Intimée Commission-scolaire-des-Patriotes
Transcription
Intimée Commission-scolaire-des-Patriotes
Dossier no 34854 COUR SUPRÊME DU CANADA (EN APPEL D’UN JUGEMENT DE LA COUR D’APPEL DU QUÉBEC) ENTRE : MARILYNE DIONNE APPELANTE (appelante) - et COMMISSION SCOLAIRE DES PATRIOTES INTIMÉE (intimée) - et COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES INTIMÉE (mise en cause) - et COMMISSION DE LA SANTÉ ET DE LA SÉCURITÉ DU TRAVAIL et FÉDÉRATION DES SYNDICATS DE L’ENSEIGNEMENT INTERVENANTES MÉMOIRE DE L’INTIMÉE COMMISSION SCOLAIRE DES PATRIOTES Henri A. Lafortune Inc. Tél. : 450 442-4080 Téléc. : 450 442-2040 [email protected] 2005, rue Limoges Longueuil (Québec) J4G 1C4 www.halafortune.ca L-3560-12 -2- Me Denis Lavoie Me Pierre Brun Me Graciela Iris Barrère Melançon Marceau Grenier et Sciortino Bureau 300 1717, boul. René-Lévesque Est Montréal (Québec) H2L 4T3 Me Marie-France Major Supreme Advocacy SRL Bureau 100 397, avenue Gladstone Ottawa (Ontario) K2P 0Y9 Tél. : 514 525-3414 Téléc. : 514 525-2803 [email protected] [email protected] [email protected] Tél. : 613 695-8855 poste 102 Téléc. : 613 695-8580 [email protected] Procureurs de l’appelante Correspondante de l’appelante Me René Paquette Me Paule Veilleux Me Julie Samson Me Yann Bernard Me Marie-Claude Pichette Langlois Kronström Desjardins, s.e.n.c.r.l. 28e étage 1002, rue Sherbrooke Ouest Montréal (Québec) H3A 3L6 Me Pierre Landry Noël et Associés s.e.n.c.r.l. 111, rue Champlain Gatineau (Québec) J8X 3R1 Tél. : 514 842-9512 Téléc. : 514 845-6573 [email protected] [email protected] [email protected] [email protected] [email protected] Tél. 819 771-7393 Téléc. : 819 771-5397 [email protected] Procureurs de l’intimée Commission scolaire des Patriotes Correspondant de l’intimée Commission scolaire des Patriotes -3- Me Marie-France Bernier Me Claude Verge Commission des lésions professionnelles Bureau 700 900, avenue d’Youville Québec (Québec) G1R 3P7 Me Alexandra Audet Noël et Associés s.e.n.c.r.l. 111, rue Champlain Gatineau (Québec) J8X 3R1 Tél. : 418 644-9602 Tél. : 418 644-7776 Téléc. : 418 528-6063 [email protected] [email protected] Tél. 819 771-7393 Téléc. : 819 771-5397 [email protected] Procureurs de l’intimée Commission des lésions professionnelles Correspondante de l’intimée Commission des lésions professionnelles Me Pierre Michel Lajeunesse Vigneault Thibodeau Bergeron Bureau 304 524, rue Bourdages Québec (Québec) G1K 7E2 Me Richard Gaudreau Bergeron, Gaudreau 167, Notre-Dame de l'Île Gatineau (Québec) J8X 3T3 Tél. : 418 266-4900 poste 5002 Téléc. : 418 266-4922 [email protected] Tél. : 819 770-7928 Téléc. : 819 770-1424 [email protected] Procureur de l’intervenante Commission de la santé et de la sécurité du travail Correspondant de l’intervenante Commission de la santé et de la sécurité du travail -4- Me Charles-David Brulotte Barabé Casavant (Services juridiques de la CSQ) 9405, rue Sherbrooke Est Montréal (Québec) H1L 6P3 Me Marie-France Major Supreme Advocacy LLP Bureau 1 397, avenue Gladstone Ottawa (Ontario) K2P 0Y9 Tél. : 514 356-8888 poste 2108 Téléc. : 514 356-0990 [email protected] Tél. : 613 695 8855 poste 102 Téléc. : 613 695-8580 [email protected] Procureur de l’intervenante Fédération des syndicats de l’enseignement Correspondante de l’intervenante Fédération des syndicats de l’enseignement -iTABLE DES MATIÈRES MÉMOIRE DE L’INTIMÉE COMMISSION SCOLAIRE DES PATRIOTES PARTIE I – EXPOSÉ CONCIS DE LA POSITION DE L’INTIMÉE ET EXPOSÉ DES FAITS PERTINENTS Page .........................................1 I.1 Exposé de la position de l’Intimée ........................................1 I.2 Les faits pertinents ........................................3 PARTIE II – EXPOSÉ CONCIS DES QUESTIONS EN LITIGE SOULEVÉES PAR L’APPELANTE .........................................9 PARTIE III – EXPOSÉ CONCIS DES ARGUMENTS .......................................10 III.1 La norme de contrôle judiciaire ......................................10 III.1.1 Le test de détermination de la norme de contrôle ......................................10 III.1.2 La norme de la décision raisonnable s’applique à l’analyse d’une question fondée sur la Charte ou inspirée du droit civil ......................................13 L’arrêt Doré ......................................14 III.1.3 III.2 L’application de la LSST à l’Appelante ......................................18 III.2.1 Objet de la LSST ......................................18 III.2.2 Champ d’application de la LSST ......................................19 III.2.3 Conditions d’admissibilité du droit au retrait préventif de la travailleuse enceinte ......................................21 III.2.4 Interprétation de la notion de « travailleur » au sens de la LSST ......................................22 - ii TABLE DES MATIÈRES MÉMOIRE DE L’INTIMÉE COMMISSION SCOLAIRE DES PATRIOTES Page III.2.5 Nécessité de détenir un « contrat de travail » ......................................24 III.2.6 Statut d’une « suppléante occasionnelle » ......................................28 III.3 Interprétation et application conforme aux droits et libertés protégés par la Charte québécoise ......................................30 PARTIE IV – ARGUMENTS À L’APPUI L’ORDONNANCE DEMANDÉE SUJET DES DÉPENS .......................................40 PARTIE V DE AU – ORDONNANCE DEMANDÉE .......................................40 PARTIE VI – TABLE ALPHABÉTIQUE DES SOURCES .......................................41 -1Mémoire de l’intimée CSP Exposé concis de la position de l’intimée et exposé des faits pertinents MÉMOIRE DE L’INTIMÉE COMMISSION SCOLAIRE DES PATRIOTES PARTIE I – EXPOSÉ CONCIS DE LA POSITION DE L’INTIMÉE ET EXPOSÉ DES FAITS PERTINENTS I.1 Exposé de la position de l’Intimée 1. La Cour suprême du Canada doit déterminer si la décision rendue par la Commission des lésions professionnelles (ci-après « CLP »), qui a interprété la notion de « travailleur » définie à la Loi sur la santé et la sécurité du travail 1 (ci-après « LSST » ou « Loi ») et décidé que l’Appelante n’avait pas fait l’objet de discrimination, est raisonnable. 2. La reconnaissance du statut de « travailleur » au sens de la LSST 2 constitue une condition d’ouverture à l’ensemble des droits accordés aux travailleurs par cette Loi, y compris le droit au retrait préventif de la travailleuse enceinte. 3. Cette Cour a d’ailleurs déjà analysé l’objet de la Loi et l’objectif poursuivi par le législateur québécois et a conclu, sous la plume du Juge Beetz3 : « Je ne pense donc pas que la Loi vise à protéger la santé et la sécurité des personnes en général dans la province. Elle régit les relations entre travailleur et employeur en tant que telles, sur les lieux du travail ou à l’occasion du travail et dans les cadres d’un contrat de travail (…). » (Nous soulignons) 4. Ainsi, le législateur a fait des choix en délimitant le champ d’application de la LSST de telle manière qu’il faut conclure que cette Loi ne vise clairement pas l’ensemble des travailleurs au Québec 4. 1 2 3 L.R.Q., c. S-2.1 [LSST], Recueil des sources de l’Appelante (ci-après « R.S.A. »), vol. I, onglet 8. Ibid., art. 1 « travailleur ». Bell Canada c. Québec (CSST), [1988] 1 R.C.S. 749, R.S.A., vol. I, onglet 20, par. 165. [Bell Canada] -2Mémoire de l’intimée CSP 5. Exposé concis de la position de l’intimée et exposé des faits pertinents La qualification de « travailleur » au sens de la LSST repose sur l’existence d’un « contrat de travail » entre un employeur et une personne. Comme le « contrat de travail » n’est pas défini à la Loi, la CLP a eu recours aux règles générales de droit commun prévues au Code civil du Québec 5 (ci-après « C.c.Q. ») pour cerner cette notion. 6. En l’espèce, l’Appelante est une personne inscrite sur une liste de « suppléants occasionnels », ce qui ne lui confère aucun lien d’emploi avec l’Intimée et conséquemment, ne lui permet nullement d’être assimilée à une « travailleuse » au sens de la LSST. C’est à l’occasion de l’octroi de chaque contrat de suppléance qu’elle est en mesure d’exécuter qu’un lien d’emploi se crée, et ce, uniquement pour la durée prévue du contrat. 7. C’est donc à bon droit que la CLP a conclu en l’instance qu’en aucun temps pertinent, un contrat de suppléance n’a valablement été conclu et qu’en conséquence, l’Appelante n’était pas une « travailleuse » au sens de la Loi. Cette décision est tout à fait raisonnable et résiste au test de la norme de contrôle judiciaire comme en a décidé la Cour d’appel du Québec. 8. Prétendre, comme le fait l’Appelante, que ce droit doit répondre au besoin d’une femme enceinte de bénéficier de revenus 6 est sans lien aucun avec l’objectif poursuivi par le législateur lors de l’adoption de la LSST. En fait, cette Loi vise exclusivement l’élimination à la source des dangers dans un milieu de travail 7. Il ne s’agit nullement d’une loi compensatrice de remplacement de revenus. Il ne faut alors pas confondre la LSST avec la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles8 (ci-après « LATMP »). 4 5 6 7 8 LSST, supra note 1 Code civil du Québec, L.Q. 1991, c. 64. Mémoire de l’Appelante (ci-après « M.A. »), p. 1, par. 3. LSST, supra note 1, art. 2. Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, L.R.Q., c. A-3.001 [LATMP], Recueil de sources de l’Intimée (ci-après « R.S.I. »), vol. I, onglet 2. -3Mémoire de l’intimée CSP 9. Exposé concis de la position de l’intimée et exposé des faits pertinents Or, le droit au retrait préventif de la travailleuse enceinte a pour seul but de permettre à celle-ci d’être réaffectée par son employeur, dans son propre milieu de travail, à des tâches qui ne comportent pas de danger pour elle ou pour l’enfant à naître. L’exercice du retrait préventif exige donc que la bénéficiaire de ce droit soit, au préalable, détentrice d’un contrat de travail qui la lie à un employeur. I.2 Les faits pertinents 10. L’Intimée, la Commission scolaire des Patriotes, regroupe une cinquantaine d’écoles sur son territoire. 11. À tout moment pertinent au litige, l’Intimée est liée par une convention collective, communément appelée « Entente nationale » (E-1-2005-2010)9 intervenue entre le Comité Patronal de négociation pour les Commissions scolaires francophones (le CPNCF) et la Centrale des syndicats du Québec (la CSQ) dont les sujets de négociation sont déterminés par la Loi10. 12. L’Intimée a aussi conclu une « Entente locale 11 » avec le Syndicat de l’enseignement de Champlain. Les sujets de négociation de cette entente sont aussi prévus par la même Loi12. 13. L’Entente nationale spécifie qu’elle ne s’applique pas aux « suppléants occasionnels », sauf pour les seules clauses où ils sont expressément désignés 13, soit essentiellement les dispositions encadrant la rémunération 14. 9 10 11 12 13 Dispositions liant le CPNCF et la CSQ (E1-2005-2010), dossier de l’Appelante (ci-après « D.A. »), pièce P-1, vol. II et III, p. 101 et s. [E1-2005-2010] Loi sur le régime de négociation des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic, L.R.Q., c. R-8.2, R.S.A., vol. I, onglet 7, art. 44-74, [Loi sur le régime de négociation des conventions collectives] Entente intervenue entre la Commission scolaire des Patriotes et le Syndicat de l’enseignement de Champlain, D.A., pièce P-1, vol. III, p. 408 et s. Loi sur le régime de négociation des conventions collectives, supra note 10. E1-2005-2010, D.A., supra note 9, vol. II, p. 117, art. 2-1.01, art. 2-1.03. -4Mémoire de l’intimée CSP 14. Exposé concis de la position de l’intimée et exposé des faits pertinents L’Entente nationale définit un « suppléant occasionnel » de la façon suivante : « 1-1.43 Suppléante ou suppléant occasionnel Toute personne, sauf une enseignante ou un enseignant régulier, qui remplace une enseignante ou un enseignant absent. » 15 15. La convention collective ne définit donc pas le « suppléant occasionnel » comme étant un « enseignant », car ce statut est réservé à des personnes qui détiennent un lien contractuel avec une commission scolaire 16. Or, c’est donc à tort que l’Appelante utilise, pour se qualifier, l’expression « enseignante suppléante », créant ainsi une certaine confusion quant à son statut réel17. 