HDA him

Transcription

HDA him
Histoire des arts : Maurizio CATTELLAN, Him (Lui), 2001 (sculpture en résine de polyester, cire, pigment, costume et cheveux), 101x41x43 cm,
exposé à Stockholm du 10 février au 08 avril 2001.
Maurizio CATTELAN est un artiste italien né à Padoue en 1960. Il vit et travaille actuellement à New-York. Ses œuvres, souvent provocatrices, mêlent humour noir
distancié et réflexion sur la mort, la place de l’être humain dans le monde et la société où il vit, la manipulation religieuse ou politique, les grandes catastrophes
humaines du XXème siècle.
"Hitler incarne l’image de la peur. En le mettant en scène, je ne fais que m’emparer d’une icône de notre siècle. Ma mère disait toujours qu’il est impossible de
bien nettoyer un carreau si on ne voit pas où se trouve la saleté"… (M. Cattelan)
Dans son œuvre Him, il met en scène le dictateur allemand Adolf Hitler. L’œuvre est une
installation éphémère: la sculpture est faite pour être installée dans un lieu, et ce lieu fait partie
de l’œuvre. Elle joue sur l’effet de surprise : le spectateur commence d’abord par découvrir la
sculpture de loin, et de dos ; celle-ci reproduit un enfant à genoux en train de prier. Mais au fur
et à mesure que le spectateur en fait le tour, il s’aperçoit que l’enfant porte en réalité le visage
du dictateur. L’effet de surprise est double : choc de se retrouver face à ce visage symbolisant le
Mal ; incompréhension de voir l’un des symboles du mal (à notre époque) en train de prier- et
cet effet de surprise est encore renforcé par les moyens plastiques mis en œuvre ici : sculpture
en cire hyperréaliste, qui reproduit avec une grand exactitude la peau humaine, les cheveux, les
sourcils et les vêtements.
Le personnage à genou donne l'impression de demander pardon, comme s'il voulait se faire
pardonner pour tout le mal qu'il avait fait. On en vient à se demander si une personne comme
Hitler, a connu la bonté pendant sa vie, et si oui, peut-on considérer cette hypothèse comme un
motif de pardon ? L'artiste ne nous suggère pas de lui pardonner mais nous met en garde en
nous montrant que, pour un temps, le mal peut revêtir l'apparence du bien et nous induire en
erreur (… comme la propagande). Il montre aussi à quel point le pouvoir peut transformer un
simple humain en un personnage monstrueux.
Cette œuvre a été étudiée dans le cadre d'une séquence sur la nouvelle où nous avons analysé
l’œuvre Pauvre petit garçon, le K de Dino BUZZATI (1966), qui fonctionne sur le même principe
« une attente trompée » ou une chute inattendue pour le spectateur/ lecteur.
Présentation de la nouvelle :
Cette nouvelle est extraite d'un recueil de nouvelles Le K, publié en 1966 et écrit par D.BUZZATI.
Dès le titre, le lecteur est prévenu : il va lire le récit d'un jeune garçon qui inspire la pitié. Le récit
s'inscrit dans la banalité et le réel. L'enfant est maltraité par ses camarades, pendant qu'ils
jouent à la guerre. Le portrait physique et moral qui est fait de l'enfant le distingue
complètement des autres et hélas, annonce le sort que lui réservent les autres enfants. Le
narrateur met tout en œuvre pour faire prendre conscience que cet enfant est pitoyable,
comme sa mère le pense.
Cependant, la chute est inattendue. Elle apporte un nouvel éclairage sur le texte. Cet enfant
malingre et maltraité par la vie est Hitler à 5 ans. Le narrateur a développé une stratégie
d'écriture qui a emmené le lecteur sur une fausse piste, voire même à avoir pitié de ce « pauvre
petit garçon ». Le narrateur permet au lecteur d'avoir une vision nouvelle de ce que sera Adolf
Hitler, en montrant qu'il a aussi été un enfant. Il propose une explication de ses actes futurs en
les reliant directement à une enfance traumatisée, sans pour autant les excuser. Mais
n'oublions pas qu'il s'agit d'une fiction/un jeu littéraire !
(L.Cardoso)