II – Réflexion - Réfraction 1 Position du problème 2

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II – Réflexion - Réfraction 1 Position du problème 2
II – Réflexion - Réfraction
1 Position du problème
Dans ce chapitre, il s'agit d'étudier le comportement d'une onde électromagnétique plane
arrivant à l'interface entre deux milieux diélectriques linéaires homogènes et isotropes d'indice
de réfraction différents. Les deux milieux seront supposés non-absorbants. Une telle interface
est appelée dioptre plan.
Les caractéristiques de l'onde incidente étant données, deux contraintes doivent être
respectées :
- les équations de propagation de l'onde électromagnétique dans chaque milieu
- les conditions de continuité sur les champs électrique et magnétique sur la surface de
séparation.
La première contrainte est traduite d'une part par les équations de dispersion reliant le vecteur
d'onde k et la pulsation ω dans chaque milieu :
k12 = n12
ω2
, k 22 = n22
ω2
c2
c2
d'autre part par une relation entre les champs électrique et magnétique, par exemple
r r r
B=k ∧E ω
Les équations de Maxwell imposent que les composantes tangentielles du champ électrique et
du champ magnétique soient égales de chaque côté de la surface. L'onde incidente donne
naissance dans le milieu 2 à une onde transmise, appelée aussi onde réfractée. Pour que les
conditions de continuité soient respectées, il est nécessaire d'avoir aussi une onde réfléchie
dans le milieu 1.
Ces trois ondes sont des ondes planes :
r
r r
r
z
E i = E 0i exp i ω t − k i ⋅ r
r
r r
r
r
E r = E 0 r exp i ω t − k r ⋅ r
i2 k t
r
r r
r
2
E
t = E 0 t exp i ω t − k t ⋅ r
x
[(
[(
[(
1
r
ki
i1
i'1
r
kr
)]
)]
)]
Le choix des axes de coordonnées est représenté cicontre: - l'axe Oz est normal à la surface.
r
- l'axe Ox est dans le plan contenant Oz et k ,
appelé plan d'incidence.
2 Continuité des vecteurs d'onde
Les conditions de continuité des champs devant être vérifiées pour toutes les valeurs de t, les
trois ondes doivent avoir la même pulsation. On peut donc écrire directement les équations
pour les composantes tangentielles des amplitudes complexes :
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(
)
(
[(
) ]
)
(
r r r
r r r
r r
r
E 0iT exp − ik i ⋅ r + E 0 rT exp − k r ⋅ r = E 0tT exp − ik t ⋅ r
soit :
[ (
) ]
(
) (
)
r r r r
r r r
r
r
E 0iT + E 0 rT exp − k r − k i ⋅ r = E 0tT exp − i k t − k i ⋅ r
Cette condition devant être vraie pour tout point de la surface, y compris l'origine O, on doit
r r r r r r
r r
r r
avoir k r − ki ⋅ r = kt − ki ⋅ r = 0 . Les vecteurs k r − ki et kt − ki sont perpendiculaires à la
surface de séparation, ce qui entraîne trois résultats :
r
r
- kry = kty = 0 Les vecteurs d'onde k r et kt sont dans le plan xOz.
Les rayons réfléchi et réfracté sont dans le plan d'incidence.
- krx = kix Les deux ondes étant dans le même milieu d'indice n1, on en déduit que les
angles i1 et i'1 sont égaux.
L'angle de réflexion est égal à l'angle d'incidence.
- ktx = kix Les ondes étant cette fois dans deux milieux différents, on obtient la
formule bien connue donnant l'angle de réfraction :
(
)
(
)
)
n1 sin i1 = n2 sin i2
[II-1]
Ces trois résultats sont généralement appelés Lois de Descartes bien qu'ils aient tous été
établis antérieurement à Descartes.
Si l'indice n1 est supérieur à n2 l'angle de réfraction ne peut pas toujours être calculé par la
formule ci-dessus. Si l'angle d'incidence et supérieur à un angle limite iL tel que
sin iL = n2 n1 , l'onde réfractée ne pénètre plus dans le milieu 2. C'est le cas de la réflexion
totale qui sera étudié plus loin.
