dégénérescence maculaire liée à l`âge

Transcription

dégénérescence maculaire liée à l`âge
Mise au point
Dégénérescence maculaire
liée à l’âge
Prévention
Dr Aude Affortit*
Introduction
La DMLA est une pathologie rétinienne acquise affectant électivement la région centrale de la rétine
responsable de la discrimination
des hautes fréquences spatiales
(lecture), de la vision des couleurs
et du champ visuel central.
Si la DMLA de forme néovasculaire
peut être traitée, la forme atrophique
est majoritaire et ne bénéficie à ce
jour d’aucun traitement curatif, d’où
l’intérêt d’un traitement préventif.
P
remière cause de malvoyance
après 50 ans dans les pays
occidentaux (1) et d’incidence
croissante, la DMLA constitue un enjeu de santé publique. En Allemagne,
par exemple, une étude de 2011 a montré que cette pathologie représentait
50 % des causes de malvoyance, loin
devant le glaucome et la rétinopathie
diabétique, et que cette proportion
s’élèverait à 57 % en 2030 (2).
Avant d’exposer les moyens de
prévention possibles de la DMLA,
les mécanismes physiopathologiques supposés de cette pathologie seront rappelés ainsi que ses
facteurs de risque et sa classification qui définit différents stades
de progression, les stades précoces
ou “précurseurs” constituant un
risque de développer ultérieurement un stade plus sévère.
*Fondation ophtalmologique Adolphe-de-Rothschild, Paris
232
Physiopathologie
de la DMLA
Le stress oxydatif est le mécanisme
principal des altérations rétiniennes constituant progressivement une DMLA (3). Le cycle visuel
produit physiologiquement des radicaux libres oxygénés qui, compte
tenu de leur toxicité, doivent être
éliminés de façon constante par
un système dit “antioxydant”. Le
renouvellement permanent des
segments externes des photorécepteurs par l’épithélium pigmentaire contribue à cette élimination
des radicaux libres, tout comme
le pigment xanthophylle qui joue
un double rôle d’antioxydant et de
filtre vis-à-vis des ultraviolets (UV).
Plusieurs enzymes utilisant notamment le cuivre comme cofacteur
et certaines vitamines comme les
vitamines C et E participent également à ce système antioxydant.
Des mécanismes inflammatoires et
ischémiques sont également impliqués dans la physiopathologie de la
DMLA.
Facteurs de risque
Âge
La DMLA est une pathologie multifactorielle, l’âge constituant le
principal facteur de risque. Une
étude récente de la prévalence de la
DMLA aux États-Unis chez les plus
de 60 ans l’estimait à 13,4 % pour les
formes précoces et 2,2 % pour les
formes tardives (4).
Facteurs ethniques
Des facteurs ethniques entrent également en jeu, les sujets caucasiens
étant préférentiellement atteints.
Facteurs environnementaux
Certains facteurs environnementaux comme le tabagisme (supérieur
à 10 paquets/année) et l’obésité sont
des facteurs de risque avérés ; le rôle
négatif des UV, bien que très fortement suspecté, reste quant à lui hypothétique (5).
Facteurs génétiques
Le caractère familial de la DMLA a
été observé de longue date. Le risque
relatif de développer une DMLA pour
un sujet ayant un antécédent familial
de la maladie est approximativement
multiplié par 4 (6). Deux principaux
gènes de prédisposition à la DMLA
ont été à ce jour identifiés. Le premier
est le gène du CFH (facteur H du complément) situé sur le chromosome 1.
Un individu porteur d’un allèle muté
de ce gène (hétérozygote) présente
un risque accru de développer une
DMLA avec un odds ratio entre 2 et 3
qui s’accroît encore si les deux allèles
sont mutés (sujet homozygote). Le second gène de susceptibilité à la DMLA
est le gène ARMS2 (Age Related Maculopathy Susceptibility) (7) situé sur
le chromosome 10 qui code pour une
protéine au rôle encore indéterminé.
Il faut noter que les allèles à risque
des gènes CFH et ARMS2 sont fréquents dans la population générale,
qu’ils confèrent un risque important
de développer une DMLA et que ces
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Dégénérescence maculaire liée à l’âge
risques se combinent entre eux. Ainsi, un individu double homozygote
(porteurs de deux allèles mutés du
gène CFH et du gène ARMS 2) présente un risque considérable de
développer une DMLA avec un odds
ratio de 57,6 (7).
