Titien, Tintoret, Véronèse… Rivalités à Venise par Marianna LORA

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Titien, Tintoret, Véronèse… Rivalités à Venise par Marianna LORA
Titien, Tintoret, Véronèse… Rivalités à Venise par Marianna LORA - Exposition du Musée du Louvre (18 septembre 2009 - 4 janvier 2010)
Titien (Tiziano Vecellio) né à Pieve di Cadore, dans les Dolomites, s’est formé Venise auprès des Bellini et de Giorgione. Il acquiert rapidement une
grande renommée dès 1520 à Venise et rapidement dans toute l’Italie et en Europe. Tintoret (Jacopo Robusti) est né à Venise vers 1518. Trente années
le séparent de Titien qui aurait été quelques temps son maître. Une forte antipathie semble s’être installée entre eux et de nombreuses commandes ou
promesses de commandes apparaissent comme des tentatives pour surpasser ou bloquer l’autre. Véronèse (Paolo Caliari) naît en 1528 à Vérone. Il
s’installe à Venise dans les années 1550 et reçoit très vite de très nombreuses commandes émanant d’églises ou du Palais Ducal, faisant ainsi de l’ombre
à Tintoret. Il semble qu’il soit devenu le protégé de Titien voire son pion dans sa rivalité avec Tintoret. Ces trois peintres vont se côtoyer pendant plus de
trente ans, et après la mort de Titien en 1576, les deux autres se confronteront encore pendant une douzaine d’années. Mais s’ils sont rivaux, ils
s’influencent, s’inspirent. Pour chacun de ces artistes, le travail des autres est un aiguillon qui exige une réaction. Ils ont énormément contribué au
renouvellement de la peinture : l’utilisation de l’huile sur toile, accent mis sur la couleur de préférence au dessin, l’émergence du tableau de chevalet qui
transforme non seulement la peinture vénitienne mais la peinture européenne toute entière. La compétition entre artistes n’est pas seulement un
phénomène vénitien puisqu’elle existait déjà quelques décennies auparavant à Rome, Florence et d’autres grandes villes ; cependant, dans le contexte
vénitien, elle ne conduit pas à une dégradation esthétique mais plutôt à une émulation, un foisonnement d’idées. Les commandes émanant de
nombreuses sources privées, ecclésiastiques et institutionnelles mais aussi de clients étrangers pleuvent. La société vénitienne n’octroie pas ses faveurs
à un seul artiste mais préserve l’harmonie en répartissant les commandes officielles sur une concentration inégalée de peintres. Le format des tableaux et
le fait qu’ils soient peints sur toile facilitent leur diffusion et de nombreux amateurs collectionnent leurs œuvres. Nombreux sont les critiques qui discourent
sur les dernières productions de chacun. Le public peut comparer leurs travaux, talents et progrès. Les Concours permettent de mieux cerner combien la
rivalité entre les artistes fut une source essentielle de création et de renouvellement artistique. Que ce soit pour la Sala Grande de la Libreria Marciana,
pour la Sala dell’Albergo de la Scuola Grande di San Rocco, pour l’autel des Marzeri de l’église San Giuliano, pour la salle du Grand Conseil au Palais
des Doges, les commanditaires invitent les artistes à concevoir un dessin de présentation très achevé (un modello) sur un sujet prédéfini ; il semble que le
modello peint n’ait été demandé que pour le concours du Paradis pour la Salle du Grand Conseil du Palais des Doges.
Titien, Danaé Naples, museo di Capodimonte
Tintoret, Esther et Assuérus Londres, The Royal Collection
Véronèse, Tentation de Saint Antoine Caen, mba
Titien, Paul III Naples, museo du Capodimonte
Véronèse, Christ guérissant une femme souffrant d'épanchements de sang Londres, National Gal
Portraits de représentation : Patriciens et patriciennes Même si le portrait est généralement considéré comme un genre mineur par rapport à la
peinture religieuse et mythologique, il a un statut particulier à Venise. Apanage de la classe dominante (patriciens, riches, marchands, lettrés), il est une
façon de mettre en avant l’ancienneté de sa lignée, l’importance d’une fonction (doge, procurateur, amiral) et de servir à l’édification morale des hommes.
