Il faut tout un village pour élever un enfant Individuation et

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Il faut tout un village pour élever un enfant Individuation et
Il faut tout un village pour élever un enfant Individuation et socialisation Par Véronique Sichem Conférence Institut d’analyse transactionnelle France-­‐‑Belgique, Lille, France, Février 2007 Introduction Devenir soi L’être autonome est un être à la fois socialisé et individué. Comment devient–on ce qu’on est ? D'ʹune manière générale, l'ʹorientation des analystes transactionnels est de permettre à chacun de forger la suite de sa trajectoire de vie en étant plus consciemment acteur de sa destinée et en développant la capacité de se réaliser tout en restant alliés aux autres (A2). Et le scénario, plan de vie issu tant des mémoires individuelles (E2) autant que collectives (P2), des rapports intergénérationnels autant que du contexte dans lequel vit la personne, peut s'ʹobserver tant dans l'ʹangle de sa formation, de son traitement et de la prévention. Pour devenir soi, il est question de traverser la tension née des deux processus complémentaires et articulés que sont la socialisation et l’individuation. La socialisation conditionne l'ʹintégration harmonieuse à la société et ne repose en rien sur un mécanisme spontané. L’individuation quant à elle, opère un mouvement psychologique de la conformité au groupe à « être vraiment soi-­‐‑même ». Ces deux processus nous rappellent que d’un point de vue systémique, l’Homme est à la fois une partie d’un tout et un tout en lui-­‐‑même. L’Homme est une partie d’un tout On connaît un être quand on connaît l'ʹensemble, la totalité, du système dont il est une partie. Il est donc un élément de la société et est déterminé par le tout dont il fait partie. Ainsi, par la connaissance et la compréhension de ce tout, l’on appréhende un certain nombre de propriétés de l'ʹélément étudié. Dans la perspective de l’Homme comme membre d’une collectivité, , sa fonction est de participer, s’intégrer, se fondre dans le groupe afin que celui-­‐‑ci ait plus d’efficacité, de protéger les autres et d’être protégé par eux, comme un animal par le troupeau, de contribuer à la survie de l’espèce à l’intérieur d’une communauté concrète. Et à la fois, l’Homme est un holon, du grec ολoς (holos -­‐‑ entier). 1
Ce tout est un ensemble de parties, une ensemble d’états du moi, dont la somme est plus que ses parties. Sa fonction est de s’affirmer, de se protéger et de survivre comme individu. Participer à la collectivité et consolider son identité Un double tempo, participation et affirmation, nous constitue tout au fil de la vie et se manifeste par une série d’attachements et de séparations alternées. Ces phénomènes mobilisent des émotions, des pensées, des comportements, des manifestations somatiques, et s’inscrivent entre développement affectif et intellectuel. La participation à la collectivité et la consolidation de l’identité individuelle s’articulent à l’échange des signes de reconnaissance, conditionnels ou inconditionnels, positifs ou négatifs, verbaux ou non, apportés par l’environnement à travers les transactions avec l’individu. Pour s’affirmer comme individu singulier, l’Homme va vers le monde pour le conquérir, attend de la reconnaissance positive et craint ou rejette la reconnaissance négative. En termes émotionnels, la colère et la peur participent à l’énergie d’affirmation. La colère apparaît devant un obstacle ou un préjudice et permet de trouver les ressources pour lever l’obstacle ou obtenir réparation. La peur apparaît face à une menace ou un danger, réels ou fantasmés, et permet la vigilance, la réassurance et la protection. Pour s’intégrer dans un groupe, l’Homme tend à effacer les différences, à arrondir les angles, à donner de la reconnaissance à autrui et accepter la reconnaissance d’autrui. La joie et la tristesse sont les émotions participatives préférentielles. La joie apparaît aux moments de découverte, de rencontre, de retrouvaille, des réussites et facilite le partage. La tristesse émerge dans les situations de perte, de renoncement et appelle soutien et réconfort. Raisonnons en termes de processus S’il n’ y a pas d’individu sans société ni de société sans individu, j’ai fait le choix d’une méthode qui s’énonce ainsi : plutôt que raisonner en termes d’individu et-­‐‑ou de société, nous raisonnons ici en termes de processus et de complexité des processus de socialisation et d’individuation. Comme le terme processus l'ʹindique, les mouvements d’apprentissages s'ʹeffectuent chez l'ʹenfant dès son plus jeune âge de façon graduelle, gagnant à chaque cran de son développement, compétences et capacités nouvelles. Développement et autonomie L’idée d’autonomie de Berne rejoint cette conception, et pour vivre en accord avec soi et en société, quatre facultés nous sont nécessaires : 2
la confiance et la sécurité de base qui permettent de reconnaître ses compétences et ses limites, de les exprimer spontanément et d’agir à partir d’elles • la conscience de soi et d’autrui qui permet de connaître nos pensées, sentiments et actions propres et ceux-­‐‑ci comme différents de ceux d’autrui • la compréhension des relations interpersonnelles qui permet d’appréhender ce qui se manifeste, d'ʹajuster sa manière d'ʹentrer en contact avec les autres, d’assumer la responsabilité des actes et paroles, et d’agir de manière solidaire plutôt que violente et rend possible l’intimité telle que Berne décrit. • le contrôle de soi qui conduit aux capacités de responsabilité et d’interdépendance De multiples inégalités d'ʹaccès, sociales, familiales et culturelles interviennent dans le développement de l’enfant, et ce, même si nous sommes animés d'ʹun désir d'ʹégalisation et de démocratisation. Le tempérament Certains enfants se montrent d’emblée plus sociables que d'ʹautres, attirant ainsi l'ʹintérêt et la sympathie des autres. Leurs contacts sociaux chaleureux s'ʹen trouvent multipliés, ce qui facilite le développement de leurs habiletés. Le développement psychomoteur Les capacités psychomotrices de plus en plus larges et fines de l'ʹenfant vont au fil du temps l’aider à diversifier ses contacts et ses échanges avec l’environnement, lui permettant de mieux le reconnaître et de mieux se connaître en relation avec lui. Le développement cognitif Les habiletés cognitives vont permettre à l’enfant de se détacher peu à peu de son point de vue égocentré pour mieux comprendre les sentiments et les besoins des autres à côté des siens. La conscience morale Les enfants qui sont en mesure d’accepter comme leurs, les règles, les valeurs et les conventions imposées par la société, développent le sens de l'ʹautodiscipline et l'ʹintériorisation d'ʹune conscience morale, et développent le contrôle de soi se montrent plus constants, plus capables de faire des choix, agissent d'ʹune manière plus conforme à leurs besoins tout en restant en accord avec la collectivité et conservent ainsi une meilleure santé mentale. La réceptivité de l'ʹentourage. La manière dont les adultes décodent les gestes et les mimiques de l’enfant influencent sur la manière de répondre à ses besoins. •
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Les messages de l’environnement Les messages de l’environnement, à commencer par ceux de leurs parents, jouent un rôle important dans le développement de la sociabilité, du contrôle de soi et de la conscience morale. La qualité du lien d'ʹattachement Tous les enfants ne bénéficient pas d’un lien d'ʹattachement sécurisant qui garantit une certaine sociabilité, lui donne la confiance et la sécurité nécessaires pour établir de bonnes relations avec les autres et avec lui-­‐‑même. Ceux qui, enfants, peuvent vivre des liens sécurisants avec plusieurs adultes voient leurs sources de signes de reconnaissance se multiplier et sont aidés à comprendre comment ajuster ses comportements. 5. Remarque de vocabulaire en psychologie Je voudrais préciser la signification de certains termes utilisés dans mon texte. Ainsi, comme dans l’approche psychanalytique, je vais utiliser le terme « mère » pour signifier « l’environnement ». Winnicott ajoute que la mère est « suffisamment bonne et normalement dévouée » pour la distinguer de la mère pathologique. J’utiliserai le terme « adualité » ou « indifférenciation » pour signifier l’unité enfant-­‐‑mère, ou plus clairement, bébé-­‐‑environnement ». Et j’utiliserai le terme « père » qui signifie « aimer, soutenir et contenir la mère » car c’est à ces conditions qu’elle peut être « suffisamment bonne et normalement dévouée ». A la différence de Winnicott ou de Berne qui parlent des personnes, je considère « mère » et « père » en tant que fonctions qui peuvent être représentées par la maman et le papa, ou d’autres personnes. La socialisation 1. Définition Le dictionnaire nous dit que c’est « l’apprentissage de la vie en société visant l'ʹadaptation à l'ʹenvironnement social, par l'ʹassimilation des normes, des valeurs, des structures intellectuelles et culturelles de son groupe d’appartenance, et des savoirs pratiques du milieu ». La socialisation désigne donc l’ensemble des mécanismes par lesquels un individu intériorise les modèles culturels de la culture dans laquelle il vit et agit, et par lesquels il construit son identité sociale. Elle s'ʹétablit par l'ʹintermédiaire de la famille, du milieu scolaire et du milieu socio-­‐‑culturel dans lequel baigne l’enfant (milieu professionnel des parents, associations, médias,…) et est le résultat à la fois d'ʹune contrainte imposée par ces « agents sociaux » mais aussi et surtout d'ʹune interaction entre l'ʹindividu et son 4
