BON ANNIVERSAIRE FRÉDÉRIC !

Transcription

BON ANNIVERSAIRE FRÉDÉRIC !
BON
ANNIVERSAIRE
FRÉDÉRIC !
Des paroles aux actes…
Livret spirituel
spécial 200e anniversaire
Année liturgique C 2012-2013
O
n a beau lire les pages qu’il nous a laissées, on a beau
se rappeler ses actes et ses discours, on n’y découvre
ni la colère qui se venge, ni l’amertume qui s’accroît en se
répandant, ni le mépris qui brave, ni l’ironie qui se moque, sous prétexte d’instruire ou de corriger. Sans abaisser jamais l’Église devant
le monde, il tient d’une main généreuse, parce que c’est la charité
qui la guide, le sceptre tout-puissant. Il plaint plus qu’il n’accuse,
il pardonne plus qu’il ne condamne, et, toujours invincible sous le
bouclier, il tempère dans son épée la force qu’il y sent, de peur
d’achever la mort en quelque âme qui peut encore revivre. »
R. P. Henri Lacordaire
Cité par Charles Alphonse Ozanam, Vie de Frédéric Ozanam, 1882, p. 50.
2
Bon anniversaire Frédéric !
AVANT-PROPOS
Frédéric Ozanam,
« humblement, reconnaissons
que nous le connaissons peu… »
I
nvités, en tant que membres de sa
famille à écrire cet avant-propos, la fin
de sa prière, dite de Pise 1, nous vient à
l’esprit : « La bénédiction du Seigneur est
sur les familles où l’on se souvient des
aïeux. » Oui, notre famille est de celles
qui se souviennent de leurs ancêtres.
Pour autant le connaissons-nous plus
ou mieux que d’autres ? Porteurs du
patronyme 2 ou descendants directs, nous
avons tous entendu, depuis notre enfance,
parler de Frédéric. Peu d’entre nous ont
participé aux commémorations de 1953
et de 1983, plus nombreux étaient ceux
présents à la béatification de 1997 et
au Colloque de la Bibliothèque Nationale
de France de 2003 : autant d’occasions
d’écouter, de découvrir parfois, d’admirer
mais surtout de se reconnaître petit devant
un tel exemple ; nous taire et méditer…
Principal fondateur de la Société de
Saint-Vincent-de-Paul, précurseur
du catholicisme social, professeur de
littérature étrangère, spécialiste de Dante,
historien et auteur de la formule « Passons
aux Barbares », rédacteur d’articles de
L’Ère nouvelle… et, pour couronner
le tout, « Bienheureux », que de titres
qui placent notre arrière-arrière-grand-
Prière écrite le 23 avril 1853. Texte complet, pages 351 à 354 in Frédéric Ozanam, Actes du
colloque de 1998, Faculté de Théologie de Lyon, Bayard, 2001.
1
Ce sont les descendants du docteur Charles Ozanam (1824-1890), frère cadet de Frédéric.
2
Des paroles aux actes…
3
père ou grand-oncle sur un piédestal,
impressionnant, inaccessible, voire
écrasant.
La décision familiale de donner, en 2003,
une grande partie des archives à la
Bibliothèque nationale de France, a été
l’occasion pour certains d’entre nous d’un
travail sur la correspondance passive de
Frédéric qui a renouvelé notre regard.
Ainsi, Raphaëlle Chevalier-Montariol a été
sensible au Frédéric de la sphère privée
en étudiant en particulier les lettres de
sa femme Amélie et de tout l’entourage
familial. Les petits défauts de Frédéric
– reconnus et avoués à sa compagne –
laissent entrevoir la possibilité pour chacun
de tendre à la sainteté 3. Surtout, Raphaëlle
a mis en lumière la personnalité d’Amélie,
son altruisme, sa culture, la profondeur
de leur amour, son rôle important non
seulement au côté de Frédéric, mais pour
lui, « le faisant grandir dans son amour
de Dieu », leur spiritualité conjugale et
le témoignage de couple uni et croyant
qu’ensemble ils donnaient 4.
Nous-mêmes, nous avons eu la chance de
mieux découvrir, lors d’un travail sur Marie
Cruiziat 5, la qualité de vie de tout leur
entourage. C’est le portrait d’une famille
unie et aimante, qui est apparu. Une
famille au sens complet du terme, élargie à
toutes les fratries et générations, vivantes
et décédées, et à tous ceux partageant leur
toit. Une famille où le mariage n’est pas
que l’union d’un homme et d’une femme
mais l’union de deux familles. Les Ozanam
et les Soulacroix unissent leurs destins,
leurs affections, partagent leurs joies, leurs
souffrances et leurs croix. Ils s’enrichissent
mutuellement de leur foi. Frédéric et ses
proches, au quotidien, vivent cela et,
ensemble, témoignent ainsi de l’Amour
de Dieu.
Entretien d’O. BETHOUX avec R. CHEVALIER-MONTARIOL (1950-2009), 2003
(http://membres.multimania.fr/philia/doc/memoire%20vive.rtf).
3
Raphaëlle CHEVALIER-MONTARIOL, Amélie et Frédéric Ozanam à la lumière de Vatican II,
Éd. Jouve, Paris, 2009, 115 p.
4
Marie Cruiziat est restée 71 ans au service de quatre générations d’Ozanam ; à partir de 1843, elle
est chez Frédéric et Amélie (Magdeleine HOUSSAY et Charles OZANAM, Marie Cruiziat 17701857, Membre de la famille Ozanam, Jouve, février 2012).
5
4
Bon anniversaire Frédéric !
Parmi les douze textes de Frédéric choisis
dans ce livret, sept sont écrits quand il a
entre 16 et 25 ans. Déjà la force de sa
foi est étonnante ; on comprend qu’il soit
donné à nouveau en exemple aux JMJ
de 2013 à Rio. À 40 ans, très malade,
il rédige son testament et y ajoute ces
lignes : « Je laisse à ma chère Amélie en
mémoire de ses tendres soins et comme le
plus doux adieu que je puisse lui adresser,
le dessin de Buonajuti représentant
le baiser des anges et des saints. Et
puisqu’elle m’a demandé des vers pour les
écrire au-dessous, elle y pourra mettre les
vers suivans [sic] :
Ces anges attendaient au sortir de la terre
Les élus confiés à leur doux ministère.
Toi, mon ange gardien, tu restes ici-bas :
Ta prière ouvrira le ciel devant mes pas.
Tu restes quelques jours pour mettre sur la voie
L’Enfant, la tendre enfant qui causait notre joie.
Fais qu’elle pense à moi : donne-lui tes vertus.
Nous nous retrouverons au séjour où l’on aime,
Et nous échangerons sous les yeux de Dieu même
Le long embrassement qui ne finira plus.
Pise, la semaine sainte 1853. »
Les liens créés par le sacrement du
mariage sont bien pour Frédéric des liens
éternels 6 qui préfigurent la Communion
des Saints. Beau sujet de méditation qu’on
peut mettre en relation avec les fêtes de
Noël et de la Sainte Famille.
L’affirmation contraire - le mariage s’arrêterait au décès de l’un des époux - est parfois trouvée,
certains interprétant ainsi l’évangile dit “des Saducéens” (Mc 12, 25). Le Père CANTALAMESSA,
prédicateur de la Maison pontificale, rectifie cela dans son homélie de novembre 2006 (cf. : http://
www.zenit.org/article-14032?l=french).
6
Des paroles aux actes…
5
Rédigée au même moment, l’émouvante
prière de Pise est la supplique d’un
homme qui se trouve à « plus que la moitié
du chemin ordinaire de la vie ». Il sait qu’il
est proche du retour au Père. « Faut-il donc
quitter tous ces biens que vous-même,
mon Dieu, m’avez donnés ? » Il renoncerait
à tout en échange de « la douceur de
vieillir auprès de ma femme et d’achever
l’éducation de mon enfant », mais il se
soumet : « Il est écrit au commencement
du livre que je dois faire votre volonté. Et
j’ai dit “Je viens Seigneur”. »
Comment ne pas faire le parallèle avec
le Christ au jardin des Oliviers ? « Et Il
priait pour que, s’il était possible, cette
heure s’éloignât de Lui. » Et Il dit : “Abba,
Père, tout Vous est possible ; transportez
ce calice loin de Moi ; toutefois, non
pas ce que Je veux, mais ce que Vous
voulez” 7. Notre Saint-Père Benoît XVI,
après explication de ce passage, nous dit
qu’ « Adam et Ève ont pensé [à cause du
péché] que le “non” à Dieu était le sommet
de la liberté, signifiait être pleinement
soi-même. Jésus sur le Mont des Oliviers
ramène la volonté humaine au “oui” total
à Dieu ; […] Ainsi, Jésus nous dit que
ce n’est que dans la conformation de sa
propre volonté à celle de Dieu, que l’être
humain arrive à sa hauteur véritable,
devient “divin” ; ce n’est qu’en sortant de
lui, ce n’est que dans le “oui” à Dieu que
se réalise le désir d’Adam, de nous tous,
celui d’être complètement libres. C’est
ce que Jésus accomplit à Gethsémani :
en transférant la volonté humaine dans la
volonté divine naît l’homme véritable, et
nous sommes rachetés 8. »
Frédéric atteint cette hauteur, ce rachat :
« Je viens si vous m’appelez, et je n’ai pas
le droit de me plaindre. »
Cette année, qui est aussi celle de la Foi,
nous invite à un regard renouvelé sur
Frédéric Ozanam, centré sur le croyant,
le chrétien qu’il était. À quelques mois de
sa mort, il redit son espérance en la Vie
Marc 14, 36.
7
8
ENOIT XVI, Audience Générale du mercredi 1er février 2012, Salle Paul VI (cf. : http://www.vatican.