Classification de
la DMLA selon l’AREDS
L’AREDS 1 (Age Related Eye Disease
Study) (8) est la grande étude prospective, multicentrique et randomisée menée aux États-Unis entre
1992 et 1998 à l’initiative du National
Eye Institute, qui a confirmé l’intérêt
d’une supplémentation en vitamines
antioxydantes et en minéraux à visée
préventive dans la DMLA. La classification de la DMLA utilisée dans
l’AREDS est essentiellement fondée
sur l’aspect du fond d’œil et définit
quatre stades.
- Stade 1 : absence d’anomalies ou
petits drusen (de taille inférieure à
63 microns) non extensifs.
- Stade 2 : petits drusen extensifs,
drusen intermédiaires (entre 63 et
125 microns) ou anomalies pigmentaires sur au moins 1 œil.
- Stade 3 : drusen intermédiaires
extensifs, grands drusen (de taille
supérieure à 125 microns) ou atrophie géographique non centrale sur
au moins 1 œil.
- Stade 4 : DMLA avancée (atrophie
géographique touchant le centre ou
néovascularisation choroïdienne) ou
acuité visuelle < 20/32 attribuable à
des lésions de DMLA précoce.
Les stades 2 et 3 constituent la maculopathie liée à l’âge (MLA) (Fig. 1) qui
peut être asymptomatique ou se traduire par un trouble de l’adaptation
au changement d’ambiance lumineuse ou encore par un besoin accru
d’éclairage lors de la lecture. Ces
stades 2 et 3 prédisposent au développement d’un stade 4.
Le stade 4 constitue la DMLA à pro-
Figure 1 - DMLA de stade 3, photos du fond d’œil. A : drusen séreux et intermédiaires.
B : drusen séreux partiellement confluents. C et D : décollement de l’épithélium
pigmentaire drusénoïde et hyperpigmentations.
Figure 2 - DMLA de stade 4. A : photos couleur objectivant une plage d’atrophie
géographique touchant le centre entourée de drusen de grande taille involutifs.
B : cliché en autofluorescence correspondant avec hypoautofluorescence des zones
atrophiques. C : photo couleur d’une DMLA exsudative avec volumineux hématome
maculaire. D : évolution fibrineuse de l’hématome.
prement parler (Fig. 2). Les symptômes
associent de façon variable une
baisse d’acuité visuelle prédominant
en vision de près, des métamorphopsies et un scotome central. La DMLA
atrophique, majoritaire, se caracté-
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rise par le développement progressif de plages d’atrophie rétinienne
autour de la fovéa avec une tendance
variable à l’extension notamment
en position rétrofovéolaire. Comme
dit plus haut, elle ne bénéficie à ce
233
Mise au point
jour d’aucun traitement curatif. La
DMLA exsudative est définie par
le développement de néovaisseaux
choroïdiens de différents types selon
leur comportement en OCT et angiographies (Fig. 3 et 4). Elle est désormais
traitée par injections intravitréennes
(IVT) d’anti-VEGF qui en ont considérablement amélioré le pronostic.
Cette classification en quatre stades
utilisée dans l’AREDS ne souligne
pas l’importance des pseudo-drusen (9) dont on sait désormais qu’ils
confèrent un risque important de
développer une DMLA (Fig. 5).
Classification simplifiée
Secondairement, en 2005, le rapport
n°18 de l’AREDS (10) a établi une
classification simplifiée permettant
de déterminer le risque de développer une DMLA avancée à 5 ans en
fonction des anomalies du FO. Ces
dernières sont cotées comme suit :
- présence de migrations pigmentaires sur 1 œil = 1 point ;
- présence d’au moins 1 drusen séreux (de taille > 125 microns) sur
1 œil = 1 point.