Des peintres vénitiens, Titien est sans doute le plus recherché. Se faire peindre par lui, c’est une marque de distinction qui vous place au même rang que
le pape Paul III, l’empereur Charles Quint, le roi François Ier, le cardinal Hippolyte de Médicis, les ducs d’Urbino et de Mantoue, les doges, …A Venise,
l’ancienneté de la famille est la condition de la noblesse patricienne et de l’exercice du pouvoir. Le portrait permet de représenter la lignée des ancêtres et
de réaffirmer le droit de siéger au Grand Conseil. Dans la société vénitienne, la vie active a une importance toute particulière. On se fait représenter dans
l’exercice de sa fonction. De plus, il est important de montrer que les actions d’éclat, les prouesses militaires, diplomatiques ou intellectuelles, ne sont pas
seulement le fruit d’un génie particulier mais plutôt d’une appartenance à l’excellence de la république de Venise. Les nombreux portraits placés dans les
établissements publics renforcent aussi l’idée de l’alternance politique : le pouvoir n’est pas accaparé par une famille mais par l’ensemble des patriciens.
Ce qui compte le plus n’est pas l’illusionnisme mais la vraisemblance du portrait. Il n’est pas l’image de la réalité mais une image construite de ce que
veut paraître le personnage (grandeur morale, prudence, capacité à maitriser ses passions, …) l’idée qu’il souhaite que l’on ait de lui. Le costume et les
attributs révèlent le rang et la fonction de l’homme. Plus encore que pour les hommes, les atours apparaissent déterminants pour les femmes qui n’ont
pas d’activités publiques. Les autorités vénitiennes ont même dû promulguer des lois pour réguler les dépenses somptuaires ; costumes et parures ne
devaient pas excéder un certain prix fixé par la République et le luxe devait être tempéré par une maîtrise dans l’apparence (corset lacé, cheveux tressés)
et par un contrôle des gestes et de l’expression ce qui différencie les patriciennes des courtisanes qui elles ne sont pas tenues à cette retenue. Les
personnages ne sont pas toujours intégrés dans un cadre déterminé. Chez Titien notamment, les individus se détachent sur un fond sombre. Mais parfois,
le cadre - une fenêtre ouverte sur un paysage ou un intérieur meublé de colonnes, de sièges - renseigne sur la vie publique du personnage. Le motif de la
fenêtre est généralement absent des portraits féminins dont le modèle se détache sur un fond indéfini ou un intérieur renforçant l’idée que la position
sociale de la femme se situe à l’intérieur de la famille dans sa maison.
Titien, Le Doge Francesco Venier Madrid, Museo Thyssen-Bornemisza - Tintoret, Sebastiano Venier Vienne, Kunsthistorisches Museum - Véronèse, Agostino Barbarigo Cleveland, Museum of Art
Le reflet et l’éclat : Jeu de l’envers dans la peinture Venise est la ville des reflets jusque dans sa peinture. L’un de ses peintres fameux – Giorgione aurait conçu un tableau qui par ses jeux de reflets affirmait la prééminence de la peinture sur la sculpture. En effet, pour contempler une sculpture, le
spectateur doit se déplacer autour de l’œuvre. Or, ce tableau de Giorgione, qui n’est connu que par la description qu’en firent certains auteurs, offrait en
même temps au regard tous les angles de vue de la figure humaine : il s’agissait d’un homme nu vu de dos dont la vue de face se reflétait dans l’eau
d’une source et les deux vues latérales étaient révélées dans un miroir et une armure, placés de part et d’autre de la composition. Le reflet, révélateur de
l’envers du tableau, dévoile ce qui est soustrait à l’œil du spectateur ; ceci est notamment vrai dans la peinture flamande comme chez Van Eyck. S’ils ont
été fascinés par les œuvres flamandes, les peintres italiens ont utilisé les miroirs et les reflets pour focaliser le regard du spectateur sur le sujet. Ils ont
donc particulièrement joué avec l’aspect technique du reflet : autoréflexivité de la composition, vue en raccourci dans un miroir, réverbération de la
lumière sur les objets métalliques … Bien que Titien dans son premier tableau de femme à sa toilette ait repris le miroir convexe à la flamande, le miroir
plat prédomine chez les peintres italiens. Il est notamment présent dans les portraits de Suzanne ou de Vénus où la femme, absorbée par la
contemplation de son image, en oublie qu’elle livre sa nudité au regard du spectateur et de ceux qui l’entourent. L’acier poli des armures, par sa surface
bombée, pourrait se rapprocher du miroir convexe flamand et si quelques peintres ont voulu jouer avec ce type de reflet et les procédés de rétrécissement
et distorsion qu’il occasionne, les théoriciens de la peinture ont très tôt dénoncé le procédé comme étant un expédient facile. Seul Tintoret s’adonna
parfois au jeu des reflets sur les cuirasses, notamment en transformant l’armure martiale en un miroir vénusien, les chairs féminines dénudées se fondant
dans le métal poli. La force évocatrice de la peinture vénitienne, rendue par ses coloris atmosphériques, se marie mal avec l’image détaillée et minutieuse
d’un reflet à la flamande. Le métal reflète donc une illumination diffuse de la lumière et des couleurs mais aussi révèle, notamment chez Titien, l’ardeur et
la force militaire de celui qui le porte. Les pièces d’orfèvrerie et de verrerie témoignent de l’importance du thème de l’éclat, de la réverbération de la
couleur et de la lumière.
