Panel : Oil Governance in the Current Energy Crisis
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Panel : Oil Governance in the Current Energy Crisis
Panel : Oil Governance in the Current Energy Crisis Pluralité de gouvernances des sociétés nationales de pétrole en Amérique latine (Brésil, Mexique et Venezuela) Isabelle Rousseau1 Au début du XXI ème siècle, la conjonction de la hausse importante du prix du baril et l’arrivée au pouvoir de nouvelles forces politiques (en Russie, au Venezuela et en Bolivie) ou l’émergence politique et économique de certains Etats et régions (Caspienne et Asie Centrale) ont favorisé la révision des politiques libérales au profit d’un nouvel interventionnisme de l’Etat dans les activités de l’énergie. Outre la flambée des cours du pétrole, rentrent aussi en ligne de compte d’autres facteurs : l’arrivée au pouvoir de nouveaux gouvernements (en Russie, au Venezuela et en Bolivie) qui se sont montrés très peu satisfaits des politiques engagées par les gouvernements précédents (ce fut aussi le cas en Algérie et au Kazakhstan) ainsi que les grandes constantes qui épaulent les nationalisations dans le secteur minier: la méfiance vis à vis des étrangers – notamment des puissances occidentales (pays et compagnies confondus) et le besoin de contrôler l’ensemble de la chaîne de production des hydrocarbures pour avoir la maîtrise de l’économie et résoudre les problèmes sociaux auxquels ces pays sont confrontés. Cette nouvelle vague de nationalisations a remplacé une époque de forte libéralisation (1980-2000) qui s’était traduite dans l’industrie pétrolière par un vent d’ouverture et de re-privatisations. Bien que les raisons aient différé selon les pays, ce mouvement était accompagné partout de la diffusion de normes juridiques contraignantes encadrant les relations contractuelles entre Etats propriétaires des ressources en terre et compagnies privées étrangères pour garantir aux investisseurs un haut degré de sécurité des droits acquis par contrat. En ce qui concerne l’Amérique latine, le nouveau nationalisme pétrolier a accompagné l’arrivée au pouvoir de nouvelles forces de gauche, antagoniques à l’idéologie neo-libérale qui intégrait le fameux « consensus de Washington ». Le Venezuela, sous l’égide du Président Hugo Chávez, a été le pionnier de ce revirement, suivi bientôt par la Bolivie et l’Equateur. La visibilité de ce phénomène a été d’autant plus notable que certains d’entre eux s’étaient largement engagés dans la voie neolibérale. Ce fut le cas de l’Argentine et de la Bolivie qui avaient privatisé totalement leur industrie. Quoique le Venezuela n’ait pas suivi une voie aussi extrême, néanmoins la Apertura était conséquente. Le contraste n’en n’a été que plus frappant. Néanmoins, hormis ces quelques cas, ni l’ouverture ni le nouveau nationalisme de l’industrie pétrolière n’ont acquis ces dimensions dans les autres pays latinoaméricains. Le Mexique et le Brésil, deux autres grands pays pétroliers (principalement le Mexique), présentent des situations différentes. L’intérêt du Brésil –qui vient tout récemment d’accéder à la catégorie de pays exportateur (il a été importateur jusqu’en 2006)- provient de son expérience et de la capacité qu’il a su développer dans l’off 1 . Professeure et Chercheuse. Centro de Estudios Internacionales. El Colegio de México. Responsable d’un projet CONACYT “Vers une meilleure gouvernance de Pemex et de l’industrie pétrolière mexicaine ». 1 shore mais aussi de la bonne gouvernance de sa société nationale – Petrobras - qui en fait un modèle parmi les NOC’s. De son côté, le Mexique est resté fidèle au nationalisme qui a imprégné l’industrie pétrolière depuis l’expropriation des compagnies pétrolières internationales en 1938. L’Etat n’a jamais perdu sa place centrale dans l’organisation de ce secteur même durant les années 90 alors que le Mexique signait le traité de l’ALENA avec les Etats-Unis et le Canada et faisait montre d’une très grande ouverture de son économie dans les autres secteurs d’activités industrielles, financières et commerciales. L’hypothèse que nous voulons développer ici est la suivante : l’hétérogénéité dans les modèles de gouvernance de l’industrie et de la société nationale dépendent du rôle que l’Etat a joué dans la création et dans le développement du secteur minier –et donc de l’industrie pétrolière- et du type d’institutions qu’il a voulu, pu ou su construire pour encadrer ce secteur. Ainsi, en fonctions de l’organisation de ce secteur et de l’encadrement institutionnel établi, les vagues de libéralisation et ensuite de nationalisation n’ont acquis ni la même dimension ni suivi les mêmes modalités. Pour ce faire, nous allons procéder à une comparaison principalement entre le Venezuela et le Mexique. En effet, ces deux pays sont les deux grands pays pétroliers latino-américains. Nous n’aborderons le Brésil que de facon tangentielle car, jusque très récemment (2007), le Brésil n’était pas un pays auto-suffisant en pétrole. Nous nous proposons d’étudier dans les deux cas les stratégies développées par les Etats pour construire leur industrie pétrolière. Nous observerons, en particulier, la relation que l’Etat a entretenu avec sa société nationale –le rôle qui lui a attribué pour consolider le régime politique et pour le développement industriel et économique du pays- les institutions qu’il a crées et aussi la place accordée aux compagnies étrangères dans la production pétrolière. Nous examinerons, dans un premier temps, la naissance et le développement de l’industrie pétrolière jusqu’au moment de l’ère libérale (années 90). Puis nous étudierons les modalités qui ont présidé à l’ouverture dans les deux cas, en montrant comment la construction institutionnelle a conduit à des modes d’ouverture et de gouvernance totalement différents. Enfin, nous analyserons comment ce construit institutionnel et organisationnel préside le renouveau du nationalisme pétrolier dans ces deux pays. La naissance et le développement de l’industrie pétrolière au Mexique et au Venezuela Introduction En Amérique latine, l’industrie pétrolière est née et a été faconnée par les compagnies internationales (américaines, en général), à la fin du XIXème siècle. Pour ce faire, en général, le cadre légal et fiscal a été modifié de manière à attirer les capitaux étrangers. Néanmoins, l’histoire propre de chacun des pays de la région modèlera de facon différente l’évolution de ce secteur économique. Les cas du Mexique et du Venezuela sont patents à cet égard. 2 Mexique Les origines de l’industrie pétrolière au Mexique L’exploration et la production de pétrole au Mexique commencent, au XIX ème siècle, vers la fin des années soixante, cependant le début de la production à grande échelle date de 1901, dans la région de Ébano-Pánuco. Le développement de l’industrie pétrolière est corrélatif à un changement du cadre légal en vigueur. En effet, s’il est vrai que, jusqu’en 1884, le régime de propriété du sol et du sous-sol était favorable à la nation (couronne espagnole puis nation mexicaine), en 1884, le gouvernement de Porfirio Díaz adopte la conception anglo-saxonne des droits de propriété : les ressources du sous-sol se convertissent en propriété exclusive du propriétaire du sol. La loi de 1901 – spécifique au pétrole - confirme ce droit et délivre en outre au gouvernement mexicain la possibilité de donner en concession aux compagnies privées des aires appartenant à la nation. Ce nouveau cadre légal va favoriser la venue de compagnies anglaises et américaines qui se bénéficieront aussi d’un cadre fiscal très favorable. En très peu de temps, le Mexique va devenir un des principaux pays producteur et exportateur de pétrole.2 Le développement de l’industrie pétrolière était totalement dépendant de l’étranger quant aux capitaux étrangers, aux cadres et hauts cadres et à la technologie. En effet, la Révolution mexicaine avait affecté et désorganisé les entrepreneurs et l’Etat était en pleine reconstruction. Bien que la Constitution de 1917 ait restitué à la nation les droits de propriété sur les ressources du sous-sol, durant de nombreuses années la législation porfiriste continuera à prévaloir. Si bien qu’après la Révolution, la production pétrolière continuera à croître. De facon graduelle, les gouvernements émanant de la Révolution chercheront à reprendre le contrôle des ressources pétrolières, mais il leur faudra plus de deux décennies pour y parvenir : entre la promulgation de la Constitution de 1917 et la Nationalisation en 1938. Ils tenteront à la fois de faire reconnaître les droits et la souveraineté de la Nation aux investisseurs étrangers et aussi d’augmenter les revenus fiscaux. Dès 1915, ils vont se doter de spécialistes pour surveiller l’industrie pétrolière et la réguler puis, en 1918 et ensuite en 1925, les gouvernements mexicains ont émis des lois qui, à partir d’un nouveau cadre fiscal, tentaient de remettre en cause le principe de concession à perpétuité (pour lui fixer une durée temporelle) ; solution qui a essuyé le refus total des compagnies étrangères. Ayant un besoin urgent de réactiver l’économie du pays, le gouvernement cherche à négocier avec les compagnies (loi du Pétrole de 1928) et leur donner des garanties concernant leurs activités au Mexique tandis qu’en contrepartie les compagnies devaient prouver qu’elles étaient réellement les propriétaires des terrains et qu’elles avaient vraiment réalisé des investissements pour produire du pétrole (et obtenir ainsi des concessions confirmées).3 Néanmoins, de par la conjonction de divers facteurs, à partir de 1922 la production a commencé à diminuer. En outre, lorsque les compagnies comprirent que tôt ou tard le gouvernement mexicain appliquerait les principes de la Constitution, leur unique objectif fut d’extraire et d’exporter le plus possible de facon à récupérer rapidement leurs investissements et financer leurs futures opérations (négligeant toute mesure de conservation et de protection des puits et des champs). En 1932, la Anglo-Dutch Mexican Eagle Co. 2 . En 1918, 73% de la production était d’origine américaine, 21% anglaise, 4% hollandaise et 2% hispano-mexicaine. . Angel de la Vega. La evolución del componente petrolero