B
va/holy_father/benedict_xvi/audiences/2012/documents/hf_ben-xvi_aud_20120201_fr.html).
6
Bon anniversaire Frédéric !
éternelle, il croit en la Communion des
Saints et en toute liberté, à l’appel de Dieu,
il dit « Oui ».
Que cette année du bicentenaire soit vôtre,
à vous les Vincentiens, famille de cœur de
Frédéric.
Ce jeudi 18 octobre 2012, en la fête de
saint Luc, Évangéliste
N Magdeleine Houssay,
descendante de Frédéric
et Charles Ozanam,
descendant de Charles
Des paroles aux actes…
7
Avent et Noël
DÉCEMBRE 2012
U N DI EU
QU I SE CAC H E…
« Il ne faut point croire que la foi, que le soin des intérêts
d’une croyance chère et menacée retiennent les chrétiens
éloignés des connaissances humaines. La religion, qui les
rassure, ne leur a pas fait inutilement ces loisirs. Elle ne leur
permet pas seulement, elle leur recommande la science. Car
si la vérité est Dieu même, il s’ensuit, comme parle saint Augustin, que toute science est bonne en soi, et que le vrai est
souverainement désirable, même indépendamment de l’utilité théologique qu’on en peut tirer. Au fond de toutes choses
et dans les dernières profondeurs de l’infiniment petit, il faut
bien finir par trouver la trace de l’idée éternelle. Les docteurs ont reconnu ce vestige empreint par toute la création,
et c’est ce qui sanctifie l’étude de la nature. Une image plus
ressemblante se découvre dans l’homme, et c’est ce qui fait
la dignité de la philosophie. La Providence remplit l’histoire,
et de là Bossuet professe qu’il est honteux à un honnête
homme d’ignorer le genre humain. En sorte que, dans tous
les ordres et à tous les degrés, c’est toujours un Dieu absent
qu’on poursuit, qui se cache de façon qu’on le cherche, mais
de façon qu’on le trouve, parce qu’il veut éprouver l’amour et
ne le désespérer pas.
8
Bon anniversaire Frédéric !
De là vient la probité de la science chrétienne. Elle ne se paye
ni de faits hasardés, ni de conséquences prématurées. Elle
est humble et ne croit pas que ce soit trop de toute une vie
pour acheter une vérité si petite qu’elle soit. Elle est patiente
enfin, parce qu’elle se confie. Nous descendons, le microscope à la main, dans les derniers détails de la physiologie
végétale ; nous nous penchons sur les creusets de nos laboratoires, nous reconstruisons péniblement des inscriptions
effacées et des langues en ruines. Il ne nous est pas donné
de voir le terme de ces recherches arides : mais nous savons
que d’autres y trouveront des conclusions glorieuses pour la
Providence. Nous ne sommes qu’au commencement, et le
chemin est long ; mais nous savons que Dieu est au bout. »
Bienheureux Frédéric OZANAM
Des devoirs littéraires des Chrétiens, 1843,
discours prononcé au Cercle catholique en présence de Mgr Affre, Archevêque de
Paris, in Mélanges, Œuvres Complètes, 3e Édition, 1855, tome VII, pp. 132-133.
L
a foi chrétienne ose dire que
tous les hommes, croyants ou
non, sont des chercheurs de
Dieu. Qu’ils scrutent l’infiniment petit
de la matière ou l’infiniment grand du
cosmos, qu’ils s’interrogent sur euxmêmes par les sciences humaines
et la philosophie, qu’ils se refusent
à «ignorer le genre humain» en
relisant leur histoire, ils peuvent voir
les traces, sous forme de «vestiges»
et d’ «images», de l’action divine.
L’observation, la connaissance des
choses sont, nous l’ont rappelé les
Pères grecs et latins, une voie pour
découvrir Dieu, ce Dieu qui, par le
Des paroles aux actes…
9
Mystère de l’Incarnation, vient à nous
dans la chair, par la Révélation, mais
qui reste caché…
Et bien qu’il ne soit plus possible pour
quelques hommes de connaître tout
du monde de façon encyclopédique,
comme l’affirmait humblement le
pape Paul VI juste après le Concile
de Vatican II, l’Église ne reste pas
«éloignée des connaissances
humaines». Elle continue de
s’informer, de se former et d’être, elle
aussi, «experte» en humanité parce
qu’elle a reçu la mission de servir.
De plus, Frédéric a affronté
courageusement, avec intelligence
et courtoisie, le dénigrement de la foi
chrétienne : au même titre que nous
nous présentons comme les avocats
ou les porte-parole des pauvres,
nous sommes invités à défendre la
foi chrétienne aujourd’hui avec le
même respect et le même courage.
Nous ne sommes peut-être pas aussi
habiles en paroles et en discours
que le professeur Frédéric Ozanam
mais nous pouvons être habiles et
transmettre, plus que des valeurs
dont certaines ont rang universel
maintenant, des savoir-faire et des
savoir-vivre ensemble évangéliques.
«Aimer, Partager et Servir»…
N Jérôme Delsinne cm
10
Bon anniversaire Frédéric !
Pour aller plus loin…
Que nous reste-t-il encore à découvrir ? Qu’avons-nous encore à
apprendre ou à améliorer ?
Pour prier…
Confions au Seigneur le travail des chercheurs.
Que leurs découvertes servent au bien de l’humanité entière.
À lire…
Christian VERHEYDE, Prier 15 jours avec Frédéric Ozanam,
Nouvelle Cité, mai 2011, 126 p.
Des paroles aux actes…
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JANVIER 2013
épiphanie
H EU R EU X
L ES CŒU RS PU RS…
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« Heureux celui qui a reçu de profondes semences de vertus, de grands exemples de sagesse, heureux celui qui a
toujours chéri la religion de son enfance : car si les liens
dont elle captivait son intelligence viennent à se relâcher,
du moins il lui reste attaché par le cœur : le doute lui pèse
et il cherche à s’en affranchir ; le combat est douloureux et
pénible, il lui coûte de secrètes larmes, bien des angoisses,
mais enfin il se termine par la victoire ; un examen respectueux éclaire peu à peu son esprit et bientôt l’inonde de lumières ; si quelque temps la conviction rationnelle lui a manqué, la fidélité morale lui demeurait, le don de Dieu était en
lui, et la foi ne l’avait point quitté ; elle s’est voilée seulement,
comme pour se faire chercher, comme pour se faire aimer
davantage.
Mais il en est beaucoup que la violence d’une imagination
précoce, beaucoup que la présomption d’un orgueil juvénile
entraîne, et qui croient se faire grands ou heureux, en désertant l’autel où ils avaient appris à prier, en tournant le dos au
prêtre qui les avait bénis, pour suivre les diverses doctrines
répandues autour d’eux.
Alors ils vont grossir successivement le cortège de tous ceux
qui se disent chercheurs de vérité ; ils recueillent successivement les fruits de tous les arbres de science, plantés de
Bon anniversaire Frédéric !
la main des hommes pour devenir semblables à Dieu, mais
tous ces fruits sont vides et amers, et plusieurs de ceux qui
avaient essayé de s’en nourrir, sentent que ce n’est point assez pour apaiser leur soif et leur faim, et alors ils s’asseyent
tristement, et croyant que la vérité n’est pas, parce qu’ils ne
l’ont pas connue, ils s’endorment affaiblis dans un léthargique sommeil. »
Bienheureux Frédéric OZANAM
Extrait de l’article sur les « Souvenirs de Tusculum ou entretiens philosophiques et
religieux de deux amis près des ruines de la maison de campagne de Cicéron »,
in L’Univers, du 20 février 1834. (cité dans le Livre du Centenaire, p. 9)
E
n février 1834, il écrit un
article sur les «Souvenirs de
Tusculum» pour le journal
L’Univers. La tonalité du texte pourrait
nous faire penser aux Confessions
de saint Augustin. Finesse de la
langue, profondeur de la pensée,
justesse psychologique : ce texte,
bien que son auteur soit encore
très jeune, manifeste une maturité
exceptionnelle. Il n’est pas une
réflexion de type philosophique, il
se présente plutôt comme un sage
avertissement qu’Ozanam adresserait,
indirectement, à ses condisciples
étudiants, élevés dans la religion
catholique comme lui, et confrontés à
Paris, pendant leurs études, à toutes
sortes d’idées, d’opinions, de courants
philosophiques pouvant les éloigner
très loin du christianisme, en une
contrée «où les fruits sont vides et
amers».
Et Ozanam parle d’expérience.
Quelques années auparavant, alors
qu’il était au lycée (1827-1829),
il traversa une crise spirituelle très
grave, mais qu’il pu surmonter
grâce à l’aide de son professeur de
philosophie, l’abbé Noirot, qui l’aida
Des paroles aux actes…
13
à rebâtir sa vie chrétienne sur une
base intellectuelle solide où la foi et
la raison ne s’opposent pas mais se
complètent. Dans ce cheminement
spirituel, où les crises sont inévitables,
le travail sur un plan «moral», l’ascèse,
joue un rôle extrêmement important :
«si quelque temps la conviction
rationnelle lui a manqué, la fidélité
morale lui demeurait». C’est cette
«fidélité morale» qui permet justement
de traverser le doute et toutes les
nuits de la foi.
