Vendanges - Union des oenologues de France

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Vendanges - Union des oenologues de France
Vendanges
LE CONTROLE DE MATURITE :
IMPORTANCE ET OUTILS D’EVALUATION
Eric MEISTERMANN, Rémi GUERIN-SCHNEIDER
Entav-ITVFrance
28, rue Herrlisheim, 68000 Colmar
INTRODUCTION
La qualité de la vendange comporte plusieurs facettes : réglementaire par les règles de production ou les cahiers des charges,
hygiénique par les résidus de pesticides ou les mycotoxines, technologique par l’évaluation des critères intervenants sur la vinification
(azote assimilable, protéines, etc.) ou encore qualitative par l’impact sur la qualité du vin. Les contrôles de maturité prennent en
compte certains de ces aspects. Ils ont pour objectif d’aider à évaluer la qualité de la vendange, à déterminer la date optimale de
récolte et à recueillir des informations utiles pour le choix des itinéraires de vinification.
Au cours de la maturation, la qualité du raisin augmente, passe par un optimum puis diminue. La maturité optimale dépend bien
évidemment du type de vin recherché : vins effervescents ou tranquilles, vins blancs, rosés ou rouges, vins primeurs ou de garde, vins
secs, moelleux ou liquoreux. Le contrôle de maturité doit donc faire référence au type de vin recherché. Il doit intégrer à la fois une
approche descriptive, par les critères d’évaluation de la qualité du raisin, et dynamique, par son évolution au cours du temps. Nous
allons détailler ces aspects avant de présenter une méthodologie pour l’évaluation des arômes des raisins blancs.
1. LES CRITERES D’EVALUATION DE LA QUALITE DU RAISIN
Les principaux piliers de la qualité du raisin reposent, d’une part,
sur les composantes de la pulpe que sont les sucres et l’acidité,
d’autre part, sur ceux de la pellicule que sont les composés
aromatiques et les composés phénoliques pour les vins rouges.
D’autres critères ont été avancés pour évaluer cette qualité.
1.1
LES CRITERES CHIMIQUES
Les sucres : c’est le critère le plus courant et le plus
ancien. Les sucres sont, avec l’eau, le principal composant du jus
de raisin. Ils constituent un bon critère de maturité (Carbonneau,
1992) mais insuffisant pour évaluer la qualité du raisin. En effet,
si une teneur en sucres faible est bien le signe d’un manque de
maturité, une teneur élevée n’est pas une garantie de qualité.
Autrement dit, la teneur en sucres n’est pas un critère de qualité
mais plutôt un critère de non-qualité. C’est une condition
nécessaire, mais non suffisante, pour élaborer un vin de qualité.
De plus, avec le réchauffement climatique, cette variable est, dans
de nombreuses régions, moins fréquemment un facteur limitant.
Ce n’est pas un hasard si la recherche de nouveaux critères de
rémunération est une préoccupation dans plusieurs vignobles.


L’acidité : c’est l’autre élément important de
l’équilibre du vin. L’acidité n’intervient pas uniquement sur la
qualité immédiate du vin mais également sur la vinification et les
capacités de vieillissement du vin. Elle peut s’apprécier
de manière globale par l’acidité totale ou le pH ou de manière
plus fine par la prise en compte des teneurs en acides tartrique
et malique. Toutefois, comme la teneur en acide tartrique varie
peu à l’approche de la maturité, les variations d’acidité
proviennent essentiellement de la dégradation de l’acide malique
(Maxa et al., 1995). Le rapport tartrate/malate peut être
pertinent en situation froide. Il est important de signaler que
les résultats des analyses d’acidité totale, du pH, des acides
tartrique et malique dépendent directement du taux
d’extraction, et donc du mode d’extraction des jus lors des
contrôles de maturité (Aerny et al., 2000).

Les composés phénoliques : ce critère est important
pour les vins rouges. Il n’est pas corrélé à la teneur en sucres ou à
l’acidité. Il apporte donc une information supplémentaire. Plusieurs
méthodes d’évaluation du potentiel polyphénolique des raisins
rouges ont été développées. Elles diffèrent par leur objectif et leur
mode opératoire (Cayla et al., 2002 ; Saint-Cricq de Gaulejac N. et
al.,1998 ; Dupuch V., 1996 ; Gunata Z. et al.,1987 ; Roson J.P.,
1988). La méthode proposée par l’I.T.V. est à la fois pertinente et
assez facile à mettre en œuvre (De Montmollin et al., 2003).

