kohlhaas - Le Grand T

Transcription

kohlhaas - Le Grand T
DIRECTION ARTISTIQUE KURT POTHEN | AGORA THEATER
02 51 88 25 25 / leGrandT.fr
1-1075853 1-1075850 2-1075851 3-1075852 - © WILLI FILZ
D’APRÈS HEINRICH VON KLEIST MISE EN SCÈNE CLAUS OVERKAMP
2015/16
KOHLHAAS
Licences spectacles
EN TOURNÉE EN LOIRE-ATLANTIQUE
KOHLHASS
En Loire-Atlantique
VALLET
MARSME
0210:00 et 19:30 (tout public)
JE
0314:00
PORNICHET
MARSJE
1010:00 et 14:00
VE
1114:00 et 20:30 (tout public)
NORT-SUR-ERDRE
MARSJE
1710:00 et 14:00
VE
1814:00 et 20:30 (tout public)
MACHECOUL
MARSJE
2414:00
VE2514:00 et 20:30 (tout public)
Informations pratiques
6€ / À PARTIR DE 13 ANS / 1H20
©CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE
SOMMAIRE
Présentation
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La pièce 4
Note d’intention 5
L’Agora theater 6
Extraits de la pièce 7
En images
8
À propos de l’œuvre et de son auteur 9
La presse en parle 11
Pour aller plus loin
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PRÉSENTATION
Adaptation libre d’après Heinrich Von Kleist
Poèmes Erich Mühsam
Mise en scène Claus Overkamp
Direction artistique Kurt Pothen
Artistes Roger Hilgers, Eno Krojanker, Annika Serong, Matthias Weiland, Marie-Joëlle Wolf
Regie Céline Leuchter ou Judith Thelen
Musique Gerd Oly
Costumes Emilie Cottam, Viola Streicher
Scénographie, accessoires Celine Leuchter
Constructions Gerd Vogel, Atelier Held
Création lumière Michel Delvigne
Affiche Katja Wiefel
Photos Willi Filz
Assistante à la production Judith Thelen
Adaptation française Gil, Emile Lansman
Création Agora Theater, Le Theatre de la communaute germanophone de la Belgique
Coproduction Theatre Marabu (Bonn-Allemagne)
Soutien Via 2018 Maastricht – Kandidaat Culturele Hoofdstad Van Europa 2018, Kultursekretariat Nrw, Ville de Bonn
et du Land Rhénanie-du-Nord-Westphalie
Création décembre 2011 à St-Vith (en allemand) / août 2012 au Festival de Huy (en français)
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LA PIÈCE
Une famille d’artistes voyage avec son théâtre ambulant
à travers le pays. Ce sont des saltimbanques, musiciens
et chanteurs ambulants qui s’installent sur les places
publiques pour divertir les gens.
Ils racontent des histoires à faire frémir, s’adressant
directement au public, sur un ton simple, direct et effronté.
Avec plein d’humour, de dérision et parfois de grotesque.
PRIX REÇUS
Prix de la Culture aux Rencontres Théâtre Jeune Public
2012 à Huy.
Coup de cœur de la presse aux Rencontres Théâtre Jeune
Public à Huy.
Prix principaux au Festival Westwind 2012 – 28e
Rencontres de théâtre jeune public de Rhénanie-du-Nord
Marburger Kinder und Jugendtheatrepreis 2012.
Aujourd’hui ils jouent Kohlhaas, l’histoire d’un marchand
de chevaux qui possédait avec sa femme une ferme à
Brandebourg et qui élevait ses cinq enfants dans l’amour du
travail et de la loyauté et dans la crainte de Dieu. Jusqu’au
jour où un petit incident a fait basculer sa vie et celle de
beaucoup d’autres et où son sens de la justice a fait de lui
un hors-la-loi et un meurtrier. Où cet homme, respectueux
des lois et de l’ordre établi finira par déclencher une révolte
sanguinaire et incontrôlée.
À partir d’un drame d’Heinrich von Kleist, que l’Agora Théâtre
déconstruit goulûment avec un humour et un décalage
constant, Kohlhaas exacerbe l’insupportable domination
arbitraire des puissants et l’impuissante crédulité des plus
humbles.