3 Coefficients de réflexion et de réfraction
Les coefficients de réflexion et de réfraction sont des nombres qui caractérisent le rapport
entre les amplitudes des ondes réfléchie et transmise et l'amplitude de l'onde incidente. Nous
allons calculer ces coefficients, pour deux polarisations particulières de l'onde incidente, dans
le cas où il n'y a pas de réflexion totale.
3.1 Champ électrique perpendiculaire au plan d'incidence (onde s)
r
Bt
2
r
Bi
z
i2
[(
x
r
Br
r
Er
1
r i1
ki
r
Ei
L'onde incidente étant donnée :
r
r r r
E i = E 0i exp i ω t − ki ⋅ r u y ,
r
kt
r
Et
r
kr
)]
les ondes réfléchies et transmises s'écrivent :
r
r r r
E r = E 0 r exp i ω t − k r ⋅ r u y
r
r r r
E t = E 0t exp i ω t − kt ⋅ r u y
[(
[(
)]
)]
E 0i , E 0 r et E 0t étant des constantes scalaires.
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Les coefficients de réflexion et de transmission r ⊥ et t ⊥ sont définis par :
E 0 r = r ⊥ E 0i et E 0t = t ⊥ E 0i , l'indice ⊥ rappelant que ces coefficients sont calculés pour une
polarisation perpendiculaire au plan d'incidence.
r r
r k ∧E
En tenant compte de la relation B =
, la disposition des vecteurs est celle décrite sur la
ω
figure. Les conditions de continuité des composantes tangentielles sont alors :
E iy + E ry = E ty
⇒
B ix + B rx = B rt
⇒
1+ r⊥ = t⊥ ,
(1 − r ⊥ ) n1 cos i1 = t ⊥ n2 cos i2 ,
d'où l'on tire les expressions des coefficients, appelées Formules de Fresnel :
[II-2]
r⊥ =
n1 cos i1 − n2 cos i2
,
n1 cos i1 + n2 cos i2
t⊥ =
2 n1 cos i1
n1 cos i1 + n2 cos i2
On remarque que r⊥ et t ⊥ sont réels. Il n'y a pas de déphasage à la réflexion et a la
transmission.
3.2 Champ électrique parallèle au plan d'incidence (onde p)
r
Et
r
Ei
r
kt
i2
2
La direction et le sens positif des champs sont
représentés sur la figure. Il faut noter que, les
champs électriques des trois ondes n'étant plus
selon le même axe, la convention définissant le
sens positif pour les champs Er et Et n'est pas
automatique. La convention choisie est celle qui
donne le même sens positif pour les trois champs
lorsque l'incidence est normale (i1 = 0).
z
r
Bt
x
r
Br
1
r i1
ki
Avec cette convention, les équations de continuité
deviennent :
r
r
(1 + r // ) cos i1 = t // cos i2 ,
Er
Bi
(1 − r // ) n1 = t // n2 ,
d'où l'on tire les formules de Fresnel pour cette polarisation :
[II-3]
r// =
r
kr
n1 cos i2 − n2 cos i1
,
n1 cos i2 + n2 cos i1
t // =
2 n1 cos i1
n1 cos i2 + n2 cos i1
3.3 Cas général, polarisation quelconque.
On remarque que, pour un angle d'incidence non nul, les coefficients de réflexion pour
les polarisations parallèle au plan d'incidence et perpendiculaire a celui-ci sont différents. Il en
est de même pour les coefficients de transmission. Il en résulte que, pour une onde
quelconque, la direction de polarisation ne sera pas conservée après réflexion ou transmission.