16. L’Entente locale encadre les modalités de remplacement des enseignants18. Cette entente locale 19 prévoit qu’en cas d’absence d’un enseignant, le remplacement est d’abord effectué par un « enseignant en disponibilité 20 ». Ce n’est qu’à défaut de pouvoir combler le remplacement de cette façon que l’Intimée fera appel à un enseignant détenant déjà un contrat à temps partiel dans l’école ou sinon, à une « suppléante ou suppléant occasionnel » inscrit sur une liste confectionnée à cet effet par l’Intimée. 17. L’Intimée s’est dotée d’un centre d’appels pour pourvoir au remplacement ponctuel d’enseignants. Ce centre peut référer à la liste de « suppléants occasionnels », sans y être par ailleurs obligé. Cette liste constitue, ni plus ni moins, une banque de candidats pouvant être appelés à combler un besoin ponctuel de remplacement 21. 14 15 16 17 18 19 20 21 Jugement dont appel, par. 62 à 65. E1-2005-2010, D.A., supra note 9, vol. II, p. 115, art. 1-1.43. Ibid., p. 114, art.1-1.19 à 1-1.26. M.A., p. 2, par. 7 à titre d’exemple. E1-2005-2010, D.A., supra note 9, vol. II, p. 208, art. 8-7.11. Ibid., vol. III, p. 493, art. 8-7.11. Ibid., vol. II, p. 114, art. 1-1.23. Jugement dont appel, par. 62. -5Mémoire de l’intimée CSP 18. Exposé concis de la position de l’intimée et exposé des faits pertinents La preuve, tant documentaire que testimoniale, a révélé que pour être inscrite sur la liste de « suppléants occasionnels », une personne n’a nul besoin de détenir un baccalauréat en enseignement ni même d’être soumise à un processus de sélection par l’Intimée 22. 19. De plus, la Loi sur l’instruction publique prévoit que toute personne, sans être légalement qualifiée, peut effectuer de la suppléance dans une école au Québec23. 20. Les ententes précitées ne prévoient ni droit de rappel, ni même de priorité d’appel, pour les « suppléants occasionnels ». Ainsi, la liste ne peut aucunement être assimilée à une liste d’ancienneté, une liste de rappel ou de priorité d’emploi24. Ainsi, contrairement à la conclusion du Juge Dalphond dans sa dissidence 25, la liste de suppléance ne peut aucunement être assimilée à une liste de rappel qui serait contraignante. C’est pourquoi le retrait du nom d’un candidat de la liste ou le défaut de communiquer avec un candidat inscrit ne peut être contesté par voie de grief. 21. Les « suppléants occasionnels » n’ont aucune obligation de disponibilité envers l’Intimée. Ils n’ont pas davantage celle d’accepter une proposition de remplacement offerte par l’Intimée 26. Ils peuvent même s’inscrire sur la liste de plusieurs commissions scolaires et, conséquemment, effectuer de la suppléance pour plusieurs d’entre elles. 22. L’Appelante a complété un baccalauréat en enseignement en décembre 2005 et s’est inscrite en janvier 2006 sur la liste de « suppléants occasionnels », telle que constituée par l’Intimée 27. 23. Pendant le mois de septembre 2006, l’Appelante a effectué trois (3) contrats de suppléance, totalisant deux jours et demi (2,5 jours), dans des écoles de l’Intimée 28. 22 23 24 25 26 27 Décision de la CLP du 5 juin 2008, D.A., vol. I, p. 4, par. 6 et 7. Loi sur l’instruction publique, L.R.Q., c. I-13.3, art 23 (2), R.S.I, vol. I, onglet 3. Jugement dont appel, par. 62. Ibid., par. 9 et par. 30. Décision de la CLP du 5 juin 2008, D.A., vol. I, p. 4, par. 10. Jugement dont appel, par. 62. -6Mémoire de l’intimée CSP 24. Exposé concis de la position de l’intimée et exposé des faits pertinents Le 24 septembre 2006, l’Appelante apprend qu’elle est enceinte. Ce jour-là, elle n’effectuait aucun remplacement, ne fournissait aucune prestation de travail et ne détenait aucun contrat de travail qui la liait à l’Intimée 29. 25. Le 25 septembre 2006, l’Appelante communique avec le centre d’appels pour les aviser qu’elle n’est pas disponible pour effectuer des remplacements puisqu’elle attend les résultats de ses tests d’immunité à l’égard de certaines maladies contagieuses susceptibles de présenter un risque pour la santé de son enfant à naître 30. 26. Le 23 octobre 2006, alors qu’elle n’effectue aucune suppléance, qu’elle ne fournit aucune prestation de travail et qu’elle ne détient aucun contrat de travail la liant à l’Intimée, l’Appelante obtient un certificat visant le retrait préventif et l’affectation de la travailleuse enceinte ou qui allaite (ci-après « certificat de retrait préventif ») signé par un médecin du CLSC lui indiquant un risque de contagion par exposition au Parvovirus B-19 31 qui lui permettrait de cesser son travail, le cas échéant. 27. Bien que l’Appelante ne fût liée par aucun contrat de travail avec l’Intimée, elle avait identifié cette dernière comme « lieu de travail » sur le certificat qu’elle a soumis au CLSC et qui a été transmis à la CSST par la suite. Rappelons que l’Appelante n’avait effectué aucun remplacement depuis qu’elle connaissait son état de grossesse, soit depuis le 24 septembre 2006. 28. En se basant sur cette information erronée quant à l’identification de l’employeur, la CSST conclut, dans sa décision du 3 novembre 2006, que la travailleuse est admissible au programme Pour une maternité sans danger. La CSST assimile erronément le statut de l’Appelante à celui d’une « travailleuse contractuelle » au service de l’Intimée 32. Cette décision précise à l’Appelante que son « retrait préventif 28 29 30 31 32 Ibid., par. 66. Ibid., par. 67. Ibid. Certificat de retrait préventif du 23 octobre 2006, D.A., pièce P-2, vol. III, p. 529. Décision de la CSST du 3 novembre 2006, D.A., pièce P-3, vol. III, p.530. -7Mémoire de l’intimée CSP Exposé concis de la position de l’intimée et exposé des faits pertinents débutera le jour où vous serez appelée au travail par votre employeur pour effectuer un contrat ». Cette décision est contestée par l’Intimée devant la CSST siégeant en Révision administrative, qui la confirme dans sa décision du 20 décembre 2006 33. L’Intimée conteste cette décision devant la CLP. 29. Le 13 novembre 2006, le médecin traitant de l’Appelante complète un deuxième certificat de retrait préventif en raison, cette fois, d’un risque de contagion par exposition à la rubéole 34. 30. À la suite de l’obtention de son certificat, l’Appelante communique elle-même avec le centre d’appels pour se déclarer maintenant disponible malgré son incapacité réelle à exécuter un contrat de suppléance dans une école. Puisque l’Appelante se déclare alors disponible, l’Intimée lui offre un contrat de suppléance pour la même journée. L’Appelante déclare accepter l’offre qui lui est faite puis signale immédiatement son incapacité d’effectuer la prestation de travail requise en raison des dangers identifiés par les certificats de retrait préventif 35. 31. Entre le 13 et le 30 novembre 2006, elle répète le même stratagème en téléphonant directement au centre d’appels pour solliciter d’autres offres de suppléance. Elle déclare chaque fois accepter toutes les offres de suppléance qui lui sont faites, en ajoutant aussitôt ne pas pouvoir fournir la prestation de travail requise en raison des certificats de retrait préventif 36. 32. L’Appelante communique ensuite avec la CSST pour l’aviser qu’elle a reçu des offres de suppléance de l’Intimée et réclame le paiement des jours lors desquels elle n’a pas travaillé. Le 27 novembre 2006, la CSST rend une décision déclarant qu’elle a le droit de recevoir des indemnités pour la période comprise entre le 13 novembre 2006 et le 33 34 35 36 Décision de la CSST siégeant en révision administrative du 20 décembre 2006, D.A., pièce P-6, vol. III, p. 535. Certificat de retrait préventif du 13 novembre 2006, D.A., pièce P-4, vol. III, p.532; Jugement dont appel, par. 68. Jugement dont appel, par 69. Ibid., par. 70. -8Mémoire de l’intimée CSP Exposé concis de la position de l’intimée et exposé des faits pertinents 28 avril 2007, soit la date prévue de son accouchement. Par la même décision, la CSST ajoute que l’Appelante a droit à des indemnités tant qu’elle répondra aux critères suivants : être enceinte, être au travail chez l’employeur actuel, ne pas être réaffectée à d’autres tâches, mais être apte à les accomplir, le cas échéant 37. 33. Cette décision, également contestée par l’Intimée 38, est confirmée par la CSST siégeant en Révision administrative dans la décision rendue le 20 décembre 2006, laquelle est contestée devant la CLP. 34. La CLP infirme la décision rendue par la CSST, siégeant en Révision administrative, et accueille la requête de l’Intimée. La CLP confirme, dans une décision finale et sans appel, que l’Appelante ne peut bénéficier du droit au retrait préventif de la travailleuse enceinte puisqu’elle ne peut se réclamer du statut de « travailleuse » au sens de la LSST39. 35. L’Appelante présente une requête en révision judiciaire de cette décision devant la Cour supérieure, laquelle la rejette le 20 avril 2010 40. Elle interjette appel de ce jugement devant la Cour d’appel du Québec qui le confirme le 2 avril 2012 41. ---------- 37 38 39 40 41 Ibid., par. 72. Ibid., par. 73 et 74. Décision de la CLP du 5 juin 2008, D.A., vol. I, p. 4. Jugement de la Cour supérieure du 20 avril 2010, D.A., vol. I, p. 15. [Jugement de la Cour supérieure] Jugement de la Cour d’appel du 2 avril 2012, D.A., vol. I, p. 36 [Jugement de la Cour d’appel]. -9Mémoire de l’intimée CSP Exposé concis des questions en litige soulevées par l’appelante PARTIE II – EXPOSÉ CONCIS DES QUESTIONS EN LITIGE SOULEVÉES PAR L’APPELANTE 36. L’Appelante soulève la question de la norme de contrôle judiciaire applicable à la décision de la CLP. L’Intimée soumet que la norme de contrôle applicable est celle de la décision raisonnable pour l’ensemble de la décision rendue par la CLP, même si la CLP doit, dans le cadre de sa décision, appliquer la Charte des droits et libertés de la personne 42 (ci-après la « Charte ») ou s’inspirer du Code civil du Québec. 