Teilhard Chardin Création point oméga par André Beauchamp

Transcription

Teilhard Chardin Création point oméga par André Beauchamp
Teilhard de Chardin
Création et point oméga
2 octobre 2012
André Beauchamp
[email protected]
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1 – INTRODUCTION
Quelques caractéristiques de Teilhard
-
Un aristocrate de tradition royaliste;
-
Homme de science fasciné par la matière et désireux de comprendre les
origines de l’humanité. C’est un homme de terrain infatigable. Un des
grands paléontologues de sa période, toujours en contact avec les milieux
scientifiques;
-
Homme profondément mystique soucieux de réconcilier la foi chrétienne
avec la science particulièrement en ce qui concerne les origines de
l’humanité. C’est un évolutionniste convaincu et convainquant;
-
Le drame de sa vie c’est d’être constamment condamné et mis à l’écart
par l’Église. L’interdiction de publier empêche la discussion ouverte de
ses théories et bloque en un sens la dynamique de la recherche;
-
C’est un homme qui a été profondément amoureux de certaines femmes
(la femme, c’est le monde pour l’homme, l’homme c’est le monde pour la
femme) mais il n’a jamais franchi le pas de quitter son ordre religieux ni
son statut sacerdotal. Tout indique qu’il a sublimé constamment l’éros
dans l’agapè.
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2 – Quelques thèmes forts de la pensée de Teilhard
a) Teilhard cherche à dépasser l’opposition traditionnelle de la Matière et de
l’Esprit. Jeune il est frappé par la densité et la force du fer. On peut dire que
pour lui Matière et Esprit sont deux manifestations de l’être.
« Sans aucun doute, par quelque chose, Énergie matérielle et Énergie
spirituelle se tiennent et se prolongent. Tout au fond, en quelque manière, il
ne doit y avoir, jouant dans le Monde, qu’une Énergie unique. » (Le
phénomène humain, p.60)
b) un mot cher à Teilhard est celui d’étoffe. Tout est inter relié et tout se tient
ensemble comme les fils d’un tissu. Entre la réalité la plus modeste et la
splendeur du milieu divin, il y a une continuité et des liens intrinsèques. On
reproche à Teilhard d’être panthéiste : il s’en défend vivement. Il maintient
toujours la transcendance de Dieu. Il est panenthéiste. Mais il insiste sur
l’unité du processus qui va de la Géogenèse à la Biogenèse, à la
Psychogenèse, à la Noogenèse (Phénomène humain, p.200). Il est
convaincu que la vie n’est apparue qu’une fois sur Terre et que tout le reste
s’ensuit (Phénomène humain, note 1, Page 101)
c) évolutionniste convaincu, Teilhard partage l’idée que le processus en œuvre
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est celui du jeu des grands nombres et du hasard. Au fond, la nature
explore, cherche et bricole et seules les pistes les plus prometteuses
réussissent.
Au-delà de ce premier niveau d’analyse, Teilhard essaie de comprendre s’il y
a un progrès dans l’évolution. « De quel droit, par exemple, dire que le
Mammifère, fut-ce l’Homme, est plus avancé et plus parfait que l’Abeille ou la
Rose? » (Le phénomène humain, page 154). Pour Teilhard, le fit d’Ariane est
celui de la complexité-conscience. La rupture survient quand l’humanité
franchit le seuil de la réflexion.
d) évolutionniste radical, Teilhard n’a pas vu venir la crise écologique. La survie
de l’être humain au sein de l’écosystème ne l’inquiète pas, et encore moins le
risque d’une dégradation du milieu écologique. Ce qui l’intéresse c’est l’avenir
de la Noosphère. « Par l’hominisation, en dépit des insignifiances de la santé
anatomique, c’est un Âge nouveau qui commence. La Terre fait « peau neuve ».
Mieux encore, elle trouve son âme » (Le phénomène humain, p. 201).
Teilhard craint le fascisme et le marxisme, la guerre et la violence. Il
n’imagine pas la défaillance écologique, mais on a l’impression qu’il redoute
la surconsommation: « la grande machine humaine est faite pour marcher –
et elle doit marcher – en produisant une surabondance d’Esprit. Si elle ne
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fonctionne pas, ou plutôt si elle n’en garde que la Matière, c’est donc qu’elle
travaille à rebours » (Le phénomène humain, p. 285).
e) en tant que croyant, Teilhard croit en la création de Dieu. Mail il voit cette
création comme un processus dynamique, comme une évolution créatrice.