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r
r
r
En effet, le champ incident Ei peut être décomposé selon les vecteurs unitaires u // et u ⊥ ,
r
r
r
respectivement parallèle et perpendiculaire au plan d'incidence : Ei = Ei // u // + Ei ⊥ u ⊥ .
r
r
r
Après réflexion on peut écrire, avec les mêmes conventions, Er = Er // u // + Er ⊥ u⊥ . Le rapport
Er // r// Ei //
E
=
étant différent de i // , l'angle du vecteur champ électrique avec le plan
Ei⊥
Er⊥ r⊥ Ei⊥
d'incidence sera modifié.
r
r
On voit donc que seules les polarisations selon u // (polarisation p) et selon u ⊥ (polarisation s)
seront conservées lors de la réflexion ou de la réfraction. Ce sont des modes propres de
polarisation. Toute autre forme de polarisation devra donc être décomposée selon ces modes
propres, puis recomposée après réflexion ou réfraction.
4 Réflexion totale
4.1 Onde évanescente
La composante en z du vecteur d'onde dans le milieu 2, ktz est déterminée par la relation de
dispersion,
r 2 ω2
kt = 2 n22
c
et par la continuité des composantes tangentielles,
ktx = kix =
ω
c
n1 sin i1 .
D'où :
ktz = kt − ktx =
2
2
2
ω2
2
(n
2
2
)
− n1 sin 2 i1 .
2
c
2
2
Si l'angle d'incidence est inférieur à l'angle limite iL, n2 − n1 sin 2 i1 est positif et l'angle i2
existe. On a donc :
2
2
2
2
2
n2 − n1 sin 2 i1 = n2 − n2 sin 2 i2 = (n2 cos i2 ) .
Au delà de l'angle limite par contre, n2 − n1 sin 2 i1 est négatif. Il n'y a de solution qu'en
2
2
prenant ktz complexe. En posant γ = n1 sin 2 i1 − n2
2
k tz = ± i
ω
c
2
on peut écrire k tz = −
2
ω2
c2
γ 2 , d'où :
γ
L'expression générale de l'onde transmise dans le milieu 2 est alors :
r r −
 ω  r+
 ω 
E t =  E t exp − γ z  + E t exp + γ z   exp[i (ω t − k tx x )]
 c 
 c 

Dans le cas étudié ici, le milieu 2 étant illimité, le deuxième terme donnerait un champ
r+
exponentiellement croissant vers les z positifs. On doit donc avoir E t = 0 . Remarquons que
ceci n'est plus vrai si le milieu 2 est limité vers les z positifs par autre une interface. C'est le
cas par exemple dans la réflexion totale frustrée (voir 4.4).
L'expression du champ dans le milieu 2 est donc finalement :
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r
r
 ω 
E t = E t exp − γ z  exp[i (ω t − k tx x )]
 c 
Dans le cas d'une onde polarisée linéairement, selon Oy par exemple, le champ réel s'écrit :
r
r
 ω 
Et = E t exp − γ z  cos(ω t − k tx x + ϕ t ) u y
 c 
L'onde est donc une onde progressive dans la direction de l'axe Ox tout en ayant le caractère
d'une onde stationnaire, exponentiellement décroissante dans la direction Oz . Cette onde est
appelée onde évanescente.
c
1 λ
L'amplitude de l'onde est divisée par e à une distance z =
=
de l'interface. Si l'angle
γω γ 2π
d'incidence i1 n'est pas trop voisin de l'angle limite iL (pour lequel γ = 0 ), γ est de l'ordre de 1.
Le champ électrique dans le milieu 2 n'a donc de valeur notable que pour des distances à
l'interface de l'ordre de la longueur d'onde.
Remarque :
Bien que l'expression complexe de son champ électrique soit de la forme
r r
r r
r
E (t , r ) = E 0 exp i ω t − k ⋅ r , cette onde n'est pas une onde plane.
