note de clarification à l`attention des acteurs du réemploi

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note de clarification à l`attention des acteurs du réemploi
Statut de déchet et réemploi
Note de clarification à l’attention des acteurs du réemploi
L’importance du réemploi dans la hiérarchie des modes de traitement
La loi française établit une « hiérarchie des modes de
traitement des déchets », laquelle classe en première
position la prévention et la réduction des déchets, ainsi
que le réemploi. Ce n’est qu’après que la loi fait référence
à la réutilisation, au recyclage, à la valorisation
notamment énergétique, et enfin à l’élimination des
déchets (art. L541-1 du Code de l’environnement).
Le réemploi constitue donc un mode de traitement
privilégié, par exemple pour des biens d’ameublement,
des textiles ou encore des équipements électriques et
électroniques.
A ce titre, Zero Waste France promeut le réemploi, et œuvre pour la sécurisation des
projets qui présentent des opportunités économiques évidentes, et d’importants
bénéfices environnementaux et sociaux.
La présente note vise à clarifier le statut de déchet, et l’appartenance ou non à ce
statut des substances, matières et objets récupérés puis réemployés ou réutilisés, ainsi
que les précautions à prendre.
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1 – Définir le « déchet »
Un déchet se définit comme « toute substance ou tout objet, ou plus généralement
tout bien meuble, dont le détenteur se défait ou dont il a l'intention ou l'obligation de
se défaire ». Si l’expression « se défaire » englobe une multitude de comportements,
l’entrée dans la catégorie juridique de déchet déclenche l’application d’une
règlementation spécifique, d’où l’importance de la présente réflexion :

une responsabilité afférente du producteur initial et des détenteurs successifs
envers les autorités publiques jusqu’à « l’élimination » ou la « valorisation
finale » (art. L541-2 du Code de l’environnement)

une traçabilité, c’est-à-dire la tenue à jour, par les exploitants des
établissements produisant ou expédiant des déchets, les collecteurs, les
transporteurs, les négociants et les exploitants des installations de transit, de
regroupement ou de traitement de déchets, d’un registre chronologique de la
production, de l'expédition, de la réception et du traitement de ces déchets
(art. R541-43 du Code de l’environnement et arrêté du 29 février 2012)

des obligations en termes d’organisation des dépôts, tel que la réservation
d’une zone spécifique pour le stockage des déchets

des déclarations et agréments divers (voir notamment art. R541-50 du Code de
l’environnement lorsque la structure collecte ou transporte une quantité
supérieure à 0,5 tonne par chargement de déchets non dangereux)
Le « réemploi » se définit quant à lui comme « toute opération par laquelle des
substances, matières ou produits qui ne sont pas des déchets sont utilisés de nouveau
pour un usage identique à celui pour lequel ils avaient été conçus » (art. L541-1-1 du
Code de l’environnement).
Par ailleurs, la loi française distingue le réemploi de la réutilisation : cette dernière
s’entend comme toute opération par laquelle des substances, matières ou produits qui
sont devenus des déchets sont utilisés de nouveau.
Le réemploi, tel que défini dans la loi, semble donc exclure la qualité de déchet. Cette
interprétation est confirmée par la doctrine administrative, laquelle s’exprime
notamment à travers l’Ademe, qui a écrit que :
« Le réemploi est l’opération par laquelle un produit est donné ou vendu par son
propriétaire initial à un tiers qui, a priori lui donnera une seconde vie. Le produit
garde son statut de produit et ne devient à aucun moment un déchet. Il s’agit
d’une composante de la prévention des déchets »
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Cette affirmation mérite d’être précisée puisqu’en pratique :

le réemploi peut être précédé ou non d’un acte de réparation (exemple des
ordinateurs fonctionnant, ou nécessitant d’être réparés grâce, le cas échéant, à
des pièces de réemploi)

