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année e 30 trimestriel Lecture Jeune © Gianpaolo Pagni, 2003 Revue de réflexion, d’information et de choix de livres pour adolescents Les adolescents et la presse écrite mars 2007 N°121 I Chers lecteurs, Lecture Jeunesse vous invite à découvrir son site Internet : www.lecturejeunesse.com LJ121_P1-3.qxd 23/02/07 17:42 Page 1 Sommaire Éditorial page 2 Rencontre avec… page 3 Dossier Les adolescents et la presse écrite page 7 Parcours de Lecture Livres accroche Et après Lecteurs confirmés Ouvrages de référence page 30 page 42 page 54 page 69 En savoir plus page 71 Index page 75 LJ121_P1-3.qxd 23/02/07 17:42 Page 2 2 Édito Hélène Sagnet (1) Source : OJD Du 19 au 24 mars se déroule la 18e semaine de la presse et des médias dans l'école, organisée par le Clemi (Centre de liaison de l’enseignement et des moyens d’information). L’occasion pour Lecture Jeune de s’intéresser au support de lecture que constitue la presse écrite. On évoque depuis de nombreuses années le déclin de la presse quotidienne nationale. L’une des raisons invoquée serait le recul du lectorat jeune. En 2005, pour la première fois, la baisse de la diffusion concerne également la presse magazine (1). La presse peut pourtant s’avérer être un vecteur de lecture surprenant, comme l’écrit Véronique Le Goaziou dans Pratiques lectorales et rapport sur la lecture des jeunes en voie de marginalisation (2005) : « Le premier, principal et parfois unique objet de lecture, est le journal. […] Il s’agit souvent ou exclusivement du journal régional ou local.» La lecture de la presse, en particulier magazine, est surtout une lecture librement choisie, associée aux loisirs et liée aux centres d’intérêt des adolescents. Elle fonctionne sur les modes de reconnaissance et d’identification de ce public et se prête parfaitement aux sociabilités qui sont les leurs : échanges, commentaires… Elle peut alors donner le goût de lire, à nous de proposer des réseaux de lecture pertinents. L’autre volet enfin concerne la place croissante de l’information et des médias dans la culture jeune. Il renvoie donc à leur rapport au monde, ce qui rend indispensable le travail de sensibilisation à l’analyse critique de la presse, notamment dans ses nouvelles formes multimédia. Quels sont les titres réellement plébiscités par les adolescents ? Le sociologue Jean-François Barbier-Bouvet revient sur deux enquêtes récentes, il analyse d’une part la lecture de la presse « ado » et d’autre part la consommation de magazines adultes par ce public. Presse « people », « trash » et magazines TV sont bien présents et installent le règne de la « société du spectacle ». Christelle Crumière, sémiologue des médias, étudie quatre de ces titres en interrogeant leur fonction de support identificatoire. La presse quotidienne gratuite semble elle aussi avoir séduit les jeunes. Marie-Christine LipaniVaissade, journaliste et enseignante, explique les raisons de ce succès, largement lié aux nouveaux modes de consommation des médias. Parmi ceuxci, le journaliste Albert du Roy, s’interroge sur la lecture de presse sur Internet et s’inquiète du défi que constitue la bonne maîtrise de cet outil. Evelyne Bevort du Clemi insiste également sur les enjeux de l’éducation aux médias. Nous concluons enfin ce dossier autour de deux initiatives : celle du magazine Citato, une revue de presse destinée aux adolescents et celle des « P’tits déj’ info », une expérience de médiation de la presse au sein d’une petite bibliothèque. Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P1-3.qxd 23/02/07 17:42 Page 3 Rencontre avec Gipi Auteur Par Hélène Sagnet pages 4 à 6 LJ121_P4-7.qxd 23/02/07 17:44 Page 4 4 Rencontre avec… Gipi Auteur Entretien réalisé par Hélène Sagnet Traduction de Maria Franchini Révélé au public français en 2005 avec Notes pour une histoire de guerre, l’auteur italien a publié depuis cinq ouvrages traduits en France. Chacune de ses histoires a su nous étonner et nous séduire. A la fin de l’année 2006 paraît S., récit autobiographique d’une sensibilité rare et à la narration singulière. Lecture Jeune a rencontré cet artiste dont les livres mettent en scène de jeunes adultes aux prises avec la vie. Parcours et références Pourriez-vous évoquer votre formation et votre parcours artistique ? Biographie Gipi (Gian Alfonso Pacinotti) est né à Pise en 1963. Dès 1994, il publie des dessins et des nouvelles dans la revue satirique Cuore. En 2002, il débute sa collaboration avec la maison d’édition Coconino Press qui publie Extérieur nuit (recueil, 2005). Notes pour une histoire de guerre (Actes Sud BD, 2005) est sa première « histoire longue ». Cet ouvrage reçoit en 2005 le prix Goscinny et en 2006 le prix du meilleur album du Festival de la Bande dessinée d’Angoulême. Gipi poursuit sa carrière de dessinateur de presse (La Repubblica, Internazionale). Il réalise également des courts et longs métrages numériques. Son site Internet www.bacidallaprovincia.com Son blog traduit en français http://gipifrance.blogspot.com J’ai débuté en dessinant des logos publicitaires et des couvertures de livres. J’avais été un mauvais élève au lycée artistique et j’ai quitté les Beaux Arts au bout de deux semaines. Mes premières bandes dessinées ont été publiées dès 1994 dans un journal satirique, Cuore, très populaire en Italie. Puis j’ai collaboré avec la maison d’édition Coconino Press et publié mon premier livre, Extérieur nuit. Quelles sont vos références littéraires et graphiques ? Je ne saurais répondre... Les trente premières années de mon existence ont été assez désordonnées… Il y avait alors peu de place dans ma vie pour la lecture, le cinéma et la culture en général. Aujourd’hui, je lis, j’étudie. C’est comme si je voulais rattraper les années passées : cette période où j’étais persuadé que la seule vraie connaissance venait de la rue, ce qui me faisait refuser tout le reste. Quoi qu’il en soit, je n’ai pas de « guide », tout comme je n’ai jamais eu de maître ou d’instruction digne de ce nom. En fait, je ne me fie qu’à mon intuition. Quel regard portez-vous sur la bande dessinée contemporaine ? Vous sentez-vous proche de certains univers d’auteurs ? C’est une question que je ne me pose pas. J’ai certainement des affinités avec certains, mais cela ne concerne que notre façon d’aborder le travail, une sorte de rapprochement « éthique ». J’ai commencé à publier mes histoires dans une ignorance quasi absolue du monde de la BD contemporaine. David B., Igort, Sfar ou Baru ont été pour moi des découvertes récentes. J’ai probablement des points communs avec les auteurs qui ressentent le besoin de raconter des histoires inspirées de leurs expériences profondes, plus que du désir de communiquer avec un public. Même s’il doit s’instaurer, le dialogue avec le lecteur n’est pas premier. Ce qui me fait écrire c’est le besoin et la volonté de mieux comprendre la réalité. Personnages Dans vos histoires, les personnages sont souvent des jeunes hommes. L’adolescence, le passage à l’âge adulte, est un motif récurrent Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P4-7.qxd 23/02/07 17:44 Page 5 5 de votre œuvre. Quel regard portez-vous sur cette période particulière de la vie ? J’ai passé de nombreuses années dans la rue. Ce fut un temps où la seule valeur qui comptait pour moi était l’amitié. Le reste n’avait que peu d’importance. Ma chance/malchance d’avoir ainsi grandi avec une bande de voyous - ou presque -, m’a conduit à vivre des situations assez fortes, des moments parfois dramatiques. Désormais, ce souvenir s’éloigne. Ma vision du monde a beaucoup changé. Mais je garde une certaine fascination pour cette période « sans loi ». Si je donnais libre cours à ce sentiment, il pourrait presque devenir romantique. Ces jeunes sont livrés à eux-mêmes. Ils sont confrontés à la violence d’une société au sein de laquelle ils tentent de se construire. Ils sont à la recherche de modèles d’identification, et de fait la question de la transmission est très présente… Cette période que j’évoque – la rue, la bande… - est marquée par l’absence totale de figures adultes positives. Ceux auxquels nous avions à faire étaient souvent des policiers, et ils n’étaient pas dotés de grandes qualités. Nos parents étaient loin de nous, pour des raisons de travail, de culture... Ils ne nous manquaient pas. Au contraire, nous faisions tout pour nous éloigner d’eux. Je trouvais absolument normal alors que les jeunes soient livrés à euxmêmes, qu’ils vivent des expériences autodestructrices, la drogue, la violence. Devenu adulte, j’ai compris que le monde ne fonctionne pas comme cela et qu’on peut avancer et se construire sans se détruire. Dès lors j’ai éprouvé une grande tendresse pour mes amis, les plus malchanceux, ceux dont le destin m’avait semblé jusque là inéluctable. Narration Ce qui compte pour vous avant tout chose c’est de raconter une histoire. Le récit est premier. Comment naît-il ? Les histoires viennent d’un besoin majeur, enfoui et caché au plus profond de moi. Souvent je commence au hasard… Je dessine le premier tableau, sans étude ou ébauche préalable, d’un seul jet, sans savoir où je vais. Puis je m’arrête et je me demande : y a-t-il réellement en toi une motivation profonde ? Parfois, la réponse est négative et l’histoire s’arrête là. Elle s’éteint tout simplement. L’écriture est en fait un moyen de pallier mon incapacité à être présent, à être dans le réel face à un quotidien qui me fait souffrir. Je me surprends à désirer transformer en histoire chaque petit événement important de ma vie afin de le revivre dans une forme qui m’est plus compréhensible. Avec Notes pour une histoire de guerre, j’ai transposé les relations d’amitié de mon adolescence. Avec S., j’ai « revécu » la relation avec mon père. Il y a donc beaucoup de vous dans vos récits. Comment abordezvous la question de la fiction ? Chaque histoire, même la plus autobiographique, est soumise à de nombreux « filtres » : les sentiments, la mémoire… Ce qui est écrit est dans tous les cas une construction artificielle. Ce qui m’intéresse, c’est la nécessité que je ressens de raconter une histoire, pas de reproduire une réalité. C’est à cette condition de sincérité que ce qu’on transmet au lecteur est juste, et qu’il le considérera comme réel. Lecture Jeune - mars 2007 «Traîner dans la rue. Faire partie de la bande. Pendant des années, nous n'avons pas cherché autre chose. Je ne me souviens ni des parents, ni des jeux vidéo ou des programmes télé. Il y avait la rue, avec ses lois inconnues et ses figures menaçantes. Et il y avait nous, qui étions encore innocents, jusqu'à la preuve du contraire.» (Quatrième de couverture, Les innocents) LJ121_P4-7.qxd 6 23/02/07 17:44 Page 6 Rencontre avec… Bibliographie S., Vertige Graphic & Coconino Press, 2006 (Moby Duck), Ils ont retrouvé la voiture, Vertige Graphic & Coconino Press, 2006 (Ignatz), e 2 tome de la série "Baci dalla provincia" Prix de la meilleure histoire brève au festival Lucca comics 2006 Prix Max und Moritz au festival de Erlangen 2006 (Allemagne) Nomination aux Eisner Awards 2006 (US) Prix Micheluzzi du meilleur dessin au festival Napoli Comicon 2005 Notes pour une histoire de guerre, Actes Sud BD, 2005, Prix René Goscinny 2005 Prix Margouillat au festival de l’île de la Réunion 2005 Prix du meilleur album au festival d’Angoulême 2006 Le journal de la rivière in Short, Actes Sud BD, 2005 Extérieur nuit, Vertige Graphic & Coconino Press, 2005 (Offissa Pupp), Prix Micheluzzi du meilleur dessin au festival Napoli Comicon 2004 Le local, Gallimard jeunesse, 2005 (Bayou), Les innocents, Vertige Graphic & Coconino Press, 2005 (Ignatz), 1er tome de la série "Baci dalla provincia" @ Retrouvez l’intégralité de la rencontre avec Gipi sur notre site : www.lecturejeunesse.com Technique graphique Quelles techniques utilisez-vous ? Que permet le travail à l’aquarelle ? Mon premier ouvrage, Extérieur nuit, a été réalisé à partir d’une technique à l’huile, complexe et épuisante. Le résultat était très suggestif – lyrique et onirique - mais la lecture s’en trouvait alourdie. Pour Notes pour une histoire de guerre, j’ai choisi l’aquarelle. Je n’ai utilisé qu’une seule nuance de couleur, le gris de Payne. Dans S., les tons sont devenus plus chauds. Le travail sur la mémoire exigeait d’autres couleurs. Et puis il y avait l’amour, très présent. Il a défini les formes. En regardant ces dessins avec un peu de recul, je découvre mon désir de revenir à une certaine lumière, à certains tons qui soient « accueillants », y compris pour les personnages. Je ne voulais pas situer mon père dans une ambiance acide. En d’autres mots, la technique est toujours liée à l’histoire. En fait, même si je tente un travail préparatoire, dès que je commence à dessiner, la technique change, le dessin évolue et devient à chaque fois quelque chose d’imprévu. S. Dans S. on retrouve tous les thèmes et motifs que nous venons d’évoquer (souvenir, transmission, violence…). C’est un ouvrage très personnel. Pourriez-vous nous parler de ce projet d’écriture ? S. est un sujet complexe. Du point de vue technique, c’est une recherche dont j’avais envie depuis longtemps. Je voulais voir s’il était possible d’inventer une longue histoire d’un seul jet, sans structure, sans scénario, sans dialogues ou story-boards préalables. J’avais déjà tenté l’expérience, mais pour des formes très courtes. Je m’étais aperçu qu’en écrivant d’un jet, une plus grande énergie se dégageait. Mais j’étais persuadé que pour la rédaction de plusieurs pages, je ne pourrais pas conserver cette même force. Pour S. j’ai utilisé un petit agenda. J’ai numéroté les pages de 1 à 120 et écrit sur chacune des petites notes telles que « mer », « sa femme est triste », etc… Rien de plus. Puis j’ai débuté les dessins et l’écriture. Je m’étais fixé une règle « éthique » bien précise : je ne réécrirais pas ces phrases. Dans la version italienne, il y a toutes les ratures, les fautes d’orthographe. Dans la traduction, tout cela n’a pu être gardé. Il aurait été ridicule de le reproduire artificiellement. Cette règle, qui peut sembler stupide, m’a permis d’être en paix avec la mémoire de mon père. J’étais en train de m’approprier ses souvenirs et des événements de sa vie, et cela me préoccupait beaucoup. Ce que je voulais, c’était « offrir de l’imprécision » : écrire sans trop choisir les mots, avec des erreurs de rythme. Cela me semblait un sacrifice approprié. Pourtant j’ai trahi mon père, comme je l’ai fait quand il était en vie, j’ai changé d’écriture... Cela survient quand je commence à évoquer sa disparition : la narration tourne plus autour de moi-même que de lui. Quelles sont vos envies et projets à venir ? Me reposer… J’ai des propositions pour adapter mes histoires au cinéma. Je me consacrerai à ce travail si les offres se concrétisent. Et puis on verra : il n’est pas impossible que, tôt ou tard, je sois « assailli » par une nouvelle histoire, au moment où je m’y attends le moins. Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P4-7.qxd 2/03/07 15:27 Page 7 Le Dossier thématique Les adolescents et la presse écrite Presse magazine et adolescents Par Jean-François Barbier-Bouvet pages 8 à 10 « Dis-moi ce que tu lis, je te dirai qui tu es » Par Christelle Crumière pages 11 à 15 Le pari réussi de la presse quotidienne gratuite Par Marie-Christine Lipani-Vaissade pages 16 à 20 Les risques d’Internet Par Albert du Roy page 21 Les enjeux de l’éducation aux médias Par Evelyne Bevort pages 22 à 23 Citato, la revue de presse des ados Par Anne Lanchon pages 24 à 25 Les « P’tits déj’ info » Par Valérie Médiano pages 26 à 27 Expériences de promotion de la presse Par Anne Lanchon page 28 LJ121_P8-10.qxd 23/02/07 17:45 Page 8 Presse magazine Le Dossier et adolescents 8 Jean-François Barbier-Bouvet Etude Les jeunes lisent peu de presse quotidienne, mais ils sont friands de presse magazine. C’est ce que prouvent deux enquêtes nationales réalisées en 2006. Jean-François Barbier-Bouvet, sociologue, est directeur des études et de la recherche du groupe de presse Le Monde - La Vie. Il a d’abord été chercheur au ministère de la Culture puis à la BPI/Centre Pompidou, où il étudie plus particulièrement les pratiques de lecture, les publics des musées et l’usage des nouvelles technologies. Il a également été directeur des études de Bayard-Presse. Publications « La presse ça n’a pas de prix : à propos de la gratuité », Médias, mars 2005 « Internet, lecture et culture de flux », Esprit, déc. 2001 1 Selon l’enquête Conso Junior, les deux tiers des adolescents lisent des journaux au moins une fois par semaine (62% chez les 12-14 ans, 64,5 % chez les 15-18 ans), et entre les trois quart (78% chez les 12-14 ans) et les deux tiers (64% chez les 15-18 ans) ont lu au moins un livre au cours des trois derniers mois, en dehors des livres scolaires et des BD. 2 Dont Salut, qui a disparu depuis l’enquête. L’enquête Conso Junior porte sur un échantillon de 7000 enfants de 2 à 18 ans et s’intéresse aux magazines qui leur sont destinés. La deuxième enquête, réalisée pour le compte de l’AEPM (Association des éditeurs de presse magazine), porte sur un échantillon de 20 000 Français de 15 ans et plus et s’intéresse aux magazines adultes. Nous nous pencherons donc sur les plus âgés de la première (les 12-18 ans) et les plus jeunes de la seconde (les 15-18 ans). La première de ces enquêtes permet de situer la lecture de presse parmi les centres d’intérêt des adolescents. Trois informations peuvent être soulignées : - Le goût affirmé pour la lecture en général tourne autour du tiers de la génération (même si la pratique effective est bien supérieure1). Il est très en deçà du goût des adolescents pour la musique (77% des 12-14 ans, 83% des 15-18 ans), l’ordinateur (73% et 68%), le cinéma (69% et 64%) ou la télévision (63% et 53%). L’imprimé ne joue pas dans la même catégorie, mais nous le savions déjà. - En revanche, les scores moyens d’inclination pour les trois supports écrits (BD, presse et livre), sont aujourd’hui très proches les uns des autres : respectivement 39, 39 et 24% pour les 12-14 ans, 24, 32 et 29% pour les 15-18 ans. Il n’en a pas toujours été ainsi. Plus les autres supports matériels de la communication se développent (audiovisuel, informatique, Internet), plus le goût pour l’imprimé s’homogénéise. - Enfin, le goût pour la lecture baisse de manière générale avec l’âge : diminution relative pour la presse et le livre, qui baissent respectivement de 7 et 5 points entre les 12-14 ans et les 15-18 ans, perte plus conséquente pour la BD qui baisse de 15 points. Les lectures magazine des 12-14 ans Le classement des vingt titres les plus lus par les plus jeunes (voir tableau 1) fait apparaître des phénomènes intéressants. Dès cette tranche d’âge, la première place est occupée par un titre « people » : Fan 2. Beaucoup d’autres magazines de même type figurent dans le groupe de tête : six parmi les dix premiers !2. Parmi ces « people » spécialisés, l’univers musical (Fan 2) l’emporte sur celui du cinéma ou de la télé (Star Club, Star’Ac mag), ce qui est cohérent avec la hiérarchie des centres d’intérêt des jeunes. Les titres dits « éducatifs » n’occupent que deux places parmi les dix Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P8-10.qxd 23/02/07 17:45 Page 9 9 premiers (Sciences et Vie junior, J’aime lire). Okapi, Mon Quotidien et Géo Ado ne figurent qu’en 11e, 12e et 14e position. Leur prix plus élevé n’explique pas à lui seul cette situation car le plus souvent, ce sont les parents qui les achètent, contrairement aux titres distractifs. Les lectures des 12-14 ans sont un curieux mélange de projection vers l’univers des adultes (presse musicale et stars) et d’enfance prolongée : Picsou et Mickey occupent encore des places d’honneur (3e et 4e position). Enfin cette période de la vie est marquée par une grande curiosité comme en témoigne le succès de Sciences et Vie junior (2e) et dans une moindre mesure de Géo Ado (14e) et de Sciences et Vie Découvertes (15e). Les lectures magazine des 15-18 ans 1. Les titres pour adolescents Une fois de plus, la tête du classement surprend (voir tableau 2). Nous attendions un titre éducatif chez les plus jeunes, et nous avons eu Fan 2. Nous attendions un titre distractif chez les « grands » et nous découvrons Phosphore… Son tirage n’est pas plus élevé que celui des autres, mais sa circulation certainement démultipliée par sa présence dans les CDI. Les féminins ados sont ensuite nombreux. Leurs titres sont d’ailleurs tout un programme : Girls en deuxième position, dont l’intitulé anglais (ou plutôt américain) connecte symboliquement ses lectrices à un pays qui les fait rêver ; Jeune et Jolie ensuite, qui exprime par antiphrase à quel point il ne fait pas bon être vieille et moche dans notre société de l’apparence ; Vingt Ans en 9e position, dont les lectrices sont plus jeunes que ne le proclame son titre, mais se sentent valorisées par ce statut de femme accordé par anticipation. Les « people » (One, Fan 2, Séries Mag, Star Club) apparaissent bien plus bas dans le classement par rapport aux jeunes lecteurs. En réalité le relais a été partiellement pris par les titres adultes. 2. Les titres pour adultes Les magazines adultes les plus lus par les adolescents sont… les magazines de télévision ! Nous ne les avons pas fait figurer dans le tableau général (3), mais ils sont placés très haut, avec dans l’ordre Télé 2 Semaines, Plus (le magazine de Canal +), TV Magazine, Télé loisirs, Télé Z, Télé Star et Télé 7 jours (voir tableau 4 ). Leur poids est paradoxal quand on sait que les adolescents sont les rois de la télécommande, et choisissent leur programme à partir des images (zapping). En réalité, ces magazines traînent sur la table du foyer et ils les regardent plus qu’ils ne les lisent. Les lectures adultes des 15-18 ans nous réservent d’autres surprises avec pour commencer la première place de Choc, suivi immédiatement d’Entrevue (voir tableau 3). Il ne s’agit plus là de presse « people » mais de presse « trash » d’actualité, mélange de photos qui heurtent, d’indiscrétions sur les personnes, d’approximations sur les faits et bien sûr de sexe. Cette presse « trash » est la forme principalement masculine (par son public) de la presse à sensation, dont le « people » classique Lecture Jeune - mars 2007 Tableau 1 Les lectures des 12-14 ans En % Fan 2 22,5 Sciences & Vie junior 17,0 Picsou magazine 17,0 Le journal de Mickey 16,5 Star Club 15,0 Hit Machine Girls 14,5 One 14,0 Salut 13,5 J'aime lire 13,0 Kid Paddle 13,0 Okapi 12,5 Mon Quotidien 12,0 Star'ac Mag 11,5 Géo Ado 11,0 Sciences & Vie Découvertes 10,5 Julie 10,0 I love English 10,0 Playstation 2 magazine 10,0 Séries mag 9,5 Jeune et Jolie 9,5 Source Conso Junior 2006 Tableau 2 Les lectures des 15-18 ans en presse jeune En % Phosphore 14,5 Girls ! 11,5 Jeune et Jolie 11,5 Sciences & Vie Junior 10,5 One 10,5 Fan 2 9,5 Séries Mag 8,5 Sciences & Vie Découvertes 8,0 Vingt Ans 7,0 Star Club 7,0 Playstation 2 Magazine 6,5 Salut 6,5 Le Journal de Mickey 6,0 Picsou Magazine 5,5 Hit Machine Girls 5,0 Kid Paddle 4,5 Today In English 4,5 D Manga 4,0 Star'ac Mag 4,0 Geo Ado 3,5 Source Conso Junior 2006 LJ121_P8-10.qxd 10 1/03/07 14:31 Page 10 Presse magazine et adolescents Tableau 3 Les lectures de 15-18 ans en presse adulte En % Choc Entrevue Super GTI Magazine L'Équipe Magazine Onze Mondial ADDX Jeux Video magazine Voici Public PC Jeux Auto Moto Version Femina Sciences et Vie Cine Live France Football Femme actuelle Geo FHM Joystick L'Automobile magazine 35,0 31,0 17,0 14,5 13,5 13,0 12,5 11,5 11,5 11,5 11,0 10,5 10,0 9,5 9,5 9,0 8,0 8,0 7,0 7,0 Source AEPM 2006 Tableau 4 Les magazines de télévision les plus regardés par les 15-18 ans En % Télé 2 semaines 25,0 Plus, le magazine de Canal + 24,0 Tv magazine 22,5 Télé loisirs 21,5 Télé z 20,5 Canal sat magazine 19,5 Télé star 19,5 Télé 7 jours 19,0 Télé poche 13,5 Tv grandes chaînes 11,5 Tv hebdo 9,0 Télécable satellite hebdo 8,0 Télérama 5,0 Télé magazine 4,5 Source AEPM 2006 (Voici, Public) est la forme féminine. Les garçons, qui n’ont pas vraiment de titres pour eux dans la presse jeune (et lisent moins que les filles les titres généralistes), sont en effet nettement plus représentés dans la presse pour adultes : nous les retrouvons également dans les titres consacrés aux jeux vidéo (Jeux Vidéo Magazine, PC Jeux), les magazines de sport (L’Equipe magazine, Onze Mondial) et les magazines d’automobiles, plus particulièrement de tuning (Super GTI Magazine, ADDX). La place de l’automobile dans leurs lectures semble paradoxale, car ils n’ont pas encore l’âge du permis de conduire ! Les lecteurs, là encore, se projettent vers l’avenir. Les féminins adultes lus par les adolescentes sont en revanche peu nombreux dans ce classement (Version Femina, le supplément féminin du quotidien de leurs parents, et Femme Actuelle). Il est vrai que, nous l’avons vu, les filles disposent de plusieurs féminins adolescents qui leur sont explicitement dédiés. Au total, il ressort de la confrontation des tableaux 2 et 3 que la lecture des plus de 15 ans est particulièrement stratifiée par « genre ». Nous remarquerons également la percée de la version « tous publics » de magazines (Géo, Sciences et Vie) qui disposent d’une version spéciale pour les jeunes (Géo Ados, Sciences et Vie Junior), la lecture de ceux-ci préparant sans doute la lecture de ceux-là. Quant aux magazines de cinéma, qui correspondent à l’un des centres d’intérêt majeurs des adolescents, ils sont curieusement absents. Seul l’un d’entre eux figure dans les vingt premiers titres lus : Ciné Live, dont la présentation est plus originale (présence d’un DVD, maquette très « clips ») que celle de ses deux concurrents, Première et Studio. La lecture des titres cinéma plaît sans doute davantage au-delà de 18 ans, à moins que les adolescents cinéphiles préfèrent naviguer sur des sites spécialisés, pour y trouver des « making of » et des bandes-annonces. Cette seconde hypothèse n’exclut pas la première. La lecture adolescente de presse magazine n’a rien d’un désert culturel, il y aurait même pléthore. Pléthore d’offre (dont les tableaux ici présentés ne rendent que partiellement compte), mais surtout pléthore d’usages. Le nombre de lecteurs de chaque titre est en effet très supérieur au nombre d’exemplaires diffusés, dix fois plus élevé souvent. Ce qui caractérise avant tout la presse lue par les adolescents, c’est sa forte circulation : chaque exemplaire passe de mains en mains, via le CDI pour la presse éducative mais surtout entre copains pour les titres les plus lus. Les adolescents échangent et se prêtent leurs magazines, ils les commentent et les lisent à plusieurs... La presse magazine est en effet un vecteur de sociabilité majeur pour cette génération, à la différence du livre qui, s’il peut s’échanger en petit comité et faire l’objet de discussions entre amis, reste un objet qu’on s’approprie personnellement, et ne crée pas cette effervescence partagée qui est le propre de la presse magazine. La lecture adolescente de presse est le contraire d’une pratique solitaire. Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P11-15.qxd 23/02/07 17:47 Page 11 « Dis-moi ce que tu lis, Le Dossier je te dirai qui tu es » 11 Christelle Crumière Analyse Que lisent les adolescents et pourquoi ? Comment s’opèrent leurs choix, autour de quels motifs, quelles représentations ? C’est ce que nous tenterons de comprendre à travers l’analyse de quatre titres plébiscités par les 15-18 ans : Phosphore et Jeune et Jolie, titres de « presse jeune » qui concentrent respectivement 14,5% et 11,5% des lecteurs de cette tranche d’âge, mais aussi Entrevue et L’Équipe magazine, titres de « presse adulte » attirant respectivement 31% et 14,5% des lecteurs adolescents. Il y a fort à parier que ces quatre magazines touchent des publics distincts, dont les attentes, besoins et exigences diffèrent, aussi tenterons-nous de mettre en évidence les éléments qui, pour chacun d’entre eux, séduisent les jeunes lecteurs. Notre analyse portera sur trois axes principaux : - la dénomination du magazine et ses modalités énonciatives ; - le contenu éditorial ; - la mise en forme visuelle et la place de l’image. 1. Phosphore, une mise en scène de l’ascension sociale et de l’implication citoyenne - Dénomination et modalités énonciatives Dès le premier abord, le nom du mensuel est révélateur du discours pédagogue que le magazine entend proposer à son lectorat. Au sens strict, le phosphore est un élément chimique nécessaire au fonctionnement du cerveau, au sens figuré, l’expression « phosphorer » renvoie au déploiement d’une activité intellectuelle intense. Lire Phosphore, c’est s’identifier à un magazine instructif, explicitement intégré dans un cursus d’études : c’est s’inscrire dans la représentation valorisante d’une ascension sociale, d’un processus de réussite. Les modalités énonciatives (vouvoiement, dialogue) mettent en scène une appréhension gratifiante de l’adolescent représenté comme un adulte en devenir, possédant une identité, des goûts et des idées déjà bien affirmés. L’importance de l’avis des jeunes (« Les 16-25 ans interpellent les candidats »), de leurs idées et de leur vote, est largement évoquée. La réponse négative des lecteurs au sondage « Et si on votait à 16 ans ? » est contestée dans l’édito du numéro de février : « Nous ne sommes pas d’accord avec vous. À 68%, vous êtes opposés au droit de vote à 16 ans. Quand cette idée nous semble, à nous, plutôt séduisante. », affirme l’éditorialiste. Ces signes de considération ne peuvent que satisfaire des adolescents aspirant à être pris aux sérieux. - Contenu éditorial et préoccupations des jeunes Outre les rubriques ludiques ou informatives, trois types de thématiques, Lecture Jeune - mars 2007 Christelle Crumière, est chargée de cours à l’université de Cergy-Pontoise (95) en sémiologie de l’image, traitement de l’information, droit et éthique du journalisme, dans le cadre d’une initiation à l’éducation aux médias. Elle achève actuellement une thèse de doctorat en sémiologie des médias, à l’Institut Français de Presse (Paris II), sur l’élaboration narrative du 11 septembre 2001 dans les journaux français. Corpus analysé : Phosphore, décembre 2006, janvier et février 2007 Jeune et Jolie, décembre 2006, janvier et février 2007 L’Equipe magazine, n° 1280, 1281 et 1282 des 13, 20 et 27 janvier 2007 Entrevue, décembre 2006, janvier et février 2007 LJ121_P11-15.qxd 12 23/02/07 17:47 Page 12 « Dis-moi ce que tu lis, je te dirai qui tu es » proposent des réponses aux préoccupations essentielles des jeunes lecteurs : l’orientation et l’insertion professionnelle future de l’adolescent (rubriques Métiers, Études sup., Orientation) ; son implication citoyenne immédiate (portraits et témoignages de jeunes gens investis dans un parti, un syndicat, une association) ; son positionnement dans une génération, une mouvance, une tendance actuelle (rubrique Et moi). En vue de l’intégration du jeune et de sa réussite annoncées, le magazine assume une fonction d’incitation et de mobilisation (« Inscrivez-vous ! ») ; une fonction de conseil et d’information (« Pour quels métiers êtes-vous fait ? ») ; une fonction d’étayage et de sensibilisation (« Stop, j’arrête de courir après le temps »). - Mise en forme visuelle et place de l’image S’adressant à une tranche d’âge large et peu homogène (les 15-25 ans), Phosphore mise sur la multiplicité des styles picturaux et des supports iconographiques : photos, dessins, graphiques ou mini-BD ; pleines pages, encadrés, montages, juxtapositions et superpositions se répartissent l’espace visuel de façon dynamique, bousculant le regard d’une image à l’autre sans hiérarchisation apparente : au lecteur d’opérer un choix, de s’arrêter plus longuement sur une image qui l’interpelle. Les photographies représentant des jeunes gens sont davantage codifiées et esthétisées : elles insistent sur des signes distinctifs ou générationnels (piercing), mettent en scène des ressemblances, des identifications. « Avec Phosphore, il a fallu trouver une identité graphique qui voulait dire : « nous ne faisons pas partie du monde de l’enfance, mais nous ne sommes surtout pas aussi coincés que les adultes ». Pour cela, on utilise des codes photos assez raffinés, assez distanciés. Les ados [sont représentés] avec une élégance un peu codée mais qui leur permet de se projeter : une espèce de neutralité élégante où chacun se projette avec son histoire personnelle.1», explique Magnus Harling, directeur artistique chez Bayard. 2. Jeune et Jolie : promesse de socialisation et de révélation identitaire (1) « Entre création artistique et marketing, les images dans la presse destinée aux adolescents. », par Magnus HARLING, colloque « L'image dans la culture adolescente », Université de Lille 3, 20 novembre 2001 - Dénomination et modalités énonciatives D’emblée, le nom Jeune et Jolie s’impose comme élément identifiant : il délimite les contours d’une communauté de lectrices, autour de critères d’âge et d’esthétique qui fonctionnent sur un registre inclusif, intégrateur (en signalant des points communs, des qualités requises), donc aussi distinctif et discriminatoire (les « vieilles » et « laides » sont d’emblée exclues des lectrices potentielles). Lire Jeune et Jolie, c’est adhérer à l’imaginaire véhiculé par le magazine d’une stricte réciprocité de la jeunesse et la beauté (être jeune, c’est être belle ; être belle, c’est être jeune), c’est faire correspondre l’image de soi à la représentation valorisée, idéalisée, qu’il élabore de sa lectrice. S’appuyant sur le besoin adolescent d’appartenir à un groupe, les modalités énonciatives dessinent les frontières d’une identité collective, les lectrices étant désignées au pluriel, et de façon métonymique, par le nom même du magazine : les « Jeunes et Jolies ». L’intégration au groupe est favorisée par la mise en place de rubriques de témoignages (« La vie des Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P11-15.qxd 23/02/07 17:47 Page 13 13 J&J »), d’échanges et de dialogue (« Les Jeunes et Jolies répondent aux Jeunes et Jolies »), encourageant les adolescentes à communiquer entre elles. La revendication par les lectrices du diminutif J&J (« Merci d’avance à toutes les J&J pour leurs précieux conseils ! Sonia ») est révélatrice de l’appropriation des codes (familiarité, intimité, connivence) du magazine, qui s’impose comme vecteur d’une insertion sociale et d’une reconnaissance mutuelle. - Contenu éditorial et préoccupations des jeunes C’est essentiellement sur les plans de l’identification et de la socialisation que se situe le mensuel, qui prétend répondre aux doutes et interrogations intimes de l’adolescente (multiplication des tests de personnalité porteurs d’une révélation identitaire), pour favoriser son acceptation de soi, et son acceptation par ses pairs. La réponse à ces besoins est revendiquée par la rédaction à travers des fonctions de conseil (rubriques Sexy stratégie, Positive attitude, Fun attitude), d’encadrement (rubriques Psy coach, Love coach), d’étayage narcissique et de soutien fantasmatique (rubriques Psy intime, Mode, Beauté). Dans tous les domaines de sa vie, le magazine apparaît comme l’adjuvant de la jeune fille : il remplace l’adulte référent, l’aînée (la grande sœur, la mère, la confidente) dans la transmission d’un savoir-faire (maquillage, coiffure), d’une aptitude (séduction), de solutions relationnelles (affirmation/confirmation de soi). - Mise en forme visuelle et place de l’image L’identité visuelle de Jeune et Jolie est calquée sur les titres féminins destinés aux adultes, le magazine multipliant les pages « mode », les mises en scène thématisées et les pages « tendance » où les produits (vêtements, objets, accessoires) sont présentés pêle-mêle, dans un désordre savamment organisé, invitant la lectrice à tracer son propre itinéraire en fonction de ses goûts et de ses intérêts. Les jeunes filles exposées en couverture sont des anonymes susceptibles de porter l’identification de la lectrice tout en constituant des modèles accessibles. Qui plus est, les stars et célébrités présentées dans les pages du mensuel sont elles-mêmes ramenées à des modèles accessibles, les lectrices étant invitées à les contacter (encart « Où leur écrire ? »), ou incitées à les imiter (encart « Castings » répertoriant tournages, concours, auditions). 3. L’ Équipe magazine : entrer dans l’équipe - Dénomination et modalités énonciatives Ici, le nom du magazine fonctionne de façon intégrative : aucun critère discriminant ne préside à l’inclusion ou l’exclusion de la communauté des lecteurs, liés par un intérêt commun pour une ou plusieurs discipline(s) sportive(s). Lire L’Équipe, c’est symboliquement entrer dans une équipe, se définir comme membre d’un groupe, celui de tous les sportifs : licenciés, amateurs ou occasionnels. Cette appartenance symbolique est particulièrement attractive pour l’adolescent en quête d’intégration et d’identification, en demande d’une place qui est aussi l’expression d’une reconnaissance collective. Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P11-15.qxd 14 23/02/07 17:47 Page 14 « Dis-moi ce que tu lis, je te dirai qui tu es » - Contenu éditorial et préoccupations des jeunes Au-delà de son contenu informatif (résultats des matchs, commentaires, analyses), le magazine opère un déplacement des symboles et représentations de la réussite : l’ascension fulgurante des sportifs professionnels présente un modèle alternatif d’intégration et de succès, celui d’une promotion sociale indépendante d’une scolarité réussie. Pour l’adolescent, la valorisation de compétences autres que scolaires porte la mise en scène d’un succès compensatoire. À la différence des exemples classiques de réussite sociale, les sportifs professionnels constituent des modèles issus de milieux diversifiés, de minorités ou de communautés ordinairement sous-représentées ; ce sont, qui plus est, des modèles de réussite rapide, précoce : des modèles jeunes, voire très jeunes. « Balles neuves » titre le magazine, sous la photographie des jeunes espoirs du tennis mondial. « Ils sont neuf, ils ont moins de 22 ans. Ils sont la nouvelle génération. Prêts à bousculer la hiérarchie du tennis mondial », insiste le sous-titre. Aux côtés des sports traditionnels (foot, rugby, tennis), le magazine fait la part belle aux sports « à sensations » (freestyle, glisse) prisés des adolescents, qui y font figure de « génération de pionniers ». - Mise en forme visuelle et place de l’image L’identité graphique de L’Équipe magazine est extrêmement soignée. Hormis une bande dessinée, le domaine visuel est entièrement voué à la photographie. Les premières pages (« Zoom ») sont consacrées à des photographies insolites, anecdotiques, mais de grande valeur esthétique (doubles pages à bords perdus), qui favorisent une entrée progressive et valorisée dans le magazine. Les différents articles, les reportages en particulier, sont accompagnés de nombreuses photos disposées de manière ordonnée (dans des proportions quasiment équivalentes de texte et d’image), de façon à privilégier une lecture linéaire et continue du texte. Outre les photographies prises dans l’action, les nombreux portraits mettent en scène les sportifs dans des poses codifiées : les tennismen de la génération montante sont représentés collectivement comme des guerriers impassibles (menton levé en signe de défi, regard lointain, expression fière, imperturbable). Les adolescents ne peuvent qu’être sensibles à cette esthétique sophistiquée et distanciée, qui revalorise l’image sportive en l'arrachant aux clichés dont elle pâtit ordinairement (boue et sueur). 4. Entrevue : hypersexualisation et conflictualité - Dénomination et modalités énonciatives Le nom Entrevue place d’emblée le lecteur sur le terrain de la rencontre et de l’intimité, l’entrevue renvoyant à un entretien discret, voire secret, entre deux personnes. Accorder une entrevue, c’est ménager un tête-à-tête, accepter de faire entrer l’autre dans sa sphère privée. Exposition de l’intime, simulation de la connivence : le lecteur est propulsé dans un univers, qui sans le magazine, lui serait interdit. Cette « entrevue » paradoxale, car différée et médiatisée, entre des célébrités de second rang (starlettes interchangeables) et un public anonyme, fait converger pulsions Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P11-15.qxd 23/02/07 17:47 Page 15 15 exhibitionnistes et voyeuristes dans une mise en scène du scandale et du secret d’alcôve. Prétendument ciblé sur un public adulte, le magazine est entièrement construit sur les codes, contenus et ressorts propres à séduire un public adolescent. - Contenu éditorial et préoccupations des jeunes Quatre tendances sont discernables. Tout d’abord, Entrevue « brille » par son absence de contenu informatif et rédactionnel propre, la quasi totalité du matériau présenté dans le mensuel provenant en copier/coller des trois autres médias – télévision, radio, et Internet – privilégiés par les adolescents. La seconde tendance est l’hypersexualisation du contenu affichée dès la couverture, tant par la mise en scène d’images racoleuses que par la promesse de révélations sulfureuses. Cette surconcentration fantasmatique ne peut que fasciner l’adolescent au moment où se constitue sa propre identité sexuelle. La troisième tendance apparaît dans le déploiement d’un humour transgressif et régressif (impostures des Lafesse, Baffie, Muller, Sellem), correspondant aux blagues de potaches des films destinés au public adolescent (du type American Pie). Enfin, le magazine orchestre conflits et règlements de comptes avec diverses personnalités médiatiques (« Castaldi, le faux-cul du PAF »), arbitre ou envenime les rivalités (« Star Ac/Nouvelle Star : notre enquête déclenche une nouvelle guerre des chaînes »), expose les dissensions entre célébrités (rubriques « Ils ont dit/ Ils ont menti », « Téléclash »). Cette mise en scène de la conflictualité ne peut que trouver un écho favorable chez l’adolescent en conflit lui-même (avec la société, son entourage, sa propre image), trouvant dans l’opposition et le rejet un moyen d’expression presque militant. - Mise en forme visuelle et place de l’image L’identité graphique du magazine joue sur des codes immuables (texte noir sur fond jaune/texte jaune sur fond noir) qui fonctionnent comme des identifiants, et sur la pose stéréotypée de starlettes standardisées, issues des émissions de téléréalité suivies par les adolescents : Mélanie de L’île de la Tentation, Gaëlle de Koh-Lanta, Céline de la Star Academy. Il ne s’agit donc pas d’inconnues pour les jeunes lecteurs, mais de supports fantasmatiques déjà identifiés. Le visuel repose sur la juxtaposition linéaire de photographies ou de captures d’écran, associées aux dialogues correspondants, retranscrits sous l’image ou dans des bulles surajoutées, à la façon des BD et romans-photos. La faible proportion du texte par rapport à l’image et la multiplicité de rubriques courtes favorisent une lecture rapide et non chronologique du magazine, une pratique de feuilletage aléatoire ne nécessitant ni effort, ni suivi, ni concentration. Le choix d’un magazine n’est pas uniquement celui d’une représentation du monde, il est aussi révélateur de la vision qu’a de lui-même l’adolescent qui le choisit, non seulement comme source d’un contenu informatif, mais comme vecteur intégratif, pôle interprétatif, et support identificatoire. Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P16-21.qxd 23/02/07 20:08 Page 16 Le pari réussi de la Le Dossier presse quotidienne gratuite 16 Marie-Christine Lipani-Vaissade Analyse Les quotidiens gratuits ont levé tous les obstacles bloquant la lecture de la presse quotidienne par les adolescents. Cette lecture reste pourtant fragmentée et les jeunes n’hésitent pas à passer d’un support à un autre. Marie-Christine Lipani-Vaissade, commence sa carrière comme journaliste au Progrès de Lyon puis collabore à divers titres nationaux à vocation politique ou économique, entre autres l’hebdomadaire Vendredi. Parallèlement, elle exerce le métier de directrice de cabinet pour différents élus. Particulièrement sensible aux évolutions de la presse écrite et aux transformations du journalisme, elle se tourne ensuite vers la recherche universitaire. Sa thèse, intitulée : « Impact des quotidiens gratuits Métro et 20 Minutes sur la lecture de la presse quotidienne par les 17-25 ans : vers la constitution d’un public distinct et typique ? », explique comment les jeunes se sont appropriés la presse quotidienne gratuite et pointe leurs attentes en matière d’information. Ses recherches portent également sur le traitement des faits divers dans la presse écrite, les relations entre les jeunes et les médias, la complémentarité des supports journalistiques (papier et web) et le contenu des journaux dans l’ambiance numérique. Elle est aujourd’hui maître de Conférences à l’Institut de Journalisme de Bordeaux Aquitaine à l’université Michel Montaigne Bordeaux 3, où elle enseigne le droit de la presse. Les acteurs médiatiques sont quasi-unanimes sur ce point : la presse quotidienne et en particulier la presse quotidienne nationale n’a pas su et ne sait toujours pas attirer les jeunes lecteurs. Pour quelles raisons s’est-elle désintéressée de ce public spécifique ? Nous pouvons tenter quelques hypothèses. Elle ne le connaît pas assez, ne souhaite pas le développer, peut-être n’a-t-elle n’a pas les moyens financiers de se pencher sur lui... Hélas, les occasions manquées ne se rattrapent pas. La presse quotidienne nationale a laissé la place vacante à ses concurrents : Internet et la presse quotidienne gratuite, et ces derniers se sont vite emparés du marché. Le public jeune sera difficile à reconquérir. Ce qui fait qu’en France, où on lit de moins en moins de journaux, comme dans le reste du monde d’ailleurs, le fossé se creuse plus rapidement. La France est l’un des pays qui compte la plus faible diffusion de quotidiens par habitant. Pour 1000 habitants de plus de 15 ans, il se vend 719 journaux en Norvège, 668 au Japon, 536 en Suède et seulement 190 en France. Notre pays se situe à cet égard au 28e rang mondial1. Les raisons qui expliquent cette crise de la presse quotidienne sont nombreuses : vieillissement et non renouvellement du lectorat, érosion et dispersion du marché publicitaire, multiplication de la concurrence et des sources d’information, disparition des quotidiens d’opinion et populaires, diminution du nombre des points de vente, coûts de fabrication et de distribution élevés entraînant le prix de vente au numéro le plus cher d’Europe 2, moindre créativité éditoriale pour finir 3, qui a pour effet de créer un décalage entre le contenu des journaux et les attentes des lecteurs. D’autres éléments sont à prendre en compte, qui relèvent davantage de l’évolution des modes de vie : la modification des comportements et des rythmes de vie, avec plus de temps consacré aux loisirs, l’urbanisation croissante qui rallonge les temps de transport, le développement des nouvelles technologies et de nouvelles activités de loisirs... Le lectorat jeune est sans aucun doute le plus concerné par ces derniers bouleversements. De nouveaux modes de consommation des médias Etudier la lecture de presse par les adolescents renvoie à un certain nombre de présupposés. Nous vivons dans une société où l’image et la technologie sont omniprésentes. Il serait confortable « intellectuellement » d’attribuer à ce phénomène le désintérêt des jeunes pour la lecture, celle de la presse en Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P16-21.qxd 23/02/07 20:08 Page 17 17 particulier. Cette hypothèse éviterait de s’interroger d’une part sur le contenu des journaux, d’autre part sur leur mode de consommation. Mais de nombreuses études montrent que les jeunes lisent toujours : ils lisent sur Internet, achètent des magazines et des livres. Ce qu’ils boudent, c’est la presse quotidienne payante. Le phénomène n’est pas nouveau. La lecture de la presse quotidienne des 15-24 ans se détériore en effet depuis des décennies. En 1994, ils représentaient 23,7% des lecteurs de presse quotidienne nationale, en 2004, ce chiffre était descendu à 16,7% soit 7 points de moins 4. On notera que dans le même temps, la catégorie des 25-34 ans a chuté de 18%, ce qui est bien pire 5 ! La presse quotidienne nationale n’a donc pas trouvé la formule magique pour captiver le lectorat jeune. L’ erreur serait de se persuader que le « mal » vient uniquement de la télévision, d’Internet ou des quotidiens gratuits. En réalité, la faiblesse de la pénétration de la presse quotidienne chez les jeunes révèle l’inadaptation des contenus journalistiques et des systèmes de distribution aux attentes de ce lectorat et à ses nouvelles pratiques culturelles. Les jeunes sont de plus en plus mobiles et urbains, ils pratiquent la lecture occasionnelle et la lecture zapping, habitués depuis leur plus jeune âge aux télécommandes de télévision, ils multiplient les sources d’information et favorisent les plus faciles d’accès (Internet). Par ailleurs, ils ont pris l’habitude de ne pas payer certains services ou loisirs, comme en témoigne le téléchargement de musique ou de films. La gratuité est aujourd’hui devenue une valeur de notre société. Les gratuits en tête du hit-parade Interpellés par toutes ces questions, nous avons conduit une étude de terrain afin de comprendre les attentes des jeunes en matière de presse écrite, découvrir ce qu’ils lisaient et pourquoi. Nous nous sommes appuyés sur deux outils méthodologiques complémentaires : le questionnaire et l’entretien de recherche semi-directif, qui nous ont amenés à rencontrer plus de 1200 jeunes entre 17 et 25 ans 6. Nos questionnaires portaient sur la lecture de la presse quotidienne nationale, y compris celle des deux quotidiens gratuits Métro et 20 Minutes 7. Cet outil a permis entre autres de « pister » la lecture régulière de la presse quotidienne, c’est-à-dire tous les jours ou un jour sur deux. Celle-ci est vraiment très faible chez les jeunes, quels que soient leur sexe, leur âge ou leur niveau de qualification. Les filles semblent lire davantage la presse que les garçons. La plupart du temps, les quotidiens gratuits Métro et 20 Minutes sont cités en premier, avec une nette préférence pour 20 Minutes, qui s’explique sans doute par sa maquette et sa ligne éditoriale dynamiques. Après les gratuits, les titres les plus lus par les filles sont Le Parisien, Le Monde et Le Figaro, puis dans une moindre mesure Libération. Les quotidiens économiques sont cités de façon très marginale 8. Le schéma de lecture est quasi-semblable pour les Lecture Jeune - mars 2007 1 Source : Daniel Junqua, « La presse quotidienne en Europe », World Press 2001, www-clemi.org. 2 En France, le prix moyen d’un quotidien se situe entre 0,80 € et 1,20 €, en Allemagne entre 0,40 et 1 €, en Grande-Bretagne entre 0,40 et 0,60 € et en Espagne entre 0,60 et 1€. 3 Il y a eu malgré tout quelques tentatives pour créer de nouvelles formules, telles qu’Info Matin en 1994. Ce quotidien demi-format était vendu moins cher que les autres. Rappelons également que la presse magazine est en France riche et imaginative, et que si la lecture des quotidiens est en baisse constante, les Français restent de gros consommateurs de magazines. 4 Source EuroPQN 5 Source : Le Monde, du 16 mars 2004, « Les jeunes boudent de plus en plus la lecture des journaux », de Claudia Courtois 6 Ce travail a fait l’objet d’une thèse en Sciences de l’information et de la communication intitulée : « Impact des quotidiens gratuits Métro et 20 Minutes sur la lecture de la presse quotidienne par les 17-25 ans : vers la constitution d’un public distinct et typique ? », soutenue en novembre 2005 à Paris III, Sorbonne Nouvelle. Tous les jeunes rencontrés dans le cadre de cette recherche étaient encore en formation (école ou université) et habitaient l’Île-de-France. Les quotidiens gratuits n’étaient distribués que dans cette région à l’époque. 7 Nous avons diffusé notre questionnaire en deux temps : une première série entre 2002 et 2003, juste après la sortie des premiers quotidiens gratuits, auprès de 1036 jeunes, soit 412 garçons (39,8%) et 624 filles (60,2%), et une deuxième en janvier-février 2005 auprès de 223 jeunes. Les résultats ont été pratiquement identiques entre les deux séries. 8 Nous avons mis à part le quotidien L’ Équipe qui n’est pas un journal d’information générale, mais ce dernier est assez lu par les jeunes. LJ121_P16-21.qxd 18 23/02/07 20:08 Page 18 Le pari réussi de la presse quotidienne gratuite garçons, sauf que Le Figaro paraît plus apprécié que Le Monde et Le Parisien. Libération ferme encore une fois la marche. Chez les deux sexes, les quotidiens économiques sont toujours cités en derniers, France Soir et La Croix très rarement évoqués. Les résultats indiquent que les filles lisent plutôt le matin et dans les transports en commun, alors que les garçons ont tendance à lire davantage chez eux. Les deux groupes sont attirés par les sujets internationaux, mais les rubriques sports, faits divers ou sujets de société sont souvent citées. D’une manière générale, les jeunes sont peu attirés par les articles économiques et encore moins par les questions politiques. Le rejet du commentaire journalistique 9 Sur l’ensemble de nos résultats, plus de 90% des jeunes sont favorables à la presse quotidienne gratuite. 