G Bellini Femme nue devant un miroir KHV
Titien, Vénus au miroir Washington, National Gallery of Art & Titien, femme au miroir Louvre
Tintoret, Suzanne et les vieillards Vienne, Kunsthistorisches Museum
Véronèse, Vénus au miroir Omaha, Joslyn Art Museum
Entre sacré et profane La fête biblique est l’un des grands thèmes de la seconde moitié du XVIe siècle. Titien, Tintoret, Véronèse mais aussi Bassano
en ont tous peint de monumentaux exemples. La célébration du repas à Emmaüs fait écho à la Cène. C’est le moment, relaté par saint Luc, où le Christ
voyageant avec deux pèlerins se fait reconnaitre en consacrant le pain et le vin. « Et leurs yeux s’ouvrirent et ils le reconnurent ». Titien a réalisé de
nombreuses versions de ce thème pour des commanditaires de sa génération. Celle conservée au musée du Louvre, reflète une attention portée à La
Cène de Léonard de Vinci : une longue table horizontale, le Christ de face se détachant sur un fond de paysage scandé verticalement par une
architecture, la pose d’un des pèlerins évoquant celle du Judas de Léonard. Titien choisit de représenter le moment où les deux pèlerins comprennent qui
est le personnage qu’ils ont rencontré. C’est aussi pour lui l’occasion de restituer avec soin la nappe blanche aux nombreux plis, le tapis d’Orient et les
objets sur la table (salière, carafe, verres, pain). Le thème des Pèlerins d’Emmaüs a été très tôt traité par Tintoret. Dans une première version, il semble
qu’il ait eu la volonté de défier son aîné sans avoir encore la capacité de ses ambitions ; mais, quelques années plus tard, dans la Dernière Cène, il
reprend avec maestria ce qu’il avait tenté précédemment avec des poses pleines d’éloquences, un accent mis sur la simplicité et le quotidien, un clair
obscur prononcé, une énergie vibrante. Les Pèlerins d’Emmaüs de Véronèse conservé au musée du Louvre offre un registre très différent. Il semble que
ce soit le premier d’une grande série de fêtes bibliques où se mêlent narration sacrée et portraits aristocratiques vénitiens même si le résultat n’est pas
encore ici complètement abouti. A la différence de Titien et Tintoret, Véronèse choisit de représenter le moment où le Christ bénit le pain ; la composition
évoque la Transfiguration de Raphaël avec un sentiment d’équilibre et d’harmonie.