37. L’Appelante soulève la question de savoir si elle a droit au « retrait préventif de la travailleuse enceinte » prévu à la LSST. La réponse est négative. Nous vous soumettons que l’Appelante ne détient aucun contrat de travail la liant à l’Intimée et qu’elle n’est donc pas une « travailleuse » au sens de LSST. 38. L’Appelante soulève la question de savoir si elle a fait l’objet de discrimination fondée sur la grossesse en vertu de la Charte. La réponse est négative. Nous soumettons qu’elle n’a pas fait l’objet de discrimination. D’abord, il n’y a pas eu conclusion d’un contrat. Ensuite, il y a un lien rationnel entre la capacité d’effectuer sa prestation de travail et l’obtention d’un contrat dans un contexte de suppléance occasionnelle. Finalement, constituerait une contrainte excessive l’obligation faite à l’employeur de conclure un contrat avec une personne qui n’est absolument pas en mesure d’effectuer le travail requis, afin de lui créer un poste sur mesure. ---------- 42 Charte des droits et libertés de la personne, L.R.Q., c. C-12. [Charte] - 10 Mémoire de l’intimée CSP Exposé concis des arguments PARTIE III – EXPOSÉ CONCIS DES ARGUMENTS III.1 La norme de contrôle judiciaire III.1.1 Le test de détermination de la norme de contrôle 39. Rappelons, d’entrée de jeu, le test de détermination de la norme de contrôle, tel qu’exposé par cette honorable Cour, dans l’arrêt Dunsmuir 43 : « [62] Bref, le processus de contrôle judiciaire se déroule en deux étapes. Premièrement, la Cour de révision vérifie si la jurisprudence établit déjà de manière satisfaisante le degré de déférence correspondant à une catégorie de questions en particulier. En second lieu, lorsque cette démarche se révèle infructueuse, elle entreprend l’analyse des éléments qui permettent d’arrêter la bonne norme de contrôle. » 40. Cette Cour a ainsi très clairement établi le test devant s’appliquer aux fins de déterminer la norme de révision applicable à une décision rendue par un tribunal administratif. Nous soumettons que l’arrêt Doré 44 n’a pas modifié ce test, malgré ce que peut prétendre l’Appelante à ce sujet. Nous y reviendrons plus loin. 41. La Cour propose donc un processus de détermination de la norme en deux étapes. La première étape consiste à se demander si la jurisprudence a établi de manière satisfaisante le degré de déférence applicable à cette catégorie de questions en particulier. En l’occurrence, la Cour d’appel du Québec45 s’est déjà spécifiquement prononcée sur la norme applicable à une décision de la CLP portant sur l’interprétation de la notion de « travailleur » au sens de la LATMP. Elle a conclu que c’était la norme de la décision raisonnable qui s’appliquait. Cette même conclusion sur la norme de contrôle doit s’appliquer en l’instance. 43 44 45 Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190, R.S.A., vol. III, onglet 31, par. 62. [Dunsmuir] Doré c. Barreau du Québec, [2012] 1 R.C.S. 395, 2012 CSC 12, R.S.A., vol. II, onglet 29. [Doré] Agropur, Coopérative (division Natrel) c. Rancourt, 2010 QCCA 749, R.S.I., vol. I, onglet 5, par. 16. [Agropur] - 11 Mémoire de l’intimée CSP 42. Exposé concis des arguments Considérant que le plus haut tribunal du Québec a déjà établi la norme de contrôle applicable au cas en l’espèce, cela devrait suffire à disposer de la question. Mais, même en poursuivant l’exercice sur le deuxième volet du test et en appliquant l’analyse contextuelle à la décision de la CLP, nous arrivons à la même conclusion. 43. Dans cette analyse, on tient compte des éléments suivants : (1) l’existence d’une clause privative; (2) « un régime distinct et particulier dans le cadre duquel le décideur possède une expertise spéciale (p. ex., la santé et sécurité au travail) »; (3) la nature de la question de droit, à savoir si elle revêt « une importance capitale pour le système juridique [et qui est] étrangère au domaine d’expertise » du tribunal administratif 46. 44. En l’instance, tant la Cour supérieure que la Cour d’appel ont appliqué, à bon droit, la norme de la décision raisonnable à la décision de la CLP. 45. En application de ce test, une analyse relative à la norme de contrôle permet de conclure à l’application de la norme de la décision raisonnable. 46. Rappelons d’abord que la CLP est un tribunal administratif spécialisé qui a pour mission de décider, à l’exclusion de tout autre tribunal, des contestations des décisions rendues par la CSST en vertu de la LSST et de la LATMP 47. Elle possède ainsi le pouvoir de décider de toute question de fait ou de droit nécessaire à l’exercice de sa compétence. Ses décisions sont finales et sans appel et elles sont protégées par une clause privative complète 48. 46 47 48 Dunsmuir, supra note 43, par. 55. L.R.Q., c. A-3.001, Recueil de sources de l’intimée Commission des lésions professionnelles, ci-après « S.I. CLP », p. 36 à 46. [LATMP] Ibid., art. 369, 377, 429.49, 429.56, S.I. CLP, p. 29, 30, 33, 34 et 35. - 12 Mémoire de l’intimée CSP 47. Exposé concis des arguments Deuxièmement, la question posée relève spécifiquement et exclusivement du champ d’expertise spécialisée de la CLP, soit la détermination du statut de « travailleur » en vertu de la LSST et du droit de l’Appelante de bénéficier ou non du retrait préventif prévu à la LSST. 48. En l’espèce, la question dont était saisie la CLP et, par la suite, la Cour supérieure puis la Cour d’appel apparaît être d’abord et avant tout une question de fait. Ce n’est que dans un second temps que l’on peut prétendre qu’il s’agit d’une question mixte de fait et de droit amenant l’interprétation des dispositions de la LSST et l’application de la Charte. 49. En effet, la CLP devait déterminer, à partir de l’ensemble des faits présentés devant elle, si effectivement l’Appelante était une « travailleuse » au sens de la LSST. 50. Cette question ne peut être qualifiée que de question de fait et certainement pas d’une pure question de droit d’une importance capitale pour le système juridique dans son ensemble et étrangère au domaine d’expertise de la CLP. 51. Ainsi, en appliquant le test élaboré dans l’arrêt Dunsmuir 49 et réaffirmé notamment dans l’arrêt Newfoundland and Nurses’ Union 50, force est de conclure que la norme applicable à cette décision est celle de la décision raisonnable, même si la question soulevée comportait un volet touchant la Charte. En fait, ce n’est pas le volet constitutionnel de la Loi ou des règlements qui est mis en cause, mais plutôt l’application aux faits de la cause d’un droit protégé par la Charte. 49 50 Dunsmuir, supra note 43, par. 55. Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c. Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, R.S.I. (CLP), vol. II, onglet 20. Voir aussi, Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier, section locale 30 c. Pâtes & Papier Irving, ltée, 2013 CSC 34, R.S.I., vol. III, onglet 28, par. 7. - 13 Mémoire de l’intimée CSP Exposé concis des arguments III.1.2 La norme de la décision raisonnable s’applique à l’analyse d’une question fondée sur la Charte ou inspirée du droit civil 52. Même si la CLP a eu à déterminer s’il y avait, en l’instance, discrimination à l’égard de l’Appelante, elle est demeurée dans le cadre de son champ de compétence spécialisée, car il est depuis longtemps reconnu, comme l’indique cette Cour dans l’arrêt Nor-Man Regional Health Autority inc. 51, que les tribunaux administratifs (dans cette affaire, il s’agissait d’un arbitre de relations de travail), « grâce à leurs larges mandats légal et contractuel — et à leur expertise —, ont tous les outils nécessaires pour adapter les doctrines » de droit civil « qu’ils estiment pertinentes dans les limites de leur sphère circonscrite de créativité ». 53. Nous soumettons que la CLP possède tous les outils nécessaires pour appliquer la Charte aux questions soulevées dans le cadre de son mandat spécifique. 54. Dans son arrêt Conway 52, cette Cour énonçait qu’un tribunal administratif a le pouvoir de trancher des questions de droit et même des questions constitutionnelles se rapportant à une affaire dont il est régulièrement saisi. Elle ajoute aussi que les tribunaux spécialisés « doivent jouer un rôle de premier plan dans les questions reliées à la Charte. » La CLP est donc compétente pour accorder des réparations demandées en vertu de la Charte, puisqu’elle doit agir en conformité avec la Charte et ses valeurs. C’est ainsi qu’on peut affirmer que la CLP possède conséquemment l’expertise requise pour décider de la question soumise, soit une question dont elle est régulièrement saisie et à l’égard de laquelle le législateur lui a confié le mandat exclusif d’en décider, et ce, même si la question implique un droit protégé par la Charte. 51 52 Nor-Man Regional Health Authority Inc. c. Manitoba Association of Health Care Professionals, [2011] 3 R.C.S. 616; R.S.A., vol. III, onglet 36, par. 45. Voir également Toronto (Ville) c. S.C.F.P., section locale 79, [2003] 3 R.C.S. 77, R.S.A., vol. VI, onglet 51, par. 68 à 78, [Ville de Toronto], Canada (Procureur général) c. Mossop, [1993] 1 R.C.S. 554, R.S.I., vol. I, onglet 9, p. 599-600; et Pushpanathan v. Canada (M.C.I.), [1998] 1 R.C.S. 982, R.S.I. vol. II, onglet 23, par. 34 et 37 [Pushpanathan], Dunsmuir, supra note 43, par. 49 -50. R. c. Conway, [2010] 1 R.C.S. 765, R.S.I. vol. III, onglet 26, par. 21, 22, 23 et 78. - 14 Mémoire de l’intimée CSP 55. Exposé concis des arguments Nous ajoutons que même si la CLP applique une autre loi que sa loi constitutive et que cette loi est reliée à la question principale à trancher, dans un tel cas, c’est la norme de décision raisonnable qui doit s’appliquer 53. 56. Ainsi, même si à l’occasion de l’analyse du statut de « travailleur », la CLP a eu à référer au droit civil, la cour de justice chargée de réviser la décision appliquera le test de la décision raisonnable. En effet, cette notion de « travailleur » est si étroitement liée à son mandat spécialisé que la référence aux fins de cette interprétation à des notions de droit civil ne modifie pas l’application de la norme de contrôle applicable à l’occasion d’une révision judiciaire. 57. De plus, cette Cour a aussi déclaré que même en situation de pures questions de droit, « si d’autres facteurs de l’analyse pragmatique et fonctionnelle semblent indiquer que cela correspond à l’intention du législateur », les tribunaux devront faire preuve de déférence envers la décision du tribunal spécialisé 54. 58. Au surplus, la CLP a rendu une décision sur une question qui, même si elle était qualifiée avoir une importance primordiale pour le système de justice, n’est absolument pas étrangère à son expertise. III.1.3 L’arrêt Doré 59. En terminant, nous devons aborder la question de l’arrêt Doré 55, sur lequel l’Appelante s’appuie pour prétendre qu’il devrait y avoir deux normes de révision judiciaire applicables à la décision de la CLP. Elle convient que sur la notion de « travailleur », la norme de la décision raisonnable s’applique. Cependant, elle plaide que c’est la norme de contrôle de la décision correcte qui devrait s’appliquer à la partie de la décision qui concerne la Charte. 53 54 55 CSST c. Albert Pouliot inc., 2011 QCCA 2178, R.S.I., vol. I, onglet 11, par. 2 et 4. Pushpanathan, supra note 51, R.S.I. vol. II, onglet 23, par. 34 et 37. Doré, supra note 44. - 15 Mémoire de l’intimée CSP 60. Exposé concis des arguments En fait, sa position peut se résumer à dire que puisque des valeurs consacrées par la Charte sont en cause dans le cadre de la révision judiciaire, un examen selon la norme de la décision correcte doit se substituer sur cette question à celui de la norme de la décision raisonnable. Nous soumettons que cette façon de voir est fondamentalement erronée. 61. Dans l’arrêt Doré 56, la Cour énonce qu’un décideur administratif, exerçant son pouvoir discrétionnaire conféré par la loi et analysant la constitutionnalité d’une loi, est soumis à la norme de contrôle de la décision correcte. Elle distingue cet exercice du décideur administratif de l’exercice où il a à interpréter une disposition d’une loi habilitante dans le respect des valeurs consacrées par la Charte. Dans cette deuxième situation, la norme de la décision raisonnable doit s’appliquer. 