10 Une quarantaine de jeunes de 17 à 25 ans et issus de différentes écoles ont participé à ces entretiens semi-directifs, des entretiens d’environ une heure chacun, portant uniquement sur la lecture ou la non-lecture des quotidiens gratuits Métro et 20 Minutes. De nombreuses raisons freinent la lecture des quotidiens payants. Les garçons dans leur majorité évoquent le prix des quotidiens, le manque de temps et la longueur des articles jugée trop contraignante. Les filles mettent en avant la récurrence des sujets politiques et le coût. Les deux groupes enfin reprochent à la presse traditionnelle « son manque d’objectivité, sa perte de crédibilité, une écriture ennuyeuse, une information uniforme, un langage éloigné de celui de la jeunesse ». Beaucoup ont le sentiment que la presse « ment ». Certains (très nombreux) lui préfèrent Internet ou encore la télévision. La plupart des jeunes ne se sentent pas concernés par les sujets abordés par la presse. Si le manque de temps et le coût constituent des freins majeurs à la lecture de quotidiens, un autre élément apparaît donc comme essentiel : la prise de position journalistique. Autrement dit, ce ne sont pas les sujets politiques qui dérangent en tant que tels, mais les commentaires journalistiques autour de ces sujets. Les adolescents ont le sentiment que les médias leur donnent des leçons, leur imposent une façon de penser et le ressentent très mal. Notre enquête est loin d’être représentative, mais elle apporte un certain nombre d’informations sur le comportement des jeunes vis-à-vis de la presse quotidienne et porte à croire que le jeune est avant tout un lecteur occasionnel, qui ne dispose que de peu de temps à consacrer à la lecture de presse et privilégie d’autres façons de s’informer, en particulier Internet. Pour lui, la presse est onéreuse et souvent rébarbative. Il lui préfère les quotidiens gratuits 9. Il ne rejette en rien l’information : notre étude montre au contraire qu’il s’intéresse à l’actualité (du moins à certains types de sujets), mais il ne se retrouve pas dans la presse traditionnelle. Se sentir destinataire de l’information La gratuité n’explique pas à elle seule l’intérêt des adolescents pour les quotidiens gratuits : telle était notre conviction intime. Pour en avoir la preuve, nous nous sommes servis d’un deuxième outil de recherche : l’entretien semi-directif 10, plus pertinent pour approfondir les pratiques de lecture. Rappelons au passage que Métro et 20 Minutes privilégient les aspects Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P16-21.qxd 23/02/07 20:08 Page 19 19 pratiques, ludiques et visuels. L’illustration (notamment la couleur) et la photographie y jouent un rôle majeur. L’actualité est traitée d’une manière rapide et rythmée avec des articles courts, ce qui induit de nouvelles formes de lecture (zapping) et multiplie les portes d’entrée. L’offre de cette presse quotidienne gratuite est véritablement différente et attractive. La gratuité agit comme une invitation, une sollicitation, un appel. Si la forme et le contenu de ces quotidiens ne correspondaient pas aux attentes des jeunes, ces derniers ne les liraient pas. L’analyse de nos entretiens a confirmé cette tendance : la lecture de la presse quotidienne gratuite est certes une lecture de facilité, mais pas pour autant une lecture de dépit. Par lecture de facilité, nous voulons dire que ces journaux ont levé tous les obstacles bloquant la lecture de la presse quotidienne : celui du coût, du contenu rédactionnel et pour finir de la distribution. La force des gratuits réside en effet surtout dans leur mode de distribution. Ils vont au devant des lecteurs adolescents, sont distribués dans les lycées et les universités, ou sur le chemin qui les conduit au travail (métro, RER, gares). Les jeunes n’ont plus besoin de se déplacer pour les acheter ni d’y penser à l’avance. Avec Métro ou 20 Minutes, c’est le journal qui va chercher le lecteur, non l’inverse. Cependant, ce n’est pas parce que le journal « s’offre » à ses lecteurs que ce don est suivi de lecture ! La lecture reste un acte volontaire. Confortée par notre étude, nous soutenons que les jeunes choisissent de lire ces quotidiens gratuits pour différentes raisons. Nous en retiendrons trois. En premier lieu, les gratuits rendent l’information accessible en termes de visibilité et d’appropriation. La maquette est ludique et dynamique, et l’information rarement commentée. Par ailleurs, les gratuits replacent le lecteur au centre de l’énonciation discursive en abordant des thématiques qui parlent de la jeunesse comme le marché du travail pour les jeunes diplômés, la notoriété des écoles… Pour finir, leur langage est adapté au public adolescent. Il s’agit d’une écriture factuelle, avec des phrases courtes, simples. La hiérarchisation des titres et des thèmes forts quant à elle permet une vraie lisibilité. Résultat, les jeunes se sentent concernés par le contenu des gratuits, ils se sentent destinataires de l’information. Il ne suffit pas que l’information soit gratuite, encore faut-il qu’elle soit adaptée et comprise. « J’ai du mal à entrer dans un journal comme Le Monde, il faut des clés pour comprendre ». Ces propos, maintes fois recensés au cours de nos entretiens, confirment la difficulté pour les jeunes d’aborder la presse quotidienne classique. Les gratuits favorisent également un autre usage du journal en créant de nouvelles proximités. Le journal est lu dans les transports et quand les jeunes arrivent en classe, ils peuvent discuter de son contenu, le prêter ou le donner : le gratuit devient un référentiel commun. Les adolescents enfin veulent être informés en privilégiant l’essentiel et en recherchant une forme de divertissement. La lecture de presse doit rester pour eux un plaisir, non une contrainte. Ils aiment passer d’un support à un Lecture Jeune - mars 2007 Publications : « Dis à qui tu te donnes… La presse quotidienne gratuite ou le marketing du don », avec Dominique Augey, Denis Ruellan et Jean-Michel Utard, Le journalisme en invention, de Roselyne Ringoot et Jean-Michel Utard (dir.), Presses universitaires de Rennes, 2005 LJ121_P16-21.qxd 20 23/02/07 20:08 Page 20 Le pari réussi de la presse quotidienne gratuite Pour en savoir plus : Le journalisme en invention, Roselyne Ringoot et Jean-Michel Utard (dir.), Presses universitaires de Rennes, 2006 Le défi des quotidiens gratuits, Ludovic Hirtzmann et François Martin, éditions MultiMondes, Québec, 2004 La culture des individus, dissonances culturelles et distinction de soi, Bertrand Lahire, La Découverte, 2004 (Textes à l’appui) Sociologie des publics, Jean-Pierre Esquenazi, La Découverte, 2003 (Repères) « La culture des gratuits », Bernard Legendre, Le Monde, 25 octobre 2003 Les étudiants et la lecture, Emmanuel Fraisse (dir.), PUF, 1999 L’analyse de discours, Dominique Maingueneau, Hachette, 1991 autre, ne souhaitent pas lui accorder trop de temps, qu’ils préfèrent consacrer à leurs amis. Les gratuits favorisent cette souplesse d’utilisation adaptée à leurs modes de vie. Ils participent enfin à la désacralisation du journal en tant que source d’information et en tant qu’objet. Les quotidiens gratuits inciteront-ils les adolescents à lire demain davantage la presse quotidienne nationale ? Rien n’est moins sûr. En revanche, ceux qui ne lisaient rien jusque là renouent un peu grâce à eux avec la lecture d’un journal. Au cœur de l’ambiance numérique actuelle, cette lecture reste d’ailleurs une pratique fragmentée. Nous retiendrons que les jeunes lecteurs veulent être informés un peu, divertis beaucoup, impliqués énormément, et politisés... pas du tout ! Les quotidiens gratuits en France Les quotidiens gratuits ont fait leur apparition en France début 2002, avec 20 minutes et Métro. Ils ont imposé un nouveau système économique et instauré un nouveau genre journalistique. En effet, ces supports d’information sont aussi des supports de communication car ils s’inscrivent dans une démarche interactive avec leur public. Celle-ci s’appuie sur un contrat de lecture, qui repose sur les attentes supposées du lecteur. Autres caractéristiques : ces journaux ont osé la gratuité comme stratégie de développement et inventé un nouveau mode de distribution, soigneusement pensé à partir de méthodes nouvelles de chronomarketing et de géomarketing. D’autres titres gratuits se sont développés depuis, y compris des magazines. La presse quotidienne régionale elle-même a créé ses propres gratuits au sein du réseau Ville Plus. Bien que les gratuits aient suscité une certaine polémique, ils se sont installés dans le paysage médiatique français avec des qualités propres et une offre éditoriale différente. La crise que traverse la presse quotidienne nationale a commencé bien avant l’arrivée de ces quotidiens. Il serait faux d’affirmer que les gratuits ont fait perdre des lecteurs aux quotidiens payants. Ils ont surtout puisé leur lectorat dans le vivier des personnes non lectrices de la presse quotidienne, en particulier les jeunes. Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P16-21.qxd 23/02/07 20:08 Page 21 21 Le Dossier Les risques d’ Internet Albert du Roy Tribune La quasi-totalité des 15/24 ans surfent sur la toile. Ils échangent des messages (68%), recherchent des informations pratiques (65%) mais s’informent aussi sur l’actualité (55%)*. Conséquence : les jeunes ne lisent plus les journaux. Ou du moins les « journaux papier », puisque les quotidiens ont leur site sur la toile. La question est de savoir si la qualité de cette information équivaut à celle des quotidiens. Pour ma part, j’en doute pour trois raisons. 1. D’abord, les sites d’information sont nombreux. Les uns sont sérieux (ceux des journaux notamment), on connaît leur identité, leur esprit, les opinions qu’ils véhiculent. Les autres sont fantaisistes, édités par des inconnus, alimentés par des sources anonymes, et constituent un vecteur virtuel de manipulation et de propagande. Il n’est pas évident qu’un adolescent ou même un adulte puisse les distinguer. 2. Les modes de lecture sur l’écran et sur le papier sont différents. Sur le premier on survole, on picore, on zappe, sur l’autre, on s’arrête, on choisit, on plonge. Regarder et lire, ce n’est pas la même chose. Il me semble que la consultation d’un journal papier favorise davantage la concentration et la réflexion. 3. L’écran enfin ne permet pas le feuilletage. Sur la page de présentation qui mentionne quelques titres, le lecteur clique sur celui qu’il souhaite lire et les autres thèmes disparaissent. La « Une » d’un journal ne mentionne également que quelques titres, et il faut pour approfondir aller voir à l’intérieur. Mais le feuilletage crée justement des occasions de s’intéresser à d’autres sujets, auxquels on n’aurait pas spontanément prêté attention. Ce dernier point me semble essentiel. Nous vivons une époque où l’incroyable multiplication des médias audiovisuels permet à chaque individu de se créer sa bulle informative et de s’y isoler. L’un ne s’intéressera qu’au foot, l’autre à l’actualité de sa commune, un troisième à la Bourse… Internet ouvre sur le monde, mais referme sur soi-même ! Naguère, on évoquait les mass médias, nous en sommes à l’ère du « self média » ! Or, un citoyen responsable doit avoir un minimum de connaissances de tous les aspects de l’actualité qui concernent la société où il vit. De même qu’on parle de culture générale, il existe aussi une « information générale » indispensable à la conscience citoyenne. Internet apparaît ainsi avec sa double face : un immense progrès en matière de communication, mais un danger si on ne le maîtrise pas. Les jeunes en sont conscients. Fin 2006, Ipsos a réalisé une nouvelle étude pour Graines de citoyens. Elle montre que les 2/3 des 18-25 ans attendent de l’école qu’elle leur « fasse découvrir la presse écrite » et leur « apprenne à s’informer sur Internet ». Le défi Internet est d’une telle ampleur que cette mission apparaît comme essentielle. Lecture Jeune - mars 2007 Albert du Roy Journaliste politique, ancien rédacteur en chef de L’Express, du Nouvel Observateur et de la rédaction de France 2, Albert du Roy est vice-président de l’association Graines de citoyens destinée à promouvoir la presse quotidienne auprès des adolescents. Publications (entre autres) Domaine réservé, les coulisses de la diplomatie française, Le Seuil, 2000 Sur la presse : Le carnaval des hypocrites, Le Seuil, 1997 Le serment de Théophraste, Flammarion, 1992 * Enquête Ipsos réalisée en mars 2006 pour l’association Graine de citoyens auprès de 1253 jeunes internautes. LJ121_P22-23.qxd 23/02/07 19:00 Page 22 Les enjeux de Le Dossier l'éducation aux médias 22 Evelyne Bevort Point de vue Evelyne Bevort, est directrice déléguée du Clemi (Centre de liaison de l’enseignement et des moyens d’information) après avoir enseigné les sciences économiques et sociales. Elle a participé à de nombreux projets de recherches concernant l’éducation aux médias et la relation des enfants et des jeunes aux médias en France et à l’international. Experte dans ce domaine pour l’UNESCO et la Commission européenne, elle est engagée dans de nombreuses actions autour de ces thématiques : formations, publications, élaboration d’outils pédagogiques appropriés. Publications Rapports pour le Conseil de l’Europe entre 1986 et 1990 : - L’éducation aux médias à l’école primaire - L’éducation aux médias à l’école secondaire - Le partenariat entre l’école et les médias Nouvelles orientations de l’éducation aux médias, éditions de l’UNESCO, 1990 (co-auteur des actes d’un colloque organisé à Toulouse) … L’éducation aux médias peut être définie comme la possibilité de connaître, d’évaluer et d’apprécier les différents types de médias auxquels nous sommes confrontés et qui font partie intégrante de notre culture contemporaine. Les adolescents sont doublement concernés par cet apprentissage : la pratique des médias constitue l’un des piliers de leurs activités culturelles, mais ils n’en explorent qu’un faible pan par méconnaissance. L’éducation aux médias doit leur permettre à la fois de penser leurs pratiques installées et d’en découvrir de nouvelles. Les adolescents ne lisent la presse écrite que sur certains segments. Elle est pourtant indispensable à leur future vie de citoyen car les médias sont porteurs d’informations mais aussi de valeurs. C’est par la presse que l’on voit s’exprimer le pluralisme des idées et des positionnements au quotidien. Elle nous renvoie les reflets d’une société composée de personnes d’âges variés, impliquées dans la vie sociale à des niveaux différents, curieuses de sports ou de politique internationale… Les journaux dans la variété de leurs rubriques nourrissent tous ces intérêts et les font partager à ceux qui en sont éloignés. Ainsi, l’éducation aux médias se propose de faire découvrir aux jeunes d’autres questionnements, d’autres modes de pensée. La presse écrite est de tous les médias celui qui véhicule le mieux le pluralisme des idées et le flambeau de la liberté d’expression. Elle participe à l’apprentissage de la démocratie. Par ailleurs le travail sur la presse permet, au sein d’une éducation aux médias envisagée globalement, de mettre en lumière leur complémentarité. Il permet également de prendre conscience du rôle spécifique de la presse comme lieu centré sur l’analyse, la mise en perspective et l’approfondissement des sujets traités, mais aussi comme média de proximité par excellence. Le système éducatif français va connaître une remise en perspective sans équivalent avec l'entrée en vigueur du « socle commun des connaissances et des compétences ». Ce socle établit ce qui doit constituer le bagage minimum commun de tous les jeunes Français à l'issue de la classe de 3e. Au-delà des domaines plus classiques comme la langue maternelle, les sciences ou la culture humaniste sont désormais citées les compétences sociales et civiques, l'esprit d'initiative et l'autonomie. L’éducation aux médias a sa juste place au sein de ces deux domaines. On ne peut que s'en réjouir. Depuis plus de vingt ans, le Clemi (Centre de liaison de l'enseignement et des moyens d'information) s'efforce de convaincre, par l'exemple comme par la réflexion, l'ensemble des acteurs du système éducatif du bien-fondé de la démarche d'éducation aux médias et plus encore, de son caractère indispensable dans le contexte des Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P22-23.qxd 1/03/07 13:36 Page 23 23 bouleversements techniques et médiatiques de ce début de XXIe siècle. Reste à créer chez les jeunes concernés un vrai désir de découverte et d’ouverture sur cet environnement. Des activités riches de sens Le travail d'éducation aux médias pratiqué au sein de l’école repose sur cette activation du désir, lié à une meilleure connaissance de la presse écrite. Très vite, les éducateurs s'aperçoivent qu'indifférence et ignorance vont de pair. Beaucoup de jeunes ignorent tout de la presse en croyant la connaître. Il s'agit de la leur faire découvrir, pour les intégrer progressivement à leur environnement. Le premier travail consiste à leur mettre en mains des journaux, pour comprendre comment ils sont conçus et organisés, en vue d'une lisibilité optimale de l'information. Cet exercice les aide à découvrir les rubriques, l'organisation des pages, la mise en forme des articles… Pratiquée avec un large panel de titres, cette activité leur permet de saisir la diversité de la presse et sa capacité à répondre à des attentes correspondant aux différentes facettes de la société, depuis la presse d'information jusqu'à la presse féminine en passant par la presse sportive. Ces travaux se font le plus souvent dans le cadre de l'enseignement du français, de l'histoire ou de l'éducation civique, mais les nouveaux dispositifs à l'œuvre dans le secondaire (IDD, TPE, ECJS…)* ouvrent des possibilités pour un travail plus transversal. La presse écrite est un formidable réservoir d'activités qui ont du sens pour la compréhension du monde : choix et hiérarchie des informations, place de la publicité, rôle de l'image… Ces travaux permettent aussi d’appréhender le pluralisme de l'information et des titres. Cette dimension ne s'accepte vraiment qu'à l'adolescence, car il n'est pas aisé pour les plus jeunes d'imaginer que la vérité puisse être multiple. La réflexion sur le pluralisme des idées tel qu'il est proposé dans la presse est capitale pour ceux qui travaillent dans une optique d’apprentissage de la démocratie et la citoyenneté. Il s’agit là d’un axe fondamental du travail proposé par le Clemi. L'éducation aux médias doit permettre aux futurs citoyens d'acquérir le goût de l'information, d'en saisir la dimension fondamentale pour la vie démocratique, de la discuter et d'apprendre à s'informer en étant capable de déjouer certains pièges de la désinformation ou de la surinformation. C'est pour faciliter toutes ces activités que le Clemi organise depuis bientôt 18 ans « la semaine de la presse et des médias dans l'école » (voir p.28). Le succès de cette opération hors du commun joint aux nouvelles dispositions du « socle commun de connaissances » devrait faire de la presse un objet moins lointain pour les jeunes et leur permettre d'en apprécier l'importance dans leurs choix médiatiques. * Itinéraires de découverte, travaux personnels encadrés, enseignement civique, juridique et social Lecture Jeune - mars 2007 … Publications Evaluation des pratiques en éducation aux médias, leurs effets sur les enseignants et les élèves, Clemi, 1999 (co-auteur) Les jeunes et Internet, Clemi, 2001 Mediappro, appropriation des nouveaux médias par les jeunes, tirage limité en anglais pour la Commission européenne, 2006 Ces trois ouvrages sont en ligne sur le site : www.clemi.org Apprendre la télé : le JT, Dvd-Rom coproduit par l’INA, les CEMEA et le Clemi, Jeriko/CEMEA, 2003 (copilote et co-auteur) Télévision mode d’emploi, CNDP, 2003 (coordinatrice et co-auteur) La presse scolaire Le Clemi apporte aussi son concours aux jeunes producteurs d'information, parmi lesquels de nombreux adolescents à la recherche d'eux-mêmes, qui font partager leurs points de vue sur le monde et expérimentent ces formes de la communication démocratique. Cette presse scolaire et lycéenne est porteuse de contenus originaux et profonds, qui nous informent sur les préoccupations et les points de vue des jeunes. En 2006, le Clemi s’est associé à la Bibliothèque Nationale de France pour conserver ces journaux dans le cadre d’un dépôt légal. LJ121_P24-25.qxd 23/02/07 19:01 Page 24 Citato, la revue Le Dossier de presse des ados 24 Franck Tirlot Entretien Propos recueillis par Anne Lanchon Les jeunes sont-ils fâchés avec la presse écrite ? Ils la trouvent coûteuse, ardue, trop éloignée de leurs centres d’intérêt… Le magazine Citato pourrait bien les réconcilier avec elle. Créé il y a trois ans par deux journalistes, Franck Tirlot et Mehdi Lounis, ce mensuel au concept original affiche en 2006 175 000 exemplaires vendus, l’un des plus gros tirages de la presse jeunesse. Rencontre avec Franck Tirlot, directeur de la rédaction. Lecture Jeune : Comment est né Citato ? Franck Tirlot, directeur de la rédaction de Citato. Franck Tirlot : Après des études à l’IFP (Institut Français de Presse) et une brève expérience dans la communication et l’édition, Mehdi et moi avons eu envie de créer un magazine pour les adolescents d’un genre nouveau, destiné à leur faire découvrir et aimer la presse. Le concept était simple, il avait déjà été expérimenté pour les adultes avec Courrier International : une revue de presse constituée d’articles sélectionnés dans les quotidiens et les magazines. L’originalité de notre projet consistait à le distribuer gratuitement dans les établissements fréquentés par les jeunes : lycées, collèges, facs, restaurants universitaires... Puisque les adolescents ne venaient pas spontanément vers la presse, nous allions aller à leur rencontre ! L.J. : Comment ont réagi les éditeurs et les médiateurs ? F.T. : Très favorablement. Les premiers y ont vu l’occasion d’être mis en valeur et de gagner de futurs lecteurs, puisque nous citons toujours nos sources. Les fédérations de documentalistes (FABDEN et ANDEP) se sont montrées très enthousiastes, tout comme le Clemi qui nous a aidés à finaliser notre projet. Nous avons même reçu en 2003 le prix Jacques Douce d’aide à la création d’entreprise des mains de Xavier Darcos, alors ministre délégué à l’enseignement scolaire. Il ne nous restait plus qu’à tester la formule auprès des adolescents, ce que nous avons fait en décembre 2003 en envoyant le numéro 0 à 1200 documentalistes de lycées. Le succès a été immédiat, et en mars 2004, nous lancions le numéro 1. L.J. : Pourriez-vous préciser votre concept ? F.T. : Citato se compose principalement d’articles sélectionnés dans la presse française, mais aussi d’articles écrits par la rédaction. Il est bâti autour d’un dossier principal en lien avec l’actualité ou proche des intérêts des lecteurs (le commerce équitable, les banlieues, la bande dessinée…), de pages d’informations (monde, France, sport, sciences), culture (cinéma, livres, musique, jeu vidéo), mode et formation. Nous tâchons de séduire les adolescents avec des sujets qui les intéressent vraiment (leurs loisirs, leur avenir) et en profitons pour les initier à des sujets plus graves : dans Citato le Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P24-25.qxd 23/02/07 19:01 Page 25 25 débat sur la peine de mort coexiste avec Mario Bros ! Par ailleurs, chaque numéro comporte un sondage réalisé par l’institut BVA qui rend compte de l’opinion des jeunes en matière de politique, d’enseignement, de télévision… Pour finir, deux rubriques régulières reflètent notre volonté d’éducation aux médias, nous y tenons beaucoup et elles sont très appréciées : l’analyse d’une image (photo, illustration de presse, publicité) par un professeur de sémiologie, Frédéric Lambert, et le témoignage d’un professionnel de la presse : éditorialiste, photographe, maquettiste… L.J. : Comment sélectionnez-vous vos articles ? F.T. : Nous puisons nos articles dans plus de 150 supports : presse quotidienne de toutes tendances (Le Monde, Le Figaro, L’Humanité, La Croix …), newsmagazines (Le Point, Le Nouvel Observateur…), presse sportive (Onze mondial, Midi Olympique…), culturelle (Studio, Lire, Rolling Stone…), scientifique (Sciences et Avenir, Sciences et Vie…), enfin presse du monde entier avec Courrier International. Nous sélectionnons les meilleurs articles, les plus clairs, sans jamais les réécrire. En revanche, il nous arrive de les couper ou de les compléter par une mise en perspective ou un glossaire pour rendre leur lecture plus aisée. Sur certains sujets délicats, comme ce fut le cas avec le CPE, nous avons à cœur de présenter deux points de vue opposés : nos lecteurs doivent se forger leur propre opinion, à nous de leur en donner les moyens. Bien entendu, nous rémunérons tous ces articles à leur auteur ou leur éditeur : c’est le prix de notre indépendance. L.J. : Quels sont les ressources de Citato ? F.T. : 80% de nos ressources proviennent de la publicité, 20% de nos abonnements. Citato est gratuit pour ses lecteurs adolescents, mais pas pour les établissements qu’ils fréquentent (1) ! Nous comptons aujourd’hui 1600 abonnés payants : 45% dans les lycées, 40% dans l’enseignement supérieur, 15% dans les collèges. Le reste se répartit entre les bibliothèques, les centres d’orientation jeunesse, les CROUS, quelques particuliers… En général, les documentalistes les installent dans un lieu de passage. Les élèves se servent et emportent le magazine chez eux. Et si l’on en croit le courrier des lecteurs ou leurs blogs, ils le lisent vraiment, surtout dans les régions où l’accès à la presse est moins facile. Citato est un mensuel édité par la SARL Citato, dont les principaux actionnaires sont M6 Interactions, Franck Tirlot et Mehdi Lounis. Rédaction et siège social : 89, av. Charles-de-Gaulle, 92575 Neuilly-sur-Seine Cedex Tél. : 01.41.92.26.73 Fax : 01.41.92.58.06 e-mail : [email protected] site : www.citato.org Directeur de la rédaction : Franck Tirlot Rédacteur en chef : Mehdi Lounis L.J. : Citato sert-il de support aux enseignants ? F.T. : Parfois. Comme ils disposent de plusieurs exemplaires, c’est pratique pour eux. Ils analysent la composition des articles, le commentaire d’images, étudient notre page en anglais. Mais ce n’est pas la vocation première de Citato, qui a pour ambition de donner aux jeunes le goût de la presse écrite et d’en faire des lecteurs assidus et avisés, une fois devenus adultes. Pour cela, il faudrait que les éditeurs de presse fassent un réel effort d’accessibilité, aussi bien éditorial que financier. LJ : Au fait, que signifie Citato ? F.T. : C’est la question que tout le monde pose ! Citato vient du latin « opere citato », expression que l’on trouve souvent en version abrégée « op. cit. » dans les textes et qui signifie « ouvrage cité ». Elle reflète parfaitement notre concept. Lecture Jeune - mars 2007 (1) Tarifs abonnement annuel : 1 ex. : 29,38 €HT 50 ex. : 59,80 €HT 100 ex. : 69,90 €HT 150 ex. : 89,90 €HT LJ121_P26-28.qxd 23/02/07 19:04 Page 26 Les «P’tits déj’ info» 26 Une expérience Le Dossier de médiation de la presse Elsa Declerck Témoignage Propos recueillis par Valérie Médiano Depuis octobre 1999, la bibliothèque de Puget-Ville (83) propose à ses usagers des « P’tits déj’ info ». Lecteurs adultes et adolescents s’y retrouvent pour lire et commenter