Nous rejoignons l’Évangile : «Heureux
les cœurs purs, ils verront Dieu». Voir
Dieu, c’est être rassasié pleinement,
éternellement. La vision de Dieu
s’offre autant à l’intelligence qu’à la
pureté du cœur, cette «fidélité
morale», la clarté du regard, sans
ombre, ni trouble. Frédéric Ozanam
nous enseigne à traverser avec lui,
comme lui, toutes les crises à venir
qui secouent ou qui vont secouer la
barque de notre vie. Mais il nous dit :
accroche-toi à l’Église, à l’Évangile
qu’elle proclame à temps et à
contretemps, à la prière. C’est en
elle, avec l’Église que tu atteindras la
Vérité, non pas comme un corpus de
doctrines à défendre ou comme un
bien à faire mais comme un bien à
être. Mais ce chemin est impossible
à parcourir sans la grâce, le «don de
Dieu» dont parle Ozanam, la perle
précieuse, le trésor caché dans le
champ.
N Olivier Bethoux
Pour prier…
Confions au Seigneur toutes celles et ceux qui n’ont « point assez
pour apaiser leur soif et leur faim ». Qu’ils trouvent sur leur route
des frères qui partagent le pain et donnent sens à la vie…
À lire…
JEAN XXIII, Mater et magistra, lettre encyclique, 15 mai 1961.
JEAN-PAUL II, Fides et ratio, lettre encyclique, 14 septembre 1998.
14
Bon anniversaire Frédéric !
U N SUJ E T
D’I N DIGNAT ION…
« Elle est triste et déplorable, la condition de ces malheureuses victimes de la barbarie européenne ! Elle sera toujours un sujet d’indignation et de larmes pour le vrai philosophe et le vrai chrétien, l’horrible cruauté de ces hommes
qui se disent civilisés, et qui au nom d’une religion sainte,
apparaissent aux terres étrangères tels que des brigands ravisseurs pour enlever le fils à sa mère, le père à ses enfants.
Pleurons la honte de nos frères oppresseurs ! Pleurons les
maux de nos frères opprimés ! Mais vous qui les déplorez
avec moi, détournez un instant vos yeux de ces calamités
pour remonter à leur cause ! »
Bienheureuse Rosalie Rendu
FÉVRIER 2013
Bienheureux Frédéric OZANAM
Extrait de la Lettre sur la Traite des Nègres, in L’Abeille française, 15 août 1829.
A l’âge de seize ans, dix-neuf ans avant le décret du gouvernement provisoire conduisant
à l’abolition de l’esclavage dans les colonies françaises sur la proposition de Victor
Schœlcher, député de la Martinique, Frédéric Ozanam dénonçait l’inhumanité de la traite
des Noirs.
Des paroles aux actes…
15
F
rédéric Ozanam perçoit
l’injustice et l’horreur de
l’esclavage, pourtant largement
accepté par la société de son temps.
Son opposition totale avec la foi
chrétienne lui apparaît comme une
évidence, mais il ne s’en tient pas à
ce constat : il invite à remonter aux
causes afin d’attaquer le mal à la
racine. Il accompagne sa conscience
spirituelle d’une recherche rationnelle.
Nous qui avons vocation à être les
porte-parole des pauvres, nous
devons avoir une attitude semblable.
En effet, comme chrétiens, notre
responsabilité est éminemment
engagée car nous connaissons «la
volonté du Maître» (Lc 12, 47).
16
Nous devons d’abord ouvrir les yeux
pour voir le pauvre à notre porte (Mt
25, 44 - Lc 16, 19-31) en dépassant le
consensus social qui, bien souvent,
ferme nos yeux et anesthésie notre
cœur.
Pour cela, notre conscience a besoin
d’être formée afin que nous soyons
capables de déceler les injustices
là où elles se trouvent, de nous en
indigner en vérité et de vouloir y
remédier dans la mesure de nos
moyens. Comme nous y incite la
doctrine sociale de l’Église, les
critères pour éclairer notre conscience
pourraient être la vérité, la justice
l’amour et la liberté, piliers sur
lesquels, «au-delà des droits et des
devoirs, l’ordre de la société repose»
(Pacem in Terris). En effet, «dépourvu
de la vérité, l’amour bascule dans le
sentimentalisme» (Caritas in Veritate,
§ 3), «la charité dépasse la justice,
[…] mais elle n’existe jamais sans
la justice» (Caritas in Veritate, § 6),
et «Amour et vérité se rencontrent,
justice et paix s’embrassent» (Ps 85,
11). Liberté et charité, pour leur part,
Bon anniversaire Frédéric !
sont étroitement liées. L’une ne va pas
sans l’autre. C’est l’amour qui nous
rend libres et, en nous libérant, le
Christ nous engage sur le chemin du
plus grand amour (Jn 15, 12).
l’immigré sans toit, le vieillard ou le
malade en fin de vie, la personne
handicapée, l’enfant à naître…
N Rémy Bertrand
Alors, les yeux grands ouverts sur la
vérité, nous aurons la volonté éclairée
de secourir le pauvre quel qu’il soit :
Pour aller plus loin…
Avons-nous une connaissance suffisante de la doctrine sociale de
l’Église ? Connaissons-nous et consultons-nous le Compendium de
la D.S.E (disponible depuis 2006 sur le site www.vatican.va) ?
Quelle est notre capacité d’indignation et quels « esclaves »
devons-nous libérer aujourd’hui ?
Pour prier…
Prions pour les malades, les persécutés, les esclaves de notre
siècle et demandons au Seigneur d’ouvrir nos yeux sur les
détresses morales et sociales de notre temps.
À lire…
Sr Louise SULLIVAN FdlC, Sœur Rosalie Rendu, Une passion pour les
pauvres, traduit par Raymonde Dubois, Médiapaul, 2007, 426 p.
Christine LAZERGUES, Alain VIDALIES, Sur les diverses formes de
l’esclavage moderne, Rapport d’information, n° 3459, 12 décembre
2001, Assemblée Nationale.
Des paroles aux actes…
17
mars 2 0 1 3
Carême
L A R E NA ISSA NC E
PA R L’ESPR I T…
« J’ai dit, déjà plus d’une fois, que le christianisme n’a
point fait l’humanité, mais qu’il l’a refaite ; il ne crée pas,
il transforme. L’homme existe, mais sous la loi de la chair ;
la famille, mais sous la loi du plus fort ; la cité, mais sous la
loi d’intérêt. Le christianisme réforme l’homme par la renaissance de l’esprit ; la famille, par le droit des faibles ; la cité,
par la conscience publique. De même aussi il trouve dans les
sociétés antiques des temples, des sacrifices, des prêtres : il
ne les abolit pas, il les purifie ; le christianisme n’a rien aboli,
il a tout régénéré. »
Bienheureux Frédéric OZANAM
La Civilisation chrétienne au V e siècle,
Douzième leçon, « Les institutions chrétiennes »,
Œuvres Complètes, 3e Édition, 1855, tome II, p. 28
L
e Carême est ce temps donné
par Dieu pour «refaire», se
laisser «transformer», «purifier»
et «régénérer». Semper reformanda.
18
Toujours en réforme. Toujours en
train d’«assouplir ce qui est raide»,
de «réchauffer ce qui est froid», de
«rendre droit ce qui est faussé».
Bon anniversaire Frédéric !
certes, mais, ô combien plus juste !
Nous avons bien, comme nous y
invite saint Paul, à nous «dépouiller du
vieil homme» pour «revêtir l’homme
nouveau 3.» L’Apôtre des nations en
précise le moyen : «il vous faut être
renouvelés par la transformation
spirituelle de votre intelligence 4.»
Aussi Frédéric souhaitait de tout son
cœur, de toute son âme, sa force et
son intelligence, voir se transformer
intelligemment les institutions de
la France pour le bien de tous les
hommes en tenant compte des plus
faibles. Il avait compris quels étaient
les déséquilibres et les injustices
qui menaçaient grandement la
paix sociale et il avait humblement
et intelligemment proposé en
Nous sommes toujours trop vite tentés conséquence des moyens pour les
d’abolir. Et par là, nous risquons de
corriger. Saint Paul ne s’adressait pas
choisir la voie facile du rejet et de
à un seul Corinthien. N’y voyons pas
rester dans la logique de l’exclusion,
ici un vouvoiement de politesse. Saint
celle-là même que nous dénonçons.
Paul s’adressait à une communauté,
La voie de la purification – comme
à un corps, à un ensemble donc.
l’on purifie l’or – est bien plus ardue, Frédéric fait la même chose : en
Patiemment. Pas à pas. Pierre par
pierre. L’Église, les institutions, les
hommes, ma vie personnelle, nos
relations sont appelés sans cesse à
se réformer. Nous ne désirons pas
un «autre» monde créé de toute
pièce par quelques technocrates
et conceptuellement parfait mais,
comme Frédéric Ozanam, nous
désirons un monde fait «autrement»
par la participation de tous car les
hommes, les familles et les cités
resteront. Nous désirons un monde
«autrement» avec des hommes qui
vivent de l’Esprit, avec des familles qui
donnent toute la place – et une place
active – aux plus faibles, avec des
cités régies par le bien commun.
3
Éphésiens 4, 22-24 et Colossiens 3, 9-10.
Éphésiens 4, 23.
4
Des paroles aux actes…
19
écrivant dans L’Ère Nouvelle, il
s’adresse à tous les hommes, à la
société française dans son entier.
Quand Dieu prend la parole, par la
bouche d’un prophète, Il s’adresse à
tout le peuple…
Aussi, dans cette optique, la
conversion ou la réforme concerne
«notre intelligence» ou pour dire
autrement nos facultés, nos aptitudes
ou nos capacités : quels regards,
quelles compréhensions des choses,
quelles paroles, quelles pratiques
– mêmes charitables – allons-nous
purifier et transformer spirituellement
en Conférence, dans la Société de
Saint-Vincent-de-Paul, dans l’Église,
dans notre démocratie, en Europe,
dans le monde, ceci pour le bien de
tous ? L’enjeu n’est pas tant ici un
progrès personnel – moi et mon Dieu
– mais le progrès, la transformation
en bien de l’humanité tout entière :
un meilleur partage des richesses,
un meilleur accès aux ressources
nécessaires pour vivre, une meilleure
possibilité d’éducation et de
formation…
N Jérôme Delsinne cm
Pour prier…
Avant de faire ou « refaire », de « régénérer » la société,
demandons au Seigneur la « renaissance de l’Esprit ».