62. Dans un premier temps, nous devons rappeler les propos du Juge LeBel dans l’arrêt Toronto (Ville) 57 selon qui il peut arriver que la question à trancher se scinde en deux questions distinctes et faire l’objet de deux normes de contrôle différentes, mais que cette occurrence est rare. Habituellement, la décision du tribunal administratif forme un tout : « (…) Les divers éléments qui sous-tendent une décision ont plus de chance d’être inextricablement liés les uns aux autres, en particulier dans un domaine complexe comme celui des relations de travail, de sorte que la Cour de justice chargée du contrôle doit considérer que la décision du tribunal forme un tout. » 63. En l’instance, ce n’est ni la constitutionnalité de la loi ni l’interprétation d’un article de la Charte qui est en cause, mais simplement l’application de la Charte, aux faits de l’espèce. Ici, la question portant sur la détermination de la notion de « travailleur » dans le contexte d’une suppléance occasionnelle à durée déterminée et la question de la discrimination forment un tout indissociable et doivent être considérées comme un ensemble et non selon deux normes de contrôle distinctes. 56 57 Doré, supra note 44. Ville de Toronto, supra note 51, par. 76. - 16 Mémoire de l’intimée CSP 64. Exposé concis des arguments Nous soumettons que l’arrêt Doré ne modifie pas la jurisprudence déjà bien établie par cette Cour 58 quant à la norme de contrôle applicable en l’instance. En effet, la norme de contrôle applicable à une décision d’un tribunal administratif qui statue sur sa loi constitutive ou sur une loi sur laquelle il possède une expertise particulière et exclusive est celle de la norme de la décision raisonnable. 65. Par ailleurs, l’arrêt Doré ajoute le test de la mise en balance des valeurs consacrées par la Charte lors de la révision judiciaire de décisions administratives discrétionnaires où une question fondée sur les Chartes59 est soulevée. 66. Or, les enseignements de cette Cour ont été énoncés dans un contexte légal et factuel bien particulier et fort différent de celui du dossier à l’étude. L’appel portait sur la décision d’un comité de discipline qui avait réprimandé un avocat en raison du contenu d’une lettre qualifiée d’injurieuse qu’il avait écrite à un juge. L’appelant attaquait la constitutionnalité de la décision elle-même, au motif qu’elle contrevenait à l’article 2 b) de la Charte canadienne des droits et libertés de la personne 60. Cette Cour a décidé que la Cour de justice agissant en révision judiciaire devait appliquer la norme de la décision raisonnable et aussi s’assurer que le tribunal administratif avait tenu compte des valeurs consacrées par la Charte dans sa décision. 67. Notre affaire est d’une tout autre nature et s’inscrit dans un tout autre contexte. Tel que mentionné précédemment, la question fondée sur la Charte a été plaidée de façon subsidiaire à la question principale et ne constitue pas la véritable question en litige. La question du statut de l’Appelante était la question déterminante à être tranchée par le tribunal. Ainsi, comme le Juge Wagner l’a bien exprimé : « [116] (…) Je suis d’avis que la première détermination du statut de l’Appelante scelle le sort de son moyen d’appel subsidiaire selon lequel elle a souffert de discrimination en violation des dispositions de la Charte ». 58 59 60 Notamment Dunsmuir, supra note 43 et Ville de Toronto, supra note 51. Charte canadienne des droits et libertés de la personne, 1982, ch. 11, L.R.C. (1985), APP. II, no 44 [Charte canadienne] et Charte, supra note 42. Charte canadienne, supra note 59. - 17 Mémoire de l’intimée CSP Exposé concis des arguments « [117] La preuve ne permet pas de conclure sérieusement que l’Intimée a refusé d’embaucher l’Appelante en raison de sa grossesse. (…) » 68. Considérant ce contexte fort différent de celui de l’arrêt Doré, nous soumettons que le test de la mise en balance des valeurs consacrées dans la Charte ne trouve pas application en l’instance. 69. Finalement, même l’Appelante admet qu’en essayant d’appliquer le test de l’arrêt Doré à la présente affaire, elle rencontre des difficultés 61. Cela démontre bien, selon nous, que ce test ne trouve pas application en l’espèce. 70. Par ailleurs, même si on devait soumettre la décision de la CLP à ce test de « proportionnalité », il nous faudrait conclure que considérant l’expertise spécialisée de la CLP à l’égard de la LSST et en raison de sa proximité avec les faits, ce tribunal administratif était particulièrement bien au fait des considérations opposées en jeu dans la mise en balance des valeurs consacrées par la Charte et en a tenu compte dans sa décision. La détermination de la notion de « travailleur » et le statut de l’Appelante sont des questions de fait ou mixtes de fait et de droit et la CLP était définitivement la mieux placée pour évaluer les valeurs en cause. 71. En définitive, l’interprétation que la CLP donne à la notion de « travailleur » est raisonnable, eu égard au contexte, et tient raisonnablement compte de la valeur fondamentale en cause. 72. Ainsi, la décision de la CLP dans la présente affaire doit, sous tous ses volets, être soumise au test de la décision raisonnable. Voyons maintenant l’application de cette norme aux faits en l’espèce. 61 M.A., par. 37 et 42. - 18 Mémoire de l’intimée CSP III.2 Exposé concis des arguments L’application de la LSST à l’Appelante III.2.1 Objet de la LSST 73. La LSST est le résultat d’un vaste chantier entrepris par le gouvernement du Québec en 1978, visant à élaborer une réforme de toute la politique québécoise en matière de santé et sécurité au travail et énoncée dans le Livre Blanc sur la santé et la sécurité du travail 62. On peut y lire que : « Pour atteindre le but poursuivi, il faut s’attaquer à l’ensemble des risques qui existent sur les lieux du travail. » 74. Cette réforme a mené à la mise sur pied de la CSST, organisme où sont représentés les travailleurs et les employeurs du Québec. Cet organisme assume l’entièreté des responsabilités en matière de prévention et d’indemnisation des lésions professionnelles. Pour ce faire, la CSST applique deux lois principales, soit la Loi sur la santé et la sécurité au travail 63 et la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles 64, ainsi que divers règlements. 75. Alors que la LATMP a comme objectif de réparer les conséquences d’une lésion professionnelle pour les travailleurs qui en sont victimes, la LSST a comme objectif de les prévenir en éliminant à la source différents dangers pour la santé, la sécurité et l’intégrité physique des travailleurs. Pour atteindre cet objectif de prévention, la LSST prévoit des droits, des obligations et divers mécanismes de participation pour les travailleurs et employeurs, ainsi que leurs associations respectives 65. 76. Quant aux droits des travailleurs qui y sont prévus, ils constituent de véritables conditions de travail 66. D’ailleurs, ces conditions s’intègrent dans toute convention 62 63 64 65 66 Ministre d’État au développement social, Livre Blanc sur la santé et la sécurité au travail, Éditeur officiel du Québec, 1978, R.S.I. vol. III, onglet 37, p. 193. LSST, supra note 1. LATMP, supra note 47. Les articles 2 et 166 de la LSST prévoient que la CSST peut élaborer des politiques pour assurer une meilleure qualité du milieu de travail, R.S.I. vol. I, onglet 4, art. 2 et 166. Bell Canada, supra note 3, par. 133. - 19 Mémoire de l’intimée CSP Exposé concis des arguments collective qui ne peut y déroger, sous peine de nullité, en raison du caractère d’ordre public de la Loi67. 77. La LSST prévoit, par exemple, qu’un travailleur peut exercer un droit de refus d’exécuter un travail, s’il a des motifs raisonnables de croire que ce travail l’expose à un danger pour sa santé 68. Un travailleur peut aussi demander d’être réaffecté à des tâches qui ne comportent pas d’exposition à un contaminant pouvant être source de danger, sur présentation d’un certificat qui l’atteste 69. 78. La LSST prévoit aussi qu’une travailleuse enceinte peut fournir un certificat attestant que ses conditions de travail comportent un danger physique pour elle ou pour son enfant à naître et demander alors d’être affectée à des tâches ne comportant pas de tels dangers, sur présentation d’un certificat dûment complété à cet effet par un médecin 70. À défaut de pouvoir obtenir une modification de ses tâches, elle pourra alors recevoir des indemnités de remplacement du revenu versées par la CSST. 79. Cette mesure préventive s’inscrit dans le cadre du programme Pour une maternité sans danger qui est administré par la CSST, mais financé par l’ensemble des employeurs du Québec par le paiement de leur cotisation annuelle 71. III.2.2 Champ d’application de la LSST 80. Pour atteindre son objectif de prévention, le législateur a défini le champ d’application et a clairement précisé que cette Loi devrait s’appliquer à un « travailleur », tel qu’il l’a défini72. Ainsi, la LSST n’a pas pour objectif de viser la protection de la santé et de la sécurité de tout individu habitant sur le territoire du Québec, mais bien celle des « travailleurs » au sens de la LSST. 67 68 69 70 71 72 LSST, supra note 1, art. 4. Ibid., R.S.I. vol. I, onglet 4, art. 12 à 31. Ibid., art. 32 à 39. Ibid., R.S.A., vol. I, onglet 8, art. 40 à 48. Ibid., art. 45. Ibid., art. 1. - 20 Mémoire de l’intimée CSP 81. Exposé concis des arguments Certes la LSST est une loi à caractère social, qui doit être interprétée de façon large et libérale. Toutefois, la portée sociale d’une loi ne peut justifier d’élargir son champ d’application en ajoutant aux termes clairement exprimés par le législateur et, ce faisant, modifier les conditions d’accessibilité aux droits qui y sont prévus. 82. Cette Cour nous rappelle, dans l’arrêt Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. 73, qu’il faut lire les termes d’une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du législateur. Plus le libellé d’une disposition est précis et plus « le sens ordinaire joue un rôle primordial dans le processus d’interprétation 74. » 83. En raison de l’importance de la question, la CLP a formé un banc de trois commissaires 75 qui se sont déjà penchés sur l’interprétation à donner aux dispositions traitant du droit au retrait préventif de la travailleuse enceinte prévu à la LSST. Ce tribunal spécialisé a conclu qu’il faut interpréter ce droit dans un contexte de prévention et qu’il doit s’analyser en parallèle avec les autres droits prévus à la LSST76. 