Sur scène, les visages maquillés de blanc, empreints
de gravité, les comédiens usent de tous les ressorts
dramatiques : mise en scène explosive, jeu rythmé,
maquillages clownesques, marionnettes, théâtre d’ombres,
guitares électriques et percussions, vue sur les coulisses…
Pas une seconde n’est prévisible !
Un drame burlesque et musical des plus réussi où
absolutisme et tyrannie sont dénoncés par un théâtre à la
Brecht alliant plaisir et intelligence.
EN VIDÉO
http://youtu.be/vXBBLIHZleU (source : Le Tarmac)
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NOTE D’INTENTION
cette contradiction « qui se rebelle » à l’intérieur de chacun
d’entre nous. La méthode de travail d’Agora Theater, basée
sur l’autobiographie, a mis un focus sur certains moments
du roman, qui sont en relation avec des expériences de nos
propres vies. Les poèmes d’Erich Mühsam nous ont aidés à
renforcer le monde intérieur des sentiments et des pensées
de Kohlhaas. Le choix de l’univers du théâtre de foire
provient d’une part des improvisations scéniques proches
de cet univers lors des répétitions. D’autre part, cet univers
est pour nous la réponse à la question : quelle perspective
de narration permettrait le mieux de raconter cette folie de
violence, qui provoque d’autres violences, d’une manière à la
fois cruelle et pleine d’humour ? »
Claus Overkamp, metteur en scène
© MATTHIAS
« Au départ d’une nouvelle production, nous nous posons
la question : « Quelles sont nos préoccupations ? Que se
passe-t-il dans le monde actuellement ? Cette lutte de
Kohlhaas pour la justice a retenu notre attention. En lisant
le roman de Kleist, nous avons été frappés par l’actualité
du propos et les questions qu’il soulève. Comment réagir
face aux injustices d’aujourd’hui ? Quels moyens sont
autorisés ? Dans l’œuvre de Kleist, ce n’est pas le Michael
Kohlhaas historique qui nous a intéressés, mais le Michael
Kohlhaas en nous-mêmes que nous assimilons au sens de
la justice profondément ancré dans chaque être humain.
Dans notre mise en scène, le personnage de Kohlhaas
prend forme dans l’esprit des spectateurs de deux façons :
d’une part comme utopie - la justice et la loi doivent être
équivalentes pour tous les êtres humains - et d’autre part
comme expérience - notre monde est loin de la réalisation
de cette utopie. En quelque sorte, Michael Kohlhaas est
5
L’AGORA THEATER
Agora : Place publique et marché dans les anciennes villes
grecques ; à Athènes, l’agora était le centre de la vie publique
et politique (Dictionnaire Quillet).
Agora est un théâtre. Ses racines et son port d’attache se
trouvent à St-Vith, une ville de l’Est de la Belgique dans
une région frontalière entre l’Allemagne, les Pays-Bas et
le Luxembourg. Au cours des siècles, les habitants de ce
territoire ont dû changer plusieurs fois leurs identités, politique
et étatique. Les habitants y parlent l’allemand, troisième langue
officielle en Belgique mais minoritaire à côté du français (parlé
par les Wallons) et du néerlandais (parlé par les Flamands). La
compagnie vit et travaille sur cette terre chargée d’Histoire, qui
a survécu à de nombreux conflits historiques.
C’est en 1980 que Marcel Crémer a fondé à St Vith, Agora,
le Théâtre de la Communauté germanophone de la Belgique.
Germaniste, néerlandiste et pédagogue de théâtre, auteur
de pièces de théâtre, acteur jusqu’en 1986 et metteur en
scène, il a présenté depuis cette date plus de 32 créations,
d’après ses propres écrits ou inspirées d’œuvres littéraires. Il
a dirigé plus de 150 workshops en Belgique, en Allemagne,
au Luxembourg, en Hongrie, en Autriche, en France et au
Brésil. De manière constante et avec un succès continu,
Agora oriente ses créations vers un travail théâtral engagé,
à travers ses nombreuses productions que la compagnie
présente à travers toute l’Europe et participe aussi à de
nombreux festivals de renommée internationale : en Belgique,
en Allemagne, en France, en Autriche, en Suisse, aux PaysBas, au Luxembourg, en Hongrie, en Pologne, en République
Tchèque, en Slovaquie, en Lituanie, au Brésil, au Pays de
Galles, en Bosnie, en Croatie, en Espagne, en Irlande, en
Angleterre, en Italie… Tous les ans en octobre, la compagnie
Agora organise le Festival de Théâtre de St Vith dont Marcel
Cremer a été le directeur artistique jusqu’à son décès, en
décembre 2009.
