Financement du sport en Europe : vers une

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Financement du sport en Europe : vers une
Financement du sport en Europe :
vers une désolidarisation entre sport de masse et sport de haut niveau ?
Jean Dutoya et Julien Montel, cabinet AMNYOS,
Le modèle européen du sport repose sur une structure pyramidale où le sommet
(constitué du haut niveau, y compris le sport professionnel) et la base (composée par le
sport « de masse » et reposant fortement sur le bénévolat) sont solidaires l'un de l'autre.
L’étude des financements du sport en Europe, menée dans le cadre de la Présidence
Française de l’UE1, conclut à une fragilisation de ce modèle.
Ecarts entre
disciplines
Pratique de
haut niveau
(et sport
professionnel)
Pratique
de masse
Concentration
des financements
sur les disciplines
les plus médiatisées
Difficultés à capter
les financements privés
Difficultés à renouveler le bénévolat et à
pérenniser les emplois salariés
Plafonnement des financements publics
Incertitude sur les systèmes de reversement des
revenus issus des paris et loteries
On
observe
tout
d’abord
une
spécialisation
des
sources
de
financements, au bénéfice du sommet de
la pyramide. Ainsi, les financements
privés (ménages, droits télévisuels,
sponsoring)
sont
majoritairement
orientés vers le sport de haut niveau
(avec des écarts importants entre
disciplines, selon leur niveau de
médiatisation). Les financements d’Etat,
représentant en moyenne 11,9% des
financements
du
sport,
tendent
également à s'orienter vers le haut
niveau, en adoptant des critères de
performance sportive et de visibilité
médiatique.
Dans le même temps, les financements destinés à la base de la pyramide se raréfient. La
pratique de masse repose très fortement sur la contribution du bénévolat (dont la
monétarisation équivaut au montant total des financements publics), les collectivités
locales et les pratiquants eux-mêmes (cotisations et licences). Concernant les collectivités
locales, leur contribution financière est très significative (24,3%) mais finalement peu
structurante, compte tenu de leur caractère diffus et fragmenté. L'impact de cette
contribution pourrait être optimisé en offrant aux collectivités une place dans la
gouvernance du sport davantage en rapport avec l'importance de leur contribution.
Ce double constat amènerait plusieurs recommandations. Il inciterait à aider le sport de
masse à développer ses propres sources de financements, en lui facilitant l'accès aux
financements privés et en particulier à ceux des ménages qui représentent 49,7% des
financements du sport. Le mécénat de particulier ou la revalorisation des tarifs, en lien
avec le développement de l'emploi salarié, pourraient être encouragés en ce sens.
Mais ce double constat amène avant tout à renforcer et pérenniser les systèmes de
solidarités entre la base et le sommet de la pyramide. Ces solidarités existent dans 21
Etats parmi les 27 Etats membres de l'Union européenne2. Ils sont cependant à la fois
insuffisants pour combler les écarts qui se creusent et menacés du fait de l'autonomisation
croissante du sport de haut niveau ou de la fin des situations de monopole sur les paris
sportifs. Ce risque de désolidarisation entre le sommet et la base de la pyramide a
également été pointé par l'ISCA lors du forum européen du sport en novembre 2008.
Il paraît donc urgent de garantir durablement ces solidarités, si emblématiques et
identitaires du modèle européen du financement du sport.
La synthèse de l'étude sur le financement du sport en Europe est téléchargeable à l'adresse
suivante : www.amnyos.com/-Dernieres-etudes-.html.
2 Ces solidarités peuvent opérer soit à l'intérieur d'une discipline sportive donnée (solidarité
"verticale" : entre sports médiatisés et sport de masse) soit, plus rarement, entre disciplines
sportives (solidarité "horizontale").
1
Revue scientifique Sport et Citoyenneté n°7 « Sport, éthique et économie »