environnement. La socialisation ne repose en rien sur un mécanisme spontané : l'ʹenfant doit être guidé, conseillé, encouragé, recevoir du feed-­‐‑back des adultes responsables de son éducation pour acquérir une certaine discipline. Et faciliter la coopération de l’enfant implique que les relations avec lui s’appuient sur des relations explicites, chaleureuses et constituée d’appréciation réciproque. es parents et les professionnels de l’éducation et de la santé jouent, par leur engagement affectif et leur exercice le plus adéquat possible d’une certaine discipline, un rôle déterminant dans le défi de la socialisation : ils ont comme mission de répondre aux besoins de l'ʹenfant, de lui apprendre à tolérer une certaine frustration, de développer sa confiance en lui, le contrôle de soi et une conscience morale, de l'ʹaider à identifier et à développer ses ressources. De sorte qu’il puisse agir tant que faire se peut lui permettant d'ʹagir pour son propre bien-­‐‑être et celui de tous. 2. Etapes de socialisation La socialisation primaire C’est la première étape de socialisation d’un nouveau-­‐‑né par l'ʹintermédiaire de la famille, puis plus tard, de la crèche, de l’école, des pairs et des média. Cette socialisation est importante car elle va apprendre à l’enfant à vivre en société. Il s'ʹagit là d'ʹun aspect important du développement de l'ʹenfant puisque la socialisation conditionne l'ʹintégration harmonieuse au sein des groupes dont nous sommes membres et plus largement de la société toute entière. Les enfants sont capables de s'ʹengager dans des relations sociales, limitées mais souvent harmonieuses, avec d'ʹautres enfants et ce, dès l'ʹâge de six mois. Vers 6 mois , e bébé peut tout en buvant son biberon, échanger des jouets. Entre 10 et 12 mois, il pleure souvent d'ʹémotion lorsqu'ʹun autre bébé est en larmes. Vers 13 ou 14 mois, il caresse ou embrasse l'ʹenfant qui pleure. Vers 18 mois déjà, il peut aider à consoler un enfant en lui offrant un jouet pour remplacer celui qui fait défaut. Ces exemples montrent que, très jeune, l'ʹenfant est sensible aux personnes qui l'ʹentourent et spécialement aux autres enfants. Le milieu où l’enfant passe la journée, la crèche, lieu de garde, dont donc un lieu privilégié d'ʹapprentissage social : l’enfant peut y observer, imiter, exprimer, tester, expérimenter en jouant avec des enfants de son âge. La socialisation secondaire Elle se superpose à la première forme de socialisation et va se faire par l'ʹentreprise, les pairs, les amis... et à travers les événements importants de la vie comme le mariage, naissance du premier enfant, mariage de ce dernier, divorce, enterrement, fêtes, rituels… 3. 5
Socialisation, reproduction sociale et changement. Si on voulait fabriquer une personne exactement comme vous ? Quels genre de parents devraient-­‐‑elles avoir ? Que diraient-­‐‑ils ? Qu’est-­‐‑ce qui serait important pour eux ? Comment vous l’apprendraient-­‐‑ils ? Ce n’est pas parce que la socialisation favorise la reproduction sociale qu’elle élimine pour autant les possibilités de changement social. Certains sociologues insistent sur la socialisation comme facteur de reproduction sociale alors que d’autres considèrent au contraire que l'ʹindividu socialisé joue un rôle actif sur la société elle-­‐‑même. Ainsi, deux définitions de la socialisation co-­‐‑existent. La première est normative et parle de facteurs de reproduction sociale. La socialisation, à travers apprentissage méthodique de règles et de normes par les jeunes générations, favorise et renforce l'ʹhomogénéité de la société. Ainsi, pour Emile Durkheim ou plus tard pour Henri Laborit, la société exerce une contrainte, un pouvoir de coercition, sur l’individu qui doit intérioriser les principales règles et les respecter; les comportements individuels sont dès lors socialement déterminés. Pierre Bourdieu souligne que le déterminisme est le fait qu'ʹun comportement, une situation sont déterminées à l'ʹavance compte tenu de certaines caractéristiques socio-­‐‑
démographique comme l'ʹâge, l'ʹappartenance à un milieu social d'ʹorigine… La reproduction sociale est un mécanisme sociologique de maintien de la position sociale et des façons d'ʹagir, de penser et de sentir d'ʹune famille. Exemple : les enfants des milieux populaires auront tendance à ne pas faire d'ʹétudes longues. Toujours selon Bourdieu, cette reproduction sociale est favorisée par l'ʹinégale répartition des capitaux économique, culturel et social entre les classes sociales. Les familles des classes dominantes cherchent à maintenir leur place dans l'ʹespace social et utilisent l'ʹécole afin de reproduire leur capital culturel. La seconde est cinétique et parle de facteur de changement social La socialisation correspond à l'ʹensemble des interactions par lesquels se construit l'ʹidentité sociale. L’individu socialisé est capable de s'ʹadapter, en fonction de ce qu'ʹil a appris dans des situations très différentes les unes des autres, et il interprète les valeurs plutôt qu'ʹil ne les apprend, les faisant ainsi évoluer et favorisant le changement social. Piaget, d’ailleurs, dans sa théorie sur le développement de l’intelligence, et a sa suite, Eric Berne, Daniel Stern, Boris Cyrulnik pour n’en citer que quelques uns, ont montré que l’enfant n’est pas le réceptacle passif des messages de son environnement. Piaget décrit la croissance cognitive de la personne et son apprentissage comme un processus continu d’adaptation, basé sur deux séquences articulées et indissociables, l’assimilation et l’accommodation. 6
L’assimilation est le processus par lequel « toute liaison nouvelle est intégrée en un schème connu, c’est à dire en une structure antérieure ». Le mouvement est un mouvement de l’inconnu au connu en quelque sorte. Pour le dire en termes d’AT, la réalité est filtrée pour correspondre au cadre de référence et tout ce qui y paraît non assimilable, est laissé pour compte, raboté du champ de la conscience ou redéfini. L’accomodation est le processus par lequel la personne accepte de remanier ses structures pour mieux tenir compte de la réalité et pouvoir l’utiliser à son avantage. Un peu comme les deux faces d’une même pièce de monnaie, elles sont mises en œuvre en alternance selon les nécessités de l’action. C’est un apport majeur car il souligne que les nouvelles expériences ne sont pas juxtaposées aux anciennes mais s’y intègrent. Ce qui sera moteur de la curiosité chez l’individu. Il n’accomode pas seulement sa pensée au réel, en retour, il adapte le réel à lui-­‐‑même par l’action. Nous y reviendrons dans le processus d’individuation. Ces phases interviennent dans la socialisation. Par l'ʹassimilation, le sujet intériorise son environnement et tend à se suradapter en fonction de lui pour répondre aux pressions, exigences, contraintes de son environnement et diminuer ses sentiments d'ʹanxiété et d'ʹintensité. Par l'ʹaccommodation, au contraire, le sujet tendrait à agir sur son environnement pour le modifier et qu’il réponde plus à ses désirs. Le changement social, c’est la modification plus ou moins fondamentale des normes et des valeurs dans une société donnée. La socialisation n'ʹest pas un processus unidirectionnel et l'ʹindividu n'ʹest pas un être passif. Si l'ʹindividu est marqué par les valeurs de sa société et fait l'ʹapprentissage de certaines normes et de règles, il peut constamment se remettre en question par ses demandes et par la place et le rôle qu'ʹil entend jouer. On constate d’ailleurs que les individus n'ʹont jamais tout à fait les mêmes croyances, les mêmes valeurs et les mêmes manières de vivre que leurs parents. L’individuation 1. Définition Le terme « individuation » apparaît au XVIe siècle et est emprunté au latin scolastique individuatio. Il est à distinguer de l’individualisation qui est une attitude pédagogique qui consiste à répondre aux besoins de chaque individu. Tandis que l’individuation est le processus par lequel un individu se constitue comme être singulier. Le principe d'ʹindividuation, chez les scolastiques et chez Leibniz, est ce qui confère au type spécifique une existence singulière : l'ʹindividuation par la forme, par la matière. Et en philosophie, c’est la réalisation d'ʹun type spécifique dans un individu. C’est Jung le premier qui utilise ce terme en psychologie pour parler de la seconde moitié de la vie : dès que l'ʹindividu a établi sa place dans le monde, une nouvelle exigence, émerge celle d'ʹêtre vraiment lui-­‐‑même. L'ʹarchétype du soi suscite et dynamise le processus 7