LA DÉMARCHE ARTISTIQUE D’AGORA THEATER
« Avant tout, nous recherchons le dialogue avec le
spectateur. Les pièces du Théâtre Agora veulent donner
au spectateur la force de modeler activement le monde et
de le transformer. Les mises en scène signées Agora font
la synthèse de différents arts traités sur un pied d’égalité,
ou considérés comme complémentaires. L’expérience
théâtrale s’adresse à la fois à l’émotion, au sentiment et
à la raison. Elle est perçue par l’ensemble des sens. L’art
est la conscience de la société. L’art est le reflet de la
réalité, tout en modifiant le point de vue et en agissant sur
cette réalité. Nous nous engageons pour que le théâtre
trouve sa place dans le quotidien des gens et pour qu’il soit
accessible à toutes les couches sociales. L’art est liberté.
Libre de revendications, d’attentes et de contraintes de
toute nature. Le théâtre est liberté. Cette liberté, nous la
défendons. Lorsque nous créons, nous nous permettons
toutes les libertés et bravons tous les interdits. Nous
travaillons selon la méthode du théâtre autobiographique
développée par Marcel Cremer. Cette méthode place la
biographie au commencement de chaque genèse d’une
pièce. Il s’agit d’histoires qui touchent à la question centrale
animant la pièce en gestation. Celles-ci en constituent les
fondements. Nous prenons notre temps. Nous travaillons
sciemment dans la lenteur et la concentration, afin de
permettre un débat intense et chargé de plaisir autour
d’un sujet. Nous vérifions à chaque fois si le spectacle
et notre théâtre est en relation avec le monde que nous
connaissons. »
Le Théâtre Agora
« La plus grande richesse d’un acteur, voire de tout être humain, c’est sa biographie, son trésor d’expérience, son
histoire. [...] Chaque acteur, chaque être humain possède en lui des milliers d’histoires qui peuvent donner lieu à
une pièce de théâtre. Toutes les histoires que connaît l’humanité se retrouvent dans un seul individu. De Hamlet à
Faust, en passant par Méphisto, Iphigénie, Mère Courage, la Pucelle d‘Orléans, tous les personnages de la littérature
mondiale se retrouvent en chacun de nous. Je dois m’efforcer de découvrir ces personnages en moi. La découverte
du personnage est la première, la communication de cette découverte au spectateur est la deuxième partie du processus. »
Marcel Cremer, Le Spectateur invisible
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EXTRAITS DE LA PIÈCE
« Je vendrai la ferme et les terres. Kohlhaasenbrück n’est
pas un monde… il peut y avoir une raison… une raison
supérieure… en vue de laquelle une vie bourgeoise… une
vie de père de famille… d’honnête homme… est secondaire et indigne. Dois-je, d’aventure, abandonner mon affaire ? Dois-je plutôt me rendre au château de Tronkenburg
et supplier que l’on me rende les chevaux, sauter en selle
et revenir ici ? Lisbeth, est-ce cela que je dois faire ? Non,
je ne le peux ! Je ne le peux, car je ne désire pas vivre
dans un pays dans lequel on ne veut pas protéger mon bon
droit. Plutôt être un chien, si je dois être traité à coups de
pieds, et pas un homme ! Si tu estimes qu’il faut me rendre
justice, alors accorde-moi aussi la liberté d’agir nécessaire
afin qu’on me la rende. »
Poème d’Erich Mühsam, La Voix des exécutés
De ma tombe, salut à vous, mes meurtriers !
Je ne vous en veux pas de votre forfait.
Tout un chacun cherche à privilégier le droit
qu’il estime être juste.
De vos aïeux vous croyez l’enseignement
Je suis le maître et toi le valet !
Être maître pour vous est un honneur
Et l’honneur un privilège.
Mais moi j’étais du côté des humbles.
