Rapport de la Chambre régionale des comptes de Midi

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Rapport de la Chambre régionale des comptes de Midi
CHAMBRE REGIONALE DES COMPTES
DE MIDI-PYRENEES
--N/Réf. : GO10 329 01
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES
SUR LES COMPTES ET LA GESTION
DE LA COMMUNE DE TARBES
Exercices 2003 à 2009
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5.3 Les renégociations de dette au moyen d’emprunts à taux structurés
La commune de Tarbes a procédé, par ailleurs, à deux renégociations
d’emprunts avec DEXIA, l’une en 2005 (17,3 M€) l’autre en 2006 (9,7 M€). En 2007, une
nouvelle renégociation a été opérée avec la Caisse d’Epargne. L’objectif de la collectivité
était, d’une part d’alléger la charge budgétaire sur quelques années, d’autre part de
sécuriser la dette en privilégiant les taux fixes.
Les deux renégociations avec Dexia ont donné lieu à la substitution d’emprunts
structurés à des emprunts à taux fixe ou à taux variables. Ces renégociations ont été
rapidement suivies de la mise en place de divers instruments de couverture (contrats de
« swap »), plusieurs de ces contrats se cumulant parfois sur un même emprunt.
La chambre a examiné l’ensemble de ces contrats, afin de dresser un bilan
global pour les finances communales, de ces renégociations d’une part et des divers
instruments de couverture qui leur sont associés d’autre part.
5.3.1 L’emprunt « overtec » n° 437 conclu avec Dexia
5.3.1.1 La renégociation
Dans un objectif de sécurisation de la dette et de dégagement de marges
budgétaires par lissage des remboursements du capital, la commune a procédé à la
renégociation de quatre emprunts, dont le capital restant dû s’élevait à 17,3 M€. Le nouvel
emprunt a été souscrit auprès de Dexia en avril 2005, pour le montant du capital des
anciens emprunts, sans versement d’indemnité actuarielle.
Les taux d’intérêt des prêts refinancés étaient, soit des taux fixes (7,71 % pour
l’un, 4,51 % pour un autre), soit des taux indexés. Le taux moyen pondéré de ces emprunts,
au moment de la renégociation, était de 5,22 % (source : simulations présentées à la
commune par Dexia). Les risques pour la collectivité étaient donc relativement limités, la
collectivité a néanmoins fait le choix de la renégociation, souhaitant profiter de
l’opportunité de la baisse des taux constatée à ce moment là, et alléger ses annuités sur les
premières années.
Cette renégociation a d’abord conduit à un rallongement de la durée de
remboursement, la durée résiduelle moyenne des anciens emprunts étant de 9 ans, celle du
nouveau de 13 ans.
Pour le nouvel emprunt, c’est l’écart de taux existant entre l’Euribor 12 mois et
le TEC 10 qui détermine le taux à chaque échéance selon la formule suivante, appliquée à
chaque annuité :
Taux = (2 x euribor 12 mois) – TEC 10 + 2,08 %
Toute augmentation de cet écart, dans la situation généralement constatée d’un
TEC 10 plus élevé que l’Euribor 12 mois, entraîne une diminution du taux supporté par la
commune.
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L’Euribor présente une certaine volatilité, et un rapprochement de ces deux
taux sur la période 2006-2007 a pu être observé, conduisant à une progression du taux des
échéances 2006 (4,89 %) et 2007 (6,45 %). Ce phénomène s’est fortement accentué en
2008 avec le croisement de la courbe des taux, celui appliqué à cette échéance passant
alors à 8,14 %. En revanche, la forte baisse de l’Euribor en 2009, face à une baisse
beaucoup plus faible du TEC 10, a entraîné un effondrement du taux de cette échéance à
1,37 %, le même phénomène se reproduisant pour l’échéance 2010 (1,53 %).
