Des mineurs en foyer veulent mettre fin à leurs jours

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Des mineurs en foyer veulent mettre fin à leurs jours
Vendredi 11 novembre 2016 | Postcode
stcode 1 JA 1000 LAU
LAUSANNE 1 | No 267-45 | Fr. 3.60 (TVA 2,5% incluse) | France ! 3.30
Elections 2016 Nos pages spéciales
La victoire de Trump
Le changement de style
donne des ailes aux
à la Maison-Blanche
populistes en France
promet d’être brutal
Point fort, pages 2-3
AFP
Point fort, page 4
AFP
Ex-étoile du PS lausannois,
Solange Peters a choisi
de donner la priorité
à sa carrière. Portrait
de celle qui est depuis peu
cheffe du Service
d’oncologie
médicale
du CHUV
ODILE MEYLAN
Page 32
Des mineurs en foyer veulent
mettre fin à leurs jours
Sept tentatives de suicide dans un établissement de l’EVAM pour les jeunes requérants
La situation dans certains foyers pour
mineurs gérés par l’Etablissement vaudois d’aide aux migrants (EVAM) devient
intenable. Tentatives de suicide, bagarres
au couteau, burnout des éducateurs dépassés par l’ampleur de la tâche.
Ces dernières semaines, pas moins de
sept MNA – les mineurs non accompagnés
– ont tenté de mettre fin à leurs jours dans
un foyer de l’avenue du Chablais, à Lausanne. Dont trois le même soir.
A cela s’ajoutent des altercations où
ces jeunes désemparés n’hésitent pas à
sortir des armes blanches et obligent la
police à intervenir. C’est la résultante
d’un taux d’encadrement très inférieur
aux normes en vigueur dans les foyers
d’adolescents suisses. Ces derniers mois,
l’EVAM enregistre d’ailleurs des démissions et des arrêts maladie à répétition
parmi ces travailleurs sociaux débordés
et pour la plupart très jeunes.
Autre exemple, les 36 mineurs du
foyer de Chamby-sur-Montreux sont pri-
vés d’éducateurs pendant tous les weekends de novembre. Un ou deux Securitas
seront là. «Mais ils ne vont pas proposer
des activités aux jeunes. Ils peuvent appeler la police en cas de problème, mais ils
ne sont pas là pour écouter, comprendre
ou tenter de résoudre les problèmes»,
relève une observatrice.
Vaud, pages 17 et 19
Surmenage En sous-effectifs,
les éducateurs démissionnent
Tensions Bagarres au couteau
et intervention de la police
Les retrouvailles de l’«Italie» avec son Léman
Grippe aviaire
Les lacs suisses
sous surveillance
La mort d’une centaine d’oiseaux sur les
rives du lac de Constance a poussé la
Confédération à prendre un certain nombre de mesures. Page 6
France
Des temps difficiles
pour les chaînes TV
Qu’elles soient privées ou publiques, les
chaînes sombrent l’une après l’autre,
souffrant face à l’essor de la vidéo à la
demande. Page 11
Fusillade de Bex
La mère de l’homme
abattu témoigne
Si Nicole Mandundu parle aujourd’hui, «ce
n’est pas pour accuser les policiers. Ça ne
me rendra pas mon fils. Je veux simplement savoir pourquoi il est mort.» Page 19
Gastronomie
Edgard Bovier mijote
de belles surprises
A la tête des quatre restaurants du Lausanne-Palace, le cuisinier ne veut pas entendre parler de retraite. Et il a imaginé la
carte du Valrose, à Rougemont. Page 29
Rénovation C’était un patrimoine en danger. C’est désormais une pièce maîtresse de la CGN Belle Epoque. Onze ans après avoir été «désarmé», cet
ancien vapeur fonctionne désormais au diesel et à l’électricité. Mais «la structure métallique est d’origine de même que les roues à aubes et la marqueterie
dans le restaurant principal», détaille Maurice Decoppet. Un chantier de 13,6 millions financé par quelque 20 000 donateurs et le Canton, qui y a investi
quelque 3 millions. L’Italie retrouvera bientôt son rythme de croisière estival sur les lignes reliant Lausanne à Genève et Montreux. Page 21 ODILE MEYLAN
L’éditorial 5 Décès 12-13 Jeux 14 Cinéma, Agenda 30 Courrier 31 Météo 31
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24 heures | Vendredi 11 novembre 2016
Vaud
& régions
Vaud
Lausanne & région
Riviera-Chablais
Nord vaudois-Broye
La Côte
Migration
Sept
tentatives
de suicide
parmi les S
requérants
mineurs
Stéphanie Arboit
L’EVAM héberge les jeunes migrants
arrivés en Suisse sans leurs parents
dans cinq foyers différents.
