RACINES200 - oct09

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RACINES200 - oct09
(Photo : Fotolia / Yuri Arcurs)
Magazine Racines, le temps de vivre près de chez vous
Par Yvelise Richard
e de ce dossier
Retrouvez le thèm
dans l’émission
sur RCF Vendée,
,
alier, Prise directe
de Françoise Chev
h.
h à 12
le 9 octobre de 11
“J’ai déménagé
à la retraite”
Logement devenu trop grand ou mal adapté, souhait
de se rapprocher des enfants partis travailler ailleurs, envie de changer
d'air… Les raisons de déménager lorsque arrive la retraite
sont nombreuses. Ceux qui ont sauté le pas nous racontent.
TÉMOIGNAGES
Un départ bien préparé
Katherine, 52 ans, a pris sa
retraite anticipée en juin 2008.
Mariée, trois enfants (tous partis de
la maison), cette infirmière de nuit
habitait en périphérie du sud de
Nantes avant d'emménager à Pornic.
Pourquoi avoir choisi de
changer de lieu de vie au
moment de votre départ à la
retraite ?
On a profité de mon départ en
retraite pour enfin aller vivre là où on
avait toujours rêvé de vivre : au bord
de la mer ! Bien que mon mari soit
toujours en activité, cela ne l’ennuyait
pas du tout de faire la route pour aller
travailler (à 30 minutes). On préférait faire ce choix à ce moment-là,
plutôt que de déménager à l’âge
“normal“ de la retraite, afin d'être
déjà bien établis dans notre vie de
retraités.
L'aviez-vous préparé avant
votre retraite ?
Cela faisait deux ans que nous
recherchions l’endroit où l'on souhaitait s'établir. On avait délimité un péri-
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mètre qui allait des Moutiers-en-Retz
à Saint-Michel-Chef-Chef, avec une
préférence pour Pornic. On se promenait dans les bourgs, certains
quartiers et le long de la côte pour
voir où on se plairait le plus, aussi
bien en hiver que l’été.
En novembre 2007, nous avons
“lancé la machine“ et mis notre maison en vente début janvier. Et, à
notre grande surprise, elle s'est vendue en quinze jours ! Du coup, on
a tout de suite recherché une maison. Cette rapidité nous a évité le
questionnement et les doutes (du
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(Photo : Fotolia / Yuri Arcurs)
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genre “avons-nous bien fait de vendre ?“) que l'on peut avoir lorsque
sa maison est en vente depuis un
petit moment et qu'aucun acheteur
ne se manifeste.
La vente conclue, nous avons
déménagé début avril, et habité pendant deux mois dans un gîte, toujours à Bouguenais, et loué un box
dans un garde-meuble. Cela a été
une petite aventure qui a pimenté
notre vie “rangée“. Nous avons
déménagé le 31 mai 2008 et le
même jour, je finissais de travailler.
Ça c’est extraordinaire !
Sur quels critères avez-vous
choisi votre nouveau logement ?
Nous sommes passés par une
agence immobilière. Nos critères
étaient : une maison basse, près de
la mer, avec un peu plus de terrain
que ce que l’on avait auparavant, de
manière à ce que mon mari puisse
avoir un potager. Mais une maison
pas trop ancienne qui ne demanderait pas de travaux de rénovation, et,
surtout de plain-pied. Ayant travaillé
en rééducation fonctionnelle, j’avais
été confrontée bien des fois à des
familles qui se retrouvaient démunies face aux handicaps de l’un des
leurs.
On voulait également habiter à
proximité d'une gare pour que mon
mari puisse aller travailler en cas de
panne de voiture. Nous ne voulions
pas non plus qu'elle soit trop grande,
car je ne souhaitais pas passer mon
temps à faire du ménage !
Quels conseils donneriezvous aux nouveaux retraités qui
souhaiteraient vous imiter ?
Ne pas attendre d’être en retraite
pour déménager. Car un déménagement, c'est relativement lourd aussi
bien sur le plan physique, intellectuel, administratif (notaire et
banque), émotionnel : l'angoisse que
l'on peut ressentir entre le compromis et la conclusion de la vente, car
les acheteurs peuvent se rétracter.
Avec le recul, vous sentezvous à l'aise dans votre nouvelle
commune ?
Je ne regrette rien ! Je me plais
bien à Pornic, et surtout dans mon
quartier où les voisins sont sympathiques. Et parce que j'avais besoin
de souffler, j’ai fait le choix de ne
m’investir dans aucune association
cette année. Je voulais profiter pleinement de ma retraite : me promener à la plage quand j’en avais envie,
décorer ma maison et profiter de mes
petites-filles (elles disent d'ailleurs
qu'on habite “dans une maison de
retraite“). Mais cette année, je compte
faire partie d’une association. Notre
première maison, nous l'avions choisie en fonction de nos enfants : proximité des écoles, des moyens de
transport, des loisirs… Mais cette nouvelle maison, c'est pour nous deux.