en el desarrollo y la transición de México. PUE/UNAM. 1999. pp-3840 3 3 découvrit et développa le champ de Poza Rica, (Veracruz) ce qui a réactivé un peu la production du pays. Cependant, au moment où le président Cárdenas décide d’exproprier les compagnies étrangères, les revenus fiscaux provenant du pétrole avaient nettement diminué (vu la baisse générale de la production). De la nationalisation du pétrole à la fin des années 1980 Le processus d’édification de Pemex et de l’industrie pétrolière mexicaine a été un acte éminemment politique. En effet, bien que l’article 27 de la Constitution de 1917 revendique pour la nation la propriété des ressources du sous-sol, cette Charte, dans sa version originale, n’excluait pas la participation du secteur privé, que ce soit sous forme de concessions ou d’autres formules juridiques. Sur la base des principes contenus dans l’article 27, la loi pétrolière de 1925 et son règlement avaient en effet instauré un système de concessions. Ce sont les conditions dans lesquelles s’est produite la nationalisation du pétrole au Mexique et la nature de l’Etat mexicain qui émerge de la Révolution qui conduiront à donner une interprétation particulière à cet article constitutionnel et forger une équivalence entre les termes suivants : « Nation = Etat = Pemex « 4. Comme nous l’avons vu, les conceptions des gouvernements émanant de la Révolution (1910-1917) ne se différenciaient pas fondamentalement – eu égard aux capitaux étrangers - de celles des Porfiristes du siècle précédent : la reconstruction du pays et la réactivation des entreprises rendaient indispensable le recours au secteur privé, qu’il soit national ou étranger. La seule obligation pour les investisseurs étrangers consistait à accepter le nouveau rôle exercé par l’Etat mexicain dans la conduite des processus économiques5. Or, les compagnies étrangères qui exploitaient les hydrocarbures au Mexique n’avaient pas voulu reconnaître les lois mexicaines6. Confrontées aux demandes des syndicats qui réclamaient une augmentation de salaire et une participation majeure dans la prise de décisions concernant la gestion de l’industrie, elles refusèrent de reconnaître la décision de la Cour Suprême de Justice qui donnait raison aux syndicats. Cette négation fut interprétée comme une atteinte inacceptable envers la souveraineté de l’Etat. Ce conflit mettait à l’épreuve le système corporatiste qui appuyait ouvertement les organisations de travailleurs ainsi que la nouvelle jurisprudence7. C’était un comportement jugé inadmissible par un régime qui cherchait encore à s’affirmer, et ce dans un pays qui n’avait pas encore pansé les blessures morales que les invasions étrangères de la seconde moitié du XIXème siècle lui avaient laissées. Ceci a conduit le Président Lázaro Cárdenas, le 18 mars 1938, à nationaliser le pétrole et à créer par décret, le 7 juin 1938, une société publique – Petróleos Mexicanos (Pemex)-. Dès lors, Pemex sera une entreprise décentralisée du gouvernement fédéral, dotée d’un caractère technique, industriel et commercial et d’une personnalité juridique et un patrimoine propres.8 Elle a pour mission d’administrer, mettre à profit, transformer, commercialiser et conserver une ressource non renouvelable d’intérêt pour la souveraineté nationale et de grand impact sur la structure économique du pays. 4 . Isabelle Rousseau. « A la recherche d’une meilleure gouvernance d’entreprise : Petróleos Mexicanos (Pemex) ». Etudes du CERI. CERI/ Sciences Po. 2007. p. 6. 5 . Knight, Alan. The Mexican Revolution. Cambridge University Press. 1986 (Vol. 2). 6 . Parmi les compagnies étrangères, les intérêts anglo-hollandais prédominaient. En 1938, sous l’égide de la Royal Dutch-Shell (groupe El Aguila), ils possédaient 70% de l’industrie pétrolière au Mexique. 7 . Vega, Angel (de la), op.cit. 8 . PEMEX, Marco jurídico básico. 1ra edición. México. 1988. p. 23-25 4 Néanmoins, l’expropriation des compagnies étrangères et l’acte de nationalisation de l’industrie pétrolière ne suffisent pas à expliquer à eux seuls le statut de monopole public qu’a acquis Pemex. Ce sont la construction du système politique mexicain post-révolutionnaire et les assises légales qu’il s’est données qui permettent de comprendre comment on est passé du statut de « nation détenant la propriété des hydrocarbures » à celui de « société nationale, monopole d’Etat dans la gestion de l’activité pétrolière »9. Bien que le principe du monopole d’Etat n’ait pas présidé à la naissance de Pemex, il sera instauré quelques années après. C’est avec la réforme de l’Article 27 de la Constitution, le 9 novembre 1940, que l’industrie pétrolière deviendra une industrie d’Etat. Par un transfert de droits, l’Etat est le représentant juridique et politique de la nation et Pemex, un instrument qui permet à l’Etat – et au gouvernement fédéral qui le représente - d’organiser l’industrie pétrolière et gazière et de promouvoir son développement. Par le truchement de la société nationale, l’Etat va prendre en charge toutes les opérations de l’industrie pétrolière. Parallèlement, il se dote d’un cadre légal qui couvrira toutes les activités du secteur – tant minières que de transformation industrielle. La Constitution achèvera de consolider le statut de monopole de Pemex en attribuant un caractère stratégique à l’industrie pétrolière. Dans ce contexte, Pemex s’est vu confier des objectifs et des tâches qui excédaient de loin celles qui incombent normalement aux compagnies pétrolières. Depuis sa nationalisation, PEMEX a traversé trois grands moments. De 1938 au milieu des années soixante-dix, le secteur pétrolier a été un des piliers fondamentaux de l’industrialisation du pays. Sous le lemme “Au service de la Patrie”, la paraétatique a eu pour tâche de fournir de l’énergie bon marché et d’assurer l’autosuffisance énergétique du pays. En bien des égards, l’entreprise a réussi à satisfaire les buts assignés: durant plus de trente ans, Pemex a pu alimenter le marché national avec une énergie très bon marché -au profit, en particulier, du développement industriel de quelques secteurs clés de l’économie.10 Cependant, les coûts de cette politique ont été particulièrement élevés. En tant que monopole d’Etat dans un marché national fermé et protégé, les prix provenaient d’une décision politique et n’avaient que peu de relation avec les prix en vigueur sur le marché international. La capacité d’autofinancement de l’entreprise s’est progressivement réduite. 11 Au début des années soixante-dix, la relative obsolescence de Pemex avait atteint un niveau critique: pour la première fois, le Mexique a dû importer du pétrole! A partir de 1977, la politique pétrolière a effectué un virage. La découverte de gisements impressionnants au Chiapas et au Tabasco (et ensuite dans l’état de Campeche) et les niveaux records du prix du baril de brut ont favorisé la « pétrolisation » de l’économie. La politique pétrolière s’est orientée vers l’exportation massive de brut.12 Pour ce faire, de 1977 à 1982, l’industrie pétrolière s’est transformée et développée de manière notable; elle s’est convertie en détonateur du dynamisme 9 . Meyer, Lorenzo y Morales, Isidro. Petróleo y Nación (1900-1987). La política petrolera en México. FCE. 1990. . En ce sens, le pétrole a participé à l’élaboration et au maintien du Pacte social et de la politique priiste. 11 . En donnant la priorité aux prix bons marchés, les prix de vente de Pemex sont restés bas en comparaison avec les prix internationaux tandis que les coûts étaient beaucoup plus élevés. 12 . Ce changement s’est fondé sur deux croyances: 1. très rapidement, au niveau mondial, de nouvelles sources d’énergie allaient substituer le pétrole et 2. le prix du barril allait continuer à augmenter de facon exponentielle et ininterrompue. 10 5 économique national.13 Parallèlement, le pétrole est devenu un instrument de financement –une garantie sur tous les prêts internationaux. Ceci a précipité un endettement pharamineux, de l’entreprise bien sûr mais aussi du pays.14 Dans cette économie extrêmement fragile, la crise est survenue quand, simultanément, le prix du pétrole s’est effondré et que les taux d’intérêt bancaire se sont brusquement élevés. En 1982, endetté de facon extrême (la dette publique externe atteignait alors 100,000 millions de dollars), le Mexique était sur le point de se déclarer en banqueroute.15 La nouvelle administration –sous la houlette de Miguel de la Madrid (19821988)- a émis un diagnostique très sévère: la crise était le produit d’une politique économique erronée qui avait provoqué de grands déséquilibres dans les secteurs public et externe et des distorsions dans le système financier et le marché de biens et des facteurs de production. Considérant que le protectionnisme de l’appareil productif et la prédominance du secteur public étaient des options anachroniques, peu viables et, en outre, inefficaces, cette équipe a proposé des changements radicaux pour vaincre la crise, récupérer la capacité de croissance et obtenir un développement soutenu et sans inflation. Fort de ces principes, le gouvernement de Miguel de la Madrid a décidé de promouvoir les exportations non pétrolières ; parallèlement, il s’est efforcé de construire un “Nouveau Pemex”, le soumettant à un ajustement économique rigoureux et, dans une moindre mesure, à des changements administratifs. La réduction budgétaire a affecté de manière importante l’investissement pétrolier.16 Pour contrebalancer cette mesure, on a cherché à assainir ses finances.17 On a aussi mis sur pied un programme de substitution des importations qui a permis d’épargner un montant substantiel de devises.18 En outre, on a restructuré les termes de la dette externe dont la plus grande partie était engagée à court terme.19 Bien que la structure financière de l’entreprise se soit considérablement améliorée, le programme d’austérité engagé a eu des conséquences fâcheuses sur la capacité de l’entreprise pour faire face aux besoins futurs en énergie et fournir les facteurs de production de base, de moyen et long terme. La baisse du volume des exportations combinée avec la chute dramatique des prix internationaux a durement affecté le montant des devises obtenues. En outre, une charge fiscale croissante –qui va rapidement représenter presque 80% des revenus pour concept de ventes- a commencé à asphyxier l’entreprise. S’il est vrai qu’à la fin du sexennat de Miguel de la Madrid, le pétrole en tant que bien d’exportation avait cessé d’être une plateforme pour la croissance économique, néanmoins les revenus provenant des hydrocarbures deviendront un des principaux instruments pour financer le service de la dette externe et des dépenses publiques. Par contre, l’organisation de l’entreprise et l’industrie pétrolières a très peu changé : elle est restée à l’image d’un modèle de développement industriel replié sur lui-même. Pemex ne s’intéressait alors nullement aux règles de fonctionnement du 13 .Grâce à un programme d’actualisation technologique très coûteux et de grandes découvertes (sonde de Campeche), Pemex a élevé considérablement sa plateforme de production de pétrole brut (de 156. 