Problème: le manque d’éducateurs
ne permet pas un encadrement
suffisant de ces adolescents
traumatisés
ept enfants, dont trois le
même soir, ont tenté de mettre fin à leurs jours ces dernières semaines dans l’un
des foyers qui abrite les requérants d’asile mineurs, arrivés en
Suisse sans leurs parents. Ces mômes
sont habituellement qualifiés par un acronyme: MNA, pour mineurs non accompagnés. Mais derrière ces trois petites lettres
se dresse une énorme souffrance, à peine
imaginable, qui a donc poussé de très
jeunes garçons et filles (dès 13 ans et
demi) à risquer l’irréparable. Par chance,
aucun d’entre eux n’a fini aux soins intensifs. Depuis ces actes désespérés survenus
au foyer de l’avenue du Chablais, à Lausanne, l’Etablissement vaudois d’accueil
des migrants (EVAM), qui les héberge
dans cinq foyers différents, a modifié les
procédures d’accès aux médicaments.
Les raisons de leur désarroi sont multiples. Mais cette situation révèle aussi un
dysfonctionnement du système: les éducateurs de l’EVAM ne sont pas assez nombreux. Le taux d’encadrement paraît très
inférieur aux normes en vigueur dans les
foyers d’adolescents domiciliés en Suisse
(lire ci-contre). Inquiets de la situation, les
éducateurs de l’EVAM s’en sont ouverts à
leur hiérarchie, accompagnés dans leur
démarche par des représentants syndicaux. Ces derniers mois, l’EVAM enregistre des démissions et des arrêts maladie à
répétition parmi ses travailleurs sociaux,
débordés et pour la plupart très jeunes.
Une des conséquences directes sur les
Foyer
C’est dans le foyer de l’avenue du
Chablais à Lausanne (ici lors d’un
reportage début octobre) que les
tentatives de suicide ont eu lieu.
VANESSA CARDOSO
enfants: par manque de personnel, les
36 mineurs du foyer de Chamby-sur-Montreux sont privés d’éducateurs pendant
tous les week-ends du mois de novembre.
Un ou deux Securitas seront là pour ne
pas les laisser seuls. «Mais ils ne vont pas
proposer des activités aux jeunes. Ils peuvent appeler la police en cas de problème,
mais ils ne sont pas là pour écouter, comprendre ou tenter de résoudre les problèmes», relève une observatrice.
Aucune des personnes interrogées ne
s’exprime à visage découvert. Pour ne
pas mettre en péril le contact avec ces
enfants et par crainte que la dénonciation
de la situation ne retombe sur les éducateurs: «Il ne faut pas leur jeter la pierre, ils
sont au front, insistent trois témoins. Ils
prennent même sur leur temps libre pour
s’occuper de ces enfants. Mais ils manquent cruellement de moyens.» «Le nombre d’éducateurs est la clé! martèle une
femme. On surajoute des problèmes à la
souffrance de l’exil et des traumatismes
vécus.»