Propos recueillis par Laurenn Gru
“Se donner du temps pour trouver le bon endroit“
ous sommes arrivés en Vendée, en janvier 2004, soit un
mois après mon départ à la
retraite. Nous travaillions en région
parisienne, moi dans une association
intermédiaire, ma femme dans une
maison de l'enfance. Nous sommes
vraiment devenus des retraités en
Vendée. J'aspirais à quitter mon
métier. On a quand même gardé le
contact avec des amis parisiens, mais
on ne les voit plus aussi souvent, bien
sûr.
Nous nous étions donné du temps
pour trouver notre nouvelle maison
où passer notre retraite. Nous
connaissions un peu la Vendée pour
l'avoir parcourue en camping-car. On
N
recherchait une petite maison (moins
grande que la précédente) et avec un
peu de terrain.
Nos enfants étant installés un peu
partout en France (Paris, Toulouse et
dans l'Ardèche), on s'était dit qu'on
serait ainsi au milieu d'eux, sur la côte.
Finalement, on a trouvé une maison
assez grande, dont on loue une partie (indépendante) à la belle saison.
C'est vrai qu'elle n'est pas de plainpied, mais on peut l'aménager pour
qu'elle le devienne, quand on en aura
besoin.
Nous nous sommes intégrés dans
notre commune du littoral, par le biais
du monde associatif. On est allés vers
les autres, sans attendre qu'on vienne
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nous chercher. Sans s'imposer et en
douceur. On essaie d'abord de
connaître les gens. De son côté, ma
femme va à “Lire et faire lire“ pour
aider les enfants et assure du soutien
scolaire le soir. Sans prendre de responsabilités au début, j'ai participé
au club photo de l'association locale
Familles rurales. Et avec le temps, je
l'ai pris en charge, lorsque l'ancien
responsable a passé la main. On a
réussi à introduire progressivement
les appareils photos numériques. Les
choses, il faut les faire petit à petit, il
ne faut pas chercher à les brusquer
Jean-Jacques, 63 ans,
littoral vendéen
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“Pour moi, le cap a été difficile à passer“
ous avons quitté ce village que
j'aimais tant il y a un peu plus
d'un an. Aujourd'hui, nous
vivons dans le bourg de cette même
commune, dans une maison que nous
avions construite, il y a seize ans. C'est
un de nos fils qui vit a présent dans
celle du village.
Cela nous avait semblé judicieux
de prévoir un endroit où vivre nos
vieux jours. Et puis c'était un investissement. J'ai 64 ans et mon mari, quatre ans de plus. Nous sommes tous
les deux en retraite depuis huit ans.
Un peu plus tôt que prévu, notre
locataire nous annonça qu'elle partait…
Même si, dans le fond, déménager à la retraite était une chose que
nous avions décidée, ce changement
a été pour moi un cap assez difficile.
J'avoue que j'ai encore du mal à me
sentir totalement bien dans ce nouvel environnement. D'autant plus que
notre déménagement a coïncidé avec
une série d'événements douloureux.
Ça n'aide pas…
Mais surtout, j'ai souvent dit que
j'étais amoureuse du village où nous
avons vécu plus de quarante ans, à
plusieurs kilomètres du bourg et sans
N
voisinage. J'y étais tranquille, je passais du temps au jardin, mon mari
agriculteur n'était jamais très loin, je
gardais les petits-enfants…
C'est cette indépendance et cette
intimité qui me manquent le plus à
présent. Ici il y a une telle proximité !
Devant ou derrière la maison, tout le
monde voit ce que vous faites.
D'ailleurs, je n'ai pas vraiment envie
de faire mes courses en centre bourg
(je sais que ce n'est pas très correct
vis-à-vis des commerçants), j'y vais
parfois à vélo, mais très rarement à
pied.
Je ne suis pas une femme
d'intérieur. J'aime gratter la terre !
Comme chez nous le jardin est tout
petit, je continue de m'occuper de celui
de notre ancienne maison.
Progressivement, je m'habitue
quand même. Les copines, les enfants
passent me voir et me soutiennent à
leur façon. Souvent, les gens me disent
que j'ai de la chance, que je suis bien
ici… Je sais qu'ils ont raison, mais
comme expliquer… j'étais tellement
attachée à ma vie de village… Pourtant, j'avais toujours dit que je ne ferais
pas comme nos mères : rester vivre
loin de tout et en étant dépendante
des enfants. Nos générations ne peuvent plus raisonner comme ça.
Mon mari n'exprime pas facilement
ses sentiments et ne se pose pas
autant de questions que moi ! Mais il
a très bien compris mon mal-être et
un jour il m'a confié que pour lui aussi
ça été dur.
Le plus important, il est vrai, c'est
que nous soyons tous les deux ensemble en bonne santé. Dans ce sens, je
pense qu'il fallait déménager pendant
qu'il était encore temps. Je vois autour
de nous des personnes fragilisées par
la maladie et pour qui quitter la maison est devenu trop lourd.
Notre fils m'avait proposé de prendre plus de temps et d'emménager à
la place où nous sommes actuellement, le temps que je sois prête à
quitter le village. Je n'ai pas voulu. Il
fallait partir une bonne fois pour
toute.