[(
)]
4.2 Coefficients de réflexion
r r
r k ∧E
La relation B =
qui a été utilisée pour le calcul des coefficients dans le cas ou i2 existe
ω
r
reste valable pour un vecteur d'onde k complexe. Pour une onde polarisée
perpendiculairement au plan d'incidence, l'ensemble des calculs peut être repris en remplaçant
ω
ω
γ , c'est à dire en remplaçant n2 cos i2 par − iγ .
c
c
Le coefficient de réflexion pour les amplitudes est donc :
kz =
n2 cos i2 par k z = −i
r⊥ =
n1 cos i1 + iγ
, que l'on peut mettre sous la forme :
n1 cos i1 − iγ
1 + iΓ⊥
r⊥ =
1 − iΓ⊥
avec Γ⊥ =
γ
n1 cos i1
n1 sin 2 i1 − n2
2
=
2
n1 cos i1
Pour une onde polarisée dans le plan d'incidence, le calcul est un peu plus délicat car on ne
peut pas définir simplement un coefficient de transmission pour l'amplitude du champ
électrique. La substitution de n2 cos i2 par − iγ donne cependant le résultat correct :
r // =
− iγ n1 n2 − n2 cos i1
, soit :
− iγ n1 n2 + n2 cos i1
r // = −
1 + iΓ//
1 − iΓ//
avec Γ// =
n1 γ
n12
=
Γ⊥
n22 cos i1 n22
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Les coefficients de réflexion en amplitude r ⊥ et r // sont maintenant complexes. Le champ
réfléchi est donc déphasé par rapport au champ incident. On peut remarquer que ces
coefficients sont des nombres complexes de module unité que l'on peut écrire :
r ⊥ = e 2iϕ⊥ et r // = − e 2iϕ // avec tan ϕ ⊥ = Γ⊥ , tan ϕ // = Γ//
Dans les deux cas, les ondes incidente et réfléchie ont même amplitude et donc même
intensité. La réflexion est donc bien une réflexion totale pour toutes les polarisations.
r
Par contre, les déphasages ϕ ⊥ et ϕ // sont différents. Les polarisations linéaires selon u //
r
(polarisation p) et selon u⊥ (polarisation s) demeurent donc les modes propres de polarisation. Une onde incidente quelconque devra être décomposée selon ces modes propres, puis
recomposée après réflexion ou réfraction.
En ce qui concerne les coefficients de transmission, dans le cas de l'onde polarisée
perpendiculairement au plan d'incidence, la relation de continuité du champ électrique
t ⊥ = 1 + r ⊥ donne directement :
t⊥ =
2
2 n1 cos i1
soit t ⊥ =
1 − iΓ⊥
n1 cos i1 − iγ
Pour l'onde polarisée dans le plan d'incidence, le champ électrique dans le milieu 2 est
constitué d'une composante en x et d'une composante en z qui sont en quadrature. On peut
cependant définir un coefficient de transmission t // par la substitution de n2 cos i2 par − iγ ,
puis calculer les composantes du champ électrique dans l'onde évanescente par la même
substitution.
On trouve :
2i Γ//
2
n12
cos i1 Ei 0 et Et 0 z =
cos i1 Ei 0
1 − iΓ//
1 − iΓ// n22
Ce résultat, obtenu par une méthode de calcul qui peut sembler assez formelle, peut être
retrouvé de façon plus claire en écrivant la continuité du champ magnétique (qui est
tangentiel), puis en calculant le champ électrique à partir du champ magnétique en utilisant
l'équation
r r iω r
∇ ∧ B = 2 εrE
c
Et 0 x =
4.3 Profil de l'onde selon z
On traitera seulement le cas de l'onde perpendiculaire au plan d'incidence (polarisation s).
ω
ω
En posant k x = n1 sin i1 et k z = n1 cos i1 l'onde dans le milieu 1 s'écrit :
c
r
r c r
r
E 1 = E i + E r = E 0 [exp(− ik z z ) + r ⊥ exp(− ik z z )] exp[i (ω t − k x x )]
soit, comme r ⊥ = e 2iϕ⊥ ,
r
r
E 1 = 2 E 0 cos(k z z + ϕ ⊥ ) exp(iϕ ⊥ ) exp[i (ω t − k x x )]
d'où l'expression
réelle :
r
r
E1 = 2 E0 cos(k z z + ϕ ⊥ ) cos(ω t − k x x + ϕ ⊥ )
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Comme l'onde dans le milieu 2 (cf 4.1), cette onde est stationnaire dans la direction z et
progressive dans la direction x.
