La seconde gloire de Rome, XV e -XVII e siècle

Transcription

La seconde gloire de Rome, XV e -XVII e siècle
Sélection d’ouvrages présentés en hommage
lors des séances 2013 de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres.
J'ai l'honneur de faire hommage à notre Académie de mon
dernier livre paru le mois dernier et intitulé La Seconde gloire de
Rome, XVe-XVIIe siècle: ouvrage qui m'a été demandé par Laurent
Theis pour les éditions Perrin.
Cet ouvrage n'a pas voulu être un travail d'érudition comme le
fut en son temps (1957-1959) ma thèse en deux volumes sur La
vie économique et sociale de Rome dans la seconde moitié du
XVIe siècle. Il s'agit aujourd'hui, sur un registre différent, d'une
réflexion synthétique et argumentée sur une période beaucoup
longue couvrant les deux siècles courant des environs de 1450 à
la seconde moitié du XVIIe. J'ai conçu les 300 pages de cet essai
comme le rassemblement de conversations au coin du feu et non
érudites, sur un sujet qui m'est relativement familier depuis un demi-siècle, mais sur lequel
je m'instruis encore chaque jour, car il est inépuisable.
Mon intervention de ce soir veut naturellement dire d'abord ma gratitude à ceux de nos
confrères dont les travaux récents ont enrichi mes propres dossiers, élargi notre information
et modifié notre regard sur Rome entre les débuts de la Renaissance et l'apothéose du
Baroque. Il s'agit, en suivant les périodes successivement étudiées dans mon livre, d'André
Vauchez, André Chastel, Yves-Marie Bercé et Marc Fumaroli qui, tous les quatre, ont
grandement éclairé l'évolution qui, en Italie, a conduit du Moyen-Âge à la Renaissance et de
celle-ci au Baroque.
L'avantage de concentrer la lumière du projecteur sur la période allant du milieu du XVe au
milieu du XVIIe, malgré tous les changements historiques et artistiques qui se produisirent
alors, est de mettre en lumière un projet global qui, à travers des circonstances contrastées,
des moments tour à tour de crises et de gloire et des esthétiques successives a gardé sa
cohérence. Car les papes de la période considérée, si différents furent-ils, eurent, plus ou
moins en commun la volonté de faire de Rome, par et pour la Religion, une capitale aux
ambitions universelles. Avec le recul du temps nous apercevons peut-être mieux que nos
prédécesseurs les lignes directrices de ce projet grandiose. Il s'est agi d'édifier une ville sans
égale à l'échelle mondiale, résistant par l'art et la rénovation religieuse aux sécessions
protestantes et s'adaptant à la fois à l'ouverture de la route maritime vers l'Asie et à la
découverte inattendue de l'immense Amérique. La résurrection de Rome - le mot n'est pas
trop fort - à l'époque des grands voyages intercontinentaux et de l'expansion chrétienne aux
quatre coins du monde mérite donc une place particulière dans la mémoire historique. Et
cela en dépit de faux pas et d'erreurs de parcours ; en dépit aussi des compromissions avec
l'argent que nécessitèrent les grandioses transformations de la capitale des papes. C'est ce
cas unique dans l'histoire des villes que j'ai essayé de mettre en relief.
Mon essai - c'est, je crois, la désignation qui lui convient le mieux - conçu comme une suite
de « causeries familières au coin du feu », prend nécessairement visage de réhabilitation.
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Sélection d’ouvrages présentés en hommage
lors des séances 2013 de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres.
Car il veut aider à faire comprendre comment, en moins de deux siècles, une ville au passé
illustre, mais à l'abandon, devint véritablement, à la surprise des contemporains, la première
capitale de rayonnement mondial qu'ait connu l'histoire. Vers 1650-1670 elle est dans la
géographie de l'époque la ville de l'univers la mieux pourvue de lieux de culte, de palais et
de villas, d'eau courante et de fontaines, de bibliothèques, d'hôtels et d'hôpitaux. Elle est
alors plus riche d'œuvres d'art, anciennes et récentes, que n'importe quelle autre ville du
monde.
Avec le recul du temps on peut considérer que les dernières grandes œuvres du Bernin en
1665-1670 - statues du Pont Saint­ Ange et quadruple colonnade de la place Saint-Pierre malgré quelques dernières réussites tardives au XVIIIe siècle (escalier de la Trinité des Monts
et Fontaine de Trévi) clôturent la grande période du baroque romain et le second âge d'or de
Rome. Il n'est pas certain que les millions de visiteurs qui viennent chaque année à Rome
réalisent le « miracle » que constitua la résurrection de cette ville unique au début des
temps modernes.
Jean DELUMEAU
17 mai 2013
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