Nous sommes en train de passer de la conscience à la surconscience et cela
n’est possible que parce qu’à l’horizon, le temps est aspiré vers l’avant par un
Centre d’attraction qu’il appelle le point Omega, qui est le Christ ressuscité.
Le monde n’engendre pas Dieu (panthéisme), mais le Dieu du passé est
aussi le Dieu de l’avenir et le Christ total s’édifie à la mesure de l’émergence
de l’Esprit et de sa transformation du monde.
f) Teilhard bouleverse profondément la représentation du péché originel : un
ordre préternaturel perdu par la faute d’un individu primordial (Adam), un
péché d’origine ensuite transmis dans la nature pour tous les autres humains
(par la génération dira Augustin, affirmation qui dévalorisera le sexe à
perpétuité). « Au regard de la Science, donc, qui de loin ne saisit que des
ensembles, le « premier homme » est, et ne peut être qu’une foule; il sa
jeunesse est faite de milliers et de milliers d’années » (P. 205-206). Ce texte
était rédigé en 1940 et dans bien des milieux on en est encore à vouloir
enseigner le fixisme au nom de la Bible ou à exiger un « intelligent design> ».
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Dans la perspective teilhardienne il faut voir les récits de création comme des
prophéties, des promesses eschatologiques qui n’auront sens que quand
l’Esprit du Ressuscité – le point oméga – aura transfiguré la matière et fait
triompher l’amour.
g) invité à dire sa foi (Comment je crois), Teilhard a résumé sa pensée en quatre
phrases :
Je crois que l’Univers est une évolution,
Je crois que l’Évolution va vers l’Esprit,
Je crois que l’Esprit s’achève dans du personnel,
Je crois que le Personnel suprême est le Christ universel.
(1)
On voit ici comment la science, la philosophie et la foi s’interpénètrent. La
synthèse teilhardienne n’a pas fini de nous interroger.
(1)
Cité par Antier, Pierre Teilhard de Chardin ou la force de l’amour, p. 228
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Quelques données biographiques sur Teilhard de Chardin
1881
1er mai, naissance à Sarcenat (Auvergne), France
1897
Bac en philo
1898
Bac en mathématiques
1899
Entrée chez les Jésuites
1902
Licence en lettres
1905
Régence en Égypte
1907
Lecture de l’évolution créatrice de Bergson
1909
Début d’études théologiques en Grande-Bretagne
1911
Devient prêtre
1912
Doctorat en théologie, lecture de Darwin, veut devenir paléontologue
et entre au Muséum d’histoire naturelle de Paris.
1914-1918
Mobilisé par l’armée, devient brancardier sur le front
1919-1922
Études au Muséum d’histoire naturelle de Paris
1919
Docteur en botanique
1920
Certificat en zoologie
1922
Doctorat en sciences
« Les mammifères de l’éocène supérieur français »
« Note sur le péché originel »
1923
Chine
« La Messe sur le monde »
1925
Interdiction d’enseigner et de publier des livres non scientifiques
Exil en Chine
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1928
Le phénomène humain
1931
Premier voyage aux États-Unis
1935
Expédition en Chine
1946
Quitte la Chine
1947
Directeur de recherche au CRNS
Élu membre correspondant de l’Académie des sciences
1948
Rome refuse la publication de Le phénomène humain et sa
nomination au collège de France.
Sixième voyage aux États-Unis.
1951
À Paris, cède ses écrits non scientifiques à Jeanne Mortier
1955
10 avril : mort le jour de Pâques à 75 ans.
De 1955 à
1976
Les éditions du Seuil publie ses œuvres complètes sous l’égide
d’un comité général et d’un comité scientifiques : 13 volumes
(tiré de Jean-Jacques Antier, Pierre Teilhard de Chardin ou la forme de l’amour,
Paris, Presses de la Renaissance, 2012, 379 pages)
Voir également : Jacques Arnould, Teilhard de Chardin », Paris, Perrin, 2005,
389 pages.
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