20
Bon anniversaire Frédéric !
AU BOR D
DU SE N T I E R…
« L’humanité de nos jours me semble comparable au voyageur dont parle l’Évangile : elle aussi, tandis qu’elle poursuivait sa route dans les chemins que le Christ lui a tracés,
elle a été assaillie par des ravisseurs, par les « larrons » de la
pensée, par des hommes méchants qui lui ont ravi ce qu’elle
possédait : le trésor de la foi et de l’amour ; et ils l’ont laissée
nue et gémissante et couchée au bord du sentier. Les prêtres
et les lévites ont passé, et cette fois, comme ils étaient des
prêtres et des lévites véritables, ils se sont approchés de cet
être souffrant, et ils ont voulu le guérir. Mais, dans son délire,
il les a méconnus et repoussés.
Octave de Pâques
AVRIL 2013
À notre tour, faibles Samaritains, profanes et gens de peu de
foi que nous sommes, osons cependant aborder ce grand
malade. Peut-être ne s’effrayera-t-il point de nous ; essayons
de sonder ses plaies et d’y verser l’huile, faisons retentir à
son oreille des paroles de consolation et de paix ; et puis,
quand ses yeux se seront dessillés, nous le remettrons entre
les mains de ceux que Dieu a constitués les gardiens et les
médecins des âmes, qui sont aussi, en quelque sorte, nos
hôteliers dans le pèlerinage d’ici-bas, puisqu’ils donnent à
nos esprits errants et affamés la parole sainte pour nourriture
et l’espérance d’un monde meilleur pour abri.
Des paroles aux actes…
21
Voilà ce qui nous est proposé, voilà la vocation sublime
que la Providence nous a faite. Mais que nous en sommes
peu dignes et que nous fléchissons facilement sous le fardeau ! Je parle de nous autres, étudiants de Paris, colonie
du peuple de Dieu sur la terre étrangère. Il semble que le
spectacle de cette corruption et de cette misère devrait nous
rendre ardents et forts. Il semble qu’ayant devant nous de
grands vices, et au-dessus de nous de grandes vertus, nous
dussions être comme un bataillon serré en face de l’ennemi,
rangé sous les drapeaux qu’il aime. Et malheureusement il
n’en est point ainsi. Je ne sais quelle langueur semble s’être
emparée de nous. Je ne crains pas de dire du plus grand
nombre ce qui est vrai de moi en particulier. Nous sommes
frappés d’un abattement général, nous remplissons nos devoirs par habitude, nous continuons nos bonnes œuvres par
routine, mais plus d’enthousiasme, plus de bouillant prosélytisme, plus de ces rayons de Charité qui au commencement
venaient quelquefois illuminer et échauffer nos âmes. Nous
sommes très nombreux, mais nous perdons en intensité ce
que nous gagnons en étendue. »
Bienheureux Frédéric OZANAM
À Léonce Curnier, lettre du 23 février 1835.
22
Bon anniversaire Frédéric !
P
ermets-moi tout d’abord de
te tutoyer, toi qui es mon aîné
dans la foi mais mon cadet
quant à ton bref pèlerinage sur la terre
des vivants car aujourd’hui je suis
beaucoup plus âgé que toi. Toi aussi,
cher Frédéric, au XIXe siècle, en ce
23 février 1835, à travers ton courrier
adressé à ton ami Léonce Curnier
– qui fut le fondateur à Nîmes de la
première Conférence provinciale –, tu
faisais déjà le constat de ce que nous
vivons aujourd’hui en France et dans
le monde en ce XXIe siècle. Oui «la
terre s’est refroidie», oui «l’humanité
de nos jours est comparable au
voyageur dont parle l’Évangile, elle
aussi, tandis qu’elle poursuivait la
route tracée par le Christ elle a été
assaillie par des ravisseurs, des
larrons de la pensée qui lui ont ravi ce
qu’elle possédait : le trésor de la foi et
de l’amour.»
ô combien ces écrits prophétiques
nous interpellent au sein de notre
chère Société de Saint-Vincentde-Paul ! Cette Société que tu as
fondée avec tes amis en désirant
que ses membres humbles, simples
et fraternels soient à la lumière de
l’Évangile les témoins de Celui qui
est amour à travers l’exercice de
la charité. Car : «où sont amour
et charité Dieu est présent 5».
Soyons donc conscients que notre
engagement de vincentien est avant
tout une vocation, une réponse à
un appel, devenu désir, de suivre le
Christ souffrant dans ses membres
les plus faibles. Restons-y attachés.
Souvenons-nous du jour où, pour la
première fois, nous avons frappé à
la porte de la Conférence qui allait
devenir la nôtre pour lui offrir nos
services. Le Seigneur nous attendait
pour vivre cette vocation qu’il avait
faite éclore au sein de notre âme :
aller à sa rencontre à travers le service
Hymne latine chantée le Jeudi Saint pendant le lavement des pieds.
5
Des paroles aux actes…
23
des pauvres. «Serviteur des pauvres»
et «serviteur de Jésus-Christ» selon
les belles expressions de saint Vincent
de Paul.
Tu as dû toi aussi, mon cher
Frédéric, être interpellé comme je le
fus lors de mon éveil à la vocation
vincentienne par ces paroles du
Christ : «des pauvres il y en aura
toujours parmi vous 6». Et à cause de
cela j’ai ressenti ce pressant appel
qui me faisait obligation d’aller à leur
rencontre et d’essayer de soulager
bien modestement leur misère. Notre
vocation qui nous pousse à rencontrer
l’autre à travers le Tout Autre, doit se
faire fraternellement avec beaucoup
d’humilité, de tendresse, de respect,
d’amour. Notre vocation n’est pas
uniquement de soulager les misères
matérielles, mais apporter aussi cette
espérance qui va permettre à l’ami en
difficulté de grandir, peut-être, dans la
foi car «l’homme ne vit pas seulement
de pain». Notre vocation nous invite
aussi à porter un regard global sur la
société, à ne pas rester inactifs devant
les injustices et les discriminations
mais aussi devant le rejet de la plupart
des valeurs qui sont les nôtres et
qu’actuellement l’on bafoue, l’on
rejette, l’on méprise.
Notre vocation nous appelle à la
douceur, à l’humilité mais aussi à la
fermeté. Il nous appartient de faire
entendre notre voix lorsque notre
société court à la dérive ou à sa perte,
comme tu l’as fait Frédéric, avec
courage durant toute ta vie qui fut si
brève – ta révolte devant l’esclavage,
le travail des enfants, le salaire
insuffisant –, mais aussi ton énergique
protestation en Sorbonne lorsque,
étudiant, tu as été meurtri par les
attaques incessantes contre la foi en
Jésus-Christ. Notre vocation est avant
tout le témoignage de l’Amour de
Dieu pour les hommes. N’ayons pas
peur de dire que notre action caritative
prend sa source dans la lumière de
l’Évangile et n’oublions pas qu’elle
nous invite personnellement à vivre en
présence de Dieu qui nourrit notre foi
par la prière et les sacrements.
Matthieu 26, 11.
6
24
Bon anniversaire Frédéric !
En cette année 2013, où nous fêtons
ton 200 e anniversaire, dans un monde
ô combien matérialiste et qui s’éloigne
de façon tragique de cette civilisation
de l’amour si chère au bienheureux
Jean-Paul II et que, toi aussi, tu as
appelé de tous tes vœux en fondant
notre Société de Saint-Vincent-dePaul, ouvre le cœur des hommes et
des femmes de notre temps afin qu’ils
accueillent ce petit grain de folie qui
nous pousse à la vocation à la charité.
Je sais, mon cher Frédéric, toi l’ami
fidèle, que nous pouvons compter sur
toi, sur ta prière, sur celle de Marie
notre mère et de tes amis les saints et
bienheureux dont tu partages la joie
céleste. Je termine ce petit message
d’amitié en te souhaitant, cher
Frédéric, un bon anniversaire.
N Charles Martre
Pour prier…
En cette année du 200 e anniversaire de sa naissance, que le
bienheureux Frédéric Ozanam intercède pour sa chère Société de
Saint-Vincent-de-Paul afin que le Seigneur envoie de nombreux
ouvriers dans les champs de la charité et en particulier des ouvriers
de la dernière heure.
À lire…
Michel-Marie ZANOTTI-ZORKINE,
La passion de l’amour - Chemin de Croix,
Édition Ad Solem, collection « Spiritualité », avril 2012, 64 p.
Des paroles aux actes…
25
mai 2 0 1 3
Pentecôte
DES HOM M ES
PLUS GR A N DS
E T M E I L L EU RS…
« Il est douloureux de voir le génie déserter solennellement et
passer transfuge dans le camp opposé ; transfuge inutile car,
en abdiquant la foi, il abdique son passé et, par conséquent,
sa gloire et sa force, double sujet de deuil pour ceux qui
l’aimaient. Et maintenant, qui remplira la place que ceux-ci
laissent vide ? Où sont les Ambroise, les Jérôme, les Augustin, qui viendront s’asseoir sur le siège désert de Tertullien ? Qui osera ramasser la lyre tombée dans la poudre, et
achever l’hymne commencé ? Je sais que Dieu, que l’Église,
n’ont pas besoin de poètes ni de docteurs ; mais ceux qui
en ont besoin, ce sont les faibles croyants que les défections scandalisent ; ce sont ceux qui ne croient pas, et qui
méprisent notre pauvreté d’esprit ; c’est nous-mêmes, qui
avions besoin parfois de voir devant nous des hommes plus
grands et meilleurs, dont le pied frayât notre sentier, dont
l’exemple encourageât et enorgueillît notre faiblesse. Nous
ne pouvons pas, jeunes gens chrétiens, penser à remplacer
ces hommes ; mais ne pourrions-nous pas en faire la monnaie, et combler par le nombre et le travail la lacune qu’ils ont
laissée dans nos rangs ?