586 barils par jour de pétrole brut en 1970 à deux millions 750 mille barils en 1982) et de gaz naturel (d’environ 18,ooo millions de pies cubiques en 1970 à 43 millions 890 mille en 1982), de renouer avec les exportations de pétrole (en 1976, 34.5 millions de barils) et, enfin, d’élever le volume des réserves prouvées (de 7,000 millions de barils en 1976 à 70,000 millions en 1982). 14 . PEMEX requérait un gros endettement pour se moderniser et être à la hauteur des nouveaux défis. 15 . Les statistiques de 1982 montrent la profondeur de la récession dans laquelle le pays était tombé: le PIB enregistrait un taux de croissance négative de 0.2%, l’inflation avait atteint 100% tandis que le chômage avait vu doubler ses chiffres. 16 . En termes réels, l’investissement total dans l’industrie pétrolière s’est restreint ; en 1989, il ne représentait plus qu’un quart de ce qu’il représentait en 1981 (la production primaire a été la plus affectée). 17 . On a révisé à la hausse les prix et on a réduit les subventions pour diminuer la demande interne et réduire la brèche eu égard aux prix internationaux. On a aussi cherché à attaquer les goulots d’étranglements concernant l’infrastructure pour emmagasiner et transporter les hydrocarbures. Et tenté de freiner la corruption galopante qui avait oxydé la paraétatique. 18 . On a réussi à diminuer les biens de production importés de 60% en 1982 à 15% en 1985. 19 . Son montant s’est réduit de 19.200 millions de dollars en 1982 à 15.700 en 1985. 6 marché pétrolier international : la compétition avec des entreprises étrangères ne rentrait pas dans sa sphère de préoccupations. Pemex était restée une entreprise dédiée à alimenter le marché interne et avait négligé presque complètement son rôle commercial, qui fonctionnait sur des notions antiéconomiques concernant les prix et les coûts. Monopole d’Etat, Pemex répondait au modèle classique d’organisation centralisée avec une intégration verticale. Ce modèle avait été fonctionnel pour coordonner efficacement les activités de l’entreprise et satisfaire les besoins internes (fournir du pétrole à bas prix et fomenter le développement industriel du pays). Les objectifs poursuivis étaient politiques plus qu’économiques et l’organisation centralisée représentait un moyen efficace de contrôle. Cependant, cet ensemble institutionnel et organisationnel montrait ses insuffisances. Quoique les revenus de la rente pétrolière aient aidé à différer les changements, l’urgence de la crise économique et financière a obligé l’administration de Miguel de la Madrid à s’attaquer au problème financier et à reléguer à un second terme la réforme organisationnelle. Le tournant radical que le projet économique du pays avait effectué et l’ouverture commerciale qui l’avait accompagné (entrée dans le GATT puis signature de multiples accords –dont le principal reste l’ALENA-) devait répercuter sur l’organisation d’une entreprise stratégique pour le pays. Dotés d’intentions plus ou moins cachées et plus ou moins proches de privatisation et avec un sceau évident d’internationalisation, les décideurs se sont efforcés de transformer Pemex en une entreprise orientée vers la productivité, la rentabilité. De même que le reste des entreprises pétrolières d’Etat dans le monde, la réorganisation administrative de Pemex est devenue alors un des grands sujets de préoccupation. Venezuela L’histoire de l’industrie pétrolière au Venezuela montre le lent apprentissage de l’Etat vénézuélien à exercer son rôle de propriétaire des ressources en terre ; c’est à dire à comprendre l’importance de ces ressources pour le développement du pays (et aussi pour le maintien de l’élite au pouvoir) et ensuite à apprendre à jouer son rôle d’agent fiscal puis de régulateur et de planificateur avant de devenir producteur (avec la création de sa propre compagnie pétrolière, en 1975, Petróleos de Venezuela, Sociedad Anónima (PDVSA) . De la découverte du pétrole à la création d’une société nationale pétrolière… Il faut attendre 1878 pour que la prospection du sous-sol vénézuélien révèle les premiers gisements d’hydrocarbures du pays, mais en réalité ce n’est qu’en 1914 -avec la découverte par Royal Dutsch Shell du gisement Zumaque I dans le champ de Mene Grande au large du lac de Maracaibo- que naît officiellement l’industrie des hydrocarbures au Venezuela. Avec la mise en production en 1917 de ce gisement, les activités liées aux ressources d’hydrocarbures entrent dans une phase résolument industrielle. Les compagnies pétrolières internationales affluent massivement sur le territoire national, déplacant par la même les grands propriétaires fonciers (latifundistas) qui avaient jusque-là exploré le sous-sol de leur propriété afin d’en extraire les quantités de pétrole nécessaires au fonctionnement de leur exploitation agricole. 7 Face à l’attrait exercé soudainement par le sous-sol, le gouvernement de Juan Vicente Gómez (1908-1935) décide d’intervenir en légiférant pour que l’Etat contrôle l’accès à la ressource en terre tout en s’appropriant une part relative des revenus engendrés par l’industrie. En 1920 puis en 1922, le gouvernement émet des lois qui affirment clairement la propriété de l’Etat sur les ressources en terre et permet de construire un cadre contractuel au sein duquel sont définis les droits et obligations entre le propriétaire institutionnel des réserves en terre (l’Etat vénézuélien) et l’exploitant privé de la concession pétrolière octroyée (la compagnie étrangère) et qui établissent un cadre fiscal propice aux investissements dans le pays. 20 Cela aura pour effet un accroissement du volume des investissements pétroliers étrangers, beaucoup de découvertes majeures et une augmentation des volumes de production (le Venezuela des positionnera comme le 2eme producteur mondial après les Etats-Unis en 1928 et le 1er exportateur mondial). Mais parallèlement, les finances publiques qui se « pétroliseront ». A partir de 1935, apparaît une nouvelle génération de dirigeants politiques qui décide de réviser le cadre fiscal pétrolier pour augmenter la part relative de l’Etat dans le partage des revenus issus de l’exploitation des ressources présentes dans son sous-sol. En 1935 puis en 1936 de nouvelles lois apparaissent : elles reformulent le cadre fiscal mais aussi le cadre légal concernant le développement des activités des concessionnaires (on les oblige à privilégier la main-d’oeuvre vénézuélienne dans cette industrie et consacrer une partie de leurs revenus d’exploitation à la formation des ressources humaines vénézuélienne. Ceci contribuera a former une élite pétrolière vénézuélienne qui pourra plus tard servir les intérêts nationaux). Parallèlement, cette nouvelle loi oblige les compagnies étrangères à se conformer à l’arbitrage national.21 L’avènement de la seconde Guerre Mondiale a accru les capacités de production de l’industrie pétrolière vénézuélienne. Malgré cela, le taux de croissance des revenus pétroliers destinés à l’Etat reste bien en decà du taux de croissance de la production tandis que parallèlement les dépenses à caractère économique et social continuent d’ augmenter. Le gouvernement en place promulgue de nouvelles lois –la loi de 1945 qui instaurera le principe du fifty-fifty (50-50%) pour tous les contrats de concession. Cependant l’application de ce principe sera variable puisque le gouvernement vénézuélien ne dispose d’aucun mécanisme (institutions) pour contrôler la quantité de pétrole produite, le coût de son extraction et son prix de vente. Cette asymétrie d’informations permettra aux compagnies étrangères de fixer elles-mêmes le montant de leurs taxes et impôts. Adoptant une attitude plus processive, Rómulo Betancourt - élu à la Présidence de la République vénézuélienne en décembre 1958- promulgue un décret qui redéfinit les termes contractuels des concessions (éliminant leur reconduction tacite) et instaure un nouveau système de partages des profits. Parallèlement, il se rapproche des autres grands pays producteurs de pétrole dans le but de mutualiser les connaissances sur la régulation pétrolière domestique. Dans le prolongement de la réunion du Caire (16 avril 1959), est créé à Bagdad en 1960 l’Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole (OPEP) dont le Venezuela est un des membres fondateurs. Les Etats membres de l’OPEP décident d’établir des compagnies pétrolières nationales. Le gouvernement Betancourt décide de créer en décembre 1960 l’entreprise publique, Corporación 20 . Mora-Contreras. « El derecho de propiedad de los hidrocarburos en Venezuela : origen y tradición legal ». Revista Venezolana de Economía y Ciencias Sociales, vol. 8, n0. 2 (mayo-agosto). 2002. Pp. 219-235. concessionnaire dispose d’un droit de propriété exclusif de 30 années sur la concession octroyée par le gouvernement et l’Etat propriétaire recoit en contrepartie financière une redevance annuelle fixée par un taux de royaltie de 15% de la valeur marchande des quantités de pétrole vendues ainsi qu’un impôt sur le revenu sur les activités des concessionnaires. 21 . Juan Carlos Boué. Venezuela : The Political Economy of Oil. Oxford University Press. OIES. UK. 1993. 