Évaluation et dépistage des troubles de la
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Évaluation et dépistage des troubles de la
NPG Neurologie - Psychiatrie - Gériatrie (2013) 13, 107—116 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com PRATIQUE CLINIQUE Évaluation et dépistage des troubles de la déglutition en gériatrie Assessment and screening of deglutition disorders in geriatric patients A. Forster a,∗, N. Samaras a, G. Notaridis a, P. Morel a, J. Hua-Stolz a, D. Samaras b a Département de médecine interne, réhabilitation et gériatrie, hôpital des Trois Chêne, hôpitaux universitaires de Genève, 3, chemin du Pont-Bochet, 1226 Thônex, Genève, Suisse b Service d’endocrinologie, diabétologie et nutrition, département des spécialités médicales, hôpitaux universitaires de Genève, rue Gabriel-Perret-Gentil 4, 1211 Genève, Suisse Disponible sur Internet le 4 décembre 2012 MOTS CLÉS Troubles de la déglutition ; Dysphagie ; Dépistage ; Évaluation KEYWORDS Deglutition disorders; Dysphagia; Screening; Evaluation ∗ Résumé Les troubles de la déglutition peuvent être causés par de nombreuses pathologies neurologiques, œsophagiennes, oto-rhino-laryngologiques (ORL) ou encore être d’origine iatrogène. Leur présentation clinique est souvent insidieuse et peu spécifique, contribuant ainsi à une probable sous-estimation de leur prévalence. En pratique gériatrique, les conséquences de la dysphagie sont loin d’être négligeables avec un risque de déshydratation, de malnutrition et surtout de complications infectieuses respiratoires. Souvent négligés, les troubles de la déglutition justifient donc toute l’attention du praticien : leur identification précoce permet de fixer des objectifs thérapeutiques spécifiques pour chaque patient et de proposer une prise en charge multidisciplinaire individualisée et adaptée. © 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Summary Deglutition disorders can be caused by different diseases, including neurological, oesophageal, oto-rhino-laryngological etiologies or by iatrogenicity. Clinical presentation is often insidious and unspecific; therefore their prevalence is probably underestimated. In geriatric patients, consequences of dysphagia are well known, including dehydration, malnutrition and infectious respiratory complications. As deglutition disorders are often neglected, an early identification is important in order to determine therapeutic objectives for each patient and to propose a multidisciplinary individualized intervention. © 2012 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (A. Forster). 1627-4830/$ — see front matter © 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.npg.2012.10.005 108 A. Forster et al. Introduction Chaque individu déglutit environ 1000 fois par jour. La déglutition, phénomène physiologique simple en apparence, est un processus sensitivomoteur semi-réflexe complexe et parfaitement coordonné, qui permet le passage sécurisé et rapide d’un matériel donné de la bouche vers l’estomac. Les troubles de la déglutition ou dysphagie sont définis par des difficultés ou l’impossibilité d’avaler des liquides, des solides ou des médicaments. Le processus de déglutition peut être affecté par de nombreux facteurs. Plus particulièrement chez le sujet âgé, le nombre de comorbidités [1] et la multiplicité des médicaments et des prises médicamenteuses [2] augmentent l’incidence des troubles de la déglutition dans cette population. Les conséquences sont en termes de sécurité un risque accru de fausse route et de bronchopneumonies, et en termes d’efficacité un risque de déshydratation et/ou de dénutrition. Les troubles de la déglutition sont une pathologie fréquente, probablement sous-estimée et sous-diagnostiquée dans la population gériatrique [3]. Leur prévalence dépend du type de population considérée mais également du type de méthode utilisée pour assurer leur diagnostic ou leur dépistage. Ainsi dans une évaluation par autoquestionnaire auprès d’une population de personnes âgées de plus de 65 ans et vivant de façon indépendante à domicile aux États-Unis, 15 % des sujets rapportent des difficultés à la déglutition. Vingt-trois pour cent de ces sujets considèrent même que les troubles de la déglutition font partie du vieillissement normal [4]. Dans une autre étude réalisée sur une population similaire, 37 % des sujets rapportent des troubles de la déglutition survenus ponctuellement durant leur vie et 32 % signalent des difficultés au moment de l’enquête [5]. Une étude espagnole prospective utilisant un test de déglutition avec différentes consistances dans une population ambulatoire, a identifié 27 % de sujets avec des signes de dysphagie oropharyngée, en particulier, les sujets âgés de 80 ans et plus. La dépendance fonctionnelle (index de Barthel), la prise de benzodiazépines, une vitesse de marche faible, la dépression et les affections neurodégénératives étaient statistiquement associées à la dysphagie dans cette étude [6]. Au Japon, 13,8 % des sujets de plus de 65 ans à domicile rapportent des symptômes en rapport avec la dysphagie [7]. Pour les patients en soins de longue durée, une large étude taiwanaise a objectivé des troubles de la déglutition chez 51 % des sujets. La méthode d’évaluation combinait un autoquestionnaire, un examen clinique neurologique et un test de déglutition [8]. En service de court séjour, la prévalence des troubles de la déglutition est principalement estimée à partir des données du PMSI. Aux États-Unis, à partir des données de 473 centres hospitaliers (National Hospital Discharge Survey [NHDS]), l’incidence s’élevait à 40,6 % quel que soit l’âge des patients et à 73 % après 75 ans. La présence d’une dysphagie était associée à une augmentation de 40 % de la durée de séjour et à un risque relatif de décès de 13,7 (IC 95 % 3,5—54,5), ajusté pour le sexe et pour l’âge [9]. La prévalence de la dysphagie dans la population gériatrique est donc loin d’être négligeable. Cette affection Figure 1. Schéma simplifié du carrefour aérodigestif et des trois principales étapes de la déglutition, à savoir la phase orale (1), la phase pharyngée (2) et la phase œsophagienne (3). mérite d’être connue et identifiée par le praticien au vu des complications potentielles en termes de morbidité et de mortalité. Physiologie de la déglutition normale Pour des raisons didactiques, on distingue schématiquement trois phases pendant la déglutition, orale, pharyngée et œsophagienne, qui peuvent être chacune perturbées par de multiples pathologies ou prises médicamenteuses et ainsi occasionner des troubles de la déglutition. La déglutition est un processus complexe rapide, en partie volontaire et en partie réflexe, faisant intervenir différents composants sensitifs, moteurs et psychologiques. Différentes aires corticales, en particulier l’opercule frontopariétal et l’insula, ainsi que le tronc cérébral par l’intermédiaire de plusieurs nerfs crâniens (V, VII, IX, X, XII) permettent le contrôle de la déglutition [10]. Comme mentionné plus haut, trois phases sont distinguées pendant la déglutition normale (Fig. 1). Phase orale Cette phase peut être elle-même séparée en deux périodes. Durant la phase orale préparatoire, l’aliment arrive dans la cavité buccale, où il est mastiqué, réduit en taille et assoupli en consistance s’il est solide ou semi-solide, et mélangé à la salive. La pâte ainsi obtenue forme le bol alimentaire. L’abaissement du palais mou contre la base de la langue évite l’entrée de matériel dans le pharynx avant le déclenchement de la déglutition. Cette phase préparatoire est de durée variable et volontaire. Pendant la phase orale de transport, le bol alimentaire prêt à être dégluti est placé sur la pointe de la langue. La formation d’un sillon médian et l’élévation de la langue permettent de propulser le bolus vers l’oropharynx. La base de la langue s’abaisse et le palais mou commence à s’élever. Les mouvements de la langue stimulent des récepteurs oropharyngés qui vont déclencher le réflexe de déglutition pharyngé. De nombreux récepteurs sensitifs au niveau de la muqueuse buccale, de la mâchoire Évaluation et dépistage des troubles de la déglutition en gériatrie et des muscles masticateurs permettent d’adapter la force de mastication et de la langue à la consistance du bolus [11]. Phase pharyngée La phase pharyngée est réflexe et ne peut pas être interrompue une fois déclenchée. Le mécanisme exact de déclenchement (triggering) de cette phase n’est pas précisément connu mais fait probablement intervenir des stimuli sensitifs et sensoriels, comme le goût, le contact, la pression et la température [11]. Certains stimuli, comme une substance acide, peuvent déclencher un réflexe de toux au lieu d’une déglutition. La phase pharyngée est la plus compliquée et la plus critique : plusieurs phénomènes synchrones interviennent. L’élévation du palais mou permet la fermeture vélopharyngée et évite ainsi tout reflux du bolus vers le nasopharynx. La base de la langue se rapproche de la paroi pharyngée postérieure et participe à la propulsion du bolus. L’os hyoïde s’élève et avance en même temps que l’épiglotte s’abaisse pour protéger les voies aériennes inférieures [12]. Lorsque la musculature pharyngée commence sa relaxation, le sphincter supérieur de l’œsophage (SSO) s’ouvre, permettant le passage du bolus vers l’œsophage. Phase œsophagienne Elle débute après la fermeture du SSO et se termine par l’arrivée du bolus dans l’estomac. Le péristaltisme œsophagien comprend une première phase déclenchée pendant la déglutition par des récepteurs de la paroi pharyngée postérieure. La seconde phase péristaltique est enclenchée par l’arrivée du bolus et la dilatation de l’œsophage. Les troubles de la déglutition Troubles de la déglutition liés au vieillissement physiologique Différentes modifications surviennent avec l’âge même chez le sujet sain, ayant conduit au concept de « presbyphagie ». La sensibilité au niveau pharyngé et laryngé diminue avec l’âge et le seuil de déclenchement du réflexe pharyngé devient plus long à atteindre [13—15]. Chez des sujets âgés sains, la phase oropharyngée s’allonge, la phase pharyngée réflexe est plus tardive et le risque de résidus pharyngés augmenté. Le SSO s’ouvre plus lentement et avec une moindre amplitude. Parallèlement, les sujets âgés présentent souvent une diminution de la sensibilité gustative et des odeurs, mais également une tendance accrue à la sécheresse buccale et aux problèmes buccodentaires. Causes de troubles de la déglutition liées aux pathologies De multiples pathologies peuvent être à l’origine de troubles de la déglutition. Pour des raisons didactiques, nous distinguerons les causes