Un gain budgétaire, ainsi qu’il ressort de l’annexe 6, sera effectivement dégagé
jusqu’en 2011 (estimé à environ 6,5 M€ entre 2005 et 2011), grâce notamment à une
diminution de l’annuité en capital des premières périodes. Mais cette période de gain sera
suivie d’une charge budgétaire supplémentaire de 2012 à 2019, pour un montant
(estimation en fonction de l’échéancier prévisionnel) d’environ 7,6 M€. Le surcoût
budgétaire serait, sur toute la période, de 1,07 M€ (en euros courants), soit une majoration
de 19 % des frais financiers par rapport à ceux des emprunts initiaux. Ce surplus de frais
financiers est dû à l’allongement de la durée et au choix fait d’un allègement des annuités
en capital en début de période.
La chambre constate donc une grande imprévisibilité dans la détermination des
frais financiers liés à cet emprunt qui ne va pas dans le sens de la sécurisation de la dette
qui était recherchée. Ainsi sur les quatre premières échéances, le taux appliqué a varié de
1,37 % à 8,14 %. Elle constate également que ce contrat ne comporte pas de plafonnement
dans le mode de calcul des intérêts.
Par ailleurs, la possibilité de le dénouer est peu aisée à mettre en œuvre, la
détermination d’une soulte de sortie n’étant pas connue à l’avance, mais étant déterminée
par DEXIA « …en tenant compte des conditions prévalant sur les marchés financiers,
10 jours ouvrés avant la date du remboursement anticipé…Le jour de fixation, Déxia
demande préalablement à deux établissements de référence sur ces marchés de calculer le
montant de l’indemnité à régler par la partie débitrice à l’occasion du remboursement
anticipé du prêt. L’indemnité de remboursement anticipé retenue est la moyenne
arithmétique de ces deux indemnités… » (article 10 du contrat).
5.3.1.2 Les contrats de couverture du prêt n° 437
La collectivité, constatant une évolution des taux d’intérêt défavorable a décidé
de mettre en place un contrat de couverture, lui-même suivi par plusieurs autres, en
fonction de l’évolution des marchés financiers et des risques potentiels.
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Communauté d’agglomération du Grand Tarbes
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Le contrat de prêt 437 a ainsi donné lieu à quatre de ces contrats :
- un premier contrat de swap conclu avec RBS pour la période du 1 juillet 2006
au 1 juillet 2012,
- un contrat conclu avec la société Nomura, afin de couvrir le contrat
précédent, sur la même période,
- un deuxième contrat avec RBS couvrant, pour la seule échéance 2007, le
contrat précédent Nomura
- un dernier contrat avec RBS pour les échéances 2013 à 2018.
Aux termes de ces contrats, la ville reçoit de l’organisme retenu l’annuité en
intérêt qu’elle doit supporter aux termes de son contrat de prêt, ou de son précédent contrat
de couverture. Elle doit, elle-même verser à la société de couverture une annuité
déterminée suivant une nouvelle formule de taux. Généralement, dans ce type de contrat, la
mise en place d’un swap se traduit par l’échange d’un taux indexé ou structuré, porteur de
risques, contre un taux fixe, ce dernier étant alors supérieur au taux du marché, ce surcoût
constituant le prix de l’assurance.
La chambre a constaté que, dans ses différents contrats de couverture, à
l’exception du deuxième contrat RBS, au contraire, la ville de Tarbes a en définitive
échangé un taux structuré contre un autre taux structuré également porteur de risque.
a) Le premier contrat RBS
En avril 2006, le rapprochement des courbes de taux faisant craindre une
sensible augmentation de l’annuité en intérêts, la commune a conclu avec la banque RBS,
un premier contrat d’échange de taux (swap).
Aux termes de ce contrat, la banque RBS s’engage à verser à la commune,
pour chaque échéance de l’emprunt DEXIA couvert, l’annuité en intérêt prévue au contrat
dudit prêt.
La commune quant à elle, s’engage à verser à RBS une première échéance
(01 juillet 2006) au taux fixe de 3,40% et, pour les échéances suivantes, un intérêt égal à
l’Euribor 12 mois si celui-ci se maintient dans un « tunnel » de taux compris entre une
barrière basse de 2,80 % et une barrière haute variant de 4,12 % à 4,60 %. Dans le cas
contraire, le taux de l’échéance sera déterminé en rajoutant à l’Euribor du jour 6 fois la
différence entre ce dernier et la barrière contractuelle.
