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A LA GLOIRE DU GRAND ARCHITECTE DE L’UNIVERS
Vénérable Maître et vous tous mes frères en vos degrés et qualité.
Dans les épreuves de réception au grade de compagnon nous sommes mis en
possession de moyens et d’objets de la Connaissance destinés à nous
« réaliser » » et à nous « exprimer » en employant des outils symboliques et les
arts libéraux.
Ainsi le compagnon reçoit pour les quatre premiers des cinq voyages, le maillet
et le ciseau, puis la règle et le levier, viennent ensuite le fil à plomb et le niveau
et enfin l’équerre. Chaque outil à sa signification.
Je me propose d’étudier tout particulièrement la signification du LEVIER sous son
aspect physique et opératif puis sous l’angle symbolique et spéculatif.
Qu’est ce qu’un levier ?
Un levier est une pièce rigide, allongée, généralement en liaison pivot ou en
simple appui par rapport à une partie fixe, qui permet de transformer un
mouvement, il sert à varier la force de gravitation. Ce mécanisme permet
d’utiliser l’effet de levier, qui réduit la force à appliquer mais exige de prolonger
la durée de l’effort. Séparé en deux parties par un point
d’appui, le levier
augmente la force de l’homme proportionnellement à l’allongement de la partie
sur laquelle il appuie.
Le levier est un des outils les plus anciens. Il est sans doute né du bâton
prolongement de la main de l’homme. L’homme a commencé à utiliser ce
modeste instrument pour déplacer des pierres, pour déraciner des arbres.
L’homme se rendant compte des limites de sa force physique, utilise ce bâton
avec de plus en plus d’adresse en jouant sur le point d’appui et décuple ainsi sa
force.
Néanmoins, Il ne lui suffit pas d’être puissant et courageux : son outil mis au
service de son intelligence et son intelligence mise au service de l’outil lui
donnent une qualité supplémentaire : le pouvoir sur la nature.
C’est très certainement de cette façon que l’homme crée le levier qu’il doit
apprendre à manier en fonction de ses propres possibilités. Maîtriser, le levier
obéira à sa volonté et à son imagination.
Mais revenons à l’usage du bâton, instrument passif, qui avec le double apport
du point d’appui (qui demande un choix sérieux et bien calculé) et de sa volonté
(qui implique un raisonnement, une détermination) ce bâton devient un
instrument actif avec toutes les conséquences positives et négatives qui peuvent
en découler.
Arrivé à ce stade, l’homme, grâce au levier est résolu à agir, il se doit d’étudier
toutes les possibilités dans les diverses positions de la barre posée sur le point
d’appui, afin d’atteindre précisément le but recherché. Parallèlement, il devra
adapter sa propre force à son outil pour savoir jusqu’où il peut aller.
Sur le plan pratique, nous pouvons schématiser la notion du levier lié à la
connaissance par :
La barre : en contact avec la main lui donne la puissance par la volonté ;
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Le point d’appui : choisi, donc lié à la réflexion et à l’intelligence ;
La résistance : déplacée devient le résultat recherché.
Le choix conjugué de ces trois éléments est déterminant sur le résultat attendu.
Parce qu’il met en œuvre ces trois points, le levier évoque, l’action, le
dynamisme, la relativité, la variabilité, la nuance, mais c’est aussi l’outil de
l’action résolue, raisonnée et calculée.
Il existe une relation entre la pensée projective et l’action – l’intermédiaire, la
voie choisie, la méthode recherchée étant : le levier.
En effet, cet outil permet avant tout d’obtenir des résultats positifs mais le
contraire est possible. Par un mauvais équilibre des trois points évoqués dû à un
manque de connaissances ou de maîtrise de l’énergie employée.
On peut donc constater que sur le plan physique et opératif le levier présente
une dualité évidente.
Ce constat pour l’utilisation du levier peut être mis en parallèle avec le levier
outil spéculatif.
Outil spéculatif car nous le rencontrons dans notre vie quotidienne, dans les
rapports humains, aussi bien individuels que ceux des groupes en société. Nous
le retrouvons chaque fois que nous cherchons le processus qui a amené une
personne ou un groupe à agir dans un certain sens. C’est là aussi qu’il rejoint sa
signification maçonnique.
En reprenant le schéma précédent, nous retrouvons alors :
1 – la force et la volonté, qui pour être efficaces et positives demandent une
profonde connaissance de soi et de ses responsabilités ;
2 – Le point d’appui, la méthode, le moyen, ce qui nécessite l’étude approfondie
des possibilités existantes dans la société, c'est-à-dire la culture. C’est aussi la
connaissance de l’impact que l’on peut avoir sur la résistance ;
3 – la résistance, c'est-à-dire l’autre et les autres, à travers le résultat recherché.