233. p 8 Venezolana del Petróleo qui devient un observatoire qui permet de surveiller les activités des compagnies internationales tout en bénéficiant de leur savoir faire et expérience. En outre ce gouvernement introduira toute une série de mesures -tout au long des années soixante- qui transforment peu à peu la structure des rapports de force entre les concessionnaires et le propriétaire. L’influence de plus en plus grande de l’OPEP et l’insertion de Corporación Venezolana del Petróleo dans les structures du système pétrolier national ont entraîné une modification des contours institutionnels de l’industrie pétrolière nationale. Entre 1970 et 1975, toute une série de mesures prises par le gouvernement vénézuélien accroîtront les tensions entre le propriétaire et les concessionnaires. En 1974, un comité présidentiel associant l’ensemble des partis politiques et des composants de la société civile est chargé d’élaborer un projet de loi de nationalisation. Celle-ci est proclamée le 29 août 1975. De la nationalisation à l’ouverture de l’industrie pétrolière La promulgation de la loi organique sur les hydrocarbures de 1975 constitue l’acte fondateur de l’industrie pétrolière vénézuélienne. La nationalisation des actifs immobiliers et mobiliers présents sur le territoire national, les droits de propriété, les prérogatives, les rentes pétrolières sont intégralement transférés vers l’Etat vénézuélien et sa société pétrolière nationale, Petróleos de Venezuela, S.A. Entre 1975 et 1979, on va procéder à une homogénéisation et une rationalisation des structures des différents opérateurs nationaux qui constituent la holding (qui finalement seront réduits à trois : Corpoven, Maroven et Lagoven) et on va créer un centre de recherche et de développement, Intenvep. Cependant contrairement à ce qui se passe au Mexique, où Pemex est concu comme un véritable appareil au service de l’administration et du gouvernement mexicain, au Venezuela la nationalisation marquera le point de départ d’une relation conflictuelle entre les différents dirigeants des opérateurs de PDVSA et l’Etat vénézuéliens. Cela soulignera la contradiction latente entre la logique nationale et la logique commerciale des sociétés pétrolières nationales. En période de boom pétrolier (de 1973 à 1981), les affrontements ne sont pas visibles car les hauts prix permettent aux opérateurs et au propriétaire d’atteindre leurs objectifs respectifs ; par contre, en période de bas prix, les affrontements deviennent notoires. Ce fut le cas à partir de 1981-1982. Le gouvernement d’Herrera Campins va intervenir de plus en plus dans les domaines de compétence propres à la holding pétrolière (pour lesquels il ne dispose ni du savoir faire ni des informations techniques) en lui ôtant son autonomie financière et en lui déléguant –contre son gré- un rôle économique et social croissant (missions nationales), nécessaires au développement économique et à la stabilité sociale. Les résultats sont contrastés pour la holding : ils sont positifs en ce qui concerne le renouvellement des réserves pétrolières et l’augmentation de la capacité de raffinage mais le sont nettement moins en ce qui concerne le volume de production, d’exportation et l’évolution de la structure des coûts opératoires. En outre, pour des raisons politiques (subvention des produits pétroliers sur le marché interne), le prix de cession est bien inférieur au prix international ce qui se traduit par de nettes pertes pour la holding à peine compensés par les profits réalisés à l’exportation. Ainsi le revenu net de PDVSA en 1983 est inférieur à celui de 1977. Face à cette situation de blocage, les dirigeants de PDVSA initient une stratégie d’expansion – d’internationalisation - pour recouvrir l’autonomie financière et opérationnelle de la société nationale : ils développent une partie de leurs activités aval (raffinage) hors du territoire national. Cette stratégie se déroule en trois étapes au cours 9 desquelles PDVSA va créer une entité nouvelle qui regroupera l’ensemble des filiales de la holding situées hors du pays.22 Le gouvernement ferme les yeux vu la nécessité de stabiliser les revenus publics, affectés par les soubresauts des prix internationaux du pétrole. Parallèlement, les dirigeants de PDVSA vont acquérir une autonomie opérationnelle importante vis à vis de leur actionnaire unique mais, en même temps, une dépendance accrue vis à vis de leurs partenaires dans les joint ventures et aussi des consommateurs internationaux : il doivent honorer leurs engagements contractuels en termes d’approvisionnement ce qui crée à l’intérieur même de PDVSA un rapport de forces entre les filiales de l’amont et de l’aval. En conclusion, que l’industrie pétrolière vénézuélienne soit sous le régime des concessions ou de la propriété publique, les mécanismes de création et d’appropriation des rentes pétrolières sont toujours à l’origine de tensions, de conflits et de rapports de forces entre l’Etat propriétaire des réserves et le(s) locataire(s) de la terre sous laquelle se trouvent les gisements d’hydrocarbures. Par ailleurs, l’exacerbation des tensions qu’a engendré la baisse des prix du pétrole, achemine les dirigeants de la holding à chercher à s’émanciper vis-à-vis de leur actionnaire unique (notamment par le biais d’une large autonomie opérationnelle et financière). Bilan et conclusion Les sociétés nationales pétrolières mexicaines et vénézuéliennes se sont développées dans des pays d’économie mixte où l’Etat assurait un rôle important. Dans les deux cas, le processus de nationalisation de compagnies privées internationales et de création d’une société nationale détenant un monopole sur l’ensemble des activités du secteur n’a pas été uniquement lié à des logiques de contrôle de la manne pétrolière. Ce fut aussi et surtout le résultat d’une politique plus générale d’affirmation de la souveraineté nationale se concrétisant dans des options développementalistes, où l’État jouait un rôle central dans l’économie, et plus particulièrement dans la grande industrie. Il a suivi (précédé, dans le cas du Mexique) un phénomène généralisé à cette période dans l’ensemble des pays exportateurs de pétrole – et en particulier, au sein de l’Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole (OPEP). La création d’entreprises publiques, dotées généralement du monopole public, répondait à une logique à la fois industrielle et politique. Vu la faiblesse historique du secteur privé dans cette région, seul l’État disposait de la force économique pour assurer les investissements nécessaires à la création et au maintien d’une industrie exigeante en capital et dotée d’une importante complexité technologique. Pour les gouvernements de ces deux pays, c’était également un moyen de promouvoir le développement de l’industrie nationale, en concevant le contrôle des ressources énergétiques comme un levier pour le reste de l’industrie nationale. Ils avaient aussi investi ces entreprises d’un rôle à la fois fiscal et social : tout en contribuant de manière très significative aux budgets publics, elles devaient assurer l’accès et la distribution d’une énergie à faible coût. Enfin, ces sociétés nationales étaient dotées d’une fonction d’intégration de l’espace national, par la construction d’infrastructures dans les régions de production, et d’un réseau de distribution et de commercialisation des produits finis dans l’ensemble 22 . Dans un premier temps, PDVSA s’associe avec des petites compagnies européennes pour le raffinage (VEBA OEL puis la RURH OEL ; ensuite il acquèrera en deux temps les parts de CITGO Petroleum Corporation aux Etats-Unis). 10 du territoire national. Mais comme le montre l’analyse des deux cas étudiés - Mexique et Venezuela- l’histoire de la construction institutionnelle et de l’organisation du secteur pétrolier a été différente. Bien que, dans les deux cas, les compagnies pétrolières internationales découvrent et exploitent les gisements de pétrole dès la fin du XIX ème siècle, elles auront un statut différent dans chaque cas et donc joueront un rôle distinct. Au Venezuela, elles seront acceptées et intégrées pleinement sur le plan légal, et les différends qui se produiront entre le propriétaire des ressources du sous-sol et les opérateurs porteront essentiellement sur la question de la rente pétrolière. Au contraire, au Mexique, avec la Révolution et le changement de Constitution (1917), les compagnies internationales seront vues comme des parasites qui violent la Charte du pays. Vu les conditions économiques et financières déplorables dans lesquelles s’est trouvé le pays à la sortie du mouvement armé, les différents gouvernements mexicains se verront dans l’obligation de fermer les yeux sur cette anomalie. Néanmoins, dès qu’ils sera possible de consolider les institutions du pays, l’expropriation des compagnies étrangères deviendra un must. Cette différence essentielle engendrera des relations IOC’s/NOC’s et des comportements complètement différents. En premier chef, le processus de nationalisation prendra des formes distinctes. Dans le cas du Mexique, il surviendra très tôt , bien avant la vague des nationalisations promue par l’OPEP (années 60) et il sera vécu sur le mode de la rupture (traumatisme et vengeance du côté des compagnies internationales) et défi pour les mexicains (auront-ils la capacité de monter tout seuls une industrie pétrolière digne de ce nom ?). Au contraire, dans le cas du Venezuela, la nationalisation deviendra une suite logique, quasiment naturelle, d’une évolution graduelle (en douceur) de l’organisation du secteur pétrolier ; du coup, la logique de fonctionnement des compagnies étrangères sera préservée au sein de PDVSA. La nouvelle société nationale bénéficiera d’un savoir faire, d’informations et de technologie de pointe. En deuxième lieu, et par conséquent, Pemex sera concue comme un appendice du gouvernement fédéral qui contribue au maintien de la stabilité du pacte priiste tandis que PDVSA fonctionnera des le départ comme une véritable compagnie pétrolière, quoique par ailleurs, la rente pétrolière contribuera au maintien de la stabilité économique, politique et sociale du pays. Ces différences structurelles auront des conséquences sur les décisions et la manière d’aborder et de répondre aux injonctions et aux transformations qui vont