la presse écrite autour d’un café et de croissants. Une animation qui rencontre un vrai succès dans cette petite commune. Lecture Jeune : Qu’est-ce qui est à l’origine de ce projet ? Elsa Declerck, responsable du projet : Nous souhaitions créer un espace de convivialité et de rencontre entre l’équipe de bibliothécaires et les lecteurs d’une part, et pour les usagers d’autre part. L’actualité nous a paru un excellent fil conducteur. D’autant que la bibliothèque de Puget-Ville ne dispose pas d’un budget important et n’a pas les moyens de s’abonner à des quotidiens. Nous offrons aux 3500 habitants de la commune 10 000 documents, parmi lesquels très peu de magazines. Les « P’tits déj’info » nous donnent l’occasion de rattraper ce « manque ». Le jour de l’animation, nous achetons au numéro plusieurs quotidiens et hebdomadaires auxquels la bibliothèque n’est pas abonnée, et jouons ponctuellement notre rôle de médiation pour ces supports. LJ : Quel est le principe de cette animation ? E.D. : La formule est simple. Tous les deux mois environ, nous proposons au public de se réunir un samedi matin de 9h à 11h dans une salle d’une capacité de 80 personnes. La grande taille de la salle évite de mettre en place un système de réservation. Lorsque le temps le permet, nous accueillons même les usagers à l’extérieur, c’est très sympathique. Cette rencontre a lieu autour d’un petit déjeuner offert par la bibliothèque. Nous organisons cinq rencontres par an environ. LJ : Quels journaux achetez-vous ? E.D. : Des titres de presse quotidienne locale (Var Matin, La Marseillaise) et de presse quotidienne nationale (Le Monde, Libération, L’Equipe…), mais aussi des news (Le Nouvel Observateur, Le Point, L’Express…), des journaux satiriques (Le Canard enchaîné, Charlie Hebdo), parfois des magazines spécialisés que nous voulons tester auprès de nos lecteurs ou qu’ils nous réclament. LJ : Comment se déroulent les « P’tits déj’ info » ? E.D. : Les participants découvrent ensemble les différents journaux. Le débat s’ouvre ensuite sur les sujets d’actualité. Les discussions sont animées soit par les bibliothécaires, soit par des intervenants extérieurs lorsque le « P’tit déj’ info » comporte une thématique spécifique, ce qui arrive parfois. Nous Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P26-28.qxd 23/02/07 19:04 Page 27 27 avons ainsi consacré un samedi à Internet, et fait intervenir Philippe Dho, un créateur de sites qui anime un PointCyb. LJ : Les participants sont-ils nombreux ? E.D. : Nous avons en moyenne 20 à 30 personnes à chaque fois : des adultes et des adolescents de 13 à 19 ans. Parfois, l’animation attire un public qui ne fréquente pas la bibliothèque. Cela a été le cas autour d’Internet, où la participation des non-inscrits était majoritaire. LJ : Comment attirez-vous le public adolescent ? E.D. : La bibliothèque compte 1000 adhérents parmi lesquels 160 adolescents. Nous tâchons de les investir dans l’organisation même de l’événement en leur proposant d’installer la salle. Nous effectuons un travail intensif de promotion également. Les ados naviguent d’une animation à l’autre : quand on les invite, ils viennent toujours. Par ailleurs, nous annonçons nos « P’tits déj’ info » sur le site de la bibliothèque, par des dépliants distribués dans les commerces et des annonces dans la presse locale. LJ : Lors de ces animations, débattez-vous du contenu ou du traitement de l’actualité ? E.D. : Les discussions tournent surtout autour du contenu. La plupart du temps, les sujets s’imposent d’eux-mêmes. Les discussions ont été vives à propos du CPE ou des révoltes des banlieues. Chacun sentait le malaise social s’installer et éprouvait le besoin d’en parler, de réfléchir au « pourquoi » et au « comment ». Le contenu des journaux a servi de base de discussion. Les jeunes, curieusement, sont restés un peu en retrait sur ces questions qui les concernaient directement. Mais ils ont écouté avec attention les interventions des adultes. LJ : Les adolescents sont-ils gênés par la présence des adultes ? E.D. : Certainement. Le plus souvent, ils restent ensemble et discutent entre eux. Des liens se créent parfois selon les thèmes abordés. Ces échanges intergénérationnels restent toujours respectueux et courtois, y compris lorsque le sujet fâche. Le public adolescent de la commune est plutôt « facile ». Chaque projet varie en fonction de l’environnement socioéconomique de la structure : il aurait peut-être été différent ailleurs. LJ : Quel est le programme des prochains « P’tits déj’ info »? E.D. : Nous aborderons la peinture en avril. Nous avons prévu d’inviter un plasticien, et mettrons à la disposition des lecteurs des magazines consacrés à l’art. Nous achèterons tout de même des titres de la presse généraliste en réponse à l’attente du public. LJ : Quel bilan faites-vous de ce projet ? E.D. : Nous sommes très satisfaites. C’est une animation qui fonctionne bien, avec un petit budget et une équipe réduite : nous ne sommes que deux bibliothécaires, Nadia Viano et moi-même. Le public est fidélisé, et les débats permettent de faire le lien entre la presse et le livre. Les lecteurs échangent souvent des conseils de lecture, en rapport ou non avec les sujets d’actualité. Les « P’tits déj’ info » sont un vrai moment de partage. Lecture Jeune - mars 2007 Bibliothèque de Puget-Ville Place des droits de l’homme, 83390 Puget-Ville, tél. : 04.94.48.38.47 Contact : [email protected] Site : www.puget-ville.org LJ121_P26-28.qxd 1/03/07 13:42 Page 28 28 Trois expériences Le Dossier de promotion de la presse Anne Lanchon En savoir plus La semaine de la presse et des médias dans l’école (1) Centre de liaison de l’enseignement et des moyens d’information Enseignants et documentalistes sont invités à participer du 19 au 24 mars à la 18e semaine de la presse et des médias dans l’école. Initiée par le Clemi 1, cette semaine a pour but de faire découvrir aux élèves la diversité et le contenu de la presse française, de les inciter à la lire et de développer leur esprit critique. Tous les niveaux sont concernés, de la maternelle aux classes préparatoires. Le Clemi met à la disposition des enseignants un dossier pédagogique axé sur le thème de l’année, en l’occurrence : « Découvrir le monde avec les médias ». Les professionnels de la presse se mobilisent également : des milliers d’exemplaires sont envoyés gratuitement dans les établissements et les journalistes se déplacent pour répondre aux questions des élèves. En 2006, 1400 médias se sont associés à la semaine de la presse, qui s’est déroulée dans 13 000 établissements scolaires, représentant plus de 4 millions d'élèves. Site : www.clemi.org Les assises de la presse écrite et de la jeunesse Les assises de la presse écrite sont organisées tous les ans par l’association Graines de citoyens qui a pour objectif de promouvoir la lecture de la presse quotidienne auprès des jeunes de 15 à 25 ans. Ces assises, gratuites pour eux, ont lieu tous les ans dans une ville différente. Elles se sont déroulées à Lyon le 7 mars 2007. Lycéens et étudiants ont eu l’occasion de débattre des grands enjeux de notre société (Sommesnous bien informés sur les progrès de la science ? Faut-il rapprocher les entreprises et le système éducatif ?...) avec des personnalités telles qu’Hubert Reeves, Philippe Meirieu ou Laurence Parisot. Les débats, préparés par 14 classes pilotes avec leur enseignant ou leur documentaliste, étaient animés par des rédacteurs en chef de quotidiens. Site : www.grainesdecitoyens.net Les kiosques d’Aquitaine Depuis novembre 2006, les lycées et CFA d’Aquitaine qui le souhaitent peuvent s’abonner gratuitement à une vingtaine de journaux nationaux et régionaux. Cette opération, financée par le conseil régional, le ministère de la Culture, le ministère de l’Education nationale et les syndicats de la presse quotidienne vise à promouvoir la lecture de la presse quotidienne auprès des lycéens et des apprentis. Des kiosques sont mis à la disposition des élèves qui n’ont qu’à se servir, aucune médiation n’est prévue. Site : http://jeunes.aquitaine.fr Lecture Jeune -mars 2007 LJ121_P29-41.qxd 23/02/07 19:06 Page 29 Parcours de lecture Livres accroche Littératures Bandes Dessinées Documentaires pages 30 à 34 pages 35 à 37 pages 38 à 41 Et après Littératures Bandes Dessinées Documentaires pages 42 à 47 pages 48 à 51 pages 52 à 53 Lecteurs confirmés Littératures Bandes Dessinées Documentaires Ouvrages de référence pages 54 à 61 pages 62 à 66 pages 67 à 68 pages 69 à 70 LJ121_P29-41.qxd 23/02/07 19:06 Page 30 30 Parcours de lecture Livres accroche Littératures 1I Gilles Barraqué Ill. de Catherine Meurisse Nathan, 2006 139 p. 4,50 € 2-09-250785-0 Genre Roman illustré Humour Mots clés Langage Dictature La loi du roi Boris Parce qu’il s’ennuie, le roi Boris cherche querelle au royaume voisin. Il rédige une déclaration de guerre, mais son ministre Mettemberg lui fait remarquer qu’il a mal orthographié l’adverbe « évidemment », avec un « a » central en place du « e ». Piqué au vif et influencé par son précepteur Moutrin, le roi dirige sa colère vers un nouvel ennemi : la voyelle « e ». Il interdit à ses sujets d’employer ce « trait impur » à l’oral comme à l’écrit, sous peine de terribles sanctions. Tandis que la population se perd en synonymes et périphrases, la résistance s’organise, avec à sa tête Mettemberg, officiellement renommé Mottomborg. Moutrin, incapable de traduire ses œuvres dans la langue qu’il a initiée, prend la fuite. Boris rend enfin justice à son ministre. Une nouvelle question le hante désormais : à quoi sert le zéro ? Ce petit roman servi par des illustrations croquignolettes propose une interrogation amusante sur les rapports entre langage et liberté. Il permet au jeune lecteur de prendre conscience qu’il existe mille manières d’exprimer une même idée. Au gré d’une intrigue simple mais bien rythmée, les discours autorisés privés de « e » succèdent aux dialogues des résistants, qui suppriment les autres voyelles. Les personnages sont hauts en couleurs, du roi fantoche au ministre épris de justice, en passant par le précepteur prétentieux. Plus qu’un exercice de style, voilà une lecture plaisante, humble et pleine d’humour. ■ Cécile Burgard Autre avis : Un roman court et bien troussé, à l’humour jubilatoire, en hommage aux prouesses verbales de Georges Perec et de l’Oulipo. Pour le plus grand plaisir du lecteur éberlué, la loi du roi Boris s’étend progressivement à tous les dialogues. Et les « e » de se perdre... La contrainte du lipogramme provoque de surprenantes créations et conduit à des périphrases loufoques : ainsi un mari n’a-t-il plus de femme mais un « patron à jupon » ! La fable pointe toutefois derrière la farce. La tyrannie de Boris aboutit au règne sanguinaire de l’absurde. Ceux qui prononcent la lettre interdite perdent un doigt et dans le silence on médite l’assassinat du dictateur. L’humour noir s’avère plus inquiétant qu’il ne paraissait d’abord. Cette fantaisie décidément féroce rappelle d’autres traques sanglantes, bien réelles et proches de nous. ■ Charlotte Plat Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P29-41.qxd 23/02/07 19:06 Page 31 31 2I Ellana : Le pacte des Marchombres, T. 1 Ellana est orpheline. Après quelques années passées au sein du peuple des Petits, elle retourne chez les humains et découvre qu'elle est une Marchombre. Commence alors pour elle un apprentissage rigoureux qui va lui apporter l'harmonie et développer ses dons. Ce parcours initiatique est l'occasion pour elle de découvrir le monde dans lequel elle vit et les forces qui le régulent. Dans des chapitres courts, rythmés, Pierre Bottero poursuit l'exploration autour de Gwendalavir commencée avec La quête d’Ewilan et Les Mondes d'Ewilan (LJ n°107). Si le genre héroic fantasy est à la mode, Pierre Bottero réussit à le renouveler et à le rendre accessible aux jeunes. Ces derniers devront attendre la fin de l’année pour le tome 2. ■ Laurence Guillaume Le site de l'auteur (www.ewilan.com) aidera les curieux à comprendre la genèse d'un cycle de fantasy. ndlr Pierre Bottero Rageot, 2006 426 p. 16 € 2-7002-3270-4 Genre Roman d’aventures Roman initiatique Heroic fantasy Mots clés Orphelin 3 I Là-bas Badr, 14 ans, vit seul avec sa mère, journaliste à la télévision. Le jeune garçon, livré à lui-même, supporte de moins en moins les absences de celle-ci, notamment le soir de son anniversaire, le 11 septembre 2001. Les mois passent. Badr sombre peu à peu dans la dépression. Il sèche les cours, boit du whisky Coca en visionnant les innombrables enregistrements vidéos de sa mère. Il découvre ainsi qu’il a été adopté et qu’il a une sœur dans un pays ravagé par la guerre. Pour : Ce récit est un long cri de désespoir poussé par un adolescent rongé par l’absence et le tourment. Le lecteur, ému, devient le témoin de ce naufrage intérieur, jusqu’au malaise parfois. La construction en flashbacks en fait un roman déroutant, à l’instar du personnage principal. Mais l’écriture maîtrisée permet une lecture aisée. ■ Juliette Buzelin Contre : Ce roman bien construit et à l’écriture directe dépeint avec justesse l’isolement d’un adolescent. Mais l’image de l’adoption qu’il véhicule est choquante : une journaliste prend le risque d’adopter un enfant irakien et le délaisse ensuite totalement… Pas très crédible, ni généreux ! L’adoption d’un enfant étranger, quand on connaît les difficultés de cette démarche, n’est pas un « gadget humanitaire ». ■ Cécile Robin-Lapeyre Lecture Jeune - mars 2007 Romuald Giulivo L’école des loisirs, 2006 (Médium) 139 p. 9€ 2-211-083-96-X Genre Roman psychologique Mots clés Adoption Dépression nerveuse Relation mère/fils LJ121_P29-41.qxd 32 23/02/07 19:06 Page 32 Livres accroche 4I Philip B. Kerr Trad. de l’anglais par Pascale Jusforgues Bayard jeunesse, 2006 361 p. 15,90 € 2-7470-2046-0 Genre Roman d’aventures Fantasy Mots clés Magie Gémellité Après leur première aventure en Egypte, John et Philippa Gaunt sont à nouveau sollicités par leur oncle Nemrod. Les jumeaux doivent absolument retrouver le grimoire de Salomon, qui a été dérobé. Ce recueil d’anciens sortilèges confère des pouvoirs très puissants à celui qui le possède. S’il tombait entre de mauvaises mains, l’avenir de toute la communauté des Djinns, dont ils font partie, serait compromis ! John et Philippa embarquent à bord du Royal Express de Hongrie pour négocier avec le voleur. Mais la jeune fille est enlevée pendant le voyage ! John n’a plus qu’une idée en tête : retrouver sa sœur. Second volet de la trilogie de Philip B. Kerr, ce roman tiendra les jeunes lecteurs en haleine, grâce à de nombreux rebondissements. Londres, Berlin, mais aussi Istanbul ou encore l’Irak : le périple est long, exotique et semé d’embûches, ce qui rend l’aventure captivante. L’auteur met particulièrement l’accent sur l’amour fraternel et la douleur liée à la disparition d’un être cher : jusqu’où peut-on aller pour sauver une personne que l’on aime ? Ceux qui ont apprécié le premier tome ne seront pas déçus et attendront le prochain volume avec impatience ! ■ Maryon Wable-Ramos 5I Joshua Mowll Trad. de l’anglais par Luc Rigoureau Flammarion, 2006 304 p., 306 p. 15 € 2-08-16-3116-4 2-08-16-3117-2 Genre Roman d’aventures Mots clés Science Explorateur Les enfants de la lampe magique : Le Djinn bleu de Babylone, T.2 Les aventuriers du Cercle : Opération Zoridium, T.1 Opération Typhon, T.2 Voici les deux premières aventures de Rebecca et Douglas MacKenzie, deux adolescents dont les parents ont mystérieusement disparu lors d’une expédition en Chine. Rebecca et son jeune frère sont confiés à leur oncle, Fitzroy MacKenzie, capitaine haut en couleur de L’Expédient. Nous sommes en 1920, les jeunes gens embarquent sur ce navire scientifique en partance pour une mission inconnue, dont ils vont essayer de percer le secret. Leur curiosité les conduit dans une aventure aux nombreux rebondissements, au cours de laquelle ils découvrent l’existence du Cercle du savoir, une société secrète qui a pour but de rassembler quatre « gyrolabes » et semble avoir un lien avec la disparition de leurs parents. Ces livres sont avant tout de beaux objets : Joshua Mowll, leur auteur, est également graphiste et les a remarquablement illustrés de planches, de dessins et de photos anciennes. Ils apportent au récit une caution authentique. La narration ne manque pas d’originalité non plus. L’auteur Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P29-41.qxd 23/02/07 19:06 Page 33 Littératures se présente en effet comme l’héritier de Rebecca : elle lui aurait demandé par testament de rendre publiques ses archives concernant le Cercle du savoir. Le texte se partage donc entre le récit de Joshua et des extraits du journal intime de Rebecca. Quant à l’aventure, passionnante et mêlée de découvertes scientifiques, elle évoque les romans de Jules Verne ou certains albums de Tintin. Les jeunes lecteurs devraient adorer. ■ Juliette Buzelin 6I The Midnight Library : Du sang sur le sable, T.2 Après un premier tome plutôt décevant (Les Voix, 2006), le second volet de The Midnight Library offre une agréable surprise. Il se compose de trois nouvelles courtes et effrayantes, dont le schéma narratif est à chaque fois identique : au départ, une situation d’apparence banale et des personnages ordinaires. Un événement insolite vient perturber la tranquillité des héros, qui tentent de surmonter leur problème. Alors que nous les croyons sortis d’affaire, le dénouement laisse entendre que rien n’est résolu, bien au contraire ! Chaque histoire s’achève sur une note d’angoisse et laisse imaginer le pire, comme c’est souvent le cas avec les nouvelles fantastiques. Les récits vraiment effrayants sont rares pour les jeunes lecteurs. Ces nouvelles, de lecture facile, les initieront au genre et devraient leur plaire en distillant frissons et émotions. ■ Maryon Wable-Ramos Réseau de lecture : dans le même registre, on pourra lire l’excellent Coraline de Neil Gaiman, Albin Michel, 2003 (LJ n°108). ndlr 7I Nick Shadow Trad. de l’anglais par Alice Marchand Nathan, 2006 189 p. 10,50 € 2-09-251242-0 Genre Fantastique Mots clés Peur Paranormal Roméo et Juliette Malgré une maquette rose qui semble le destiner aux filles, cet album constitue une première entrée réussie dans l’univers shakespearien, pour les jeunes lecteurs qui dépasseront la découpe en coeur de la couverture. Michel Piquemal adapte la tragédie de Roméo et Juliette sous la forme d’un court récit, fidèle et imprégné d’échos aux vers de Shakespeare. C’est un juste retour aux sources de la pièce, principalement inspirée d’une nouvelle italienne. Celle-ci est présentée à la fin de l’album dans une intéressante notice historique. Sous le pinceau de Nathalie Novi, les couleurs chatoyantes des premières illustrations laissent place aux tons froids de la nuit, prémices de mort. L’ouvrage, peint à l’huile, rappelle l’Italie de la Renaissance à travers de nombreuses réminiscences picturales et architecturales. Il nous ramène aussi vers la scène élisabéthaine, grâce à la belle théâtralité des images qui évoquent un spectacle : un décor en perspective campe une Lecture Jeune - mars 2007 William Shakespeare Adapt. de Michel Piquemal Ill. de Nathalie Novi Albin Michel, 2006 48 p. 10,90 € 2-226-15917-7 Genre Album Mots clés Théâtre Amour Mort 33 LJ121_P29-41.qxd 34 23/02/07 19:06 Page 34 Livres accroche place italienne, deux amants sont symboliquement séparés par un rideau cramoisi. Notre regard, tel celui d’un spectateur assis au balcon, plonge à la fin de la représentation sur deux silhouettes inanimées, étendues sur le fond rouge sang de la scène. Un bel album. ■ Charlotte Plat 8I Anne Vantal Actes Sud Junior, 2006 (ado) 125 p. 8€ 2-7427-6352-X Genre Roman initiatique Mots clés Adoption Voyage Algérie Un été outremer Il n’y a jamais eu de secret pour Félicien : lui et sa sœur cadette ont été adoptés par un couple d’enseignants. A 18 ans pourtant, lorsqu’il consulte à la DDASS le dossier de ses origines, Félicien a un choc : il est né à Alger d’une mère algérienne. Déstabilisé, le jeune homme rate son bac et décide de partir à la recherche de sa mère biologique. Ecrit comme un journal intime à la première personne, ce roman dépeint un personnage en pleine confusion des sentiments. L’adolescent veut connaître la vérité et pour cela, il est prêt à affronter toutes les difficultés et à rompre avec sa famille adoptive. Son départ n’est pas une fugue, il n’éprouve aucun ressentiment, seulement le besoin de « faire le vide » pour s’imprégner de son nouveau pays et découvrir ses racines. Le style simple et fluide de ce roman offre une lecture facile : le lecteur découvre l’Algérie avec Félicien et apprécie ses nouveaux amis. Il évolue et mûrit avec l’adolescent, ses sens s’éveillent au même rythme que lui, jusqu’au dénouement final qui réserve une surprise et une désillusion. Félicien est devenu adulte. Un bel hommage à Albert Camus conclut le récit et le résume : « Ce n’est pas si facile de devenir ce qu’on est ». ■ Cécile Robin-Lapeyre Autre avis : A 18 ans, Félicien peut enfin accéder à son dossier d’adoption et découvre qu’il est arabe. Bouleversé, il rate son bac et embarque pour Alger à la recherche de sa « véritable » identité, avec comme seuls indices le nom de sa mère biologique et celui du plus grand hôpital d’Alger. La découverte de cette ville exubérante incarne la confusion de ses sentiments. Félicien s’y fraye un chemin et y trouve ses repères. Chaque rencontre le rapproche de la vérité et de lui-même. Le récit démarre par un échec scolaire et une interrogation identitaire et s’achève sur une réussite personnelle : à la fin du roman, Félicien se sent libre et adulte. Bien construit, utilisant au besoin un langage familier, ce roman est facile d’accès. La thématique de l’adoption pose en filigrane la délicate question de l’identité culturelle. Elle se résout par la démarche simple et spontanée avec laquelle le héros appréhende le monde. ■ Olivia de Villeneuve Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P29-41.qxd 23/02/07 19:06 Page 35 35 Parcours de lecture Livres accroche BD 9I H2 : T.1, T.2 Hiro a choisi d'intégrer un lycée sans club de base-ball alors qu'il est considéré comme un grand espoir dans cette discipline. En effet, un médecin lui a diagnostiqué une blessure au coude l'empêchant de tenir son poste de lanceur. Par dépit, il s'inscrit dans le club de football sans y briller, réalise qu'il peut lancer la balle à nouveau et rejoint l'autre camp. H2 est considéré par les fans de Mitsuru Adachi comme la meilleure série de son auteur. On y retrouve avec plaisir tous les ingrédients qui font le succès de ses mangas. Il réunit en particulier très habilement la vie sentimentale des adolescents et le sport. Plus qu’un simple arrière-plan, le sport sert de terrain d’expression aux jeunes Japonais. Le mangaka s’intéresse pour la seconde fois au base-ball, c'était déjà le cas dans Touch, son autre grand succès. L'humour est omniprésent dans cette comédie sportive qui ravira les garçons comme les filles. Cette nouvelle série démarre sous les meilleurs hospices. ■ Sébastien Féranec 10 I Mitsuru Adachi Tonkam, 2006 188 p., 184 p. 5,95 € 2-84580-875-5 2-84580-876-3 Genre Shonen manga Mots clés Adolescence Base-ball Jérôme K. Jérôme Bloche : Un chien dans un jeu de quilles, T.19 Le réveil de notre détective privé favori est quelque peu renversant ce matin : une très jeune femme, le visage couvert d’ecchymoses, lui propose 15 000 euros pour tuer un homme ! Réputation oblige, Jérôme la flanque à la porte. Quelques réflexions et un repas réparateur plus tard, il se lance à la recherche de l’inconnue. De poursuites en cascades, parviendra-t-il à démasquer le véritable ennemi ? C’est ce que nous apprendrons en lisant le second volume de l’enquête, ici incomplète. Personnage phare d’une sympathique série que nous suivons avec délices (Le cœur à droite, LJ n°80 et La comtesse, LJ n° 99), Jérôme a su évoluer sous le trait de son dessinateur Dodier. N’a-t-il pas depuis quelques épisodes franchi le pas en se mettant en ménage avec la jolie Babette, qui le secoue à bon escient ? Héros lunaire, rêveur, « enfourcheur » de solex, Jérôme séduit et attendrit dans le paysage de la BD aux personnages masculins si souvent caricaturaux. Lui est à la fois intemporel et contemporain. ■ Michelle Charbonnier Lecture Jeune - mars 2007 Alain Dodier Dupuis, 2006 (Repérages) 48 p. 9,80 € 2-8001-3837-8 Genre Policier Mots clés Paris Maltraitance LJ121_P29-41.qxd 36 23/02/07 19:06 Page 36 Livres Livresaccroche accroche 11 I Jean-Louis Fonteneau Ill. de J. Etienne Les Humanoïdes associés, 2006 48 p. 12,90 € 2-7316-1757-8 Genre Aventure L’histoire se déroule au pays de la célèbre « schlingotte », une crème de fromage aux herbes de montagne. Notre héros, Brüssli, né d’un œuf, a été recueilli et élevé par deux villageois. Malgré ce que lui disent ses parents, Brüssli sent bien qu’il n’est pas un petit garçon ordinaire et décide de partir à la recherche de ses origines. Parallèlement un complot se trame dans le village et le bruit court que les loups sont de retour. Même si l’on peut noter quelques longueurs, l’intensité dramatique monte progressivement et l’humour laisse vite place à la peur. Le dessin est séduisant, dans la veine de Gargouilles, du même illustrateur. Il évoque les dessins animés de Disney, surtout quand surgit un lapin rose qui parle ! Le travail sur les couleurs est tout à fait réussi. Si l’illustration peut paraître enfantine, le scénario plaira aux collégiens. ■ Juliette Buzelin 12 I Nicolas Jarry Ill. d’Achile Soleil, 2006 (Soleil Celtic) 48 p. 12,90 € 2-84946-568-2 Genre Enquête Fantasy Mots clés Orphelin Delcourt, 2006 32 p. 8,90 € 2-7560-0363-8 Les chemins d’Avalon : Trafic de fées, T.1 Solenn et son frère Colin ont fui l’orphelinat et se sont réfugiés dans une maison abandonnée du port de Glennfinnan, sur la côte anglaise. Colin, qui s’est proposé pour décharger un navire, découvre un trafic de petites fées transportées dans des caisses. Par ailleurs, un inspecteur alcoolique enquête sur le meurtre de plusieurs hommes, dont les yeux ont été crevés et remplacés par des pierres d’obsidienne. Trolls, Pucks et autres monstres se mêlent à l’histoire. Pourquoi ce trafic et ces meurtres ? Le lecteur, pris aux tripes par cet univers glacé et inquiétant, attend la suite en frissonnant. Le scénario, bien rythmé, est enrichi par un dessin vif et expressif. L’influence des mangas et du cinéma est perceptible dans la composition des cases, les grands yeux des personnages, les onomatopées monstrueuses, la variété des plans. Froides et lustrées, les couleurs accentuent l’angoisse du lecteur. Du bel ouvrage. ■ Agnès Donon 13 I Rascal Ill. de Thierry Murat Brüssli le conquérant Ysoline : Comme un poisson dans l’eau !, T.1 Ysoline, une jeune adolescente, partage sa vie entre les domiciles de ses parents divorcés. Elle a appris à ouvrir le parapluie qu’exhibe la première de couverture pour se mettre à l’abri et