84. Dans le même sens, les auteurs du Traité de droit de la santé et de la sécurité au travail 77 s’exprimaient déjà comme suit : « Ce droit ne s’adresse en effet qu’à la femme enceinte qui est au travail, et seulement si ses conditions de travail comportent des dangers physiques pour elle-même ou pour l’enfant à naître. Ce droit est donc intimement lié aux conditions de travail et participe, de ce fait, davantage du régime de santé et sécurité au travail que d’une 73 74 75 76 77 Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 R.C.S. 27, R.S.A., vol. IV, onglet 42. Hypothèques Trustco Canada c. Canada, [2005] 2 R.C.S. 601, R.S.I. vol. II, onglet 19, par. 10. LATMP, supra note 47, art. 422. Un banc de trois commissaires est désigné par le président de la CLP pour entendre un recours en raison de sa complexité ou de son importance. Desjardins et Commission scolaire des Draveurs et al., C.L.P., 2006 CanLII 68774 (QCCLP), R.S.I. vol. I, onglet 13, par. 59. [Desjardins et Commission scolaire des Draveurs]. CLICHE, Bernard et al, dans le Traité de droit de la santé et de la sécurité au travail, Cowansville (Qc), Yvon Blais, 1993, p. 238, R.S.I. vol. III, onglet 35. Voir sur le même sujet, VEILLEUX, Paule, Les maladies infectieuses et le retrait préventif, Cowansville (Qc), Yvon Blais. Développements récents en droit de l’éducation (1999) du Service de la formation permanente du Barreau du Québec, R.S.I. vol. III, onglet 38. - 21 Mémoire de l’intimée CSP Exposé concis des arguments politique sociale, bien que le premier relève en grande partie de la seconde. » (Nous soulignons) 85. Ainsi, c’est à juste titre que le Juge Wagner 78, s’exprimant pour la majorité de la Cour d’appel du Québec, a énoncé : « Cela dit, même si une loi telle que la LSST doit être interprétée de façon généreuse et qu'il serait, dans un monde idéal, permis à toutes les citoyennes de bénéficier d'indemnités de remplacement de revenus lorsque leur occupation présente des risques pour l'enfant à naître, je ne peux me convaincre que les conclusions de la CLP, confirmées par la Cour supérieure, sont déraisonnables. » III.2.3 Conditions d’admissibilité du droit au retrait préventif de la travailleuse enceinte 86. Pour être admissible au retrait préventif de la travailleuse enceinte, il faut remplir trois conditions : 1. Être une « travailleuse » au sens de la LSST. 2. Présenter à son « employeur », dont la notion est aussi définie à la LSST, un certificat qui atteste que les conditions de son travail comportent des dangers physiques pour l’enfant à naître ou pour elle-même, en raison de son état de grossesse. 3. Demander d’être affectée à des tâches ne comportant pas de tels dangers et être raisonnablement en mesure de les accomplir 79. 87. Seulement si la troisième condition ne peut être remplie, la travailleuse enceinte pourra cesser de travailler 80. Nous soumettons que les termes choisis par le législateur font ressortir de façon évidente son intention de traiter de la situation d’une personne étant déjà en relation contractuelle d’emploi et non d’une candidate à une telle relation. 78 79 80 Jugement dont appel, par. 111. LSST, supra note 1, art. 40. Ibid., art. 41. - 22 Mémoire de l’intimée CSP 88. Exposé concis des arguments L’admissibilité au retrait préventif de la travailleuse enceinte doit s’analyser au moment du dépôt du certificat auprès de l’employeur, puisque le dépôt du certificat équivaut à une demande de réaffectation 81. Force est d’admettre qu’à cette date, l’Appelante ne détenait aucun contrat de travail, ce qui devrait sceller le sort du litige. III.2.4 Interprétation de la notion de « travailleur » au sens de la LSST 89. Au sens de la LSST82, la notion de « travailleur » se définit comme suit : « 1. (…) « travailleur »: une personne qui exécute, en vertu d'un contrat de travail ou d'un contrat d'apprentissage, même sans rémunération, un travail pour un employeur, y compris un étudiant dans les cas déterminés par règlement, à l'exception : 1° d'une personne qui est employée à titre de gérant, surintendant, contremaître ou représentant de l'employeur dans ses relations avec les travailleurs; 2° d'un administrateur ou dirigeant d'une personne morale, sauf si une personne agit à ce titre à l'égard de son employeur après avoir été désignée par les travailleurs ou une association accréditée. » (Nous soulignons) 90. La LSST prévoit que les personnes visées par ces exceptions jouissent toutefois de certains droits, dont celui au retrait préventif de la travailleuse enceinte 83. Le texte de cette disposition est clair et s’interprète restrictivement. Cette disposition n’a pas pour effet de conférer aux personnes qui y sont visées le statut de « travailleur » concernant les autres dispositions prévues à la LSST84. 81 82 83 84 Alexandra Lymberopoulos et CPE St-Mary, [2005] AZ-50308032 (C.L.P.), R.S.I., vol. I, onglet 6. [Alexandra Lymberopoulos] LSST, supra note 1, art. 1. Ibid., art. 11. Fédération québécoise des massothérapeutes et Jacquart, 2009 QCCLP 1241, R.S.I. vol. II, onglet 16, par. 32. - 23 Mémoire de l’intimée CSP 91. Exposé concis des arguments Il est pertinent de rappeler que le législateur a retenu une définition différente de la notion de « travailleur » pour l’application de la LSST et de la LATMP 85. Toutefois, les deux définitions exigent la présence d’un contrat de travail. 92. Selon la définition retenue, une personne pourrait être qualifiée de « travailleur » au sens de la LATMP et être indemnisée par la CSST à la suite d’une lésion professionnelle, sans que le même statut lui soit reconnu au sens de la LSST. Par exemple, une travailleuse autonome peut répondre à la définition de « travailleur » au sens de la LATMP, mais ne pas être admissible aux droits consentis par la LSST. 93. La CLP a d’ailleurs déjà reconnu que les travailleuses autonomes ne pouvaient bénéficier du droit au retrait préventif de la travailleuse enceinte 86 : « [57] Une étude de la Loi permet de constater qu’elle ne contient aucune définition de la notion de travailleur autonome contrairement à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles. Cette dernière Loi prévoit d’ailleurs plusieurs dispositions spécifiques relatives à ce concept de travailleur autonome et contient même à son article 9 une présomption permettant à un travailleur autonome d’être considéré comme un travailleur au sens de cette Loi. Force est de constater que tel n’est pas le cas dans le cadre de la Loi sur la santé et la sécurité du travail. […] [60] Il est donc manifeste que le législateur n’a pas voulu octroyer le droit au retrait préventif à une travailleuse autonome. » 85 86 LATMP, supra note 47, art. 2. Voir aussi LAFONTAINE, Serge, Le retrait préventif de la travailleuse enceinte ou qui allaite : qui décide quoi?, Cowansville (Qc), Yvon Blais, Développements récents en droit du travail (1991) du Service de la formation permanente du Barreau du Québec, R.S.I. vol. III, onglet 36. LSST, supra note 1, R.S.A.; vol. I, onglet 8, art. 7; Bédard et Coifferie des Bouleaux, [2002] AZ-02300476 (C.L.P.), R.S.I. vol. I, onglet 7, par. 57 et 60. Voir aussi : Fondation Canadienne Espoir Jeunesse et Le Groupe d’Entraide Janik inc. et Jessica Gauvin, 2011 QCCLP 638, R.S.I. vol. II, onglet 17, par. 20 et 21. - 24 Mémoire de l’intimée CSP 94. Exposé concis des arguments La Cour d’appel du Québec s’est déjà exprimée quant à ce rôle du législateur de définir les termes utilisés dans une loi. Avant de traiter de la question spécifique qui était soulevée dans ce pourvoi, elle rappelle ceci en regard de la définition de « travailleur » au sens de la LATMP 87 : « [18] (…) D'abord, la LATMP est une loi sociale et d'ordre public qui vise à procurer à tous les accidentés du travail une indemnisation adéquate. Elle doit donc être interprétée largement de manière à ce qu'elle atteigne son objectif. Deuxièmement, il faut noter que le législateur a non seulement régulièrement ajouté de nouveaux statuts à la LATMP comme celui de domestique, conjoint, travailleur étudiant, travailleur bénévole, etc., mais a aussi périodiquement modifié la définition de travailleur, tout cela afin que soient prises en compte les réalités changeantes du monde du travail. Ainsi, si en 1964, l'article 1 de la LATMP faisait état de l'« ouvrier » et de l'« ouvrier indépendant », ces notions se sont aujourd’hui étendues et développées en celles de : - travailleur; - travailleur autonome; - travailleur autonome considéré comme un travailleur salarié. [19] Dès lors, la prudence et la réserve s’imposent dans l’usage de la jurisprudence élaborée sur la notion de salarié, d’employé ou d’entrepreneur en application d’autres lois, notamment du Code civil. » III.2.5 Nécessité de détenir un « contrat de travail » 95. La définition de « travailleur » au sens de la LSST nous renvoie à la notion de « contrat de travail », qui n’est pas elle-même définie à la LSST. Il faut donc s’en remettre aux règles de droit commun prévues au Code civil du Québec qui complète et supplée à la LSST, comme à toute autre loi en matière d’emploi ou de conventions collectives. 87 Agropur, supra, note 45, R.S.I., vol. I, onglet 5. - 25 Mémoire de l’intimée CSP 96. Exposé concis des arguments L’article 2085 du C.c.Q. 88 définit ainsi le « contrat de travail » : « Le contrat de travail est celui par lequel une personne, le salarié, s'oblige, pour un temps limité et moyennant rémunération, à effectuer un travail sous la direction ou le contrôle d'une autre personne, l'employeur. » (Nous soulignons) 97. De plus, l’article 1385 du C.c.Q. prévoit quatre (4) conditions nécessaires à l’existence et à la validité de tout contrat. Outre l’échange de consentement entre personnes capables de conclure un contrat, le contrat doit avoir une « cause » et un « objet » 89. En l’espèce, la « cause » du contrat découle de la nécessité de pourvoir au remplacement ponctuel d’un enseignant, alors que son « objet » est la fourniture d’une prestation de travail moyennant une rémunération 90. Cette prestation doit être possible et déterminée et ne doit être ni prohibée par la loi, ni contraire à l’ordre public 91. 98. En l’espèce, l’objet de l’obligation contractuelle de l’Appelante était de fournir la prestation de travail requise afin de remplacer un enseignant absent ce jour-là. Comme l’Appelante était incapable de fournir cette prestation de travail, il n’a pu y avoir eu formation d’un contrat de travail en l’espèce sans cette condition essentielle. 99. C’est à juste titre que la majorité de la Cour d’appel du Québec92 retenait que : « [105] On mesure bien ici l’importance de l’objet d’une obligation qui est la prestation de travail elle-même. La proposition de l’Appelante selon laquelle un contrat de travail est créé dès l’instant où une offre de suppléance lui est soumise relève d’une gymnastique intellectuelle désincarnée. En effet, il faudrait conclure que dès que l’Intimée offre à l’Appelante une période de suppléance et que cette dernière l’accepte, il y a alors création d’un lien et d’un contrat d’emploi même si l’Appelante refuse immédiatement l’offre en raison de l’exercice du droit au retrait préventif. Même une interprétation généreuse de la loi ne peut mener à une telle conclusion. » (Nous soulignons) 88 89 90 91 92 Code civil du Québec, supra note 5, R.S.I., vol. I, onglet 1, art. 2085. Ibid., art. 1385. Ibid., art. 1410 et 1412. Ibid., art. 1373. Jugement dont appel, par. 105. - 26 Mémoire de l’intimée CSP Exposé concis des arguments 100. L’Appelante a donc cherché à se créer un droit dont elle ne jouissait pas, en faisant des demandes au centre d’appels et en sollicitant du travail, tout en sachant qu’elle ne pouvait effectuer la prestation de travail selon un avis médical. La Cour supérieure 93 posait à ce sujet une question bien pertinente dans son jugement: « [52] Comment quelqu’un peut-il, de bonne foi, offrir ses services à un éventuel employeur en sachant à l’avance qu’il ne pourra aucunement exécuter le travail qu’il offre pourtant d’accomplir et puis exiger, dans l’instant de raison qui suit, d’être rémunéré pour ce travail qu’il n’effectuera pas, mais pour lequel il s’est offert sans pouvoir le faire? C’est pourtant ce que Mme Dionne a fait. » 101. Dans la décision Syndicat de l’enseignement de la région de Québec c. Ménard 94, la Cour d’appel du Québec rappelle que « l’exigence de la bonne foi participe de l’ordre public dans le contexte du contrat de travail. » Cette bonne foi aurait dû gouverner l’Appelante, tant au moment où elle communique avec le centre d’appels pour se déclarer disponible, malgré l’obtention de ses certificats de retrait préventif, qu’au moment de déclarer accepter l’offre qui lui est faite. 