Là encore, comme ailleurs, l’observation et l’étude sont nécessaires.
La connaissance, sous toutes ces formes, sur ces trois points est indispensable,
on peut dire que la puissance, résultant de l’utilisation du levier, donne à
l’homme un pouvoir à la fois fascinant et dangereux.
Le levier présente donc une dualité sur le plan spéculatif. Parfois positif, parfois
négatif.
Archimède nous a dit « donnez moi un point d’appui et je soulèverais la terre »
pouvoir fascinant et positif lorsque :
Dans le couple :
1 - la force et la volonté – nous avons l’amour
2 - le point d’appui – la confiance
3 - le résultat recherché – l’harmonie
Dans la famille :
1 - la force et la volonté : l’amour des parents pour les enfants
2 - le point d’appui : la connaissance objective des réalités et de la psychologie
enfantine
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3 - le résultat recherché : la croissance harmonieuse des enfants et leur
évolution
Dans les rapports humains :
1 – la force et la volonté : le dialogue
2 – le point d’appui : l’honnêteté liée à la recherche de la vérité
3 – le résultat recherché : la communication, l’échange, l’évolution des hommes
Dans un pays :
1 – la force et la volonté : une société bien administrée
2 – le point d’appui : le progrès scientifique utilisé à des fins pacifiques
3 – le résultat recherché : l’harmonie le bien être de cette société
Nous pouvons aussi rencontrer pour un pays :
1 – la force et la volonté : une société misérable et opprimée
2 – le point d’appui : l’adéquation entre les théoriciens et la prise de conscience
des masses
3 – le résultat recherché : la révolution qui aboutira pour le bien des hommes.
Le point d’appui du levier joue un rôle majeur car c’est lui qui détermine par sa
position avec les deux autres points, l’action positive ou négative. Avant
d’aborder les effets négatifs du levier j’aimerais revenir sur la notion de volonté
symbolisée par le levier. L’application la plus immédiate de la volonté porte à
mon avis sur les 5 moyens qui nous sont donnés par la nature c'est-à-dire la
vue, l’ouïe, le toucher, le goût et l’odorat. Ces 5 sens physiques cités dans le
premier voyage de la cérémonie d’installation du compagnon soulignent
l’importance de bien connaître sa nature profonde et de prendre en considération
ses forces et faiblesses.
Connais toi toi-même précepte gravée en lettres d’or sur le fronton du temple de
Delphes nous invite à nous projeté au-delà des 5 sens physiques vers les 5 sens
spirituels que sont l’émotion, l’émotivité, l’intuition, la conscience et l’inspiration.
Comment positionner notre levier, pour mieux canalisées nos émotions en
recalant, par exemple, notre besoin de séduction, en relativisant l’impact de
notre ego, en agissant par exemple sur notre humeur, j’entends : mauvaise
humeur. Une petite citation d’ALAIN à ce sujet : « Le pessimiste est humeur ;
l’optimiste est de volonté ».
Comment développer notre imagination en abandonnant nos préjugés qui
réduisent notre angle de vision.
Comment mieux écouter notre intuition avant d’entreprendre quoi que ce soit.
Comment percevoir cette conscience d’être.
Comment s’appuyer sur notre inspiration et capter les idées qui s’agglomèrent,
tel un grand nuage au-dessus de la planète. A l’intérieur de ce grand nuage les
idées s’entrecroisent s’hybrident, fusionnent. Les idées sont comme des êtres
indépendants, elles ont leur propre évolution, leur propre sélection, leur propre
mutation.
Comme on peut le noter le nombre cinq apparaît régulièrement. Le cinq est le
nombre du compagnon. Celui-ci doit pérégriner, voyager, pour trouver son
centre et tenter de se rapprocher du qui suis-je ? Et cela est symbolisé par le
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tracé initiatique de l’étoile à cinq pointes qui contient dans sa graphie même la
descente et le « trajet que doit parcourir l’homme qui aspire au divin, par le
retour au pôle ». En effet le cheminement commence au sommet de l’étoile et
passe successivement par ses « quatre » autres pointes pour revenir en fin de
parcours au pôle de la verticalité.
Comme je le dis précédemment, le levier est un outil à la fois fascinant et
dangereux. C’est pourquoi il ne m’apparaît pas possible d’en parler comme
symbole maçonnique sans qu’il soit associé avec les autres outils et symboles du
2ème degré car il en a besoin pour sa juste utilisation.
Il faut lui adjoindre la Règle, cette ligne droite qui symbolise l’esprit alors que le
levier, lui, est matière. La Règle lui apporte la précision dans l’exécution et la
juste mesure du temps par ses 24 divisions.