défendre son territoire. Sa langue bien pendue en témoigne ! Ysoline s’accommode de sa famille éclatée mais revendique de devenir adulte. Le texte minimaliste met en scène un personnage « candide » qui évoque celui d’Agrippine de Brétécher. On est Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P29-41.qxd 23/02/07 19:06 Page 37 BD loin du stéréotype de l’adolescente. Chaque aventure, une par page, construit peu à peu son portrait. Les bulles s’entassent à la verticale en un dialogue serré ou étalent au contraire à l’horizontale les plages de silence. Aucun narrateur n’intervient pour donner son point de vue, mais l’image est parlante et le trait celui d’un caricaturiste. La tête, disproportionnée, fait toujours face au lecteur et le jeu des regards révèle les non-dits du texte. Le style possède les qualités d’une langue prise sur le vif mais aussi littéraire. Les jeunes lecteurs se reconnaîtront aisément dans ce portrait. Ils adhéreront à ce personnage sympathique et souriront devant l’infantilisme d’une société qui demande aux adolescents de prendre en charge les désirs et les erreurs des adultes. ■ Nicole Wells 14 I Mots clés Divorce Adolescence Hato, toujours plus haut !, T.1 Hato, toujours plus haut ! raconte le destin de deux jumeaux dans un Japon de légendes. On retrouve avec plaisir le style naïf du maître du manga dans cette œuvre singulière et peu connue. Elle surprendra les amateurs de mangas, puisque Tezuka s’attaque ici au « roman graphique », ce bien avant Will Eisner. L’auteur y mêle avec habileté textes illustrés et bande dessinée. La narration des légendes japonaises, l’humour, le suspense, la mythologie animiste et surtout la fantaisie raviront tous les publics. Malgré une lecture dense, les plus jeunes lecteurs apprécieront cette œuvre que l’auteur décrivait comme « son enfant préféré ». Un ouvrage qui prouve une fois de plus le talent de raconteur d’histoires d’Osamu Tezuka, son profond humanisme et son dédain des ambitions. Un manga à découvrir et un auteur à redécouvrir ! ■ Sonia Seddiki 15 I 37 Osamu Tezuka Trad. du japonais par P. Honnoré et Y. Maeda Cornélius, 2006 (Paul) 14 € 2-915492-17-4 Genre Manga Roman graphique Mots clés Japon Mythologie Wizz et Buzz, T.1 Voilà deux crétins comme l’édition jeunesse n’a guère l’habitude de nous en offrir. Avec leur look tout droit sorti d’une BD underground, Wizz et Buzz n’ont a priori rien pour plaire. Duo inséparable, tour à tour amis et ennemis, ils sont pour nous comme de vieilles connaissances, dont les blagues minables nous font honte, mais que l’on retrouve avec plaisir, ne serait-ce que parce qu’ils sont les premières victimes de leurs douteuses plaisanteries. Piliers de la revue Ferraille, Winshluss et Cizo font leur entrée chez Delcourt, dans la collection « Shampooing » dirigée par Trondheim. Sous l’apparente simplicité du récit ils font preuve, si l’on ose dire, d’un mauvais goût très sûr, macabre et légèrement scatophile, empruntant à l’univers burlesque des cartoons ou parodiant différents genres populaires, y compris le communiqué du ministère de l’Éducation ! Chaque histoire, particulièrement soignée, possède une tonalité et un traitement propres. Une BD qui ne prend pas ses lecteurs pour des imbéciles. ■ Éric Peltier Lecture Jeune - mars 2007 Winshluss Ill. de Cizo Delcourt, 2006 (Shampooing) 32 p. 8,90 € 2-84789-931-6 Genre Humour LJ121_P29-41.qxd 23/02/07 19:06 Page 38 38 Parcours de lecture Livres accroche Documentaires 16 I Sylvain Allemand Autrement, 2006 (Monde d’aujourd’hui) 95 p. 15 € 2-7467-0841-8 Mots clés Développement durable Mondialisation Environnement Contrairement à la « décroissance économique » prônée par certains mouvements, le développement durable vise à concilier la production de richesses avec la réduction des inégalités et le respect de l’environnement. La réussite dépend de la mobilisation de chacun à son niveau de responsabilité, depuis l’Etat jusqu’au simple citoyen, des décisions politiques jusqu’aux gestes de la vie quotidienne. Après avoir exposé les tares de notre mode actuel de développement (inégalités persistantes, urbanisation galopante, atteintes à l’environnement…), l’auteur montre pourquoi il faut agir sans plus tarder. D’une présentation soignée, abondamment illustré, cet ouvrage expose avec clarté les grands enjeux du développement durable. ■ Jean Ratier Nouvelle collection : « Monde d’aujourd’hui » est une nouvelle collection de l’éditeur Autrement qui s’adresse aux collégiens, aux lycéens et à leurs parents. Visuelle et concrète, elle les incite à agir sur le monde qui les entoure. Autres titres parus : L’entreprise, Les ONG. ndlr 17 I Anne Blanchard Ill. d’Emmanuel Cerisier Bayard jeunesse Institut du monde arabe 68 p. 14,90 € 2-7470-2007-X Mots clés Sciences Islam Le développement durable Le grand livre des sciences et inventions arabes La première moitié de ce livre est consacrée à l’histoire de l’empire musulman, du VIIIe au XVe siècle. Chef de tribu, Mohamed cherche à répandre la parole divine après avoir reçu la « révélation ». Devenu chef politique et militaire, il impose sa religion, l’islam, et sa langue, l’arabe, dans les pays conquis qui constituent un immense empire. Des villes naissent, le savoir et la culture se développent. Soutenus par des califes éclairés soucieux de faire rayonner leur puissance, des savants musulmans traduisent en arabe des manuscrits grecs scientifiques et philosophiques, qui sortent ainsi de l’oubli. La deuxième partie de l’ouvrage raconte l’épopée de cinq savants originaires de cinq villes. A Bagdad au IXe siècle, le mathématicien AlKhwarizmi impose le chiffre zéro qu’il a découvert sous la forme d’un point dans un livre indien. Un siècle plus tard au Caire, le scientifique Al-Hazen étudie la réfraction de la lumière. Au XIe siècle, c’est à Ispahan qu’Avicenne achève son grand livre de médecine. Cent ans plus tard, le géographe et explorateur Al-Idrisi dessine à Palerme la première carte du monde. A Damas au XIVe siècle, l’astronome Ibn al-Shatir mesure le temps grâce aux étoiles. Impressionnant, ce que la culture arabe a légué aux sciences ! Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P29-41.qxd 23/02/07 19:06 Page 39 39 Ce documentaire, facile à lire et joliment illustré devrait séduire les plus jeunes. Un glossaire, une chronologie synoptique et une carte de l’empire musulman au Xe siècle complètent la lecture. ■ Brigitte de Bergh 18 I L’art à travers les âges Ce nouveau documentaire sur l’histoire de l’art, abordable dès les premières années de collège, retrace avec un synthétisme réussi un parcours qui débute avec les peintures rupestres et se clôt en suspens sur les formes naissantes de l’art contemporain. Attrayant sans intimider grâce à son petit format, son papier glacé et ses couleurs vives, il multiplie les pistes de lecture et favorise une utilisation sélective. De nombreuses illustrations et iconographies éclairent le texte et rendent la lecture agréable. Les frises chronologiques sur les rabats de couverture permettent de visualiser les grands courants artistiques et l’évolution de l’art figuratif. Pédagogue, l’auteur propose des jeux et des activités pour tester et mettre en pratique ses connaissances. Un ouvrage astucieux qui donnera envie aux plus curieux d’approfondir le sujet. ■ Elise Hoël 19 I Sonia Chaine Flammarion, 2006 (Castor Doc) 127 p. 8,50 € 2-08162777-9 Mots clés Art Histoire Les explorateurs racontés par les peintres Des peintres célèbres, et d’autres moins, font ici mémoire des découvertes qui, au fil des siècles, ont ouvert notre horizon terrestre, maritime et spatial. D’Alexandre le Grand à Neil Armstrong, l’auteur nous invite à emboîter le pas de vingt explorateurs aux objectifs divers. Il consacre à chacun d’entre eux deux doubles-pages : la première relate le contexte historique de l’expédition, la personnalité de son responsable et offre en regard un détail du tableau choisi. La seconde apprend à décrypter l’ensemble du tableau : sa composition, sa dynamique, la valeur des lignes de fuite, de la lumière… et à dénicher les petits détails qui complètent les non-dits. La visite de cette galerie d’explorateurs est très variée : un colonisateur assoiffé d’or (Francisco Pizarro), un missionnaire pacifiste (Jonathan Livingstone), un savant (Humboldt), un corsaire (Francis Drake) sans oublier la Croisière noire, aventure publicitaire organisée par André Citroën ! Les textes sont intéressants, bien écrits et invitent à plonger dans des biographies plus fournies. ■ Brigitte de Bergh Lecture Jeune - mars 2007 Séverine Charon Bayard jeunesse, 2006 86 p. 19,90 € 2-7470-2049-5 Mots clés Art Explorateur LJ121_P29-41.qxd 40 23/02/07 19:06 Page 40 Livres accroche 20 I Jean-Yves Dana Bayard jeunesse Le Mémorial de Caen, 2006 (J’ai vécu) 96 p. 9,90 € 2-7470-1914-4 Genre Témoignage Mots clés Guerre d’Espagne Pour ce huitième volume de la collection « J’ai vécu », le journaliste JeanYves Dana a recueilli les témoignages d’une républicaine, d’un combattant franquiste et d’un membre des Brigades internationales. Mercedes, Rafael et Antoine avaient respectivement 12, 18 et 21 ans lorsque la guerre civile éclata en 1936. Ils évoquent ici leur enfance, exposent les motifs de leur engagement, racontent « leur » conflit, l’aprèsguerre. Tous étaient persuadés d’agir pour le bien de l’Espagne, que ce soit pour défendre la République, garante des libertés et du progrès, ou les valeurs traditionnelles contre les excès du Front populaire. Aucun d’entre eux ne regrette son engagement d’alors. Serions-nous prêts, comme eux, à nous battre pour défendre notre idéal ? Le dossier présenté en deuxième partie montre comment les tensions, exacerbées par l’arrivée au pouvoir du Front populaire, rendaient le conflit inévitable. Il aura provoqué la mort de 600 000 personnes, sans compter les victimes de la répression qui a suivi. Voilà un ouvrage très intéressant, facile à lire, à la maquette agréable. Il est complété par une chronologie et un index. ■ Jean Ratier 21 I Laure Mistral Ill. de Sophie Duffet De La Martinière jeunesse, 2006 (Enfants d’ailleurs) 47 p. 12 € 2-7324-3460-4 Mots clés Israël-Palestine J’ai vécu la guerre d’Espagne Rachel vit à Jérusalem, Nasser à Bethléem Ce livre fait partie de la récente collection des éditions De La Martinière jeunesse « Enfants d’ailleurs » qui a pour but de « faire connaître aux enfants d’ici la vie quotidienne des enfants d’ailleurs » à travers le portrait de plusieurs adolescents : ici Rachel, une jeune fille juive qui habite à Jérusalem et Nasser, un jeune Palestinien qui vit dans un camp de réfugiés en Cisjordanie. Leurs « témoignages » sont précédés d’une fiche signalétique sur chaque peuple et d’un rappel historique. Dans ce volume, compte tenu du sujet, la situation politique prend rapidement le dessus sur la vie quotidienne. Cet ouvrage a le mérite d’exposer de façon claire et impartiale une situation complexe. Le choix des photos est intéressant, les cartes claires, dommage que les illustrations viennent gâcher l’ensemble ! ■ Juliette Buzelin Nouvelle collection : neuf titres sont parus dans la collection « Enfants d’ailleurs », qui s’adresse aux plus jeunes. Les plus récents sont Sultana, Leïla et Everett vivent aux Etats-Unis, de Michèle Anouilh et Darya, Reza et Kouros vivent en Iran, d’Armand Erchady. ndlr Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P29-41.qxd 23/02/07 19:06 Page 41 Documentaires 41 22 I 100% technologique Ces objets qui nous changent la vie Bon nombre d’objets familiers font appel à des techniques nouvelles et, à moins d’être des spécialistes, nous ignorons leur fonctionnement. Le présent ouvrage se propose de nous l’expliquer aussi simplement que possible, depuis le lecteur MP3 jusqu’au Doppler, en passant par l’avion à décollage vertical. Communication, sports et loisirs, à la maison, transports, travail, santé : chaque domaine est introduit par un bref historique et s’achève sur une conclusion qui trace les perspectives d’avenir et souligne, le cas échéant, les risques à éviter. La fin de l’ouvrage, polyvalente, propose une chronologie, de brèves notices biographiques d’inventeurs ainsi qu’un glossaire et un index. L’ensemble est intéressant, la présentation soignée et le texte évite les développements techniques ardus. L’illustration est abondante, attractive et plutôt claire. Le choix des 90 objets présentés est forcément arbitraire. On s’étonnera tout de même de trouver les allumettes et la machine à laver le linge, qui n’ont rien à voir avec les techniques modernes ! La traduction quant à elle laisse franchement à désirer. Pourquoi le traducteur écrit-il « connection » au lieu de connexion et parle-t-il de « hardware » et de « software » au lieu de matériel et logiciel ? ■ Jean Ratier Lecture Jeune - mars 2007 Chris Woodford Luke Collins Clint Witchalls Ben Morgan James Flint Trad. de l’anglais par Bruno Porlier Gallimard jeunesse, 2006 256 p. 24,50 € 2-07-057289-7 Mots clés Science Technologie LJ121_P42-53.qxd 1/03/07 13:43 Page 42 42 Parcours de lecture Et après Littératures 23 I Franck Beddor Trad. de l’anglais (Etats-Unis) par Sidonie Van den Dries Bayard jeunesse, 2006 353 p. 15,90 € 2-7470-1799-0 Genre Roman initiatique Mots clés Liberté Amitié Alyss est la jeune princesse du Pays des Merveilles. Durant la fête donnée en l'honneur de ses sept ans, sa tante Redd, exilée, revient prendre le pouvoir. Elle assassine les parents d'Alyss qui doit s'enfuir dans le monde réel. La jeune fille est adoptée par la famille Liddle à Oxford. Pendant treize ans, elle tente d'oublier son royaume où la résistance s'est organisée autour de Dodge, son ami d'enfance. Ce roman d'initiation nous plonge dans un univers manichéen où s'opposent magie blanche et magie noire. Les personnages, très nombreux, doivent choisir leur camp entre Alyss et sa tante Redd. Ils sont parfaitement décrits avec une mention spéciale pour le Chat, homme de main de Redd et le Chapelier, garde du corps d'Alyss. L'élément le plus intéressant est bien évidemment d'avoir utilisé Alice au Pays des Merveilles et son auteur comme sources d’inspiration du scénario. Cela attisera sans doute la curiosité des adolescents, et suscitera chez eux l’envie de le comparer avec l’original de Lewis Carroll, alias Charles Dogson, en attendant la suite de cette série. ■ Sébastien Féranec 24 I Pierre Bottero Rageot, 2006 307 p. 15 € 2-7022-3119-8 Genre Roman d'aventures Mots clés Adolescence Différence Amitié Les guerres du miroir : Alice en exil, T.1 L’autre : Le souffle de la hyène, T.1 Natan, un jeune Français qui vit à Montréal, possède des qualités physiques et intellectuelles exceptionnelles. Un soir, il échappe miraculeusement à une bombe qui ravage sa maison et tue ses parents, et reçoit sur son portable un message préenregistré de son père lui indiquant de rejoindre sa famille à Marseille. Là-bas, il rencontre une jeune fille, Shae, qui tente de contenir le « monstre » en elle. Les deux adolescents se découvrent de nombreux points communs. Cette nouvelle série de Pierre Bottero commence vraiment fort. L'univers est très riche : les deux adolescents appartiennent à sept familles apparues à l'époque sumérienne (4500 av. Jésus-Christ) et aux pouvoirs incroyables (transformation, guérison...). Le récit, truffé de rebondissements, se lit aisément et laisse présager une belle relation amoureuse. Une réussite dont on attend la suite avec impatience. ■ Sébastien Féranec Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P42-53.qxd 23/02/07 19:08 Page 43 43 25 I Le garçon en pyjama rayé Bruno, 9 ans, ne veut pas quitter Berlin, sa maison à cinq étages, ses trois amis et ses grands-parents. Mais la famille doit déménager à cause du travail de Père. Le garçon découvre alors une campagne sans animaux et sans potager, avec des baraquements partout, de hauts murs surmontés de fils barbelés et tous ces gens de l’autre côté, si tristes dans leurs pyjamas rayés. Décidément, « Hoche-Vite » est un endroit affreux pour un petit garçon. Si le lecteur comprend assez vite quel métier exerce le père de Bruno, l’enfant narrateur conserve jusqu’au bout de ce magnifique roman son regard candide. Quand il approche de la vérité, ses questions restent sans réponse : « Et qui avait décrété que les uns porteraient un pyjama rayé et les autres un uniforme ? ». Shmuel, de l’autre côté de la barrière, n’a pas plus de réponses que lui. Les deux innocents deviennent amis, tout simplement, et comparent les brassards de leurs pères : une croix gammée pour l’un, une étoile jaune pour l’autre. Ce roman intelligent, d’une grande simplicité narrative et pourtant très efficace culmine avec une fin bouleversante, loin de tout pathos. Un roman sur les camps comme on en a rarement lu, où le point de vue d’un enfant dénonce l’injustice de façon originale et efficace. ■ Sandrine Brugot-Maillard Autre avis : Bruno, jeune héros de l’histoire, ne cerne pas du haut de ses jeunes années les enjeux de son époque. Une famille aisée, un père que l’on sait être un haut dignitaire nazi, une mère nostalgique et une sœur improbable. L’élément perturbateur surgit comme dans la trame d’un conte. Bruno se rend compte que sa maison jouxte un lieu dans lequel sont enfermés des adultes et des enfants. Son seul objectif est de rentrer en contact et de jouer avec l’un d’entre eux au péril de sa vie. Ce texte très fort, qui se présente clairement comme une fable, suscite bien des commentaires. Pour ma part je le reçois comme un récit à la tonalité juste, et je fais abstraction de mes connaissances historiques d’adulte. Bouleversant et digne, cet enfant jusqu’au-boutiste nous redit l’absurdité et l’horreur par le biais de sa « candeur ». Ce texte n’a pas d’ambition « documentaire », il permettra à de jeunes lecteurs de collège de lire sous la forme d’une fiction différente un texte dérangeant. ■ Michelle Charbonnier Réseau de lecture : on retrouve la même candeur dénonciatrice dans le film de Roberto Benigni La vie est belle. ndlr 26 I John Boyne Trad. de l’anglais par Catherine Gibert Gallimard jeunesse, 2006 (Folio Junior) 205 p. 5,60 € 2-07-057069-X Mots clés Shoah Enfance Amitié Dans la peau des arbres Une adolescente de 16 ans, Didi pour ses proches, vit sans plaisir dans le nord de la France avec des parents qu’elle juge distants. Elle préfère les vacances insouciantes dans le Sud chez sa grand-mère. Mais cet été-là, l’incendie de la pinède autour de la propriété familiale va tout bouleverser. La mort de l’aïeule délie les langues et conduit les parents de Didi à révéler Lecture Jeune - mars 2007 Isabelle Collombat Rouergue, 2006 (DoAdo) 219 p. 10 € 2-84156-787-7 LJ121_P42-53.qxd 44 23/02/07 19:08 Page 44 Et après Genre Roman psychologique Mots clés Relation mère/fille Adolescence enfin le mystère qui entoure sa naissance. Ce roman aux allures de journal met en scène le passage à l’âge adulte d’une adolescente. Didi ne fait rien pour infléchir le cours des choses. Après un parcours initiatique vécu passivement, elle sort de sa chrysalide. Tous les stéréotypes sont là, avec la mise en scène d’un roman familial dans lequel se joue la jalousie d’une fille envers sa mère. Après une séparation « à l’amiable » avec des parents un peu falots, le départ avec l’ami d’enfance transformé en prince charmant représente une conquête limitée de l’autonomie. Le livre séduira les lectrices friandes d’histoires romanesques. Il offre un miroir grossissant de l’univers adolescent sur fond d’incendies. Mais en plaçant la mort au centre du récit, il touche avec délicatesse un point sensible. La langue qui détaille le quotidien ne s’embarrasse pas de détours, mais devient poétique pour évoquer le rapport sensuel à la nature ou la complexité du monde intérieur. Cela tire le roman du côté de l’émotion et en rend la lecture agréable. ■ Nicole Wells 27 I Maryline Desbiolles L’école des loisirs, 2006 (Médium) 87 p. 8€ 2-211-083-27-7 Genre Roman intime Mots clés Imaginaire Immigration Aïzan Aïzan était toute petite quand elle quitta la Tchétchénie avec ses parents. Le temps de séjourner dans un hôtel miteux à Paris, son père disparaissait pour ne jamais revenir. « De la chambre d’hôtel très étroite elle se souvient, et de l’odeur de son père, l’odeur un peu brutale de son torse nu contre lequel elle s’était endormie un soir qu’il faisait tellement chaud. Mais quelquefois l’odeur de son père ne réapparaît pas, elle se souvient qu’elle se souvient, rien d’autre pour attester qu’un jour, ils furent trois, chiffre magique, il n’y en a pas de plus beau pour Aïzan. » Ensuite, elles ne sont plus que deux : l’enfant et sa mère s’installent dans une cité de Nice, l’Ariane, un nom qui plaît tout de suite à Aïzan. A cause du A initial qui la relie à son prénom et à la ville dont elle est originaire, Argoun. A cause de l’héroïne mythique abandonnée par Thésée. Ariane, c’est ainsi qu’Aïzan la solitaire appelle son amie imaginaire. Elle aimerait comprendre son histoire, mais sa mère travaille beaucoup et parle peu. Alors Aïzan se renferme, se réfugie dans son monde intérieur. Heureusement, il y a les cours de danse orientale et Kevin, ce garçon à l’école dont la vie familiale n’est pas simple non plus. Maryline Desbiolles livre un récit sensible et ténu qui ne manque pas de charme. En filant la métaphore d’Ariane, elle dresse un portrait tout en finesse d’une petite immigrée en manque de père et de repères. Il existe certes beaucoup de romans pour adolescents sur le sujet, celui-ci a le mérite d’éviter tout misérabilisme : Aïzan, petit pierrot lunaire, puise dans son imagination pour avancer et se construire. Ce roman est servi par une écriture aérienne, poétique et néanmoins très accessible. ■ Gaëlle Glin Autre avis : Maryline Desbiolles construit son récit autour de la figure d’Ariane. Ariane est le nom d’un quartier défavorisé de Nice dans lequel vivent la jeune Aïzan et sa mère, originaires de Tchétchénie, Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P42-53.qxd 2/03/07 15:39 Page 45 Littératures abandonnées par le père de la fillette. C’est également ainsi qu’Aïzan baptise sa sœur imaginaire, qu’elle fait apparaître « pour être à nouveau trois ». C’est évidemment le mythe qu’elle découvre à l’école et qui vainc son ennui. Alors son ami Kévin devient Thésée et Aïzan, peu à peu, prend plaisir à vivre. L’auteur aime les mots. Elle compose un univers poétique et délicat et livre quelques instants, des sensations. Cet ouvrage touchera des lecteurs sensibles. Peut-être seront-ils peu nombreux à rencontrer Aïzan, mais la fragilité et la douceur du personnage sauront les émouvoir et les transporter. Hélène Sagnet Aïzan est le premier ouvrage pour la jeunesse écrit par Maryline Desbiolles, auteur d’Anchise (prix Fémina 1999). ndlr 28 I Trop parfait pour être honnête Bastien est l’ami idéal. Quel que soit le problème (amour, argent, déprime) il accourt, toujours prêt à rendre service sans rien demander en retour. Tant d’empathie étonne de la part de ce jeune homme, qui par ailleurs ne connaît pas son père. Lorsque Bastien vient en aide à Jérémy pour retrouver son père naturel, il décide de se faire passer pour son ami. Mais tel est pris qui croyait prendre ! Les ressemblances entre Bastien et le supposé père de Jérémy s’accumulent, notre jeune héros se prend à douter. Dans ce roman écrit à la première personne, Bastien laisse peu transparaître ses émotions. L’écriture est efficace, parfois elliptique. Etre partout là où on a besoin de lui, ne jamais dévoiler ses sentiments, ses doutes… Bastien pourrait être ce narrateur omniscient qui maîtrise le cours de l’histoire. Jusqu’au jour où il découvre l’inconsistance du socle sur lequel il prend appui. Bastien dérape, perd son contrôle, se perd lui-même. Et nous le découvrons enfin. Le thème de l’identité est ici abordé de façon originale. La dernière scène, où l’émotion trouve finalement sa place, vient clore de façon brillante ce récit à ne pas manquer. Elise Hoël 29 I Joaquin Dorfman Trad. de l’anglais (Etats - Unis) par Nathalie Laverroux Milan, 2006 (Macadam) 403 p. 9,50 € 2-7459-1986-5 Genre Roman initiatique Mots clés Filiation Mensonge Amitié Une année douce amère Emile, le narrateur, a quatorze ans en 1944. Il vit au Chambon-sur-Lignon en Haute-Loire, village reconnu depuis comme « juste » pour avoir caché beaucoup de juifs pendant la Seconde Guerre mondiale, avec un courage et une générosité sans faille. Ce récit très simple et précis évoque, à travers les petits événements de la vie scolaire - Emile prépare le concours d'entrée à l'école normale d'instituteur - les amitiés et les jalousies entre copains, les premiers émois amoureux, les alertes quand apparaît la police ou les Allemands, l'aide apportée au maquis... La gravité de la situation n’empêche pas la joie de vivre. Une lecture facile et instructive, pour ceux Lecture Jeune - mars 2007 Pascale Maret Thierry Magnier, 2006 160 p. 8€ 2-84420-485-6 45 LJ121_P42-53.qxd 46 23/02/07 19:08 Page 46 Et après Genre Roman historique Mots clés Seconde Guerre mondiale Résistance qui s’intéressent à cette période de l’histoire. ■ Gilberte Mantoux Réseau de lecture : sur ce thème, on recommandera entre autres la lecture de Paroles d’étoiles (Librio, 2004), récits bouleversants d’enfants cachés pendant la guerre ainsi que le roman de Rolande Causse, Les enfants d’Izieu (Syros, 2004), qui raconte à l’inverse le destin tragique d’enfants cachés puis trahis. ndlr 30 I Stephenie Meyer Trad. de l’anglais (Etats-Unis) par Luc Rigoureau Hachette jeunesse, 2006 571 p. 18 € 2-01-201295-7 Genre Roman fantastique Mots clés Vampire Loup-garou Amour Bella fête ses dix-huit ans chez les parents de son petit ami Edward, un vampire. Mais la jeune fille se coupe, saigne et manque de se faire mordre par un membre de la famille Cullen. Pour protéger celle qu’il aime, Edward décide de disparaître de la vie de Bella, qui ne comprend pas cet abandon. Elle finit par mettre ses jours en danger dans l’espoir de calmer sa douleur… Tentation est la suite fort réussie de Fascination (LJ n°119). Le ton est juste, les sentiments des personnages très réalistes : la douleur consécutive à la perte d’un être cher, la colère, l’émergence d’un nouvel amour, le doute... Après s’être initié aux vampires dans le premier tome, le lecteur découvre l’univers des loups-garous, tout aussi captivant. Un bémol cependant : ce second volume en appelle un troisième. L’auteur saura-t-il s’arrêter avant de lasser son lecteur ? ■ Maryon Wable-Ramos 31 I E. L. Konigsburg Trad. de l’anglais (Etats-Unis) par Pascale Jusforgues Bayard, 2006 (Millézime) 283 p. 11,90 € 2-7470-0781-2 Genre Roman policier Roman psychologique Mots clés Amitié Prison Famille recomposée Tentation Plus un mot Depuis qu’il a été accusé d’avoir tué sa demi-sœur, Branwell s’est enfermé dans un mutisme que personne ne parvient à rompre. Tentative de meurtre ou chute accidentelle ? Le bébé est plongé dans un coma sur l’issue duquel les médecins ne se prononcent pas. Persuadé de l’innocence de son