Le coefficient de transmission pour l'onde s peut être exprimé sous la forme
t ⊥ = 1 + r ⊥ = 1 + e 2iϕ ⊥ = 2 cos ϕ ⊥ e iϕ ⊥ ,
d'où l'on tire l'expression de l'onde dans le milieu 2:
r
r
 ω 
E2 = 2 E0 cos ϕ ⊥ exp − γ z  cos(ω t − k x x + ϕ ⊥ )
 c 
On vérifie bien qu'il y a continuité pour z=0.
∂E1 y ∂E1 y
=
.
On remarque de plus que les dérivées en z sont aussi continues :
∂z
∂z
Ce résultat est général. Il aurait pu être obtenu directement à partir de la continuité de la
r
r r
r
composante tangentielle de B en utilisant l'équation ∇ ∧ E = −iω B .
Le profil complet du champ est représenté ci-dessous. On peut noter que, en raison du
déphasage ϕ ⊥ , l'onde stationnaire n'a ni nœud ni ventre au niveau de l'interface.
Onde stationnaire sinusoïdale
Onde évanescente
O
Milieu 1
z
Milieu 2
4.4 Applications
Prisme à réflexion totale : Pour un verre d'indice n = 1.5, l'angle limite est voisin de 42°, il y a
donc réflexion totale pour un angle d'incidence de 45°. Cette
propriété est utilisée pour changer la direction d'un faisceau
lumineux de 90°.
Réflexion totale frustrée : En approchant un deuxième prisme sur la face arrière du premier, à
une distance assez faible (une fraction de micron) pour que l'onde
évanescente ne soit pas complètement nulle, on constate qu'une
partie de l'onde continue tout droit dans le deuxième prisme.
L'onde a donc en partie traversé la zone où la propagation n'est pas
permise. C'est un effet identique à l'effet tunnel en mécanique
quantique. De façon pratique, les deux prismes sont réunis par un
matériau transparent d'indice plus faible que le verre. En ajustant la distance et la nature de ce
matériau, on peut réaliser un dispositif séparant un faisceau incident en deux faisceaux
d'intensités égales.
Propagation guidée : Comme on le verra plus loin, la réflexion totale est aussi à la base du
guidage d'ondes dans les fibres optiques. Un guide d'ondes diélectrique plan est constitué
d'une fine lame parallèle de diélectrique transparent entourée par un milieu d'indice plus
faible. Une onde plane arrivant à l'entrée de la lame sous un angle pas trop grand sera
transmise jusqu'à la sortie après avoir subi une série de réflexions totales.
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Une fibre optique fonctionne sur le même principe. Un cœur, de section circulaire, en
matériau d'indice élevé est entouré d'un gaine d'indice plus faible, confinant ainsi l'onde dans
la partie centrale.
5 Conservation de l'énergie
On s'intéresse aux valeurs moyennes dans le temps de la puissance et de l'intensité
r de chaque
r
onde. Pour alléger les notations, ces grandeurs seront notées P = <P> et I =< I > . On notera
r
r
r
I 0 l'intensité incidente, I r et I t les intensités réfléchie et transmise.
Pour une onde progressive, le vecteur intensité
r 1
r
2 r
I = ncε 0 E u k = I u k
2
est proportionnel à l'indice n et au carré du module de l'amplitude du champ électrique.
2
L'intensité réfléchie est donc dans tous les cas I r = r I 0 puisque les deux ondes voyagent
dans le même milieu. Le facteur de réflexion pour les intensités, R, défini comme le rapport
de l'intensité réfléchie à l'intensité incidente est :
2
R= r .
5.1 Cas i < iL
Les facteurs de réflexion et de transmission pour les amplitudes sont réels, on a donc pour
l'onde réfléchie
R = r2
Pour l'onde transmise, dans le cas où il n'y a pas réflexion totale, l'intensité est
1
n
2
I t = n2 cε 0 E t = 2 t 2 I 0 .