Les composés aromatiques : au cours de la
maturation, l’arôme des raisins et des vins correspondants passe
successivement par des notes herbacées, végétales, florales, de
fruits frais acides (fruits exotiques et agrumes), de fruits murs
sucrés, de fruits confits (coing, abricot) et, enfin, des notes de
surmaturation. La composante aromatique doit donc être
parfaitement adaptée au type de vin recherché. Les molécules
aromatiques du raisin participent à l’arôme variétal (terpénols,
thiols aromatiques) mais aussi au bouquet ou arômes de
vieillissement des vins. Certaines molécules peuvent jouer un
rôle négatif, comme les composés en C6, responsables des
odeurs herbacées, ou les méthoxypyrazines à odeurs végétales.
L’évaluation du potentiel aromatique de la vendange est longue,
difficile et coûteuse. Des méthodes plus rapides sont en cours de
développement comme nous le verrons plus loin.

Les éléments minéraux : parmi les éléments
minéraux, le potassium joue le rôle le plus important.
Il intervient directement sur le pH du moût. Sa teneur augmente
au cours de la maturation, mais avec des fluctuations parfois
importantes (Maxa et al., 1995). Les autres cations et les anions
minéraux n’ont pas été cités comme critères d’évaluation de la
maturité.

Les composés azotés : la teneur en acides aminés
et plus particulièrement en proline, a été considérée par certains
auteurs comme un critère de maturité car elle augmente au
cours de la maturation (Du Plessis, 1983 ; Miltenberger et al.,
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1993 ; Schwab et al., 2003). Ces composés interviennent,
directement ou indirectement, comme précurseurs de certains
arômes. La proline est, en outre, un marqueur de stress chez les
végétaux. Compte tenu de l’incidence de la nutrition azotée de
la vigne sur les teneurs en azote dans les baies (Delas, 1993),
ce paramètre n’est pas un bon critère de qualité organoleptique.
L’azote assimilable est, en revanche, un indicateur technologique
de la fermentescibilité des moûts (Aman et al., 2001).

Les polyosides : la dégradation des pectines dans la
baie à partir de la véraison est en partie responsable de son
ramollissement. La teneur en polyosides diminue au cours de la
maturité et atteint un minimum (Dubourdieu et al., 1981). Mais, il
existe de grandes variabilités de comportement qui rendent difficile
leur utilisation comme critère de qualité (Chardonnet et al., 1987).

Les activités enzymatiques : elles évoluent dans la
baie au cours de la maturation (Sauvage et al., 1991 ; Romieu,
1993). Ces modifications sont révélatrices des changements
physiologiques qui affectent la baie de raisin à partir de la véraison.

Les indices de maturité : ils proposent une approche
globale de la maturité permettant d’évaluer la qualité du raisin et
de déterminer la date de vendange. De nombreux indices ont été
proposés (Cf. Tableau 1). Ils consistent souvent en un rapport
sucres/acidité (acidité totale, pH ou les deux). Leur nombre
élevé est une preuve à elle seule de leur incapacité à
évaluer correctement la maturité. Ils favorisent généralement les
moûts peu acides. Ils sont, comme les sucres, capables de
déterminer le manque de maturité mais ils manquent de
pertinence pour évaluer la qualité.

La notion de marqueur de maturité : elle repose
sur le suivi d’un composé précis du raisin au cours de la maturité
dont l’évolution permettrait, à elle seule, de déterminer la date
optimale de récolte. Comme l’indice de maturité, la teneur de ce
composé passe par une valeur optimale qui indiquerait la date de
récolte (Marteau et al., 1978). Plusieurs marqueurs ont été
proposés tels que les composés aromatiques (terpènes
globalement ou isolément, composés azotés, activités
enzymatiques, etc.). Cette idée sous-entend qu’il faut un
marqueur de maturité pour chaque type de vin.
AUTRES CRITERES D’EVALUATION
Les critères physiques : le poids des baies, pris en
compte isolément, n’est pas un critère de qualité (Champagnol,
1993). Les caractéristiques mécaniques de la baie telles que la
résistance à l’écrasement ou à l’éclatement permettent de
caractériser la véraison (Abbal et al., 1992), mais pas la
maturité. Il en est de même pour la coloration de la baie.