neurologiques, oto-rhinolaryngologiques (ORL) et œsophagiennes. Nous citerons 109 ensuite les principales causes iatrogènes et des causes plus rares de troubles de la déglutition. Causes neurologiques Les accidents cérébraux vasculaires Les accidents cérébraux vasculaires (AVC) représentent une cause importante de dysphagie, en particulier, lorsqu’ils touchent le tronc cérébral ou les aires corticales impliqués dans la déglutition. En particulier, une atteinte de l’opercule frontopariétal, de l’insula ou des noyaux des nerfs crâniens impliqués (V, VII, IX, X, XII) sur le tronc cérébral peut être la cause de troubles de la dysphagie. L’incidence des troubles de la déglutition à la phase aiguë varie entre 25 et 81 % selon les études [16,17] et peut atteindre 11 à 50 % chez les survivants à six mois [17,18]. Ces variations importantes d’incidence s’expliquent principalement par le type de méthodes diagnostiques utilisées, les techniques instrumentales (vidéofluoroscopie [VFS] ou endoscopie flexible par voie nasale) s’avérant être les plus sensibles, comparées à des méthodes cliniques ou à des techniques de dépistage au lit du malade [16]. À la phase aiguë d’un AVC, la présence d’une dysphagie est associée avec une mortalité accrue, une durée de séjour plus longue [19], une moindre récupération fonctionnelle et un risque accru d’institutionnalisation [20]. Dans une étude de cohorte rétrospective récente, l’évaluation de la déglutition à la phase initiale d’un AVC était associée de façon indépendante avec un meilleur pronostic en termes de mortalité intra-hospitalière et d’admission en institution [21]. La maladie de Parkinson La prévalence de la dysphagie dans la maladie de Parkinson varie entre 30 % et plus de 80 % selon les études et le type de méthode diagnostique utilisée [22]. Les troubles de la déglutition peuvent survenir très tôt dans l’évolution de la maladie, voire même précéder l’apparition des autres signes moteurs classiques [23,24]. Leur présence n’est donc pas forcément un signe de progression de la maladie. La rigidité, la bradykinésie et un tremblement de la langue ou de la musculature orale peuvent allonger la phase orale. Des résidus alimentaires buccaux et une accumulation de salive au niveau de la bouche perturbent également la déglutition. Ces modifications augmentent le risque d’aspiration et de broncho-pneumonie [22]. Les conséquences psychosociales de la dysphagie, en particulier sur la qualité de vie, sont d’autant plus marquées que les troubles de la déglutition sont sévères [25]. Une dysfonction œsophagienne peut également affecter la déglutition. Les patients parkinsoniens sont à risque majeur d’aspiration et de bronchopneumonie, cette dernière ayant été confirmée comme facteur prédictif indépendant de mortalité dans une population de parkinsoniens vivant en institution [26]. D’autres syndromes extrapyramidaux, comme la paralysie supranucléaire progressive, la dégénérescence corticobasale, la démence à corps de Lewy, l’atrophie multisystémique, beaucoup plus rares, peuvent entraîner des troubles de la déglutition. 110 Les démences Toutes les types de démences peuvent s’accompagner de troubles de la déglutition, en particulier en fin d’évolution de la maladie, et sont alors souvent aggravés par des troubles de l’attention, de la concentration et des problèmes praxiques. Une étude récente par VFS a montré que différentes phases de la déglutition pouvaient être affectées selon le type de démence considéré. Les patients avec démence de type Alzheimer présentent un allongement du transit oral pour les liquides, tandis que les patients atteints de démence vasculaire ont des difficultés pour la mastication et la formation du bolus, mais aussi un risque accru d’aspiration silencieuse et d’inversion épiglottique [27]. En neuro-imagerie fonctionnelle, le contrôle cortical de la déglutition est modifié précocement chez les patients Alzheimer, bien avant l’apparition de manifestations cliniques. Ces patients activent moins d’aires corticales lors de la déglutition, sans possibilité de compensation par d’autres aires associées [28]. La sclérose latérale amyotrophique (SLA) Cette pathologie plutôt rare en gériatrie, peut se traduire par des symptômes bulbaires chez près de 30 % des patients au stade de début. Les troubles de la déglutition et la dysarthrie deviennent quasiment inéluctables au cours de l’évolution de la maladie [29]. La dysphagie peut résulter d’une faiblesse ou d’une spasticité des différents muscles impliqués dans la déglutition. La dysphagie affecte les prises alimentaires avec un risque de malnutrition, inhalation et bronchopneumonie. La malnutrition est un facteur de risque indépendant de décès dans la SLA [30,31] et le dépistage et la prise en charge des troubles de la déglutition est un enjeu majeur dans l’approche thérapeutique des patients atteints de SLA. Causes rares de troubles de la déglutition Citons enfin des causes plus rares de troubles de la déglutition chez la personne âgée, comme des tumeurs, d’autres affections neuro-dégénératives telle que la maladie de Huntington, la paralysie faciale a frigore, des atteintes infectieuses (encéphalites, syndrome post-poliomyélite, VIH, neuroborréliose) ou inflammatoires (sclérose en plaques, syndrome de Guillain Barré). Causes oto-rhino-laryngologiques (ORL) Parmi