ABUS SEXUEL DANS L`ENFANCE ET CONDUITES A RISQUE

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ABUS SEXUEL DANS L`ENFANCE ET CONDUITES A RISQUE
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ABUS SEXUEL DANS L’ENFANCE ET CONDUITES A RISQUE CHEZ LES GAYS
Les hommes homosexuels ou bisexuels ayant été victimes d’abus sexuels dans leur
enfance (avant l’âge de 13 ans) ont globalement deux fois plus1de comportements à risque
à l’adolescence et l’âge adulte que les autres homosexuels ou bisexuels tandis qu’un gay sur
trois ne se protégeant pas avec un partenaire à risque inconnu est dans ce cas.
Tels sont les résultats préliminaires d’une enquête exploratoire2 réalisée par l’association
AREMEDIA sous la direction de Marc Shelly, médecin de santé publique, responsable du
CDAG de l’hôpital Fernand-Widal (AP-HP) à Paris et praticien en addictologie.
Dans l’échantillon étudié comprenant 1026 hommes (âgés de 16 à 39 ans) - de l’adolescence
à l’âge adulte - recrutés sur plusieurs sites différents, vivant à Paris, en région parisienne
ou en province, plus de 20% des homosexuels ou bisexuels 3 déclarent avoir été victimes
d’abus sexuel 4 alors qu’ils étaient enfants contre moins de 4% des hommes hétérosexuels
(chiffre habituellement trouvé dans les enquêtes en population générale).
Cette même proportion (une personne sur cinq) est également trouvée par une équipe
californienne dans le cadre d’une plus large enquête (prés de 3000 personnes) réalisée
récemment auprès d’un échantillon représentatif de la population des gays vivant dans
plusieurs grandes villes américaines (San Francisco, New York, Chicago et Los Angeles)5.
1
Toutes les données rapportées ci-dessous sont statistiquement significatives .
2
Ces nouvelles données, issues d’une étude en cours ayant trait aux relations entre souffrance
psychique conduites à risque, poursuivent et complètent la précédente enquête exploratoire sur la
« sursuicidalité » des gays et bisexuels (cf. Libération du 4/3/2005 et Le Monde,du 10/9/2005)
3
définis, dans cette étude, comme ayant des relations sexuelles de pénétration avec d’autres hommes (dans
cette étude, 2 hommes abusés sur 3 parmi les gays déclarent avoir une orientation bisexuelle).
4
selon la définition internationale : impliquant un contact génital (de l’attouchement à la pénétration sexuelle)
5
Paul JP, Catania J et al. in Child Abuse and Neglect, 2001
AREMEDIA (ASSOCIATION DE RECHERCHE EUROPEENNE POUR LA MEDECINE ET L’INFORMATIQUE INTERACTIVE)
50, avenue Claude Vellefaux– 75010 PARIS - FRANCE – Tél. 33 1 47 70 07 70 – Fax 33 1 47 70 07 12 – E-mail: [email protected]
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Association d’éducation populaire à but non lucratif régie par la loi du 1 juillet 1901, déclarée à la Préfecture de Police sous le N° 93/4513 - SIRET : 408 713 063 000 35
- Agréée par le Ministère de la Jeunesse et des Sports sous le n°75 JEP 96-68 - Agréée par le Rectorat de l’Académie de Paris – Arrêté du 10 juin 2003 –
- Adhérente à l’Union Nationale des Associations de Lutte contre le Sida - Centre Collaborateur de l'Agence Européenne pour l'Information et le Conseil des Jeunes (ERYICA) Siège Social : 42, rue Cadet - 75009 PARIS - France •
Association sans but lucratif • Non-profit-making Association
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Comparés aux autres homo(bi)sexuels, toutes choses égales par ailleurs (âge,
catégorie socio-professionnelle6, niveau éducatif, région, structure familiale monoparentale
ou non, etc.), les victimes d’abus sexuels dans l’enfance consomment significativement
plus certaines substances psychoactives : tabac, médicaments psychotropes et drogues
illicites (cannabis, cocaïne, ecstasy, etc.).Toutefois, la fréquence de leur consommation
d’alcool dans la vie quotidienne n’est pas significativement différente, même si on trouve
une tendance dans ce sens. En revanche, presque tous (prés de 90%) ont des relations
sexuelles (et 5 fois plus souvent que les autres) dans un contexte de prise de produits
(alcool et drogues illicites dont MDMA, ketamine, GHB, etc.). [De façon générale, cette
étude met d’ailleurs en évidence chez les gays une relation très significative entre l’abus
d’alcool et/ou de psychoactifs illicites dans un contexte sexuel et le fait de ne pas se
protéger avec un partenaire de rencontre (utilisation deux fois moindre du préservatif
dans ces circonstances)]
D’autre part, les homosexuels abusés dans l’enfance ont plus de 2 fois plus de
partenaires que les autres, 3 fois moins souvent un partenaire stable et sont 2 sur 3
à ne pas utiliser de préservatifs avec un partenaire à risque inconnu (2 fois plus que
les autres). Par ailleurs, ils font 4 fois plus de tentatives de suicide que ceux qui n’ont
pas été victimes d’abus sexuels dans l’enfance et ont significativement plus d’accidents de
la voie publique. Enfin, ils souffrent plus souvent de troubles du comportement alimentaire
(anorexie ou boulimie avec ou sans vomissements).
A noter que les résultats convergents d’études nord-américaines menées auprès
d’hétérosexuels (des 2 sexes) victimes d’abus sexuel dans l’enfance révèlent des conduites
à risque toute à fait comparables. Toutefois ceux-ci sont actuellement
épidémiologiquement moins exposés au VIH/Sida.