Observation de la vigne : elle consiste à réaliser
une notation visuelle de paramètres tels que le rendement, la
vigueur, l’état sanitaire, la surface foliaire, l’arrêt de croissance,
l’état du sol, etc. Elle est complétée par des analyses de moûts
(Gresser et al., 2006). Elle replace la maturation dans la
physiologie de la plante entière et permet d’évaluer le potentiel
qualitatif en comparant des parcelles entre elles. C’est un
élément clé des sélections parcellaires.

L’hétérogénéité de la maturation : ce paramètre
n’est pas pris en compte par les analyses habituelles qui
déterminent une valeur moyenne par parcelle. Il peut être
estimé par une observation du déroulement des stades
phénologiques (floraison, véraison). Une floraison ou une
véraison étalée entraîne une plus forte hétérogénéité de la
vendange, ce qui peut avoir des conséquences sur la qualité du
vin.

La dégustation des baies : il s’agit de la
normalisation d’une méthode ancestrale mais empirique. Elle
s’est largement généralisée ces dernières années. C’est le
complément de l’observation de la vigne. La méthode est moins
objective qu’une analyse chimique mais pertinente pour
déterminer la date de récolte optimale. Les paramètres pris en
compte au moment de la dégustation concernent aussi bien la
grappe entière que la rafle, la pellicule, la pulpe et les pépins.
Les descripteurs proposés sont assez nombreux. (Mengler,
2005 ; Adar du Vignoble, 2004 ; Guyot et al., 2004).
France :
Sucres (g/L) / AT1
TAP (% vol.) / AT1
(Schopfer, 1984)
(Schopfer, 1984)
Suisse et Allemagne :
°Oechslé x 10 / AT2
°Oechslé x pH² / √AT2
Poids 20 baies + °Oechslé – 5 x AT2 – 7
(Aerny, 1984)
(Basler, 1992)
(Aerny, 1984)
Pays anglo-saxons :
°Brix / AT (en acide tartrique %)
°Brix x pH²
Indice de Baragiola :
(Du Plessis, 1983)
(Du Plessis, 1983)
(Ribereau-Gayon et al., 1975)
100 x Acide tartrique / AT2
Indice de Ferré :
(Ribereau-Gayon et al., 1975)
Acide tartrique / (AT2 + alcalinité des cendres)
Acide tartrique / (acide tartrique + acide malique)
Coef de saturation des acides de Ferré (Ribereau-Gayon et al., 1975)
2 x Alcalinité des cendres x 100 / (AT2 + alcalinité des cendres)
avec AT1 = acidité totale exprimée en H2 SO4 g/L
AT2 = acidité totale exprimée en acide tartrique g/L
Tableau 1 : Les principaux indices de maturité
2. LA DYNAMIQUE DE MATURATION DU RAISIN
La maturation est un phénomène dynamique. Les critères
analytiques présentent chaque année à peu près le même type
d’évolution, rapide après la véraison, et plus lente à l’approche de
la maturité. D’où l’idée de modéliser cette évolution afin de prévoir
la date de récolte ou la qualité de la vendange.
Certains modèles se contentent pour cela d’extrapoler les
données des premiers contrôles de maturité (Barillère et al.,
1988 ; Klas, 1986 ; Maujean, 1983) ou de modéliser les courbes
de maturation pour comparer les millésimes ou les parcelles
(Panigai et al., 1988).
D’autres modèles prennent en compte des paramètres climatiques
tels que le degré-jour, l’ensoleillement, les précipitations, etc.
(Binder et al., 1991 ; Bonnardot, 1997 ; Hofmann et al., 1991 ; Mc
Intyre et al., 1987 ; Mehofer et al., 2005).
Des modèles plus élaborés intègrent non seulement les données
climatiques mais également des paramètres agronomiques afin
de développer une approche écophysiologique de la vigne
(Carbonneau, 1992 ; Panigai et al., 1998 ; Garcia de Cortazar
Atauri, 2006).
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Des propositions de modèles développés il y a dix ou vingt ans
peuvent avoir perdu de leur pertinence en raison du
réchauffement climatique. La règle des 100 jours entre la
floraison et la maturité n’est déjà plus une réalité. Les périodes
entre la floraison et la véraison et entre la véraison et la récolte
deviennent plus courte (Duchène, 2007).
Une autre approche dynamique de la maturation a été développée
par la mesure du flux de sucre vers la baie. La maturité n’est plus
évaluée uniquement par la quantité de sucre, mais par la cinétique
d’accumulation des baies ce qui permet d’identifier les situations
de blocage de la maturité (Deloire, 2005).
3. UNE NOUVELLE METHODE D’EVALUATION DES AROMES :
CAS DES PRECURSEURS GLYCOSYLES