La chambre constate que ce contrat d’échange de taux, après avoir sécurisé une
première échéance à taux fixe, substitue ensuite une formule de taux structuré à une autre
formule structurée, et qu’il n’apporte donc pas une meilleure garantie, en terme de risque,
pour la collectivité. D’ailleurs, depuis sa mise en place, le taux de l’Euribor 12 mois s’est
situé à plusieurs reprises hors des barrières contractuelles, sur de longues périodes, et
notamment aux dates de détermination des échéances 2007, 2008, 2009 et 2010. Le fort
coefficient appliqué conduit par ailleurs, à amplifier les mouvements de baisse ou de
hausse sur le taux appliqué à la commune. Ainsi, le passage de l’Euribor à plus de 5 % en
juin 2008, a conduit à une échéance au taux de 12,47 %, et la baisse du même taux en
dessous de 2 % en juin 2009 et juin 2010 a également conduit à appliquer respectivement
des taux de 9,25 % et 10,27 %. Cette formule en effet, pénalise la collectivité en cas de
hausse de l’Euribor, mais également en cas de baisse de celui-ci.
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Dès lors, à l’exception de l’échéance 2006, pour les quatre échéances 2007,
2008, 2009 et 2010, les intérêts supportés au titre du swap ont été chaque fois supérieurs à
ceux du prêt DEXIA (3,37 M€ de coût supplémentaire au total sur ces 4 ans). Le système
assurantiel a donc fonctionné à l’envers.
b)
Le contrat Nomura
En juillet 2007, constatant les risques de ce contrat de couverture, face au
maintien de l’Euribor au-delà de la barrière haute (4,20 % à ce moment là), la commune a
souscrit un nouveau contrat de swap venant couvrir le précédent, avec la société Nomura
(de droit anglais).
Cette société s’engage à verser à la commune, à chaque échéance du contrat de
couverture du contrat RBS, l’annuité en intérêt prévue audit contrat. Le montant sur lequel
s’engage la ville repose également sur l’Euribor 12 mois, selon la formule suivante :
EURIBOR 12 mois
si Taux Plancher A ≤ EURIBOR 12 mois ≤ Taux
Plafond A
EURIBOR 12 mois + 8 (Taux Plancher A EURIBOR 12 mois)
si EURIBOR 12 mois < Taux Plancher A
EURIBOR 12 mois + 8 (EURIBOR 12 mois - Taux
Plafond A)
si EURIBOR 12 mois > Taux Plafond A
Taux Plancher A variant de 3,00 % à 2,80 %
Taux Plafond A = 4,60 %
Taux Plancher B = 2,80 %
Taux Plafond B variant de 4,12 % à 4,60 %
L’Euribor 12 mois s’appliquera si son taux se maintient également dans un
« tunnel », dans le cas contraire, une formule avec coefficient multiplicateur jouera.
Par rapport au contrat précédent, la ville a cherché à se couvrir contre une
éventuelle hausse de l’Euribor, en relevant la barrière haute à 4,60 %, alors qu’elle
n’atteignait ce montant qu’en 2012 dans le précédent contrat. Mais ce faible relèvement de
la barrière haute s’est fait au prix du relèvement de la barrière basse (de
2,80 % à 3 % pour les échéances 2007, 2008, 2009), et de l’application d’un coefficient
multiplicateur plus élevé (8 au lieu de 6). L’intérêt de ce nouveau contrat apparaît donc
limité. Il est relativement protecteur en cas de hausse du taux. Ainsi en 2008, où la barrière
haute a été franchie (Euribor 12 mois à 5,43 %), la ville a versé à NOMURA un intérêt au
taux de 11,638 %, alors qu’elle recevait un versement déterminé au taux de 12,474 % (taux
du contrat du prêt DEXIA, versé par RBS).
En revanche, en cas de baisse des taux, la combinaison du relèvement de la
barrière basse et de l’augmentation du coefficient multiplicateur a un effet très pénalisant.
Ainsi, pour l’échéance 2009, l’Euribor étant descendu à 1,51 %, les intérêts versés à
NOMURA ont été calculés au taux de 13,43 %, ceux du contrat RBS à 9,25 % et, pour
2010, l’Euribor étant à 1,306 %, le taux Nomura s’est établi à 13,26 %.
