gazette du festival # 2
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gazette du festival # 2
UNIVERCINÉ ALLEMAND #2 GAZETTE DU FESTIVAL FOCUS : DEUX MERES On aurait pu l’appeler « le sujet qui fâche » ou encore « la théorie versus la pratique ». Nous parlons bien sûr de la procréation médicalement assistée (PMA) qui est au cœur du film d’Anne Zohra Berrached. En effet ce film, primé par l’Office francoallemand pour la jeunesse (prix « Dialogues en perspective ») à Berlin, porte sur la situation des couples homosexuels qui souhaitent avoir un enfant biologique. Une nouvelle fois le festival propose un film abordant une question au cœur l’actualité. Alors que le mariage civil homosexuel a été instauré il y a peu en France, il n'est pas encore autorisé en Allemagne. (…) Il existe cependant depuis 2001 un "partenariat de vie enregistré" (eingetragene Lebenspartnerschaft) qui accorde des droits similaires au mariage sauf en matière fiscale et en ce qui concerne l'adoption. Cette union alternative au mariage est comparable au Pacs français mais accorde plus de droits aux couples ainsi unis qu'en France. Par exemple, la possibilité de partager l’autorité parentale avec le parent non biologique et, depuis 2005, le droit à l’adoption de l’enfant du conjoint. (…) En revanche, aucune disposition législative ne réglemente l’accès des couples de même sexe à la procréation médicalement assistée (PMA). Une directive de l’ordre fédéral des médecins de février 2006 réserve toutefois cette technique aux couples mariés, mais l'ordre des médecins de chaque région (Land) peut décider de la suivre ou non. Dans les villes-États de Hambourg et de Berlin par exemple, deux femmes liées par un partenariat peuvent ainsi, sous certaines conditions, avoir accès à la PMA (il a été montré qu'en 2011, aucun ordre fédéral des médecins n’a interdit la procréation assistée à un couple homosexuel). On peut donc dire que dans une certaine mesure la PMA est légale, selon les Lander. Le problème persiste néanmoins car même dans les Lander où elle est autorisée en théorie, la pratique – la réalité – est souvent bien différente. Et c’est ce que choisit de démontrer ce docu-fiction. Nous avons en point de départ un couple, Katja, 43 ans (Sabine Wolf) et Isa, 37 ans (Karina Plachetka) souhaitant avoir un enfant. Mais ici, vouloir ne signifie pas forcément pouvoir et le film relate de manière intensément réaliste, et parfois crue - sans aucune pudeur - les problèmes et l’intimité de ce couple voulant une PMA. De la recherche d’un médecin qui accepte de pratiquer jusqu’à l’insémination artificielle elle-même, en passant par un véritable casting des pères potentiels, le spectateur vit avec ces deux femmes leurs douleurs, leurs peurs, leurs désillusions, leur amour. (…) « Deux mères » pose la question de la famille. Si fonder une famille est une aventure hors-norme et le fait d’avoir des enfants (et de les élever, car ne dit-on pas qu’être parent est un travail à plein-temps ?), les difficultés pour avoir des enfants sont éprouvantes. Ces situations complexes et émotionnellement difficiles sont abordées ici dans une dimension d’autant plus forte que cela tend à devenir un sujet de société fondamental pour beaucoup. L’accès à la PMA, de la théorie à la pratique, pour les couples lesbiens n’est pas un sujet facile à traiter mais le défi est ici relevé haut la main. Manon Rousselle & Claire Ferotin RETROUVEZ L’INTEGRALITE DE L’ARTICLE SUR www.ccfa-nantes.org QUESTIONS A ARON LEHMANN Questions posées par le public vendredi 8 novembre 2013, à l'issue de la projection de son film Kohlhaas ou comment la fin justifie les moyens. Un film qu’il dit être sur le combat que l’on mène pour réaliser ses rêves et défendre sa vision des choses. D'où vous est venue l'idée de vous inspirer de la nouvelle ("Michael Kohlhaas") d'Heinrich von Kleist? A.L.: C'est une des décisions que j'ai prises assez tard. Kohlhaas est mon film de fin d'études ; Nous avons souffert en 2012 de manques d'argent et de temps. A cause de cela, nous n'avons pas pu réaliser ce que je voulais initialement. J'ai quand même travaillé le rapport entre fiction et réalité dans l'histoire. J'ai décidé de montrer comment les deux se mélangent de plus en plus dans la réalisation d'un film. Je voulais choisir une œuvre littéraire allemande ancienne et j'ai opté pour "Michael Kohlhaas" et dès la première page, le personnage de Kohlhaas ressemblait beaucoup à mon réalisateur. La musique est un personnage à part entière dans votre film. Quel travail autour du son a été réalisé en amont pour que celui-ci soit autant présent et participe activement au rythme du film? Comment a été fait le choix de la musique de Leonard Cohen (« Le chant des partisans »)? Boris Bojadzhiev, qui a fait la musique, est également intervenu dans l'écriture du script. On voulait une façon d'intégrer la musique dans le film, sans pour autant qu'elle ne prenne le pas sur les dialogues et l'histoire. Au cours du tournage, on a régulièrement passé de la musique pour que les acteurs s'en imprègnent. Le choix s'est effectué tardivement. On a travaillé dans une cave avec trois trombonistes et des instruments à vent. C'est Boris qui a joué tous les instruments à cordes, un par un. Pour moi, il y a vraiment eu un énorme travail du son, je trouve que la musique du film est un vrai bijou. C'est important pour moi que le générique de fin soit regardé jusqu'au bout, car