Bagarres aux couteaux
Les éducateurs gèrent dans l’urgence les
tâches administratives (distribution des
tickets de transports, demandes de financement pour le matériel scolaire, etc.)
mais n’ont plus le temps pour aider aux
devoirs. Ou pour désamorcer les conflits.
Résultat: une situation explosive où la
moindre étincelle met le feu aux poudres.
Avec des bagarres où certains jeunes en
sont arrivés à prendre les couteaux et où
la police a dû intervenir. Des conflits qui
Suite en page 19
PRÉVENTION Douze associations romandes de santé
publique voient leur organisme faîtier poursuivre sa
mue: priorité à la prévention, contrôle accru de l’Etat,
avant la renaissance sous un nouveau nom. Page 21
VC5
Contrôle qualité
TERRITOIRE La densification de Palézieux est un projet
de longue haleine. Après dix ans de travail, il arrive à
bout touchant. Mais c’est sans compter la nouvelle loi
sur l’aménagement du territoire. Pages 22-23
270 mineurs non accompagnés
(MNA) dans le canton, dont 207
hébergés dans des foyers EVAM dédiés
au MNA (contre 45 en mai 2015).
5 foyers EVAM pour MNA: Lausanne
(Chablais et Chasseron, 42 et 61
mineurs), Chavannes (17), depuis avril
Chamby-sur-Montreux (34) et depuis
septembre Crissier (53).
1 éducateur gère 20 enfants dans les
faits dans les foyers MNA, alors que
l’EVAM annonce 1 pour 6 en théorie.
Par opposition, un taux de 0,5 à 0,8
éducateur par enfant est pratiqué dans
les foyers pour mineurs domiciliés en
Suisse et reconnus par le Service de
protection de la jeunesse (SPJ). «Il y a
entre 1 éducateur pour 2 enfants et
1 éducateur pour 4, soit en moyenne
1 éducateur pour 3 enfants sur les
temps forts, les moments où les
enfants sont au foyer, pour les devoirs
par exemple, explique le SPJ. Le
nombre exact dépend de l’âge, de
l’urgence des situations et du concept
sociopédagogique de l’établissement.
Le week-end, 2 éducateurs sont
présents par tranche de 5 enfants. La
nuit, ce sont des éducateurs ou des
veilleurs (souvent des étudiants du
domaine social).» Mais non des agents
de sécurité privés comme pour les
MNA.
Le nouveau gardepêche de Morges
est un passionné
2B ARCHITECTES
Oron est suspendu
Promotion Santé
Vaud remplacera les aux débats
Ligues de la santé du Grand Conseil
Un éducateur
pour vingt enfants
PORTRAIT Sylvain Kramer, 27 ans, vient de commencer le travail de ses rêves. Lui qui, petit, se levait en
cachette à 4 h pour aller pêcher avant l’école, a été
nommé garde-pêche du district. Pages 24-25
Vaud 19
24 heures | Vendredi 11 novembre 2016
Migrants mineurs
Suite de la page 17
font peur aux plus jeunes. «Il n’y a pas besoin d’avoir fait de grandes études pour
comprendre qu’ils doivent être encadrés!
Ils ne se sentent pas en sûreté dans le foyer»,
témoigne une femme. Pourtant, la sécurité
est essentielle à ces enfants, déjà désécurisés affectivement et souvent en «état dépressif aigu».
Ils ont traversé l’enfer
Durant leur périple pour rejoindre l’Europe, certains ont assisté à des noyades et à
d’autres scènes épouvantables, témoigne
une femme qui leur vient en aide: «Ceux qui
remontent d’Erythrée ont forcément passé
par la Libye, l’enfer sur terre, où ils sont
enfermés dans ce que l’on ne peut nommer
autrement que des camps de concentration.