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La chambre constate donc que la couverture de taux choisie par la commune,
loin de sécuriser les engagements de la collectivité, comporte un niveau d’imprévisibilité
et de risque au moins aussi important que dans le contrat précédent, l’Euribor s’étant,
jusqu’à l’échéance 2010, toujours situé hors des limites du tunnel.
La place de ce contrat est par ailleurs déterminante, car, par le jeu successif des
contrats de couverture, le fonctionnement de la formule ci-dessus détermine le coût
budgétaire final de l’emprunt Dexia renégocié.
c)
Le deuxième contrat RBS
Pour l’échéance de juillet 2008, la ville a négocié, avec RBS, un nouveau
contrat venant couvrir le contrat NOMURA ci-avant. La ville a ici obtenu, en couverture
du taux NOMURA, un taux fixe de 7,50 %.
Cette couverture qui n’a été négociée que pour la seule échéance de juillet
2008, s’est avérée intéressante, la ville recevant un versement d’intérêt établi à 11,638 %
(contrat Nomura) et supportant elle-même un taux de 7,50 %.
d)
La couverture de la fin du contrat n° 437
Le contrat de couverture RBS, lui-même couvert par le contrat Nomura, se
termine avec l’échéance due le 01/07/2012.
La commune a signé avec RBS, dès le 2 juillet 2008, un nouveau contrat de
couverture pour les échéances restantes du prêt (2013 à 2018). Aux termes de ce
contrat, RBS rembourse à la commune l’échéance en intérêts du contrat DEXIA, la ville
devant verser à RBS une annuité établie sur la base de l’Euribor 12 mois majoré d’une
marge égale à 2 fois le « taux annuel d’échange pour les opérations d’échange en euros
dont la maturité est de 10 ans (écran Reuters « euribor basis-fr » 11.00 AM Frankfurt), soit
le CMS 10 ans, moins 5,50 % ».
L’annuité de la ville sera au moins égale à l’Euribor, celui-ci éventuellement
majoré de 2 fois la différence entre les CMS 10 ans et 5,50 %. Cette marge ne joue que si
le taux en cause dépasse 5,50 %. Une clause prévoit par ailleurs de figer le taux au niveau
de l’Euribor, si celui-ci reste inférieur à 4,70 %.
Ce contrat semble plus protecteur des intérêts de la commune que le précédent,
l’application d’un taux supérieur à l’Euribor 12 mois ne s’opérant qu’en cas de
constatation d’un taux des CMS 10 ans supérieur à 5,50 %. De plus le coefficient
multiplicateur est faible.
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La ville a cependant conclu, en juin 2010, un accord avec RBS, mettant fin à ce
contrat (qui n’avait pas encore commencé à produire ses effets), moyennant le versement
par RBS, d’une somme de 300 000 € au bénéfice de la collectivité.
La chambre régionale des comptes prend acte de la résiliation de ce contrat,
dans des conditions à priori intéressantes pour la collectivité. Il n’a cependant pas été
possible de déterminer les modalités exactes du calcul de l’indemnité reçue par la ville.
5.3.1.3 Le bilan du fonctionnement du prêt 437 et de ses contrats de
couverture
L’enchaînement de ces différents contrats de couverture a entraîné des soldes
tantôt positifs, tantôt négatifs pour la commune. Le tableau joint en annexe n° 7 en fait la
synthèse, avec pour mémoire, ce que la commune aurait supporté en l’absence de toute
renégociation. A ce jour, seul le contrat de couverture Nomura produit un effet budgétaire,
le contrat RBS étant neutralisé par ce dernier.
L’application cumulée des contrats de couverture successifs a permis de
dégager des gains pour le budget communal pour les exercices 2006, 2007 et 2008. En
revanche, pour les exercices 2009 et 2010, les pertes se sont avérées élevées, et sur ces
cinq premiers exercices de leur application, la perte totale s’élève à 2,68 M€, dont 1,9 M€
pour la seule année 2009, montant équivalent à celui que la commune a perçu au titre du
remboursement anticipé du FCTVA. Ces pertes sont dues à la formule particulièrement
pénalisante du contrat Nomura en cas de maintien de l’Euribor 12 mois à un niveau très
bas, ce qui est le cas depuis 2009.