les principales causes ORL, on retient les causes tumorales quelle que soit leur localisation sur le tractus oropharyngé, mais aussi les séquelles ou conséquences d’anciennes interventions thérapeutiques (chirurgie, radiothérapie, curage ganglionnaire). Un certain nombre de gestes thérapeutiques ou diagnostiques, comme une trachéotomie, une intubation, la mise en place d’une sonde nasogastrique, une chirurgie (ORL, endartériectomie carotidienne, cure d’une sténose du canal rachidien cervical) ou des séances de radiothérapie au niveau de la région cervicale et buccale peuvent se compliquer par des lésions du nerf vague, du nerf récurrent ou hypoglosse [32,33] même tardives, et ainsi causer des troubles de la déglutition. Causes œsophagiennes Différentes pathologies peuvent affecter le fonctionnement normal de la motilité œsophagienne : l’achalasie, A. Forster et al. les spasmes œsophagiens, le reflux gastro-œsophagien ou encore la sclérodermie. On peut observer des diverticules œsophagiens (Zenker ou épiphréniques) ou la présence d’une sténose œsophagienne. Celle-ci peut être d’origine peptique, post-traitement endoscopique (laser, sclérose de varices), radique ou caustique, liée à des malformations de type anneau, diaphragme ou encore dans le cadre d’un syndrome de Plummer-Vinson. Citons enfin les causes tumorales pouvant être responsables d’une compression intrinsèque ou extrinsèque et les atteintes inflammatoires de type œsophagite. Causes iatrogènes Les médicaments peuvent directement causer des troubles de la déglutition ou aggraver une dysphagie sous-jacente et cela par différents mécanismes [34]. Certains médicaments engendrent un effet sédatif ou une dépression du système nerveux central. C’est le cas de tous les psychotropes, comme les antidépresseurs, les anxiolytiques, les antipsychotiques, les agents hypnotiques et/ou sédatifs et les antiépileptiques dans une moindre mesure. Un blocage de la jonction neuromusculaire, en particulier dans les cas de myasthénie, peut être causé par certains antibiotiques (aminoglycosides, érythromycine), la toxine botulique ou la pénicillamine. Les corticostéroïdes, la colchicine ou les agents hypolipémiants peuvent entraîner un effet musculaire de type myopathie ou myosite. L’effet antidopaminergique de certains neuroleptiques, antiémétiques (métoclopramide) ou antiparkinsoniens se manifeste par des effets extrapyramidaux et des dyskinésies, entre autre au niveau buccofacial et peut ainsi causer des troubles de la déglutition. Tous les médicaments à effet anticholinergique — citons entre autres les antidépresseurs tricycliques, les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine, les antiparkinsoniens, les alphabloquants — sont source d’hyposialorrhée et de xérostomie. L’utilisation d’opiacés, d’agents rétinoïdes ou encore de bronchodilatateurs inhalés peut également occasionner une xérostomie. L’irritation de la muqueuse œsophagienne est une autre cause de dysphagie [35], en particulier chez les patients âgés rencontrant des difficultés pour assurer la prise correcte de certains médicaments, comme les biphosphonates per os. Les AINS, les tétracyclines et les préparations de chlorure de potassium per os sont également potentiellement responsables de cet effet. Causes rares La présence d’ostéophytes cervicaux ventraux a été décrite comme cause inhabituelle de dysphagie [36]. Il convient de mentionner les pathologies neuromusculaires comme la myasthénie, les myopathies inflammatoires, telles que les polyomyosites ou les dermatomyosites, les myopathies d’origine toxique ou métabolique (thyrotoxicose) et certains syndromes paranéoplasiques. Évaluation et dépistage des troubles de la déglutition en gériatrie 111 Certaines pathologies infectieuses (diphtérie, botulisme, maladie de Lyme, syphilis, herpès) ou encore métaboliques (amyloïdose, maladie de Wilson, hypercorticisme) sont des causes exceptionnelles de dysphagie en gériatrie. de procéder à une évaluation clinique au lit du malade ou à des examens complémentaires, qui seront détaillés plus loin. Complications des troubles de la déglutition Que rechercher à l’anamnèse ? Deux aspects importants de la dysphagie doivent être considérés : l’efficacité et la sécurité de la déglutition. L’efficacité de la déglutition peut être altérée avec des apports oraux insuffisants et donc un risque de déshydratation et de malnutrition. La relation entre malnutrition et troubles de la déglutition a été principalement décrite dans des populations bien spécifiques, comme chez les patients avec AVC ou maladie de Parkinson. En soins de longue durée, une étude finlandaise a montré une association significative entre la malnutrition et les troubles de la déglutition (OR 3,03) [37]. À la phase initiale d’un AVC, Smithard et al. ont montré que la présence initiale de troubles de la déglutition était associée significativement avec le risque d’institutionnalisation à trois mois et la mortalité précoce pendant les trois premiers mois [20]. Dans une population de patients tout venant de plus de 70 ans vivant à domicile, les patients dysphagiques présentaient une prévalence significativement plus importante de situations de malnutrition ou à risque de malnutrition (évaluée par le mini-nutritional-assessment [MNA]) [38]. L’identification précoce des troubles de la déglutition est