L’arôme variétal est formé, d’une part, de composés volatils
libres directement odorants et donc perceptibles dans le raisin
lui-même et, d’autre part, de précurseurs d’arômes qui se
révèlent au cours des opérations techniques intervenant depuis
la récolte jusqu’au vieillissement des vins (Drawert, 1974).
Ces précurseurs sont divers (lipides, acides hydroxycinnamiques,
caroténoïdes de la pellicule, etc.). Les deux classes de composés
les plus étudiées à l’heure actuelle sont constituées, d’une part,
des précurseurs cystéïnylés et/ou glutathionés (Tominaga et al.,
1998, Peyrot des Gachons, 2001) qui donnent naissance, au
cours de la fermentation alcoolique, à des thiols fortement
odorants, responsables des notes de buis et d’agrumes de
nombreux vins et, notamment, des vins de sauvignon blanc et,
d’autre part, des précurseurs glycosidiques qui peuvent générer
des composés odorants très variés : alcools en C6, alcools
aromatiques et aliphatiques, phénols volatils, terpènes et C13norisoprénoïdes (Williams et al. 1982 ; Voirin, 1990).
L’analyse de ce potentiel aromatique s’avère importante, tant
pour le choix des techniques culturales et la détermination d’une
date optimale de récolte, que pour l’adaptation de l’itinéraire
technique de vinification afin de valoriser ce potentiel qualitatif.
3.1
METHODES D’ESTIMATION DES PRECURSEURS
GLYCOSIDIQUES DU RAISIN
La méthode classique des précurseurs glycosidiques est
longue et coûteuse. Elle nécessite une extraction sélective des
glycosides, une étape d’hydrolyse (souvent enzymatique, parfois
chimique) et une analyse des composés volatils par
chromatographie en phase gazeuse couplée à la spectrométrie
de masse ou à un détecteur à ionisation de flamme (CPG-SM et
FID).
La méthode glycosyl-glucose a été développée par
l’Australian Wine Research Institue d’Adélaïde en Australie
(Williams et al., 1995 ; Iland et al.,1996 ; Francis et al., 1998).
Elle consiste à analyser le glucose après hydrolyse des glycosides
qui, dans le raisin, comprennent tous une unité glucose et une
seule. La mesure donne donc par correspondance la teneur en
glycosides totaux. Cette méthode est rapide mais imprécise car
la présence de glucosides de polyphénols fausse le résultat.
D’autre part, elle inclut des molécules qui n’ont pas forcément
d’importance dans l’appréciation qualitative du produit final.
La méthode I.T.V./INRA a été développée dans le cadre d’un
partenariat entre I.T.V. France et l’INRA-UMR Sciences pour
l’œnologie de Montpellier. Elle fait l’objet d’une protection
juridique.
Les précurseurs glycosidiques sont déterminés par grande classe
chimique d’aglycones par Infra-Rouge à Transformée de Fourrier
(IRTF) sur les jus après traitement au PVPP et extraction sur
résine C18. Cette méthode nécessite, pour chaque cépage, la
mise en place et l’actualisation d’une banque de données et
l’établissement d’un modèle prédictif à l’aide des corrélations
statistiques entre les spectres IR et les données quantitatives
issues des analyses de références. La méthode a déjà été
appliquée au Melon B (Guérin-Schneider, 2003).
3.2
APPLICATION DE LA METHODE I.T.V. / INRA AU
RIESLING ET AU GEWURZTRAMINER
La base de données a été constituée entre 2004 et 2006 en
récoltant les deux cépages dans les parcelles du réseau de
maturation du vignoble alsacien, ce qui a permis d’avoir une
diversité représentative de celle du terrain.
Les modèles prédictifs, calculés sur les données 2004 et 2005,
sont basés sur 49 échantillons de chacun des deux cépages.
Leurs performances sont regroupées dans le Tableau 2
ci-dessous.
Pour le riesling, les deux familles les plus importantes pour
l’arôme des vins, monoterpènes et C13-norisoprénoïdes, sont
parmi celles pour lesquelles la méthode d’analyse semble
adaptée.
Les précisions de prédiction (RMSEC) pour ces deux familles
sont du même ordre de grandeur que celles de l’analyse de
référence. En ce qui concerne le gewurztraminer, l’ajustement
est un peu moins bon, pour les norisoprénoïdes, mais il reste
acceptable.
Là encore, l’analyse semble bien adaptée, notamment pour les
monoterpènes glycosylés qui constituent la classe de glycosides
la plus importante pour l’arôme des vins de ce cépage.
Riesling
Famille chimique
d'aglycone