d’individuation : dans Dialectique du moi et de l’inconscient, il écrit que "ʺL'ʹindividuation n'ʹa d'ʹautre but que de libérer le Soi, d'ʹune part des fausses enveloppes de la persona, et d'ʹautre part de la force suggestive des images inconscientes"ʺ. L’individuation est donc le processus de formation et de particularisation de l'ʹindividu, et plus particulièrement, de l'ʹindividu psychologique comme être distinct de l'ʹensemble. Processus complexe de différenciation et d'ʹélargissement de la vie psychologique consciente qui passe par différentes étapes. Pour Jung, nombre de conflits inconscients résultent de la difficulté à accepter cette dynamique qui vient décentrer le sujet conscient de sa position habituelle et le confronte à des parts de lui-­‐‑même qu'ʹil a l'ʹhabitude d'ʹignorer. Il décrit les contenus inconscients avec lesquels l'ʹindividu a à faire : • la persona qui représente l'ʹidentification de la personne avec son rôle dans la société, • l'ʹombre qui contient tout ce que la personne juge moralement répréhensible, • l'ʹanima (pour les hommes), ou l'ʹanimus (pour les femmes), qui représentent respectivement les valeurs féminines et masculines. Tous les concepts psychologiques énoncés et définis par Jung se caractérisent par leur structure bipolaire, les deux pôles en présence générant une tension qui peut se bloquer, sous forme d’un dilemme ou d’une impasse mais dont peut aussi jaillir l'ʹénergie psychique si la personne concilie le conscient et l'ʹinconscient, l'ʹattitude extravertie avec l'ʹattitude introvertie, etc A sa suite, Bernard Kaempf parle pour le processus d’individuation d’un processus de réconciliation ou de rétablissement d'ʹun lien entre le conscient et l'ʹinconscient collectif. 2. Etapes d’individuation selon la psychanalyse Stade 1 Du cri primal à l’être de besoin -­‐‑ L’adualité -­‐‑ Apports majeurs de Winnicott Sur le plan relationnel Avant la naissance, la mère s’est déjà centrée sur le bébé à venir à partir de son imaginaire et des réactivations de ses souvenirs de l’enfance. A la naissance, tout commence par des cris, des gesticulations, des grognements de l’enfant qui n’indiquent rien sur le contenu de ce que veut l’enfant. Mais très vite, ces éléments seront interprétés, fort heureusement, par la mère et le père, comme un appel : « sois une mère pour moi, quelqu’un qui comble mes besoins ». Et par ce fait même, ils identifient le nouveau-­‐‑né à un être de besoin. Dès lors, du premier cri aux vagissements et babillages, l’être humain tente, par tous les moyens disponibles, d’exprimer ses états d’âme, ses sensations et ses besoins que les parents tentent de comprendre : que veut-­‐‑il ? a-­‐‑t-­‐‑il soif ? faim ? mal ? est-­‐‑il sale ? … La mère entre dans un état schizoide sain ou symbiotique normal qui va perdurer en s’estompant progressivement. En s’adaptant aux besoins de l’enfant, elle assure la survie mais crée 8
une illusion de toute puissance chez l’enfant (l’objet vient à l’enfant quand il le crée) puis en se désadaptant progressivement (l’objet va résister progressivement), elle lui offre l’autonomie mais le confronte aussi à l’inconfort de la réalité. Avant le langage du contenu ou de l’information (c’est à dire les sons articulés, la langue parlée et la langue écrite), c’est le langage essentiel et existentiel de la relation à l’autre qui prime. Winnicott décrit les fonctions de la mère : • Le holding représente tous les moyens utilisés pour donner un support et du soutien psychologique • Le handling représente tous les moyens non intrusifs de soigner l’ enfant physiquement, de favoriser ainsi le temps, l’espace, le corps et la limite du corps... • L’object presenting représente tous les moyens dont la mère présente l’enfant au monde, progressivement et répétitivement Grâce à la qualité de soins et au contact chaleureux, l'ʹenfant apprendra que la mère est là pour répondre à ses besoins physiques et psychologiques et il s'ʹattachera à elle. Ce lien d'ʹattachement permettra la participation de l'ʹenfant au développement de sa socialisation, dont . Stade important, vers 3 mois : le sourire dit social, c’est à dire celui qui est fait en réponse à un stimulus de la mère. Sur le plan cognitif Piaget déjà mettait l’accent sur la présence d’une intelligence précoce chez l’enfant mais qui a des modalités très différentes de celle de l’adulte. L’on parle d’adualité ou de relation mère-­‐‑enfant indifférenciée, c’est d’une part parce que l’enfant ne survit pas sans son environnement et d‘autre part, parce que l’enfant s’inscrit encore dans des actes pré-­‐‑intelligents à dominance sensori-­‐‑motrice, appelées « réactions circulaires ». Avant 5 mois Les premières habitudes acquises consistent en des réactions circulaires primaires c’est à dire que l’enfant tend à conserver un résultat trouvé par hasard, sans aucune conduite de recherche. Par exemple, dans un espace visuel, buccal, postural ou auditif, il regarde, suce, écoute, babille et peut par exemple, produire un son au hasard et le prolonge par plaisir des sensations que ce son produit en lui. Vers 5 mois Piaget parle de réactions circulaires secondaires. L’enfant produit un acte, le conserve et cherche à le retrouver. C’est le début de l’intention et le débaut d’une certaine causalité. Elle est décrite comme le début de la conscience du monde externe, du désir et de la direction d’un acte, même si au départ, le but n’est pas posé d’avance et les moyens ne sont pas différenciés. Cela va permettre progressivement à l’enfant de savoir que l’objet existe même quand il est hors de son champ de vision. 9
Stade 2 La castration primaire ou sevrage -­‐‑ De l’être de besoin à l’être de désir La relation à deux -­‐‑ Apports majeurs de Mélanie Klein Sur le plan relationnel La castration est une limite posée, qui s’opère sur la relation, pas sur l’être. La première limite posée, c’est la mère qui va l’agir en se désadaptant progressivement du bébé : ainsi, quand l’enfant va appeler l’objet, celui-­‐‑ci va résister un moment et l’enfant va faire l’expérience de la frustration. C’est le stade dit du sevrage. Au sens premier, comme au sens figuré. En permettant à l’enfant de boire un autre lait que le sien, la mère aide le bébé à se « décoller » d’elle et elle de lui, ouvrant l’enfant au monde extérieur, l’aidant à se différencier d’elle, lui permettant d’éprouver et de traverser la frustration) et chaque fois qu’elle participera à un autre sevrage (passer de la maison à la crèche, de la crèche à l’école, …). Un élément clé est l’acquisition de la permanence de l’objet. Ainsi, jusqu’à 8-­‐‑10 mois, si l’on cache un jouet sous son tapis de jeu, l’enfant croit qu’il a disparu car l’objet n’existe pas en-­‐‑dehors de lui. En fait, des recherches postérieures à Piaget, celles de LECUYER, ont montré que l’enfant avant 8-­‐‑10 mois, a conscience des propriétés de l’objet même quand il a disparu mais ne dispose pas d’une sensorialité suffisamment coordonnée et d’une mobilité suffisante pour chercher l’objet au bon endroit. A un moment donné, l'ʹenfant acquiert ses habiletés et aussi par voie de conséquence, la permanence de l'ʹobjet : il commence à comprendre rationnellement et progressivement que les objets existent à l'ʹextérieur de lui et continuent d'ʹexister même s'ʹil ne les perçoit pas par un de ses 5 sens. Lecuyer insiste qu’à ce stade, l’enfant dispose d’une suffisante relation de causalité pour anticiper le point de chute d’un objet et d’une suffisante mobilité pour le retrouver. L’objet extérieur existant pour lui-­‐‑même et par lui-­‐‑même, l’on parle alors de différenciation et d’individuation : toi est un autre. Ce stade que j’illustre ici avec un jouet se passe de la même manière avec sa mère et c’est l’objet transitionnel (le doudou qui symbolise sa mère) qui lui permet d’attendre son retour, ouvre à l’accès au symbole chez l’enfant et au début du langage articulé. Avant la permanence de l’objet Mélanie Klein avait montré en son temps que ce premier objet pulsionnel, la mère, était tantôt perçu dans la représentation de l’enfant en "ʺbon "ʺ objet idéalisé, tantôt en « mauvais » objet. Berne parle du P1+ et du P1-­‐‑ qui résultent respectivement de l’incorporation du bon ou du mauvais objet. P1 possède donc à la fois des aspects + résultant des expériences de bien-­‐‑être de l’enfant avec sa mère et des aspects – résultant des expériences de mal-­‐‑être de l’enfant avec sa mère. Et lorsque les analystes transactionnels parlent de la mère Fée pour le P1+ et de la mère Sorcière pour le P1-­‐‑, ils évoquent non seulement les attitudes réelles de la mère mais aussi la perception en termes de bien-­‐‑être et de mal être qu’a l’enfant. 10
Après la permanence de l’objet L’enfant par le soutien et la stabilité de son entourage a développé un sentiment stable de lui et de l’autre qui lui permet d’unifier les images « bonne » et « mauvaise » en une seule image, plus réaliste et fiable. En interne, au fur et à mesure que A1 va développer une représentation plus constante de l’objet, il peut s’appuyer sur les qualités et sources de soutien de la mère et se les remémorer même si sa mère est absente, déçue ou fâchée contre lui. Une caractéristique de la mère saine est le mélange de sentiments d’amour et de haine vis-­‐‑à-­‐‑vis de l’enfant ainsi que l’acceptation de cette haine sans passage à l’acte. Si la mère peut recevoir l’agressivité de l’enfant sans en être envahie, elle aide l'ʹenfant à accéder à l'ʹambivalence (P1+ et P1-­‐‑, le bon objet ET le mauvais objet). Dans la relation affective, adulte, il pourra alors juxtaposer les bons et les mauvais côtés, se positionner sans collage ni rupture, et accéder à la position ++. En conclusion, avoir été haï par sa mère, l’avoir agressé et qu’elle ait toléré sans représailles, les aspects agressifs (sa propre agressivité et celle de son enfant) est fondamental dans l’individuation. 11
Sur le plan cognitif A partir de la permanence de l’objet, Piaget parle de conduites intelligentes : dès ce moment, les moyens sont utilisés en fonction des buts poursuivis. Ainsi, l’enfant écarte l’obstacle pour parvenir à l’objet disparu. A ce stade, on parle de différenciation mère-­‐‑
enfant (objet-­‐‑corps). C’est le début de la causalité de transition : la relation n’est plus liée seulement à des sensations mais aussi à un lien spatial objectif entre les objets. Vers 12 à 18 mois L’enfant développe les réactions circulaires tertiaires: non seulement, il sait maintenant conserver un stimulus et le retrouver, mais il va maintenant modifier son environnement pour le retrouver. Il entre dans un jeu de rechercher active pour cela : il attire à lui le support sur lequel l’objet se trouve, il tend le bras si l’objet est hors d’atteinte, il utilise un bâton pour l’attirer à lui, il tire sur la ficelle qui est reliée à l’objet, il sollicite son environnement pour ramasser l’objet qu’il a jeté au loin… Ainsi, il entre dans la causalité anticipatrice : il est capable de mettre les objets en relation, y compris dans leurs déplacements. Il sera en mesure aussi de vivre au stade suivant la triangulation relationnelle de l’Œdipe. Petit à petit, de 19 à 24 mois Il va inventé toutes sortes de moyens nouveaux d’action sur l’environnement par tâtonnement, combinaisons mentales et déduction. En parallèle, il développe sa motricité et la fonction symbolique (langage, imitation différée, jeu, dessin et images mentales). uis, 12
