de fourniture en liquidité. Elle a donc
annoncé une nouvelle phase de TLTRO, des opérations 140
de refinancement à long-terme dépendantes de la 120
distribution de crédits bancaires. La première phase de
TLTRO, débutée en septembre 2014 et qui devait prendre fin 100
en juin 2016, avait conduit à une demande des banques de
80
418Mds€ sur six opérations (les deux opérations restantes
60
auront lieu en mars et juin 2016).
La deuxième phase du TLTRO, intitulé TLTRO2,
40
comportera
quatre
nouvelles
opérations
de
20
refinancement, une tous les trimestres à partir de juin
?
?
0
2016 et jusqu’en mars 2017. Chaque prêt de la BCE aura
TLTRO TLTRO TLTRO TLTRO TLTRO TLTRO TLTRO TLTRO
une maturité de quatre ans, ce qui signifie que la dernière
(sept14) (dec14) (mars15) (juin15) (sept15) (dec15) (mars16) (juin16)
échéance TLTRO aura lieu en mars 2021, après la fin du
mandat initial de M. Draghi.
Le taux d’intérêt appliqué à ces opérations de refinancement TLTRO2 sera celui du taux de refinancement qui
prévaut au moment de l’allocation, actuellement 0%. Toutefois, les banques auront la possibilité de voir le taux des
opérations TLTRO2 atteindre au maximum celui de la facilité de dépôt, actuellement -0,4%, à la condition qu’elles
justifient une création de crédit suffisante par rapport à une valeur de référence (déterminée comme pour le
TLTRO1 par son comportement de prêt du 31 janvier 2015 au 31 janvier 2016) sur la période allant du 1er février
2016 au 31 janvier 2018. Pour simplifier et en d’autres termes, une banque pourrait, dans le meilleur des cas,
se voir rémunérer par la BCE au taux sur la facilité de dépôt (tant qu’il reste négatif) si elle s’est engagée
dans une production de prêt aux agents économiques.
Sur le papier, cette spécificité rend les opérations de refinancement TLTRO2 relativement attractives car à moindre
coût (voire bénéfique) pour les banques. A ce titre, la BCE offre la possibilité aux banques de rembourser de
manière préemptive leurs prêts du TLTRO1 lors de l’opération du mois de juin 2016 afin de basculer sur le nouveau
dispositif.
Dans le détail, la capacité maximale d’emprunt à disposition des banques sur la nouvelle phase du TLTRO a été
fixée à 30% de l’encours éligible de crédits aux entreprises non-financières et ménages hors immobilier au 31
janvier 2016 moins le montant total déjà alloué lors des opérations TLTRO1. Le seuil d’allocation a donc été
largement étendu puisque celui-ci était de 7% de l’encours éligible sur les deux allocations initiales du TLTRO1.
Au 31 janvier 2016, les banques possédaient un encours éligible de 5643Mds€. La capacité totale d’emprunt est
donc estimé sur l’ensemble des quatre opérations TLTRO2 à 1280Mds€ (30% de 5643Mds€ auxquels on soustrait
les 418Mds€ empruntés au TLTRO1).
D – La BCE semble se résoudre à une déviation de sa cible d’inflation à horizon 2018
La conférence de presse à la suite de la réunion a été
Zone Euro : Projections d'inflation des équipes de la BCE
l’occasion pour M. Draghi de présenter les nouvelles
(linéarisation à partir des moyennes annuelles)
projections macroéconomiques d’inflation et de croissance 5
GA%
Décembre 2015
mars-16
sur l’horizon 2016-2018.
Du côté de la croissance du PIB réel, les projections ont 4
été globalement révisées à la baisse sur les années 2016 3
(1,4% contre 1,7% en décembre 2015) et 2017 (1,7%
contre 1,9%) en raison d’un contexte international plus 2
1,6
dégradé qu’initialement anticipé. Ainsi la croissance
1,0
mondiale (hors Zone euro) est abaissée à 3,2% en 2016 1
1,3
contre 3,6% lors du précédent exercice. Le commerce
mondial est attendu en croissance de 2,2% en 2016 (2,9% 0
0,1
lors des projections de décembre). Enfin, la BCE s’attend
-1
néanmoins à une consolidation graduelle de la reprise en
07
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11
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Zone euro avec une croissance de 1,8% en 2018.
Sources : Eurostat, Covéa Finance, Thomson Reuters
Les révisions sur les projections d’inflation ont été
drastiquement abaissées en 2016 et 2017. La BCE prévoit
une progression des prix de 0,1% en 2016 (1%
précédemment) et 1,3% en 2017 (1,6% précédemment).
Pour la première fois depuis le recul des prix du pétrole,
la BCE signale que son objectif d’inflation, proche mais
en dessous de 2%, sera hors d’atteinte en 2018 (1,6%
attendue). Ces projections ont pour hypothèse une remontée
graduelle du prix du pétrole à 41 dollars par baril en 2017 et
45 dollars en 2018 (prix des futures à la date du 15 février
2016).
Thomas Foicik, le 10 Mars 2016
1,6
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