Les scores de l’œil droit et de l’œil
gauche s’additionnant, la présence
de drusen intermédiaires bilatéraux
correspond à un score de 1 et l’existence d’une DMLA néovasculaire
unilatérale à un score de 2. Ainsi, le
risque de développer une DMLA
avancée à 5 ans peut être estimé à :
- score = 0 : 0,5 %
- score = 1 : 3 %
- score = 2 : 12 %
- score = 3 : 25 %
- score = 4 : 50 %
le risque global
de DMLA
Si elle est informative et permet
de situer le patient en fonction de
l’aspect de son FO, cette classification simplifiée ne tient pas compte
du caractère multifactoriel de la
234
Figure 3 - Différents types de néovaisseaux choroïdiens. A : néovaisseaux visibles actifs
en angiographie à la fluorescéine à 1 minute et B : 3 minutes, montrant une diffusion
progressive de l’hyperfluorescence initiale. C et D : néovaisseaux occultes œil droit
et gauche, stade tardif de l’ICG montrant une plaque hyperfluorescente. E et F : OCT
spectral domain objectivant un discret soulèvement de l’épithélium pigmentaire isolé
à droite et accompagné d’un décollement séreux rétinien à gauche.
DMLA. Pour déterminer au mieux
le risque réel d’un individu de développer la maladie, l’ensemble
des facteurs de susceptibilité (lésions précurseurs au FO mais également âge, tabagisme, indice de
masse corporelle et facteurs génétiques) devraient être considérés.
Cette approche globale du risque
de DMLA a été modélisée par
Seddon et al. (11) qui ont établi un
algorithme déterminant le risque
de développer une DMLA en
fonction de son statut vis-à-vis de
l’ensemble des facteurs de risque.
À l’avenir, cet algorithme pourrait
être utilisé en pratique clinique
pour identifier les patients les plus
à risque afin d’adapter au mieux les
conseils préventifs et le rythme de
surveillance.
La prévention de
la DMLA
Historique : l’étude AREDS 1
❚Méthode
❚
Cette étude a étudié 3 557 sujets répartis en 4 groupes : le premier
supplémenté par une association
de vitamine C (500 mg), de vitamine E (268 mg) et de bêta-carotène (15 mg), le deuxième par
zinc (80 mg) et cuivre (2 mg), le
troisième à la fois par vitamines
antioxydantes, cuivre et zinc, le
quatrième par un placebo.
❚❚Résultats (12)
Une réduction de 25 % du risque
de progression de la DMLA a été
observée dans le groupe de pa-
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Dégénérescence maculaire liée à l’âge
tients présentant un stade 3 ou 4
de DMLA et traités par l’association de vitamines C et E, de bêtacarotène, de zinc et de cuivre,
contrairement aux groupes traités par l’un ou l’autre de ces éléments seuls et aux groupes de
patients présentant un stade plus
précoce de MLA.
Aucun effet secondaire majeur
n’a été rapporté dans l’AREDS en
dehors d’une coloration jaunâtre
des téguments par ailleurs réversible. Par contre, un surrisque de
cancer pulmonaire, associé à la
supplémentation par bêta-carotène chez les fumeurs, a été attesté par deux études (13-14).
Une méta-analyse de Chong et
al. (17) concluait récemment à la
nécessité d’études randomisées
supplémentaires pour attester for-
mellement l’intérêt d’une supplémentation par oméga-3. L’étude
NAT-2 (18) (Nutritional AMD Treatment 2 Study) a étudié le délai de sur-
Oméga-3 et caroténoïdes
Après l’AREDS 1, un faisceau d’arguments avait suggéré l’effet protecteur d’autres nutriments : les
oméga-3 et les caroténoïdes.
❚❚Les oméga-3
Acides gras polyinsaturés, ils
sont représentés d’une part par
l’acide alpha-linolénique (ALA) à
chaîne courte et, d’autre part, par
l’acide docosahexaénoïque (DHA)
et l’acide eicosapentaénoïque
(EPA), tous deux à longue chaîne.
L’ALA et l’EPA sont des précurseurs du DHA qui est fortement
concentré dans les segments
externes des photorécepteurs.
Leur provenance est essentiellement alimentaire, l’organisme ne
pouvant les synthétiser en quantité suffisante. Le DHA est très
concentré dans les poissons gras
(thon, sardines, maquereaux, saumon), l’ALA dans les huiles d’origine
végétale (colza, soja, noix, germe de
blé).
Des études épidémiologiques ont
montré que les sujets présentant
une alimentation riche en oméga-3
et pauvre en acides gras polyinsaturés de type oméga-6 présentaient un
moindre risque de DMLA (15-16).