6
L’abus sexuel dit précoce (avant la puberté), généralement intrafamilial ou perpétré par un proche de
l’enfant (dans 3 cas sur 4 dans cette étude) est un phénomène trans-social. L’abuseur, ayant un
comportement pédophile, s’identifie lui-même le plus souvent comme hétérosexuel.
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50, avenue Claude Vellefaux– 75010 PARIS - FRANCE – Tél. 33 1 47 70 07 70 – Fax 33 1 47 70 07 12 – E-mail: [email protected]
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- Agréée par le Ministère de la Jeunesse et des Sports sous le n°75 JEP 96-68 - Agréée par le Rectorat de l’Académie de Paris – Arrêté du 10 juin 2003 –
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Sans doute, la souffrance psychique entraînée à l’âge adulte par ce type de
psychotraumatisme précoce pourrait constituer chez certains homosexuels et bisexuels
l’un des ressorts intimes de prises de risque répétées, « passages à l’acte » (sous-tendus
par la consommation de produits), probablement accomplis de façon non consciente, - et
s’inscrivant dans un contexte de dépressivité masquée et de dégradation de l’estime de soi
-, susceptibles d’être appréhendés comme autant de violences envers soi-même et autrui.
Dans bon nombre de cas, la compulsivité sexuelle (étroitement associée à l’abus de
psychoactifs) classiquement observable chez une forte minorité de gays pourrait sans
doute, au moins en partie, s’expliquer.
Cette proportion d’une personne sur cinq abusée dans son enfance parmi les
homo/bisexuels masculins « tout-venant » est probablement sous-estimée car sousdéclarée, l’abus sexuel étant fréquemment objet d’amnésie ou de déni. D’autre part, elle
est vraisemblablement beaucoup plus élevée chez ceux qui fréquentent les lieux de
sexe anonyme, les sites de rencontre sur Internet, etc. ainsi que chez les personnes
contaminées (dont on sait que la moitié n’utilisent pas de préservatifs dans un contexte de
« sexe anonyme »). De fait, dans cette étude, pourtant réalisée sur un échantillon
tout-venant (hors lieux de sexe anonyme), une personne sur trois ne se protégeant
pas avec un partenaire à risque inconnu déclare avoir été abusée dans l’enfance. Cette
proportion considérable fait par conséquent de l’abus sexuel dit «précoce» un facteur de
vulnérabilité majeur vis-à-vis du risque de contamination par le VIH/Sida et permet
d’identifier un sous-groupe de personnes surexposées (au moins un tiers de la population
gay dite à «haut risque») qui devraient faire l’objet de stratégies d’intervention
spécifiquement ciblées.
D’ordinaire ignorée, négligée ou occultée, cette problématique de l’abus sexuel
précoce chez les gays acquiert ainsi une réelle dimension de santé publique et pourrait
constituer dès à présent un enjeu majeur pour la prévention et la réduction des risques.
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Ces données inédites jettent en effet une lumière particulière sur les
«défaillances» de la prévention – ou plutôt les «résistances» – observables chez
certains gays. Elles seront utiles à l’ensemble des acteurs de prévention et en particulier
aux professionnels des CDAG : de fait, le repérage précoce de ce psychotraumatisme réel
et l’incitation à une prise en charge des personnes concernées dans le cadre d’un suivi
psychothérapique spécifique, ou encore au sein de groupes de parole anonymes réunissant
des personnes abusées, paraît contribuer, l’expérience clinique le suggère fortement, à
réduire la souffrance psychique sous-tendant leurs conduites à risque et, en aval, à limiter
celles-ci.
Dans l’attente d’un financement, cette enquête exploratoire devrait se poursuivre
afin d’identifier certains déterminants complémentaires et de préciser encore d’autres
facteurs utiles aux différents acteurs de prévention et de soin. Elle est réalisée sur
ordinateur, ce qui permet d’augmenter le taux de confidence s’agissant des questions
«sensibles» (sexualité, usage de produits, tentatives de suicide, etc.) et par l’intermédiaire
d’un logiciel spécialement conçu – « Prévention à la carte »7 – qui délivre des messages
ciblés en fonction des réponses et oriente, le cas échéant, vers des permanences
téléphoniques anonymes spécialisées ou des lieux ressource.
L’analyse statistique des données anonymes recueillies8 a été réalisée par David
Moreau, ingénieur de recherche à l’association AREMEDIA et les résultats validés par
Pascale Tubert-Bitter, directrice de recherche à l’unité Biostatistique et Epidémiologie de
l’INSERM. Les Prs Sylvain Dally (Service de Médecine Interne à orientation toxicologique)
et Dominique Bertrand (Service de Santé Publique) de l’Hôpital Fernand-Widal (AP-HP) ont
également participés à ce travail. S’y sont également associées Vesna Novak (Ass.. AREVI) et
Dorothée Dussy (anthropologue, CNRS).
Contact : Marc Shelly au 06 84 83 40 76 ou 01 40 05 42 01/41 92
7
validé par la Commission Nationale de la Mission Interministérielle de la Drogue et des Toxicomanies
(MILDT), ce dispositif interactif original – développé par l’association Aremedia avec le soutien de la
Commission Européenne - a d’autre part été jugé pertinent par l’Observatoire Français des Drogues et
Toxicomanies (OFDT) ainsi que l’ Observatoire Européen de la Drogue et des Addictions (EMCDDA), à la fois
en tant qu’outil de prévention personnalisée et d’investigation épidémiologique.
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après avis favorable de la CNIL
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