Quant à la renégociation avec Dexia, elle se traduit, après l’échéance 2010, par
un surcoût global d’intérêts de 108 000 €.
Par rapport aux quatre contrats initiaux, la renégociation a fait croître les frais
financiers de 3 %, et la mise en place des différents contrats de couverture, censés limiter
le risque, de 73 % supplémentaires. Sur ces premiers exercices, les différentes opérations
liées à cette renégociation auront donc entraîné un surplus de frais financiers de 2,8 M€.
L’objectif de sécurisation de la dette, par la renégociation d’une part, par la
souscription successive de plusieurs contrats de couverture de taux d’autre part, n’a pour
l’instant pas été atteint. L’appréciation de cet objectif ne pourra cependant être complète
qu’à l’achèvement des contrats. Mais cette réalisation reste totalement aléatoire et
dépendante de l’évolution des marchés.
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Quant au second objectif, visant à réduire l’annuité des emprunts renégociés et
donc dégager des marges budgétaires, il n’a été que très partiellement atteint. En effet, sur
un gain attendu d’annuité proche de 6 M€ sur la période 2006 – 2010, ce gain ne sera que
d’environ 2,5 M€ compte tenu d’un gain sur annuités du prêt de 5,47 M€, fortement
atténué par des pertes cumulées sur swap de 2,68 M€. Ce gain définitif s’avère
sensiblement inférieur aux charges budgétaires supplémentaires qui apparaîtront à compter
de 2012, la seule charge de l’amortissement du capital entre 2012 et 2018 représentant un
surcoût budgétaire de 6,9 M€ par rapport aux quatre emprunts renégociés.
5.3.2 L’emprunt n° 443
5.3.2.1 Le contrat conclu avec Dexia
En juillet 2006, la commune a procédé à la renégociation de deux autres
emprunts avec Dexia, pour un capital restant dû de 9,69 M€. L’un était un prêt, avec une
première phase à taux structuré à partir des écarts entre l’Euribor et le TEC 10 (prêt
Overtec), et une seconde phase, à compter de 2010, le taux étant indexé sur l’Euribor. La
croissance constante de l’Euribor à partir de 2006 faisait régulièrement augmenter le coût
de cet emprunt. Pour le second emprunt, le taux était plafonné à l’Euribor dans tous les
cas.
Le contrat choisi n’a eu qu’un effet très limité sur la durée résiduelle moyenne
de cette dette, qui était de 11,8 ans, le nouvel emprunt étant souscrit pour 13 ans.
Par ailleurs, des marges de manœuvre budgétaires seront dégagées jusqu’en
2011 (3,4 M€), ensuite le gain budgétaire disparaîtra pour se transformer en une charge
(4,9 M€). Globalement, le surcoût budgétaire (en euros courants) sera de 1,49 M€ (détail
en annexe n° 8 : estimation, à compter de 2010, des frais financiers au taux de l’échéancier
prévisionnel : 3,518 %).
Quant au taux, le choix s’est porté sur un produit de pente. Après une phase à
taux fixe de 3,49 % garanti pour deux échéances (2006 et 2007), le taux de la deuxième
phase sera maintenu à 3,49 % si l’écart entre les taux du CMS euro 30 ans et du CMS euro
1 an reste supérieur à 0,30 %. Dans le cas contraire, le taux appliqué à l’échéance sera égal
à 5,99 % moins 5 fois la différence entre les CMS 30 ans et 1 an.
Habituellement, les taux longs sont supérieurs aux taux courts, et l’écart
sensiblement supérieur à 0,30 %. La collectivité a donc fait un choix raisonnable compte
tenu des données existantes lors de la souscription du prêt (écart de 1,10 % à ce moment
là). Cependant, les perturbations observées sur les marchés financiers à compter de 2007
ont entraîné un rapprochement de la courbe des taux, et même leur croisement durant l’été
2008. Pour l’échéance de 2007, la commune a pu bénéficier de la garantie du taux à 3,49
% de la première phase, malgré un écart inférieur à 0,30 %, mais pour 2008, le taux
appliqué à l’échéance s’est élevé à 7,57 %. La forte baisse des taux courts en 2009 a en
revanche permis de maintenir un écart entre les CMS supérieur à 0,30 %, ainsi qu’en 2010.