avec l’acquisition progressive du langage parlé et écrit, le désir d'ʹêtre compris et de s'ʹaffirmer pousse l'ʹenfant améliorer sa façon de communiquer, verbalement et non verbalement. Le fait de savoir communiquer efficacement joue un rôle capital dans le développement des habiletés sociales et le soutien des adultes est nécessaire pour aider l'ʹenfant à développer sa capacité de communiquer. Stade 3 La castration secondaire -­‐‑ La relation à trois -­‐‑ Apports majeurs de Freud En termes de développement, cette étape s’articule avec le moment où l’enfant gagne progressivement d’une part en mobilité (ce qui lui permet de partir à la découverte d’un monde plus large que celui de son tapis de jeu) et d’autre part, en capacité à s’exprimer (le stade du « non » étant un stade important, qui je le rappelle et cela a tout son sens en matière d’individuation, précède le stade du « oui »). Sur le plan relationnel C’est ici le rôle du père qui a toute son importance. Il va par son action, soutenir l’ouverture à l’extérieur amorcée par la mère. Il met du tiers dans la relation mère – enfant, plus fortement qu’auparavant, et mettre du tiers, c’est offrir à l’enfant une parole en stéréo de sorte que la parole de sa mère ne soit plus la seule à le définir. Il intervient auprès de la mère. Il lui rappelle qu’elle est une femme avant d’être une mère et qu’elle ne sait pas tout de l’enfant. Ainsi, il ôte à la mère son côté tout puissant dans le réel et magique aux yeux de l ’enfant, ce qui contribue à lui rendre sa dimension humaine. Ajoutant sa parole à celle de la mère, il permet un espace dans lequel la parole de l’enfant prendra place progressivement. Progressivement, puisqu’il va penser et s’exprimer à partir d’un espace psychique qui lui est propre et n’est plus sous la lecture de sa mère, l’enfant va aussi renoncer à être deviné par elle. Il intervient auprès de l’enfant et lui indique avec chaleur et fermeté, les limites à ne pas franchir pour vivre dans la collectivité. L’alternance de moments de gratification (qui entretiennent la relation chaleureuse) et de frustrations (qui auraient plutôt tendance à pousser à la rupture) et en parallèle, la conscience que l’enfant a de son propre pouvoir (marcher, parler, manipuler,…) lui permettent un meilleur contrôle de lui-­‐‑même, et de border son angoisse. C’est le stade de l’Œdipe. Ce que l’on connaît en général de l’Œdipe, c’est le désir et l’attirance de l’enfant pour le parent du sexe opposé mais l’Oedipe, c’est bien plus que le sentiment d’amour de l’enfant pour le parent du sexe opposé, c’est le conflit avec le parent du même sexe. C’est à dire le conflit avec la troisième personne qui va permettre à l’enfant de découvrir que le père est amoureux de la mère et celle-­‐‑ci de lui. C’est aussi la parole du père qui dira à son fils : ‘tu ne coucheras pas avec ta mère, car elle est mienne. Plus tard, tu seras comme moi, tu te marieras avec une femme ». C’est ce que dira la mère concernant son mari à sa fille également. Aider l’enfant à traverser l’Œdipe, c’est pour les parents 13
renoncer à appeler pour soi, à demander de l’attention pour soi et à utiliser l’enfant comme un bouche trou de ses manques. Sur le plan cognitif L’observation du jeu montre aussi l’évolution cognitive et affective de l’enfant. Les premiers jeux sont des jeux d’exercices en lien avec les réactions circulaires. Puis petit à petit, le jeu symbolique émerge : on va jouer à « faire comme si ». Et progressivement, l’enfant se tourne aussi vers les jeux de règles. Piaget montre que de 2 à 5 ans, c’est stade préopératoire concret où la perception domine. Puis de 5 à 8 ans, au contact du monde social, l’enfant passe au stade opératoire concret : il peut alors mener des opérations sur le monde qui l’entoure c’est à dire interroger ( pourquoi et comment ? ), anticiper (se détacher du perçu), mettre en relation, généraliser et synthétiser,raisonner sur la contre argumentation… Sur le plan éducatif, les parents à ces âges stimulent l’enfant à acquérir la maîtrise de soi, la conscience des limites (moi et les autres, imaginaire et réalité) et limiter le pouvoir tout puissant et des désirs • en lui fournissant des occasions de prendre des décisions, tout en tenant compte de son niveau de maturité pour éviter de lui confier de trop lourdes responsabilités. • en faisant prendre conscience à l'ʹenfant de ses compétences, ce qui lui permet de se considérer comme un individu ayant de la valeur et apte à exercer un contrôle sur lui-­‐‑même. • en l’aidant aussi à acquérir un sens moral par une attitude de fermeté chaleureuse. Une relation affectueuse et enrichissante motive à agir positivement (Permissions). L’utilisation du Parent normatif donne une raison de faire ou de ne pas faire certaines choses, «Je ne peux pas te laisser faire ceci car… » (Protections). La véritable discipline est une façon positive et constructive d'ʹéduquer les enfants. C’est apprendre aux enfants à se conformer aux règles et aux obligations sociales, tout en reconnaissant leur dignité. L'ʹadulte gagne pour cela à guider l'ʹenfant et à respecter ses besoins, à lui donner le temps nécessaire pour apprendre les règles, anticiper les sources de problème ou de conflit (par exemple : donner un espace suffisant pour jouer, prévoir des temps de détente au retour de l’école, limiter les sources de stress, etc.) et adapter ses exigences à ce qui est tenable pour l’enfant compte tenu de son stade du développement. Certaines méthodes sont moins efficaces, voire nuisibles, pour aider l'ʹenfant à contrôler ses impulsions, à accepter les limites et à comprendre les fondements des règles. Par exemple, les sarcasmes, les coups, lui faire honte, crier, le critiquer, l’enfermer dans un placard,… ou tout signe de reconnaissance inconditionnel négatif diminuent l'ʹestime de soi de l'ʹenfant et entravent son développement socio-­‐‑
affectif. En effet, toute l’attention de l’enfant est alors portée sur la douleur, les sentiments d'ʹhumiliation et de rejet ressentis plutôt que sur la règle à laquelle il convient de se soumettre. Si la vie d'ʹun enfant est entièrement réglementée, dans chacun de ses domaines, par les principes des adultes qui l'ʹéduquent, il n'ʹa plus de place pour penser, sentir, être lui-­‐‑même. Il se résigne au silence et se vit en "ʺclandestin"ʺ de lui-­‐‑
même. Tantôt soumis, peu capable d'ʹun avis personnel, de choix, d'ʹun "ʺnon"ʺ et de 14
contact avec ses besoins et désirs, attenant et réalisant les « ordres » et les désirs des autres. Tantôt, rebelle à toute forme d'ʹautorité. Une petite fille de 6 ans et son cousin de 8 ans, leurs deux mamans qui sont sœurs, sont à une fête pour enfants. Enfin d’après-­‐‑midi, les enfants font la file à un stand de maquillage. Au moment où cela va être leur tout, la fête se termine et le stand ferme devant les cousins et les enfants qui les suivent, frustrés. Les mamans expliquent aux enfants que ce sera pour une autre fois… mais la petite fille se met à hurler et crier… la maman dit tout haut que c’est trop injuste de faire ça à sa fille et demande aux maquilleurs de faire au moins deux pommettes rouges à sa fille pour la consoler… L’admiration complaisante ou trop peu de commentaires-­‐‑clés n’enseignent pas à l’enfant les comportements sociaux mais plutôt la croyance que « tout est permis », qu’il suffise de «vouloir quelque chose pour y avoir droit », le « tout tout de suite ». L'ʹenfant à qui l'ʹon n'ʹaurait pas donné, dans les circonstances qui le nécessitent, le message "ʺque tu le veuilles ou non, là c'ʹest stop"ʺ ou qui l’a reçu sans bienveillance, n'ʹa pas reçu le soutien nécessaire pour canaliser ses désirs et ses comportements. Si la confrontation aux limites lui est retirée, il devient l'ʹenfant-­‐‑roi, l'ʹenfant-­‐‑idole, l’enfant-­‐‑proie, l’enfant-­‐‑tyran selon la position dans le triangle dramatique. Adolescent, il risque d’aller chercher la limite ailleurs, à l'ʹextérieur de son cercle habituel, quitte à escalader, à "ʺpousser le bouchon de plus en plus loin"ʺ, jusqu'ʹà l'ʹextrême, dans les actes déviants, en cherchant la limite dans la rue ou encore, en maltraitant ses parents qui, dépassés, se retrouvent victimes. Stade 4 La castration symbolique -­‐‑ Devenir son propre père Sur le plan relationnel La troisième limite, c’est l’enfant lui-­‐‑même qui se la pose dès qu’il peut se passer de l’intervention de la mère et du père réels, ayant intégré en lui leurs modèles. Il est devenu sa propre mère et son propre père et peut mobiliser le P pour lui-­‐‑même. L’adolescent aura progressivement à sa disposition deux systèmes de lecture : les opérations formelles qu’il est capable de faire sur l’environnement (A2) et les références composées d’interdits, de valeurs et de protections (P2) qui lui donnent des possibilités internes de résoudre les problèmes, de mesurer les risques encourus et d’agir en conséquence, de tester et comparer les systèmes de valeurs, de mettre en place une action réfléchie et d’en assumer les conséquences. Sur le plan cognitif Piaget décrit deux stades ici. D’abord, le stade opératoire représentatif durant lequel l’adolescent dé-­‐‑subjectivise le raisonnement, est capable de se décentrer de son propre raisonnement pour prendre aussi en considération le point de vue de l’autre. Ensuite, l’adolescent atteint le stade opératoire formel dès qu’il peut agir à partir d’une donnée 15