affecter l’industrie pétrolière internationale. La libéralisation de l’industrie pétrolière : Mexique et Venezuela Introduction Dans les pays producteurs latino-américains, bien que les sociétés nationales pétrolières aient généralement rempli avec succès les différents rôles, fiscal, social et d’intégration qui leur avait été dévolu, la question pétrolière a pleinement participé de la spirale de l’endettement. L’attrait d’énormes profits liés aux exportations pétrolières les a conduit à financer par un endettement énorme la modernisation de leur infrastructure 11 (en exploration, production et industrie de transformation)23. L’insolvabilité financière de la région a conduit la plupart des pays latino-américains à adopter des programmes de « stabilisation » et d’ « ajustements structurels » qui ont réduit le rôle de l’État dans l’activité économique (privatisations, libéralisations) et l’ont conduit à devenir bien souvent un simple régulateur de secteurs ouverts à la concurrence, incitant à travers différentes mesures le secteur privé -national et étranger- à devenir l’acteur principal. Le secteur énergétique a été touché par ces politiques néo-libérales, d’autant qu’il était considéré comme l’une des sources principales de l’endettement public. Selon la perspective des réformateurs, déréguler ce secteur n’avait pas pour seul objectif de garantir une meilleure exploitation de la ressource ; il s’agissait aussi de contribuer grandement au désendettement des États. En outre, ce changement s’est déroulé dans un contexte de profonde mutation du secteur pétrolier au niveau mondial : face aux nouvelles formes de compétitivité et la multiplication des incertitudes et des risques auxquelles se voient confrontées l’ensemble des compagnies pétrolières sur le plan international,une des réponses des entreprises du secteur aux défis de ces transformations a été la réalisation de très importantes fusions-acquisitions ou rapprochements entre grandes compagnies, à la fin des années 1990. Dans un tel contexte, les sociétés pétrolières latino-américaines se sont vues contraintes d’adopter de nouvelles structures organisationnelles pour réagir rapidement et de façon adéquate face à une situation fortement changeante afin d’apparaître comme plus compétitives. Néanmoins, pour différentes raisons, dans l’industrie pétrolière, les politiques d’ouverture et de privatisation ont différé selon les pays, contrairement à ce qui se passait dans le reste des secteurs économiques. A cet égard, les exemples du Mexique et du Venezuela sont deux cas d’école. Mexique : La réorganisation administrative de Pemex Introduction Comme nous l’avons vu, l’histoire et la configuration du système politique et économique mexicains ont assigné des traits particuliers aux stratégies et mesures adoptées pour réorganiser l’entreprise et l’industrie pétrolière nationales. La recomposition administrative de Pemex a dû prendre en compte des aspects qui dépassent les considérations d’ordre « managérial » et/ou économique et financier pour intégrer des éléments d’ordre politique et symbolique. Dans ce cadre légal et politique, la question qui se pose a été la suivante : Comment faire de Pemex une entreprise compétitive qui s’insère plus efficacement dans le processus de modernisation et d’internationalisation de l’économie du pays sans enfreindre les principes clés de la Constitution ni remettre en cause la conception – encore vivace- de souveraineté nationale? Comment établir un équilibre viable entre ces deux rationalités –la nationale et la logique d’entreprise- et mettre en oeuvre les réformes nécessaires pour réaliser sans à coups le passage du statut d’établissement public protégé à celui d’entreprise pétrolière capable d’engranger les meilleurs revenus possibles et de résister aux règles de la compétition mondiale? 23 D’après l’Organisation latino-américaine de l’énergie (OLADE), l’endettement externe dû à l’énergie représentait 20 % du total de la dette extérieure. 12 Vu les limites constitutionnelles, dès la fin des années quatre-vingt, les différentes administrations de Pemex ont décidé que la réorganisation administrative de l’entreprise pétrolière serait une manière adéquate de répondre avec succès à ces grands défis. Dans ce cadre, la question devient alors la suivante: quelles sont les nouvelles modalités organisationnelles qui permettent, à la fois, à Pemex de conserver son statut d’entreprise d’Etat tout en fonctionnant d’après les modalités et les critères en vigueur dans le secteur privé –critères qui, selon la théorie, du moins, garantissent la meilleure gouvernance d’entreprise possible? Pemex: entre le monopole et la logique de marché (1989-1992) Au début des années 90, l’avenir de Pemex a été l’objet de nombreux débats parmi les spécialistes du secteur de l’énergie; différentes visions sur la restructuration de l’organisme -qui allaient du statu quo jusqu’à la privatisation- se sont alors confrontées. L’option intermédiaire s’est finalement imposée. La réorganisation s’est efforcée de concentrer Pemex sur ses activités de base (l’exploration et la production d’hydrocarbures) au détriment d’activités telles que la transformation industrielle ou de certains services des hydrocarbures. Ceci a induit la compagnie à se défaire d’activités qui n’appartiennent pas proprement dit à l’industrie pétrolière (telles que l’entreprise de construction, l’Institut d’Ingéniérie et d’autres activités de services et de logistique) et les placer en sous-traitance à des compagnies privées. S’il s’agit bien d’une privatisation partielle des activités périphériques, c’est une mesure dotée néanmoins d’une valeur stratégique et politique très différente à celle qui aurait consisté à vendre partiellement ou dans sa totalité les actifs principaux. La réforme de 1992 a divisé Pemex en un corporatif et quatre filiales et a introduit une gestion basée sur les lignes de négoces.24 Jusque-là, Pemex était organisée de facon verticale et fonctionnait de manière globale. La division de la compagnie a cherché à décentraliser le pouvoir, assignant à chaque filiale ses propres responsabilités (dans les domaines financier, du patrimoine, légal, etc.)25. Il s’agissait aussi d’identifier et de séparer les entités fonctionnelles de celles qui étaient déficitaires26. Cette restructuration a été transcrite dans la Loi Organique de Pemex et des filiales de juillet 1992 ce qui rendrait plus difficile tout retour en arrière. La division en filiales a été pensée en fonction de la considération des “coûts de transaction” qui prennent en compte les prix internationaux. Parallèlement, on a construit un édifice de prix qui intègre les “coûts d’opportunité” pour simuler la formation d’un marché au sein d’une entreprise qui conservait son statut de monopole (en permettant d’éliminer toute subvention de la part de l’Etat). Cependant, ce système de prix inter-organismes a privilégié la filiale Pemex Exploration et Production (PEP) au détriment des aires de transformation (raffinage et pétrochimie) qui, du coup, ont commencé à enregistrer des pertes dans leur bilan financier. Parallèlement, on a instauré un système de réglementation et crée de nouvelles institutions pour introduire la compétition. Deux types de règlements ont été mis en oeuvre: les génériques qui s’appliquent de facon identique quelque soit le secteur et 24 . Il s’agit de Pemex Exploration et Production (PEP), Pemex Raffinage, Pemex Gaz et Petrochimie de Base (PGPB) et Pemex Pétrochimie. 25 . Chacune possède son propre Conseil d’administration; un département corporatif stratégique assure la coordination; il doit superviser les activités des filiales et possèdent son propre Conseil de Directeurs. 26 . La structure verticale de l’entreprise ne permettait pas d’effectuer un tel bilan. 13 cherchent à mettre sous tutelle le comportement administratif (dans le domaine des travaux publics et des achats mais aussi pour surveiller le comportement des fonctionnaires) et les règlements spécifiques, propres à l’industrie concernée, qui ont pour mission d’encadrer le fonctionnement du marché. La Loi Fédérale de Compétition Economique (LFCE) et la Commission Fédérale de Compétition (CFC) appartiennent au premier type ; les diverses lois et règlements du gaz naturel et, surtout, la Commission Régulatrice de l’Energie (CRE), qui doit établir des normes pour les quatre segments qui tomberont sous la coupe du secteur privé dans l’industrie du gaz naturel relèvent du deuxième type. Dans ce but, on a fixé les prix du gaz naturel en fonction des conditions du marché du sud du Texas - le Houston Ship Channel). On cherchait aussi à construire un environnement de certitude pour l’investissement privé. La nouvelle administration de Pemex a également manifesté un vif intérêt pour les questions relatives au marché pétrolier international et a créé une entreprise publique dotée d’une personnalité juridique propre - Pemex Comercio Internacional, S.A. de C.V. - pour commercialiser les produits pétroliers mexicains à l’extérieur et affronter les défis dus à la volatilité du marché pétrolier international27. Il s’agissait aussi d’optimiser les bénéfices dans les transactions commerciales à tous les niveaux – production, raffinage et distribution. Par ailleurs, PMI a été concu comme un centre pilote inaugurant un nouveau style de gestion en vue de fomenter une culture d’entreprise différente (organisée sous la forme de Profit Centers extrêmement fluides et flexibles, autour de relations horizontales entre les différentes catégories de personnel, sans jamais abriter une organisation syndicale). Cette réforme administrative a été imaginée et réalisée depuis une perspective et des critères économiques (et par un groupe d’économistes). On a voulu, d’un côté, mettre en ordre la comptabilité de l’entreprise sans cesser pour autant de préserver le rôle fiscal et social de Pemex. La réorganisation en un holding (doté d’un corporatif et de quatre filiales) cherchait à promouvoir la transparence des subsides: éviter de protéger des entités inefficaces et les obliger à se responsabiliser de leurs biens et actions. Dans le même sens, elle a été guidée par la notion de compétition: placer les différents acteurs en situation de concurrence (tant les filiales que leur personnel) où chaque ligne de négoce cherche à maximiser ses bénéfices. Par ailleurs, l’établissement d’un environnement de marché (coût d’opportunité, prix y tarifs en accord avec le marché international, etc.) a été un des grands défis relevés. Bien que ce fût une réforme administrative de grande envergure (la transformation la plus importante qui ait été réalisée), en réalité les piliers de la construction originelle n’ont pas été affectés : le monopole restera intact (même si on ouvre aux investissements étrangers (et, ce, très légèrement) certains segments de l’aval (downstream) et le syndicat pétrolier, quoiqu’il ait été affecté, ne sera pas brisé dans sa logique de fonctionnement. On ne touchera pas finalement à la culture bureaucratique et corporatiste en vigueur dans l’industrie pétrolière. Venezuela : La libéralisation de l’industrie des hydrocarbures ou l’Apertura Petrolera (1989- 1998) 27 Constituée comme société anonyme de capital variable où Pemex participe avec 85% du capital social, la Banque du Commerce Extérieur (BANCOMEXT) avec 7.5% et Nacional Financiera (NAFIN) avec 7.5%. 