102. Dans l’exercice de sa compétence exclusive, la CLP doit interpréter la notion de « travailleur » de façon quotidienne, comme condition d’accessibilité aux différents droits prévus tant à la LSST qu’à la LATMP. Chaque fois, elle doit recourir aux règles prévues au Code civil du Québec 95. 103. L’Appelante tente de contourner cette nécessité d’être capable de fournir la prestation de travail visée par le contrat, soit le remplacement ponctuel de l’enseignant absent, en invoquant le fait qu’elle était disponible pour effectuer d’autres tâches, sans risque pour sa santé 96. Rappelons toutefois à nouveau que ce droit d’être réaffecté dans le cadre d’un retrait préventif présuppose qu’on occupe déjà un travail chez l’employeur. 93 94 95 96 Jugement de la Cour supérieure, supra note 40, D.A., par. 52. 2005, QCCA 440, R.S.I., vol. III, onglet 30, par. 49. À titre d’exemple, voir : 9114-7058 Québec inc. et Commission de la santé et de la sécurité au travail, 2013 QCCLP 296, R.S.I., vol. III, onglet 34, par. 34 à 39. M. A., p. 11, par. 38. - 27 Mémoire de l’intimée CSP Exposé concis des arguments 104. Retenir l’argument de l’Appelante équivaudrait à obliger l’Intimée à former un contrat fondé sur une tout autre cause que celle de pourvoir au remplacement ponctuel d’un enseignant absent. Selon l’Appelante, alors que l’Intimée avait un besoin urgent et ponctuel de remplacer un enseignant, elle aurait dû plutôt affecter l’Appelante à d’autres tâches au cours de la journée pour laquelle ses services auraient été retenus, et ce, sous prétexte qu’un contrat aurait été conclu malgré tout. Un tel argument ne peut être retenu. 105. L’Appelante tente aussi de contourner la nécessité d’un « contrat de travail » afin de se qualifier à titre de « travailleuse ». Elle invoque que la volonté réelle du législateur est d’étendre le droit au retrait préventif de la travailleuse enceinte à des personnes, et ce, même en l’absence d’un élément essentiel à la formation d’un « contrat de travail» 97. L’Appelante s’appuie ainsi sur l’opinion émise par le Juge Dalphond dans sa dissidence, lequel prétend que le législateur a exclu la notion de « salarié » pour retenir celle de « travailleur », car il a voulu conférer largement ce droit, et ce, même dans des cas où il n’y avait pas de « contrat de travail 98 ». Nous vous soumettons respectueusement que cette position ne peut être retenue en présence d’un texte clair et d’une définition qui requiert, comme condition essentielle, la présence d’un « contrat de travail ». L’application de la notion de « travailleur » aux autres situations spécifiquement énumérées à l’article 1 de la LSST n’y change rien. Au surplus, aucune de ces situations ne saurait s’appliquer à l’Appelante. 106. L’exigence de détenir un « contrat de travail » au moment de présenter son certificat de retrait préventif est d’autant plus manifeste lorsqu’on tient compte de l’article 43 de la LSST 99 qui prévoit que l’employeur doit réintégrer la travailleuse enceinte dans son emploi, avec les mêmes avantages, à la fin du retrait préventif. Est-ce à dire que l’Intimée serait obligée de donner des contrats de suppléance à l’Appelante à l’expiration de son retrait préventif alors qu’il n’existe aucune obligation de conclure un contrat avec quelque suppléant que ce soit? 97 98 99 Ibid., p. 25 par. 67. Jugement dont appel, par. 34 à 39. LSST, supra note 1. - 28 Mémoire de l’intimée CSP Exposé concis des arguments 107. À l’évidence, une réponse négative à cette question s’impose. 108. Non seulement l’existence d’un contrat de travail est nécessaire au moment de déterminer son admissibilité au retrait préventif de la travailleuse enceinte, mais le lien d’emploi ainsi créé doit exister pendant toute la durée du retrait préventif. En effet, la jurisprudence de la CLP a confirmé à maintes reprises que la terminaison du lien d’emploi pendant l’exercice du droit au retrait préventif de la travailleuse enceinte mettait fin à celui-ci ou aux indemnités qui en découlent, puisque le danger qui est au cœur de ce droit d’être réaffecté n’existe plus100. 109. Il en va de même dans tous les cas où ce n’est que la prestation de travail qui est suspendue, sans que le lien d’emploi soit rompu, comme lors d’une suspension, d’une mise à pied ou d’un lock-out. Ces situations ont aussi pour effet, pour les mêmes motifs, de mettre fin au retrait préventif de la travailleuse enceinte ou aux indemnités qui en découlent 101. 110. À maintes reprises, la CLP a d’ailleurs réitéré que le droit au retrait préventif de la travailleuse enceinte des enseignantes sous contrat avec une commission scolaire était suspendu pendant la période estivale 102. 111. En effet, l’objectif de la Loi n’est pas d’indemniser une travailleuse enceinte, mais d’empêcher qu’elle soit exposée à des dangers que pourrait comporter son travail. L’existence d’un lien d’emploi est donc indissociable de l’objectif du retrait préventif de la travailleuse enceinte. III.2.6 Statut d’une « suppléante occasionnelle » 112. Enfin, l’Appelante prétend à une fiction basée sur un prétendu « continuum » qui ferait en sorte de créer un « rapport d’emploi » avec l’Intimée pouvant être assimilé à un lien 100 101 102 Provigo Distribution inc. et Blanchet et CSST, [1992] C.A.L.P. 1246, R.S.I., vol. II, onglet 22, p. 5. Alexandra Lymberopoulos, supra note 81, vol. I, onglet 6, par. 16 et s. Desjardins et Commission scolaire des Draveurs, supra note 76, R.S.I. vol. I, onglet 13, par. 65. - 29 Mémoire de l’intimée CSP Exposé concis des arguments contractuel103. L’Appelante invente un concept qui n’a aucune assise légale, surtout que l’Entente nationale négociée entre les parties n’a jamais prévu un lien contractuel entre les « suppléants occasionnels », qui ne sont pas chargés d’une tâche, et les commissions scolaires, et ce, contrairement aux différentes autres catégories d’enseignants. 113. La Cour d’appel du Québec s’est d’ailleurs déjà prononcée sur le statut d’un « suppléant occasionnel » offrant ses services à une commission scolaire en analysant une situation factuelle très similaire à la nôtre et a conclu que 104 : « Enfin, il faut retenir que la liste de suppléants occasionnels tenue à jour par la Commission scolaire Intimée ne constitue par un contrat d'emploi. Cette liste n'est, à toutes fins utiles, qu'une banque de noms disponibles dans laquelle la Commission scolaire doit puiser pour requérir des suppléants. Elle ne crée cependant aucune obligation de fournir du travail, aucun droit de rappel et il n'y a aucune priorité à l'intérieur de la liste, le choix d'un remplaçant étant laissé à la discrétion de l'Intimée. […] Ces constatations de faits ne se retrouvent pas en l'espèce. Il ressort de la preuve que les deux suppléantes inscrites sur la liste n'ont aucune obligation de maintenir une disponibilité. Elles peuvent se déclarer disponibles auprès de plusieurs employeurs et elles peuvent refuser tout contrat de suppléance qui leur est offert. D'autre part, elles n'ont aucun droit de réclamer un contrat de remplacement et elles ne peuvent s'attendre à obtenir des contrats de suppléance; d'ailleurs plusieurs suppléants n'en obtiennent aucun. Les contrats qui les lient à l'employeur sont véritablement de nature temporaire. Que des besoins de remplacement reviennent à chaque année ne change rien à la situation. Elles ne sont, en effet, pas embauchées comme remplaçantes pour répondre à d'éventuels besoins, pour combler des absences prévisibles d'enseignants, mais pour remplacer un enseignant spécifique pour une durée limitée. C'est le lien d'emploi et non seulement l'exécution du travail qui est interrompu à la fin de chaque contrat. » 103 104 M. A., par. 75-76. Commission des normes du travail c. Commission des écoles catholiques de Québec, J.E. 95-1527 (C.A.), 1995 CanLII 4648 (QC CA), R.S.I. vol. I, onglet 10, p. 6, 7 et 8. - 30 Mémoire de l’intimée CSP Exposé concis des arguments 114. Nous sommes tout à fait d’accord avec l’Appelante lorsqu’elle mentionne, dans son mémoire, que les Ententes nationale et locale définissent un régime particulier dans « lequel coexistent diverses formes d’emplois, les modalités du contrat de travail variant d’une catégorie d’emplois à l’autre 105 ». Ce qui amène la conclusion inévitable que précisément, ces Ententes nationale et locale n’ont jamais voulu créer de lien d’emploi entre les « suppléantes occasionnelles », même enceintes, et les commissions scolaires. Preuve en est notamment que toutes les dispositions concernant les droits parentaux ne s’appliquent pas aux « suppléantes occasionnelles106 ». 115. La Cour d’appel du Québec était bien fondée en concluant que la décision de la CLP est raisonnable et que l’Appelante ne pouvait revendiquer le statut de « travailleur » au sens de la Loi. Cette décision constitue une des issues possibles et acceptables de l’instance. III.3 Interprétation et application conforme aux droits et libertés protégés par la Charte québécoise 116. Après avoir prétendu qu’il y avait formation d’un contrat et qu’elle était une « travailleuse » au sens de la LSST, l’Appelante plaide aussi qu’elle fait l’objet de discrimination à l’embauche en raison de son état de grossesse. 117. Dans le contexte de cet appel, il importe de rappeler la portée de la demande de l’Appelante pour en comprendre tous les effets et en apprécier les impacts sur la mise en œuvre du droit à l’égalité. 118. L’Appelante n’a pas fait l’objet de discrimination, mais si nous venons à en discuter, il faut remettre le tout dans le contexte factuel général, soit que c’est l’Appelante qui a sollicité l’Intimée, par son centre d’appels, afin de se voir octroyer une suppléance, alors qu’elle se sait dans l’impossibilité totale d’effectuer la prestation de travail qui en 105 106 M. A., p. 28, par. 73. E1-2005-2010, supra note 9, D.A, art. 5-13.01 et s. - 31 Mémoire de l’intimée CSP Exposé concis des arguments découle, et ce, pour toute la durée de l’emploi sollicité. L’Intimée ne peut, dans ces circonstances, être taxée de faire de la discrimination envers l’Appelante. 119. La Cour d’appel du Québec a par ailleurs bien saisi le contexte de cette affaire, comme l’a fort justement mentionné le Juge Wagner dans la décision faisant l’objet du présent appel 107 : « [116] Ici, l'Appelante n'a aucun contrat de travail entre les périodes de suppléance et ne peut prétendre que l'Intimée a fait preuve de discrimination à son égard. Je suis d'avis que la première détermination du statut de l'Appelante scelle le sort de son moyen d'appel subsidiaire selon lequel elle a souffert de discrimination en violation des dispositions de la Charte. [117] La preuve ne permet pas de conclure sérieusement que l'Intimée a refusé d'embaucher l'Appelante en raison de sa grossesse. Accepter la théorie de l'Appelante implique que l'Intimée avait l'obligation de retenir ses services pour ne pas commettre de discrimination au sens de la Charte, alors qu'en d'autres circonstances, si l'Appelante n'avait pas été enceinte, elle n'aurait eu aucune obligation à son égard. La proposition est intenable. Ce moyen doit être écarté. » 120. La réalité de ce dossier est la suivante : le contrat de travail revendiqué par l’Appelante est en fait une suppléance à durée déterminée, soit d’une journée. Cette suppléance ne dure que le temps du remplacement effectué. Comme nous l’avons déjà exprimé ci-dessus 108, il n’existe aucun lien d’emploi entre deux suppléances. 