J'ai plein d'arguments en faveur
de ce déménagement. C'était le bon
choix. Mais je n'ai pas totalement fait
le deuil de notre vie d'avant. Il faut
que les saisons passent, comme on
dit.
Anne, 64 ans (Vendée)
De l'importance d'un cocon protecteur
Dans son dernier
livre, le psychologue Patrick
Estrade a examiné nos
manières d'habiter nos maisons, de se les approprier
ou de leur donner une âme.
Face à la “maison prison“, il
oppose la “maison refuge”,
la maison “ouverte sur le
monde ou sur les rires et les
jeux“.
L'auteur a aussi regardé
nos manières de quitter une maison
ou d'en changer. Tout le monde a
vécu, vit ou vivra un déménagement.
C'est l'un des moments les plus cruciaux de notre vie domestique. Com-
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ment se fait le passage d'une
maison à une autre : que
laisse-t-on derrière soi et que
trouve-t-on en arrivant dans
son nouveau logement ? Un
chapitre est consacré aux
diverses incidences d'un
déménagement sur un individu : peur du changement,
remise en cause des habitudes, crise et décision, tri et
vide (au risque de voir disparaître une partie de son passé).
La maison sur le divan, tout ce que nos habitations révèlent de nous, de Patrick Estrade,
collection Réponses, aux éditions RobertLaffont. 318 pages. 19 €.
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ENQUÊTE IPSOS
Pourquoi les seniors déménagent-ils à la retraite ?
ne récente enquête Ipsos(1) a
révélé que près d'un tiers des
Français souhaite déménager
à l'heure de la retraite. Pour quelles
raisons et pour aller où ?
La longévité en France est l'une des
plus importantes dans le monde :
l'espérance de vie d'une personne de
60 ans, aujourd’hui, est de 26,9
années si c'est une femme, et de 22
années pour un homme.
Autant dire que cette seconde vie
peut entraîner des changements pour
les nouveaux retraités. Ils n'hésitent
plus à quitter la région dans laquelle
ils ont mené leur carrière professionnelle pour changer d'air en s'installant
ailleurs selon différents motifs : le climat et l'ensoleillement, les paysages
et la tranquillité du cadre (critères de
sélection pour 34 % des personnes
interrogées).
L'accent est aussi mis sur les équipements que l'on va trouver dans sa
ville d'adoption (santé, services, commerces… cités par 22 % des seniors),
avant même l'envie de revenir dans
sa région d'origine (12 %).
L'une des principales raisons invoquées à ce déménagement est la
volonté de se rapprocher de ses
proches (enfants ou parents). Une raison mise en avant par 47 % de ces
seniors. Une envie tempérée cependant par un désir d'indépendance
marqué. Lorsque l'âge s'accroît, ce
besoin de vivre à proximité des siens
augmente (pour combattre la solitude
ou la perte d'autonomie).
Le nouveau logement de ces
seniors doit répondre à leurs attentes :
pour résumer, les jeunes retraités souhaitent en majorité vivre dans une
maison neuve, de préférence hors
lotissement mais en ville plutôt qu'à
la campagne, et dont ils seraient propriétaires (mais après 70 ans, on pri-
U
Se rapprocher de la famile (parents, enfants…)
fait partie des premiers arguments pour déménager à la retraite.
vilégie l'appartement, et si possible
en centre-ville).
Cohabiter ?
Pour ceux qui possèdent une résidence secondaire, la solution toute
trouvée consisterait à en faire leur
résidence principale. Avec la nuance
cependant, qu'avant d'investir totalement cette maison de vacances, il est
prudent d'y vivre au moins un an avant
de vendre son habitation principale
pour être sûr de son choix. De plus, des
travaux (chauffage, installations sanitaires, appareils ménagers…) seront
souvent à prévoir pour améliorer son
confort. L'environnement dans le village
sera-t-il aussi animé que durant la saison des vacances (commerces fermés,
animations en baisse…) ?
Nouvelle tendance qui émerge, la
cohabitation ne fait pas peur aux nouveaux retraités : 46 % d'entre eux
n'excluent pas l'idée de partager leur
logement avec des gens plus jeunes
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(comme des étudiants), une idée qui
fait son chemin notamment parmi les
jeunes seniors (51 % des 50-59 ans
seraient pour, alors qu'ils ne sont plus
que 40 % passé 70 ans). Mais les résidences réservées aux seniors reçoivent
l'adhésion des plus anciens (à 50 %
chez les plus de 70 ans) : résidences
services ou foyers-logements, après
c'est une question de coût à évaluer.
Quant à la mode de passer sa
retraite à l'étranger, qui se développe
depuis quelques années, elle est
certes tentante, mais pour seulement
22 % des seniors,et majoritairement,
parmi les plus jeunes.
1) Enquête réalisée auprès de 798 personnes
âgées de 50 ans et plus, issues d'un échantillon national de 2020 personnes représentatif de la population française âgée de 15 ans
et plus.
Erratum : Retour sur l'article sur les Caisses à
savon de Beaulieu, publié dans Racines d'août
2009. La personne à l'origine de cette manifestation était Maurice Poissonnet, premier adjoint du
maire de la commune à cette époque (en 2002).
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