donc essentielle pour prévenir les complications sur le plan nutritionnel de la dysphagie. La sécurité de la déglutition est un autre aspect important à considérer. L’incidence des bronchopneumonies d’aspiration augmente avec l’âge, concernant près de 10 % des patients vivant à domicile admis à l’hôpital pour ce motif et plus de 30 % pour les patients vivant en institution [39]. La présence d’aspirations à la VFS est un facteur prédictif de pneumonie et de mortalité dans les suites d’un AVC [40]. Dans une étude de cohorte prospective récente, la prévalence de la dysphagie oropharyngée chez des patients âgés de plus de 70 ans admis en court séjour gériatrique pour pneumonie, était de 55 %. Les patients avec des signes de dysphagie présentaient une dépendance fonctionnelle plus marquée, un âge plus important, une prévalence plus élevée de malnutrition et de comorbidités et surtout une mortalité accrue à 30 jours [41]. Les conséquences infectieuses des fausses routes au plan respiratoire sont donc majeures en termes de morbidité et de mortalité. Comme dans toute évaluation gériatrique, il convient de préciser les antécédents et diagnostics actuels du patient, plus particulièrement neurologiques, ORL ou œsophagiens. L’interrogatoire détaille les plaintes subjectives en rapport avec la déglutition (salive, douleurs à la déglutition, sensation de blocage. . .), les traitements médicamenteux en cours, le contexte social (entourage, aidant présent lors de la prise des médicaments ou des repas) et le type d’alimentation utilisé habituellement (difficultés pour certaines consistances ou textures). Il est important de retenir que les signes cliniques de la dysphagie varient beaucoup d’un patient à l’autre et peuvent fluctuer au cours du temps chez un même sujet. De plus, les patients signalent rarement les troubles de la déglutition, les considérant comme « normaux » [4], surtout si leur installation est progressive et insidieuse. Une anamnèse soigneuse et répétée au besoin, auprès du patient mais aussi des aidants présents lors des prises médicamenteuses et/ou de repas, est donc indispensable pour dépister des troubles de la déglutition. Au besoin, une observation du patient pendant un repas ou lors d’une tentative de déglutition pourra compléter le bilan. En dehors de la situation d’urgence d’une bronchoaspiration sur fausse route évidente, les signes évocateurs de dysphagie sont souvent peu spécifiques. La régurgitation d’aliments ou de liquides peut se faire par la bouche (insuffisance de fermeture labiale par exemple, « drooling » en anglais) ou par le nez. Lorsque le patient ne peut pas garder le bolus alimentaire suffisamment longtemps en bouche, celui-ci peut glisser dans l’oropharynx de façon prématurée avant le déclenchement du réflexe de déglutition « leaking ». Des résidus alimentaires peuvent persister dans la bouche après la déglutition « retention » et le bolus déjà dégluti peut parfois régurgiter de l’œsophage vers la bouche « regurgitation ». La durée du repas ou de la mastication peut être prolongée et une modification de la voix (voix mouillée) peut survenir pendant la déglutition. D’autres signes moins spécifiques peuvent témoigner de troubles de la déglutition sous-jacents, comme des modifications de la respiration ou une toux pendant les repas, la réduction ou un refus des prises alimentaires, une modification progressive dans le type de texture acceptée par le patient, des infections pulmonaires à répétition, des pics fébriles ou un amaigrissement inexpliqués [42,43]. L’efficacité de ce dépistage clinique reste néanmoins limitée. Dans une population de patients avec AVC, moins de 50 % des mesures présentaient un accord inter- et intrajuge suffisant pour prédire le risque d’aspiration en se basant uniquement sur des données d’anamnèse ou de l’examen clinique réalisé par une orthophoniste [44]. La sensibilité et la spécificité des données cliniques pour prédire le risque d’aspiration dans une population similaire de patients âgés s’élève à respectivement 78 % et 58 % [43]. Les troubles de la déglutition : leur évaluation au quotidien L’évaluation d’un patient présentant des troubles de la déglutition ou à risque implique un certain nombre d’étapes fondamentales. En dehors de la situation de fausse route cliniquement évidente entraînant une broncho-aspiration directement objectivée par le soignant, leur reconnaissance n’est pas toujours aisée. Une anamnèse et un examen clinique soigneux constituent un préalable indispensable avant 112 Quel examen clinique ? En dehors de l’examen clinique général et du calcul de l’indice de masse corporelle (IMC), l’examen du patient dysphagique comprend un examen complet neurologique et ORL, en particulier de la région oropharyngée et cervicale. La musculature et la sensibilité de la région orofaciale et linguale sont appréciées, avec une évaluation visuelle et tactile des différentes structures accessibles. L’examen clinique apprécie également le réflexe de toux, la voix, l’élocution, la production et la déglutition de salive, l’état buccodentaire et la respiration au repos. L’état cognitif du patient permettra de définir quels types d’examens complémentaires il est capable de faire, un certain nombre nécessitant une coopération active de la part du patient et de pouvoir répondre à des ordres simples, comme