26
Bon anniversaire Frédéric !
[…] Oui, nous sommes des serviteurs inutiles ; mais nous
sommes des serviteurs, et le salaire n’est donné qu’à la
condition du travail que nous ferons dans la vigne du Seigneur en l’endroit qui nous sera assigné. Oui, la vie est méprisable, si nous la considérons dans l’usage que nous en faisons, mais non si nous voyons l’usage que nous pouvons en
faire, si nous la considérons comme l’œuvre la plus parfaite
du Créateur, comme le vêtement sacré dont le Sauveur a
voulu se couvrir : la vie alors est digne de respect et d’amour.
Prions l’un pour l’autre, mon bien cher ami, défions-nous
de nos ennuis, de nos tristesses, de nos défiances. Allons
simplement où la miséricordieuse Providence nous conduit,
contents de voir la pierre où nous devons poser le pied, sans
vouloir découvrir toute la suite et toutes les sinuosités du
chemin. »
Bienheureux Frédéric OZANAM
À François Lallier, lettre du 5 novembre 1836.
A
u début de sa lettre, Frédéric
Ozanam fait allusion à
la condamnation par
Grégoire XVI à Rome de l’ouvrage
de l’abbé de la Mennais, Les affaires
de Rome, et du poème Jocelyn
d’Alphonse de Lamartine. Il exprime
sa douleur devant les défections
de leurs auteurs par rapport à
l’Église et la difficulté de trouver des
personnalités pouvant remplacer
les Docteurs de l’Église et servir
d’exemples.
Des paroles aux actes…
27
Cette réflexion l’amène à encourager
les jeunes chrétiens à un engagement
fort pour combler les lacunes
laissées et être encore davantage
au service de l’Église. Il rappelle que
les chrétiens sont des serviteurs et
doivent, en serviteurs fidèles, suivre
la voie que le Seigneur les incite à
suivre : «Seigneur, tu m’as confié
deux talents ; voilà, j’en ai gagné
deux autres. Très bien, serviteur bon
et fidèle, tu as été fidèle pour peu de
choses, je t’en confierai beaucoup.
Entre dans la joie de ton maître !»,
(Mt 25, 22-23). Être au service des
plus pauvres est bien dans l’objectif
de tout vincentien et chaque confrère
en est sans doute bien convaincu.
Cependant, dans sa lettre, Frédéric
Ozanam fait allusion au texte de
saint Luc (Lc 17, 5-10) en soulignant
que «nous sommes des serviteurs
inutiles». Cela paraît bien dur et n’est
guère encourageant. On peut se
demander à quoi bon servir si l’on ne
sert à rien ! Certes Jésus conte cette
parabole pour ceux qui seraient tentés
de se croire indispensables et qui
28
risquent de s’enorgueillir de ce qu’ils
ont pu réaliser. Mais le texte ne nous
incite pas seulement à la recherche
de l’humilité. Il va plus loin, plus
précisément pour indiquer une autre
voie que celle d’une utilité plus ou
moins payante des services rendus.
Dans notre société actuelle,
on est obsédé par l’idée de
résultat et d’efficacité. Or, pour
Dieu, ce qui importe n’est pas la
reconnaissance du service mais
plutôt la reconnaissance du serviteur
en tant que personne. Le Seigneur
se considère lui-même comme
serviteur : «le Fils de l’homme n’est
pas venu pour être servi, mais pour
servir et donner sa vie en rançon pour
la multitude», (Mt 20, 28). Il veut nous
faire comprendre que, malgré nos
maladresses et nos fautes, Il a besoin
de nous, Il nous prend à son service.
Il le fait parce qu’Il nous aime. Et cet
amour, Il ne le compte pas, Il nous le
donne.
Il ne faut plus chercher à savoir si l’on
est utile mais plutôt rendre grâce et
Bon anniversaire Frédéric !
remercier Dieu de ce qu’il veut bien
nous prendre à son service.
Le Seigneur nous ouvre la voie
de la gratuité, le chemin où nous
pouvons découvrir et vivre la grâce
d’être inutile. Pour Jésus, y a-t-il de
plus grandes choses que d’aimer ?
Aimer, c’est servir. Parce qu’Il nous
fait confiance, Il nous invite à le servir
davantage dans nos frères en les
aimant.
À l’exemple de Frédéric Ozanam,
sachons mettre davantage encore
notre belle devise vincentienne en
pratique : «Aimer, Partager, Servir».
N Juliette Asta
Pour aller plus loin…
Comment pouvons-nous suivre le Christ dans nos actions
vincentiennes ?
Savons-nous toujours répondre à son appel de façon
désintéressée ?
Pour prier…
Le grand livre des prières, textes choisis et présentés par Christine
Florence et la rédaction de Prier, préface de Mgr Albert Rouet, Desclée De Brouwer, Paris, collection Prier, octobre 2010, 537 p.
À lire…
Évangile selon saint Luc 12, 35-43 ; 17, 5-10
et Évangile selon saint Matthieu 20, 20-27 ; 24, 42-51 ; 25, 14-30.
Des paroles aux actes…
29
Mariage de Frédéric et d’Amélie, le mercredi 23 juin 1841
JUIN 2013
30
QU I VI E N DR A
COM B L E R
C E GR A N D VI DE ?
« Je balbutie une langue que je ne sais point encore ; je parle
de choses qui ne me sont point révélées. Chez moi l’imagination s’est développée de bonne heure, la sensibilité a été
plus tardive ; bien que mon âge soit celui des passions, à
peine en ai-je senti les premières approches. Ma pauvre tête
a déjà bien souffert, mais mon cœur n’a pas encore connu
d’autres affections que celles du sang et de l’amitié. Cependant il me semble que j’éprouve depuis quelque temps les
symptômes avant-coureurs d’un ordre nouveau de sentiments, et je m’en effraye ; je sens en moi se faire un grand
vide que ne remplit ni l’amitié, ni l’étude ; j’ignore qui viendra
le combler : sera-ce Dieu ? Sera-ce une créature ? Si c’est
une créature je prie qu’elle ne se présente que tard, quand je
m’en serai rendu digne ; je prie qu’elle apporte avec elle ce
qu’il faudra d’avantages temporels et de charmes extérieurs
pour qu’elle ne laisse place à aucun regret ; mais je prie surtout qu’elle vienne avec une âme excellente, qu’elle apporte
une grande vertu, qu’elle vaille beaucoup mieux que moi,
qu’elle m’attire en haut, qu’elle ne me fasse pas descendre,
qu’elle soit généreuse, parce que souvent je suis pusillanime, qu’elle soit fervente, parce que je suis tiède dans les
Bon anniversaire Frédéric !
choses de Dieu, qu’elle soit compatissante enfin, pour que
je n’aie pas à rougir devant elle de mon infériorité. Voilà mes
vœux, voilà mes rêves ; mais, comme je vous l’ai dit, rien
n’est plus impénétrable que mon propre avenir.
Vivez heureux, vous dont la route est maintenant toute tracée : Vivite felices quibus est fortuna peracta. Mais, quand
au milieu de vos jouissances, vous aurez un moment de
libre, priez pour moi qui ne sais encore où je vais.
Votre ami. »
Bienheureux Frédéric OZANAM
À Léonce Curnier, lettre du 29 octobre 1835.
Q
uand il envoie cette lettre,
le 29 octobre 1835, à son
grand ami Léonce Curnier –
fondateur de la première Conférence
de Charité en dehors de Paris en
1834 à Nîmes – qui lui annonce son
prochain mariage, Frédéric n’a que
vingt-deux ans. Il poursuit des études
de droit et de lettres à Paris.
Il connaît peu des choses de l’amour :
«je balbutie une langue que je ne
sais point encore». Cependant il lui
apparaît que cela doive évoluer. Mais
dans quelle direction ? «Sera-ce
Dieu ? Sera-ce une créature ?». Il est
fort indécis, il le sera pendant cinq ans
encore avant de rencontrer Amélie.
Même s’il «éprouve les symptômes
avant-coureurs d’un ordre nouveau
de sentiments», il fait part de ses
émotions dont certaines sont très terre
à terre, mais bien compréhensives et
montrent bien la difficulté de prendre
position : «je prie qu’elle apporte
avec elle ce qu’il faudra de charmes
extérieurs pour qu’elle ne laisse place
à aucun regret». Il attend beaucoup
de sa future épouse. Il souhaite qu’elle
possède d’autres qualités que lui :
générosité, ferveur, «qu’elle vaille
beaucoup mieux que moi» qu’elle soit
Des paroles aux actes…
31
«compatissante pour que je n’ai pas à
rougir devant elle de mon infériorité».
À la fois désirs égoïstes – il écrit ce
qu’il espère de sa future épouse –
mais aussi et beaucoup plus souhaits
que l’être choisi lui apporte beaucoup.
Il a besoin d’une femme qui le fera
grandir dans son amour de Dieu.
Frédéric emploie le «je» et il s’adresse
à celle qu’il ne connait pas encore
avec un «elle» très impersonnel. Il
aura beaucoup de mal à transformer
ce «moi» et ce «vous» en nous :
«désormais, nous dirons nous». Mais
comme toujours, dans les lettres
de Frédéric, il fait confiance en la
Providence. Sans le dire – «rien ne
m’est plus impénétrable que mon
propre avenir» – il comprend que
le couple est une aventure à deux,
journellement recommencée et
grandie.