14 En réalité, plus que le désir d’émancipation manifesté par les dirigeants de la holding, ce sont les conditions déplorables de l’économie vénézuélienne qui vont être à l’origine de l’ouverture pétrolière.28 De facon à faire face aux dépenses courantes les plus pressantes pour éviter une crise sociale plus profonde, le gouvernement se tourne vers le Fonds monétaire international. Le FMI accepte de lui accorder des lignes de crédit si, en échange, le gouvernement s’engage à rembourser la dette externe qu’il détient auprès des différents créanciers mais aussi à entreprendre des réformes profondes de ses structures et de sa politique économique. Le plan d’ajustement structurel que met en place le gouvernement de Carlos Andrés Pérez s’inscrit dans la lignée des politiques préconisées par le « Consensus de Washington » ; cette période sera connue comme celle du « Gran Viraje » (Grand Virage). En ce qui concerne l’industrie pétrolière, la politique d’ouverture vise à inverser la tendance déclinante des indicateurs pétroliers nationaux en augmentant le volume de l’investissement pétrolier domestique et en n’excluant plus la participation du capital pétrolier privé, national ou étranger. Elle se fera de facon graduelle. On commencera par les activités du secteur aval, puis le secteur amont de l’industrie. Le Plan d’expansion de Petróleos de Venezuela, S.A., extrêmement ambitieux, incite les dirigeants pétroliers à vouloir s’associer avec des compagnies étrangères pour explorer certains gisements d’hydrocarbures. Pour résoudre le problème constitutionnel –la loi de nationalisation de 1975 (la loi organique sur les hydrocarbures) et notamment l’article 5- PDVSA utilise plusieurs tactiques : soit s’immiscer dans les failles de l’article 5, soit de passer outre le Congres et de soumettre les contrats d’association à l’avis consultatif de la Cour suprême de justice de la République en vue de démontrer que l’accord d’association ne viole pas la loi de nationalisation29 ou bien encore de faire appel à différents experts et juristes nationaux et internationaux pour qu’ils qualifient comme d’authentiques contrats de services des contrats qui ne le sont pas vraiment (pour réouvrir et exploiter certains puits marginaux (1991)). Les compagnies internationales exigent que soient modifiés les conditions fiscales et mais aussi le cadre légal en vigueur pour qu’elles acceptent d’investir massivement dans l’amont vénézuélien -en particulier, dans la ceinture de l’Orénoque (pétroles extra-lourds) et pour extraire le gaz. Sur le plan fiscal, elles font pression pour être exonérées de la royaltie et de l’impôt sur les exportations d’hydrocarbures et veulent être imposées selon le taux auquel sont soumises les entreprises non productrices d’hydrocarbures (30% et non pas 67.7%) en ce qui concerne l’exploitation de gisements peu rentables. Le nouveau cadre fiscal pour les associations est comparable à celui qui prévalait lors de la première loi sur les hydrocarbures de 1920. Sur le plan légal, elles exigent que le gouvernement vénézuélien accepte de conformer ses modes d’intervention aux normes internationales, c'est-à-dire au nouveau droit international des investissements. Les fondements de la loi organique des hydrocarbures de 1975 sont directement remis en cause en ce qui concerne l’extraction et le développement des pétroles non conventionnels au sein des associations stratégiques avec les compagnies étrangères. Bien entendu, la loi de 1975 régit encore l’ensemble des champs en exploration et à l’ensemble des gisements exploités sur le territoire national. Dans un deuxième temps, les dirigeants de PDVSA mettent en place un nouveau type de contrat –les contrats à risque- qui doivent permettre l’exploration et la 28 . En janvier 1989, au moment où Carlos Andrés Pérez est investi pour la seconde fois président de la République, les principaux indicateurs économiques et financiers du pays sont au plus bas. 29 . Ce fut le cas de Lagoven en 1990 pour le contrat d’association avec Exxon, Shell et Mitsubishi. 15 production de nouveaux gisements pétroliers pas encore développés par la holding mais qui possèdent potentiellement d’importantes réserves. Les aires de El Sombrero et de Catacumbo sont les deux aires les plus importantes qui ont été octroyées. Enfin, on ouvrira les zones anciennement productrices d’hydrocarbures dont l’activité a été interrompue du fait de leur faible rentabilité ou du manque de moyens financiers nécessaires à l’entretien des gisements. Dans la poursuite de cette logique d’ouverture, les dirigeants de PDVSA décident d’ouvrir le marché interne des hydrocarbures (rapprocher les prix intérieurs des prix d’exportation), puis privatiser partiellement Pequiven -la filiale pétrochimique- et l’industrie du gaz naturel, à l’aide d’un nouveau cadre de régulation. Avec la politique d’ouverture, le niveau des réserves va augmenter notablement, la production pétrolière domestique aussi (2Mbd à 3.5 entre 1989 et 1998). Les investisseurs privés en association avec PDVSA occupent une position importante dans la production (près de 25% de la production totale). Cependant les dépenses réelles ont doublé passant de 3 à 6 milliards de dollars alors que la production n’augmentait que de 50%. La mise en œuvre de la Política de Apertura Petrolera va renforcer le rôle et l’influence politique des dirigeants de PDVSA. Par ailleurs, le Venezuela tourne le dos manifestement aux politiques émises par l’OPEP (PDVSA cherche à maximiser les volumes de production en négligeant les quotas de l’OPEP et ses objectifs de prix). Bilan et conclusion L’impact des politiques néo-libérales sur l’organisation du secteur pétrolier n’a pas été le même, s’agissant du Mexique ou du Venezuela. Au Mexique, l’ouverture a été –tout compte fait- extrêmement « bénigne ». Le Core business a été totalement préservé ; seuls quelques segments de l’aval seront ouverts aux capitaux privés (et encore, seul l’aval de l’industrie gazière (et non pétrolière, sera touché) ainsi que l’industrie parapétrolière (contrats de service). Même si la réorganisation de la société nationale –Pemex- a été un phénomène important, les analyses qui seront faites ultérieurement sur ces transformations organisationnelles montreront que leur impact sur la productivité et l’efficacité de l’entreprise sera bien diminué vu que le monopole d’Etat n’a pas été affecté. En outre, comme le pouvoir du syndicat n’a pas été touché dans son essence, les changements que les dirigeants de l’entreprise pourraient formuler auront peu de chance d’être mis en œuvre. La mise en place d’institutions de régulation (lois et Commission de Régulation de l’Energie (CRE) ou les prix de transfert et les coûts d’opportunité montrent que l’on a cherché à instaurer un cadre de régulation qui permette ensuite - peut-être - d’ouvrir ce secteur. Au contraire, au Venezuela, l’ouverture a été plus radicale. Néanmoins, en ce qui concerne l’amont pétrolier, elle n’a concerné que quelques segments : la Ceinture de l’Orénoque et la production de bruts ultra lourds, les gisements de faible rentabilité ou les nouveau gisements. Ce qui montre, une fois de plus, le pragmatisme du Venezuela qui sait mettre à profit les compétences et ne pas s’embarrasser de diktats idéologiques. Quant à l’aval pétrolier, l’ouverture a été un peu plus poussée qu’au Mexique puisqu’on a privatisé partiellement l’industrie pétrochimique. 16 Les années 2000 : le nouveau nationalisme pétrolier Introduction A l’image du processus d’ouverture, ce que l’on a eu tendance à appeler le « nouveau nationalisme pétrolier » différera entre ces deux pays. Avant toute chose, il faut signaler que trop souvent, on confond “ nationalisme pétrolier” avec “expropriation de TOUS les actifs des compagnies existantes”. En fait, il s’agit bien plutôt du désir qu’éprouvent certains gouvernements de reprendre le contrôle de leurs ressources naturelles; ce qui les conduit à restreindre ou conditionner l’accès des compagnies étrangères aux ressources minières (l’amont pétrolier) et parallèlement à augmenter la participation de leur propre société publique nationale dans ce segment de l’industrie. En quels termes peut-on parler de « nouveau » nationalisme pétrolier au Mexique et au Venezuela ? Mexique Introduction Contrairement à une grande partie des pays latino-américains, les années 2000 au Mexique n’ont pas accueilli des gouvernements issus de la gauche. La transition démocratique au Mexique s’est traduite par l’arrivée au pouvoir de gouvernements issus du Parti d’Acción Nacional (PAN), un parti libéral sur le plan économique et s’identifiant à la Démocratie Chrétienne (donc plutôt favorable aux entrepreneurs, à l’église catholique et aux américains). Pour autant, les réformes que ces gouvernements ont entreprises dans le secteur pétrolier n’ont pas été influencées par la nouvelle vague de ce qu’on a appelé « le nouveau nationalisme pétrolier ». Par ailleurs, la transition démocratique s’est inscrite, à partir de 1997, sous l’égide d’un Congrès (Chambre des députés et Sénat) dominé par trois forces politiques d’importance égale. Ceci a eu une répercussion extrêmement importante sur le secteur pétrolier. En effet, toute restructuration profonde de cette industrie –qui implique du moins l’ouverture d’un de ses segments- oblige à modifier la Constitution (article 27) à un moment où le processus de démocratisation a amené “un gouvernement divisé », c'est-à-dire un système où aucune force politique ne domine suffisamment le Congrès pour imposer sa volonté. Ceci oblige à forger d’amples consensus parmi tous les partis politiques (toute modification de la Constitution requiert l’approbation des deux tiers du Congrès Fédéral outre la majorité simple des parlements locaux), situation particulièrement compliquée, ce qui aura pour effet de retarder toute réforme dans ce secteur. Nous allons analyser rapidement les tentatives de remodelage que les dirigeants actuels de PEMEX ont tenté de lui imprimer depuis la fin de l’année 2000. 