Je parlais au peuple, l’exhortant
à répliquer au petit-fils des anciens :
Je ne suis pas valet, tu n’es pas maître !
Ainsi j’ai froissé votre fierté
et enlevé au peuple sa crédulité d’enfant,
que vous seriez d’un bois plus rare,
que le monde vous serait soumis.
Je vous offensai. Vous avez pris vengeance
et tous nous sommes persuadés
de servir la cause juste devant laquelle
s’incline l’homme avec humilité.
Que mon sang sacrifié décide
si votre droit, si le mien vainc
et si du peuple les souffrances ou les vôtres
pèseront plus devant l’ultime Conseil des Mondes.
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EN IMAGES
DR
8
À PROPOS DE L’ŒUVRE ET DE SON AUTEUR
LE MARCHAND DE CHEVAUX, MICHAEL KOHLHAAS, ROMAN DE HEINRICH VON KLEIST, 1805 (FLAMMARION)
Ignoré de son vivant, Kleist conquit, après sa mort tragique
à 34 ans, une audience considérable. Ses œuvres, denses,
succinctes, se composent de quelques tragédies et nouvelles. Aux circonvolutions de Goethe, il préféra une prose
rapide, sans détails superflus, digne de l’homme d’action et
de l’officier prussien qu’il avait été. Dans Michael Kohlhaas,
court roman historique situé au XVIe siècle, il retrace la lutte
inouïe d’un marchand de chevaux contre les institutions de
ce temps.
Kohlhaas, héros à la limite de la folie, combat pour la justice et menace, en quelques semaines, l’équilibre politique et
social de l’électorat de Saxe tout entier. Sujet brandebourgeois - la future Prusse – Michel Kohlhaas se rend en Saxe
pour vendre quelques uns de ses plus beaux chevaux. Arrêté
à quelques verstes de la frontière entre les deux états par
les barrières d’une forteresse, on exige de lui le paiement
de droits de douane. Kohlhaas, qui a déjà franchi maintes
fois la frontière, n’a jamais eu à payer quoi que ce soit pour
cela. Le ton monte rapidement avec les serviteurs du Seigneur Von Tronka, propriétaire de forteresse : le seigneur
lui-même finit par intervenir et confirme au marchand l’existence de ces nouvelles lois. Dans le doute, l’édiction d’une
nouvelle ordonnance n’étant pas à exclure, Kohlhaas laisse
en otage deux de ses plus beaux chevaux à l’intendant du
château. A Dresde, les services du prince lui confirment que
Von Tronka n’avait aucun droit pour lui réclamer une taxe et
que les chevaux, laissés en gage, lui reviennent sans contrepartie. Revenu au château, armé de cette réponse, il exige
la restitution de ses animaux. Or, ceux-ci ont été maltraités
par les serviteurs de Von Tronka : en quelques semaines, les
superbes étalons, usés par les travaux de ferme, mal nourris,
sont devenus deux haridelles décharnées. Kohlhaas exige
la remise sur pied des animaux, qu’on lui refuse. Le marchand entame alors des procédures auprès de la cour de
Dresde. Les Von Tronka, très influents, opposent au souci
de justice de Kohlhaas la toute la puissance de leurs relations. Débouté plusieurs fois, de manière totalement inique,
par les magistrats puis les ministres du prince, tous affiliés aux Tronka, présents aux plus hauts sommets de l’état
saxon, sa femme tuée par les gardes du roi, Kohlhaas se
métamorphose subitement. De simple bourgeois légaliste,
convaincu de son bon droit, il devient un justicier implacable.
Il vend tous ses biens pour recruter quelques mercenaires
et attaque de nuit la forteresse des Tronka. Le seigneur
lui échappe mais le château est rasé, les serviteurs exter-
minés. Pourchassant sans relâche Von Tronka, Kohlhaas
remporte plusieurs succès inattendus contre les forces de
l’État. Métamorphosé en archange vengeur, il joue sur les
tensions sociales entre la noblesse et le peuple, arme des
paysans et se proclame justicier de Dieu. L’État s’en vient
rapidement à trembler sur ses bases. Pour le neutraliser,
le prince lui envoie Martin Luther. Le prédicateur apaise
Kohlhaas et lui transmet une promesse du prince : l’amnistie contre l’assurance d’un procès équitable. Kohlhaas, sur
la foi de cette garantie, rend les armes – peut-être un peu
vite… Car les Tronka finissent par obtenir son arrestation.