Cela est toujours vrai et les qualités
de l’homme et de la femme doivent
être en harmonie la plus parfaite
pour que leur amour s’épanouisse
non seulement à travers eux, non
seulement à travers leurs enfants,
mais aussi au travers des rencontres
de la vie.
Même quand les bourrasques
du temps, parfois, chahutent
l’embarcation, elle résistera si les
époux se font confiance et se mettent
sous la protection de Dieu.
N Christian Verheyde
Pour prier…
Confions au Seigneur les couples qui se préparent au mariage,
toutes celles et ceux qui hésitent à prendre un engagement ou qui
« s’en effraient ».
Demandons au Seigneur qu’Il donne son Esprit aux époux pour
qu’ils soient, comme Amélie et Frédéric, « généreux et « fervents ».
Confions enfin au Seigneur toutes celles et ceux qui « ressentent
en eux un grand vide » : qu’ils trouvent de vrais amis.
32
Bon anniversaire Frédéric !
U N R EST E
DE DIGN I T E…
« Il faut achever, et, pour juger le divorce comme institution démocratique, il faut descendre à l’application de la loi,
c’est-à-dire du titre VI du Code civil, la plus sage législation qui soit en cette matière, et la seule praticable, si l’on
veut conserver au mariage un reste de dignité, un reste de
contrainte aux passions. Les rédacteurs du Code civil, ces
juges sévères du cœur humain, avaient pensé rendre le divorce rare en le rendant dispendieux. Ce n’est pas ici le lieu
de dresser le tableau des frais d’une instance en dissolution
de mariage. Mais il suffit de parcourir les soixante articles
qui en règlent la procédure (254-294), de calculer tout ce
qu’elle exige d’inventaires, de comparutions avec assistance d’avoué, de pièces fournies, d’enquêtes, de procèsverbaux, de jugements interlocutoires ou définitifs, tout ce
qu’elle permet d’incidents, de défauts, d’appels et de pourvois ; pour se figurer, avec un peu d’habitude du palais, le
formidable chiffre auquel s’élèvera la taxe. Ce signe n’est
pas celui d’une institution populaire. Et ne dites pas qu’on
y pourvoira en rendant la justice gratuite pour les pauvres :
car combien de citoyens consentiront à recevoir la justice
comme une aumône ?
Ni en rendant la justice gratuite pour tous : car vous ne voulez pas inaugurer le règne de la fraternité universelle en déDes paroles aux actes…
Saint Benoît, Abbé, Patron de l’Europe
J U I llet 2 0 1 3
33
chaînant sur la société le déluge des procès que la crainte
salutaire du tarif ne contiendrait plus. »
Bienheureux Frédéric OZANAM
Mélanges, « Du Divorce »,
Œuvres Complètes, 3e Édition, 1855, tome VII, pp. 179-180.
R
endre le divorce rare en le
rendant dispendieux…» Que
nous sommes loin de cette
réalité ! Nous savons, à travers nos
accueils, nos visites, à quel point
l’éclatement des couples est devenu
tristement commun et à quel point
ces situations conduisent parfois à de
grandes précarités, surtout pour les
femmes.
Au-delà des difficultés matérielles, la
grande, l’immense solitude de celui
ou celle qui se retrouve seul(e), sans
personne à qui confier les difficultés
quotidiennes, sans regard amoureux à
donner ou à recevoir doit être et rester
pour nous une souffrance à partager.
34
«J’ai peine de votre peine»
disait Monsieur Vincent. Dans
l’accompagnement que nous
faisons de ces familles déchirées,
nous devons savoir trouver des
causes d’émerveillement, pour
que, sous notre regard, ces familles
retrouvent l’estime d’elles-mêmes, et
redécouvrent la fierté, l’envie d’aller
de l’avant, le désir de reconstruire
leur vie.
Lorsque nous accompagnons des
personnes qui viennent de se séparer
ou qui sont en train de divorcer,
sachons que la procédure est difficile
à vivre : elle marque le tournant de la
fin d’un rêve, le rêve d’une vie à deux
avec un projet commun. Elle ouvre
Bon anniversaire Frédéric !
une vie de solitude et de galères. La
procédure de divorce révèle petit à
petit cette triste réalité. Elle est de plus
parfois violemment agressive et pour
mieux se venger du conjoint, on se
sert des enfants... À nous de savoir
être des porteurs de paix, des apôtres
de douceur.
«Apprenez de moi que je suis doux
et humble de cœur»,
(cf. Mt 11, 29). À une période
où ils sont entourés de rancœur,
d’agressivité, de conseils plus ou
moins bons, la douceur que nous
apporterons sera une bénédiction ;
la paix que nous partagerons sera
consolante et réconfortante.
N Migueline Houette
Pour aller plus loin…
Sachons reconnaître, à chacune de nos visites, les merveilles de
Dieu, Dieu à la fois présent et caché agissant en chacun de nous.
Notre regard émerveillé valorisera ceux que nous visitons.
Sachons accompagner sans juger. Difficile exercice…
Pour prier…
Évangile selon saint Marc, chapitre 10, « Jésus, l’ayant regardé, l’aima… »
Des paroles aux actes…
35
AOÛT 2013
Saint Augustin, Évêque et Docteur
UNE MêME
ESPé R A NC E…
« Dans le christianisme, la fin principale du mariage n’est
pas la naissance des enfants ; saint Augustin le dit dans un
admirable langage, et c’est aussi la doctrine de Tertullien ; la
fin principale du mariage, c’est de donner l’exemple, le type,
la consécration primitive de toute société humaine dans cet
amour qui en est le lien. Et comme ce type de toute société
doit être l’unité parfaite, et par conséquent une unité où tout
soit égal et indissoluble, il s’ensuit que dans le mariage chrétien tout se partage et rien ne se rompt ; tout se partage,
devoirs, condition : les devoirs sont égaux pour les deux
parties contractantes. Toutes les deux doivent apporter une
même espérance, un cœur égal aux mêmes chaînes destinées à les unir toujours. »
Bienheureux Frédéric OZANAM
La Civilisation au V e siècle,
Quatorzième leçon, « Les femmes chrétiennes »,
Œuvres Complètes, 3e Édition, 1855, tome II, pp. 81-82.
36
Bon anniversaire Frédéric !
C
’est en remontant aux
sources de l’institution du
mariage au début de la
chrétienté que Frédéric Ozanam
contredit en première lecture la finalité
du mariage telle qu’elle était et est
encore, couramment formulée ; et il
est très affirmatif : «La fin principale
du mariage n’est pas la naissance
des enfants». C’est pour «rétablir la
femme à sa place naturelle dans la
famille» et il poursuit son propos sur
l’égalité des devoirs des deux époux,
«des deux parties contractantes».
Cette approche reste d’une grande
actualité au XXIe siècle et dans
l’Église, à telle enseigne que les
«Semaines Sociales 2012» ont été
consacrées au thème de la parité
homme-femme. L’on comprend bien
dans cette perspective l’indissolubilité
du mariage, qui, autrement, n’aurait
pas de sens pour un couple sans
enfants si ceux-ci étaient la finalité
première du mariage.
Mais Frédéric Ozanam va plus loin, la
finalité du mariage «c’est de donner
l’exemple», de constituer le «type»
de toute société ; il y a là une vision
du rôle du couple chrétien dans la
société comme témoin d’amour et
d’espérance par l’unité sociale qu’il
constitue ; ce témoignage, le couple
Amélie-Frédéric en est un vivant
exemple.
C’est dans cette perspective que
la Société de Saint-Vincent-dePaul en Italie a proposé il y a déjà
plusieurs années la notion de
«Conférence familiale» composée
exclusivement de couples. L’intérêt
de cette formule est multiple. Elle
Des paroles aux actes…
37
permet à des couples de partager
leur engagement et d’échanger
entre eux sur les équilibres à
trouver au sein du couple entre vie
familiale, activité professionnelle et
engagement associatif à la lumière
de la spiritualité vincentienne. Elle
permet aussi de faire participer toute
la famille, notamment les enfants à
l’engagement vincentien des parents.
N Bertrand Ousset,
Président National
Pour prier…
Prions le Seigneur pour que tous les couples chrétiens s’attachent
à porter autour d’eux le témoignage d’amour et d’espérance
partagés.
à lire…
Bernadette et Bernard CHOVELON, préface de Xavier LACROIX ,
L’aventure du mariage, guide pratique et spirituel,
Cerf, collection « Épiphanie »,2002, 208 p.
Mgr Renaud de DINECHIN, Charles MERCIER et Luc DUBRULLE,
Frédéric Ozanam, l’homme d’une promesse,
Desclée de Brouwer, 2010, 185 p., le chapitre « Frédéric Ozanam en
privé », pp. 125-146.
38
Bon anniversaire Frédéric !
U N R EST E
DE DIGN I T E…
« Mon cher Ernest,
[…] Pauvres gens que nous sommes, nous ne savons pas si
demain nous serons en vie et nous voudrions savoir ce que
nous ferons dans 20 ans d’ici. Nous ignorons quelles sont
nos facultés, quel peut être notre bonheur et nous voudrions
nous tracer une route inflexible pour le développement des
facultés dont nous ne sommes pas sûrs, pour atteindre un
bonheur qui est pour nous un mystère. D’ailleurs, considère
ceci : à quoi sert de savoir ce qu’on doit faire - sinon à faire
bien ? À quoi sert de connaître sa destination - sinon à l’accomplir ? À quoi bon voir le chemin - sinon à marcher ? Or,
pourvu que le voyageur y voie à dix pas devant lui, n’arrivera-t-il pas aussi bien que s’il avait sous les yeux le plan
de l’architecte ? Et ne nous suffit-il pas de connaître notre
devoir et notre destinée pour le moment le plus prochain de
l’avenir, sans vouloir étendre nos regards jusqu’à l’infini ? Si
nous savons ce que Dieu veut faire de nous demain, n’est-ce
pas assez et qu’avons-nous besoin de nous soucier de ce
qu’il nous commandera dans dix ans, puisque d’ici là il peut
nous appeler au repos ?