verbale autant qu’à partir des objets et est donc capable d’abstraction, de combinaisons logiques, de transformations, de logique hypothético-­‐‑déductive et systémique. 16
Le point de vue de l’analyste transactionnelle 1. La tonalité somatique : langage des sensations et des réflexes Jusqu’à environ huit mois, d’un point de vue relationnel, l’enfant est « collé » à sa mère : ses compétences réduites ne lui permettent pas d’assurer lui-­‐‑même sa survie, il est en dépendance totale. L’enfant est au départ « organisé » autour d’un cerveau reptilien • de réactions biologiques réflexes de mal-­‐‑être qui le font pleurer et de réactions réflexes de bien-­‐‑être qui le font sourire et s’endormir. Ce sont les sensations et de réflexes (E0) • de « préférences » progressives en lien avec les réactions du système nerveux central (A0) • et de « préférences » conditionnées par la réponse externe engrammées dans le cerveau, sorte de prototype d’apprentissage qui permet progressivement la recognition (P0) 2. La tonalité affective : langage des émotions et des états d’âme Dès 5 mois, le système nerveux est suffisamment cablé pour que l’enfant puisse agir par intention. Le cerveau limbique, celui de la mémoire, fonctionne alors par action-­‐‑
réaction : j’ai intégré que chaque fois que je pleure, après le biberon, je reçois des 17
caresses. Jenni Hine nous le rappelle, l’E2 a « de nombreuses façons de faire connaître ses besoins et désirs, et d’obtenir l’attention de sa mère durant les premières années de vulnérabilité et d’impuissances relatives. Tous les sous systèmes (P1,A1,E1) y participent (et constituent des facteurs de survie dans l’enfance et plus tard). E1 avec son côté non inhibé et sa sensibilité à ce qui concerne son propre fonctionnement appelle l’attention de sa mère sur ses propres besoins de manière impérative, l’attention intuitive de A1 à l’urgence détourne l’attention de l’enfant vers les stimuli importants et le P1 se centre sur l’entourage qui peut prendre soin de l’enfant : tout ceci favorise des comportements adaptatifs qui vont maintenir impliquée la mère. 3. La tonalité opératoire : langage de l’information et du contenu Plus tard, dès 2, avec le développement du cerveau cortical (langage et pensée), c’est au fond un système parental, personnel et autonome, que l’enfant met en place. A cet âge, l’enfant découvre une cohérence dans les attentes de son environnement parental et celles des grandes personnes en général. Il stocke cela dans P1, posant ainsi la base pour l’élaboration d’un système ultérieur d’attentes envers lui-­‐‑même. Ensuite, entre environ 6 et 12 ans, il met en place avec P2 un système personnel et autonome de normes, valeurs, opinions,… dont la fonction consiste à réguler les pulsions et les besoins en fonction des autres. L’enfant acquiert progressivement la capacité à considérer qu’il y a un monde en-­‐‑dehors de lui, qui a un impact sur lui tout autant que ce qu’il fait ou dit à un impact sur le monde. Jenni Hine émet l’hypothèse que les manifestations des états du moi sont le produit de trois réseaux neuropsychologiques hiérarchiques, « extéro, néo et endo » (…) constitués de myriades de représentations généralisées auto organisées par des sous systèmes identifiables relativement autonomes dans l’E et dans le P. Ces trois réseaux majeurs sont capables de capter l’information et de gérer les stimuli en parallèles, chacun possédant des caractéristiques propres. Les stimuli provenant de l’environnement qui seront traités par • P0, A0 , E0 sont « avalés » tout entier • P1, A1, E1 sont sous l’influence de A1 triés par la perception et interprétés (influence interne) • P2, A2 et E2 sous l’influence de A2 s’inscrivent dans un rapport différencié de soi à autrui (influence externe) et ces éléments sont potentiellement et progressivement plus accessibles à la conscience 18
Le développement est dynamique car comme le montre Peg Blackstone, chaque niveau de structure du Parent (P0, P1, P2) se forme et se modifie au fur et à mesure que le récepteur correspondant (A0, A1, A2) fait l’expérience de l’influence externe et l’interprète (…). Et, perspective pour le professionnel qui accompagne une personne, les changements dans le P2 et l’ A2 qui passent par A2 se répercutent vers le bas, vers E2. P2 et A2 font partie de l’environnement de soutien qui favorise les changements dans l’état du moi Enfant (…)(en faisant) voir à A1 le monde comme plus sûr. De même, les changement dans P1 et A1 se répercutent vers le bas, dans E1. On peut supposer que A0 qui réagit au niveau sensoriel (…) engendre de la même manière des changements dans P0 et A0 (qui) se répercutent sur E0. 19
Quand l’analyse transactionnelle parle de la socialisation Pour parler du processus de socialisation, Berne met l’accent sur l’organe psychique Parent : P0, P1 et P2 selon les phases du développement. Le P2, dit aussi extéropsychè Justine : « Mon intransigeance, mon exigence de la volonté, ma tyrannie de la réussite pour moi et mes enfants, ca vient de mon père. Il était comme ça et considérait l’indulgence comme de la faiblesse. Il n’avait aucune bienveillance pour lui, pour moi, pour mon frère qui en est 20
mort de son intransigeance. Il lui a dit « bon, tu as réussi mais ne te repose pas sur tes lauriers, l’an prochain, ce sera plus difficile encore. Travaille ». Et ma mère était fragile, malade, angoissée, centrée sur elle, en-­‐‑dehors de la réalité. Aujourd’hui, c’est comme si j’ai deux parents miniatures en moi parfois. C’est comme un théâtre de marionnettes en moi. J’ai le gendarme, mon père, et le petit enfant, ma mère. Il me manque Guignol pour un peu alléger tout ça… » Le P2 pourrait être appelé plus justement encore, la sociosphère. Il résulte de l’introjection inconsciente des personnes parentales dans leur entièreté, avec leurs trois états du moi, telles qu’elles ont été incorporées à travers le processus secondaire (lié au langage, à la pensée et aux symboles, nous y reviendrons). « Introjection » signifie imprégnation passive et sans vigilance, comme une éponge de la personnalité des modèles, qui absorbe les manières d’être, penser et de sentir telles quelles se manifestent en présence de l’enfant. Pour Berne, ces figures parentales sont le père et la mère, ou les personnes qui ont joué ce rôle pour l’enfant. Pour ma part, j’élargis ces figures à tous les agents de socialisation et à toutes les personnes qui ont joué un rôle d’autorité (parents, professeurs, grands frères et grandes soeurs, héros de livres…) et à tout ce qui de leurs ancêtres est passé à travers eux de P en P (P3 et P4). De nombreuses études ont montré que d'ʹautres personnes que la mère peuvent jouer un rôle déterminant dans le développement social de l'ʹenfant et ce, depuis son plus jeune âge. La personne intériorise un certain nombre d’éléments propres au groupe social dans lequel il vit c’est à dire Des valeurs Ce sont les manières qu'ʹune société considère comme devant être respectées. Il s'ʹagit d'ʹidéaux partagés par les membres de cette société : sens de l'ʹeffort, réussite professionnelle, solidarité… Des normes En sont l'ʹincarnation plus concrète, dans une société elles désignent tout ce qu'ʹun individu peut ou ne peut pas faire, il s'ʹagit donc de la traduction des valeurs en lois : être ponctuel à son travail, cotiser à la sécurité sociale… Des rôles Les rôles correspondent aux attitudes qui sont attendues d'ʹun individu, compte tenu de son statut. Un individu dispose tour à tour de plusieurs rôles : un maître, un époux, un ami. Il implique nécessairement d'ʹautres rôles pour se réaliser. Des statuts Le statut est la position occupée par un individu dans un cadre social donné (fonction, rétribution, apports dans la famille, dans l’entreprise, …). Il est essentiellement normatif et fait qu'ʹun individu peut s'ʹattendre de la part d'ʹun autre à tel ou tel comportement. 21
Des comportements propres au groupe social auquel l’individu appartient Ainsi, dire bonjour, au revoir, s'ʹil vous plaît et merci, se moucher plutôt que d'ʹessuyer son nez sur sa manche, boire sans renverser, manger la bouche fermée, demander à l'ʹautre quelque chose au lieu de le lui enlever brusquement, attendre son tour avant de parler, faire la file calmement, porter les vêtements adaptés aux circonstances, etc… Mais aussi des choses comme la manière d’assurer l’hygiène, le type d’aliments que l’on achète et la manière de les préparer, le type d’habillement, la manière de s’exprimer, … c’est à dire ce que Pierre Bourdieu appelle l’habitus qui récapitule en fait les apprentissages réalisés par l'ʹindividu au sein de la famille et de sa classe socio-­‐‑
professionnelle. Des modes d’interaction Les interactions sont des actions réciproques porteuses d'ʹinfluences mutuelles entre les êtres sociaux. À la faveur de ces interactions se construisent, se confortent, se défont et se reconfigurent des manières d'ʹêtre ensemble, des modes de coexistence, mais aussi des systèmes d'ʹattitudes. La socialisation apparaît donc comme un processus d'ʹinteraction entre un individu et son environnement. Et Jeni Hine rappelle qu’au niveau intrapsychique, le mode de formation passif et inconscient est la clé pour comprendre la valeur de survie du système Parent. Un ensemble de connaissances est transmis d’une génération à une autre sans qu’il y ait le moindre processus intentionnel d’apprentissage ou la moindre possibilité de refus de l’enfant qui le reçoit. Ainsi nous sommes à nous tout seul une république de personnages, un théâtre dans lequel il y a beaucoup de monde : celui qui est à l’avant de la scène, celui qui est aux oubliettes, celui qui seconde, celui qui surveille, l’amuseur public, l’intriguant, … D’une part, les éléments transmis augmentent les chances de survie et d’intégration dans la société de la génération suivante, et d’autre part, l’imprégnation est non sélective et l’enfant absorbe tant les traits fonctionnels que dysfonctionnels. Le P1, ou le parent archaïque Par contre, le P1 se structure à une époque plus précoce, c’est à dire du début de la phase symbiotique : c’est donc une intériorisation qui passe par le processus primaire (lié aux représentations internes, basée sur des perceptions plus que sur la pensée, nous y reviendrons) et à la différence de P2, il s’y associe des réactions internes de bien-­‐‑être ou de mal-­‐‑être. Inès : Quand mon bébé pleure, je me sens furieuse, angoissée et ça me donne Moi : des frissons… Je ne supporte pas… un enfant qui pleure, le mien ou un autre, c’est insupportable. Est-­‐‑ce que quand vous, vous étiez petite vous pouviez pleurer ? 22