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Ce contrat comporte dès lors des éléments de risque, pour le moins aussi
importants que les deux contrats remplacés, dans une période de perturbation des marchés
financiers.
De plus, comme dans le précédent contrat de renégociation conclu avec Dexia,
la formule de calcul du taux ne comporte pas de clause de plafonnement du taux. De
même, les conditions de sortie de ce contrat s’avèrent mal aisées à maîtriser.
5.3.2.2 Le contrat de couverture
Face, d’une part au rapprochement de la courbe des taux constatée à partir de
2007, faisant courir le risque du déclenchement de la formule de taux majoré, d’autre part
la difficulté d’appréhender à l’avance les possibilités concrètes de sortie de ce contrat
d’emprunt, la ville a fait appel à un contrat de couverture.
En juillet 2008, quelques jours avant l’échéance annuelle, la commune a
souscrit avec la Société Générale un contrat d’échange de taux (swap). La courbe des taux
s’était en effet déjà inversée, et la probabilité de l’application de la formule de révision du
taux de l’échéance était très forte. Ce contexte n’était d’ailleurs pas favorable à la
commune dans sa négociation avec la banque.
Aux termes du contrat souscrit, la société générale s’engage à verser à la
commune l’annuité en intérêt du prêt 443, la commune devant quant à elle verser un intérêt
au taux fixe de 5,50 % pour l’échéance 2008. Pour les 12 échéances suivantes, le taux est
garanti à 5,50 % si la différence entre le « CMS GBP 10 ans » et le « CMS CHF 10 ans »
est supérieure à 1,28 %. Dans le cas contraire, le taux appliqué sera ainsi déterminé :
11,95 % + 5 [1,28 % - (CMS GBP 10 ans – CMS CHF 10 ans)]
La couverture du risque de taux du prêt structuré n° 443 est donc assurée par
un nouveau taux structuré, faisant appel à la comparaison entre 2 CMS 10 ans, pour deux
zones économiques et monétaires différentes, la zone livre anglaise d’une part, la zone
franc suisse d’autre part. Les facteurs de détermination du taux sont donc ici éloignés et
difficilement prévisibles. Sur les dernières années, les courbes de ces taux ont évolué de
façon parallèle (graphique en annexe n° 9) mais l’écart est resté peu éloigné de la barrière
de 1,28 %, et en 2 ans il s’est situé à plusieurs moments en dessous de cette barrière. Si
pour l’échéance 2009 (1er août), l’écart est resté supérieur à 1,28 %, garantissant ainsi le
taux de 5,50 %, cet écart est resté inférieur à la barrière jusqu’au 03 juin, ainsi qu’à partir
du 05 octobre. La barrière s’avère donc assez aisément franchissable.
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Mais, en sus de la probabilité de dépassement de la barrière, la formule de
calcul du taux, en cas de franchissement, est extrêmement pénalisante pour la commune,
avec un taux de départ incompressible très élevé (11,95 %), auquel s’ajoute 5 fois la
différence entre 1,28 % et l’écart entre les 2 CMS. Ainsi, si l’échéance avait été au 29 mai
2009, à un moment où l’écart de taux entre les deux CMS était de 1,17 %, le taux appliqué
à l’échéance aurait été de 12,50 %.
Ce contrat, sensé assurer le risque de taux du prêt n° 443, lui-même structuré,
présente au moins autant d’aléas que ce dernier. Afin de sécuriser la première échéance à
5,50 %, la collectivité s’est engagée pour les 12 années suivantes sur un contrat risqué.
A ce jour, le bilan qui peut être fait de cette opération de renégociation et de ce
contrat de couverture, fait apparaître que, pour les quatre premières échéances (2007, 2008,
2009 et 2010), la renégociation a entraîné, par rapport aux contrats initiaux, un surcoût de
444 000 €. Quant au contrat de couverture, il a dégagé un gain de 195 000 € sur l’année
2008, mais des pertes sur les exercices suivants pour un total de 350 187 €. Le bilan global
de cette opération s’établit, pour les quatre premiers exercices, à un surcoût proche de
600 000 €, soit environ 50 % des intérêts qu’auraient supportés les deux emprunts
renégociés. (détail en annexe n° 9).