Jusqu’à ce que leur famille paie, qu’ils
s’échappent ou soient vendus.» Sur le trajet,
beaucoup sont victimes d’abus sexuels ou
de sévices en tous genres. «Pour payer les
passeurs en Grèce, certains ont dû se prostituer pour 10 euros, se désole une autre
femme. Leurs tentatives de suicide sont des
appels au secours. C’est normal que ces
jeunes soient perdus! Leur famille leur manque. Ils ont été envoyés avec une sorte de
mission: dans le meilleur des cas, s’en sortir
en se construisant un avenir meilleur. Dans
le plus lourd des cas, renvoyer de l’argent.»
Forcés à partir, du fait de l’emprisonnement
d’un père ou de la pression familiale, ces
jeunes voient leur libre choix recalé au second plan.
Décalage avec la réalité
Beaucoup de ces mineurs sont «révoltés du
décalage entre les espoirs de ce qu’on leur
avait promis et la réalité. Par exemple, les
plus jeunes croyaient qu’ils seraient forcément placés dans des familles d’accueil suisses et ne comprennent pas pourquoi ils se
retrouvent en foyer.»
«Leurs mères étaient voilées chez eux et là
ils voient la consommation d’alcool et de drogue dans la rue. Et ils ne parlent même pas
notre langue. C’est normal que ce soit le bordel dans leur tête!» s’exclame une bénévole.
Fusillade de Bex
«Ce n’est pas tolérable
de traiter des enfants
ainsi et de croire que,
dans dix ans, tout
se passera bien!»
Anonyme de l’entourage
des jeunes migrants
Mal encadrés, certains ne se rendent pas
à l’école. «L’ambiguïté typique de l’adolescence est exacerbée dans leurs cas: ils ont
besoin des adultes et de leur amour, et en
même temps ils refusent certaines contraintes liées à la surveillance des adultes. Il faut
se rappeler que ces enfants ont fonctionné
seuls pendant des mois.» Le message est
contradictoire: «On leur dit quoi faire et on
veut qu’ils se débrouillent seuls.»
Appel aux politiciens
Le directeur de l’Etablissement scolaire de
Montreux-Est, Pierre Steffen, ne dément pas
les problèmes. Mais il ne veut pas les aborder dans la presse, privilégiant le dialogue
avec l’EVAM: «Nous avons fixé un rendezvous lundi avec la directrice du foyer de
Chamby. Nous examinerons nos points de
friction et tenterons de trouver des solutions
à ce moment-là.» D’autre part, une délégation cantonale est censée visiter le foyer des
hauts de Montreux aujourd’hui même.
C’est à ces politiciens que s’adressent
toutes les personnes interrogées: pourquoi
n’embauche-t-on pas davantage d’éducateurs? «Plus l’encadrement est important et
transversal – entre profs, éducateurs, psy,
etc. – plus le travail de chacun est facilité,
estime une professionnelle. Si à 18 ans ces
enfants ne sont pas en mesure de commencer une formation, même élémentaire, c’est
là qu’ils vont être livrés à eux-mêmes et
potentiellement glander dans la rue.»
«Tout un chacun doit prendre conscience que ce n’est pas tolérable de traiter
des enfants ainsi et de croire que, dans
dix ans, tout se passera bien!»
«Nous prenons des mesures»
U Erich Dürst, directeur de l’EVAM,
explique que son institution a fait le
maximum pour faire face à l’afflux
de mineurs non accompagnés. Ces
derniers ont passé de 50 en mai 2015
à 271 actuellement.
Quelles mesures avez-vous prises
après les 7 tentatives de suicide?
En plus de la prise en charge adéquate des
jeunes en question, nous avons augmenté
l’encadrement temporairement pour faire
baisser la tension. Nous avons mis en
place un suivi les lendemains des faits,
pour que tant les autres jeunes que notre
équipe éducative puissent débriefer. Puis
nous avons engagé un questionnement
sur ce que cela signifiait et voir s’il fallait
modifier quelque chose dans notre
organisation. Ce type d’événements est
traité de manière très sérieuse. Ce sont
bien sûr des appels au secours mais il faut
les analyser individuellement, enfant par
enfant, sans tirer de conclusions générales.