Inès : Non, ma mère me prenait dans ses bras et si ça ne s’arrêtait pas tout de suite, elle s’énervait et parfois hurlait… hurlait…J’ai vite compris que quand on pleure, on est insupportable. Il s’agit donc plus ici de l’endosphère. Jeni Hine parle d’ailleurs d’endospychè plutôt que d’archéopsychè pour E2, point de vue que je partage. L’endospychè met bien plus l’accent sur le processus continu durant la vie des expériences que nous vivons sous forme d’engram, laissant une trace somatique et cellulaire. Par contre, le terme archépsychè met l’accent, et c’est limitatif, sur les expériences historiques fixées et méconnaît la dimension saine, dynamique et résiliente de l’E2. Berne fait référence ici à la perception qu’a eu l’enfant du premier objet pulsionnel c’est à dire sa mère, ou la personne principale qui s’occupe de lui, avant et après la permanence de l’objet. Cela signifie que l’enfant n’enregistre pas seulement une scène ou des attitudes mais aussi la tonalité affective de toute la relation avec la personne qui est en interaction avec lui. Et c’est cela qui définit pour lui qui est lui et qui est l’autre. Quand l’Analyse transactionnelle parle d’individuation Pour Berne, l’instance qui aide à l’individuation, c’est l’ Adulte : A0, A1 et A2. Un déplacement progressif du processus s’est opéré sur le plan affectif et sur le plan cognitif, de pensée de A1 (le petit professeur) s’opère vers A2 (la néopsychè). L’A2 et l’ A1 comportent tous deux un aspect cognitif mais apportent au développement de l’identité, leurs logiques propres dans la manière de rencontrer la réalité, de recueillir les données et de les analyser. A2, la néopsychè, l’Adulte intégré : c’est l’observateur, l’ambassadeur du réel Dès son premier écrit consacré à l’AT, Berne décrit l’apport spécifique de l’Adulte (A2) dans l’appréhension et la vérification de la réalité et dans le développement du discernement. Il sert de médiateur chez la personne saine entre la réalité, les tendances du Parent et celles de l’E. A2 s’appuie sur le processus secondaire, tel que Freud le décrit, c’est à dire celui du langage, « représentant des mots », celui de la parole du conscient. Un trauma secondaire constituant dès lors, une blessure survenue à l’époque de la maîtrise de la parole avec des mots pour le dire. A2 se réfère à ce que Piaget nomme la « pensée logique ou dite causale». Elle permet l’accomodation c’est à dire l’intégration de données nouvelles et l’action sur la réalité. A1, le petit professeur ou la pensée de l’Enfant : c’est le petit explorateur. Nous avons précédemment abordé ce moment où l’enfant s’aperçoit que son environnement n’est pas lui. C’est la première fois que l’enfant prend conscience de sa dépendance à l’environnement et la conscience de la dépendance crée l’angoisse de perte. Le voilà confronté à un deuil : il va devoir par moments se passer de l’environnement et se retrouver face à l’angoisse. A1 est l’instance qui parle 23
développement de l’imaginaire, va lui permettre d’anticiper l’absent et son retour, de fantasmer l’absent et d’explorer tous les comportements lui permettant de retenir l’absent le plus longtemps possible. A1 se réfère à ce que Piaget nomme la « pensée prélogique ». Ainsi, les petits enfants croient souvent que leur professeurs dorment à l’école, si leurs parents disent qu’ils n’ont plus de sous pour acheter quelque chose que l’enfant veut, ils répondent « tu n’as qu’à aller à la machine, elles te donnera de sous », un petit enfant peut demander à sa mère qui allume la radio de mettre la chanson qu’il aime bien, ne comprenant pas que celle-­‐‑ci ne choisit pas les programmes, l’enfant qui se cogne à la table, la frappe et dit « méchante table ! ». Et vous, adultes, quand au volant, nous regardons le feu de signalisation en disant « pourvu qu’il reste vert », quand vous marchez sur le trottoir en faisant avec nous-­‐‑mêmes le pari de ne pas marcher sure les lignes de jonction des dalles, vous mobilisez aussi la pensée de A1. Berne s’est intéressé de près à l’intuition psychologique, la joie, le plaisir, la curiosité, l’humour du petit professeur et son excitation dans la découverte,… Les caractéristiques de la pensée de A1 s’apparentent à la grandiosité : Egocentrisme : ce qui est léger pour moi l’est pour tous Animisme : méchante table si je me cogne Artificialisme : qui a fabriqué les montagnes ? Finalisme : une orange, c’est pour couper en quartiers Phénoménisme : c’est bon parce que c’est vert Pensée magique : maman sait ce que je pense Absolutisme : moi, je L’Adulte et le Parent inhibent largement cette partie de notre psychè à l’âge adulte. Néanmoins, il est aussi, pour reprendre la manière dont José Grégoire le nomme, l’architecte du scénario, dans la mesure où il élabore des croyances, des représentations, des décisions limitatrices pour assurer sa survie et ménager au mieux mais illusoirement la constance de son bien-­‐‑être. Ou comme le dit José Grégoire, «dans ce cadre, il cherche comment l’enfant Libre va pouvoir s’exprimer au mieux : c’est le petit avocat ». A1 s’appuie sur le processus primaire, tel que le définit Freud, c’est à dire celui de la sensation brute non formulée, "ʺreprésentant des phénomènes », de la communication pré-­‐‑verbale interne, c’est à dire proche de la pensée de l’inconscient. Le trauma primaire constituant une blessure psychique survenue chez le sujet avant la maîtrise des mots de la parole, ce que nous appelons une décision scénarique archaïque. José Grégoire rappelle qu’au départ, A1 permet intuitivement l’assimilation ou le rejet de données. Nous l’avons vu avec P1, les premiers éléments majeurs qui nous viennent du réel sont que Maman, les autres, sont distincts de nous, ils ne pensent, sentent et n’agissent pas comme nous. C’est un saut qualitatif de réaliser cela mais c’est aussi une frustration intense pour l’enfant qui en réalisant cela accepte de quitter l’idée qu’il est le centre du monde, et c’est un renoncement coûteux. En fait, comme tout apprentissage, 24
celui-­‐‑ci est à la fois un gain et un renoncement, et donc une tension entre assimilation et rejet, une lutte où le risque de rejet est fréquent et intense. Plus tard, dans la phase d’accomodation, A1 suppose une dynamique moins défensive, plus souple pour que la personne accepte de mettre en cause son système personnel pour l’enrichir et l’adapter, nous dit José Grégoire. A1 a plaisir à découvrir, savoir et trouver ce qui peut lui être utile, savoir commet « ça marche », trouver des déclics, relever des défis,… Il se situe comme un PETIT EXPLORATEUR qui ne se tracasse pas de l’objectivité ; il lui suffit de s’amuser, de répéter en boucle, de faire et défaire, que cela fasse joli,… Dans le développement, c’est en effet, au stade où le petit enfant explore le monde, et plus particulièrement lorsqu’il commence à gagner en mobilité, que le petit professeur est très actif. Ensuite, progressivement, il acquiert plus d’indépendance et développe le langage, la fonction symbolique. Au fil du processus de socialisation et d’individuation, l’A2 reçoit un investissement croissant permettant à l’enfant d’acquérir une perspective plus décentrée et donc plus objective. A2 constitue un réseau de données acquises en dehors de l’influence de la relation mère-­‐‑enfant et traitées par de plus grandes capacités cognitives que par le passé. Son attention est absorbée, centré et concentrée sur les objets et les événements en-­‐‑dehors de lui, il se situe comme OBSERVATEUR capable de réfléchir sur lui-­‐‑même, sur le monde et sur autrui. Ce sont ces caractéristiques qui font de A2 un état du moi plus autonome que P2 et E2. Au début de la vie, ses compétences étant réduites, A2 est peu susceptible d’aider le petit professeur dans sa démarche mais progressivement A2 va devenir un interlocuteur qui renvoie à A1 que ses impressions, ses interprétations, ses déductions et ses conclusions sont erronées, hâtives, illusoires et doivent être revues. De cette tension entre A2 et A1 peut naître une nouvelle lutte. • Si elle est traversée, A2 et A1 peuvent coexister : l’E prend plaisir à intégrer du neuf et l’A sans le brider, lui sert d’ambassadeur de la réalité. A2 aide A1 à la vérification des intuitions. • Si non, soit A2 domine, rationnel, précis, factuel mais la personne devient ennuyeuse, soit l’E domine par A1 et la personne perd contact avec la réalité se sentant vulnérable. Quand l’articulation individuation-­‐‑ socialisation pose problème… Nous pouvons regarder comment les jeux psychologiques, les comportements passifs, les manifestations parasitaires, le triangle dramatique,… circuit parasitaire peuvent manifester des problématiques internes et structurales dans le processus de socialisation et de l’individuation. L’analyse transactionnelle propose plusieurs angles d’observation et d’intervention pour aborder les incidents de parcours des processus de socialisation et d’individuation, et offre ainsi des indices que peut utiliser le professionnel pour son 25