R2
RMSEC
R2
RMSEC
Alcools
98%
6,5%
95%
11,5%
Norisoprénoïdes
88%
13,0%
77%
16,5%
Phénols
98%
16,0%
82%
14,0%
Terpènes
85%
11,5%
89%
11,0%
Tableau 2 : Performances des modèles prédictifs établis pour
les échantillons de riesling et de gewurztraminer (2004 et 2005)
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Gewurztraminer
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Les familles d’aglycone étudiées ne présentent pas de corrélation
avec les critères habituels de qualité comme le titre
alcoométrique probable (TAP en % vol.) et l’acidité totale
déterminés lors du contrôle de maturité le plus proche de la
récolte (Cf. Tableau 3). L’évaluation du potentiel aromatique
glycosylé constitue de ce fait un paramètre indépendant de la
teneur en sucres et d’acidité.
Tableau 3 : Corrélation de Bravais-Paerson entre
les sucres et l’acidité totale des raisins et les familles
d’aglycone pour les échantillons de riesling et de
gewurztraminer(2004 et 2005)
Riesling
Famille chimique
d'aglycone
TAP
Gewurztraminer
Acidité
totale
TAP
Acidité
totale
Alcools
-0,05
-0,73
0,16
-0,49
Norisoprénoïdes
0,05
-0,05
0,01
0,17
Phénols
0,19
0,36
0,09
-0,22
Terpènes
0,19
-0,40
0,10
-0,33
CONCLUSION
Les contrôles de maturité ont pour principaux objectifs d’évaluer la qualité du raisin et de déterminer la date de récolte optimale en fonction
du type de vin recherché. L’approche générale et les méthodes pour répondre à ces objectifs ont évolué au cours des années. Dans un
premier temps, il s’agissait de chercher un critère unique permettant d’évaluer la qualité globale de la vendange. Ce critère était d’abord un
indice de maturité et, plus tard, un marqueur de maturité. Le nombre élevé d’indices et de marqueurs proposés est, à lui seul, révélateur
des limites de cette approche. Ces critères ne permettent pas de définir la maturité optimale. Certains d’entre eux sont toutefois
susceptibles d’identifier les carences de maturité. Ils définissent les conditions nécessaires, mais non suffisantes, de la qualité.
Les méthodes actuelles tentent d’aller plus loin dans la définition de la maturité en prenant en compte de nouveaux paramètres.
Cette évolution a été rendue possible grâce au développement de nouvelles méthodes d’évaluation rapides et peu coûteuses. Il s’agit
tout d’abord des méthodes d’évaluation du potentiel polyphénolique des raisins rouges qui sont maintenant couramment utilisés dans
les vignobles. Plus récemment des techniques d’analyses simplifiées ont été proposées pour l’évaluation du potentiel aromatique.
La méthode ITV-INRA de détermination des précurseurs glycosylés est en cours de développement dans différents vignobles.
L’approche multiparamétrique de la maturité se retrouve également au niveau des essais de modélisation. Il ne s’agit plus aujourd’hui
de prévoir la teneur en sucres en fonction de la température et de l’ensoleillement, mais de rechercher une description du
fonctionnement de la plante entière. Au niveau de la pratique, les méthodes ont également évoluées. Même si le suivi des sucres et des
composantes de l’acidité reste une donnée de base, il est souvent complété par l’observation de la vigne et la dégustation des raisins.
Cette évolution traduit aussi des changements dans la conception de la maturité optimale. Celle-ci ne peut plus être considérée comme
un point précis sur une courbe modèle mais comme une situation de compromis où un maximum de critères sont proches de leur
optimum. A tout moment, un gain sur l’un des critères peut s’accompagner d’une perte pour un autre critère.
Enfin, il faut avoir à l’esprit que le développement de méthodes sophistiquées d’évaluation de la date de vendange est inutile si les
contraintes matérielles d’organisation des chantiers de récolte ne permettent pas de les appliquer.
REMERCIEMENTS
L’application de la méthode I.T.V./INRA au riesling et au gewurztraminer a bénéficié du soutien financier de la Région Alsace,
de VINIFLHOR, de la Communauté européenne et du CIVA.
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LE CONTROLE DE MATURITE :
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Article technique RFOE N° 224
ERIC MEISTERMANN -
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