Témoignage du mois Juillet/Août 2004 Anne AUBERTIN

Transcription

Témoignage du mois Juillet/Août 2004 Anne AUBERTIN
Témoignage du mois
Juillet/Août 2004
Anne AUBERTIN
Chef du Département Logistique de RENAULT Flins
Anne Aubertin est, depuis l’an 2000, Chef de Département Logistique de l’usine Renault à Flins, qui produit
1200 véhicules/jour (Clio et Twingo). Entrée chez Renault en 1984, elle a été successivement responsable
de fabrication à l’usine de Billancourt, puis responsable des approvisionnements pour l’usine de Douai.
GALIA : Quel retour voyez-vous sur le terrain de l’implication de Renault dans les travaux GALIA ?
A.A. : D’abord, tous les standards utilisés, en particulier les messages EDI, facilitent le déploiement plus
rapide de la politique logistique au sein de l’usine avec l’ensemble de notre tissu fournisseurs.
Ensuite, je pense à un sujet comme Evalog : nous commençons à demander à nos fournisseurs de savoir
s’évaluer en termes de qualité logistique et de mettre en place un outil reconnu dans le monde de
l’automobile, déjà utilisé par certains autres constructeurs automobiles. L’utilisation de cet outil permettra à
mes fournisseurs d’évoluer favorablement, sans que j’ai besoin de les amener au niveau de qualité et
d’exigence que je demande aujourd’hui.
GALIA : Quelle proportion de vos fournisseurs sont en EDI ?
A.A. : Pour l’imager, je donnerais pour exemple un chiffre en exploitation : aujourd’hui, je reçois 95% des
avis d’expédition sous forme EDI.
GALIA : Est-ce que les messages que vous recevez passent automatiquement dans vos applicatifs
ou bien que se passe-t-il s’ils sont mal faits, s’ils bloquent… ?
A.A. : Aujourd’hui, ils nécessitent de la reprise sur le terrain. En qualité, j’en suis aujourd’hui à 20% de
messages totalement conformes en avis d’expédition. Il nous reste du travail à faire pour parvenir à 100%
des messages totalement conformes à ce que nous souhaitons recevoir.
GALIA : Vos partenaires qui sont en EDI : sont-ils exclusivement français ou plus largement
européens ?
A.A. : Ils sont au moins européens. Mais ce dont je me rends compte, c’est qu’un fournisseur qui a
aujourd’hui des établissements en France ou ailleurs en Europe, n’a pas forcément encore déployé ces
outils-là dans les filiales qu’il possède en Pologne, Tchéquie, Slovaquie, Roumanie… A mon grand regret,
l’EDI n’y est pas encore très déployé.
GALIA : Et à ce moment-là, s’ils n’ont pas recours à l’EDI, est-ce que vous les encouragez à faire du
web EDI ?
A.A. : C’est effectivement un outil qui est mis à notre disposition maintenant ; nous allons par conséquent les
encourager à faire du Web-EDI à défaut d’EDI. J’ai pour objectif d’avoir 100% de messages électroniques à
la fin de l’année.
GALIA : Pour y parvenir, mettez-vous la pression sur votre service Achats de telle sorte qu’un
fournisseur ne puisse être homologué que s’il a mis en place de l’EDI ou du web EDI ?
A.A. : Nous sommes à un stade où ce n’est pas encore obligatoire. Par contre, le métier logistique est en
train d’écrire son attendu logistique vis à vis d’un fournisseur pour qu’il soit homologué chez Renault, avec
toute la panoplie des outils, des messages, dont nous avons besoin, dans le but d’intégrer cette exigence
dans le contrat d’achats. Ce contrat sera prêt pour le prochain véhicule qui va se déployer chez Renault,
courant 2005.
Néanmoins, à partir du moment où un nouveau modèle vise 300 ou 400 fournisseurs, il n’y a vraiment
aucune raison pour que les usines, qui ne démarrent pas forcément un nouveau modèle, ne fassent pas
pression pour parvenir à bonnes fins. Et la Direction des Achats s’est engagée à nous appuyer dans ce
sens.
Le respect de cette prescription sera généralisé d’ici 2 à 3 ans pour pouvoir devenir site fournisseur de
Renault.