5.3.3 L’emprunt n° 449
Cette renégociation a été conduite avec la Caisse d’Epargne en 2007 (signature
du nouveau contrat le 14 mai 2007). Elle porte sur le réaménagement de 5 contrats de
prêt pour un capital restant dû total de 9,3 M€. Ces 5 emprunts étaient à taux indexés. Le
taux moyen de ces emprunts, pour la dernière échéance, était de 4,12 %.
Le nouvel emprunt, souscrit pour le montant du capital restant dû des
précédents, comporte deux phases :
- 1ère phase : taux fixe de 3,80 % pendant 5 ans (jusqu’en 2011)
- 2ème phase : taux fixe pratiqué par la Caisse d’Epargne pour les prêts de 2 à
10 ans, plafonné à 4,55 %.
La durée résiduelle moyenne des prêts a été augmentée, celle des prêts
renégociés étant de 8,3 ans, le nouveau prêt souscrit de 13 ans.
Cette opération permet un gain budgétaire sur les premières années, grâce au
lissage du remboursement du capital. Les gains totaux s’élèveraient à 780 000 € sur la
période 2008-2011, suivie d’une période de pertes budgétaires, de 2012 à 2019.
Globalement, l’opération se traduirait par un coût supplémentaire (en euros courants) de
270 000 €, ce qui reste assez limité. Cette estimation a cependant été faite à partir des
conditions de taux retenues dans les contrats initiaux pour arrêter les échéanciers
prévisionnels, l’évolution réelle des frais financiers sera différente.
Cette renégociation n’appelle pas d’observations. En effet, les conditions de
taux négociées avec la Caisse d’Epargne ne présentent pas de risques majeurs, et la durée
de la dette n’a pas été augmentée de façon excessive.
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5.4 Le cadre des décisions prises en matière de dette.
5.4.1 Les textes en vigueur
Le recours à l’emprunt est de la compétence du conseil municipal. Toutefois,
comme le précise le Code Général des Collectivités Territoriales, cette compétence peut
être déléguée au maire.
Ainsi, selon l’article L 2122-22 du CGCT :
« Le maire peut, en outre, par délégation du conseil municipal, être chargé, en
tout ou partie, et pour la durée de son mandat : […]
3° De procéder, dans les limites fixées par le conseil municipal, à la
réalisation des emprunts destinés au financement des investissements prévus par le budget,
et aux opérations financières utiles à la gestion des emprunts, y compris les opérations de
couvertures des risques de taux et de change ainsi que de prendre les décisions
mentionnées au III de l’article L. 1618-2 et au a de l’article L. 2221-5-1, sous réserve des
dispositions du c de ce même article, et de passer à cet effet les actes nécessaires … »
De plus, l’article L. 2122-23 du CGT mentionne que :
« Les décisions prises par le maire en vertu de l’article L. 2122-22 sont
soumises aux mêmes règles que celles qui sont applicables aux délibérations des conseils
municipaux portant sur les mêmes objets. […]
Le maire doit rendre compte à chacune des réunions obligatoires du conseil
municipal.
Le conseil municipal peut toujours mettre fin à la délégation. »
5.4.2 Les délégations accordées par le conseil municipal de Tarbes
Le conseil municipal de Tarbes a délégué au maire une partie de ses
attributions en le chargeant de prendre les décisions concernant les emprunts. Cette
délégation a été chaque fois accordée pour la durée du mandat, mais l’assemblée aurait pu
choisir, comme c’est le cas dans certaines collectivités, d’accorder une délégation
simplement annuelle.
La délibération du 5 avril 2001 attribue au maire la possibilité «… de procéder,
dans les limites fixées par le Conseil Municipal, à la réalisation des emprunts destinés au
financement des investissements prévus par le budget et de passer à cet effet, les actes
nécessaires… », la délibération précisant les principales caractéristiques des prêts pour
lesquels la délégation est accordée.