Figure 4 - Anastomose choriorétinienne. A et B : au temps précoce et tardif de l’angiographie à la fluorescéine. C et D : en SD-OCT, volumineux œdème intrarétinien entourant l’anastomose en regard de laquelle un décollement de l’épithélium pigmentaire
est identifiable. E : temps précoce de l’ICG montrant deux vaisseaux rétiniens juxtafovéolaires à l’extrémité dilatée semblant plonger de façon perpendiculaire vers une
hyperfluorescence choroïdienne. F : ICG temps tardif, hot-spot.
Figure 5 - Pseudo-drusen réticulés. A : dépôts jaune pâle coalescents en réseau en supéro et inféromaculaire ainsi qu’au-delà de l’arcade vasculaire temporale supérieure.
B : hypoautofluorescence de ces drusen. C : pseudodrusen hyporéflectifs en infrarouge.
D : SD-OCT : dépôts hyperréflectifs de forme triangulaire situés au-dessus de l’épithélium pigmentaire.
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235
Mise au point
venue d’une DMLA néovasculaire
dans le second œil de 300 sujets
atteints de DMLA néovasculaire
sur le premier œil, les uns étant, de
façon randomisée, supplémentés
par 840 mg/jour de DHA et 270 mg/
jour d’EPA, les autres par un placebo. Aucune différence significative en termes de délai de survenue
d’une DMLA néovasculaire sur le
second œil n’a été retrouvée entre
ces deux groupes. Néanmoins, dans
le sous-groupe de sujets supplémentés par DHA et présentant les
taux membranaires de DHA les plus
importants (reflet du taux sanguin),
un risque significativement plus
faible de développer une DMLA exsudative à 3 ans a été observé.
❚❚Les caroténoïdes
La lutéine et la zéaxanthine composent physiologiquement le pigment xanthophylle maculaire où
ils jouent un double rôle de filtre
des courtes longueurs d’onde associé à une action antioxydante. Tout
comme les oméga-3, leur source
est essentiellement alimentaire. Ils
sont présents à de fortes concentrations dans le cresson, les épinards, le
chou vert, la laitue, les brocolis, les
petits pois, le maïs et le jaune d’œuf.
Leur rôle a d’abord été suggéré par
des études épidémiologiques fondées sur des questionnaires alimentaires retrouvant un plus faible taux
de DMLA chez les sujets à l’alimentation riche en légumes verts (1920). Une augmentation de la densité
du pigment maculaire a d’autre part
été observée chez des sujets supplémentés en lutéine et zéaxanthine
(21). Des études interventionnelles
de petite taille ont également suggéré l’effet bénéfique d’une telle supplémentation (22).
Les vitamines du groupe B
Les vitamines B6, B9 et B12 interviennent dans le métabolisme de
l’homocystéine en réduisant son taux
236
circulant. Dans la Blue Mountain Eye
Study, une hyperhomocystéinémie
ou un faible taux sanguin de vitamine
B12 étaient associés à un risque plus
élevé de DMLA (23). Une récente
étude a retrouvé une diminution du
risque de DMLA en cas de supplémentation en vitamines du groupe B
dans une population très spécifique
de femmes présentant une pathologie
cardiovasculaire préexistante ou de
multiples facteurs de risque (24). Le
bénéfice d’une telle supplémentation
dans une plus large population reste à
démontrer.
L’étude AREDS 2 (25)
Cette étude visait à évaluer l’effet
d’une modification de la formulation initiale de l’AREDS, à savoir
d’une part, l’adjonction d’oméga-3
et/ou de lutéine et zéaxanthine et,
d’autre part, la suppression du bêta-carotène (risque de cancer pulmonaire chez les fumeurs) et/ou la
réduction de la dose de zinc à 25 mg
(correspondant à la dose maximale
absorbée).
❚❚Méthode
Les 4 203 participants de l’étude
AREDS 2 présentaient soit des drusen bilatéraux de grande taille, soit
des drusen de grande taille sur un
œil et une DMLA avancée sur l’autre.
Une double randomisation a eu lieu.
Les patients ont reçu la formulation
de l’AREDS 1 associée à des caroténoïdes (10 mg/j de lutéine et 2 mg/j
de zéaxanthine) ou à des oméga-3
(650 mg/j d’EPA et 350 mg/j de DHA)
ou à l’association des deux ou à un
placebo. Parallèlement, la formule
originale de l’AREDS était laissée telle
quelle ou modifiée : dépourvue de
bêta-carotène, moins dosée en zinc ou
les deux.