17 La vision entrepreneuriale de la réorganisation de PEMEX : 2000-2006 A partir de décembre 2000, la nouvelle équipe sous les ordres de l’Ingénieur Raúl Muñoz Leos a cherché à développer une conception totalement « entrepreneuriale » opposée, à certains égards, à la conception (économique) qui avait présidé à la restructuration de Pemex en 1992 et après. Le nouveau président - Vicente Fox - a nommé un entrepreneur à la tête de Pemex et a cherché à intégrer, sans succès, au sein du conseil d’administration de la paraétatique, quatre entrepreneurs parmi les plus importants du secteur privé.30 De même, les hauts exécutifs du Corporatif et des filiales - hommes de confiance de Raúl Muñoz Leos ou bien du Président Vicente Fox proviennent du secteur privé où ils ont développé une brillante carrière. Il s’agissait d’appliquer l’orthodoxie « entrepreneuriale » à une entreprise d’Etat pour que Pemex soit à la hauteur des plus grandes compagnies internationales, sans cesser d’être une entreprise d’Etat. Bien que l’équipe qui dirige la paraétatique depuis le 1er décembre 2000 n’a cessé de reconnaître les mérites de bien des actions entreprises au début des années quatre-vingt dix (les institutions et règles simulant un environnement de marché (transparence dans les subsides, ordre dans les finances de l’entreprise, etc.)), par contre la division de Pemex en filiales a été l’objet de fortes critiques.31 Depuis le début de sa gestion, l’équipe de Raúl Muñoz Leos a cherché –sans succès- à réintégrer administrativement les quatre filiales sous le chapeautage d’une forte direction corporative qui définisse les objectif communs et favorise une meilleure coordination et coopération. En même temps, la nouvelle équipe a manifesté la volonté de favoriser le développement de l’industrie nationale à partir des ressources pétrolières. Parmi les différentes mesures envisagées pour ce faire, la plus visible fut le projet Fenix (construction de deux nouveaux complexes pétrochimiques de grande taille à Coatzacoalcos (Veracruz) et l’autre à Altamira (Tamaulipas), au moyen d’un coinvestissement entre le secteur privé et Pemex). Malheureusement, El Fénix est mort-né. Paral}element, elle a cherché à restaurer une meilleure interaction entre Pemex et les compagnies privées nationales dans le secteur de la construction et des biens de capitaux. Cet objectif n’a pas connu le succès espéré.32 Depuis le début, la nouvelle administration n’a eu de cesse d’impulser une profonde réforme fiscale de l’entreprise, pour contrecarrer les restrictions financières auxquelles la soumet le fisc, sans affecter substantiellement le fisc. Enfin, cette nouvelle équipe a voulu aussi promouvoir l’autonomie de gestion de l’entreprise, c’est à dire concéder une grande autonomie budgétaire à Pemex et formuler un cadre normatif propre en accord avec les caractéristiques de l’industrie. Ces idées ont intégré très tardivement l’agenda des commissions d’énergie du pouvoir législatif (en 2005), de sorte que le sexennat s’est déroulé sans aucun changement notable, sauf une réforme fiscale de dernière heure largement insuffisante. 30 . L’ingénieur Raúl Muñoz Leos est, de fait, l’ancien président de Dupont México. . Selon cette équipe, la division a conduit à sous-estimer l’importance de la chaîne de valeur de l’industrie (qui va depuis l’exploration jusqu’à la vente d’essence ou la fabrication de plastiques), à bénéficier le fournisseur -Pemex Exploration et Production (PEP)- créant des rivalités inutiles entre les différentes filiales tandis que le corporatif -trop restreint dans ses fonctionsn’a pas la capacité de coordonner et d’harmoniser les objectifs de l’ensemble. 32 . Les Contrats de Services Multiples (CSM’s) ont été pensés en fonction des majors et non pas des petites compagnies.et, selon les critiques émises }a leur encontre, ils ne favorisent pas la formation du personnel mexicain –à la différence des joint ventures. 31 18 En conclusion, les changements ont été minimes et n’ont pas été dans le sens d’un regain nationaliste. La réforme pétrolière : 2008 La situation difficile que vivent la société nationale et l’industrie pétrolière mexicaine ont conduit les différents acteurs (stakeholders) à émettre des diagnostiques et proposer différentes solutions pour remédier à ces difficultés. Le bilan de l’entreprise en termes de réserves, exploration et production de pétrole et de produits pétroliers est préoccupant. Les réserves ont diminué de facon accentuée (9.2 ans au rythme de production actuelle) et leur renouvellement reste très bas ; par ailleurs le déclin du méga gisement de Cantarell (qui les dernières années fournissait 60% de la production nationale) a affecté sérieusement la production de pétrole. Enfin le Mexique est un importateur net en termes de produits pétroliers (essences, fioul lourd,) et de gaz naturel (même si dans ce dernier cas, la production est en hausse). Par ailleurs, Pemex a été déclarée officiellement en faillite technique en 2006 : le montant de ses passifs était de 3% supérieure à la valeur de ses actifs. Enfin le régime fiscal confiscatoire de la société nationale ne lui permet pas de pouvoir réinvestir dans la modernisation de l’industrie à sa charge. Les diagnostiques des principales forces politiques (PRI, PAN et PRD) ont été souvent guidés par des considérations de type électoral. Les thèmes centraux de leurs divergences concernent le rôle de l’Etat et du gouvernement dans la gestion des ressources des hydrocarbures et l’importance des investissements privés pour redynamiser ce secteur. Selon le PRD et une fraction du PRI, le régime fiscal confiscatoire et le « plan silencieux de privatisation » dont a pâti Pemex depuis les vingt-cinq dernières années ont affaibli certains segments de l’industrie (la transformation industrielle, l’ingéniérie et les sous-contratants mexicains). Selon le PAN et l’autre fraction du PRI, il faut privilégier deux aspects : l’amélioration de la « corporate governance » de Pemex (transparence de l’information, système d’audits et une plus grande autonomie budgétaire et de gestion) et l’association avec des compagnies privées dans les domaines où la société ne dispose ni du savoir faire ni du capital pour mener à bien ces entreprises (exploration et production dans l’offshore profond du Golfe de Mexico, le raffinage et le transport, la distribution et le stockage des produits dérivés du pétrole). Le 8 avril 2008, le président Felipe Calderón (2006-2012) a présenté cinq projets de loi pour renforcer Pemex sans privatiser l’entreprise ni lui ôter le contrôle des hydrocarbures ou la propriété des actifs. D’un côté, le gouvernement a cherché à améliorer la gouvernance corporative de Pemex au moyen de différentes mesures : le renforcement du Conseil d’administration avec quatre nouveaux membres, experts reconnus de la question pétrolière, sept nouveaux comités chargés de conseiller les membres du Conseil d’administration sur des thèmes spécifiques et une plus grande autonomie budgétaire (et d’endettement) par rapport au ministère des finances. En outre, une réforme à la loi des travaux publics autorise la possibilité de contrats « incentivados » (des stimulants en espèce pour émuler les compagnies, notamment dans les segments jugés difficiles). Enfin, une très légère réforme du régime fiscal de Pemex complètera ce premier ensemble de propositions (un allègement des impôts pour les gisements peu productifs ou jugés difficiles). Par ailleurs un ensemble de mesures visent à renforcer le rôle du ministère de l’Energie. Notons en particulier la création d’un bras consultatif - la Commission Nationale des Hydrocarbures - qui devra aider le 19 ministère de l’énergie en lui fournissant les informations dont il a besoin pour prendre des décisions en ce qui concerne l’upstream. La CNH jouera le rôle de contrepoids à Pemex (qui jusque-là disposait d’informations privilégiées dont le ministère ne disposait pas). Ces projets de lois seront conservés –après corrections pour quelques-uns- dans la réforme finale qui sera votée le 23 octobre au Sénat et le 28 octobre à la Chambre des Députés. Par contre, deux des projets présentés le 8 avril seront rejetés par le PRI et le PRD: l’opération du raffinage par des compagnies privées et le transport, la distribution et le stockage du gaz, du fioul lourd et des dérivés de la pétrochimie. Du 8 mai au 22 juillet, les différents projets seront examinés et amplement critiqués au cours de 22 forums organisés par le Sénat et où participeront les principaux experts au niveau national (170 au total), suite de quoi les deux principaux partis d’opposition présenteront leurs propres projets. Outre les initiatives déjà mentionnées, la réforme finale ajoutera deux lois concernant, l’une, la transition énergétique et, l’autre, les énergies renouvelables.33 Cette réforme est le produit du consensus des différentes forces politiques du pays. En ce sens, c’est un véritable succès vu les difficultés rencontrées depuis les années 90 pour transformer les règles de fonctionnement de l’industrie des hydrocarbures. Indubitablement, cette réforme ouvre de nouvelles portes : le nouveau régime fiscal permettra d’intensifier les activités d’exploration dans