La taxation des plus-values immobilières résultant

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La taxation des plus-values immobilières résultant
Lettre de l’Office Notarial 14 PYRAMIDES
Immobilier Institutionnel – Construction Promotion – Environnement – Développement Durable – Aménagement Urbanisme
ImmoThème Avril 2011
La taxation des plus-values immobilières résultant des décisions d’urbanisme
D’intérêt général dans sa finalité, la police de l’urbanisme entretient des rapports étroits avec les propriétaires qu’elle concerne.
Sur le terrain des principes, le droit de construire n’est pas conféré par les règlements d’urbanisme : il est un attribut de la propriété du sol. Au
pays de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, il ne pouvait certainement pas en aller autrement. C’est cependant à partir des
documents d’urbanisme que se déterminent en pratique à la fois l’existence et l’étendue du droit de construire. Des inégalités entre propriétaires
fonciers en résultent qui sont encore accentuées par la présence ou l’absence d’équipements publics à proximité de chez eux. Nul ne peut
contester en effet que la valeur d’un bien immobilier dépend dans une large mesure des décisions d’urbanisme, moins-value dans certains cas,
plus-values dans d’autres.
Dans le premier cas, il ne faut guère pouvoir compter sur une indemnisation du préjudice né de la réglementation d’urbanisme. L’article L. 160-5
du Code de l’urbanisme s’y oppose en principe sauf si la servitude d’urbanisme porte atteinte à un droit acquis ou si le propriétaire supporte une
charge spéciale et exorbitante hors de proportion avec l’objectif d’intérêt général poursuivi (CE Sect., 3 juillet 1998, Bitouzet, Rec. CE., p. 288).
Cette disposition est souvent critiquée, mais le Conseil d’État vient de clore le débat sur sa constitutionnalité en décidant qu’il n’y avait pas de
motif sérieux d’adresser une question prioritaire au Conseil constitutionnel (CE 16 juillet 2010, SCI La Saulaie, req. n° 334665).
Dans le second cas, pendant longtemps, par symétrie avec l’absence d’indemnisation des servitudes d’urbanismes, les plus-values liées notamment
aux décisions de classement des terrains et aux choix des aménagements locaux n’étaient pas taxées. C’était en quelque sorte une version foncière
du « ni-ni » bien connu par ailleurs : ni indemnisation des moins-values ni taxation des plus-values.
La loi ENL du 13 juillet 2006 a cependant cassé cette belle harmonie en instaurant un mécanisme de taxation des plus-values encaissées par les
propriétaires du fait du classement d’un terrain en zone constructible et de la réalisation des équipements publics de desserte. Décomplexé, le
législateur a finalement institué en 2010 trois nouvelles taxes inspirées par la même idée de ne pas laisser se privatiser les gains issus de choix
collectifs. Au cours de la même année, il est cependant revenu sur l’une d’elles… avant même son entrée en vigueur.
L’article 10 de la loi n° 2010-597 du 3 juin 2010 relative au Grand Paris avait en effet créé la taxe de valorisation immobilière en Île-de-France
codifiée à l’article 1635 ter A du Code général des impôts (CGI), mais elle a été supprimée par l’article 31 de la loi de finances rectificative pour
2010 du 29 décembre 2010 qui a abrogé l'article 1635 ter A du CGI et institué une taxe spéciale d’équipement instituée au profit de la Société du
Grand Paris.
Trois taxes sur les plus values immobilières issues des décisions d’urbanisme existent donc à l’heure actuelle :
la taxe forfaitaire sur la cession à titre onéreux de terrains devenus constructibles ;
la taxe forfaitaire sur le produit de la valorisation des terrains nus et des immeubles bâtis hors Île-de-France ;
la taxe sur les cessions à titre onéreux de terrains nus rendus constructibles.
Ces trois taxes, qui se superposent à l’imposition ordinaire des plus-values immobilières de l’article 150 U du CGI, nous ont semblé suffisamment
importantes pour justifier une présentation synthétique.
La taxe forfaitaire sur la cession à titre onéreux de terrains devenus constructibles
Régie par l’article 1529 du CGI, cette taxe facultative a été pour l’instant instituée par 5 664 conseils municipaux dont la liste est consultable sur le
site internet du service des impôts.