❚❚Résultats
Une réduction du risque de DMLA à
5 ans de l’ordre de 30 % a été observée
dans tous les groupes. Ainsi, l’adjonc-
tion d’oméga-3 à la formulation de
l’AREDS 1 n’a pas démontré de bénéfice supplémentaire, contrairement
au faisceau d’arguments en faveur
de ces molécules. Il faut néanmoins
noter que les doses de DHA et d’EPA
utilisées dans l’AREDS 2 étaient différentes de celles de l’étude NAT 2.
L’ajout de lutéine et zéaxanthine n’a
globalement pas non plus démontré
d’effet protecteur supplémentaire
sauf dans le sous-groupe de patients
présentant un apport nutritionnel
faible en lutéine et zéaxanthine,
la diminution du risque de DMLA
dans ce sous-groupe concernant la
forme néovasculaire de DMLA.
La suppression du bêta-carotène et
la diminution de la dose de zinc a par
contre été validée par cette étude.
Que faire en pratique ?
En prévention primaire
Chez le sujet sain, indemne de
DMLA, il n’existe pas suffisamment de preuves scientifiques pour
conseiller une supplémentation
en micronutriments (1). On peut
conseiller une éviction des facteurs
de risque (tabagisme, surpoids) associée à une alimentation riche en vitamine C (poivrons, kiwis, agrumes),
vitamine E (huiles et margarines
végétales), zinc (huîtres, coquillages,
pain complet, foie) et caroténoïdes.
Une prévention ciblée des individus
présentant un risque relatif de DMLA
élevée du fait de leurs variants génétiques pourrait à l’avenir être indiquée
(26) mais n’est pas encore d’actualité.
En prévention secondaire
Pour diminuer le risque de développer une DMLA sévère ou retarder sa
survenue chez les sujets présentant
une DMLA de stade 3 ou 4 sur un œil,
la conduite à tenir théorique est cette
fois mieux codifiée et comprend :
• Les règles hygiéno-diététiques précédemment citées : arrêt du tabac,
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Dégénérescence maculaire liée à l’âge
réduction pondérale et alimentation
variée. Il faut toutefois préciser que
le surrisque lié à la consommation de
tabac n’est annulé qu’après 20 ans de
sevrage.
• Une association d’antioxydants
fidèle à l’étude AREDS 2, seule supplémentation formellement validée.
• Une supplémentation éventuelle en
oméga-3 qui, pour l’heure, ne s’appuie
pas sur des preuves scientifiques formelles mais dont le rôle bénéfique
reste pressenti avec en tout cas des
effets secondaires minimes.
quels compléments
alimentaires ?
Pour conseiller au mieux le patient, la
notion de supplémentation “fidèle à
l’AREDS” mérite d’être précisée. Une
étude sur les pratiques de prévention
de la DMLA en Grande-Bretagne
(27) a récemment montré que, si de
nombreux praticiens conseillaient
une supplémentation à leurs patients
présentant des lésions précurseurs
au FO, la formulation conseillée était
souvent éloignée de l’AREDS, notamment sous-dosée, et n’était donc pas
adaptée aux preuves scientifiques
actuelles. En France, pour conseiller
une formulation adaptée, le praticien
se heurte à un écueil de taille qui tient
au dosage des compléments alimentaires actuellement disponibles. Les
compléments alimentaires sont en
effet régis par une réglementation
d’abord européenne puis française
(décret n°2006-352 du 20 mars
2006 qui transpose la directive européenne n°2002/46/CE, disponibles
sur www.legifrance.gouv.fr et europa.eu). Ces lois distinguent les compléments alimentaires des médica-
ments et limitent strictement leur
composition et leur dosage. À titre
d’exemple, la dose journalière maximale (DJM) de vitamine C que peut
légalement contenir un complément
alimentaire est de 180 mg/j alors que
la dose de vitamine C journalière de
l’AREDS est de 500 mg/j. La vitamine C est par ailleurs autorisée dans
le Vidal à la posologie journalière de
1 000 mg/j dans l’indication “asthénie de l’adulte”, un surdosage possible
survenant au-delà de 2 000 mg/j.
Ainsi, si l’on peut conseiller aux patients certains compléments alimentaires qualitativement conformes au
cocktail de l’AREDS, ceux-ci restent
quantitativement éloignés des doses
supranutritionnelles de l’étude. n
Mots-clés :
DMLA, Prévention, AREDS
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