Les arguties juridiques échangées entre le prince de Saxe,
celui du Brandebourg et l’empereur à son sujet débouchent
finalement sur un procès rapide, et sur sa condamnation.
L’idée de Justice dont se faisait fort Kohlhaas paraît alors
vaincue, non par la loi, mais par la puissance brute et effective des Tronka. Sa vengeance démesurée n’a-t-elle servi à
rien ? Mais les Tronka ont gagné en apparence seulement :
certes, Kohlhaas est condamné mais en réalité, cette victoire
signe la fin de leur règne. Le prince permet la condamnation de Kohlhaas mais il démet les Tronka de leurs hautes
fonctions. Ceux-ci se sont en effet décrédibilisés : ils ont
été vaincus militairement à plusieurs reprises par un simple
bourgeois et quelques paysans ; ils ont mis en danger l’État
pour deux chevaux, par une obstination coupable à défendre
une cause stupide. Et dans l’ordre féodal, cette défaite honteuse ne peut se racheter par une victoire juridique. Ils ont
perdu leur statut. Leur fonction de défenseurs du prince
n’est plus tenable. Récit tragique, Michel Kohlhaas s’achève
sur un superbe retournement de situation, en une astuce
romanesque un peu grossière : Kohlhaas a reçu d’une bohémienne un papier sur lequel est inscrit l’avenir du princeélecteur de Saxe. Extrêmement superstitieux, celui-ci tente
par tous les moyens de récupérer ce document. Le jour de
son exécution, Kohlhaas se voit proposer un marché : il sera
gracié s’il livre le précieux parchemin. Victime de l’arbitraire
d’une société clanique, dans laquelle l’homme seul, violent
ou pacifique, n’a aucune chance de voir ses droits reconnus
par le pouvoir, Kohlhaas peut par un ultime retournement du
destin sauver sa tête. En défaisant les Tronka, même s’il le
paie de sa vie, il détruit la position de cette famille au sein de
l’État saxon. Voilà déjà une première vengeance. Le prince,
qui a tout fait pour le condamner est en position de faiblesse : son avenir est dans les mains d’un homme qui, pour
venger le vol de deux chevaux, a mis un pays entier à feu et
à sang. Au jeu de la puissance brute, l’homme enchaîné et
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condamné paraît bien faible face au pouvoir institutionnel
princier. Mais en réalité, il garde, dans cette situation pénible
toute sa liberté : il peut se sauver, mais il peut également
nuire gravement au prince. Kleist insère dans l’acte final de
la tragédie un ingrédient inattendu. Dans les deux cas, Kohlhaas serait vengé ! S’il livre le secret, il sortira libre de cette
affaire et les Tronka auront perdu tout crédit politique ; s’il ne
le livre pas, il brisera les espoirs superstitieux du prince en lui
démontrant qu’un simple individu peut tout face au pouvoir,
à condition de ne pas tenir à sa vie. Kohlhaas préfère avaler le papier, après l’avoir lu. Exécuté, il sort paradoxalement
vainqueur, par sa mort, de son combat justicier. Kleist affirme
la toute puissance de la liberté humaine face à la conjonction de l’injustice, du pouvoir arbitraire et du destin. Kohlhaas
aurait pu céder, renoncer, opter pour l’apaisement. Il se fait
archange vengeur, détruit la position de force des Tronka
et brise le superstitieux prince-électeur en le frustrant de
la maîtrise de sa destinée. L’ordre paraît maintenu, mais au
fond, il est brisé par l’idée de justice portée par Kohlhaas. Le
marchand est exécuté mais ses adversaires ont péri. L’ordre
inique finit puni et la cause du marchand a triomphé – même
s’il l’a payé de sa vie !
