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Style(s)
Mr.
Peter Copping
Entretien Peter Copping
Par SOPHIE LEBAS DE LACHESNAY
Diplômé de la St. Martins School et du Royal College of Art de Londres,
le Britannique Peter Copping passe chez Christian Lacroix et Sonia Rykiel
avant d’intégrer l’équipe de Marc Jacobs chez Louis Vuitton, en 1995, en
qualité de directeur de la collection femme. Il rejoint la maison Nina Ricci,
comme directeur artistique cette fois, en mars 2009, avec pour volonté
de “se débarasser du style “petite fille” de la marque. Bilan.
S. L. de L. : Après une collection
capsule et deux collections au sein
de la maison Nina Ricci, quel était
le challenge majeur pour vous dans
l’interprétation de la marque ?
P. C. : La femme Nina Ricci, après
avoir potassé les archives de la maison, s’avère être très féminine, aérienne et romantique mais, aussi,
notamment dès les années 50, plus
volontaire dans des tailleurs très
structures, jupe crayon et manches
trois-quart aux couleurs vives. Le
challenge ­résidait dans le changement de tempérament de cette femme, je ne voulais plus du coté fleur
bleue et fragile...
C’est dans cette optique que j’ai
travaillé la première
collection capsule,
qui s’est confirmée
être
la
bonne
adéquation entre
mon travail et les
codes de la maison.
J’aime l’idée de
jouer avec des
silhouettes ultra-­féminines, glamour
et fortes à la fois…
Cette direction s’est accentuée
sur la dernière collection hiver
avec des matières plus lourdes
comme le tweed et les lainages,
même si j’aime beaucoup l’idée
de reconduire certaines matières
d’une collection à l’autre en les
traitant différemment, telle une
base de travail. Nous avons utilisé,
par exemple, une crêpe de soie
l’été dernier sur des vestes de
tailleur, puis utilisé ce même crêpe
pour des robes longues cet hiver.
Je pense que la constance est très
importante dans les collections.
Cela donne vraiment à nos clientes
des repères.
On constate une
certaine nostalgie
chez les créateurs
reprenant souvent
les codes stylistiques
de leurs années
d’enfance. Votre
style, très “polar”,
se confirme, à travers
les années et chez les différentes
maisons pour lesquelles vous avez
travaillé. D’où vient cette fascination
pour la femme des 50's voire des 40's ?
(Rires.) De fait, je n’était pas né à cette
époque ! Non, je suis fasciné par les
silhouettes des femmes dans les films
noirs hollywoodiens des années 40,
comme Joan Crawford, qui ont bercé
mon enfance. Et c’est justement cette
période qui est, selon moi, la plus forte
dans l’histoire de l’enseigne.
Après douze années passées chez Louis
Vuitton, comment vous sentez-vous dans
ce studio où ont évolué deux autres
directeurs artistiques (Olivier Theyskens,
Lars Nilsson) ces cinq dernières années ?
➤➤➤
Je ne vis pas vraiment les
➤➤➤
changements précédents chez
Ricci comme une pression. Le plus
important pour moi étant plus le travail du vêtement avec l’équipe et les
essayages. Nous avons beaucoup
discuté avec Emmanuel de chez
Puig [le groupe espagnol propriétaire de Nina Ricci, Paco Rabanne,
Comme des Garçons Parfums entre autres, ndlr]. Je pense que nous
avons trouvé le juste milieu, et les
résultats le confirment. Nous avons
beaucoup plus de passage dans
la boutique et le studio étant quelques étages au-dessus­, car cela
nous ­permet une réelle corrélation
entre notre travail et notre clientèle. Mes années chez Vuitton ont
été ­particulièrement ­intéressantes,
puisque nous sommes arrivés avec
Marc Jacobs au tout début du lancement de la ligne de prêt-à-porter.
Cette expérience,– notamment avec
les lignes croisière et pre-fall dont la
logistique des défilé à New York chaque saison m’a été confiée –, m’a
donné un avant-goût de mon travail
aujourd’hui, et j’accepte plutôt bien
la mise en lumière inhérente à ce
poste. Tout s’est finalement fait très
naturellement. J’ai aussi envie d’intervenir sur toutes les petites choses de la boutique pour un univers
plus personnel, chaleureux, comme
un salon. Et aussi, pourquoi pas, de
travailler sur un concept de parfum.
Vous avez réajusté vos modèles sur
Madonna et Jennifer Lopez pour
les campagnes Vuitton. Pensez-vous
aujourd’hui qu’il est nécessaire de
“sublimer” sur des stars le travail des
coupes et les matières dans l’exploitation de l’image d’une marque ou, à
l’inverse, trouvez-vous plus intéressant
de sublimer a girl-next-door avec vos
créations ?
Je conçois que les célébrités sont
aujourd’hui très importantes dans
la communication mais je préférerais voir mes robes portées par
une jeune femme avec qui l’on
crée d’abord un vrai échange, plutôt que sur un people pas entièrement à l’aise avec le vêtement, et
qui n’aura pas forcément le style
approprié. Ce sont deux politiques
totalement différentes.
L’on dénonce parfois le rapport
malsain entre la presse et ses
annonceurs. La maison Ricci
communique uniquement sur
la parfumerie. Ressentez-vous
de la difficulté à obtenir des parutions
dans les magazine sans y annoncer ?
Nous avons eu un très bon feedback
de la presse, mais je trouve qu’en
effet un bon magazine se
doit de trouver le juste mélange dans ses pages de
style entre les grandes marques, les jeunes créateurs
ou encore du vintage, faire
les choix les plus adaptés à son image. Du journalisme tout simplement.
Malheureusement, ce problème n’est pas nouveau et
touche tout les supports.
Donc, la femme Ricci
d’aujourd’hui est
volontaire et espiègle
à la fois, toujours féminine…
La petite fille a-t-elle quitté le navire?
Oui, ça, c’est fait ! Cela se dessine au delà des vêtements : dans
le style des coiffures, pour le maquillage et dans le choix de nos
mannequins pour les défilés, elle
est définitivement plus femme. n
Ci-dessus, de gauche à droite collection «Jardin d’Hiver» automne-hiver 2010/11.
1) manteau ceinturé en moleskine et manchons en fausse fourrure
2) blouse et soutien-gorge en soie imprimée liberty et dentelle noire, jupe crayon en tweed
3) gilet ceinturé en maille et cachemire, manchons de fausse fourrure sur une blouse de radzimir.
4) minrobe bustier en jacquard brodé de fleurs en tulle, organza et dentelle, gants (inspiration gants de jardin) en cuir avec patch liberty.
5) trench «pétales» en nylon froissé.

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