2
n1
D'où l'expression du coefficient de transmission pour les intensités :
TI =
n2 2
t .
n1
Attention, il est important de noter qu'il n'y a pas conservation pour les intensités. Les angles
d'incidence et de réflexion étant différents, l'intensité incidente n'est pas la somme des
intensités transmise et réfléchie. En effet, considérons une surface S de l'interface. La
puissance incidente arrivant sur cette surface est P0 = I 0 S cos i1 . La puissance réfléchie repart
sous un angle égal d'où Pr = I r S cos i1 = RP0 . Pour l'onde transmise par contre, l'angle sous
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cos i2
P0 . Il faut donc définir un
cos i1
coefficient de transmission pour les puissances, Tp, qui tient compte des angles :
lequel on voit la surface est i2, donc Pt = I t S cos i2 = TI
TP = TI
cos i2
.
cos i1
En régime permanent, la puissance arrivant sur la surface S, P0, doit être égale à la puissance
qui en repart, Pr + Pt , ce qui se traduit par la relation
R + TP = 1 .
Par contre, mis à part le cas de l'incidence normale, R + TI ≠ 1 .
5.1 Cas i > iL
Dans le cas de la réflexion totale, r étant de module 1, on a bien évidemment R = 1.
Toute la puissance étant réfléchie, on pourrait penser que l'intensité dans le milieu 2 est nulle.
Le calcul du vecteur de Poynting moyen donne pourtant un résultat non nul. Dans le cas d'un
onde polarisée perpendiculairement au plan d'incidence, on trouve :
r 1
2r
I t = n1 sin i1 cε 0 E t ( z ) u x
2
Dans la zone de l'onde évanescente, de l'énergie électromagnétique se propage donc
parallèlement à la surface, dans la direction de l'axe Ox.
La puissance incidente étant entièrement récupérée dans l'onde réfléchie, on pourrait alors
penser que l'énergie n'est pas conservée puisqu'une partie se retrouve aussi dans l'onde
évanescente. Ce paradoxe vient du fait que le modèle que nous avons utilisé est basé sur des
ondes illimitées, dans le temps et dans l'espace. En théorie, la puissance réfléchie est bien
égale à la puissance incidente mais de l'énergie électromagnétique est aussi injectée dans
l'onde évanescente en z = −∞ , se propage le long de la surface sans la traverser et ressort en
z = +∞ , ce qui ne change pas le bilan dans le milieu 1.
Deux exemples concrets permettent de comprendre ce qui se passe en pratique.
Considérons la réflexion d'un faisceau lumineux de section finie. L'énergie correspondant à
l'onde évanescente se construit sur le côté du faisceau qui aborde le premier la surface, se
propage le long de la surface puis ressort dans l'onde réfléchie de l'autre côté du faisceau. La
puissance est donc bien entièrement restituée. Par des expériences précises, on peut mettre en
évidence un petit décalage latéral du faisceau réfléchi, comme si la surface sur laquelle la
réflexion a lieu était située légèrement à l'intérieur du milieu 2. Cet effet est appelé décalage
de Goos-Hanchen.
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Dans le cas de la fibre optique ou du guide d'onde plan, la puissance incidente est injectée
dans le cœur, mais aussi en partie dans l'enveloppe où cette puissance se propage tout en étant
confinée au voisinage de la surface.
6 Etude en fonction de l'angle d'incidence
Nous allons maintenant étudier les variations des coefficients de réflexion avec l'angle
d'incidence i1 dans le cas ou n1 est inférieur à n2, donc sans réflexion totale, et dans le cas
inverse.
Pour une incidence normale, le plan d'incidence n'est pas défini, on ne peut donc plus
distinguer les polarisations parallèles et perpendiculaires. Compte tenu de la convention de
sens faite pour le calcul de r// , on trouve bien que
r// = r⊥ =
n1 − n2
.
n1 + n2
Dans le cas d'une réflexion de l'air (n1=1) sur le verre (n2=n=1.5) on a
r// = r⊥ =
1− n
= − 0 .2 ,
1+ n
soit un coefficient de réflexion en intensité R de 0.04.