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LA PRESSE EN PARLE
« C’est le mélange explosif - un sérieux de pape allié à une
drôlerie inouïe - avec lequel les acteurs procèdent du début
à la fin qui confère à la mise en scène une aura qui fascine
par l’aberration de la menace qui plane. On est amené à se
poser la question de qui est dans son bon droit ou même
de qui, au sens propre du terme, exécute la justice. La nouvelle de Kleist se voit ici transformée en un mélange déferlant et retentissant d’école gardienne et d’asile qui rappelle
parfois de façon inquiétante le monde réel. »
SCHNÜSS, das Bonner Stadtmagazin | N° du 02.2012
« Un feu d’artifice d’idées pleines d’imagination, bien trouvées et parfaitement transposées, qui ne laisse ni aux
acteurs ni aux spectateurs ne serait-ce même qu’une seconde de répit jusqu’à la fin. [...] Une pièce sublime, où le
sous-titre « Un spectacle burlesque sur fond de pouvoir,
de despotisme et de résistance » est plus que justifié. [...] »
Helmuth Hilgers, Grenz-Echo | 10.12.2011
« La coproduction entre le théâtre Marabu de Bonn et le
théâtre Agora de St Vith, unis par un lien étroit depuis de
longues années, évolue de l’apparemment simple théâtre
de foire vers une pantalonnade aberrante sur le thème du
despotisme et de la résistance. Le décor d’envergure de
Céline Leuchter et la musique insolite de Gerd Oly sont
un plaisir en soi dans ce spectacle très réussi « A l’affiche :
Kohlhaas ». Le metteur en scène Claus Overkamp prolonge ainsi d’une manière artistique personnelle le style du
fondateur de la troupe Agora Marcel Cremer, décédé en
2009. »
Kultur - das Magazin der Theatergemeinde Bonn | N° du
02.2012
« Fable burlesque et musicale sur le pouvoir, ce spectacle
sera un rendez-vous incontournable du festival d’Avignon
cet été tant par sa précision que par la pluralité de sa forme.
Ces artistes épatants abordent avec finesse le drame particulièrement violent de Michael Kohlhaas récemment
adapté au cinéma d’ailleurs. Le public ne s’y trompe pas et
les jeunes à partir de 15 ans sont captivés par la tragédie
grotesque qui se joue sous leurs yeux… Un condensé surprenant d’idées toutes plus folles et séduisantes les unes
que les autres font de ce spectacle une réussite incontestable sur la forme. Bien que l’on passe à côté de certaines
émotions plus profondes basées sur la force du drame de
Kohlhaas on ne peut qu’être séduits par l’ensemble, totalement époustouflés par le travail incroyablement riche de
ces artistes hors-normes. »
Théâtres.com
« La magie du théâtre de foire opère à merveille, c’est souvent drôle, burlesque, c’est déjanté et surdimensionné et
on y croit. Une compagnie à suivre sans modération ! »
Anne Delaleu, Théâtre Passion | 8.05.2014
« Ils sont en communication permanente avec le public [...]
et l’on assiste à une chevauchée onirique incroyable où
les acteurs prenant à bras le corps un drame historique lui
offrent toute la démesure de leur imagination faite de bric
et de broc qui a toute la fraicheur, l’innocence de l’enfance.
[...] De l’audace, toujours de l’audace avec le public, c’est
la gageure de l’Agora Theater qui réussit à faire sourire à
la fois les enfants et les adultes. Comment ne pas tirer le
chapeau à cette compagnie, pour sa version complètement
décoiffante du drame de Kohlhaas, fraiche et vigorifiante,
époustouflante.  » !