meilleur ami, Connor se rend chaque jour au centre de détention des mineurs et tente de rétablir la communication avec Branwell, grâce à un jeu de cartes. Deux témoins pourraient aussi être coupables : Vivian, la baby-sitter et son petit ami, Morris. Le dénouement ne révèlera pas de coup de théâtre. Le lecteur est pourtant tenu en haleine grâce à une écriture efficace. L’amitié indéfectible qui unit les adolescents, la complicité et la compréhension de la sœur de Connor, qui elle aussi a mal vécu le remariage de ses parents, ces thématiques concerneront un large lectorat. L’environnement familial est ici décrit avec beaucoup de justesse. ■ Cécile Robin-Lapeyre Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P42-53.qxd 23/02/07 19:08 Page 47 Littératures 32 I L’Elfe du Grand Nord Nickolaï le petit elfe n’est qu’un bébé lorsqu’il remporte avec sa mère la grande course du Solstice d'Hiver. Mais la cérémonie de remise du trophée est interrompue par la sorcière Magda qui assassine tous les elfes et s’empare de leur royaume au pôle Nord. Nickolaï est l’unique rescapé, grâce à un renne volant qui le dépose chez un couple d’humains. Ces derniers acceptent de l'adopter malgré ses oreilles pointues et la présence à ses côtés de la petite fée Elvina. Mais le danger guette toujours : Nickolaï doit mourir pour que le pouvoir de Magda soit complet. Cette très belle histoire est digne d'un conte de Noël, avec ses rennes volants, la fée Elvina et la mystérieuse cité de Doransk toute en or. Le personnage de Nickolaï, qui doit vivre au milieu des humains malgré ses différences, est très attachant. Son intégration douloureuse, puis la recherche de ses origines sont décrits avec justesse et émotion. Quant au dénouement, particulièrement réussi, il nous réserve une belle surprise sur les origines du Père Noël ! ■ Sébastien Féranec Lecture Jeune - mars 2007 Lucy Daniel Raby Trad. de l’anglais par Luc Rigoureau Albin Michel, 2006 (Wiz) 327 p. 13,50 € 2-226-17020-0 Genre Roman d'aventures Fantastique Mots clés Adoption Amitié 47 LJ121_P42-53.qxd 23/02/07 19:08 Page 48 48 Parcours de lecture Et après BD 33 I Marguerite Abouet Ill. de Clément Oubrerie Gallimard, 2006 (Bayou) 106 p. 15,50 € 2-07-057588-8 Genre Chronique Mots clés Adolescence Afrique Petit organigramme présentant les nombreux personnages pour nous rafraîchir la mémoire… Nous voici à nouveau plongés dans le quotidien des habitants du quartier de « Yop city » à Abidjan… Le bébé en gros plan c’est Bobby, l’enfant présumé d’Adjoua et Moussa, unique héritier des opulents Sissoko, qui rappelez-vous, ont été rapidement mariés à la fin du premier tome (LJ n°118). Le problème, c’est que l’enfant ne ressemble pas du tout à ses parents et que les Sissoko menacent d’annuler l’union ! Bintou, elle, s’éprend d’un Parisien qui lui promet monts et merveilles… Heureusement Aya, toujours bonne copine, soutient ses amies. Bref, les péripéties s’accumulent ! Ce second tome tient toutes les promesses du premier : humour efficace et dialogues savoureux, personnages attachants, rythme enlevé. Mais les situations sont plus ambiguës et plus complexes. La palette de couleurs, douces et séduisantes, installe des ambiances singulières. C’est donc avec un grand plaisir que nous avons retrouvé l’univers et la douceur de vivre d’Aya de Yopougon. ■ Hélène Sagnet 34 I Frank Giroud Ill. de Marianne Duvivier Dupuis, 2006 (Empreintes) 56 p. 13 € 2-8001-3603-0 2-8001-3798-3 Genre Histoire Mots clés Mai 1968 Shoah Aya de Yopougon, T.2 L’écharde : T.1 et T.2 Mai 1968. Anabelle et Hélène, deux sœurs à la fois complices et rivales affrontent douloureusement le suicide de leur père. Rien ne laissait envisager cette tragédie. Mais quand Annabelle accompagne à l’hôpital l’ami d’Hélène blessé après un affrontement avec des policiers, une infirmière lui révèle qu’elle a accouché une jeune femme à Drancy sous l’Occupation, qui pourrait être sa véritable mère. L’écharde offre en deux volets un récit intimiste avec des personnages féminins remarquables dans leur complexité psychologique et leur sensibilité. Les flash-backs entre la France des années 40 et celle des années 60 enrichissent l’album qui se regarde comme un vieux livre de photos. Au service de ce scénario, le graphisme d’une grande qualité se passe parfois de texte. De magnifiques gros plans recentrent l’histoire dans le tumulte de 68 autour d’un seul destin : celui d’une étudiante en recherche d’identité et de vérité. Un vrai moment d’émotions. ■ Valérie Médiano Nouvelle série : Le scénariste Franck Giroud aborde dans sa nouvelle série « Secrets » des événements historiques ayant marqué des familles sur plusieurs générations : le génocide juif avec L’écharde, la Russie de Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P42-53.qxd 23/02/07 19:08 Page 49 49 Staline avec Le serpent sous la glace, illustré par Milan Jovanovic (2006), la Commune avec L’écorché, illustré par Ruben Pellejero et la colonisation britannique en Inde avec Samsara, illustré par Michel Faure. Ces deux derniers titres paraîtront en août. ndlr 35 I Une aventure rocambolesque d’Attila le Hun : Le fléau de Dieu, T.1 La Beauce est enfin conquise ! C’est la « der des der » pour Attila : le monde entier lui appartient. Pourtant, le roi des Huns s’ennuie ferme, il « souffre de la vie », en un mot il déprime. Alors il congédie ses troupes, ses femmes, et part à la conquête de Dieu. Pas facile et totalement imprévisible ! Le voilà condamné à errer sans fin dans la plate Beauce : quel supplice pour le grand homme. Après Freud et Van Gogh, Larcenet prend Attila pour cible et son humour dévastateur met le doigt là où ça fait mal. Les interrogations existentielles et philosophiques du guerrier rencontrent celles du lecteur. Le graphisme, confié à Daniel Casanave, donne allégrement vie aux fantaisies de l’auteur. Un très bon album, peut être moins facile que les précédents. ■ Agnès Donon 36 I Manu Larcenet Ill. de Daniel Casanave Dargaud, 2006 (Poisson Pilote) 48 p. 9,80 € 2-205-05813-4 Mots clés Dépression nerveuse Dieu Guerre The Boondocks : T.1 à 5 Parce que je sais que tu ne lis pas le journal, T.1, Libérez Jolly Jenkins, T.2, Je suis presque sûr que Moïse ne portait pas de flingue,T.3, Il semble que le destin ait le sens de l’ironie, T.4, Ma femme est blanche et elle me déteste, T.5 Les aventures de Huey et Riley avec leur grand-père ne manquent pas de sel. Ils savent agacer et pointer là où ça coince : ségrégation cachée, mariage mixte, problèmes économiques liés à la couleur de peau. Les références nombreuses aux émissions de radio ou de télé américaines rendent parfois difficile la compréhension des gags, mais les strips de McGruber restent incisifs et pleins d’humour. Avec le tome 5, le ton change, le 11 septembre a laissé des traces. L’auteur reprend ses personnages mais simplifie son graphisme et réduit le nombre de figurants. Il devient plus mordant, plus direct. Il attaque franchement Bush et sa politique. L’humour se fait plus grinçant, presque un peu désespéré. La série tourne franchement à la satire politique. ■ Agnès Donon Lecture Jeune - mars 2007 Aaron McGruber Trad. de l’anglais (Etats-Unis) par Jean-Paul Jennequin et Philippe Cornélis Dargaud, 2003-2006 47 p. 9,80 € 2-87129-454-2 2-87129-538-7 2-87129-668-5 2-87129-673-1 2-87129-882-3 Mots clés Etats-Unis Racisme LJ121_P42-53.qxd 50 23/02/07 19:08 Page 50 Et après 37 I Marc Védrines Dargaud, 2006 52 p. 13 € 2-205-05801-0 Genre Histoire Fantastique Mots clés Islande Nous sommes au XVIIe siècle. Lorsque Jacques, bientôt seize ans, embarque à bord d’un navire de pêche en partance pour l’Islande, le lecteur craint un instant une énième variation des Passagers du vent de François Bourgeon. Mais il se trompe : après bien des péripéties, Jacques arrive en Islande, pays dont il connaît la langue et les paysages, sans jamais y avoir posé le pied ! Et le récit de prendre alors un tour déconcertant… Car notre jeune héros possède de mystérieux pouvoirs, qui lui vaudront bien des inimitiés. Si le dessin n’est pas tout à fait abouti, sa maladresse (légère) est largement compensée par une mise en page et un découpage des plus réussis. La coloriste effectue par ailleurs un très bon travail. L’intérêt de cette nouvelle série réside avant tout dans un scénario solide, mêlant habilement données historiques et surnaturel. L’auteur se passionne manifestement pour cette région du monde, dont il dépeint avec talent les paysages sévères et cette période de l’histoire empreinte de superstition. ■ Éric Peltier 38 I Fabien Vehlmann Ill. de Frantz Duchazeau Dargaud, 2006 72 p. 13,50 € 2-205-05779-0 Mots clés Islam Conte Islandia : Escale boréale, T.1 Les cinq conteurs de Bagdad Il était une fois… cinq conteurs qui décident de s’associer et de parcourir le monde pour trouver l’inspiration qui leur permettra de remporter le concours du meilleur conteur, organisé par le calife de Bagdad. Contre : Les quelques bonnes idées qui émaillent ce récit (celle notamment de la voyante qui, dès le début du périple, révèle le destin de chacun des protagonistes) ne suffiront malheureusement pas à passionner tout à fait le lecteur. Les aventures s’enchaînent sans déplaisir, mais sans grande originalité non plus. Les dialogues agacent plus qu’ils ne séduisent (ton « forcément » décalé), tandis que le dessin, beaucoup trop influencé par l’auteur d’Isaac le pirate (le coloriste est d’ailleurs le même), se relâche parfois de façon inexplicable. Il y avait pourtant là matière à raconter mais les auteurs, s’ils ne manquent pas de talents, ont préféré céder à la facilité, glissant paresseusement leurs pas dans ceux des grandes figures tutélaires du moment, les Sfar, Blain et autres Trondheim, dont on ne compte plus les épigones. ■ Éric Peltier Pour : Les meilleures histoires doivent-elles toucher l’âme ou le cœur, avoir une dimension universelle ? Peut-on bouleverser l’ordre d’un récit sans le détruire ? La traduction pervertit-elle le conte ou le recrée-t-elle ? Autant d’interrogations sur lesquelles nos cinq conteurs, de traditions diverses, sont amenés à réfléchir et nous avec eux. On aurait tort pourtant d’imaginer que l’album de Vehlmann relève du cours de français ! Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P42-53.qxd 23/02/07 19:08 Page 51 BD L’humour et la dérision y côtoient sans cesse l’absurde et la tragédie, et l’on s’attache à ces cinq conteurs sympathiques, haut en couleurs et amoureux de leur métier au point d’en perdre la vie parfois. Le trait de Duchazeau ne s’encombre pas toujours de détails, les décors, notamment, sont à peine esquissés. Qu’importe, la magie l’emporte. ■ Anne Lanchon 39 I Subaru danse vers les étoiles, T.4 Subaru est une petite fille différente des autres. Tous les soirs après l’école, elle se rend à l’hôpital et raconte ses journées à son frère jumeau. Elle danse pour lui et tente de lui rendre le sourire. Un jour, son frère meurt et cette mort ouvre une plaie dans le cœur de Subaru. Une série sur la danse ! Peut-être, mais sans niaiserie. Le lecteur, quel que soit son sexe, prend un réel plaisir à voir évoluer Subaru dans son art mais aussi dans sa construction personnelle. L’accent est mis sur les réflexions et les émotions de l’héroïne. Le trait particulier du dessin traduit à merveille la tension, la souffrance physique et intérieure de Subaru. Les gros plans sur les visages sont un régal et permettent de vivre les moments critiques au plus près. Le jeu du « clair-obscur » caractérise la personnalité de cette jeune fille attachante mais jamais agaçante. La densité de lecture, qu’elle soit visuelle ou textuelle, évite toute frustration et l’évolution de Subaru se poursuit longtemps dans notre esprit. Après trois tomes déjà parus (LJ n°119), la série ne lasse pas et promet d’être encore intense pour les suivants. Un magnifique parcours initiatique à conseiller. ■ Sonia Seddiki 40 I Masahito Soda Trad. du japonais par Yuko K. Delcourt, 2006 (Akata) 211 p. 7,50 € 2-7560-0239-9 Genre Manga-Josei Mots clés Danse Les mystères de Taisho, T.1 Haruka Matsunomiya est détective privé à Tokyo dans les années 20. Son quotidien se voit bouleversé par l’arrivée d’une nouvelle assistante, Maya Takazono. La jeune fille se révèle mystérieuse et dotée d’une grande intelligence pour son âge. Les enquêtes s’enchaînent rapidement sans lien apparent entre elles, sauf que le lecteur en apprend un peu plus sur l’étrange assistante. Le suspense réside plus dans ce personnage, secondaire en apparence, que dans les énigmes ou leur résolution. Le dessin, assez proche du croquis, allie maladresse et élégance avec beaucoup de charme. Le personnage de Maya Takazono rappellera à certains le trait de Nihei Tsutomu dans sa série « Blame », sans l’aspect cyberpunk. Ce manga policier revisite le genre, en recréant l’ambiance des années 20 et des polars classiques. Seul bémol : les histoires sont trop vites résolues, mais l’intérêt est sans doute ailleurs, pour le moment en tout cas. ■ Sonia Seddiki Lecture Jeune - mars 2007 Kei Toume Trad. du japonais par Tamako Kageyama Delcourt, 2006 (Akata) 213 p. 7,50 € 2-7560-0254-2 Genre Manga policier Mots clés Japon Années 20 51 LJ121_P42-53.qxd 23/02/07 19:08 Page 52 52 Parcours de lecture Et après Documentaires 41 I Véronique Antoine-Andersen Actes Sud junior, 2006 95 p. 24 € 2-7427-6314-7 Mots clés Architecture L’auteur de ce documentaire, qui travaille à la Cité de l’Architecture, répond ici à la problématique : à quoi sert l’architecture ? Les réponses apportées seront différentes selon la fonction de l’ouvrage bien sûr, mais aussi selon le contexte de la civilisation. Les quatre premiers chapitres évoquent l’architecture de l’habitat et son aspect social (habiter, protéger, guider), l’architecture religieuse (prier, protéger les morts, soigner), l’architecture liée au travail (relier, transporter, travailler) et pour finir celle liée aux loisirs (exposer, conserver, se distraire). Un dernier chapitre emmène le lecteur dans des constructions originales, telles que celle du facteur Cheval dans la Drôme. Chaque thématique est resituée dans son contexte historique mais aussi mondial. Ainsi les châteaux forts présentés vont du Xe siècle français au XVe siècle espagnol en passant par le Japon du XIVe siècle. Ce livre à la maquette agréable, didactique et très bien illustré, séduira ceux qui s’intéressent au sujet. Un lexique très utile le complète, mais le documentaliste ou le bibliothécaire aurait apprécié un index. ■ Laurence Guillaume L’auteur a reçu le prix Sorcières documentaires en 2005 pour son premier livre L’art pour comprendre le monde (Actes Sud junior, 2003). ndlr 42 I Chantal Gerbaud Syros jeunesse, 2006 136 p. 10 € 2-7485-0418-6 Genre Témoignage Mots clés Shoah Seconde Guerre mondiale Hongrie Promenade en architecture Irène Hajos, survivante Témoignage d’une juive hongroise Le témoignage d’Irène Hajos, rescapée d’Auschwitz, se compose de quatre parties : avant, pendant, après la déportation et aujourd’hui. Née en Hongrie en 1922 dans une famille juive non pratiquante, Irène vit une enfance heureuse et insouciante. L’invasion allemande de 1944 va bouleverser sa vie. Déportée en Pologne, elle survit au travail forcé et à la « marche de la mort ». De retour dans son pays puis immigrée en France, elle se mure dans le silence. Une rencontre avec d’anciens déportés lui fait prendre conscience de l’importance de témoigner. Ce livre permet de comprendre la déportation, mais aussi la difficulté de survivre après un tel traumatisme, ainsi que le malaise et la culpabilité des rescapés. ■ Sophie Gentier Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P42-53.qxd 23/02/07 19:08 Page 53 53 Réseau de lecture : sur le même thème, on pourra lire le roman de l’Italien Primo Levi Si c’est un homme (Pocket, 1988) et les deux albums BD de l’Américain Art Spiegelman Maus (Flammarion, 2004). ndlr 43 I La peur au cinéma L’auteur de ce documentaire est un spécialiste du cinéma et fait partie du service pédagogique de la cinémathèque française. Il nous amène au long de six chapitres à découvrir les mécanismes qui régissent la peur, mais aussi à comprendre notre propre attirance pour les films effrayants. Sa démarche s’inscrit dans une visée pédagogique. Il donne aux adolescents les clés essentielles pour comprendre ce genre, et le désir d’aller plus loin avec les références qui illustrent ses propos. Une focale est mise sur un film emblématique : Les oiseaux d’Alfred Hitchcock, dont il analyse l’univers d’auteur, la technique cinématographique et l’empreinte dans l’histoire du cinéma. L’ouvrage nous montre enfin que la peur est un gage d’humanité mais que ce sont les techniques de son et d’images qui déclenchent en nous tour à tour inquiétude et frayeur. Nous sommes les spectateurs que le cinéaste désire : nous savons, entendons et voyons ce qu’habilement il nous soumet ! Un vrai plaisir de lecture accessible, intelligent. ■ Michelle Charbonnier Nouvelle collection : Cette nouvelle collection consacrée au cinéma s’adresse à trois types de cinéphiles : ceux qui portent encore des culottes courtes, les adolescents et les adultes ! Elle comble un manque évident dans la production jeunesse et met enfin le septième art à la portée de tous. Autres titres parus : Lanternes magiques d’Elodie Imbeau et Grand/Petit de Nathalie Bourgeois. ndlr Lecture Jeune - mars 2007 Emmanuel Siety Actes Sud junior La Cinémathèque française, 2006 87 p. 18 € 2-7427-6311-2 Mots clés Cinéma Peur LJ121_P54-71.qxd 23/02/07 19:11 Page 54 54 Parcours de lecture Lecteurs confirmés Littératures 44 I Gert Hofmann Trad. de l’allemand par Yasmin Hoffmann et Maryvonne Litaize Actes Sud, 2006 (Babel J) 166 p. 6,50 € 2-7427-6350-3 Mots clés Antisémitisme Nazisme Lorsque le professeur de philosophie Veilchenfeld s’installe dans une petite ville de Saxe, il entre naturellement dans le cercle des notables, et à ce titre est invité à partager la table du médecin, son voisin. Hans, le narrateur, est le jeune fils de ce dernier. Les nazis prennent le pouvoir et peu à peu, l’enfant assiste à la mise à l’écart du philosophe. On lui interdit de continuer à prendre des cours de dessin chez lui et même de le saluer. Fasciné par la sagesse du personnage et son appartement rempli de livres, Hans ne comprend pas l’attitude des habitants et encore moins le silence gêné de ses parents. Que dire des maux étranges qui tourmentent sa mère à chaque fois que l’on évoque ce problème… Le drame se déroule en 1938 et le philosophe a le tort d’avoir « un nom qui pue et un trop grand nez ». Les termes de national-socialisme et d’antisémitisme ne sont jamais prononcés, pourtant c’est en leur nom que se déroulera la tragédie, sous le regard de Hans et de sa petite sœur Gretel, aux prénoms symboliques. Le père continuera malgré l’hostilité de ses compatriotes à rendre visite à l’enseignant, condamné à vivre en reclus dans l’attente imminente de son « transfert ». Le moment venu pourtant, il ne prendra pas sa défense. L’aurait-il pu ? La responsabilité reste la question fondamentale de ce roman, d’inspiration probablement autobiographique. L’issue, plus dramatique que prévisible, est racontée de manière distanciée, presque « clinique ». Pour les plus âgés. ■ Cécile Robin-Lapeyre 45 I Linda Hogan Trad. de l’anglais (Etats-Unis) par Danièle Laruelle Editions du Rocher, 2006 (Terres étrangères) 288 p. 22 € 2-268-05902-2 Notre philosophe Power Il est difficile pour une adolescente en Floride de concilier traditions indiennes et modernité. Linda pour les uns, Omishto pour les autres, se sent marginalisée malgré sa réussite scolaire, à l’inverse de sa sœur parfaitement intégrée au modèle américain. De plus, elle supporte mal l’ambiance familiale depuis que sa mère a refait sa vie avec un homme brutal et concupiscent. Linda se réfugie souvent chez Ama, sa tante, qui habite une cabane au cœur de marécages infestés de serpents et d’alligators. Vivant en symbiose avec la nature, Ama initie la jeune fille au savoir traditionnel des Taigas : Omishto est « celle qui observe ». Un ouragan violent va bouleverser leur existence. Echappant de peu à la mort, Linda suit Ama sur les traces d’une panthère. Pourquoi l’Indienne décide-t-elle de tuer l’animal, espèce protégée selon la loi américaine, Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P54-71.qxd 23/02/07 19:11 Page 55 55 animal totémique de la tribu ? Ce roman d’apprentissage, qui s’avère être aussi un époustouflant récit d’aventures, intéressera les jeunes curieux de la civilisation indienne et tous ceux qui sont partagés entre deux cultures. Le récit des procès, justice des Blancs puis jugement des Anciens, leur paraîtra certes un peu fastidieux. Mais le texte recèle des images magnifiques : la jeune indienne endormie dans une barque au milieu des marais hostiles, l’ouragan parachevant le travail de sape de la civilisation américaine… Un roman authentiquement écologiste, militant de la cause indienne. ■ Cécile Robin-Lapeyre 46 I Genre Roman d’aventures Roman d’apprentissage Mots clés Interculturalité Ecologie Les sirènes de Bagdad Yasmina Khadra clôt avec cet ouvrage sa trilogie sur les grandes métropoles d’Orient (Kaboul pour Les hirondelles de Kaboul, Tel-Aviv pour L’attentat (LJ n° 117), Bagdad et Beyrouth ici) gravement meurtries par la guerre, le fanatisme et le terrorisme. Le narrateur est cette fois l’apprenti terroriste, pari d’écriture plus redoutable que dans ses précédents romans. Le récit débute et se termine à Beyrouth, présentée comme une sorte de prostituée, métaphore du profond malentendu entre l’Orient et l’Occident. L’auteur retrace l’itinéraire d’un jeune bédouin qui vivait paisiblement, selon une tradition millénaire, aux portes du désert, loin des fureurs guerrières de Bagdad. Son existence bascule dans l’horreur après les sévices et les « bavures » de combattants américains pour qui quelques vies, même arbitrairement abattues, ne comptent guère. Humilié, plein de haine, il rejoint à Bagdad les groupes de djihadistes, aux itinéraires variés mais soudés par le même sentiment d’humiliation. Le lecteur découvre avec lui la difficulté de survivre dans cette ville et les facettes d’une violence barbare et multiforme. Yasmina Khadra ne se contente pas de ce portrait, si fouillé soit-il. Il traque les compromissions, faiblesses et contradictions de chaque camp, essaie de comprendre l’origine des conflits Orient-Occident et refuse tout manichéisme simpliste, refus qui le conduit à imaginer un dénouement inattendu : la tragédie n’éclate pas toujours sous la plus prévisible et la pire des formes. Cette fiction bien écrite, très nuancée, réussit à rendre compte de l’extrême complexité d’une situation tragique au sens fort du terme. Clairement engagée contre les intégrismes de tous bords, elle ne peut laisser indifférents ses lecteurs, notamment les grands adolescents qui souvent s’interrogent sur la violence du monde, les problèmes du terrorisme et de l’intégrisme. ■ Marie-Françoise Brihaye Lecture Jeune - mars 2007 Yasmina Khadra Julliard, 2006 339 p. 19 € 2-260-01712-6 Mots clés Terrorisme Liban Irak LJ121_P54-71.qxd 56 23/02/07 19:11 Page 56 Lecteurs confirmés 47 I Nicole Krauss Trad. de l’anglais (Etats-Unis) par Bernard Hoepffner, avec la collaboration de Catherine Goffaux Gallimard, 2006 (Du monde entier) 356 p. 21 € 2-07-077308-6 Mots clés Ecriture Identité Immigration D’abord il y a Leo, vieil immigré juif polonais qui croupit dans la crasse et la solitude de son appartement new-yorkais. Ses rares moments de joie, au cours desquels il se remémore son pays, son amour de jeunesse (Alma), et son premier manuscrit – tous trois perdus –, il les partage avec Bruno, un voisin qui pourrait bien n’être qu’un fantôme. Ensuite il y a Alma, 14 ans, New-Yorkaise elle aussi. Depuis la mort de son père, sa mère traductrice est dépressive et son petit frère se prend pour le Messie. Alma doit son prénom à l’héroïne du livre préféré de ses parents, L’histoire de l’amour. A la demande d’un mystérieux commanditaire, la mère d’Alma entame la traduction de ce chef-d’œuvre méconnu signé Zvi Litvinoff, écrivain chilien d’origine polonaise, aujourd’hui disparu. Alma entre dans l’âge où elle aimerait en savoir plus sur elle-même. Pour cela, elle le sent, il faut qu’elle découvre la genèse de L’histoire de l’amour… Un livre mystérieux est donc au cœur de cet ambitieux roman que Nicole Krauss a construit comme un puzzle. A travers les souvenirs de Leo, le journal d’Alma et les extraits de L’histoire de l’amour, le lecteur happé doit deviner ce qui lie les personnages. Il savoure autant l’élaboration complexe et l’originalité du récit que la justesse des voix : Alma a le mordant, l’humour décalé et la fraîcheur des adolescents, et Leo nous bouleverse lorsqu’il évoque sans concession ni pathos son quotidien de vieillard isolé. Attention, talent ! ■ Gaëlle Glin 48 I Jhumpa Lahiri Trad. de l’anglais (Etats-Unis) par Bernard Cohen Robert Laffont, 2006 (Pavillons) 354 p. 22 € 2-221-10064-6 Mots clés Interculturalité Identité Famille L’histoire de l’amour Un nom pour un autre Boston, fin des années soixante. Ashoke et Ashima Ganguli, un jeune couple d’immigrés indiens, donnent naissance à leur premier enfant. Comme le veut la tradition, la grand-mère d’Ashima choisira son prénom. Mais les jours passent et le courrier n’arrive pas. Sommés par l’administration américaine de lui trouver un prénom, les parents le baptisent Gogol, en hommage à l’auteur russe et en écho à une histoire douloureuse, longtemps tue par Ashoke. Gogol grandit comme un jeune Américain. Peu à peu ce prénom l’embarrasse, tout comme lui pèsent la culture de ses parents, leurs traditions et leurs attentes. Ce très beau roman d’apprentissage dit la difficulté à être et à se construire dans une double culture. Le récit, qui se déroule de 1968 à 2000, nous permet d’accompagner intimement Gogol-Nikhil et d’appréhender les conflits et les doutes qui l’envahissent face à son identité. On est touché par l’évocation des relations entre un fils et ses parents, qu’il ne parvient pas toujours à aimer et comprendre. L’auteur pose en filigrane la question de l’intégration dans une Amérique sûre d’elle. Ce destin trouvera un écho certain auprès de nombreux jeunes lecteurs. ■ Hélène Sagnet Mise en réseau : Sur une thématique proche on pourra voir le film de Ken Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P54-71.qxd 23/02/07 19:11 Page 57 Littératures Loach, Just a kiss, qui met en scène la communauté pakistanaise à Glasgow. ndlr 49 I L’histoire de Chicago May À la fin du XIXe siècle, May fuit l’Irlande en emportant les maigres économies familiales et embarque pour le Nouveau Monde. Tour à tour danseuse de revue, prostituée, arnaqueuse et braqueuse, elle se fait connaître sous le célèbre nom de Chicago May, arpentant le territoire des frères Dalton au rythme des épopées du Far West. Après avoir consacré un ouvrage à son autobiographie, On s’est déjà vu quelque part ? (10/18, 2005), Nuala O’Faolain se penche