GALIA : Le fournisseur voit-il cela d’un bon œil ?
A.A. : Oui, très clairement : cela lui évitera d’utiliser 36 systèmes pour un client donné, qui est Renault. C’est
ce que nous nous efforçons de faire comprendre. D’ailleurs, aujourd’hui, quand un fournisseur a plusieurs
sites Renault comme client, nous nous efforçons de lui faciliter la vie en uniformisant notre demande pour les
pièces série : prenez l’exemple des emballages des pièces série qui sont identiques d’une usine à une autre
alors que nous n’avons pas forcément les mêmes exigences. Donc à l’inverse, un fournisseur se doit de
pouvoir livrer l’ensemble de ses clients en réseau en ayant recours aux mêmes techniques logistiques, aux
mêmes outils.
GALIA : Est-ce que vous êtes au courant des travaux auxquels Renault participe chez GALIA ?
A.A. : J’en connais un certain nombre. Je sais que nous participons à tout ce qui est Evaluation logistique,
Web-EDI, facturation, gestion des emballages durables. Par exemple, pour déployer un système de gestion
des emballages chez Renault, nous avons souhaité faire en sorte que ce soit un système harmonisé avec
les autres constructeurs pour espérer le voir rapidement déployé chez nous, en concertation avec Nissan. Je
suis également au courant des travaux sur la standardisation des emballages qui est un facteur économique
important pour nous, et puis aussi peut être un facteur d’organisation chez le fournisseur.
GALIA : Est-ce que vous avez déjà intégré les modes de fonctionnement de Nissan ou bien
raisonnez-vous toujours Renault dans vos exigences ?
A.A. : Aujourd’hui, dans le contrat logistique que nous sommes en train d’écrire, nous raisonnons Renault.
En revanche, nous sommes en train d’étudier avec Nissan quelle est notre politique à 5 ou 10 ans en
matière de gestion de production, avec dans l’intention de rejoindre un peu le mode de fonctionnement
Nissan. Je pense que, à ce moment-là, quand nous aurons une politique logistique identique, nous pourrons
exiger de nos fournisseurs quelque chose de commun. Nous n’avons pas encore cette convergence avec
Nissan Europe.
En matière d’emballages, nous sommes en train de créer une banque commune d’emballages standards.
GALIA : Quel succès ou difficultés avez-vous connus dans la mise en place des standards GALIA ?
A.A. : Le plus grand succès, je crois, c’est au niveau de la demande de livraison et de la suppression du
papier.
Ensuite, c’est l’avis d’expédition et l’étiquette GALIA. Sur ces deux points-là, si c’est bien un succès, la
qualité documentaire de nos fournisseurs doit être encore améliorée. Ceci dit, je pense que c’est aussi un
peu de notre faute dans la mesure où nous n’utilisons pas encore forcément partout ces outils complètement
intégrés dans nos systèmes ; mais maintenant le besoin s’en fait sentir et nous allons devoir remonter les
problèmes à nos fournisseurs. La demande de livraison et l’avis d’expédition sont vraiment importants. Le
Web EDI, c’est la solution qui nous permettra d’avoir les 5% manquant, de petits sites fournisseurs qui
utiliseront un standard. Ainsi irons-nous jusqu’au bout de l’intégration des données, sans risque d’erreur.
La principale difficulté que l’on rencontre, c’est le niveau des investissements nécessaires pour répondre à la
demande, lorsque le fournisseur est obligé de modifier son système d’informations, ou n’a pas de système
d’informations. Nous n’arrivons pas toujours à justifier ces dépenses vis à vis d’un fournisseur. C’est pour
cela que j’aime bien des solutions comme le Web-EDI qui sont des solutions plus légères et qui permettent à
tout un chacun de rentrer dans cette standardisation de manière économique.
GALIA : En ce qui concerne l’étiquette, ré-étiquetez-vous encore beaucoup ?
A.A. : Non, nous avons depuis quatre mois maintenant entamé une forte politique de suppression du réétiquetage : nous sommes passés de 98% de ré-étiquetage à 20% maintenant. Les 20% qui restent à
gagner, sont essentiellement dus à des problèmes de qualité de l’avis d’expédition reçu. C’est à dire que le
physique n’est pas cohérent avec les données de l’avis d’expédition lors des opérations de réception.