la VFS. Il appartient donc au clinicien d’identifier les patients susceptibles de profiter d’un bilan diagnostique et thérapeutique plus approfondi en fonction du contexte clinique et des objectifs thérapeutiques propres à chaque patient. Comment tester la déglutition ? Différentes méthodes d’évaluation sont à disposition pour dépister et quantifier les troubles de la déglutition. Les tests de dépistage clinique au lit du malade sont nombreux et variés. La plupart d’entre eux ont été validés dans des populations bien spécifiques, comme les patients avec AVC [45—47] ou dans les suites d’une chirurgie ORL [48—50]. La comparaison entre ces différents tests est rendue difficile par la variabilité dans le type de test, de protocoles et de critères de positivité. De plus, ces tests ont rarement été validés chez des patients gériatriques. Ils sont néanmoins faciles et rapides à mettre en œuvre et nécessitent peu de moyens même si leur efficacité reste discutée [51]. Certains tests nécessitent de faire déglutir au patient un volume prédéterminé de liquide, en général de l’eau. Un des plus connu, le test à l’eau (water-swallow-test) a été décliné en plusieurs versions selon le volume de liquide administré [52]. L’examinateur note la présence de signes suspects d’aspiration, comme une toux, une voix « mouillée » immédiatement ou dans la minute suivant la déglutition. Lorsque les données de ces tests sont confrontées à une VFS, 20 à 40 % des aspirations ne sont pas détectées [51]. Plusieurs auteurs ont donc modifié ce test à l’eau en y ajoutant des échelles d’observation clinique ou en se basant sur des données quantitatives (durée de la déglutition) ou encore en utilisant différentes consistances, pour augmenter la sensibilité et la spécificité du test [51]. Des auteurs espagnols ont récemment validé un test combinant divers volumes et consistances dans un groupe de patients dysphagiques dont près de la moitié âgé de 75 ans en moyenne. Ce test dépiste plus spécifiquement la dysphagie oropharyngée et utilise des volumes croissants (5 mL, 10 mL et 20 mL) avec trois consistances différentes (liquide, nectar et pudding). Il est réalisé par une soignante spécifiquement formée, qui note la présence de régurgitations nasales ou labiales, la présence de résidus oraux ou pharyngés, la nécessité de déglutir à plusieurs reprises pour un A. Forster et al. même bolus, une baisse de la saturation en oxygène de plus de 3 % à l’oxymétrie de pouls, une toux ou une modification de la voix pendant le test [52]. Ce test confronté à une VFS a montré une sensibilité et une spécificité de respectivement 83,7 % et 64,7 % pour détecter la pénétration laryngée du bolus, et de respectivement 100 % et 28,8 % pour prédire une aspiration [53]. Dans l’intervalle, les auteurs ont utilisé ce test dans une population de personnes âgées de plus de 70 ans et vivant à domicile de façon indépendante. Ils ont noté une prévalence des troubles de la déglutition de l’ordre de 27,2 % et de 33 % chez les plus de 80 ans [6]. Quel est l’apport des examens complémentaires ? La vidéofluoroscopie La VFS représente pour de nombreux auteurs un goldstandard dans l’étude de la déglutition. Cet examen permet une analyse dynamique en temps réel des différentes phases de la déglutition, le patient avalant un produit de contraste à base de baryte. Il nécessite une vigilance suffisante de la part du patient et une position assise ou debout. Une pathologie psychiatrique ou des troubles cognitifs sévères peuvent gêner la réalisation de la VFS si le patient ne peut pas suivre des consignes simples [54]. Cet examen permet de confirmer la présence d’aspiration ou de pénétration et d’apprécier l’influence de différentes consistances de bolus ou encore de postures pendant la déglutition [55]. L’utilisation répétée de cet examen est limitée par l’irradiation. L’endoscopie flexible par voie nasale L’endoscopie flexible par voie nasale (Flexible Endoscopic Evaluation of Swallowing [FEES]) permet après passage par la narine et le cornet moyen ou inférieur chez un patient en position assise, une visualisation directe du nasopharynx, du pharynx et du larynx [56—58]. Cet examen comporte peu de risques [59], principalement des épistaxis, et l’examinateur peut communiquer avec le patient et lui faire exécuter un certain nombre de manœuvres. L’examen comprend en général une observation au repos en étudiant la position des cordes vocales et des structures adjacentes, en recherchant des résidus alimentaires ou une stase salivaire. Une déglutition « à sec » (bouche vide) est alors effectuée pour vérifier la fermeture vélopharyngée, la mobilité des cordes vocales à la respiration et en phonation, la réaction du patient lors d’un contact de l’endoscope avec l’épiglotte ou les replis ary-épiglottiques. Enfin, un essai de déglutition avec du matériel est réalisé, permettant de confirmer une éventuelle aspiration/pénétration. La probabilité de détection peut être augmentée par l’utilisation de différentes consistances et volumes au cours de l’examen [60]. Une étude prospective randomisée comparant l’endoscopie flexible et la VFS a montré une équivalence pour la prévention de bronchopneumonies entre ces deux examens [61]. Dans un autre travail prospectif, les auteurs constataient un accord complet entre les deux examens dans 51,8 %, un accord