24heures Schlunegger 280313

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24heures Schlunegger 280313
Fête
A Pâques, le cabri vaudois tente sa chance sur nos
tables
Par Philippe Maspoli. Mis à jour le 28.03.2013 12 Commentaires
Comment être sûr de l’origine de la viande pascale? De Forel (Lavaux) en Australie, la
bataille mondiale est rude.
Chez Pierre Schlunegger, éleveur à Forel (Lavaux), les cabris, petits des chèvres, sont prêts à passer au four à Pâques.
Image: Chantal Dervey
D'où vient la tradition?
Agneau pascal que l’on met dans nos assiettes,
«agneau de Dieu qui enlève les péchés du
monde» pour désigner le Christ, dont les
chrétiens célèbrent la résurrection: à des
niveaux très différents, les deux expressions
montrent à quel point le petit du mouton
Le scandale du cheval remplaçant le bœuf dans les lasagnes a marqué
les esprits. Non sans humour: une caricature parue dans Vigousse
montrait un équidé aux côtés d’un âne gris perplexe dans la crèche de
Noël… Et puisqu’on évoque les traditions séculaires, parlons un peu
de l’agneau qui va remplir de nombreuses assiettes ce dimanche de
Pâques, et du cabri, le petit de la chèvre, minoritaire chez nous, mais
défendu avec chaleur par des passionnés de gastronomie et de terroir.
imprègne en profondeur la symbolique
chrétienne autour de la fête de Pâques.
C’est dans la tradition juive qu’il faut chercher
D’où vient la viande que beaucoup d’entre nous mangeront dimanche
dans la tradition pascale? Pour le savoir, on peut se rendre chez
l’éleveur local. Par exemple à Forel(Lavaux), où Pierre Schlunegger
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les origines des rites autour de l’agneau. Le petit
élève des chèvres – entre 220 et 250 bêtes – depuis trente ans. La
de la brebis se trouvait au centre des fêtes
pression est forte ces jours, en pleine préparation des cabris de lait
âgés de 1 ou 2 mois, dont la viande sera vendue directement à la ferme
pastorales printanières célébrées notamment
chez les Hébreux. Le sacrifice de l’agneau est
ensuite devenu un des rites de la Pâque juive,
(bête entière ou demi-bête), à la veille du dimanche de Pâques.
qui perpétue le souvenir de la libération du
peuple hébreu réduit en esclavage en Egypte.
Ainsi que le relevait le théologien Daniel
Marguerat lors d’une interview publiée sur le
site rts.ch, «cette tradition est passée des juifs
aux chrétiens. La fête de Pâques chrétienne s’est
greffée sur la fête de la Pâque juive.»
Mais que vient faire le cabri dans ces festivités?
Il faut remonter encore une fois aux fêtes
Le combat du cabri
Pour cet éleveur, la chèvre et le cabri sont une passion, si ce n’est un
combat: «Entre 300 et 350 tonnes de viande de cabri, sur les 600
tonnes consommées en Suisse annuellement, sont importées,
principalement de France. Mais cette année les importations sont plus
faibles car nous avons fait des efforts pour nous défendre», affirme
Pierre Schlunegger, qui fait partie du comité de la Fédération caprine
suisse.
pastorales du printemps célébrées dans les
régions méditerranéennes riches en troupeaux
de chèvres. Il se trouve que la biquette est
«saisonnée»: elle met bas régulièrement entre
janvier et mars, juste à temps pour la fête de
Pâques, où l’on peut déguster des cabris de lait.
L’échelle des prix
Gigot d’agneau de lait français (nourri au lait à
la tétée 45-60 jours, prix Boucherie du Pont de
Chailly, Lausanne): Pyrénées, 79 fr. le kilo;
Le cabri de Pâques fait surtout recette auprès des Méditerranéens qui
le dégustent en ragoût. Les Italiens, les Portugais et les Espagnols sont
donc les principaux acheteurs chez Pierre Schlunegger. Mais ce
dernier garde l’espoir d’élargir le cercle de sa clientèle: «Chez nous, la
tradition du cabri s’est perdue. La consommation est surtout forte au
Tessin. Nous faisons de la publicité pour améliorer l’écoulement d’une
production qui n’est pas très lucrative et nous voulons éviter que les
éleveurs ne s’intéressent qu’au lait de chèvre pour le fromage, qui
connaît, lui, un regain d’intérêt.»