Titien, Pèlerins d'Emmaüs Paris, musée du Louvre & Leonard la Cène de Milan
Tintoret Pèlerins d'Emmaüs Budapest
Jacopo Bassano, Les Pèlerins d’Emmaüs, collection particulière, Grande-Bretagne
Véronèse, Pèlerins d'Emmaüs Paris, musée du Louvre & Véronèse les Noces de Cana Louvre
Nocturnes sacrés : Dramatisation et effets de nuit Dans la seconde moitié du XVIe siècle, avec la nouvelle sensibilité religieuse née de la Contreréforme, les scènes nocturnes liées à la vie et à la Passion du Christ deviennent fréquentes. Dans la suite de Titien, les artistes des nouvelles générations
comme Tintoret ou Bassano vont faire de la peinture de nocturnes une sorte de marque de fabrique de la peinture vénitienne. Le premier vrai nocturne de
Titien est le Saint Jérôme conservé au musée du Louvre. Si lui-même semble regretter l’inachèvement de son œuvre, il s’engage dans une nouvelle
technique de la dissolution de la matière par la lumière avec de larges coups de pinceaux dans un souci toujours plus naturaliste. Jusqu’à ses derniers
jours, il continuera d’explorer l’effritement de la matière dans la lumière notamment dans les décors nocturnes. Les meilleurs artistes de la génération
suivante s’approprieront en le réinterprétant cet effet tragique de la lumière et de la couleur. Tintoret s’engage d’emblée dans des scènes nocturnes à
l’éclairage surnaturel, aux audacieux contrastes de lumière dénaturant les couleurs. Durant toute sa longue carrière, il aura recours à des effets
d’éclairage mouvementés dramatisant ses compositions vertigineuses. Attaché aux couleurs brillantes et à la luminosité cristalline, Véronèse ne laissera
son style subir l’influence des recherches luministes de Titien qu’après la mort de ce dernier. Ses décors nocturnes se chargent alors de densité qui
reflète la tension dramatique ; sa technique se fait plus fragmentée, avec de plus forts contrastes, plus expressifs. Jacopo Bassano s’inscrit dans la
continuité directe des recherches luministes de Titien dans le rapport matière et lumière des scènes nocturnes basculant peu à peu dans une
dramatisation angoissante. Les formes sculptées de couleur et frappées de lumière jaillissent de la pénombre transmettant un douloureux sentiment
d’angoisse. Les peintres vénitiens plus que tout autre ont travaillé dans la représentation du paradoxe de la résurrection du Christ : le Christ n’est pas
seulement ressuscité mais est mort durant trois jours ; il ne s’agit pas de le peindre comme s’il était vivant mais de tenter d’exprimer ce passage par la
mort. En plongeant certaines scènes de jour comme l’Annonciation, le Couronnement d’épines ou les martyres des saints dans une pénombre artificielle,
les peintres accentuent le tragique de la représentation. La nuit se mêle au jour et la mort à la vie. L’iconographie n’est pas seule porteuse d’émotion ; les
couleurs elles-mêmes, sont chargées d’expressivité et de pathétisme. Les peintres créent tout un jeu de couleurs qui s’interpénètrent et qui sont
absorbées par les teintes sombres, comme happées par la mort. La mise en scène, les couleurs, les jeux de clairs obscurs, tout participe à plonger le
spectateur dans la contemplation douloureuse.
Titien Saint Jérôme pénitent (Paris, musée du Louvre)
Jacoppo Bassano, Saint Jérôme Venise, Gallerie dell'Accademia
Titien, Saint Jérôme Madrid, Museo Thyssen-Bornemisza
Tintoret, Saint Jérôme Vienne, Kunsthistorisches Museum
Véronèse, Saint Jérôme Venise, Gallerie dell'Accademia
Titien, Mise au tombeau Madrid, Museo Nacional del Prado
Tintoret, Déploration du Christ Venise, Gallerie dell'Accademia
Véronèse, Christ mort St Petersburg, Musée de l'Ermitage
L’art en personnes : Portraits d’artistes et de collectionneurs Comme nous l’avons vu précédemment, le portrait a un statut particulier à Venise ; en
outre, les vénitiens accordent une place toute particulière à la représentation des œuvres d’art et des artistes comme en témoigne les nombreux portraits
de collectionneurs entourés des œuvres de leur collection. Le portrait de Jacopo Strada par Titien est l’occasion de démontrer son talent : mouvement,
contrapposto, intensité, jeu sur les matières, les couleurs et les contrastes sont une « leçon de peinture ». Les Vénitiens ont un réel engouement pour les
portraits d’artistes et nombreux sont les collectionneurs et artistes eux-mêmes qui passent commande pour des portraits de peintres, de sculpteurs et
d’architectes. Les peintres ont majoritairement préféré être les auteurs de leur propre représentation, occasion d’une autocélébration ou plutôt d’une
réflexion intime. Titien aura été le plus productif dans les autoportraits, tout au long de sa vie. Il y a chez lui tant une réflexion sur sa relation créatrice avec
le ciel, son inspiration divine que sur la conscience du labeur, de la difficulté de son travail avec un réel espoir d’une renommée au-delà de la mort. Si
Titien privilégiait les vues de trois-quarts, Tintoret choisit de se représenter de face. Tout au long de sa carrière, il aura fait le choix de surprendre et
d’exposer sa différence par rapport aux autres artistes. Dans ce choix, on ne peut ignorer le parallèle avec les représentations de la Sainte Face ou du
Christ rédempteur et il exploite particulièrement ce rapprochement : il ne nous regarde pas mais, recueilli sur lui-même, cherche l’inspiration.