GALIA : Avez-vous un outil pour gérer l’amélioration de vos fournisseurs ?
A.A. : J’ai un outil qui m’arrive en septembre sur la qualité des avis d’expédition. Il va me permettre de
détecter facilement quels sont les écarts par rapport à ce que j’attends, et de cibler là où le bas blesse.
Mais surtout nous nous engageons dans une démarche d’amélioration de la qualité logistique de nos
fournisseurs : dans chaque usine, et donc notamment à Flins, nous venons de créer un poste d’animateur
de la performance logistique fournisseurs. Cette personne aura en charge de tirer les plans d’actions des
fournisseurs dans des domaines aussi variés que le respect du délai de livraison, la palettisation,
l’identification, le plan de chargement, etc. Cela peut se faire d’ailleurs de manière intrusive en allant chez le
fournisseur pour identifier avec lui ce qu’il est possible de faire, l’aider dans le diagnostic de la situation et
dresser un plan d’actions pour parvenir au niveau requis.
Nous avons aussi engagé, en relation cette fois-ci avec la Direction des Achats, un outil d’évaluation au
travers d’indicateurs, à la fois de taux de service et puis de nombre d’incidents et très clairement, dans
l’année qui vient, pour pouvoir réussir le démarrage du nouveau véhicule à Flins, la qualité des avis
d’expédition et de l’étiquette sera complètement intégrée dans ces indicateurs. Des revues de performance
logistique sont engagées par la Direction des Achats avec ses fournisseurs pour appuyer la démarche.
GALIA : Vous êtes au courant de la parution de la nouvelle étiquette GALIA « ETI9 » qui a maintenant
obtenu le statut Odette, est-ce que vous rencontrez des freins à la mise en place de cette nouvelle
étiquette ou est-ce que vous êtes très persuasifs vis à vis de vos fournisseurs de manière à régler
vos problèmes rapidement ?
A.A. : Aujourd’hui, à Flins, je suis encore peu impactée par ce besoin. Il va arriver courant 2005, avec le
nouveau véhicule et la logistique liée à l’approvisionnement des petits emballages. Pour très bien connaître
l’usine de Sandouville, qui a d’ailleurs demandé à GALIA de l’aider à avancer sur ce sujet, aujourd’hui ce site
rencontre encore un frein relativement important dans la mise en œuvre de nouveaux matériels chez nos
fournisseurs.
GALIA : Qu’est-ce que Galia peut faire pour faciliter le déploiement des standards ?
A.A. : Je pense que GALIA doit expliquer les besoins du constructeur. J’attends de GALIA un recueil des
besoins des constructeurs et des équipementiers.
A la limite, je considère que GALIA pourrait être aussi un conseil vis à vis des constructeurs pour, en
fonction de ce qui se passe sur le marché et parce qu’il peut être au courant de ce que les autres
constructeurs font, nous orienter dans notre politique logistique pour plus facilement déployer notre politique
ou avoir une cohérence qui aide à la fois les constructeurs et les équipementiers. Je pense que l’on
n’avance pas ensemble sans que chacun y trouve son bénéfice.
Cela débouche par conséquent sur un partenariat entre Renault et GALIA, Renault faisant valoir auprès du
fournisseur ses besoins propres et GALIA expliquant la mise en œuvre et les bénéfices que le fournisseur en
retirerait au-delà d’obéir aux prescriptions de son client.
Tout à fait. Je pense que GALIA peut expliquer la politique du constructeur, expliquer aux fournisseurs ce
qu’ils peuvent avoir à gagner (parce qu’ils peuvent augmenter leur productivité à travers ces outils
standards), voire les aider à les mettre en œuvre ; l’atout de GALIA, c’est la connaissance qu’il a du tissu
fournisseurs et des autres constructeurs ; donc il peut plus facilement aider l’équipementier à orienter sa
propre politique pour répondre aux différents besoins des constructeurs.
GALIA : Est-ce que vous avez des réunions périodiques avec vos fournisseurs au cours desquelles
vous faites le point de la qualité logistique ?