Sisteron, 64 fr.; Limousin, 54 fr.
Gigot d’agneau suisse (Boucherie du Pont de
Chailly, Lausanne): 36 fr. 50 le kilo; l’irlandais
est équivalent.
Gigot d’agneau des pays anglo-saxons
(Grande-Bretagne, Irlande, Australie, NouvelleZélande) Migros GE: promotion à 27 fr. le kilo,
prix normal 41 fr. Coop (Suisse, Australie,
Nouvelle-Zélande): promotion à 24 fr. 50 le kilo,
prix normal 35 fr.
Chez l’éleveur Cabri de lait, 22 fr. le kilo;
agneau de lait, 18 fr.; gros agneau, 15-16 fr. (prix
Pierre Schlunegger, Forel (Lavaux), bêtes
entières ou demi-bêtes).
Le cabri reste bien petit face aux 9800 tonnes d’agneau mangées
chaque année dans notre pays, en grande partie en gigot, dont 5700
tonnes proviennent de l’étranger. A Vevey, le boucher Philippe Stuby
se réjouit des commandes en vue du pic de Pâques, qui concentre à
peu près 30% de la consommation nationale: «C’est bien parti, et
assez tôt», relève-t-il. Au marché de l’agneau pascal, le label
garantissant l’origine est roi, notamment le sélectif Label rouge
français: «La majorité des agneaux et des cabris de lait viennent de
France. C’est leur spécialité. Ils sont très forts avec leur système de
labels, meilleurs que nous», tranche José Naef, président des
bouchers vaudois, à Sainte-Croix. Herbert Bühler, patron de la société
d’importation schwytzoise Vecom, ne dira pas le contraire, lui qui
parle de l’agneau de lait français comme des vins et de leurs terroirs:
Sisteron (Provence), Pauillac (Gironde), Bourbonnais (centre) ou
Pyrénées, les goûts diffèrent.
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Face à la vague française de haut de gamme, marquée par des prix
allant jusqu’à 79 francs le kilo en gigot d’agneau de lait chez le
boucher, l’agneau suisse tente de défendre sa place, lui aussi avec des labels, comme Terra Suisse ou Agneau
d’alpage: «Ce dernier a fait bouger les choses», affirme, à Courtepin (FR), Dominique Pasquier, du comité de la
Fédération suisse d’élevage ovin. Mais l’agneau suisse ne fait pas l’unanimité. «Son goût est trop fort. Les gens
préfèrent l’agneau de lait français, plus fin», déclare Sébastien Losey, gérant de la Boucherie du Pont de Chailly,
à Lausanne. Le Veveysan Philippe Stuby tempère: «L’agneau du pays a moins le goût de mouton qu’autrefois.»
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Viande d’outre-mer
Ceux qui ne peuvent trancher entre le haut de gamme français et l’agneau suisse peuvent encore tenter la viande
venue de bien plus loin, de l’autre côté de la Terre. On la trouve surtout dans les grandes surfaces, chez Migros
(Nouvelle-Zélande, Australie) ou à la Coop, dont le porte-parole Ramon Gander résume la situation: «Le
pourcentage des agneaux suisses s’élève à 25%. Nous avons pu augmenter ces ventes, particulièrement grâce au
label Pro Montagna. La viande d’agneau importée provient d’Irlande, de Grande-Bretagne, d’Australie et de
Nouvelle-Zélande.»
A l’achat, un coup d’œil dans les rayons des supermarchés et des boucheries montre que l’agneau suisse se vend
à un prix équivalent à celui de ses congénères d’outre-mer, entre 30 francs et 40 francs le kilo, sans compter les
promotions. Et pourtant, la viande australienne, par exemple, a parcouru une distance qui devrait la renchérir.
Le prix se joue en fait à la production. Assis sur 80 millions de bêtes, le pays des kangourous travaille à un
niveau industriel. Et, comme le relève Dominique Pasquier, les coûts d’élevage des 424 000 moutons suisses
sont nettement plus élevés. (24 heures)
Créé: 28.03.2013, 07h08
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