Evelyne Trân, lemonde.fr | 8.05.2014
« Et voilà qu’une troupe de théâtre belge, l’Agora Theater
s’empare de cette histoire fabuleuse adaptée d’une nouvelle historique de Kleist, une figure littéraire allemande,
incontournable. Toute histoire doit pouvoir être racontée
pensent les comédiens. En l’occurrence, ils ne disposent
que de leurs hardes d’acteurs ambulants, de tours de
cirque, d’instruments de musique, hétéroclites, d’un théâtre
de marionnettes. Mais ils sont en communication permanente avec le public ; comme dans une foire ou un théâtre
de rue, ils recrachent l’histoire de Kohlhaas avec la même
énergie que des cracheurs de feu. Et l’on assiste à une
chevauchée onirique incroyable où les acteurs prenant à
bras le corps un drame historique lui offrent toute la démesure de leur imagination faite de bric et de broc qui a toute
la fraicheur, l’innocence de l’enfance. Vraiment ahurissante,
cette description de la guerre où l’on voit un tennisman
alias Kohlhaas, frapper du revers une multitude de marionnettes. »
lemonde.fr
11
POUR ALLER PLUS LOIN
PISTES DE TRAVAIL PÉDAGOGIQUE
Sources : dossier pédagogique A l’affiche : KOHLHAAS - Théâtre AGORA
Avant la représentation
Après la représentation
C’est passionnant de se préparer à la rencontre. Cette préparation constitue une introduction au nouveau et à l’inconnu,
permet d’éveiller la curiosité, d’anticiper, de stimuler la fantaisie, d’ouvrir de nouvelles perspectives et de s’ouvrir à de
nouvelles perceptions. Une préparation intensive du contenu
n’a cependant pas lieu d’être. En effet, l’histoire de Michael
Kohlhaas ne nécessite pas cette étape pour être bien comprise. Une question encore plus intéressante et importante
est « Qu’est-ce que le théâtre ? ». Il existe de nombreux
moyens de se préparer à la sortie au théâtre. Interrogez les
élèves sur leurs intérêts…
La représentation d’une pièce de théâtre est une expérience
aussi bien individuelle que collective. Le théâtre interpelle
chacun différemment. Chaque spectateur a son propre point
de vue et vit son histoire selon ses expériences et sentiments personnels. Cependant, cette expérience collective
invite aussi à partager et à confier ses émotions, images,
questions et impressions. Le défi consiste à échanger et à
débattre des perceptions différentes et en partie contradictoires de chacun. Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise
interprétation. Il ne s’agit ni d’interroger les élèves sur des
connaissances ni de leur donner des explications. Le professeur ne doit pas être « celui qui sait » mais plutôt un
spectateur qui fait part de son expérience. Une fois de
retour en classe, vous pouvez vous remémorer cette sortie
au théâtre :
Idées de questions sur le contenu :
•
Décris des injustices contre les hommes, au niveau
mondial et dans ton quotidien. Par quels moyens se
défendent-ils ? Quels sont les résultats ?
•
Te défends-tu contre l’injustice ? Par quels moyens ?
•
La fin justifie-t-elle les moyens ?
•
Heinrich von Kleist et Erich Mühsam : Les élèves
trouvent-ils des similitudes dans les biographies de ces
deux auteurs ? Pourquoi leurs poèmes ont-ils été choisis pour être intégrés dans la pièce ?
•
Quels moyens sont utilisés dans la mise en scène ?
•
Images en tête : vous pouvez évoquer les images de la
représentation en mettant en commun, sans jugement
aucun, des mots, bruits, couleurs, mouvements, etc. En
cercle, les yeux fermés, citez spontanément, sans réfléchir quelques moments de la représentation : Qu’as-tu
vu ? Qu’as-tu entendu ?
•
Émotions : demandez à vos élèves de décrire leurs sentiments. « J’étais triste, passionné, je m’ennuyais, j’étais
ravi, joyeux, confus… parce que… »
•
Moments préférés de la représentation : demandez-leur
de décrire des moments particulièrement captivants,
intenses, drôles. Les élèves peuvent les raconter, les rejouer, les dessiner, les resituer dans le contexte du récit.
Discutez avec les élèves des caractéristiques du « théâtre
populaire » qui sont à découvrir dans les textes, sur les photos annexes et sur l’affiche. Quelles autres caractéristiques
connaissent les élèves ? Trouvent-ils d’autres caractéristiques dans des sources différentes ?
12
Questions, remise en cause, pensée et réflexion approfondie
Pour cet échange, privilégiez les thèmes de réflexion, où
toutes les réponses sont autorisées. Les différents points
de vue permettent de donner matière à discussion et sont
utiles dans la formation d’opinion : se forger sa propre opinion,
l’exprimer, écouter les autres, tolérer un autre avis, remettre en
question sa propre image et la réalité elle-même. L’histoire de
Michael Kohlhaas soulève des questions intéressantes :
•
Comment se manifestent le pouvoir et la partialité ?
•
Comment Kohlhaas se défend-il ?
•
Jusqu’où va-t-il dans sa lutte ?
•
Par quels moyens Kohlhaas se bat-il et qu’obtient
il finalement ?
Remettre en question sa propre opinion :
•
À quels moments de l’histoire aurais-tu eu envie de crier
«  STOP !  » ?