A.A. : Tout à fait. Je vous parlais tout à l’heure de ce qui se met en place avec la direction des Achats : de la
création d’une cellule d’animation logistique au sein de chaque usine. En particulier à Flins, elle démarre et,
aujourd’hui, dans les premiers items que nous abordons ou dans les priorités que nous abordons avec nos
fournisseurs, il y a le respect des standards que sont l’avis d’expédition, l’étiquette GALIA, l’emballage, la
gestion des emballages qui va avec et puis le taux de service du fournisseur. Et sur ce taux de service
fournisseurs très clairement, notre intention est d’exiger une évaluation type Evalog pour amener le
fournisseur à progresser et à répondre à notre exigence. La Direction des Achats a commencé à fixer des
objectifs cette année à un certain nombre de nos fournisseurs.
GALIA : Vous dites « type Evalog », est-ce à dire que vous vous servez de l’Evalog GALIA en y
ajoutant une petite touche Renault avec quelques exigences supplémentaires et quelques exigences
en moins, ou bien vous prenez l’Evalog tel qu’il est standardisé ?
A.A. : En fait, on prend tout Evalog. Ce qu’on demande maintenant aux fournisseurs, c’est qu’ils fassent leur
propre évaluation Evalog ; ils nous retournent leur cotation et leur plan d’actions s’il y a lieu. En parallèle,
puisque nous avons certains flux logistiques sur l’approvisionnement des petits emballages qui sont très
particuliers et qui demandent énormément de rigueur, nous avons construit un petit outil d’audit qui est
propre à Renault et aux usines : là, ce sont les animateurs de chaque site qui iront faire l’audit chez le
fournisseur quand nous rencontrerons des problèmes sur le terrain. Ces problèmes sont subis en
manutention et impactent notre performance physique.
GALIA : Donc vous voyez une différence entre la note d’auto évaluation et la vérité sur le terrain.
A.A. : Tout à fait. Evalog est un outil général qui va permettre à un fournisseur de structurer sa politique, son
organisation, de déployer des indicateurs, d’identifier ses forces et faiblesses, mais qui ne va pas forcément
répondre à certains détails de flux logistiques. Donc là nous souhaitons en parallèle amener nos
fournisseurs à répondre à notre exigence sur ces flux très particuliers, propres à Renault. Mais il est certain
que quelqu’un qui s’engage dans Evalog, nécessitera de notre part beaucoup moins d’interventions parce
que nous ne serons plus dans une logique de problèmes permanents.
Au travers de rencontres régulières, nous essayons de voir nos fournisseurs une fois par an. Même les
meilleurs nous les rencontrons aussi pour échanger sur différents aspects de la politique logistique à venir.
GALIA : Par rapport à vos projets à court et à moyen terme, qu’est-ce que vous voyez comme sujets
sur lesquels GALIA devrait travailler ?
A.A. : Je rêve de ne plus avoir besoin de faire de réception administrative ou physique. Je le pratique sur le
flux de petits emballages dont je parlais précédemment, mais je suis obligée de faire un audit régulier parce
que je n’ai pas toujours confiance dans la qualité des informations transmises par le fournisseur. Faire
confiance ou être aveugle ? Je rêve de passer mes réceptions d’emballages via un portail par lequel, avec
une étiquette radio-fréquence ou toute autre technique, je pourrais identifier et inventorier une palette quand
elle entre dans l’usine, sans intervention humaine.
GALIA : C’est donc l’automatisation complète dès réception jusqu’au bord de chaîne ?
A.A. : Oui, c’est ce qui me semble aujourd’hui important par rapport à ma qualité logistique, et au
déploiement qu’on a sur les petits emballages. Ce serait pour nous un axe majeur d’amélioration de la
qualité et j’aimerais que GALIA nous aide parce que le chemin va être très long.
GALIA : En conclusion, qu’est-ce que vous pourriez dire par rapport à GALIA ?
A.A. : Il me semble important :
- qu’une telle instance perdure ;
- qu’elle soit vraiment l’instance qui recueille les politiques de chaque constructeur à plus ou moins moyen
terme ;
- et qu’elle voit aussi ce que les équipementiers sont capables de faire afin d’être un peu le conseiller vis à
vis des constructeurs dans les orientations futures pour qu’on puisse réussir plus facilement tous
ensemble.
Propos recueillis par :
Bernard Jeanneau

Documents pareils