Chambre régionale des comptes de Midi-Pyrénées – Rapport d’observations définitives –
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Une délibération du 24 juin 2002 complète la délibération précédente et ajoute
les opérations de couverture: «… de procéder, dans les limites fixées par le Conseil
Municipal, à la réalisation des emprunts destinés au financement des investissements
prévus par le budget et aux opérations financières utiles à la gestion des emprunts, y
compris les opérations de couverture des risques de taux et de change et de passer à cet
effet les actes nécessaires ».
Lors du renouvellement du conseil municipal en 2008, les délibérations des
9 avril et 30 juin 2008 ont accordé au maire une nouvelle délégation en matière d’emprunt,
pour la durée du nouveau mandat. La délégation est comparable à la précédente, mais elle
est plus précise sur le volet « gestion active de la dette », en précisant notamment les
conditions du recours à des instruments de couverture.
La délégation de 2008, est plus complète que celle de 2001. Elles respectent les
dispositions précitées du CGCT.
5.4.3 L’exercice de la délégation
Chaque opération d’emprunt ou de souscription d’un instrument de couverture
fait l’objet d’une décision du maire, dans le cadre des délégations accordées.
En ce qui concerne les différentes opérations examinées ci-avant, à l’exception
du contrat de couverture signé avec RBS en 2008, mais résilié depuis, tous les autres
contrats ont été conclus dans le cadre de la délégation de 2001.
Un compte rendu succinct en est donné au conseil municipal suivant la prise de
décision, conformément à l’article L. 2122-23 du CGT. Dans les procès-verbaux de
conseils municipaux, il est rapporté que le Maire rend compte qu’il a décidé :
- « de réaliser un emprunt de 2 500 000 € sur 15 ans auprès de la Royal
Bank of Scotland PLC. Cet emprunt est destiné à financer le programme d’investissement
prévu pour 2006 ; (contrat n° 442)
- de réaliser un emprunt de 2 000 000 € d’une durée totale de 20 ans
auprès de la Caisse d’Epargne Midi-Pyrénées pour financer les investissements prévus au
programme 2006. » (séance du 29 juin 2006)
- « de modifier la méthode de détermination des taux d’intérêt
applicables à l’emprunt contracté auprès de la Royal Bank of Scotland PLC ; (contrat n° 442)
- de réaménager 5 prêts souscrits auprès de la Caisse d’Epargne MidiPyrénées » (séance du 24 septembre 2007)
- « de contracter auprès de la Caisse d’Epargne de Midi-Pyrénées, un
emprunt d’un montant de 7 400 000 € » (séance du 29 mars 2010)
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Si le conseil municipal est bien informé de l’exercice de la délégation, il faut
bien noter que l’information communiquée est particulièrement succincte, surtout au
regard de la complexité et de l’impact budgétaire des contrats d’emprunts renégociés et des
contrats de couverture souscrits ces dernières années. Ainsi, par exemple, la mise en place
et les conditions de fonctionnement du contrat de couverture « Nomura », qui a généré
1,9 M€ de frais financiers supplémentaires en 2009, n’ont pas été explicitement exposées
au conseil municipal. Seule une annexe, très synthétique (une page) du compte
administratif reprend ces mouvements financiers.
En fait, la combinaison d’une délégation accordée pour l’ensemble du mandat
au lieu d’une délégation annuelle, avec une information à postériori succincte, aboutit à
priver l’assemblée délibérante d’une partie des informations relatives aux finances de la
commune. Certes, l’examen des comptes rendus de séance fait apparaître des débats sur la
question de la dette (cf notamment débat d’orientation budgétaire pour 2009), mais celle-ci
paraît encore ponctuelle.
La chambre régionale des comptes considère qu’il serait utile que l’assemblée
délibérante reçoive une information plus complète sur les emprunts et contrats de
couverture conclus dans le cadre de la délégation de compétence à l’exécutif, cette
information pouvant prendre la forme d’un rapport annuel sur l’état et l’évolution de la
dette. Suivant la réponse aux observations provisoires, une première information en ce sens
a été communiquée à l’assemblée délibérante lors du conseil municipal du 22 novembre
2010, la chambre régionale des comptes en prend acte.
Telles sont les observations définitives que la chambre régionale des comptes a
souhaité porter à votre connaissance.
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