•
À quels moments de la représentation aurais-tu aimé
jouer toi aussi ?
•
Qu’aurais-tu fait à certains moments ?
•
Quand aurais-tu voulu que l’histoire se déroule autrement ?
•
Avant la représentation, que t’évoquait le thème « injustice et se défendre » ? Comment aurais-tu agi ? Qu’en
penses-tu maintenant que la représentation est terminée ? Ta façon de penser et ta vision du monde ont-elles
changé ?
•
Que t’ont évoqué les poèmes d’Erich Mühsam ?
Indications bibliographiques
•
Le Marchand de chevaux, Michael Kohlhaas, roman de
Heinrich Von Kleist, 1805 (Flammarion) Œuvre qui a inspirée la pièce.
•
Erich Mühsam : Brennende Erde / Fanal / Krater / Sammlung… Poète dont une part de l’œuvre est reprise dans
la pièce.
•
Les Arts de la marionnette, PUPPETRY ARTS. Destiné
aux enseignants et ceux qui souhaitent une information
précise et synthétique sur la place des arts de la marionnette dans le paysage de la création, ce livre à la très
belle iconographie rend également hommage au Festival
mondial des théâtres de marionnettes de Charleville-Mézières.
•
Arts visuels & marionnettes et théâtres d’objets. Découverte du monde des marionnettes des origines à nos
jours. Exploration des notions d’espaces de jeu, de décor,
de mise en lumière et de paysage sonore, de théâtre
d’ombres, théâtre de papier et de cinéma. 30 expériences
autour de la fabrication, de la manipulation et de la mise
en espace.
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Les Arts de la marionnette. Éditions : CRDP de Champagne-Ardenne – Reims (2011). Au fil des mots, découvrez les personnages devenus célèbres, les influences
géographiques, les marionnettistes qui ont laissé leur
empreinte, les pratiques ancestrales et les modernes.
Richement illustré, très documenté et pétri d’humour, ce
livre changera votre regard sur les arts de la marionnette.
Laissez-vous surprendre : chaque mot, même le plus
simple, dévoile un univers…
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Le Burlesque. Édition : CNDP - Chasseneuil-du-Poitou et
Cahiers du Cinéma – Paris, 2007. Collection : Les petits
cahiers. 95 pages. Dès que l’on pense au burlesque, vient
immédiatement à l’esprit une succession de gags visuels,
d’acrobaties physiques, de poursuites frénétiques, d’évènements incongrus qui déclenchent inévitablement le rire
du spectateur. Cet ouvrage offre une mise en perspective
historique du burlesque comme genre. Issu de la comédie mais possédant ses propres caractéristiques bien
spécifiques, le burlesque est un comique de ravages et
de tartes à la crème qui explose les conventions sociales,
les barrières de la bienséance puritaine et engendre
les désordres du monde. Il naît en même temps que le
cinéma et c’est à Hollywood, dans les années dix, qu’il
définit son esthétique. Le burlesque a ses maîtres et ses
stars que l’on retrouve ici à l’apogée de leur art : Chaplin,
Keaton, Harold Llyod, Harry Langdon, Laurel et Hardy,
les Marx Brothers. Sans oublier plus récemment Jacques
Tati, Jerry Lewis, Peter Sellers… Et pour l’auteur sa définition va bien au-delà de la simple opération du rire. C’est
même une affaire très sérieuse, une vision de l’homme
face à ses faiblesses et à son environnement, magnifiquement relayée par le cinéma des premiers temps. C’est
enfin un genre qui s’illustre aussi bien dans la littérature
que dans l’art contemporain et aujourd’hui encore il inspire de grands moments de cinéma aux plus grands réalisateurs, tels David Lynch ou Takeshi Kitano.
Indication filmographique
De ce roman touffu d’Heinrich Von Kleist, classique de la littérature allemande, parcouru d’une tension extrême et authentiquement révolutionnaire, le cinéaste français Armaud des
Pallières a tiré le film Michael Kohlhaas. Son héros légaliste et
insoumis est interprété par le comédien danois Mads Mikkelsen, ex-ennemi de James Bond dans le film Casino Royal. Ce
film a été présenté au Festival de Cannes en 2013.
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