Son montant est de 10% du prix de cession diminué du prix d’acquisition. Hors du champ d’application du bouclier fiscal (Réponse ministérielle n°
73335, JO AN, 15 juin 2010), elle concerne la cession à titre onéreux de terrains nus rendus constructibles du fait de leur classement par un PLU
dans une zone U ou dans une zone AU ouverte à l’urbanisation ou par une carte communale dans une zone constructible. Seule la cession d’un
terrain devenu constructible depuis moins de 18 ans peut être taxée. Les cessions suivantes d’un terrain resté constructible ne le sont pas.
Conseil de votre notaire : Dans le cas d’un terrain situé d'une seule parcelle cadastrale situé pour partie dans une zone constructible et
pour l'autre partie dans une zone non constructible, la taxe forfaitaire est due au titre de la cession de la partie du terrain située en zone
constructible (Rescrit fiscal n° 2009/06 du 03/02/2009). Pour la détermination du prix de cession à retenir pour le calcul de la taxe, il
faudra donc distinguer la part du prix de cession afférente à chacune des fractions concernées en justifiant cette répartition par tous
moyens (prix du marché, attestation d'expert …).
La taxe forfaitaire sur le produit de la valorisation des terrains nus et des immeubles bâtis hors Île-de-France
Créée par la loi Grenelle II du 12 juillet 2010, elle est régie par l’article 1531 du CGI. Destinée à financer les infrastructures de transports urbains ou
la réalisation d'infrastructures ferroviaires, son institution est facultative.
Office Notarial 14 PYRAMIDES
ImmoThème avril 2011
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La taxe s'applique hors Île-de-France à la cession à titre onéreux des terrains nus et d'immeubles bâtis, ainsi que les droits relatifs à ces biens,
situés au plus à 1 200 mètres d'une station de transport collectif créée ou desservie à l'occasion de la réalisation du projet de transport collectif en
site propre, ou d'une gare ferroviaire.
Des exonérations sont prévues, par exemple la première vente d’un immeuble bâti neuf ou la vente d'un terrain nu devenu constructible depuis
moins de dix-huit ans.
La taxe est assise sur un montant égal à 80 % de la plus value. Son taux dépend, d’une part, de l’autorité ou de la collectivité qui a institué la taxe
et, d'autre part, du lieu de situation de l’immeuble vendu. Son rendement est cependant plafonné à 5 % du prix de cession.
Conseil de votre notaire : Le débiteur légal de la taxe est le cédant. Sa répercussion sur l’acquéreur, si elle n'est pas implicitement prévue
par le prix de vente, devrait constituer une charge augmentative du prix pour la liquidation de la TVA et des droits de mutation à titre
onéreux exigibles de l'acquéreur.
La taxe sur la cession à titre onéreux des terrains nus rendus constructibles
Créée par la loi n° 2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l’agriculture et de la pêche, cette taxe concerne la première cession à titre
onéreux de terrains nus, et des droits relatifs à ces terrains, rendus constructibles du fait de leur classement, postérieurement au 13 janvier 2010,
par un plan local d'urbanisme ou par un autre document d'urbanisme en tenant lieu, en zone urbaine ou à urbaniser ouverte à l'urbanisation ou
par une carte communale dans une zone où les constructions sont autorisées ou par application de l'article L. 111-1-2 du Code de l'urbanisme. Ce
classement doit être postérieur au 13 janvier 2010. Contrairement à la taxe de l'article 1529 du CGI, la taxe créée par la loi de modernisation de
l'agriculture et de la pêche a donc vocation à s'appliquer à la vente de terrains situés dans des communes non dotées de documents d'urbanisme
et régies par le règlement national d'urbanisme.
Due par le cédant, la taxe est assise sur la plus-value réalisée lors de la vente du terrain laquelle est calculée comme étant la différence entre le
prix de cession et le prix d’acquisition (ou la valeur vénale réelle à la date d’entrée dans le patrimoine du cédant).
L'assiette de la taxe est réduite d'un dixième par année écoulée à compter de la date à laquelle le terrain a été rendu constructible au-delà de la
huitième année. Cet abattement d'assiette aboutit à exonérer de fait, quel que soit le montant de la plus-value réalisée, les terrains cédés dix-huit
ans après leur classement en zone constructible.
Le taux est de 5 % de la plus-value lorsque le rapport entre le prix de cession et le prix d'acquisition (ou la valeur vénale) est supérieur à 10 et
inférieur à 30. Il est, au-delà de cette limite, et pour la plus-value restant à taxer, soumis au taux de 10 % de la plus-value.
En l’absence de règle de non-cumul, il faut penser que la taxe se superpose avec celles des articles 1529 et 1531 du CGI.