sur le destin de la jeune rebelle en s’inspirant des mémoires de celle-ci, d’archives, de lettres, d’articles de journaux, de photos et d’affiches. L’auteur nous fait part de ses interrogations et rend compte de la difficulté de l’historien face à ses sources. Sans nul doute, Nuala O’Faolain tente de rétablir l’image de cette fugitive au destin contestable. Elle trouve dans l’histoire de la jeune Irlandaise des concordances avec la sienne et porte beaucoup d’estime à cette femme qui ose la transgression et refuse la condition qu’on lui impose. Avec une écriture simple, l’auteur s’empare d’une façon singulière du destin de cette jeune femme hors norme. Un très beau portrait. ■ Elise Hoël L’histoire de Chicago May a obtenu en 2006 le prix Femina du meilleur roman étranger. ndlr 50 I Nuala O’Faolain Trad. de l’anglais (Irlande) par Vitalie Lemerre Sabine Wespieser éditeur, 2006 443 p. 25 € 2-84805-043-8 Genre Biographie Mots clés Anticonformisme Vol Condition féminine Grand frère En danger moral, Dag est placé dans une nouvelle famille d’accueil qui lui fait place avec une spontanéité, une confiance et une empathie remarquables. Son professeur de norvégien lui confie une caméra pour filmer la fin de l’année scolaire. Mieux encore : Dag tombe amoureux d’une fille paumée elle aussi et qui le comprend. Il finit par trouver « la lumière » grâce à cet environnement et à sa volonté de lutter contre ses peurs. Il se débarrasse enfin de son sentiment de culpabilité, lié à sa responsabilité dans l’incendie qui causa la mort du fils de sa précédente famille d’accueil. Un roman réaliste, très juste, très fort, bien construit et bien traduit. Le drame de Dag transparaît au travers de non-dits, de comparaisons et de métaphores inattendues, qui vont de Shakespeare aux séries télévisées, en passant par la mythologie ! ■ Gilberte Mantoux Nouvelle collection : Grand frère paraît chez Panama dans une nouvelle collection de fiction destinée aux 13-16 ans, qui comporte en majorité des auteurs étrangers. ndlr Lecture Jeune - mars 2007 Harald Rosenlow Eeg Trad. du norvégien par Céline Romand-Monnier Panama, 2006 206 p. 13 € 2-7557-0055-6 Genre Roman psychologique Mots clés Famille Culpabilité 57 LJ121_P54-71.qxd 58 23/02/07 19:11 Page 58 Lecteurs confirmés 51 I Bernhard Schlink Gallimard, 2006 (Folio bilingue) 171 p. 8€ 2-0703-0972-X Mots clés Amour Jalousie Secret L’autre fait partie d’un recueil de nouvelles précédemment paru sous le titre Amours en fuite (Gallimard, 2001), mais la longueur et l’aboutissement du récit permettent une lecture autonome. La présentation du livre est soignée, dans une édition de poche bilingue où l’on trouve habituellement peu de textes contemporains. Le thème : un homme veuf depuis peu découvre que son épouse, décédée d’un cancer, menait une vie secrète. Musicienne de renommée internationale, elle entretenait au cours de ses déplacements une relation avec un homme, selon toute vraisemblance son amant. La lecture de sa correspondance plonge le mari dans un état dépressif, où se mêlent jalousie, chagrin et révolte, puisqu’il l’avait accompagnée au bout de sa maladie. Il décide alors de répondre à la dernière lettre, pour entrer dans le jeu de « l’autre ». Auteur de romans policiers, Bernard Schlink manie habilement le suspense psychologique et ne laisse rien deviner de la fin. La narration à la troisième personne marque une distance et place le lecteur en position d’observateur. Derrière le pessimisme apparent du sujet (tromperie et mensonge), une vérité nouvelle éclate dont le mari sort lucide et somme toute vainqueur, puisqu’elle lui permet de se remettre en question. Ce roman haletant et inclassable, initiation sentimentale et philosophique, permettra de faire découvrir l’auteur du Liseur (Gallimard,1996) aux adolescents. L’écriture est sobre, sans difficultés. ■ Cécile Robin-Lapeyre 52 I Odön von Horvath Trad. de l’allemand par Rémy Lambrechts Gallimard, 2006 (L’imaginaire) 154 p. 6,90 € 2-0707-7969-6 Genre Roman historique Mots clés Armée Nazisme L’autre/Der Andere Un fils de notre temps Fin des années 30 en Allemagne. Un jeune chômeur s’engage dans l’armée. L’uniforme, la discipline, l’exaltation de la patrie l’enflamment et le réhabilitent à ses propres yeux. Il vénère son capitaine, un « père idéal », mais méprise son propre père, pacifiste depuis son retour de la guerre de 14. L’armée envahit sans déclaration préalable un petit pays et procède à un « nettoyage » systématique. Blessé en voulant sauver son capitaine, médaillé mais devenu invalide, le jeune soldat est lâché par l’armée. Tout s’effondre pour lui lorsqu’il apprend par une lettre posthume de son capitaine les vraies raisons de la mort de ce dernier. Ce roman précurseur nous plonge dans un avant-guerre de mensonges, froid, normatif, idéologique, où l’individu n’a plus sa place. Seuls quelques résistants rasent les murs. Le héros acerbe, profiteur et misogyne, présente néanmoins une faille dans sa carapace d’inhumanité, en construisant un amour imaginaire pour une jeune femme à peine entrevue. Ce monologue grinçant et cinglant d’un homme désabusé est écrit dans un style incisif et percutant. A lire absolument. ■ Brigitte de Bergh Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P54-71.qxd 23/02/07 19:11 Page 59 Littératures Lecture croisée 53 I Contours du jour qui vient Quelque part aujourd’hui en Afrique, une ancienne colonie française se remet difficilement de la guerre. La vie d’une femme s’effondre à la mort de son compagnon dont elle a une petite fille, Musango, qu’elle chasse pour avoir apporté le malheur dans sa vie. Le roman raconte l’aventure poignante de la fillette livrée à elle-même. Autour d’elle gravitent les figures attachantes d’une humanité qui, même dévoyée, reste battante. Le roman affiche une structure musicale optimiste en prenant appui sur un cri qui revient comme une vague « Et toi, mère, qu’as-tu fait de mon souvenir ? ». Les deux premières parties liquident le passé empoisonné dans un retour en arrière. L’interlude central évoque la rencontre symbolique du personnage avec la vieille dame apaisée qu’elle sera un jour. Les deux dernières parties reprennent une chronologie normale et affrontent le présent et l’avenir. Le propos du récit est double : rendre compte d’une souffrance privée et montrer à quel point celle-ci est intriquée dans la souffrance politique d’un peuple asservi longtemps par la colonisation. L’auteur dénonce la faute collective qui consiste à fuir dans la religion ou le rêve d’aller en France, au lieu de compter sur ses forces et d’affronter l’avenir. La narratrice voit tout du haut de ses douze ans. Mais elle se fait l’écho des idées de l’auteur, au point que sa crédibilité de narratrice enfant est mise à mal. Journal, récit, lettre, le livre est tout cela à la fois. Roman d’apprentissage, puisque l’héroïne finit par trouver sa voie, roman d’apprentissage politique, dont le message est clair : c’est en s’appuyant sur les forces de ceux qui ne se replient pas sur eux-mêmes que ce pays peut survivre. La narration au présent donne au texte la proximité d’une confession et d’un reportage : peu de descriptions, des faits rapportés au plus près à partir de phrases courtes. Le texte brûlant s’appuie sur tous les signes visibles de l’émotion en évitant les dangers du voyeurisme. Ce livre attachant fait confiance à la nature humaine et à ses capacités à rebondir. Il devrait toucher des adolescents et les sensibiliser à l’urgence de la question africaine. ■ Nicole Wells Autre avis : La voix qui nous happe est celle de Musango. Dans un long monologue intérieur, elle s’adresse à sa mère qui l’a chassée, l’accusant d’être un esprit malin, source de son malheur. Jetée à la rue, enlevée et revendue, la petite fille côtoiera pendant trois années le désespoir en servant des femmes recluses en partance pour l’Europe. Làbas, elles devront se vendre pour rembourser la dette du voyage : ces femmes, dit-on, vont « faire l’Europe »… Musango s’enfuit. Elle veut revoir sa mère et tenter de comprendre. En ville, elle retrouve les proxénètes sous les traits d’hommes d’église qui manipulent leurs fidèles. Lecture Jeune - mars 2007 Léonora Miano Plon, 2006 275 p. 18 € 2-259-20396-5 Genre Roman initiatique Mots clés Afrique noire Génocide Résilience 59 LJ121_P54-71.qxd 60 23/02/07 19:11 Page 60 Lecteurs confirmés Le récit s’organise autour de quatre mouvements, quatre étapes du parcours intérieur de Musango vers l’affirmation de soi. « Je veux toujours écrire une chanson », confie l’auteur. La musicalité est effectivement bien là. Au fil de l’histoire, alors que Musango pose ses choix et développe son individualité, le rythme de l’écriture ralentit, s’apaise. La densité étouffante du monologue du « Prélude » cède la place aux dialogues. L’espoir s’installe. L’Afrique nous apparaît à travers le regard d’une enfant de douze ans, confrontée à la violence et à la haine. Ceux qu’elle rencontre ne semblent avoir d’autres alternatives que partir en Europe ou rejoindre des groupes religieux sectaires aliénants. « Ici on ne croit pas vraiment. On mise. On tente le coup (…) ce peuple qui ne peut croire en rien, puisqu’il ne croit pas en lui. Tout doit venir d’ailleurs, d’en haut, d’en bas, peu importe, pourvu que ce ne soit pas de l’intérieur ». Ce que dénonce l’auteur, par le personnage de la mère notamment, c’est « une conscience de soi très dégradée ». Musango, elle, s’affirme et dessine les Contours du jour qui vient. ■ Hélène Sagnet Autre avis : Amour et haine sont pareillement mis à l’honneur dans ce superbe livre qui nous fait partager tout le paradoxe de l’Afrique noire. Par le biais de Musango, mal aimée et malgré tout si vivante, nous découvrons la tragédie des populations africaines dévastées par les guerres et incapables de s’occuper de leurs enfants. La jeune narratrice nous bouleverse par l’amour indéfectible qu’elle porte à sa cruelle génitrice et par la capacité qu’elle a d’avancer malgré l’adversité et la cruauté des siens. Il s’agit d’un chant d’amour, d’un chant de résilience et de pardon. Quelle belle écriture pour dire l’indicible et l’innommable ! Léonora Miano a su conquérir la sensibilité des lycéens, elle a conquis la mienne par la parole universelle de cette enfant et sa posture de reine. ■ Michelle Charbonnier Contours du jour qui vient a obtenu le prix Goncourt des lycéens en 2006. Les jeunes lecteurs avaient déjà couronné en 2000 un romancier africain, Ahmadou Kourouma pour son roman Allah n’est pas obligé (Seuil, 2000) sur la thématique des enfants soldats. ndlr Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P54-71.qxd 23/02/07 19:11 Page 61 Littératures 54 I 61 Code Cool Hunter, 17 ans, gagne son argent de poche en traquant les nouvelles modes dans New York pour le compte de grandes marques. Bien qu’il joue le jeu avec plaisir, il a conscience des mécanismes de l’univers mercantile dans lequel il évolue et en connaît la hiérarchie : au sommet, les innovateurs, inventeurs d’un style, puis les initiateurs qui le propagent. Viennent ensuite les investisseurs, qui l’achètent à prix d’or avant les simples consommateurs en bas de la pyramide. Mais un élément vient perturber la routine d’Hunter. Il s’appelle Jennifer, c’est une innovatrice et elle lui plaît. Hunter l’invite à une séance de « testing » organisée par sa patronne Mandy, où l’esprit affranchi et le goût de la jeune fille font fureur. C’est le début d’une tornade d’événements, qui conduisent les deux jeunes gens sur les traces de Mandy, disparue, et d’une mystérieuse organisation qui mène de grandes campagnes de publicité pour détourner les codes du marketing et semer le trouble dans l’esprit des consommateurs « moutonnants ». Dans un style percutant, Scott Westerfeld signe un roman accrocheur, palpitant, plein de références culturelles et historiques. Le thème principal, nos codes de consommation, est très bien servi par ses personnages. Hunter est intégré dans cet univers de « branchitude » consumériste, mais perçoit les ressorts de la carapace sociale qu’il s’est construite, vaine béquille de ses faiblesses. Plutôt que de présenter une vision manichéenne du marché de la mode, l’auteur l’étudie de l’intérieur. Il en ressort une ironie permanente, qui loin de jeter le discrédit sur les personnages, en accentue les reliefs et aspérités. Ils sont à l’image de notre société contemporaine : futiles mais conscients. L’omniprésence des marques au fil des pages - jamais citées, toujours évoquées par leurs signes distinctifs - peut lasser jusqu’à la nausée. Là encore, Westerfeld reflète les outrances du marketing qui rassasie le consommateur de possessions inutiles. Humour, références et rebondissements se mêlent avec brio et le roman emporte l’adhésion. ■ Cécile Burgard Lecture Jeune - mars 2007 Scott Westerfeld Trad. de l’anglais (Etats-Unis) par Fanny Ladd et Alice Cotin Panama, 2006 287 p. 15 € 2-7557-0090-4 Mots clés Culte de l’apparence Consommation LJ121_P54-71.qxd 23/02/07 19:11 Page 62 62 Parcours de lecture Lecteurs confirmés BD 55 I Inio Asano Trad. du japonais par Thibaud Desbief Dargaud/Kana, 2006 (Made in) 202 p. 10 € 2-50500-009-3 2-50500-010-7 Mots clés Japon Société Quotidien Ces recueils de courtes nouvelles, reliées entre elles par la dernière image, abordent des thèmes qui parleront aux adolescents à savoir la précarité, la mort, le difficile équilibre entre rêve et réalité et les difficultés du quotidien. Tel une abeille, le lecteur butine de nouvelles en nouvelles des informations sur la société japonaise contemporaine, plus précisément sur la vie des étudiants et le malaise de la jeunesse urbaine. Les dessins réalistes au trait fluide et les plans cinématographiques en longues cases horizontales facilitent la lecture, qui oscille entre légèreté et profondeur psychologique. Le leitmotiv de ce manga semble être la question « Pourquoi je vis ? ». Attention, l’auteur ne cherche nullement à apporter des solutions et c’est tant mieux. Sa lucidité, son ironie et son cynisme poussent le lecteur à ne pas perdre de vue ses propres aspirations. Il existe bien sûr autant de réponses que de personnes et de situations. À chacun sa vie, à chacun ses réponses ! ■ Sonia Seddiki 56 I Kris Etienne Davodeau Ill. d’Etienne Davodeau Futuropolis, 2006 64 p. 15 € 2-75480-010-7 Genre Documentaire Histoire Mots clés Monde ouvrier Engagement Un monde formidable !, T.1 et T.2 Un homme est mort « Heu… y’a un homme qui est mort… Edouard Mazé qu’il s’appelait… » En 1950 à Brest, les ouvriers employés à la reconstruction de la ville se mettent en grève. Lors des manifestations, les affrontements avec la police sont violents. Les blessés sont nombreux et le 17 avril, le jeune Edouard Mazé est tué. René Vautier, cinéaste engagé, est contacté par les grévistes. Assisté de Désiré et Ti Zef, il filme les événements qui agitent la ville. Chaque nuit, le film réalisé est projeté sur les chantiers en grève et le poème d’Eluard, Un homme est mort, lu à l’assemblée. Le documentaire de René Vautier n’a pas résisté à ses multiples projections, c’est la raison pour laquelle est né le projet de cette bande dessinée. Kris, son instigateur, mène une importante recherche documentaire dès 2003. Il rencontre des témoins, repère les lieux… Puis il s’agit d’écrire les parties « manquantes ». Le résultat est une réussite. On est happé par le récit et en complète empathie avec les personnages. On ressent également la sincérité et l’envie des auteurs de servir cette histoire-là. Ils livrent un récit éminemment politique et Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P54-71.qxd 23/02/07 19:11 Page 63 63 tout simplement bouleversant. ■ Hélène Sagnet La bande dessinée est suivi d’un dossier documentaire très complet qui éclaire utilement le propos des auteurs. ndlr 57 I S. Gipi consacre son dernier ouvrage à son père décédé. Comment parvient-il à évoquer cet homme, que nous dit-il de lui et de leur relation ? Il compose un voyage au fil de ses propres souvenirs et d’histoires racontées par son père. Ainsi le lecteur est-il transporté de la Seconde Guerre mondiale vécue par les parents de Gipi à l’enfance de l’auteur. Une fois encore, l’artiste italien nous livre avec talent une histoire, celle de son père. La raconter semble être une façon pour lui de revivre et de comprendre la relation qui fut la leur. Il interroge par ailleurs les notions de mémoire et de transmission : qu’est-ce que le souvenir ? Les instants racontés sont-ils les instants vécus ? Il installe peu à peu le lecteur dans une forme d’incertitude nécessaire à son propos. L’ouvrage se distingue des précédents par une narration totalement éclatée. Pas de repères ici, on passe d’une époque à l’autre, d’un souvenir à l’autre au gré des mots et des sensations. La poésie et la force de l’écriture en sont renforcées. La gamme chromatique se fait aussi plus douce et chaleureuse qu’à l’accoutumée : « J’ai souhaité des couleurs accueillantes pour les personnages », explique l’artiste. S. est un ouvrage intime et exigeant, dont la réflexion tend à l’abstraction. Il est à proposer à de très bons lecteurs. ■ Hélène Sagnet Nous vous invitons à lire la rencontre avec Gipi en page 4. ndlr 58 I La cité de Dieu A l’occasion d’un projet de reportages croisés lancé par l’Institut Goethe de Berlin, trois illustrateurs israéliens se sont rendus en Allemagne, et trois illustrateurs allemands en Israël. Jens Harder est l’un d’entre eux. Reportage, récit journalistique et carnet de voyage en bandes dessinées : cet ouvrage est inclassable. C’est avant tout un livre d’images, qui donne à voir les trois religions dans le microcosme de Jérusalem. Ici, l’expression des « marchands du temple » prend tout son sens ! Parmi les pèlerins venus du monde entier, les mystiques se mêlent aux touristes, les prêtres se prennent en photo, un rabbin téléphone devant le Mur des Lamentations… Beaucoup d’humour et d’ironie dans ces dessins si finement croqués, à l’esprit laïque et plutôt critique. En page de gauche, une scène en gros plan d’un gris brun alterne avec un récit en bande dessinée très Lecture Jeune - mars 2007 Gipi Trad. de l’italien par Hélène Dauniol-Remaud Vertige Graphic-Coconino Press, 2006 (Moby Duck) 112 p. 17 € 2-84999-042-6 Genre Roman graphique Autobiographie Mots clés Relation père/fils Deuil Mémoire Jens Harder Trad. de l’allemand par Jean-Paul Jennequin Editions de l’An 2, 2006 61 p. 17,50 € 2-84856-066-5 Genre Reportage Carnet de voyage Mots clés Israël Jérusalem LJ121_P54-71.qxd 64 23/02/07 19:11 Page 64 Lecteurs confirmés vivant sur la ville. En page de droite, le lecteur a rendez-vous avec l’histoire et le quotidien. On retient surtout la vie trépidante de la cité, la foule, ses bruits, ses odeurs, la paix des communautés qui tient du miracle. A la fois document sociologique et caméra cachée, le reportage s’attarde sur les différents quartiers, lieux de culte et de pèlerinage, sur la place réservée aux religieux, les fiefs des commerçants… Cette lecture plaisante apportera beaucoup aux adolescents, pour peu qu’ils soient réceptifs aux détails savoureux des illustrations. ■ Cécile Robin-Lapeyre 59 I Takao Saito Trad. du japonais par Anne-Sophie Thévenon Glénat, 2006 (Seinen) 1328 p. 20 € 2-7234-5215-8 Genre Seinen Manga Manga Gekika (manga dramatique des années 1960-1970) Policier Mots clés Politique Années 70 Best 13 of Golgo 13 Golgo 13, alias Duke Togo, est un tueur à gages hors pair. Cet homme mystérieux, craint et respecté de tous accomplit le sale boulot dans le monde politique complexe des années 1970. Il parcourt le monde entier pour accomplir sa mission : maintenir un certain équilibre. Un mot sur cette série culte pour mieux apprécier l’initiative de ce best of. « Golgo 13 » est une série fleuve qui compte à ce jour 142 volumes ! Dans les années 1960, son auteur Takao Saito s’entoure de nombreux assistants afin d’impulser une nouvelle manière de travailler en créant son studio. Il impose la loi de l’exactitude comme Hergé avec ses « Aventures de Tintin ». La documentation devient et reste une marque de fabrique de la série « Golgo 13 ». Ce James Bond noir, modèle d’anti-héros au Japon, permet d’aborder de manière ingénieuse le contexte international, les courants économiques et les dernières technologies de l’époque. Sous ses apparences de « gros dur », Duke Togo est un personnage complexe comme le prouve le mystère autour de son identité, que l’auteur aime à brouiller en multipliant les fausses pistes. Il incarne l’idéal de l’accomplissement de soi, ce vers quoi tendent tous les héros de Shonen. Pourquoi ce best of ? L’initiative venue du Japon a donné la possibilité aux lecteurs d’élire leurs treize histoires favorites pour en faire une compilation. Le résultat, un pavé qui pèse près de deux kilos, réjouira les fans de « Golgo 13 » et les amateurs d’ambiances sombres. Les bibliothécaires et documentalistes apprécieront de posséder un échantillon conséquent de cette série culte indispensable. ■ Sonia Seddiki Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P54-71.qxd 23/02/07 19:11 Page 65 BD 60 I Le chat du rabbin : Jérusalem d’Afrique, T. 5 Quel plaisir de retrouver les truculents personnages du Chat du Rabbin ! L’épicurien rabbin Sfar, sa fille la pulpeuse Zlabya, qui mérite mieux que son austère de mari, le chat surtout qui retrouve ici la parole et nous régale de ses aphorismes et commentaires, à la manière d’un chœur antique. Plus inspiré que dans son précédent album, Joann Sfar leur adjoint de nombreux personnages tout aussi pittoresques : un peintre juif ashkénaze débarqué de Russie dans une caisse de livres, un Russe blanc décadent qui a fui comme lui le régime soviétique, enfin le cheikh Sfar, musicien, cousin du rabbin et cependant musulman. Tout ce petit monde décide de partir à la recherche de la Jérusalem d’Afrique, en Ethiopie. Commence alors une expédition digne de la Croisière noire, où nos protagonistes rencontrent successivement l’intégrisme musulman dans un campement de Touaregs (les juifs d’Ethiopie ne vaudront guère mieux), le racisme primaire chez un Français réfugié en Ouganda, la bêtise au Congo belge en la personne d’un reporter prétentieux (excellente parodie de Tintin !), l’amour pour finir entre notre peintre et une splendide jeune femme noire. Joann Sfar délivre ici un message de tolérance qui s’adresse à tous, avec un talent et un humour d’une grande finesse. Le second degré est omniprésent, dans les illustrations souvent référentielles (le peintre russe ressemble au Petit Prince) et le texte savoureux. Le trait se fait tour à tour luxuriant, dépouillé, parodique ou érotique selon les situations. Les grands adolescents devraient adorer. ■ Anne Lanchon Autre avis : Nous voici repartis avec le chat du rabbin, qui pour l’occasion a retrouvé la parole. Toujours iconoclaste et irrévérencieux, il parvient dans cet épisode à dédramatiser des situations ou des discours d’intolérance, car il s’agit bien de cela : les intolérances religieuses (chacun s’y reconnaîtra !) et leur absurdité. Les personnages nous sont connus : les vieux sages pas si loin d’une certaine philosophie de la vie, le jeune rabbin extrémiste, son épousée qui se languit. Le nouveau venu est un juif de Russie qui les mène vers la Jérusalem d’Afrique puisque telle est la quête. Il sera le catalyseur de toutes les dérives du culte. Les gros plans sont superbes et les couleurs choisies chaudes, le trait tremblant de Joann Sfar nous montre des visages floutés mais des regards qui en disent long. Le chat, omniscient tel un garde-fou, nous renvoie sans arrêt à notre humanité. Un grand bonheur de lecture, pas facile en raison de la densité du texte et du dessin, mais à conseiller vivement ! ■ Michelle Charbonnier Lecture Jeune - mars 2007 Joann Sfar Dargaud, 2006 (Poisson pilote) 84 p. 12,50 € 978-2205-05868-0 Mots clés Afrique Intolérance Racisme 65 LJ121_P54-71.qxd 66 23/02/07 19:11 Page 66 Lecteurs confirmés 61 I Lewis Trondheim Delcourt, 2006 (Shampooing) 128 p. 11,50 € 2-7560-0411-1 Genre Autofiction Mots clés Ecriture Les petits riens de Lewis Trondheim : La malédiction du parapluie, T.1 Tour à tour voyageur hypocondriaque, père de famille dépassé et Attila des espaces verts, Lewis Trondheim, scénariste et illustrateur prolifique, poursuit sa quête aux confins du quotidien et de l’insignifiance. Ce premier volume d’une nouvelle série, « Les petits riens de Lewis Trondheim », se lit comme la suite naturelle des quatre volumes de ses « Carnets de bord » parus précédemment à l’Association. Une différence de taille est à noter : ses chroniques sont dorénavant en couleurs et à l’aquarelle. On retrouve donc ici le personnage d’autofiction cher à Trondheim, son homme à la tête d’oiseau, paranoïaque, désabusé et facétieux, attiré par les petits détails que personne ne remarque. L’auteur manie avec brio la forme courte de la planche dessinée. La couleur, elle aussi très maîtrisée, est à l’image des anecdotes qu’il nous livre, feutrée, un brin nostalgique, pleine de finesse. Du sourire amusé à l’éclat de rire, le recueil propose une jolie palette d’humour. Les lecteurs confirmés apprécieront l’autodérision du narrateur, ses aventures d’anti-héros aux quatre coins du globe, ses casquettes multiples : illustrateur reconnu, père déboussolé, être humain bourrelé de doutes, éternel adolescent. Ce personnage, qui fait du décalage une forme de poésie, est aussi attachant pour ses forces que pour ses failles. Il devient vite un complice indispensable. ■ Cécile Burgard Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P54-71.qxd 23/02/07 19:11 Page 67 67 Parcours de lecture Lecteurs confirmés Documentaires 62 I Dico des signes et symboles religieux Auteur de romans historiques et de documentaires sur la religion, Patrick Banon étudie les sciences religieuses et les systèmes de pensée à l’École pratique des hautes études. Dans cet ouvrage, il montre que la plupart des signes religieux sont partagés par l’ensemble des croyances, et appartiennent au patrimoine spirituel mais aussi culturel et social. L’étude se penche sur toutes les religions, mais développe surtout les exemples puisés dans les trois grands monothéismes. Au lecteur profane, Patrick Banon explique la différence entre signe et symbole religieux. Le premier est porteur de plusieurs sens, il possède un pouvoir spirituel et il est destiné à produire un effet, tandis que le deuxième exprime seulement l’appartenance à une communauté. A la différence du symbole décidé par les hommes, le signe religieux émane directement d’un ordre divin, ce qui ne l’empêche pas d’avoir une valeur profane. Après cette introduction détaillée, l’auteur analyse la polysémie des signes et symboles : les éléments naturels (ciel, étoiles, arc-en-ciel, feu) mais aussi les vêtements, les couleurs, les signes du corps (chevelure, barbe, tatouage), les objets spirituels (crucifix, anneau), les animaux. La plupart des symboles ont évolué avec le temps, et parfois totalement changé de sens, telle la swastika, symbole