diagnostic et ses interventions. Les phénomènes qui traversent aujourd’hui notre société et ont un impact sur la constitution de la psychè de l’Homme du XXI ème siècle. Avec Victor Klemperer, psychanalyste, nous savons à quel point le climat social peut tordre la langue et inscrire le faux au cœur des relations quotidiennes et comment le climat social imprègne le psychisme. Jusqu’à la fin des années 60, le modèle éducatif était celui de l’obéissance, le rôle du père patriarche comme grande figure d’autorité était primordial dans une société de l’épargne et de l’effort. Avec les patients ici de ce modèle, le thérapeute accompagne essentiellement les personnes à libérer l’E. Depuis 68, le modèle que nous donnons et aujourd’hui encore, est celui du développement de la performance dans une société de consommation. Actuellement, le thérapeute travaille bien plus avec les nouveaux patients à consolider le P intérieur pour border l’E. 1. Dilemmes et impasses La toute-­‐‑puissance (je le veux, j’y ai droit) d’A1 est naturelle jusqu’ à environ 6 ans mais l’action de l’entourage, justement, va la border de sorte que l’enfant puisse tolérer une certaine frustration, différer la satisfaction du désir, développer ses capacités de persévérance et de concentration et faire place à autrui. Sur le plan éducatif, nous l’avons vu, il a besoin de modèles suffisamment puissants (ni tout puissants, ni tout impuissants). De cette manière, il peut se nourrir simultanément de lien chaleureux pour se sentir en sécurité et de fermeté pour se construire. Pour le dire autrement, l’enfant gagne à trouver en face de lui quelqu'ʹun qui l’aime assez pour lui répondre autrement que par la complaisance propre à l’enfermer dans ses revendications infantiles. Il se trouve alors face à un « autre », entier, qui l’appelle à sa propre entièreté, et agit comme ambassadeur du réel. Pour rappel, d’une part, les éléments introjectés dans P2 augmentent les chances de survie et d’intégration dans la société pour la génération suivante et d’autre part, l’imprégnation est non sélective et l’enfant absorbe tant les traits fonctionnels que dysfonctionnels. Si bien que quand P2 se mobilise, l’enfant semble porter son attention sur des personnes extérieures et ce qu’elles font, mais aussi et surtout vers la surveillance de son propre enfant interne. C’est alors l’impasse : un message inhibiteur du P2 qui vient du système familial ou un message contraignant issu du système culturel contrôle en interne l’Enfant et constitue un frein à son désir. L’Enfant vit alors cela comme intraversable. Martine : Moi : Elle : Moi : Elle : Quand mes filles (6 et 5 ans) font des miettes en mangeant, je m’énerve. Je suis maniaque, je ne supporte pas leurs crasses. Je pique des colères pour 3-­‐‑4 miettes au sol. Est-­‐‑ce qu’on exigeait de vous à cet âge que vous soyez irréprochable ? Parfaite en quelque sorte ? Oh oui ! Et vos parents, ils faisaient ça crier quand vous faisiez des miettes ? Oui, d’ailleurs quand je m’entends crier, je me dis que je fais comme mon père. Je détestais ses colères et voilà que je fais pareil ! Je perds mon 26
Moi : Elle : Moi : Elle : Moi : Elle : calme… Une petite voix me dit « arrête » mais c’est plus fort que moi, et après, je culpabilise. Je voudrais être parfaite mais je n’y arrive pas. Ma cuisine doit être nickel. J’ai même acheté un petit aspirateur de table. Dès qu’une miette tombe, je me lève et j’aspire. Je ne me sens en sécurité que quand ma maison est en ordre et propre. Comme ma chambre quand j’étais petite : mon père hurlait s’il y avait du bazar. Et au moment où vous voyez « ces crasses », que se passe-­‐‑t-­‐‑il ? On ne peut pas. On doit manger proprement ! Pourtant, je sais que c’est une exigence intenable : elles n’ont que 6 et 5 ans, je m’en rends bien compte… Tiens, à ce propos, et cette expression « des crasses » ? Oui, je sais, j’exagère, je m’en rends compte là aussi. Il n’y a que quelques miettes. Mon père disait « vos crasses ! » d’un air méprisant. Et vous, enfant devant les colères de votre père… Je me disais ‘il m’emmerde’… mais je rangeais pour éviter ses colères… Maintenant, je fais les deux à la fois : d’abord, je me mets la pression et après, je suis nonchalante, par réaction. Comme si je fais comme mon père et puis, comme moi enfant, il m’emmerde et je range. Premier degré Deuxième degré Troisième degré P2
A2
E2
P2 : Sois parfaite E2 : Envie d’être relax Impasse sur Performances E1
P1 : E1 : Ne sois pas un enfant Désir de jouer et rire Impasse Relationnelle P0 : l’impression de ne pas arriver à garder son calme E0 : Envie d’y arriver Impasse d’ Identité et adaptation sociale 27
2. La projection La projection, c’est la transposition sur autrui du conflit intrapsychique : une personne en proie à des pulsions, des pensées, des désirs qu'ʹelle ne peut reconnaître pour siens utilise un mécanisme de défense essentiellement imaginaire qui consiste à les déplacer sur autrui et à faire comme si ce qui est à elle appartient à l’autre. Il s'ʹagit d’une réaction présente dès les premiers stades du développement, que nous intégrons à notre psychè et que nous mettons en œuvre pour nous protéger. A priori normale, sinon nécessaire à l’époque où P1 A1 et E1 sont les instances qui régulent la personnalité, la projection devient trouble psychique lorsqu'ʹelle revient en boomerang sur son auteur à un âge ultérieur. Notamment sous forme de délire paranoïaque, de phobies handicapantes, de jalousie extrême ou de transfert par exemple. La personne projette sur un écran qu’il interpose entre elle et l’autre, des éléments qui lui appartiennent. En somme, la personne tente à son insu de restaurer avec ses partenaires actuels la relation qu’il avait avec ses parents, réactivant le vécu, manifestant les besoins et mobilisant les sentiments parasites et les jeux qui en constituaient la trame. Ce faisant, la personne tente de rendre l’autre prévisible pour se maintenir dans le scénario habituel, en mobilisant ici et maintenant avec ses partenaires relationnels actuels des compétences et des modes d’interaction propres à une époque où elle avait moins de compétences qu’aujourd’hui, pour structurer ma relation au monde. Ainsi, quand je projette sur toi, je ne fais pas frontière entre nous, je n’ai pas une conscience claire que tu n’es pas moi et que je ne suis pas toi. La projection à partir du clivage du P1+ et P1-­‐‑ C’est Freud qui introduit le concept de clivage (spaltung) dans le processus de défense, à partir de son observation des psychotiques, pour témoigner de la coupure radicale entre le conscient et l’inconscient et décrire la coexistence au sein de la personnalité de deux potentialités contradictoires, l’une prédisposant à tenir compte de la réalité et l’autre, non, pouvant créer une schize au sein même d’une instance. Le clivage est un mécanisme de défense qui consiste à compartimenter le monde de façon étanche en blanc et noir, sans prise en compte du gris. Avant la permanence de l’objet, dans la représentation de l’enfant, nous l’avons vu, la perception de la mère est « coupée » en "ʺbon "ʺ objet, P1+, et en « mauvais » objet, P1-­‐‑. Quand la mère peut recevoir l’agressivité de l’enfant sans en être envahie, l'ʹenfant va accéder à l'ʹambivalence (P1+ et P1-­‐‑, le bon objet ET le mauvais objet). Dans la relation affective, adulte, il peut alors juxtaposer les bons et les mauvais côtés, se positionner sans collage ni rupture, et accéder à la position ++. Si la mère par ses limites à elle, est envahie d'ʹangoisse devant l'ʹagressivité de 28
l'ʹenfant, si elle devient agressive ou dépressive, l'ʹenfant balance tantôt du côté de P1+ tantôt de P1-­‐‑. Le clivage, c’est donc, en simplifié, la logique du « ou…ou », l’un excluant l’autre, qui conduit à l’affrontement inévitable, aux jeux de pouvoir, au collage symbiotique (P1+) ou à la rupture indépendante (P1-­‐‑). Le bon objet, idéalisé, ouvre alors à une position dépressive devant la frustration : « si je suis frustré, c’est que je ne suis pas à la hauteur ». Le mauvais objet ouvre alors, quant à lui sur une position agressive : « si je suis frustré, c’est à cause de toi, donc je me débarrasse de toi ». Bref, dans le clivage, « mes objets et moi » ne faisons qu'ʹun tandis que la frontière, c’est quand il y a quelque chose de « mes objets » en moi mais eux c'ʹest eux, et moi c'ʹest moi, nos identités sont juxtaposées. 29
Carlo Moiso parle alors de transfert de type 2A et de type 2B selon qu’il est + ou – Valérie : Bon objet : « comme vous êtes bien – avec vous, tout va bien ». Elle sort de la passivité et quitte son mari qui l’exploitait. Après une période de soulagement, elle souffre d’être seule. Mauvais objet : « regardez ce que vous m’avez fait faire » =) colère La projection à partir du P2 Dans le cas du transfert de type 1 tel que l’appelle Carlo Moiso, la personne projette sur un écran qu’il interpose entre lui et l’autre les états du moi des parents réels, tels qu’il 30
les a incorporés et ré-­‐‑instaure sur le plan externe le dialogue conflictuel interne entre P2 et E2. Lucien qui arrive depuis 3 séances avec 20 minutes de retard et dit : « Je suis en retard, je n’ai pas d’excuse… je suis parti trop tard… Vous allez me dire que c’est de ma faute ! J’ai toutes les pièces du puzzle pour arriver à temps et je ne fais rien !» Moi : En fait, avez-­‐‑vous remarqué que je n’ai rien dit… Lui : C’est juste, c’est moi qui pense ça et le met dans votre bouche Moi : Qui au fond aurait dit « que c’est de votre faute, que vous avez toutes les pièces et que vous n’en faites rien » ? Lui : Ma mère ! Pour elle, il faut être ponctuel à tout prix ! On n’a aucune excuse. 3. Le système parental absent ou déficient Maarten Kouwenhoven souligne que chez les personnes qui ont un système parental absent ou déficient, c’est comme si elles ne disposent que de deux état du moi constitués. 31