partiel dans 13 % des cas et un désaccord majeur dans 35 %, soulignant ainsi le fait Évaluation et dépistage des troubles de la déglutition en gériatrie que ces deux procédures ne fournissent probablement pas le même type d’information [62]. La sévérité des pénétrations/aspirations, ainsi que la présence de résidus pharyngés est probablement surestimée avec la FEES en comparaison avec la VFS [63]. Les informations fournies par ces deux examens ne sont donc pas interchangeables mais plutôt complémentaires. La manométrie pharyngo-œsophagienne La manométrie pharyngo-œsophagienne permet de mesurer la pression pharyngée pendant la déglutition et le tonus du SSO lorsqu’un dysfonctionnement à ce niveau est suspecté à la VFS [54]. Place de l’évaluation multidisciplinaire Après dépistage de troubles de la déglutition sur la base d’observations cliniques, d’un test de dépistage ou sur des données d’anamnèse suggestives, une confirmation par une évaluation logopédique et instrumentale (VFS ou FEES) pourra être proposée au patient. Une évaluation globale et coordonnée par une équipe multidisciplinaire, incluant infirmière, aide-soignante, diététicienne, orthophoniste, ergothérapeute, psychomotricien, gériatre et radiologue permet de proposer une prise en charge adaptée et individualisée. En cas de besoin et selon l’étiologie sousjacente à la dysphagie, l’avis d’un gastro-entérologue, d’un oncologue, neurologue ou otorhinolaryngologiste pourra compléter cette évaluation. Cette évaluation multidisciplinaire permettra de proposer des interventions ciblées et de fixer des objectifs thérapeutiques pour chaque patient en tenant compte de ses demandes et souhaits. Partant du constat que les troubles de la déglutition sont probablement sous-estimés et rarement signalés par les patients hospitalisés en gériatrie, nous avons voulu déterminer la prévalence des troubles de la déglutition en utilisant différentes méthodes. Pour ce faire, nous avons réalisé une étude observationnelle transversale auprès d’une population de patients non sélectionnés hospitalisés en service de gériatrie et dont les résultats sont en cours de publication. Nous avons exclus initialement les patients avec sonde nasogastrique, alimentation entérale, des troubles de la vigilance et des troubles cognitifs trop sévères pour pouvoir répondre à un questionnaire simple. Les aides-soignantes distribuant les repas et aidant le cas échéant à la prise de repas ont été interrogées en fin de repas pour savoir quels patients présentaient des troubles de la déglutition. Pendant le même repas, deux diététiciennes spécifiquement formées ont observé tous les patients prenant leur repas en salle à manger ou en chambre et ont complété un formulaire d’observation pour chaque patient. À la fin du repas, la diététicienne pouvait ainsi identifier des patients à risque ou fortement suspects de troubles de la déglutition sur la base de critères cliniques (régurgitations, voix mouillée, toux ou essoufflement pendant le repas, lenteur pour manger, fuites alimentaires par la bouche, etc.). Le type de texture et d’alimentation du patient, la présence ou non de prothèses dentaires et la notion de soif/faim à la fin du repas complétaient les observations. Parallèlement, tous les patients étaient soumis à un questionnaire simple et 113 rapide, le EAT-10 (Fig. 2), validé pour documenter la sévérité d’une dysphagie et suivre la réponse à un traitement [64]. Ce travail nous permettra donc de confronter pour chaque patient les résultats des autoquestionnaires avec les observations des aides-soignants et des diététiciennes. L’identification de patients à risque ou suspects de troubles de la déglutition en milieu hospitalier gériatrique peut donc se faire par différentes méthodes et il conviendra dans un second temps de confronter ces résultats avec une évaluation instrumentale (VFS ou endoscopie flexible par voie nasale). Que peut-on proposer comme traitement ? La prise en charge des troubles de la déglutition doit tenir compte des étiologies identifiées au cours du bilan diagnostique initial. En fonction de l’étiologie sous-jacente, un traitement spécifique pourra être proposé le cas échéant, dans le but d’éviter les complications de la dysphagie. Une première étape consiste à éduquer la famille et les aidants dans le dépistage des signes cliniques de troubles de la déglutition, ainsi que dans la supervision des patients à risque au moment de la prise des repas. Il est important d’assurer une hygiène buccodentaire régulière, d’adapter les prothèses dentaires et de traiter une éventuelle mycose associée par exemple. La revue et l’arrêt des médicaments potentiellement incriminés dans les troubles de la déglutition représentent une autre étape thérapeutique. La prise en charge comprend ensuite plusieurs volets : l’ajustement postural, l’apprentissage des manœuvres compensatoires et les modifications dans le volume et la consistance du bolus. Le positionnement adéquat du patient au moment du repas permet de réduire le risque de fausses routes. De façon générale, une position assise ou semi-assise, idéalement verticale et symétrique permet d’assurer les meilleures conditions pour la déglutition. L’environnement dans lequel le repas est pris devra être adapté en veillant à une ambiance calme sans éléments distracteurs externes et en