Bienheureux Frédéric OZANAM, le 9 septembre
SEPTEMBRE 2013
Je ne dis pas pour cela qu’il faille être insouciant et paresseux
Des paroles aux actes…
39
à suivre une vocation indiquée, mais qu’il faut se contenter
d’en connaître une partie et la poursuivre avec énergie et
calme sans s’inquiéter de ce qui est encore caché. La pensée de l’incertitude des choses humaines ne doit point briser
nos courages et éteindre notre activité : elle doit au contraire
nous attacher plus fort au devoir du présent en nous convainquant de l’ignorance de l’avenir. Tu trouverais bien de la paix
et du contentement si tu pouvais te pénétrer de ces idées
que nous ne sommes ici-bas que pour accomplir la volonté
de la Providence, que cette volonté s’accomplit jour par jour
et que celui qui meurt laissant sa tâche inachevée est tout
aussi avancé aux yeux de la suprême justice que celui qui
a le loisir de l’achever tout entière ; que l’homme ne peut
pas plus créer son être moral qu’il ne saurait créer son être
physique, qu’on ne se fait point orateur, philosophe, artiste,
homme de génie, mais qu’on est fait tel peu à peu et insensiblement par la conduite de Dieu. Les plus grands hommes
sont ceux qui n’ont jamais fait d’avance le plan de leur destinée, mais qui se sont laissés mener par la main. Un peu
de confiance au Père céleste sans la volonté duquel pas un
cheveu ne tombe d’une tête humaine. […]
Ton cousin. »
Bienheureux Frédéric OZANAM
À Ernest Falconnet, lettre du 11 avril 1834.
40
Bon anniversaire Frédéric !
F
aire bien», «accomplir sa
destination», «voir le chemin»
et «marcher» avec ses
compagnons, son épouse Amélie et
sa fille Marie. Telle a été la courte et
intense vie du bienheureux Frédéric
Ozanam. Tel a été son bonheur sur
cette terre…
Dans cette première moitié du XIXe
siècle, l’espérance de vie moyenne
en France n’était pas très longue : à
peine 30 ans. En 1810, elle fait un
bond à 37 ans en partie grâce à la
vaccination contre la variole. Pendant
les guerres napoléoniennes et la
guerre de 1870, cette espérance
décline brutalement et repasse
sous les 30 ans 7. Les longs plans
de carrières étaient rares. Nous
comprenons mieux alors cette
appréhension de son cousin Ernest
que partage Frédéric : «Nous ne
savons pas si demain nous serons
en vie.»
Notre espérance de vie n’est plus
la même aujourd’hui grâce aux
progrès continus de la médecine et
la paix durable. Cependant l’inconnu
demeure : «Veillez donc car vous ne
savez ni le jour ni l’heure 8» nous dit
Jésus. Que ferons-nous «dans 20 ans
d’ici» ? Quel visage aura la Société
de Saint-Vincent-de-Paul dans vingt
ans ? Que deviendra l’Église dans
vingt ans ? Le monde sera-t-il encore
debout tel qu’il est, se développera-t-il
durablement dans vingt ans ? Nous
n’en savons rien. Nous ne sommes
sûrs de rien en ces domaines, en
ces «facultés». Nous ne pouvons
«tracer de route inflexible.» Pourquoi
«vouloir étendre nos regards vers
l’infini» ? Nous sommes, comme l’a
été Frédéric, des «voyageurs qui n’y
voyons pas à dix pas devant nous» et
qui cependant arrivent aussi bien «à
destination» que si nous avions «sous
les yeux le plan de l’architecte.»
Voir seulement «dix pas devant» avec
pour compagne cette «pensée de
l’incertitude des choses humaines»
n’a pas découragé Frédéric ni fait
baisser son activité. Il a accompli la
volonté de la Providence «jour par
jour». Il s’est contenté de savoir ce
Des paroles aux actes…
41
que Dieu voulait de lui «demain»
et non «dans dix ans.» Loin de
l’insouciance et de la paresse, il a
poursuivit sa vocation «avec calme et
énergie». Et il est mort en «laissant
sa tâche inachevée.» Et la Société de
Saint-Vincent-de-Paul poursuit son
chemin…
«C’est bien, Frédéric, bon et fidèle
serviteur, tu as été fidèle en peu de
choses, sur beaucoup je t’établirai ;
viens te réjouir avec ton maître 9.»
N Jérôme Delsinne cm
7
S ource : INED, Graphique du mois, L’Évolution de l’espérance de vie en France,
N° 5, octobre 2006 sur www.ined.fr
8
Matthieu 25, 13 ; Matthieu 24, 36 et Matthieu 24, 50.
9
Matthieu 25, 23.
Pour prier…
Confions au Seigneur celles et ceux qui s’inquiètent de l’avenir et
qui désespèrent. Prions pour celles et ceux qui sont en recherche
de vocation. Qu’ils croisent sur leur route des femmes et des
hommes « énergiques », pétris d’espérance et de foi.
À lire…
Gérard Cholvy, Frédéric Ozanam, Éd. ARTEGE, 2012, 320 p., nouvelle
biographie spécial bicentenaire.
42
Bon anniversaire Frédéric !
U N E E NSE IGN E
PAS BA NA L E…
« Nous lisons maintenant, au lieu de l’Imitation, la Vie de saint
Vincent de Paul, pour mieux nous pénétrer de ses exemples
et de ses traditions. Un saint patron n’est pas en effet une
enseigne banale pour une Société comme un Saint-Denys
ou un Saint-Nicolas pour un cabaret. Ce n’est même pas
un nom honorable sous lequel on puisse faire bonne contenance dans le monde religieux : c’est un type qu’il faut s’efforcer de réaliser, comme lui-même a réalisé le type divin
de Jésus-Christ. C’est une vie qu’il faut continuer, un cœur
auquel il faut réchauffer son cœur, une intelligence où l’on
doit chercher des lumières ; c’est un modèle sur la terre et
un protecteur au ciel ; un double culte lui est dû, d’imitation et d’invocation. C’est d’ailleurs à ces seules conditions,
de s’approprier les pensées et les vertus du saint, que la
Société peut échapper aux imperfections personnelles de
ses membres, qu’elle peut se rendre utile dans l’Église et se
donner une raison d’existence.
Saint Vincent de Paul, l’un des plus récents d’entre les canonisés 10, a un avantage immense par la proximité des temps
où il vécut, par la variété infinie des bienfaits qu’il répandit,
10
Saint François d’Assise
OCTOBRE 2013
dlr. : Il fut béatifié par Benoît XII le 13 août 1729 et canonisé par Clément XII le 16
N
juin 1737. Frédéric Ozanam vient de vivre le centième anniversaire de la canonisation
du saint Patron.
Des paroles aux actes…
43
par l’universalité de l’admiration qu’il inspira. Les grandes
âmes qui approchent Dieu de plus près y prennent quelque
chose de prophétique. Ne doutons pas que saint Vincent de
Paul n’ait eu une vision anticipée des maux et des besoins
de notre époque : il n’était pas homme à fonder sur le sable,
ni à bâtir pour deux jours. La bénédiction du quatrième commandement est sur la tête des saints ; ils honorèrent ici-bas
leur Père céleste, ils vivront longuement. Une immortalité terrestre leur est décernée dans leurs œuvres. C’est pourquoi
les Augustin, les Benoît, les Bruno, les François, qui dorment
depuis 15, 12, 8, 6 siècles dans la poussière ne cessent pas
d’avoir leur postérité spirituelle, leurs représentants debout
au milieu des ruines du passé. L’astre de saint Vincent de
Paul, monté plus tard sur l’horizon, n’est pas destiné sans
doute à fournir une moins longue carrière. Marchons à sa
lueur : honorons aussi notre père en la personne de ce Patron si digne d’amour, et nous vivrons longtemps. »
Bienheureux Frédéric OZANAM
À François Lallier, lettre du 17 mai 1838.
Un Saint Patron
A
rrêtons-nous un instant pour
bien relire cette lettre, pour
bien comprendre le message
que Frédéric nous laisse, pour
44
découvrir la vie de saint Vincent et
ainsi mieux vivre notre service et notre
engagement. Nous croyons tous bien
connaître sa vie. La connaissons-nous
vraiment ?
Bon anniversaire Frédéric !
Vous êtes là, sorte d’oiseau de nuit,
avec votre grande cape qui vole au
vent, en ces hivers interminables, les
galoches dans la neige, pressant sur
votre cœur un enfant. C’est ainsi que
nous vous voyons.
Monsieur Vincent était tout à la fois
émerveillé comme le berger de la
crèche, modeste comme le publicain,
attentif comme le bon Samaritain
et habile comme Zachée. Nous le
reconnaissons encore sous les traits
du semeur ou du serviteur en tenue
de travail et, bien sûr, sous ceux du
Bon Pasteur.
Homme d’action et de prière, de
commandement et d’humilité, homme
d’organisation et d’imagination,
humble et audacieux, efficace et
discret, bienveillant pour autrui et
exigeant pour lui-même, il estime qu’il
ne fait jamais assez. Infatigable géant
de la charité, il n’a pas d’âge. Homme
de plain-pied, il sut diriger avec la
même autorité les femmes comme
les soldats, les Grands comme les
pauvres.
Monsieur Vincent fut l’homme de
l’instant et celui des siècles à venir…
Servir aujourd’hui.