les matières ou biens sont collectés selon des modalités différentes, de façon
sélective avec un « droit de regard » important de la structure de collecte, ou
sans sélection préalable (bornes d’apport volontaire, récupération sans
distinction des matériels en état de marche et hors service, etc.)
Pour qualifier le déchet, comptent donc tout à la fois les modalités de collecte,
l’intention du donneur initial et la façon dont il se « défait » de son bien, ainsi que
l’intention de l’entité qui le reçoit.
Par exemple, et selon cette interprétation, la qualité de déchet s’applique aux textiles
et biens apportés dans les bornes d’apport volontaire disposées dans les rues, puisque
le tri est effectué ultérieurement aux opérations d’apport puis de collecte, et que tous
les textiles ne sont pas réemployés. En revanche, ne sont pas des déchets les
ordinateurs collectés sélectivement dans un but de réemploi pour remise sur le
marché. Dans ce dernier exemple, on peut raisonnablement penser que les éventuels
ordinateurs ne fonctionnant pas dans une flotte d’ordinateurs ne constituent pas non
plus des déchets. Cette qualification pourrait cependant être retenue si la flotte
collectée devait majoritairement être composée d’ordinateurs hors service, dont on
peut douter du fait qu’ils seront tous réparés et, finalement, réellement réemployés.
La qualification de déchet doit donc être opérée au cas par cas par chaque structure,
dès lors que ce statut implique des obligations spécifiques de gestion détaillées ciavant.
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2 – Valoriser le « déchet »
Il convient de préciser que la qualité de déchet n’empêche pas sa valorisation,
notamment matière. Un ordinateur peut tout à fait passer par le statut de déchet, puis
être revendu suite à une opération de réparation par exemple.
Un avis publié au journal officiel du 13 janvier 2016 rappelle la possibilité de « sortie
explicite » du statut de déchet (en particulier par arrêté interministériel), et la « sortie
implicite », qui concerne les installations inscrites à la nomenclature des ICPE :
« Un article au sens du règlement REACH, ou un assemblage d'articles constituant
un objet, fabriqué dans une installation de production qui utilise pour tout ou
partie des déchets comme matières premières, n'a pas le statut de déchet.
De même, une substance ou un mélange, au sens des règlements REACH et CLP,
élaboré dans une installation de production qui utilise pour tout ou partie des
déchets comme matières premières, n'a pas le statut de déchet quand cette
substance ou ce mélange est similaire à la substance ou au mélange qui aurait
été produit sans avoir recours à des déchets »
Pour les structures du réemploi classées dans la nomenclature ICPE qui collecteraient
des produits ou biens constituant des déchets en application des critères exposés ciavant, et travailleraient à leur réemploi et/ou réutilisation totale ou partielle, cet avis
confirme bien la « sortie implicite » du statut de déchet à la fois des composants
individuels éventuellement réemployés (pièces d’ordinateur), et du bien final produit
(ordinateur complet de réemploi).
Si cet avis ne concerne que les installations soumises à la règlementation ICPE, il
semble cependant logique d’étendre cette solution aux structures de plus petite taille
non soumises à cette règlementation.
L’innocuité des produits et biens réemployés pour l’environnement et la santé
demeure une exigence fondamentale pour permettre le réemploi / réutilisation.
L’instant précis de sortie implicite du statut de déchet coïncide en pratique avec ce que
le Code de l’environnement appelle la « valorisation finale », qui rompt alors la chaîne
de responsabilités issus de la règlementation des déchets (du producteur initial aux
détenteurs successifs).
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La « valorisation finale » n’a pas encore reçue de définition très précise. Toutefois, en
matière de réemploi, il semble possible de considérer que cette étape est franchie :

lorsqu’un objet, après une éventuelle remise en état nécessaire, fonctionne à
nouveau,

lorsqu’il a trouvé preneur, soit à l’occasion d’un don ou d’une vente, auprès
d’un tiers qui l’utilisera conformément à son usage.
Dès lors, de nouvelles relations commencent entre la structure du réemploi et le tiers
preneur, relations nouées non pas autour d’une éventuelle qualité de déchet, mais
contractuellement établies (durée de garantie, informations sur le produit, etc.). A ce
titre, nous attirons l’attention des structures du réemploi sur l’adoption de polices
d’assurances adaptées (locaux, personnels, dommages pouvant être causés par des
objets vendus, etc.).
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