121. L’argument subsidiaire de l’Appelante nous oblige à procéder à l’examen du test portant sur la validité de la norme particulière en cause, soit la capacité pour un suppléant d’effectuer la suppléance. 122. L’Intimée est d’avis qu’elle est justifiée de demander au suppléant d’effectuer la prestation de travail qui découle d’une suppléance. Obliger l’Intimée à conclure un contrat avec l’Appelante alors qu’elle est dans la totale et définitive incapacité 107 108 Jugement dont appel, par. 116 et 117. Mémoire de l’Intimée, partie II, par. 6. - 32 Mémoire de l’intimée CSP Exposé concis des arguments d’exécuter le travail de suppléance visé par le contrat constitue une contrainte excessive pour l’Intimée. 123. Comme mentionné dans l’arrêt CUSM c. Syndicat des Employés de L’HGM 109, l’obligation d’accommodement en milieu de travail naît lorsqu’un employeur cherche à appliquer une norme qui cause préjudice à l’employé en raison de caractéristiques particulières protégées par la législation sur les droits de la personne. 124. Comme le mentionne la Juge Deschamps dans la décision précitée 110, il est bien établi que l’employeur doit justifier la norme qu’il cherche à appliquer en démontrant : (1) qu’il a adopté la norme dans un but rationnellement lié à l’exécution du travail en cause; (2) qu’il a adopté la norme particulière en croyant sincèrement qu’elle était nécessaire pour réaliser ce but légitime lié au travail; (3) que la norme est raisonnablement nécessaire pour réaliser ce but légitime lié au travail. Pour prouver que la norme est raisonnablement nécessaire, il faut démontrer qu’il est impossible de composer avec les employés qui ont les mêmes caractéristiques que le demandeur, sans que l’employeur subisse une contrainte excessive. 125. Qu’en est-il dans le cas en espèce? 126. D’entrée de jeu, nous précisons que le second critère selon lequel l’employeur doit sincèrement croire que la norme était nécessaire pour réaliser le but légitime lié au travail n’a plus d’application au Québec depuis la modification apportée en 1983 par le 109 110 CUSM c. Syndicat des employés de L’HGM, [2007] 1 R.C.S. 161, R.S.I., vol. I, onglet 12, par. 11. [CUSM] Ibid., par. 13. - 33 Mémoire de l’intimée CSP Exposé concis des arguments législateur à l’article 20 de la Charte 111. Ainsi, la notion de « qualités exigées de bonne foi pour un emploi » a été remplacée par celle de « qualités requises par un emploi ». En conséquence, l’analyse doit porter sur le premier et le troisième critère uniquement. 127. Comme la Cour d’appel du Québec l’a décidé dans une autre affaire concernant aussi la Commission scolaire des Patriotes (ci-après « CSP-1 ») 112, l’employeur est en droit d’imposer des exigences en regard des aptitudes requises pour l’exercice d’un emploi, mais ces exigences doivent être raisonnables et avoir un lien rationnel avec l’emploi. Dans le cas à l’étude, l’exigence de disponibilité et/ou de capacité à faire le travail a certainement un lien rationnel avec l’emploi. 128. Il est obligatoire, pour la formation du contrat d’emploi, que l’employé soit en mesure d’effectuer sa prestation de travail. La norme de disponibilité est le minimum exigible dans les circonstances. 129. Il existe un lien rationnel entre cette norme et l’exécution du travail. L’employeur ne peut composer avec des suppléants absents. Cette norme est nécessaire à l’exécution du travail en raison de la nature même du travail de suppléant. Il est impossible d’assurer une suppléance en étant absent. Le fait de demander à un suppléant d’être capable d’effectuer une tâche de suppléance est une norme acceptable, logique et qui rencontre l’objet même du travail demandé. 130. Comme mentionné par le Juge Rochette dans la décision Syndicat des infirmières, inhalothérapeutes, infirmières auxiliaires du Cœur du Québec (SIIIACQ) c. Centre hospitalier régional de Trois-Rivières 113, l’employeur est en droit d’imposer des 111 112 113 Syndicat des infirmières, inhalothérapeutes, infirmières auxiliaires du Cœur du Québec (SIIIACQ) c. Centre hospitalier régional de Trois-Rivières, 2012 QCCA 1867, R.S.A., vol. V, onglet 49, par. 69. [Syndicat des infirmières, inhalothérapeutes, infirmières auxiliaires du Cœur du Québec] Syndicat de l’enseignement de Champlain c. Commission scolaire des Patriotes, 2010 QCCA 1874, autorisation de pourvoi à la C.S.C. refusée le 21 avril 2011, 33985, R.S.I., vol. III, onglet 29, par. 82. Syndicat des infirmières, inhalothérapeutes, infirmières auxiliaires du Cœur du Québec, supra note 111. - 34 Mémoire de l’intimée CSP Exposé concis des arguments exigences en regard des aptitudes requises pour l’exercice d’un emploi, mais ces exigences doivent être raisonnables et avoir un lien rationnel avec l’emploi. 131. L’Appelante réclame de l’Intimée qu’elle l’embauche alors qu’elle est dans l’impossibilité totale d’effectuer la prestation de travail qui découle de l’emploi sollicité, et ce, pour toute la durée envisagée. Faire droit à la demande de l’Appelante consiste à imposer une contrainte excessive à l’Intimée en forçant cette dernière à créer un lien d’emploi avec l’Appelante qui sait, dès le départ, ne pas être en mesure de fournir la prestation de travail. 132. La jurisprudence reconnaît 114 qu’un employeur n’a pas l’obligation de garder à son emploi des employés incapables d’exercer leurs fonctions. Il a été décidé qu’un employeur pouvait rompre le lien d’emploi d’un employé et ainsi le priver de toutes les conditions de travail reliées à son statut dans le cas où l’employé ne pourrait effectuer sa prestation de travail dans un avenir prévisible. A fortiori, l’Intimée soumet qu’elle peut forcément refuser de créer un lien d’emploi avec un employé définitivement incapable d’effectuer la prestation de travail demandée au cours de la période d’emploi. 133. Dans la décision CUSM c. Syndicat des Employés de L’HGM 115, cette Cour a été appelée à examiner la portée d’une clause d’une convention collective prévoyant la perte de l’emploi en cas d’absence pour invalidité. Dans cette affaire, l’employeur était lié à une employée en vertu d’un contrat d’emploi. La convention collective régissant les relations de travail entre l’employeur et l’employée comportait une clause prévoyant la rupture du lien d’emploi en cas d’absence se prolongeant au-delà d’une période déterminée. 114 115 CUSM, supra note 109, R.S.I., vol. I, onglet 12, Hydro-Québec c. SCFP-FTQ, [2008] 2 R.C.S. 561, [Hydro-Québec], R.S.I., vol. II, onglet 18. Voir aussi, Syndicat des employées et employés professionnels-les et de bureau, section locale 571, CTC-FTQ (SEPB) c. Barreau du Québec, 2007 QCCA 64, R.S.I., vol. III, onglet 31. CUSM, supra note 109. - 35 Mémoire de l’intimée CSP Exposé concis des arguments 134. Après avoir indiqué que la jurisprudence ne conclut à l’applicabilité d’une telle clause que si celle-ci satisfait aux exigences applicables en matière d’accommodement raisonnable, particulièrement celle requérant que la mesure soit adaptée aux circonstances individuelles du cas en litige, cette Cour conclut que l’arbitre n’a pas commis d’erreur en décidant qu’il était difficile de concevoir une obligation d’accommodement avec l’employée dans les circonstances116. « [36] L’arbitre ne s’est donc pas limité à appliquer de façon automatique une clause de la convention collective. Il était conscient de l’étendue de l’obligation d’accommodement de l’employeur, mais ne pouvait prévoir le retour au travail de l’employée dans un avenir prévisible. Il a donc eu raison de conclure que l’employeur ne pouvait garder à son service une employée déclarée invalide pour une période indéterminée. » 135. Dans cette dernière affaire, cette Cour a décidé que malgré le lien d’emploi existant entre les parties, l’employeur était justifié de mettre fin à ce lien considérant qu’une période d’incapacité à durée indéterminée « sans expectative de retour au travail » constituait pour l’employeur une contrainte excessive. 136. L’affaire Hydro-Québec c. SCFP-FTQ 117 a porté à nouveau sur les règles protégeant l’employée qui s’absente pour un motif non fautif et celles régissant le contrat de travail, particulièrement sur l’interaction entre l’obligation de l’employeur d’accommoder une employée malade et l’obligation de l’employée de fournir une prestation de travail. 137. Dans cet arrêt, la Juge Deschamps, rendant jugement pour cette Cour, a conclu que l’arbitre de grief n’avait commis aucune erreur de droit en décidant que l’employeur pouvait, en l’espèce, mettre fin au contrat de travail qui le liait à la plaignante. La Cour a reconnu le bien-fondé de la position de l’employeur dans la mesure où ce dernier pouvait faire la preuve qu’au moment où fut prise cette décision administrative, la plaignante ne pouvait, dans un avenir raisonnablement prévisible, remplir la prestation de travail soutenue et régulière prévue au contrat. 116 117 CUMS, supra note 109, par. 36. Hydro-Québec, supra note 114. - 36 Mémoire de l’intimée CSP Exposé concis des arguments 138. La Juge Deschamps rappelle aussi118 que l’obligation d’accommodement d’un employeur est étroitement liée aux obligations fondamentales rattachées à la relation de travail. « [19] L’obligation d’accommodement est donc parfaitement conciliable avec les règles générales du droit du travail, tant celle qui impose à l’employeur l’obligation de respecter les droits fondamentaux des employés que celle qui oblige les employés à fournir leur prestation de travail. L’obligation d’accommodement qui incombe à l’employeur cesse là où les obligations fondamentales rattachées à la relation de travail ne peuvent plus être remplies par l’employé dans un avenir prévisible. » 139. Ainsi, en appliquant le raisonnement exposé dans l’affaire Hydro-Québec c. SCFP-FTQ 119, l’Intimée rencontrerait une contrainte excessive si on lui imposait, comme le souhaite l’Appelante, l’obligation de créer un lien d’emploi avec cette dernière, alors qu’elle est manifestement dans l’incapacité de fournir une prestation de travail pour la durée complète de la suppléance faisant l’objet du contrat de travail. 140. Par ailleurs, la Juge Deschamps 120, citant la Juge L’Heureux Dubé dans la décision Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse) c. Montréal (Ville) 121, rappelle que le but des mesures d’accommodement est de permettre à l’employé capable de travailler de le faire. « [14] Comme le dit la juge l’Heureux-Dubé, les mesures d’accommodement ont pour but de permettre à l’employé capable de travailler de le faire. En pratique, ceci signifie que l’employeur doit offrir des mesures d’accommodement qui, tout en n’imposant pas à ce dernier de contrainte excessive, permettront à l’employé concerné de fournir sa prestation de travail. L’obligation d’accommodement a pour objet d’empêcher que des personnes par ailleurs aptes ne soient injustement exclues, alors que les conditions de travail pourraient être adaptées sans créer de contrainte excessive. 118 119 120 121 Ibid., par. 19. Hydro-Québec, supra note 114. Hydro-Québec, supra note 114, par. 14 et 15. Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse) c. Montréal (Ville); Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse) c. Boisbriand (Ville), [2000] 1 R.C.S. 665, R.S.I., vol. II, onglet 24. - 37 Mémoire de l’intimée CSP Exposé concis des arguments [15] L’obligation d’accommodement n’a cependant pas pour objet de dénaturer l’essence du contrat de travail, soit l’obligation de l’employé de fournir, contre rémunération, une prestation de travail. (…) » (Nos soulignements) 141. En l’espèce, aucune mesure d’accommodement par l’employeur n’est possible afin de permettre à l’Appelante d’effectuer sa prestation de travail de suppléance. 