proposant des aides techniques si besoin (rebord d’assiette, antidérapant sous l’assiette, couverts ou verres adaptés) selon les résultats de l’évaluation ergothérapeutique. Un certain nombre de manœuvres compensatoires sont possibles selon l’étiologie de la dysphagie. Elles permettent de modifier la conformation et les dimensions du carrefour aérodigestif pour limiter les risques de fausse routes selon le type de pathologie sous-jacente. Par exemple, chez les patients avec hémiplégie dans les suites d’un AVC, une rotation de la tête vers le côté paralysé pendant la déglutition ou une inclinaison vers le côté sain avant la déglutition peuvent diminuer le risque de fausse routes [65,66]. L’évaluation préalable par VFS prend ici toute sa place puisqu’elle permettra d’évaluer l’efficacité de ces postures pendant l’examen et de les adapter au cas particulier de chaque patient. L’apprentissage de certaines techniques spécifiques peut faciliter le processus de déglutition, comme la déglutition forcée, la manœuvre de Mendelsohn ou la déglutition supraglottique. Leur réalisation correcte et efficace nécessite 114 A. Forster et al. EAT – 10 : oul de dépistage de la dysphagie Instrucons : Répondez à chaque queson en écrivant le nombre de points correspondant à votre réponse dans chaque case. Dans quelle mesure les problèmes suivants vous concernent-ils ? J’ai mal en avalant J’ai perdu du poids en raison de mes difficultés pour avaler. 0 = pas de difficultés 1 2 3 4 = difficultés sévères 0 = pas de difficultés 1 2 3 4 = difficultés sévères Mes difficultés pour avaler me limitent pour prendre mes repas à l’extérieur. 0 = pas de difficultés 1 2 3 4 = difficultés sévères Le plaisir de manger est limité par mes problèmes de dégluon 0 = pas de difficultés 1 2 3 4 = difficultés sévères Avaler des liquides me demande des efforts 0 = pas de difficultés 1 2 3 4 = difficultés sévères Lorsque j’avale, la nourriture reste coincée dans ma gorge 0 = pas de difficultés 1 2 3 4 = difficultés sévères Avaler des solides me demande des efforts 0 = pas de difficultés 1 2 3 4 = difficultés sévères Je tousse quand je mange 0 = pas de difficultés 1 2 3 4 = difficultés sévères Avaler des pilules me demande des efforts 0 = pas de difficultés 1 2 3 4 = difficultés sévères Avaler est stressant 0 = pas de difficultés 1 2 3 4 = difficultés sévères Addionnez vos points et notez les ici : Si le score total du Eat-10 est supérieur ou égal à 3, vous avez peut-être des difficultés pour avaler de façon efficace et sécurisée. Nous vous recommandons d’en parler avec votre médecin. Reference: Belafsky PC, Mouadeb DA, Rees CJ, Pryor JC, Postma GN, Allen J, Leonard RJ. Validity and Reliability of the Eang Assessment Tool (EAT-10). Annals of Otology Rhinology & Laryngology 2008;117(12):919-924. Figure 2. EAT-10 : outil de dépistage de la dysphagie [64]. néanmoins une bonne compréhension et des capacités cognitives suffisantes de la part du patient. L’utilisation de stimuli sensitifs avec le bolus, comme le froid, le chaud ou le gazeux par exemple, peuvent aider la déglutition mais avec un effet souvent limité dans le temps, pour deux ou trois déglutitions successives. L’adaptation du volume et de la consistance du bolus alimentaire reste fondamentale dans un grand nombre de dysphagies. Les repas pourront être modifiés dans leur texture ou consistance afin d’adapter la taille et la viscosité du bolus, en particulier dans les dysphagies d’origine neurologique. Le choix et le passage d’une texture à l’autre (lisse, semi-liquide, mou/haché ou normale) se fera sur la base des observations au cours d’essais alimentaires en respectant un certain nombre de critères d’évaluation, comme l’absence de toux, gêne respiratoire ou encombrement bronchique pendant et après la prise alimentaire [54]. Différentes techniques de rééducation existent. Une réhabilitation basée sur un renforcement musculaire de la langue, des muscles respiratoires, des mouvements des lèvres, joues, larynx et cordes vocales permet d’améliorer la dysphagie dans les suites d’un AVC ou d’une chirurgie ORL [67]. Ici encore, des troubles cognitifs importants peuvent limiter de façon importante l’application de ces techniques en gériatrie. Lorsque toutes ces différentes interventions se sont soldées par un échec, la décision d’une alimentation entérale ou parentérale devra être considérée. L’intérêt de ce type de nutrition chez les patients porteurs d’une affection au stade terminal ou d’une démence évoluée n’a pas fait Évaluation et dépistage des troubles de la déglutition en gériatrie la preuve de son efficacité et soulève des considérations d’ordre éthique importantes [68]. Conclusion Les troubles de la déglutition sont fréquents dans la population gériatrique mais probablement sous-estimés et sous-diagnostiqués. Leur reconnaissance et leur prise en charge représente donc un enjeu majeur dans l’approche gériatrique du patient et nécessite une évaluation multidisciplinaire coordonnée et individualisée. Les observations cliniques, complétées par des évaluations instrumentales comme la VFS ou l’endoscopie flexible par voie nasale, permettent de confirmer le diagnostic, d’en préciser le mécanisme et ainsi de proposer un plan thérapeutique adapté. Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. 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