Quel sens donner au service ? Quel
sens donner aux exigences du
service telles qu’elles nous ont été
léguées par Vincent de Paul ? Servir
requiert des attitudes cohérentes
avec ce que nous sommes, des
attitudes profondes : le discernement,
la gratuité et le désintéressement.
Notre service doit rejoindre tous nos
frères, sans exclusive quand il s’agit
de la charité, de l’amour de Dieu et
du service du prochain pour l’amour
de Dieu.
Servir, c’est aussi savoir écouter.
L’écoute est la vertu qui permet
d’accueillir. Saint Vincent a été un
maître de l’écoute parce qu’il a placé
en premier, dans sa vie, l’humilité,
cette vertu qui conduit à considérer
les autres comme cadeaux et comme
instruments du salut de Dieu pour
soi-même.
Des paroles aux actes…
45
S’engager.
C’est prendre une responsabilité,
s’exposer, mettre ses forces, ses
dons, son savoir au service d’autrui,
répondre à un appel ou enfin
répondre à l’appel de Dieu qui s’est
engagé le premier à être à nos
côtés. L’engagement peut comporter
certaines difficultés : la durée, le fait
de tenir dans la durée, l’augmentation
des tâches, le droit de rompre un
engagement quand nous faisons
fausse route, apprendre à partager
les tâches.
Le fondement de l’engagement de
saint Vincent, ce n’est pas lui-même :
c’est Dieu qui voit la misère de son
peuple et qui appelle à participer à
sa libération. L’engagement consiste
donc plutôt à répondre à un appel
de Dieu. Un appel qui peut très bien
nous être adressé par une personne
concrète ou à travers un rêve, une
10
intuition, un désir ou une conviction
ressentie au plus profond de nousmêmes.
Comprendre les fondements de
notre engagement, c’est revenir à sa
source : Dieu, l’appel de Dieu car il
a en vue notre bonheur. Finalement,
l’engagement n’est-il pas aussi
l’accomplissement de ce pour quoi
nous sommes faits 11.
Prenons-nous le temps aujourd’hui de
discerner par la prière, par exemple,
ce à quoi nous sommes appelés
comme saint Vincent ?
N Madeleine Thémines
S aint Augustin dans les Confessions I,1,1 : « Tu nous as faits orientés pour toi,
Seigneur, et notre cœur est sans repos tant qu’il ne demeure en Toi. »
46
Bon anniversaire Frédéric !
Pour aller plus loin…
Pouvons-nous nous identifier au bon Samaritain ? Jésus et saint
Vincent nous invitent à incarner cette attitude, comme eux et avec eux.
Désirons-nous servir ? Pourquoi ? Pourquoi cet engagement ?
Que ferons-nous pour servir de plus en plus « à la manière de »
saint Vincent ?
Pour prier…
Jean Pierre RENOUARD cm, Prier 15 jours avec Saint Vincent de Paul,
Nouvelle Cité, 2000, 125 p. Vous y trouverez des prières de saint
Vincent de Paul. Soyez également créatifs et partagez avec tous.
À lire…
Dominique ROBIN, confrère de Bayonne (CD 64), Saint Vincent de Paul et
le temps de la charité, Médiapaul, 2011, 271 p.
Jean Pierre RENOUARD cm, Saint Vincent de Paul, Maître de sagesse :
initiation à l’esprit vincentien, Nouvelle Cité, 2010 , 189 p
Des paroles aux actes…
47
Sainte Cécile, vierge et martyre
N ovembre 2 0 1 3
U ne espé rance
in fatigable
« L’homme, selon le christianisme, vit de deux vies : la vie de
la nature et celle de la grâce qui s’ajoute à la nature. Dans
l’ordre surnaturel, le vrai révélé à la foi constitue le dogme,
le bien embrassé par l’homme produit la morale, le beau
entrevu par l’espérance inspire le culte. Il semble qu’ici tout
soit immuable, et cependant Vincent de Lérins veut que la loi
du progrès s’y fasse obéir. Le dogme ne change point, mais
la foi est une puissance active qui cherche la lumière, fides
quærens intellectum. Elle conserve la vérité révélée, mais
elle la médite, elle la commente, et du symbole que retient
la mémoire d’un enfant, elle tire la Somme de saint Thomas
d’Aquin. La morale ne change point, mais l’amour qui la met
en pratique ne connaît pas de repos. Les préceptes restent,
mais les œuvres se multiplient. Toutes les inspirations de
la charité chrétienne sont déjà dans le Sermon sur la montagne : cependant il fallait des siècles pour en faire sortir
les monastères civilisateurs, les écoles, les hôpitaux qui
couvrirent toute l’Europe. Enfin, le culte ne change pas, du
moins dans son fond, qui est le sacrifice : un peu de pain et
de vin, au fond d’un cachot, suffisait à la liturgie des martyrs.
Mais une espérance infatigable pousse l’homme à se rapprocher de la beauté divine qui ne se laisse pas contempler
48
Bon anniversaire Frédéric !
ici-bas face à face. Il s’aide de tout ce qui semble monter
au ciel, comme les fleurs, le feu, l’encens. Il donne l’essor à
la pierre et porte à des hauteurs inouïes les flèches de ses
cathédrales. Il ajoute à la prière les deux ailes de la poésie
et du chant, qui la mènent plus haut que les cathédrales et
les flèches. Et cependant il n’arrive encore qu’à une distance
infinie du terme qu’il poursuit.
De là cette mélancolie qui respire dans les hymnes de nos
grandes fêtes. Au sortir des pompes sacrées, l’homme religieux ressent l’ennui de la terre et dit comme saint Paul : « Je
désire la dissolution de mon corps pour être avec le Christ.
Cupio dissolvi. » Ce cri est encore celui d’une âme qui veut
grandir ; en effet, le christianisme représente les saints allant
de clarté en clarté, et le bonheur de la vie future comme un
progrès éternel. »
Bienheureux Frédéric OZANAM
La Civilisation chrétienne au V e siècle,
Première et deuxième leçons, « Du progrès dans les siècles de décadence »,
Œuvres Complètes, 3e Édition, 1855, tome I, pp. 21-23.
F
rédéric Ozanam, avant d’agir
ou plutôt avant «d’opérer», de
se lancer dans une opération
de petite ou grande envergure ou
une œuvre, que ce soit l’exercice de
la charité dans les rues de Paris puis
dans le monde ou la défense de la
foi chrétienne dans ses cours à la
Sorbonne et dans ses écrits – car il
s’agit bien ici d’une œuvre – est un
Des paroles aux actes…
49
observateur attentif et un contemplatif
amoureux de «la vie de la nature»
et de la vie de la grâce «qui s’ajoute
à la nature». Cette grâce divine qui
n’empêche en rien la liberté humaine
ni ne se substitue à la nature humaine
mais qui vient au secours de notre
«faible» chair. En ce sens, Frédéric est
donc un fidèle héritier de saint Vincent
de Paul, ce contemplatif avant et dans
l’action, et par là fidèle, lui aussi, à
l’Évangile1…
repartir tout tristes comme le jeune
homme riche…
Nous ne naissons pas chrétiens, nous
ne sommes pas chrétiens du jour
au lendemain dès notre baptême :
nous devenons chrétiens en suivant
«L’homme vit de deux vies» : il est
le Christ. «Il semble qu’ici tout soit
là le fondement de la vie chrétienne
immuable, et cependant la loi du
et il se présente à nous chaque jour
progrès se fait obéir.» Aussi Frédéric
comme un défi «olympique» sans
Ozanam nous invite, moyennant la
cesse à embrasser. Non pas une
grâce, à progresser dans tous ces
schizophrénie subie ni un double jeu
domaines : chercher la lumière ou
à mener. «Ce n’est pas seulement
discerner, méditer, prier, célébrer la
de pain que l’homme vivra, mais
divine liturgie, mettre en pratique la
de toute parole sortant de la bouche
charité «qui ne connaît pas de repos»,
de Dieu 2.»
multiplier les œuvres…
Frédéric, par son regard d’historien,
Deux vies, deux nourritures… Nous
pouvons dire : oui, je le veux, «que tout nous rappelle également qu’entre
l’inspiration, la parole prononcée et
se passe pour moi selon Ta parole»
comme Marie a pu le dire et laisser la la mise en œuvre, la réalisation, il
peut se passer des siècles entiers.
grâce opérer. Ou bien nous pouvons
50
Bon anniversaire Frédéric !
Nous semons mais d’autres après
nous ferons la récolte. Et notre
trésor, «le bonheur de la vie future»,
se trouve au ciel. Aussi, selon son
souhait, que notre espérance sur
cette terre demeure «infatigable» et
nous «pousse à» nous «rapprocher»
quotidiennement tant de Dieu que
des hommes. Tel est le chemin de la
sainteté…
N Jérôme Delsinne cm
Luc 14, 28 : « En effet, lequel d’entre vous, quand il veut bâtir une tour, ne commence
par s’asseoir pour calculer la dépense et juger s’il a de quoi aller jusqu’au bout ? »
1
Matthieu 4, 4.
2
Pour prier…
Psaume 145.
À lire…
Card. Jean-Marie LUSTIGER,
Premiers pas dans la prière, Nouvelle Cité, 1986, 194 p.
Pierre PIERRARD et Amin A. de TARRAZI,
Ozanam un saint laïc pour notre temps, éditions du Signe, 1997, 48 p.
2013
200e anniversaire de la naissance du Bienheureux
Frédéric Ozanam et 160e anniversaire de sa mort.
180e anniversaire de la Fondation
de la 1ère Conférence de Saint Vincent de Paul.
Année liturgique C
2012-2013
Des paroles aux actes…
51
| Philippe Guitton | 06 25 79 60 57 | Crédit photo © Julien Spiewak
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