Un proche de Dieudonné gagne un concours iranien de

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Un proche de Dieudonné gagne un concours iranien de
Un proche de Dieudonné gagne un
concours iranien de caricature sur
l’Holocauste
Le caricaturiste Zéon fait l’objet de poursuites en France pour d’autres
Le tiroir-caisse est coiffé de la porte d’entrée du camp d’Auschwitz, son
compteur est arrêté sur 6 millions – l’estimation du nombre de juifs tués lors
de l’Holocauste –, et son tiroir plein de billets porte la mention « Shoah
Business ». Le clavier, lui, évoque la loi Gayssot de 1990 sur la répression
des actes racistes, antisémites ou xénophobes. C’est avec cette production que
le dessinateur Zéon a remporté la deuxième édition du Concours international de
caricature et de dessin de l’Holocauste, dont la cérémonie de clôture s’est
tenue à Téhéran le 31 mai. Il a obtenu le premier prix assorti de 12 000
dollars (10 700 euros). Le site ActuaBD s’en est fait l’écho dès le lendemain.
Le dessinateur de 31 ans, Pascal Fernandez de son vrai nom, est très proche
de l’essayiste Alain Soral et de l’humoriste controversé Dieudonné M’Bala
M’Bala, avec qui il a signé une bande dessinée, Yacht Club. Il partage avec
eux le mépris pour l’instrumentalisation supposée de la Shoah, expliquant sur
son blog que « c’est rendre hommage à toutes les victimes (…) de la seconde
guerre mondiale que de dénoncer ceux qui utilisent leur martyre à des fins de
basse politique et de justification de massacres comme en Palestine », tout
en reconnaissant avoir été « peut-être parfois un peu maladroit dans [s]a
manière d’aborder [s]es sujets ».
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Alain Soral condamné à 10 000 euros d’amende pour des propos
Comme à ses mentors, ses prises de position lui ont valu des démêlés
judiciaires en France. Après une première procédure soldée par un non-lieu,
il devrait comparaître en appel à la fin de l’année pour d’autres dessins à
la suite d’une plainte du Bureau national de vigilance contre
l’antisémitisme. Son président, Sammy Ghozlan, compte déposer une nouvelle
plainte pour le dessin primé en Iran, qu’il juge « odieux et obscène ».
Critique des lois mémorielles
M. Ghozlan se dit également « absolument horrifié » par le concours iranien.
Parmi les dessins récompensés, l’un représente le gardien d’un musée de
l’Holocauste vérifiant que les visiteurs se sont bien coupé la langue avant
d’être autorisés à entrer, évoquant l’interdiction des critiques contre les
lois mémorielles ; un autre, « prix spécial », montre quatre religieux juifs
dînant grassement des lettres « Holocaust » semblables à des bagels.
D’après le site du quotidien iranien Tehran Times, le secrétaire général de
la compétition, Massoud Shojai-Tabatabai, a déclaré lors de la remise des
prix que « l’un des sujets sur lesquels nous avons demandé aux dessinateurs
de se concentrer est la raison pour laquelle les pays occidentaux arrêtent
tout penseur qui met en doute l’Holocauste, alors qu’ils ne mettent aucune
limite à la liberté d’expression dans les autres catégories ».
Soucieux d’éviter que les autorités pâtissent de la réputation sulfureuse de
l’événement, le ministre des affaires étrangères iranien, Javad Zarif, avait
indiqué au New Yorker, le 25 avril, qu’il était l’initiative d’une
« organisation non gouvernementale qui n’est pas contrôlée par le
gouvernement iranien, pas plus qu’elle n’est approuvée » par lui.
« Consternation » du Quai d’Orsay
Pourtant, d’après les agences de presse iraniennes, M. Shojai-Tabatabai a
expliqué qu’il a été nommé par le ministère de la culture et de l’orientation
islamique, rapporte la Deutsche Welle. Le caricaturiste iranien en exil
Kianoush Ramezani a aussi confié au site spécialisé Caricature & caricatures
que M. Tabatabai « est l’un des islamistes extrémistes qui sont nommés
directement par le guide suprême de l’Iran pour contrôler les journalistes,
les artistes et les intellectuels ».
Le petit monde français du dessin et de la caricature avait été ébranlé par
la précédente édition du concours, en 2015. La participation de Bernard
Bouton, alors président général de la Fédération des organisations de
dessinateurs (FECO), avait suscité un tollé dans la branche française de
l’organisme. M. Bouton avait d’abord défendu sa participation avant d’être
contraint à la démission. Il confie aujourd’hui avoir « longtemps hésité à
envoyer un dessin », s’être senti « en très mauvaise compagnie » auprès des
autres dessinateurs participants, et finalement « partager l’indignation
suscitée par certains dessins lamentables ».
Le vice-président de la FECO-France, Pierre Ballouhey, estime de son côté que
le concours était « directement orienté politiquement contre les
rassemblements qui ont suivi les attaques terroristes de janvier à Paris, et
ce en ciblant l’Holocauste ».
A Paris, le ministère des affaires étrangères s’est indigné mercredi de
l’événement de Téhéran, évoquant la « consternation » de la France quant à
des caricatures « antisémites et négationnistes ». D’après le ministère des
affaires étrangères, la publication en France de ces dessins est « passible
de sanctions pénales ». Après avoir d’abord accepté de s’exprimer par
courriel, M. Fernandez n’a pas renvoyé le questionnaire du Monde.
Source :© Le Monde Un proche de Dieudonné gagne un concours iranien de
caricature sur l’Holocauste