Pour une incidence quelconque, en tenant compte de l'équation n1 sin i1 = n2 sin i2 (II-1), les
coefficients peuvent être aussi mis sous une la forme :
[II-4]
r⊥ =
sin (i2 − i1 )
et
sin (i2 + i1 )
r// =
tan (i2 − i1 )
tan (i2 + i1 )
On remarque en particulier que, lorsqu'il n'y a pas réflexion totale, les formules pour r⊥ et r//
sont antisymétriques dans l'échange i1 ↔ i2. En notant r12 le coefficient de réflexion dans le
sens milieu 1 → milieu 2, le coefficient de réflexion pour le trajet inverse est
r21 = −r12 .
L'évolution des coefficients pour les amplitudes et pour les intensités est présentée ci-dessous.
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n1 < n2
n1 > n2
1
1
r//
r⊥
0
0
r//
r⊥
-1
0
-1
π/2
0
iB
iB iL
Coefficients de réflexion pour les amplitudes
π/2
1
1
R⊥
R⊥
R//
R//
0
0
0
0
π/2
iB iL
iB
Coefficients de réflexion pour les intensités
π/2
Au delà de iL, les coefficients r⊥ et r// sont complexes, le trait pointillé symbolise leur
module, les coefficients R⊥ et R// sont égaux à 1.
Dans le cas n1 < n2, on remarque que ces deux coefficients tendent vers 1 lorsque l'angle
d'incidence tend vers π/2, c'est à dire lorsque le rayon est presque parallèle à la surface
(incidence rasante).
Pour une onde polarisée dans le plan d'incidence, il existe un angle particulier iB pour lequel le
coefficient r// s'annule en changeant de signe. Pour cet angle, appelé angle de Brewster,
l'intensité réfléchie est nulle.
D'après l'expression [II-6], r// est nul pour i1 + i2 = π 2 donc n1 sin iB = n2 sin (π 2 − iB ) d'où
[II-5]
tan iB = n2 n1
Cette propriété est utilisée lorsqu'on veut réduire les pertes par réflexion lors de la propagation
d'un faisceau lumineux, notamment dans la cavité d'un laser. La polarisation parallèle au plan
d'incidence sera transmise sans perte, alors qu'avec une lame en incidence normale, la perte
par réflexion est de 8%.
En plaçant une succession de lames à faces parallèles à l'incidence de Brewster on peut aussi
réaliser un polariseur qui atténue fortement une polarisation tout en transmettant l'intégralité
de l'autre. Cet effet est particulièrement important avec une lame de germanium dont l'indice
de réfraction dans l'infrarouge est voisin de 4.
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II-11
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On constate sur les courbes que, même si l'incidence n'est pas exactement celle de Brewster, il
existe toute une zone dans laquelle l'intensité réfléchie dépend fortement de la polarisation.
Cette propriété explique l'utilisation de lunettes polarisantes ou "lunettes de pêcheur" :
constituées de verres qui ne laissent passer que la polarisation verticale, ces lunettes atténuent
fortement toutes les réflexions sur des surfaces horizontales, les étendues d'eau par exemple.
7 Réflexion sur milieu un conducteur
7.1 Coefficients de réflexion
Nous ne considèrerons ici que la réflexion d'une onde arrivant de l'air (indice n1 ≈ 1 ) sur un
milieu conducteur ohmique (conductivité σ réelle), dans le domaine de fréquence où le
courant de conduction est dominant ( σ >> ε 0 ε r ω ).