Titien, Jacopo Strada Vienne, Kunsthistorisches Museum
Tintoret Ottavio Strada (Amsterdam, Rijksmuseum)
Véronèse, Alessandro Vittoria New York, Metropolitan Museum
Palma le Jeune, Un Collectionneur Birmingham, City Museum & Art Gallery
Titien, Autoportrait Madrid, Museo National del Prado
Tintoret, Autoportrait Paris, musée du Louvre
Tintoret, Autoportrait Philadelphie, Museum of Art
Albrecht Dürer Autoportrait de Munich
La femme désirée : Le nu féminin à Venise Cette dernière section aborde 2 thèmes, relatant essentiellement des scènes mythologiques ou bibliques
La Femme en péril Au cours de sa longue carrière, Titien évolue dans la représentation des mythes classiques où les femmes sont mises en danger :
viol de Lucrèce par Tarquin, Andromède livrée au monstre, … C’est dans une représentation brutale et palpable qu’il rejoue la scène du viol de Lucrèce ; il
fait participer le spectateur que la jeune femme semble supplier du regard tandis qu’elle tente désespérément de lutter. A la différence de Titien, Tintoret
ne s’appuie pas sur un texte classique mais sur une vision plus personnelle. Dans sa représentation du viol de Lucrèce, la scène est violente ; tout semble
s’effondrer sous l’assaut de l’homme qui arrache les derniers vêtements d’une Lucrèce en équilibre instable, au corps projeté vers l’avant. Chez
Véronèse, le choix du moment est important : dans le drame de Lucrèce, il ne choisit pas le moment du viol comme Titien ou Ti ntoret, mais l’instant qui
précède le suicide de la jeune femme. Dans Persée et Andromède, la jeune femme se sait déjà sauvée. L’élégance du trait et l’harmonie des couleurs
adoucissent le drame.
Titien, Tarquin et Lucrèce Bordeaux
Titien, Tarquin et Lucrèce Cambridge, prêté par The Syndics of the Fitzwilliam Museum
Tintoret, Tarquin et Lucrèce Chicago, The Art Institute of Chicago
Lucrèce de Véronèse KHV
Titien, Persée et Andromède Londres Wallace collection
Tintoret le miracle de l'esclave 1548 Venise Accademia
Véronèse, Persée et Andromède Rennes, musée des Beaux-arts
La Femme offerte Au XVIe siècle, Venise est célèbre pour la liberté de ses mœurs mais les images érotiques ne sont pas admises en public et les
prestigieux nus de Titien sont réservés au milieu fermé des commanditaires, souvent étrangers. Les nus profanes de Titien sont empreints d’une grande
sensualité, même s’ils s’appuient sur une thématique mythologique et suivent des codes de représentations ; le programme iconographique des poesie
peint pour Philippe II, s’il s’inspire librement sur les Métamorphoses d’Ovide, répond à une dialectique autour de l’amour accepté ou refusé, heureux ou
tragique et permet également à Titien de répondre à la prééminence de la peinture sur la sculpture. Ni Véronèse, ni Tintoret, ni aucun autre des ses
jeunes « rivaux » ne parvinrent à égaler Titien. Le premier travaillera sur des thèmes profanes dans un style plus classique, plus sculptural, d’une grande
richesse chromatique mais beaucoup moins sensuel. Tintoret délaissera les nus offerts à la délectation du regard du spectateur pour des compositions
mouvementées et dramatiques. Ses rares représentations de corps nus féminins sont dénuées de poésie.
Titien, Danaé Naples, museo di Capodimonte
Titien Danaé (Madrid, Museo Nacional del Prado)
Tintoret Danaé Lyon, musée des Beaux-Arts
Véronèse l’Allégorie de l’Amour, le Respect (Londres, National Gallery).

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