142. Nous soumettons respectueusement que c’est contrairement aux enseignements de l’arrêt Hydro-Québec c. SCFP-FTQ 122 que le Juge Dalphond, dans CSP-1 123, a décidé que d’accorder à une enseignante à temps partiel, invalide pour une durée indéterminée, les contrats qu’elle choisit ainsi que le versement des prestations d’assurance salaire pour la période de cent quatre (104) semaines prévue à la convention collective, ne constitue pas une contrainte excessive pour l’employeur. 143. De plus, il nous apparaît important de rappeler que dans cette affaire CSP-1, l’enseignante concernée bénéficiait d’une liste de priorité ou de rappel, ce qui obligeait l’employeur à lui offrir un contrat de travail en fonction de son ancienneté et de ses qualifications, ce qui n’est absolument pas la situation de l’Appelante qui, étant sur la liste des suppléants, ne bénéficie d’aucun droit de cette nature, ce qui constitue une distinction fondamentale. 144. Par contre, le Juge Dalphond, dans la décision précitée 124, rejoint l’opinion de cette Cour dans la décision Hydro-Québec c. SCFP-FTQ lorsqu’il précise que bien que la convention collective interdise de mettre fin au lien d’emploi d’une enseignante en raison de son invalidité tant que cette dernière peut bénéficier de prestations d’assurance salaire, il peut en être autrement après la fin des cent quatre (104) semaines d’invalidité, s’il y a des indications que l’enseignante ne sera jamais en mesure de fournir une prestation de travail régulière. 122 123 124 Ibid. Syndicat de l’enseignement de Champlain c. Commission scolaire des Patriotes, 2010 QCCA 1874, supra note 112. Ibid., par. 52. - 38 Mémoire de l’intimée CSP Exposé concis des arguments « [52] En ce faisant, il confond lien d’emploi et indisponibilité. Rien ne justifiait alors de mettre fin au lien d’emploi. Au contraire, la convention (art. 5-10.28) interdit de mettre fin au lien d’emploi d’une enseignante en raison d’une invalidité tant que cette dernière peut bénéficier de prestations d’assurance salaire. Il peut en être autrement après la fin des 104 semaines d’invalidité, s’il y a des indications que l’enseignante ne sera jamais en mesure de fournir une prestation de travail régulière, comme dans l’affaire HydroQuébec, précitée. Mais tel n’est pas le cas ici où l’enseignante s’est avérée capable de reprendre le travail en 2006. » 145. Rappelons que la clause 5-10.28, dont il était question dans la citation précédente, ne s’applique pas aux personnes inscrites sur la liste de suppléance, ce qui distingue encore cette affaire du cas à l’étude. 146. Par analogie, lorsque l’Intimée est informée du fait que l’Appelante ne sera aucunement en mesure d’effectuer la prestation de travail demandée, elle peut, à bon droit, prétendre qu’il n’y a pas eu formation de contrat. Dès lors, l’Appelante n’a pas été victime de discrimination à l’embauche. 147. Il importe aussi de s’attarder sur les agissements de l’Appelante avant l’obtention de son certificat de retrait préventif. Le 25 septembre 2006, se sachant alors enceinte, l’Appelante s’est elle-même déclarée non disponible pour effectuer des remplacements, puisqu’elle attendait les résultats de ses tests d’immunité. 148. L’incapacité d’effectuer de la suppléance, déclarée par l’Appelante avant l’obtention de son certificat de retrait préventif, est la même incapacité soulevée par l’Intimée en novembre 2006, au moment de lui refuser la suppléance. 149. Comment l’Appelante peut-elle soutenir qu’en novembre 2006, elle est devenue apte à effectuer le travail sollicité du seul fait d’avoir obtenu son certificat de retrait préventif? Que ce soit en septembre ou en novembre 2006, la situation est la même : il ne peut être reproché à l’Intimée d’agir avec discrimination à l’égard de l’Appelante pour une situation où cette dernière, en septembre 2006, s’est elle-même reconnue dans l’impossibilité d’effectuer la prestation de travail demandée. - 39 Mémoire de l’intimée CSP Exposé concis des arguments 150. Il est impossible pour l’Intimée d’accorder à l’Appelante ce qu’elle réclame. Conclure qu’il y a eu formation de contrat alors qu’elle était dans l’impossibilité d’effectuer la prestation de travail qui en découle consisterait à obliger l’Intimée à contracter avec l’Appelante dans le seul but de lui permettre d’être admise au régime public en vertu de la LSST. 151. Autrement dit, le seul accommodement possible afin de faire droit à la demande de l’Appelante, laquelle réclame le droit d’accès à un régime public sans être employée de l’Intimée, serait de lui accorder un contrat de travail bien qu’elle ne puisse aucunement exécuter le travail de suppléance occasionnelle. 152. Conclure autrement reviendrait à contredire la jurisprudence de cette Cour en forçant la création ou le maintien d’un lien contractuel d’emploi pour la durée totale d’un contrat de travail à durée déterminée, au cours duquel non seulement il n’y a pas d’expectative de retour au travail, mais même une certitude d’absence. 153. Ainsi, la position de l’Appelante est non fondée, car elle signifierait que, sous le couvert de la discrimination en raison de son état de grossesse, l’employeur devrait accorder un retrait préventif à une personne qui n’est pas son employée. Ce serait dire que l’état de grossesse d’une personne oblige l’employeur à lui offrir un contrat d’emploi à titre de suppléante, même s’il n’a aucune obligation de l’engager. 154. En terminant, nous soumettons que les moyens d’appel de l’Appelante ne font voir aucune erreur de droit ou de fait manifeste et dominante de la Cour d’appel du Québec ni d’ailleurs aucune autre erreur. En conséquence, la Cour d’appel du Québec était bien justifiée de décider que la décision de la CLP constitue une des issues possibles et acceptables en l’instance et peut se justifier au regard des faits et du droit. ---------- - 40 Mémoire de l’intimée CSP Ordonnance demandée PARTIE IV – ARGUMENTS À L’APPUI DE L’ORDONNANCE DEMANDÉE AU SUJET DES DÉPENS 155. L’Intimée n’a pas d’argument particulier à soumettre à cette Cour à l’appui de l’ordonnance qu’elle demande au sujet des dépens. ---------PARTIE V – ORDONNANCE DEMANDÉE 156. Pour les motifs énoncés précédemment, plaise à la Cour de : REJETER l’appel. LE TOUT avec dépens. Québec, le 25 juin 2013 _______________________________ Me Paule Veilleux, Me René Paquette, Me Julie Samson, Me Yann Bernard, Me Marie-Claude Pichette Langlois Kronström Desjardins, S.E.N.C.R.L. Procureurs de l’intimée Commission scolaire des Patriotes - 41 Mémoire de l’intimée CSP Table alphabétique des sources PARTIE VI – TABLE ALPHABÉTIQUE DES SOURCES Jurisprudence .............Paragraphe(s) Agropur, Coopérative (division Natrel) c. Rancourt, 2010 QCCA 749 ............................ 41,94 Alexandra Lymberopoulos AZ-50308032 (C.L.P.) et CPE St-Mary, 2005, .......................... 88,109 Bédard et Coifferie des Bouleaux, C.L.P. 177952-31-0202, le 16 avril 2002 ................................. 93 Bell Canada c. Québec (CSST), [1988] 1 R.C.S. 749 .............................. 3,76 Canada (Procureur général) c. Mossop, [1993] 1 R.C.S. 554 ................................. 52 Commission des normes du travail c. Commission des écoles catholiques de Québec, J.E. 95-1527 (C.A.), 1995 CanLII 4648 (QC CA) ............................... 113 CSST c. Albert Pouliot inc., 2011 QCCA 2178 ................................. 55 CUSM c. Syndicat des employés de L’HGM, [2007] 1 R.C.S. 161 ... 123,124,132,133,134 Desjardins et Commission scolaire des Draveurs et al., 2006 CanLII 68784 (QCCLP) .......................... 83,110 Doré c. Barreau du Québec, [2012] 1 R.C.S. 395, 2012 CSC 12 ... 40,59,61,64,65,68,69 Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190 ............. 39,43,51,52,64 Fédération québécoise des massothérapeutes et Jacquart, 2009 QCCLP 1241 ................................. 90 Fondation Canadienne Espoir Jeunesse et Le Groupe d’Entraide Janik inc. et Jessica Gauvin, 2011 QCCLP 638 ................................. 93 Hydro-Québec c. Syndicat des employé-e-s de techniques professionnelles et de bureau d’Hydro-Québec, section locale 2000 (SCFP-FTQ), [2008] 2 R.C.S. 561 Hypothèques Trustco Canada c. Canada, [2005] 2 R.C.S. 601 ... 132,136,137,138,139 ................. 140,142,144 ................................. 82 - 42 Mémoire de l’intimée CSP Table alphabétique des sources Jurisprudence (suite) Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c. Terre-Neuve-etLabrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62 ................................. 51 Nor-Man Regional Health Authority Inc. c. Manitoba Association of Health Care Professionals, [2011] 3 R.C.S. 616 ................................. 52 Provigo et Blanchet et CSST, C.A.L.P., [1992] 1246 ............................... 108 Pushpanathan v. Canada (M.C.I.), [1998] 1 R.C.S. 982 ............................ 52,57 Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse) c. Montréal (Ville); Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse) c. Boisbriand (Ville) [2000] 1 R.C.S. 665 ............................... 140 R. c. Conway, [2010] 1 R.C.S. 765 ................................. 54 Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 R.C.S. 27 ................................. 82 Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier, section locale 30 c. Pâtes & Papier Irving, ltée, 2013 CSC 34 ................................. 51 Syndicat de l’enseignement de Champlain c. Commission scolaire des Patriotes, 2010 QCCA 1874 .......... 127,142,143,144 Syndicat de l’enseignement de la région de Québec c. Ménard, 2005 QCCA 440 ............................... 101 Syndicat des employées et employés professionnels-les et de bureau, section locale 571, CTC-FTQ (SEPB) c. Barreau du Québec, 2007 QCCA 64 ............................... 132 Syndicat des infirmières, inhalothérapeutes, infirmières auxiliaires du Cœur du Québec (SIIIACQ) c. Centre hospitalier régional de Trois-Rivières, 2012 QCCA 1867 ........................ 126,130 Toronto (Ville) c. S.C.F.P., section locale 79, [2003] 3 R.C.S. 77 ....................... 52,62,64 9114-7058 Québec inc. et Commission de la santé et de la sécurité du travail, 2013 QCCLP 296 ............................... 102 - 43 Mémoire de l’intimée CSP Table alphabétique des sources Doctrine CLICHE, Bernard et al., dans le Traité de droit de la santé et de la sécurité au travail, Cowansville (Qc), Yvon Blais, 1993 ................................. 84 LAFONTAINE, Serge, Le retrait préventif de la travailleuse enceinte ou qui allaite : qui décide quoi?, Cowansville (Qc), Yvon Blais, Développements récents en droit du travail (1991) du Service de la formation permanente du Barreau du Québec ................................. 91 Québec, ministre d’État au développement social, santé et sécurité au travail, Politique québécoise de la santé et sécurité des travailleurs, Éditeur officiel du Québec, 1978 ................................. 73 VEILLEUX, Paule, Les maladies infectieuses et le retrait préventif, Cowansville (Qc), Yvon Blais, Développements récents en droit de l’éducation 1999 du Service de la formation permanente du Barreau du Québec ................................. 84 ____________