Nous avons vu que dans le milieu conducteur, l'équation de dispersion est :
r2 ω 2 
σ  ω2 2
k = 2 ε r − i
=
n
ε 0ω  c 2
c 
Les résultats obtenus dans le cas d'un diélectrique transparent peuvent être généralisés :
- Les conditions de passage sur les champs imposent toujours la continuité des
composantes tangentielles des vecteurs d'onde :
ω
ω
k tx = k ix = n1 sin i1 = sin i1
c
c
- La composante en z du vecteur d'onde dans le conducteur est donc donnée par
k tz = k t − k tx =
ω2
(n
)
− sin 2 i1
c
Dans le domaine de fréquence considéré, n ≈ σ ε 0 ω >>1 , d'où, en conservant le signe qui
donne un champ nul à l'infini :
2
2
k tz ≈
2
ω
c
2
2
n
- La continuité des composantes tangentielles des champs conduit de la même façon
aux formules donnant les coefficients de réflexion en ampitude :
[II-6]
r⊥ =
cos i1 − n
≈ −1 ,
cos i1 + n
[II-7]
r// =
1 − n cos i1
≈ −1 ,
1 + n cos i1
Ce résultat généralise donc celui obtenu en incidence normale : les coefficients de réflexion
en intensité R// et R⊥ sont tous deux voisins de 1 quel que soit l'angle d'incidence.
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7.2 Limite du conducteur parfait
Considérons pour simplifier une onde plane incidente, d'amplitude E0 , polarisée selon Ox, se
propageant selon l'axe Oz et arrivant en incidence normale sur le milieu de conductivité σ.
Le champ électrique de l'onde transmise étant :
r
r
E t = t E0 e − k "z e i (ω t − k ' z )u x
la densité de courant dans le conducteur est :
r
r
j = σ t E0 e − k "z e i (ω t −k ' z )u x
En z=0 son amplitude est :
r
2σ
j0 = j = σ t E 0 ≈
E0 ≈ 2 σε 0ω E0
n
Cette amplitude est divisée par e à une profondeur
2ε 0
1 c 1
≈c
δ= =
k " ω n"
σω
Calculons le courant total I parcourant le milieu, entre deux plans parallèles au plan xOz
distants d'une longueur L selon Oy :
r
r
∞ r
σ tE0 −i k z ∞ iω t r
σ t E 0 iω t r
I = ∫ j dS = L ∫ j ( z ) dz = L
e
ux = L
e ux
0 e
0
− ik
ik
r
r
c 2 iω t r
I ≈ Lσ E 0
e u x ≈ 2 Lε 0 cE0 e iω t u x
iω n n
[ ]
Le courant total I est donc indépendant de la conductivité alors que la densité de courant en
surface varie en σ 1 2 et que sa profondeur de pénétration varie en σ −1 2 .
A la limite du conducteur parfait ( σ → ∞ ), on a donc une densité de courant volumique
infinie, concentrée sur une couche infiniment mince sur la surface. On peut définir un courant
r r
r
de surface j S , tel que I = j S L , soit :
r
r
j S = 2 ε 0 cE0 e iω t u x
Le champ magnétique total à la surface du conducteur est
r
r
r
E
r
E
r
B1 = B i + B r = 0 e iω t (1 − r ) u y ≈ 2 0 e iω t u y
c
c
La condition de passage a l'interface
r
r
r
r
r r
B 2 − B1 = µ 0 j S ∧ n12 = 2 µ 0 ε 0 cE0 e iω t u x ∧ u z
r
est donc bien vérifiée si le champ B 2 à l'intérieur du conducteur est nul.
Du point de vue de l'intérieur du conducteur, l'approximation du conducteur parfait est donc
justifiée si l'échelle de mesure est grande devant la profondeur de pénétration des champs.
Du point de vue de la réflexion, la composante tangentielle du champ électrique doit être
nulle, ce qui impose que, quel que soit l'angle d'incidence, les coefficients de réflexion pour
les amplitudes sont
r⊥ = r// = −1 ,
Il y a donc toujours réflexion totale de l'onde incidente.
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Remarquons que ceci entraîne que la composante normale du champ magnétique doit être
aussi nulle à la surface du conducteur.
Le profil de l'onde selon z fait toujours apparaître une onde stationnaire dans le milieu 1, mais,
les coefficients étant réels, la surface de séparation est un zéro d'amplitude. L'onde ne déborde
pas dans le milieu 2.
Onde stationnaire
O
Milieu 1
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z
Milieu 2
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