Avez-vous demandé des moyens
supplémentaires à l’Etat de Vaud?
Parmi les 384 équivalents pleins-temps
qui travaillent à l’EVAM, 33 sont affectés
aux mineurs non accompagnés (MNA),
soit 8 ou 9% de nos collaborateurs, alors
que cette population représente bien
moins dans le total des réfugiés. C’est la
preuve que nous considérons différemment ces enfants, qui ont besoin d’un
encadrement important. Sur le budget
2016 de l’EVAM de 137 millions, 4,9 millions étaient dévolus aux MNA. Pour le
projet de budget 2017, ce sont près de
8 millions, sous réserve de l’approbation
du Conseil d’Etat. Cette augmentation
substantielle prouve que nous nous
adaptons à une situation qui évolue
constamment, presque au jour le jour.
Il y a souvent un effet boule de neige
des tentatives de suicide, et parfois
la volonté d’attirer l’attention sans
forcément vouloir réussir. Mais tout
VC5
Contrôle qualité
Erich Dürst
Directeur de
l’Etablissement
vaudois d’accueil des
migrants (EVAM)
de même, faut-il un drame pour que
les choses évoluent plus vite?
C’est une préoccupation quotidienne de
nos équipes, qui font un travail absolument remarquable sur le terrain! Nous ne
sommes pas indifférents à la situation. Au
contraire, nous nous sommes adaptés:
cette année, nous avons ouvert deux
centres supplémentaires, Chamby et
Crissier. Cela n’était pas prévu au budget,
mais à aucun moment nous n’avons été
freinés, ce qui est plutôt exceptionnel de
la part du Canton.
Les problèmes que rencontrent
les éducateurs seront-ils résolus
grâce à l’augmentation du budget?
La prise en charge des MNA est une tâche
complexe et une responsabilité importante. Nous proposons une gestion de ces
enfants par des professionnels du domaine
social, ce qui n’est pas le cas dans la même
mesure dans tous les autres cantons. Il y a
eu un constant décalage depuis un an et
demi, du fait du temps nécessaire à engager
au fur et à mesure que nous ouvrions de
nouveaux centres. Nous sommes conscients que cela a rendu la tâche des
éducateurs plus complexe. J’espère que
désormais la situation va se normaliser.
Pourquoi les éducateurs que vous
engagez sont-ils souvent très jeunes?
C’est sans doute lié au fait que nous avons
recruté de manière intense, mais pour des
postes à durée déterminée. Dorénavant,
ce n’est plus le cas. Ces jeunes ont certes
moins d'expérience professionnelle, mais
font un travail remarquable. Nous
cherchons à avoir du personnel expérimenté dans chacun des foyers.
Pour Nicole Mandundu, l’absence de réponses sur la soirée qui a coûté la vie à son fils Hervé est
le plus douloureux. CHANTAL DERVEY
«Je veux juste savoir
pourquoi Hervé est mort»
La mère du
Congolais abattu
dimanche à Bex
par un policier
témoigne
pour tenter
de comprendre
David Genillard
Un portefeuille, des cartes bancaires, un téléphone portable, des
enveloppes. Nicole Mandundu
tient dans ses mains les seules affaires appartenant à son fils que la
police a pu lui remettre depuis sa
mort, quatre jours plus tôt. Dimanche soir, Hervé a été abattu
lors d’une intervention de la Police du Chablais (EPOC) («24 heures» du mardi 8 novembre). Selon
le communiqué de la police cantonale, ce père de famille de 27 ans
originaire de la République démocratique du Congo aurait menacé
l’un de ses voisins dans l’immeuble de Bex où il vivait depuis une
année. A l’arrivée de la police, il se
serait rué sur les agents, couteau à
la main. Un caporal de l’EPOC a
fait feu, blessant mortellement
l’agresseur.