religieux hindou évoquant la régénération de la vie, devenue avec les nazis symbole de destruction et de mort (croix gammée). L’ouvrage manifeste la volonté de clarifier les sujets polémiques, comme le voile. Il sera utile aux adolescents pour les initier aux religions, absentes des programmes scolaires. La seule réserve concerne le titre, absolument trompeur : il ne s’agit pas d’un dictionnaire alphabétique l’éditeur aurait-il imposé ce titre accrocheur ? - mais d’un ouvrage plus riche, à lire en continu même s’il est possible d’en faire une lecture « zapping ». Les plus pressés peuvent se référer à la précédente publication de Patrick Banon, Signes et symboles religieux, parue en 2005 chez Flammarion (ABCdaires). Elle a servi de base à la rédaction de celle-ci. Par ailleurs, l’illustration introduit une distanciation – simplification, humour – par rapport au sujet, fort appréciable. Pour tout public. ■ Cécile Robin-Lapeyre Lecture Jeune - mars 2007 Patrick Banon Ill. d’Anne-Lise Boutin Actes Sud junior, 2006 (Les petits nécessaires de culture) 93 p. 13,80 € 2-7427-6254-X Mots clés Religion Sémiologie Symbole LJ121_P54-71.qxd 68 23/02/07 19:11 Page 68 Lecteurs confirmés 63 I Jean-Baptiste Charcot Postface de Pierre Escudé José Corti, 2006 (1ère édition : 1906) 365 p. 20 € 2-7143-0927-5 Genre Carnet de voyage Mots clés Explorateur Antarctique Belle idée que cette réédition du « récit anecdotique » publié par JeanBaptiste Charcot à son retour de l’expédition qu’il conduisit dans l’Antarctique de juin 1903 à mai 1905. Ce récit se compose principalement de son journal de bord, qu’il enrichit d’une longue introduction où nous découvrons les objectifs et les acteurs de cette formidable aventure. Il s’agit, écrit-il, d’une curiosité de savant - découvrir des terres nouvelles, les cartographier, inventorier la faune, étudier la météorologie… -, mais aussi d’une envie de damer le pion aux Anglais et aux Nordiques déjà bien engagés dans ces mers. Le Français au Pôle Sud est un journal écrit pour soi, où Charcot relate ses difficultés et ses joies avec sobriété et modestie. Durant ces vingt-deux mois d’héroïsme permanent, c’est toujours ses compagnons qu’il met en avant, qu’il s’agisse de pomper après une énorme avarie ou de pousser la baleinière embourbée dans la glace fondante. Malheureusement, le lecteur a beaucoup de mal à le suivre en raison d’un cruel défaut de cartes. Il se perd dans ses allées et venues, le récit en devient répétitif. Et pourtant ! La langue est belle, claire, souvent comique quand Charcot évoque ses démêlés avec les pingouins ou les icebergs. Elle se fait lyrique et chaleureuse dès qu’il est question d’homme. ■ Michelle Brillatz Réseau de lecture : on complétera ce témoignage avec le beau documentaire de Serge Kahn, Jean-Baptiste Charcot, explorateur des mers, navigateur de pôles (Glénat, 2006), illustré avec des documents de la famille Charcot. A noter que l’Année polaire internationale débute en mars 2007. Elle comportera une traversée terrestre de l’Antarctique dont Charcot aurait rêvé. ndlr 64 I Catherine Clément André Lewin Liana Lévi, 2006 (L’autre guide) 179 p. 16 € 2-86746-424-2 Genre Guide touristique Mots clés Inde Le Français au Pôle Sud L’Inde des Indiens Famille, condition des femmes, religions et castes, économie, histoire, politique, littérature… : tous les aspects de cet immense pays sont passés en revue dans cet « autre guide ». Laissant de côté la description touristique des villes et monuments, les auteurs se proposent de donner un tableau vivant et coloré de l’Inde d’aujourd’hui avec ses richesses, ses atouts et ses faiblesses. L’ouvrage, bien rédigé et bien présenté, est abondamment illustré. Il s’achève par une section « Repères », où l’on trouve entre autres une filmographie, une bibliographie, un choix de sites web, un bref aperçu des institutions politiques, une chronologie, un petit glossaire et un index. Cet ouvrage est idéal pour un premier contact avec le pays de Gandhi. Il expose l’essentiel sous une forme attrayante, alors que dans les guides classiques ces sujets souffrent souvent d’une présentation limitée et austère. ■ Jean Ratier Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P54-71.qxd 23/02/07 19:11 Page 69 69 Parcours de lecture Ouvrages de référence 65 I Pourquoi j’aime la bande dessinée ? Une soixantaine d’auteurs, réunis par l’éditeur Delcourt à l’occasion de son vingtième anniversaire, expriment avec des mots et des images leur amour pour la bande dessinée. Le résultat est surprenant, tantôt sérieux, tantôt léger. Il mêle avec bonheur bulles et prose, car lorsqu’il s’agit d’évoquer des souvenirs d’enfance, certains auteurs préfèrent la plume. On notera l’intrusion de Vincent Ravalec, qui frustré de n’avoir jamais su dessiner trouve le moyen de nous exposer ses premières ébauches. « J’aime la bande dessinée parce qu’elle est un art mineur, adolescent », écrit Jean-Claude Denis. Ce plaidoyer a retenu notre attention dans cet album en apparence promotionnel, il nourrira la réflexion des médiateurs : lire des bandes dessinées, n’est-ce pas conserver une part d’adolescence ? Cet ouvrage singulier offre aux plus réticents l’occasion de comprendre ce qui unit autour d’une même passion lecteurs et auteurs. ■ Elise Hoël 66 I Collectif Delcourt, 2006 94 p. 9,80 € 2-7560-0442-1 Genre Témoignage Mots clés Bande dessinée Le roman pour adolescents aujourd’hui : écriture, thématiques et réception Daniel Delbrassine a soutenu en 2005 à l’université de Liège une thèse intitulée « Le roman contemporain adressé aux adolescents ». Elle est à l’origine de cet ouvrage, qui repose sur l’analyse d’un corpus de 247 livres parus entre 1997 et 2000 (L’école des loisirs, Gallimard jeunesse, Seuil jeunesse, Flammarion jeunesse). L’auteur s’intéresse dans une première partie à la réalité éditoriale du roman pour adolescents. Il démontre la constante recherche de légitimité littéraire, puis à partir de 1995 - année de lancement de la collection « Chair de poule » et publication du premier tome d’Harry Potter en 1998 -, alors qu’un champ autonome semble s’être constitué, la polarisation de l’offre. Un chapitre passionnant consacré aux influences étrangères – littérature anglo-saxonne, suédoise, allemande – sur le roman francophone nous donne l’occasion de revenir sur des œuvres fortes et pas toujours traduites. L’auteur s’interroge dans un second temps sur les rapports entre la Lecture Jeune - mars 2007 Daniel Delbrassine CRDP de l’académie de Créteil - La Joie par les livres, 2006 (Argos références) 444 p. 23 € 2-86918-191-4 2-86918-191-5 Mots clés Littérature de jeunesse LJ121_P54-71.qxd 70 23/02/07 19:11 Page 70 Ouvrages de référence littérature générale et celle destinée aux adolescents. Le corpus étudié montre en effet une forte proportion d’auteurs « mixtes ». Daniel Delbrassine mène une analyse comparative des textes de ces auteurs, puis d’ouvrages remaniés pour la jeunesse, dans une démarche où il questionne les spécificités linguistiques, narratives et littéraires. Il ne constate aucun abaissement du niveau linguistique ou narratif dans les romans adressés aux adolescents. Dans une dernière partie enfin, le corpus est analysé sous l’angle des stratégies de séduction du lecteur et du traitement des sujets tabous, et pose la question de l’autocensure. Cet ouvrage offre un panorama brillant et inédit du roman contemporain destiné aux adolescents. Il éclaire et nourrit notre réflexion par une étude littéraire approfondie et structurée. Ajoutons qu’il se lit avec un grand plaisir, grâce à sa clarté et son accessibilité. Sans aucun doute un ouvrage indispensable. ■ Hélène Sagnet 67 I Evelyne Duret Autrement, 2006 (Généalogies) 96 p. 10 € 978-2-7467-0892-2 Mots clés Généalogie Famille Guider les jeunes sur la piste de leurs ancêtres Devenue une véritable mode, la généalogie ne cesse de faire des émules : on ne compte plus le nombre de « cousinades » et de retrouvailles qui passionnent les familles en France. Ce livre se présente comme un guide pour les adolescents mais s’adresse en priorité aux médiateurs. L’ouvrage définit le rôle et l’utilité de la généalogie, et - point fort - explique comment l’introduire en milieu scolaire ou comme activité de loisirs. C’est un manuel pratique, qui propose par exemple un modèle de lettre pour une demande d’actes auprès de l’Etat civil. Il suggère également des idées pour insérer les arbres généalogiques au sein des cours d’histoire, de géographie ou d’éducation civique. L’auteur, historienne, anime un atelier de généalogie dans un collège du Vald’Oise. Chaque page est émaillée de témoignages qui offrent deux niveaux de lecture : une lecture approfondie de la méthodologie, et une lecture-zapping des différentes démarches. La généalogie peut jouer un rôle important dans la construction de la personnalité, mais aussi dans l’intégration des jeunes. L’adolescent devient l’historien de sa famille, il découvre en même temps la démographie et l’onomastique (science des noms de famille), s’ouvre aux différents médias (film, site Internet…). Ce documentaire offre de nombreuses pistes. Il est regrettable que la bibliographie et les adresses ne soient pas reprises en fin d’ouvrage. Un oubli, probablement ! ■ Cécile Robin-Lapeyre Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P54-71.qxd 23/02/07 19:11 Page 71 En savoir plus Formations page 72 Informations page 74 LJ121_P72-78.qxd 23/02/07 19:12 Page 72 72 En savoir plus Formations Lecture Jeunesse Programme Premier semestre 2007 Nos stages et journées d’études se déroulent à Paris à des dates prédéterminées. Ils sont également proposés sur site à la demande des bibliothèques municipales, bibliothèques départementales de prêt, IUFM, associations… Notre catalogue de formations est disponible sur simple demande. Stages : Savoirs de base ● Les romans à l’adolescence niveau « repères » Problématique Comment se repérer dans la production d’ouvrages de fiction pour proposer aux jeunes des livres adaptés à leurs parcours de lecteurs ? - Maîtriser le fonctionnement narratif et graphique de ces ouvrages - Choisir et comparer les titres en vue d’une politique d’acquisition raisonnée Dates : 28-29-30 mars 2007 et 27-28-29 juin 2007 ● La presse et les adolescents Objectifs - Définir les enjeux de la lecture à l’adolescence - Identifier les collections « pour » adolescents ainsi que des titres de littérature générale pouvant susciter leur intérêt - Découvrir des univers d’auteurs - Analyser et critiquer un livre, en dépassant le simple jugement de valeur personnel, en gardant à l’esprit le public auquel le roman est destiné Dates : 21-22-23 mars 2007 Problématique La lecture, lorsqu’elle parvient à se faire l’écho de centres d’intérêts que les adolescents choisissent librement, bénéficie d’un nouvel engouement : c’est le cas de la presse magazine. Que lisent les adolescents ? Comment cette presse s’adresse-t-elle à eux ? Comment utiliser ce support en bibliothèque et le relier à d’autres ? Objectifs et 20-21-22 juin 2007 ● Les mangas niveau « repères » Problématique La France est le second pays lecteur de mangas après le Japon. Les jeunes se sont emparés de ces livres dont les héros et valeurs, étonnamment, leur ressemblent. Comment mieux appréhender la qualité littéraire et graphique de ces ouvrages ? Comment se repérer dans les courants et les genres pour prendre une place de conseil auprès des jeunes ? - Appréhender le fonctionnement et les enjeux de la presse quotidienne nationale et régionale et de la presse magazine - Identifier les grands groupes de presse et les titres destinés aux jeunes - Analyser et mettre en perspective (forme, discours, …) les titres de presse « ado » Dates : 6-7-8 juin 2007 Objectifs - Acquérir des clés de compréhension de la société japonaise - Situer les grands courants, les genres, les auteurs incontournables - Identifier les éditeurs, les collections, les séries ● P P I o t c b c r O - - D ● P L g d d l O - D Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P72-78.qxd 23/02/07 19:12 Page 73 73 Inscriptions Chantal Viotte Tél. : 01-44-72-81-50 - [email protected] Renseignements pédagogiques Hélène Sagnet - Michelle Charbonnier Tél. : 01-44-72-81-52 Tarifs des stages Tarifs de la journée d’étude 405 € TTC (Prise en charge de l’employeur) 305 € TTC (Prise en charge personnelle) 60 € TTC (Prise en charge de l’employeur) 30 € TTC (Prise en charge personnelle) Journée d’étude ● Les documentaires et les adolescents ● Le documentaire dans tous ses états Problématique Littérature, bande dessinée, photographie, cinéma, télévision… Pour leurs recherches scolaires, les adolescents utilisent Internet avant de se tourner vers le livre documentaire, oubliant qu’il peut constituer une étape du repérage tout en suscitant le plaisir de lire. Comment prendre en compte la demande de renseignements scolaires et le besoin de découvertes personnelles dans la constitution d’un fonds qui soit à la fois cohérent et repérable ? Objectifs - Développer une politique d’acquisition qui prenne en compte les programmes scolaires, les ressources d’Internet et la place des documentaires « plaisir » - Identifier les collections jeunesse ainsi que certaines collections généralistes accessibles aux adolescents - Comparer les documentaires portant sur un même thème et évaluer leur qualité Dates : 30-31 mai et 1 er Interroger le rapport au réel. Le genre documentaire suscite un regain d’intérêt. Ses formes se diversifient et de nouveaux médias s’en emparent. Le succès des docu-fictions dans le domaine télévisuel en est une juste illustration. Comment expliquer cet essor nouveau et l’engouement du public ? Quelles sont aujourd’hui les frontières du genre ? Date : 24 mai 2007 juin 2007 ● La bande dessinée Problématique La bande dessinée est une forme littéraire d’une grande créativité. Fondée sur la force du rapport du texte et de l’image, elle offre des pistes d’entrée dans la lecture riches et singulières. Comment la valoriser et l’utiliser en bibliothèque ? Objectifs - Identifier les titres et collections susceptibles d’intéresser un public adolescent - Découvrir des univers de création singuliers - Comprendre le fonctionnement narratif (et notamment le rapport texte / image) - Analyser, critiquer et conseiller une bande dessinée Dates : 13-14-15 juin 2007 Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P72-78.qxd 23/02/07 19:12 Page 74 74 En savoir plus Informations Conférences • « Editer avec Internet ? » : La BNF organise le 15 mars dans le cadre des « Ateliers du livre » une journée d’étude pour débattre de l’évolution du métier d’éditeur, depuis la parution de L’Encyclopédie de Diderot jusqu’à l’encyclopédie en ligne Wikipédia. Entrée libre. Site : www.bnf.fr • « Ecritures sans frontières » : L’association Lignes d’écritures et l’INS-HEA (Institut national supérieur de formation et de recherche pour l’éducation des jeunes handicapés et les enseignements adaptés) organisent du 20 au 22 avril à Suresnes (92) un cycle de conférences autour de la création littéraire, les lieux et ateliers d’écriture. Site : www.lignesdecritures.org Exposition • Le 13e Festival du livre jeunesse d’Annemasse aura lieu du 31 mai au 2 juin sur le thème « D'où je viens ? ». Site : www.mairie-annemasse.fr Prix • Le 34e Festival de la BD d’Angoulême a décerné le Prix du meilleur album à l’auteur de mangas Shigeru Mizuki pour NonNonBâ (Cornélius) et le Prix jeunesse 9/12 ans à l’album de Fabien Vehlmann et Bruno Gazzotti, La disparition, premier tome de la série « Seuls » (Dupuis). Site : www.bdangouleme.com Revues • La revue InterCDI n°208 (juillet-août) publie un numéro spécial sur les nouvelles pratiques de lecture. Site : www.intercdi-cedis.org • « BD reporters » : Croquis, planches et photos invitent à découvrir une bande dessinée proche du reportage ou du carnet de voyage. Jusqu’au 23 avril au Centre Pompidou, de 11h à 19h. Site : www.centrepompidou.fr Sélections Festivals et salons • Tirelivre n°11. L’édition 2006 des livres analysés par la bibliothèque de Caen est accessible sur le site ville-caen.fr/tirelivre • Le 27e Salon du livre de Paris ouvre ses portes du 23 au 27 mars avec l’Inde comme invitée d’honneur. Site : www.salondulivreparis.com • Le 2e Festival du multimédia jeunesse. Organisé par l’association Multimédia jeunesse, cet événement familial et gratuit se tiendra les 23 et 24 mars à Joinville-Le-Pont (94). Site : www.festival-multimédia-jeunesse.fr • La 8e Fête du livre jeunesse de Villeurbanne aura lieu les 28 et 29 avril. Sa thématique, "Je me souviens… de demain", aborde l’avenir de la planète, de la paix et de la société. Site : www.mairie-villeurbanne.fr • La sélection 2006 de l’association Arple est disponible par correspondance. Contact : [email protected] Divers • Le projet « Passerelle » de la médiathèque de SaintCloud et de l’espace Jeunes-Cadr’à Bulles (92) propose aux 14-20 ans un choix de livres « passerelle », exposés sur des présentoirs qui circuleront d’un lieu à l’autre. Une bibliographie correspond à cette sélection. Contact : [email protected] • Le Festival du livre de jeunesse et de bande dessinée de Cherbourg-Octeville fête ses 20 ans du 24 au 27 mai sur le thème "les Mots". Site: www.festivaldulivre.com Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P72-78.qxd 23/02/07 19:12 Page 75 Index Auteurs p. 76 Titres p. 77 Genres et mots clés p. 78 LJ121_P72-78.qxd 23/02/07 19:12 Page 76 76 Index Auteurs A notice B notice Abouet, Marguerite Achile Adachi, Mitsuru Allemand, Sylvain Antoine-Andersen, Véronique Asano, Inio Banon, Patrick Barraqué, Gilles Beddor, Franck Blanchard, Anne Bottero, Pierre Boutin, Anne-Lise Boyne, John C Casanave, Daniel Cerisier, Emmanuel Chaine, Sonia Charcot, Jean-Baptiste Charon, Séverine Cizo Clément, Catherine Collins, Luke Collombat, Isabelle D Dana, Jean-Yves Daniel Raby, Lucy Davodeau, Etienne Delbrassine, Daniel Desbiolles, Maryline Dodier, Alain Dorfman, Joaquin Duchazeau, Frantz Duffet, Sophie Duret, Evelyne Duvivier, Marianne 33 12 9 16 41 55 62 1 23 17 2, 24 62 25 notice 35 17 18 63 19 15 64 22 26 notice 20 32 56 66 27 10 28 38 21 67 34 E notice F notice G notice Etienne, J. Flint, James Fonteneau, Jean-Louis Gerbaud, Chantal Gipi Giroud, Frank Giulivo, Romuald H Harder, Jens Hofmann, Gert Hogan, Linda Horvath, Odön von J Jarry, Nicolas 11 22 11 42 57 34 3 notice 58 44 45 52 notice 12 K notice L notice M notice N notice O notice P notice R notice S notice T notice V notice W notice Kerr, Philip B. Khadra, Yasmina Konigsburg, E.L Krauss, Nicole Kris Lahiri, Jhumpa Larcenet, Manu Lewin, André McGruber, Aaron Maret, Pascale Meurisse, Catherine Meyer, Stephenie Miano, Léonora Mistral, Laure Morgan, Ben Mowll, Joshua Murat, Thierry Novi, Nathalie O’Faolain, Nuala Oubrerie, Clément Piquemal, Michel Rascal Rosenlow Eeg, Harald Saito, Takao Schlink, Bernhard Sfar, Joann Shadow, Nick Shakespeare, William Siety, Emmanuel Soda, Masahito Tezuka, Osamu Toume, Kei Trondheim, Lewis Vantal, Anne Védrines, Marc Vehlmann, Fabien Westerfeld, Scott Winshluss Witchalls, Clint Woodford, Chris 4 46 31 47 56 48 35 64 36 29 1 30 53 21 22 5 13 7 49 33 7 13 50 59 51 60 6 7 43 39 14 40 61 8 37 38 54 15 22 22 Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P72-78.qxd 23/02/07 19:12 Page 77 77 Index Titres A Aïzan Alice en exil Année douce amère (Une) Art à travers les âges (L’) Autre (L’)/Der Andere Aya de Yopougon, T.2 B Best 13 of Golgo 13 Boondocks (The) : T.1 à 5 Brüssli le conquérant C Cent pour cent technologique Chien dans un jeu de quilles (Un) Cinq conteurs de Bagdad (Les) Cité de Dieu (La) Code Cool Comme un poisson dans l’eau ! Contours du jour qui vient D Dans la peau des arbres Développement durable (Le) Dico des signes et symboles religieux Djinn bleu de Babylone (Le) E Echarde (L’) : T.1 et T.2 Elfe du Grand Nord (L’) Escale boréale Eté outremer (Un) Explorateurs racontés par les peintres (Les) notice 27 23 29 18 51 33 notice 59 36 11 notice 22 10 37 58 54 13 53 notice 26 16 62 4 55 40 N notice O notice P notice Nom pour un autre (Un) Notre philosophe Opération Zoridium Opération Typhon Pacte des Marchombres (Le) Peur au cinéma (La) Plus un mot Pourquoi j’aime la bande dessinée ? Power Promenade en architecture R 48 44 5 5 2 43 31 65 45 41 notice notice T notice W notice 52 35 63 25 50 17 67 H notice I notice J notice J’ai vécu la guerre d’Espagne Jérusalem d’Afrique 61 S notice Inde des Indiens (L’) Irène Hajos, survivante notice Malédiction du parapluie (La) Monde formidable (Un) !, T.1 et T.2 Mystères de Taisho (Les), T.1 19 G Hato, toujours plus haut !, T.1 H2 : T.1, T.2 Histoire de l’amour (L’) Histoire de Chicago May (L’) Homme est mort (Un) M 3 1 34 32 37 8 notice Garçon en pyjama rayé (Le) Grand frère Grand livre des sciences et inventions arabes (Le) Guider les jeunes sur la piste de leurs ancêtres notice Là-bas Loi du roi Boris (La) Rachel vit à Jérusalem, Nasser à Bethléem Roman pour adolescents aujourd’hui (Le) : écriture, thématiques et réception Roméo et Juliette notice F Fils de notre temps (Un) Fléau de Dieu (Le) Français au Pôle Sud (Le) L S. Sang sur le sable (Du) Sirènes de Bagdad (Les) Souffle de la hyène (Le) Subaru danse vers les étoiles, T.4 Tentation Trafic de fées Trop parfait pour être honnête Wizz et Buzz, T.1 21 66 7 57 6 46 24 39 30 12 28 15 14 9 47 49 56 64 42 20 60 Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P72-78.qxd 23/02/07 19:12 Page 78 78 Index Genres et mots clés Genres A Album Autobiographie Autofiction Aventure B Biographie C Carnet de voyage Chronique Mots clés notice 7 57 61 11 notice 49 notice 58, 63 33 A notice Adolescence 9, 13, 24, 26, 33 Adoption 3, 8, 32 Afrique 33, 60 Afrique noire 53 Algérie 8 Amitié 23, 24, 25, 28, 31, 32 Amour 7, 30, 51 Années vingt 40 Années soixante-dix 59 Antarctique 63 Anticonformisme 49 Antisémitisme 44 Architecture 41 Armée 52 Art 18, 19 D notice E notice B notice notice C notice Documentaire Enquête F Fantasy Fantastique G Guide touristique H Heroic fantasy Histoire Humour M Manga Manga-Gekika Manga-Josei Manga policier P Policier R 56 12 4, 12 6, 32, 37 notice 64 notice 2 34, 37, 56 1, 15 notice 14 59 39 40 notice 10, 59 notice Reportage Roman d’aventures 2, 4, 5, 24, 32, Roman d’apprentissage Roman fantastique Roman graphique 14, Roman historique 29, Roman illustré Roman intime Roman initiatique 2, 8, 23, 28, Roman policier Roman psychologique 3, 26, 31, S Seinen manga Shonen manga T Témoignage 58 45 45 30 57 52 1 27 53 31 50 notice 59 9 notice 20, 42, 65 Bande dessinée Base-ball Cinéma Condition féminine Consommation Conte Culpabilité Culte de l’apparence D Danse Dépression nerveuse Deuil Développement durable Dictature Dieu Différence Divorce E Ecologie Ecriture Enfance Engagement Environnement Etats-Unis Explorateur F Famille Famille recomposée Filiation G Gémellité Généalogie Génocide Guerre Guerre d’Espagne 65 9 43 49 54 38 50 54 notice 39 3, 35 57 16 1 35 24 13 Jalousie Japon Jérusalem L Langage Liban Liberté Littérature de jeunesse Loup-garou M Magie Mai 1968 Maltraitance Mémoire Mensonge Monde ouvrier Mondialisation Mort Mythologie N notice 4 67 53 35 20 I notice 18 42 47, 48 27 27, 47 64 45, 48 60 46 Lecture Jeune - mars 2007 51 14, 40, 55 58 notice 1 46 23 66 30 notice 4 34 10 57 28 56 16 7 14 notice Orphelin 2, 12 O P Paranormal Paris Peur Politique Power Prison Q Quotidien S 48, 50, 67 31 28 notice 44, 52 notice 45 47, 61 25 56 16 36 5, 19, 63 17, 38 37 58 21 Nazisme R notice Identité Imaginaire Immigration Inde Interculturalité Intolérance Irak J notice H Histoire Hongrie Islam Islande Israël Israël-Palestine Racisme Relation mère/fille Relation mère/fils Relation père/fils Religion Résilience Résistance notice notice 6 10 6, 43 59 45 31 notice 55 notice 36, 60 26 3 57 62 53 29 notice Science 5, 17, 22 Seconde Guerre mondiale 29, 42 Secret 51 Sémiologie 62 Shoah 25, 34, 42 Société 55 Symbole 62 T notice V notice Technologie Terrorisme Théâtre Vampire Vol Voyage 22 46 7 30 49 8 LJ121_P79-80.qxd 1/03/07 13:45 Page 79 79 Ours Lecture Jeune 190, rue du Faubourg Saint-Denis - 75010 Paris Tél. : 01 44 72 81 50 - Fax : 01 44 72 05 47 Courriel : [email protected] Hélène Sagnet (81-52) Anne Lanchon (81-53) Chantal Viotte (81-50) Françoise Ballanger, Patrick Borione, Nathalie Carré, Madeleine Couet-Butlen, Annick Lorant-Jolly, Bernadette Seibel, Véronique Soulé, Jean-Claude Utard [email protected] Jean-François Barbier-Bouvet, Brigitte de Bergh, Evelyne Bevort, Marie-Françoise Brihaye, Michelle Brillatz, Sandrine Brugot-Maillard, Cécile Burgard, Juliette Buzelin, Michelle Charbonnier, Christelle Crumière, Agnès Donon, Sébastien Féranec, Sophie Gentier, Gaëlle Glin, Laurence Guillaume, Elise Hoël, Anne Lanchon, Marie-Christine Lipani-Vaissade, Gilberte Mantoux, Valérie Médiano, Eric Peltier, Charlotte Plat, Jean Ratier, Cécile Robin-Lapeyre, Albert du Roy, Hélène Sagnet, Sonia Seddiki, Olivia de Villeneuve, Nicole Wells, Maryon Wable-Ramos L’ARTESIENNE - Dépôt légal : mars 2007 Tél. : 03 21 72 78 90 I.S.S.N. 1163-4987 C.P.P.P. n° 1107G79329 Revue éditée par l’association Lecture Jeunesse Association de loi 1901 déclarée le 4 janvier 1974 Agréée par le Secrétariat d’Etat Jeunesse et Sport le 27/01/1977 – N° 94.155 Cette revue est publiée avec le concours de la Mairie de Paris, du Centre national du livre et de la Direction du livre et de la lecture (Ministère de la culture) Lecture Jeune - mars 2007 LJ121_P79-80.qxd 23/02/07 80 Abonnement 19:14 Page 80 Bulletin de commande 2007 Nom, Prénom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Organisme : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Adresse : ...................................................................... Code Postal : Ville : ................................................................ ........................................................................... Email : ......................................................................... 2007 - Abonnement pour 4 numéros (Numéros 121 à 124) France : 40 € ■ Autres pays et DOM TOM : 44 € ■ Vente au numéro : 13 € Paiement par chèque joint Pour les organismes, facture en ….. exemplaires ■ ■ ■ Pour adhérer à l’association Lecture Jeunesse Je désire adhérer à l’association Lecture Jeunesse et soutenir son action en qualité de : Membre adhérent : 25 € ■ Membre bienfaiteur : 45 € et + ■ Date et signature Chers lecteurs, Lecture Jeunesse vous invite à découvrir son catalogue de formations du 1er semestre 2007 : Les romans à l’adolescence, niveau “repères” Les mangas, niveau “repères” La presse et les adolescents Les documentaires et les adolescents La bande dessinée Ainsi que la journée d’étude “ Le documentaire dans tous ses états” Retrouvez notre programme détaillé en pages 72 et 73 Lecture Jeune Les derniers numéros N°115 De la Poésie au Slam N°116 Parcours de lecteurs N°117 La transmission de la culture scientifique N°119 Les albums et les adolescents N°118 Culture manga N°120 La lecture est-elle une activité réservée aux adolescentes ?