Le Niveau qui amène la mise en œuvre correcte des connaissances elles mêmes
évoquées parles les 7 sciences libérales citées dans la 3ème cartouche :
grammaire, rhétorique, logique, arithmétique, géométrie, astronomie et
musique.
La Perpendiculaire, symbole de la profondeur dans l’observation et la parfaite
connaissance de soi.
Avec l’apport de ces autres outils, l’utilisation du levier gagne en cohérence et
en puissance par un plus grand discernement et une plus grande clairvoyance.
Car le levier possède une double caractéristique : il déplace, mais en élevant, et
il est actionnel en abaissant, le mécanisme l’apparente au symbolisme de la
verticale : abaisser pour élever, diminuer pour grandir. Mais ses dangers sont à
la mesure de ses avantages : instrument déséquilibré, le levier doit être manié
avec une grande dextérité et beaucoup de prudence, car les forces qu’il actionne,
sur le plan terrestre comme dans l’ordre spirituel nous dépassent infiniment et
peuvent nous écraser.
Donc, tout en remplissant un rôle actif, le levier peut devenir tout à fait négatif
et destructeur, reprenons le cas des parents que nous avons évoqué
précédemment :
1 – la force et la volonté : un amour possessif
2 – le point d’appui : des idées arrêtées sur les enfants
3 – le résultat : des enfants soumis et intérieurement perturbés
Parmi les leviers actifs à conséquences destructrices, on pourrait citer des cas ou
l’instinct dominateur de l’homme s’est appuyé sur les faiblesses des autres
hommes à travers leur ignorance parfois entretenue par la voie des religions au
service des pouvoirs en place.
1 – la force et la volonté : l’orgueil, les idées reçues, préconçues
2 – le point d’appui : l’ignorance entretenue et la création de bouc émissaire
3 – le résultat : le racisme, l’antisémitisme
Mais aussi :
1 – la force et la volonté : Hitler, animé d’un désir démentiel de puissance
2 – le point d’appui : adéquation entre un peuple fanatisé et une situation sociale
favorable
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3 – le résultat recherché : le nazisme avec toutes les conséquences que nous
avons connues
C’est pour éviter que la force ainsi manipulée dégénère en violence que le levier
se combine utilement et principalement avec la règle.
Maîtriser sa force, l’utiliser scrupuleusement et avec habileté ne peut appartenir
qu’à ceux qui savent se servir de la règle. Ceux qui manipulent des forces plus
grandes qu’eux- mêmes sont condamnés à être dominés s’ils ne se disciplinent
pas.
Citation : « Lorsque la volonté se tait l’instinct parle ; en l’absence de l’âme, le
corps va son chemin ».
Remontant à l’aube de la technologie, le levier est pourtant toujours en usage ;
de la pince- monseigneur du malfrat aux ciseaux de la couturière, en passant par
les leviers d’une espèce plus subtile, agissant sur les ressorts de l’âme humaine
et servant de buts aussi divers que la psychanalyse, la confession ou la
déclaration de politique générale, la liste est infinie.
Dans l’absolu, le levier idéal serait : « la foi qui soulève des montagnes ».
L’étude et la méditation de tous ces symboles et leurs applications dans notre vie
profane c’est la méthode maçonnique. Aussi, en reprenant le schéma du levier :
1 – la force et la volonté : être un franc maçon
2 – le point d’appui : la méthode maçonnique
3 - le résultat recherché : le perfectionnement individuel et la réalisation de soi,
c’et à dire de l’homme
En fait les outils comme les arts libéraux, nous conduisent non pas à acquérir
mais à devenir, à être plus qu’à posséder. Le compagnon est à la fois l’ouvrier et
l’œuvre : son levier et sa règle en action sont la manifestation tangible de son
esprit et de sa main qui s’unissent pour l’aider à se transformer, c'est-à-dire à
épanouir ses talents ses virtualités. La discipline donnée par la règle nous aide à
compenser la dévastation et la violence du levier qui deviennent énergie et
rayonnement. On comprend mieux le message de sagesse du 4ème voyage mais
plus encore la leçon du dernier : glorifier le travail, c’est le véritable sens de
notre augmentation de salaire. Et la juste rémunération de notre effort, c’est
comprendre qu’il nous reste encore à travailler.
Enfin, le cheminement initiatique doit nous inculquer une grande règle : la
recherche passionnée de la vérité qui nous fait aimer la rigueur parce qu’elle
nous affine, qui nous fait désirer la contrainte parce qu’elle nous élève, qui nous
fait rechercher la justesse, la mesure et la simplicité parce que loin de nous
réduire, elle peut nous mener à grandir.
J’ai dit Vénérable Maître.
Sylvain L :.
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