Contrairement à celle dont le système parental est dysfonctionnel, elles n’ont jamais élaboré vraiment dans P2 un système cohérent de messages en relation. Il ajoute qu’elles fonctionnent comme ces petites filles qui couvrent leur poupée de baiser et de soin et qui dans la minute suivante, l’abandonne , ou comme ce petit enfant qui surveille la maison et ne sait pas quoi faire quand une situation survient parce qu’il n’a pas reçu d’instructions explicites. Il peut arriver que des parents n’ont pas eux-­‐‑
mêmes de système parental fonctionnel et que du coup, leurs attentes sont incohérentes, imprévisibles ou intenables pour l’enfant. L’enfant n’y découvre pas ou peu de système car il n’y a rien de tel à découvrir. L’enfant se trouve alors comme handicapé par une sorte de déficience du système parental réel et développer une sociopathie1. D’autres parents moins perturbés mais néanmoins dysfonctionnels, offrent une cohérence de leur système mais tellement en décalage avec les attentes des adultes en général. Lorsque les enfants qui s’adaptent aux attentes de parents perturbés découvrent entre 2 et 4 ans la cohérence pathologique de leurs attentes mais par nécessité vitale, les incorporent dans P1 et élaboreront ultérieurement un P2 malade. D’autres parmi ces enfants soit ne saisissent pas la cohérence pathologique des attentes de leurs parents, soit ne veulent pas la saisir par angoisse, et refusent ensuite d’élaborer un système de normes et de valeurs pour s’orienter vers un système parental absent ou lacunaire. Le système parental absent La caractéristique majeure de cette pathologie du système parental est que le P2 est resté comme vide à cause des adaptations isolées aux attentes multiples et contradictoires des parents enregistrées comme des messages incohérents dans P1. Ces personnes, à cette période critique de 2 à 4 ans, se sont trouvées devant un comportement de la mère relativement absente (qui dit « je reviens dans 5 minutes et revient une heure après, le lendemain, une semaine après ou pas du tout) et quand elle est présente, qui se montre imprévisible (parfois, elle prend l’enfant dans les bras et le couvre de baisers et parfois, elle le rejette, le gifle ou l’ignore). L’angoisse, la douleur et l’insécurité de l’enfant sont grandes et augmentent avec le temps et la répétition des situations. Au lieu de chercher une cohérence dans le système, il prend une décision de survie : « jamais plus, je ne me laisserai blesser ». Juan dit souvent Moi Juan « Je verrai bien »… « Bien que je comprenne les mots, qu’est-­‐‑ce que cela signifie au fond ? » « Je réalise que ça veut dire « laisse moi tranquille » Juan fait un lien avec sa mère, actuellement hospitalisée pour maniaco-­‐‑dépression et qui dans l’enfance et l’adolescence de Juan, se montrait avec lui, tantôt surcouvante, tantôt qui lui mettait les suppositoires à l’envers pour qu’il ne puisse les faire ressortir, 1
Absence du fiabilité, manque de contrôle des impulsions, angoisse face à l’intimité et la dépendance, propension
aux excès (alcool, drogue, internet, nourriture, sexe… ou travail compulsif)
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et tantôt qui hurlait comme une furie, sans raison apparente, au retour du bureau. Dans sa vie actuelle, Juan prend une position d’attente : u lieu de chercher et d’explorer, il s’adapte isolément et de manière opportuniste à chaque situation. Il peut même entrer en compétition ou manipuler pour arriver à ses fins (« moi, moi, moi, moi d’abord… et après moi, les mouches… »). Il fonctionne au radar, cherchant à s’adapter à l’extérieur plutôt qu’utiliser la boussole intérieure. Il refuse toute situation de vulnérabilité et de dépendance, et donc l’intimité : le soir, il travaille tardivement au bureau et après le repas, à la maison, quand sa femme va se coucher, il n’arrive pas à aller se coucher alors qu’il est fatigué. Il fume cigarette sur cigarette, consulte de sites pornographiques sur son pc et se masturbe. Ainsi, il étouffe la blessure archaïque et provoque le Parent : il joue avec elle à « donne-­‐‑moi des coups », ce qui lui procure une sensation de chaleur et de « coup de fouet » et ensuite cela l’autorise à se venger pour soulager son angoisse. 33
L’accompagnement passe par l’approche progressive de la blessure archaïque tout en développant des attitudes cohérentes, stables et puissantes de Parent. Un peu comme dans l’histoire bouddhiste, le thérapeute gagne lorsqu’il s’est déguisé en tigre provocateur à se rappeler que ce n’est qu’un masque et un costume à l’intérieur duquel il y a un enfant blessé. Le système parental déficient Ici, il s’agit donc d’un arrêt de développement et non d’un blocage à le commencer. L’enfant a pris la même décision de ne plus jamais se laisser blesser mais vers 8 ans et ici, cette décision concerne les deux parents, et pas seulement la mère. L’élaboration de son système parental s’était faite jusqu’alors mais lorsqu’il s’arrête du fait de cette décision, il est encore largement lacunaire. 34
Les symptômes sont moins intenses que dans le système parental absent et l’incapacité à s’adapter à de nouvelles situations est « résolue » en en faisant le moins possible, sur une position passive-­‐‑dépendante (elle demande de l’aide et des conseils pour parasiter le système parental de l’autre) puis devient passive-­‐‑agressive (elle s’en prend aux affaires ou à la personne de l’autre). Marie-­‐‑Elise a 30 ans. Elle a eu un développement normal jusqu’à 8 ans, âge auquel elle a été violée par son grand-­‐‑père chaque fois qu’elle passait le week-­‐‑end chez lui. L’abus est connu de ses parents qui n’ont pas réagi et ne l’ont pas protégée. Depuis, elle vit repliée sur elle, a eu beaucoup de mal à finir des études. Au travail, à l’hôpital, elle est très vite dépassée si elle doit faire deux taches en suivant et est qualifiée de trop lente. Elle n’arrive pas à gérer les situations pratiques de tous genres (trier ses papiers, répondre à une lettre, négocier un contrat d’assurances, organiser son nettoyage, aller chez le dentiste,…), ne sachant pas comment s’y prendre, elle voit cela comme une montagne et panique. Cela la freine dans sa vie de tous les jours. Elle est tellement stressée qu’elle en devient agressive, ce qui n’arrange rien car les autres l’envoient promener. Le pronostic est plus favorable puisque l’incohérence des parents a été moins grave et que l’association entre soin et affection a été mise en place dans la petite enfance. 35
Le système parental malade ou déviant Ces personnes ont elles, développé un système parental mais son contenu s’écarte de ce qui est habituellement attendu dans le milieu où elles vivent. C’est aussi le cas d’enfants issus de la pègre vivent une vie rangée, d’enfants qui font une ascension ou une descente sociale par rapport à leur milieu d’origine ou d’enfants d’émigrés, qui découvrent que les normes et les valeurs qu’ils ont intériorisées ne sont pas adaptées au milieu où ils vivent actuellement. Trois réactions possibles : • Exclure leur P2 et retomber au niveau de P1 qui recherche un nouveau système dans les attentes des autres pour élaborer un nouveau P2 qui coexistera au P2 exclu. Ainsi, un P2 pour la nouvelle situation et unP2 pour quand elles retournent dans leur milieu d’origine 36
•
Exclure P2 et ne pas chercher à s’adapter. Dans ce cas, elle présente l’image d’une personne avec un système parental absent. La personne n’exclut pas le P2 et se retire dans des sous groupes de sa culture. •
L’aide la plus efficace qu’on peut offrir à ces personnes est de leur permettre par des informations et des travaux pratiques à trouver un système dans leurs adaptations, ce qui leur permet d’élaborer un nouveau P2. 37
Pour en savoir plus… • Edwige Antier, Eloge des mères, Editions Pocket, 2003 • Edwige Antier, Vive l’éducation, Editions J’ai lu, 2005 • Peg Blackstone, L’Enfant dynamique : intégrer la structure du second ordre, les relations d’objet et la psychologie du Soi, AAT numéro 92 – Octobre 1999-­‐‑ pp 125-­‐‑
142 • Dominique Bolliet et Jean Pierre Schmitt, La socialisation, Editions Bréal, Collection Thèmes & Débats sociologiques, 2002. • Pierre Bourdieu, La distinction, Critique sociale du jugement, Editions Minuit 1979 • Pierre Bourdieu, Questions de sociologie, Editions Minuit 1994 • José Grégoire, Logique de l’Adulte, logique de l’Enfant, AAT numéro 26 -­‐‑ Avril 1983 -­‐‑ pp 84-­‐‑88 • Jeni Hine, Structure psychique des états du moi, AAT numéro 92 – Octobre 1999 -­‐‑ pp 143-­‐‑154 • Jung, Dialectique du Moi et de l'ʹInconscient, Editions Folio, Collection Essais, 1986 • Jung, Les Racines de la Conscience, Editions Le livre de poche , 1995 • Mélanie Klein, La psychanalyse des enfants, Editions PUF, 1959 • Maarten Kouwenhoven, Systèmes parentaux absents, déficients et déviants, AAT numéro 28 – pp.179-­‐‑184 • Carlo Moiso, Relation transférentielle et analyse structurale, AAT numéro 31 – Juillet 1984 – pp. 133-­‐‑ 137 • Jean Piaget, Le développement de l’intelligence chez l’enfant, Editions Delachaux-­‐‑
Niestlé • Jean Piaget, La formation du symbole chez l’enfant, Editions Delachaux-­‐‑Niestlé • Jean Piaget, La construction du réel chez l’enfant, Editions Delachaux-­‐‑Niestlé, 1937 • JM Petrot, Le Moi et le bon objet, Mélanie Klein, Editions Dunod • Donald Winnicott, Jeu et réalité, Ed Gallimard, réédition 2004 • Donald Winnicott, La mère suffisamment bonne, Editions Payot, réédition 2006 38