c'est là que se trouve le plus intéressant du film [Rires]. Le producteur avait un CD de Leonard Cohen dans sa voiture. On écoutait toujours cette chanson. J'avais le sentiment qu'elle était faite pour ce film et on a payé pour qu'elle le soit. Les acteurs, sont-ils tous professionnels? Comment les avez-vous choisis? On a tourné le film dans ma ville natale. Il y a à la fois des acteurs professionnels et des amateurs. Les gens du village de "Speckbrodi", par exemple, sont tous des gens de ma région, à l'exception de l'acteur qui tient le rôle du maire. Ils ont tous plus ou moins d'expérience en tant qu'acteurs. Le mélange de professionnels et d'amateurs a bien fonctionné et j'en suis ravi. Avez-vous des anecdotes à nous raconter concernant le tournage du film? Oui, il y en a eu beaucoup. Je vous raconte ma préférée: un week-end, on a accompagné Thorsten (Thorsten Merten, tient le rôle de Herse, Ndlr) à la gare. A la minute où il est sorti de la voiture, trois voitures de police, gyrophares allumés, nous ont encerclés et Thorsten s'est retrouvé avec les armes des policiers braquées sur lui. Il ressemblait en fait à un criminel qui était recherché. Il leur a expliqué qu'il était comédien et était là pour jouer dans un film. Un des policiers lui a répondu: "C'est la pire excuse que je n'ai jamais entendue". Y a-t-il eu un gros travail pour convaincre les producteurs de financer le film? Ça a été très difficile en effet. Je n'ai par contre rencontré aucun problème dans le choix des acteurs, j'ai pu choisir l'acteur que je souhaitais pour chaque rôle. Le casting était terminé alors que je n'avais pas encore obtenu le moindre argent. La chance que l'on a eue est qu'on n'avait pas besoin d'énormément d'argent et qu'on a pu réduire certains coûts. Ce film est vraiment une production de village. Mes parents se sont en effet occupés du catering et les femmes du village, des gâteaux. Il y a eu beaucoup de public pour le film dans la région. Propos recueillis par Claire Ferotin RETROUVEZ L’INTEGRALITE DE L’ARTICLE SUR www.ccfa-nantes.org INTERVIEW DU PRODUCTEUR DE « CHASSE FERMEE » PHILIPP HOMBERG Question : D'où est venue l'idée du film? P. H : C'est la réalisatrice qui a eu l'idée du film et c'est elle-même qui a écrit le scénario. Il s'agit d'une histoire qu'on raconte mais qui n'a jamais donné lieu à un livre. L'idée qu'un allemand puisse demander à un juif de lui donner un fils l’a tout de suite conquise. Le tournage s'est-il déroulé en Allemagne? Le tournage s'est déroulé en Forêt-Noire qui se situe près de la frontière avec la Suisse (pays neutre pendant la guerre) où le jeune juif, Albert, veut se rendre. De quelle manière l'acteur qui joue le rôle du juif a-t-il été recruté ? Par un hasard, l'acteur (Christian Friedel) est connu pour avoir joué dans « Le ruban blanc » d'Haneke dans lequel il a interprété le rôle d'un professeur plutôt rondouillard. Il a été invité à participer au casting de « Chasse fermée », et il est apparu comme le candidat idéal. Pour incarner le personnage d’Albert, il a du perdre plus de dix kilos en l'espace de quelques mois. A titre d’anecdote, cela a été très frustrant pour lui parce qu'en Forêt-Noire on boit bien et on mange bien et lui n'avait pas le droit d'en profiter comme le reste de l'équipe ! Le tournage s'est-il bien passé? Le tournage s'est très bien passé ! L'équipe s'est bien entendue et le lieu de tournage était idéal. La ferme dans laquelle a été tourné le film, existait déjà et avait été reconstituée dans l'état pour correspondre aux critères de l'époque. D'après mon expérience, lorsqu'un tournage se passe si bien cela donne un mauvais film, « Chasse fermée » m'a prouvé le contraire ! Au début du scénario, le fils d'Emma se rend en Israël pour rencontrer Albert, son père biologique. La réalisatrice a-t-elle voulu intégrer cette scène pour encadrer l'histoire? L'histoire principale se passe en Forêt-Noire en 1942, mais c'est vrai que pour l’Allemagne traiter un sujet pareil est toujours délicat. Avec cette scène, elle a voulu introduire une forme de réconciliation, un lien entre les générations. Pourquoi Franziska Schlotterer, a-t-elle voulu privilégier les relations entre les êtres humains plutôt que le problème de la guerre? Tout simplement pour donner un sens à cette histoire. Il est vrai, qu'on peut parler de la guerre de manière abstraite mais là c'est une façon de l'incarner, de lui donner un corps. Cependant, l'arrière plan de la guerre reste essentiel pour comprendre la relation à trois qui se crée entre eux. Comment le film a-t-il été reçu en Allemagne? De manière très différente. Il a été montré dans les festivals, il a gagné des prix et a été nominé pour le prix du film allemand qui correspond au César français. Par contre dans les salles il n'a pas eu un grand succès, je pense que cela tient au sujet car lorsqu'on parle de la seconde guerre mondiale ça n’attire pas forcément les jeunes. Un autre problème est celui de la concurrence, un film comme celui-ci, s'il ne fait pas d'entrée importante dès sa sortie, ne reste pas longtemps en salle et n'a pas le temps de se faire connaître. En tant que producteur, pourquoi vous êtes vous lancé dans l'aventure de « Chasse fermée » ? L'histoire m'a tout de suite touché. La relation entre les trois personnages m'a paru très authentique, elle sonnait vraie et donnait lieu à un trio à la fois complexe et bouleversant ! Agnès Duthu & Manon Rousselle