certaines aires complexes (Chicontepec et l’offshore profond) et on a réussi à éliminer le schéma extrêmement onéreux des PIDIREGAS. Par ailleurs, l’adoption de nombreuses recommandations au sujet des pratiques internationales aidera à une meilleure gestion de Pemex. Finalement, on peut espérer aussi que les lois sur la transition énergétique, les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique auront un impact favorable sur le développement soutenable. Néanmoins, les grands obstacles au bon fonctionnement de Pemex n’ont pas été levés. En premier lieu, le monopole de Pemex reste intact et les problèmes qui émanent de là subsisteront. Deuxièmement, l’un des principaux acteurs qui a entravé la formation d’une culture entrepreuneuriale au sein de l’entreprise –le syndicat des travailleurs pétroliers (STPRM)- a été épargné, pour d’évidentes raisons politiques. On a également oublié de traiter un des thèmes majeurs quant à l’endettement pharamineux de Pemex : celui de la retraite et des « pasivos laborales ». Par ailleurs, le refus d’ouvrir le midstream (transport et distribution des produits dérivés du raffinage et de la pétrochimie) présente certaines incohérences : d’un côté ce segment est ouvert au secteur privé en ce qui concerne le gaz naturel et de l’autre c’est une décision antiéconomique vu que le transport routier est beaucoup plus onéreux que le transport par pipelines.34 Enfin on est en droit de se demander si certaines mesures telles que la multiplication des comités ne risquera pas de bureaucratiser encore d’avantage la gestion de la société nationale ou si les nouveaux contrats attireront les compagnies pétrolières vu leurs limitations (ils ne permettent pas aux compagnies d’inscrire sur leurs registres les réserves découvertes ni la production qui en émanera). Au total, les réformes sont surtout restées au niveau des bonnes intentions : elles n’ont pas été consolidées au niveau légal, en particulier, les lois secondaires, qui permettraient de concrétiser les décrets. Restent à voir quelles formes vont adopter les nouvelles institutions, comment on va gérer les opérations administratives, quelles 33 . Ces deux lois proviennent de la proposition de réforme du PRI. . Les raisons sont politiques: quelques familles –de véritables mafias- détiennent le monopole du transport routier du gaz LP, en particulier. 34 20 aspects privilégieront les nouveaux contrats qui vont émaner de cette réforme législative. Il est notoire que cette réforme n’ait pas touché –non plus- le cœur du nationalisme pétrolier mexicain : le monopole d’Etat. Venezuela : Le nouveau nationalisme bolivarien des hydrocarbures En 1998, face aux excès du libéralisme de la politique d’Apertura Petrolera, les nouveaux dirigeants politiques – sous l’égide d’Hugo Chávez – mettent en œuvre un processus de re-étatisation qui consiste à redonner à l’Etat l’initiative du développement de l’industrie des hydrocarbures. Dans un premier temps, le gouvernement Chávez décide de renouer avec la discipline de l’OPEP à un moment où la conjoncture des prix était particulièrement défavorable aux économies des pays producteurs. Parallèlement, le nouveau gouvernement va établir deux grandes lignes directrices en termes de politique pétrolière : d’un côté, il va à chercher à favoriser au niveau national les activités à forte valeur ajoutée (développement d’une industrie de transformation des hydrocarbures sur le territoire national) et promouvoir l’exploration, la production et la commercialisation du gaz naturel, peu développé malgré les très abondantes réserves que détient le Venezuela. En décembre 1999, l’Assemblée Constitutive (ex-Congrès vénézuélien) adopte une nouvelle Constitution qualifiée de bolivarienne, entérinant l’ensevelissement du pacte de Punto Fijo et annoncant l’avènement d’une Vème République. En matière d’hydrocarbures, elle réaffirme les fondements de la nationalisation –le contrôle sur les ressources pétrolières nationales et sur la direction des opérations de PDVSA- sans pour autant remettre en question la politique d’ouverture pétrolière. A travers toute une série d’articles, la nouvelle Constitution redonne les prérogatives à l’Etat qu’il avait dans la loi de 1975. Les mesures les plus significatives concernent le rétablissement de l’article 127 de la Constitution de 1936 qui stipule que les différents ne seront plus résolus qu’au sein des tribunaux vénézueliens et l’annulation de l’article 123 de la Constitution nationale de 1961 qui rétablit le droit aux investisseurs pétroliers nationaux d’investir dans le développement des hydrocarbures. Mais, parallèlement, elle n’exclut pas une participation accrue et active des compagnies pétrolières privées. En novembre 2001, le gouvernement Chávez promulgue un décret-loi qui instaure un nouveau cadre légal et réglementaire : la loi organique sur les hydrocarbures de 2001. Le gouvernement redéfinit le champ des activités proposées aux investisseurs privés et les conditions d’accès aux rentes pétrolières. Il détermine l’existence de deux catégories d’activités : celles qui sont réservées à l’Etat ou soumises à condition et celles qui sont totalement libres et ouvertes à la concurrence. Ces dernières concernent les segments de l’industrie où les marges bénéficiaires sont les plus basses et où le montant des investissements est trop élevé par rapport à la rentabilité escomptée. L’Etat consent même à réduire les impôts sur le revenu. Quant aux activités réservées à l’Etat, elles sont accessibles aux opérateurs pétroliers à condition qu’ils obtiennent au préalable l’accord du gouvernement et des membres de l’assemblée constitutive. Elles doivent obligatoirement être développées avec PDVSA dans le cadre d’une association appelée « entreprises mixtes » où la société nationale conservera au moins 51% du capital social. Ces entreprises seront soumises aussi au respect des traités internationaux 21 souscrits par l’Etat vénézuélien. On rétablit ainsi la clause d’exigence minimale de contrôle par l’Etat annulée en 1993 dans la loi sur les pétroles lourds et on annule la clause relative aux traités internationaux. Par ailleurs, la nouvelle loi impose aux compagnies publiques et privées de lui présenter annuellement l’ensemble de leurs comptes de facon séparée selon les différentes phases des processus d’extraction et de production. Parallèlement, la loi de 2001, concernant le gaz naturel, est très libérale sur le plan fiscal et légal, en ce qui concerne l’exploitation des gisements pour lesquels PDVSA ne dispose pas du savoir faire et des technologies nécessaires. Cette ouverture concerne aussi tous les niveaux de la chaîne gazière. Cependant, pour éviter la création de monopoles privés sur certains segments on crée une structure de régulation spécifique pour le gaz : ENAGAS. L’application de la loi de 2001 est immédiate pour PDVSA et ne sera effective pour les compagnies privées qu’avec leur reconversion en entreprises mixtes. La re-réglementation des hydrocarbures va provoquer l’accroissement des tensions entre les dirigeants et hauts cadres de PDVSA et le gouvernement. En 2001, le directeur général de PDVSA, Guaicaipuro Lamenda, critique ouvertement l’action du gouvernement Chávez : il devient le porte parole des revendications des cadres de la holding et acquiert un rôle politique dans la société vénézuélienne. En février 2002, le président Chávez nomme un nouveau directeur général de PDVSA ; il limogera ensuite les directeurs généraux de la holding pour les remplacer par des gens qui lui sont totalement dévoués. La situation s’envenime et prend rapidement une dimension politique nationale : de nombreuses manifestations de l’opposition contre le gouvernement et un putsch qui renverse le président en place (pour deux jours) sont les plus notables. Le 2 décembre 2002, une grève illimitée est déclarée par les travailleurs pétroliers qui suspendent toutes les activités de production. La production s’effondre et les activités économiques du pays en pâtissent. Le président envoie l’armée pour qu’elle reprenne le contrôle de tous les sites de production et de raffinage. Des changements majeurs sont apportés à l’organisation et au mode de fonctionnement de la holding qui devient la « nueva PDVSA » ; une grande partie des cadres et hauts cadres sont renvoyés et on cherche à diversifier les destinations pour l’exportation des ressources et des produits vers le reste de l’Amérique latine, la Russie, la Chine et l’Inde. Parallèlement à sa fonction pétrolière, la nouvelle PDVSA est en charge de missions externes qui n’ont pas de rapport direct avec sa fonction pétrolière. Vu que le financement des missions externes se fait sur la base de ses fonds propres, ceci a des conséquences préjudiciables sur sa capacité à entretenir ses infrastructures pétrolières et maintenir son volume de production. Une des questions d’envergure aujourd’hui consiste à se demander jusqu’à quel point la crise économique et financière mondiale –et son impact sur le prix du baril- va affecter ce regain nationaliste. Bilan et conclusions Il est difficile de parler d’un changement de gouvernance pétrolière à partir des années 2000, en ce qui concerne le Mexique. Le cœur du nationalisme pétrolier n’a été ni renforcé ni diminué, puisque les piliers institutionnels n’ont pas été modifiés en essence depuis 1938, ce qui fait du Mexique une véritable exception au niveau mondial. 22 Par ailleurs, le Venezuela qui est devenu pionnier au niveau mondial, en termes de nationalisme pétrolier, sous l’égide d’Hugo Chávez a une industrie qui reste beaucoup plus ouverte et libérale en matière pétrolière que le Mexique. La Loi de 2001 est extrêmement libérale s’agissant du gaz naturel et le Venezuela continue à accepter les associations avec des compagnies étrangères pour développer l’upstream (même si la formulation qui préside aux nouvelles compagnies mixtes redonne à l’Etat vénézuélien le contrôle des joint ventures). En d’autres termes, l’histoire de la naissance et de la formation de l’industrie pétrolière (hydrocarbures) dans les deux cas montre combien elle reste prégnante sur le développement de ce secteur et sur la conception de la place de la nation dans l’industrie. 23