Dans son appartement de Lucens, Nicole Mandundu ne parvient pas à comprendre. «Dans les
médias, on dit que c’est un
homme violent. Ça ne ressemble
pas au fils que je connais. Il arrive
à son petit frère de me répondre.
Hervé, lui, a toujours été respectueux envers moi. C’était quelqu’un de sociable et de chrétien.»
Avant d’ajouter: «Personne ne sait
ce qui s’est exactement passé ce
soir-là. Peut-être qu’il était effectivement en colère. Est-ce que ça
justifie qu’il soit mort comme ça?»
Trois impacts de balles
Si elle témoigne aujourd’hui, «ce
n’est pas pour accuser les policiers. Ça ne me rendra pas mon
fils. Je veux simplement savoir
pourquoi il est mort.» Pour elle, le
silence auquel elle est confrontée
depuis le drame est le plus douloureux. «Lundi matin, les policiers sont venus nous voir chez
nous. Ils nous ont demandé:
«Est-ce que vous avez un fils qui
vit à Bex et s’appelle Hervé?».
Quand on a répondu oui, ils nous
ont dit de nous asseoir, que quelque chose de grave était arrivé.»
Depuis, les visites des agents
ont été quotidiennes. «Mais à chaque fois, on nous explique qu’on
«Personne ne sait
ce qui s’est passé.
Peut-être qu’il était
effectivement en
colère. Est-ce que
ça justifie qu’il soit
mort comme ça?»
Nicole Mandundu
Mère de la victime de Bex
ne peut rien nous dire sur les circonstances.» Alors Nicole et son
mari Willy se raccrochent aux éléments qu’ils ont pu glaner. La vision du corps de leur fils, marqué
par trois impacts de balles. «Un à
l’épaule, un au cœur et le troisième à la hanche.» Les témoignages des voisins: «Comme on ne
nous disait rien, mon mari est allé
sur place lundi. Des voisins lui ont
raconté qu’ils avaient entendu un
premier coup de feu, le silence,
un deuxième coup de feu, un cri
et une troisième détonation.»
La police cantonale ne confirme pas cette version, sinon que
«plusieurs coups de feu ont bel et
bien été tirés». L’autopsie a eu lieu
mais le rapport n’a pas encore été
rendu. «Dans ce genre de drame,
une systématique a été mise en
place: la famille peut avoir accès à
toutes les pièces du dossier si elle
dépose une plainte», précise JeanChristophe Sauterel, porte-parole
de la police cantonale.
Dimanche, Hervé serait monté
pour enfoncer la porte de l’appartement situé directement au-dessus du sien. Avait-il déjà eu maille
à partir avec ce locataire, un
jeune Erythréen? Nicole
Mandundu affirme n’en avoir jamais entendu parler. «Dans la
presse, on dit qu’Hervé faisait la
fête avec des amis au moment du
drame», poursuit-elle. Cette version l’étonne: «Il vivait à Bex depuis seulement un an. Ses amis
étaient plutôt sur Lausanne.» La
famille y était installée depuis
1994. «Hervé avait 5 ans quand
nous sommes arrivés en Suisse. Il
a fait toute sa scolarité à Lausanne
avant d’obtenir son CFC de peintre en bâtiment.» Il avait déménagé à Bex pour se rapprocher de
son fils de 8 ans, vivant avec sa
mère dans le Chablais valaisan. «Il
avait grandi, je me suis dit qu’il
fallait que je le laisse faire sa vie»,
ajoute Nicole.
A côté d’elle, la sœur d’Hervé
évoque son neveu: «Il y a des moments où il joue normalement,
d’autres où il pleure. Il a tenu à
aller à l’école, pour se changer les
idées. Lorsqu’il a vu le corps de
son père, il a pleuré. Je crois qu’il
réalise lentement ce qui s’est
passé.»
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