NT-proBNP - Roche Diagnostics France

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NT-proBNP - Roche Diagnostics France
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Cahier 2 – N° 1083 – 1er Juin 2015
NT-proBNP
L’ange gardien
de l’insuffisant cardiaque ?
M. Galinier, CHU de Rangueil, Toulouse
G. Lambert, Paris
Avec le soutien institutionnel
de Roche Diagnostics
Roche-NT-proBNP-cardioPrint:Roche-20111 22/05/15 11:54 Page2
L’ensemble du numéro et en particulier le contenu, les titres et intertitres,
l’iconographie, est réalisé sous l’unique responsabilité du directeur
de publication de Cardiologie Pratique édité par Axis Santé.
Couverture : © Twice Daily
Sommaire
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NT-proBNP : l’ange gardien
de l’insuffisant cardiaque ?
éditorial
M. Galinier .......................................................................................... 4
LeNT-proBNP:dudiagnosticprécoce
ausuividel’insuffisancecardiaque
Cequ’ilfautsavoirsurlespeptidesnatriurétiques ...... 6
intérêtcliniqueduNT-proBNP ............................................. 8
Diagnostic de l’insuffisance cardiaque
Pronostic de l’insuffisance cardiaque
Suivi de l’insuffisance cardiaque chronique
Diagnostiquer précocement l'insuffisance cardiaque
chez les patients diabétiques de type 2 ?
Autres indications et perspectives
enpratique ................................................................................ 16
Cascliniques
Diagnostic de l’insuffisance cardiaque
Insuffisance cardiaque et pathologies multiples ......... 18
M. Galinier
Pronostic et suivi hospitalier
Une cinétique parlante ............................................... 20
C. Meune
Suivi de l’insuffisance cardiaque
Suivi de l’insuffisance cardiaque en ambulatoire ....... 22
C. Meune
Parcours de soins
Le NT-proBNP de l’admission aux urgences
au suivi ambulatoire.................................................... 24
I. Corman
3
eDiToriaL
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NT-proBNP:l’angegardien
del’insuffisantcardiaque?
Pr M. GALINIER,
CHU Rangueil, Toulouse
a prévalence de l’insuffisance cardiaque (IC) est estimée en France à 2,2 % de
la population générale(1). Elle augmente avec l’âge, intéressant 12 % des sujets
âgés de plus de 60 ans et 20 % des personnes de plus de 80 ans. Alors que l’incidence de l’IC à fraction d’éjection (FE) altérée semble s’être stabilisée, celle de l’IC à
FE préservée continue de progresser au prorata du vieillissement de la population.
Il s’agit d’une maladie grave, avec un taux annuel de décès de 16,6 % dans notre
pays, soit une mortalité 4 fois plus élevée que celle de la population générale chez
les sujets âgés de 75 à 84 ans. Elle constitue la première cause d’hospitalisation après
60 ans, avec un taux de léthalité intrahospitalière de 8,2 %, nettement supérieur à
celui de l’infarctus du myocarde (IDM).
Maladie chronique, elle est à l’origine d’hospitalisations à répétition, avec un taux de
réhospitalisations de 25 % à 3 mois en Europe. Or le simple suivi des recommandations
peut améliorer son pronostic, en effet pour sa forme à FE altérée, nous possédons des
traitements efficaces de classe I et de niveau A, basés sur l’inhibition des systèmes neurohormonaux et les diurétiques. Les peptides natriurétiques en améliorant le dépistage et le diagnostic de l’IC, en aidant à en fixer le pronostic, en participant à son suivi
et en guidant sa thérapeutique, peuvent améliorer sa prise en charge aux différentes
étapes de son évolution. La stabilité du NT-proBNP, sa reproductibilité d’un laboratoire
à l’autre grâce à l’utilisation des mêmes anticorps de capture au cours des dosages
immunologiques, en font le peptide natriurétique de choix.
L
Le dépistage des dysfonctions ventriculaires gauches asymptomatiques
dans les populations à risque est maintenant possible grâce à l’utilisation
des peptides natriurétiques. Chez les patients diabétiques, un taux de NT-proBNP >
125 ng/L prédit le risque de décès ou d’hospitalisation de causes cardiaques à 2 ans
et justifie la réalisation d’une échocardiographie et si nécessaire la mise en route
d’un traitement anti-neurohormonal, bloquant les systèmes rénine-angiotensine (IEC
ou ARA2) et nerveux sympathique (bêtabloquants)(2).
Le diagnostic d’insuffisance cardiaque, rendu difficile par la présence fréquente de
comorbidités, comme la BPCO, est facilité par le dosage des peptides natriurétiques,
dont l’accessibilité est supérieure à celle des autres examens complémentaires, radiographie thoracique, ECG et échocardiographie. Son utilisation face à une dyspnée aiguë
4
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fait ainsi partie des recommandations de bonnes pratiques. Le NT-proBNP grâce à des
seuils tenant compte de l’âge permet de rétrécir la zone grise d’indécision qui ne
concerne plus que 17 % des patients contre 27 % avec le BNP. Les dernières recommandations de l’ESC insistent également sur son intérêt face à une dyspnée d’apparition progressive, avec une valeur inférieure à 125 ng/L qui permet d’exclure le diagnostic
d’insuffisance cardiaque.
Le pronostic de l’insuffisance cardiaque, toujours difficile à déterminer, est éclairé par
le dosage du NT-proBNP. Au cours de l’insuffisance cardiaque aiguë, une diminution
de plus de 30 % des concentrations de NT-proBNP entre l’admission et la sortie d’un
patient hospitalisé laisse augurer d’un bon pronostic. Au cours de l’insuffisance cardiaque chronique, une valeur de NT-proBNP ≥ 1 000 ng/L est de mauvais pronostic.
Le suivi ambulatoire des insuffisants cardiaques devrait comprendre la surveillance
des peptides natriurétiques, associée à celle du poids et des symptômes au mieux par
télésurveillance. Ainsi quelques semaines après une décompensation quand le patient
est stabilisé, il est pertinent de contrôler le taux sérique du NT-proBNP qui constituera
la valeur de référence servant de comparateur en cas d’événement aigu. L’utilisation
prochaine du LCZ696, qui s’est révélé plus efficace que les IEC dans le traitement de
l’insuffisance cardiaque chronique à FE altérée, grâce au blocage de la néprélysine,
enzyme dégradant les peptides natriurétiques, augmentant ainsi les taux de BNP,
imposera de n’utiliser que le dosage du NT-proBNP dans le suivi biologique de ces
patients.
Servir de guide à notre traitement reste la dernière frontière à atteindre pour les peptides natriurétiques et si leur utilisation n’est pas encore recommandée, la persistance d’une concentration élevée chez un patient paraissant stable cliniquement
doit constituer un aiguillon pour intensifier nos traitements, une valeur cible de
1 000 ng/L pour le NT-proBNP étant l’objectif à se fixer.
Ainsi, tout au long de la vie agitée des insuffisants cardiaques, le dosage du
NT-proBNP, en améliorant leur prise en charge, servira d’ange gardien.
Références
1. Galinier M, Berry M. L’insuffisance cardiaque en France en
2013. Concours Médical 2013 ; 135 : 443-7.
2. Huelsmann M et al. PONTIAC (NT-proBNP selected prevention of cardiac events in a population of diabetic patients
without a history of cardiac disease) : a prospective randomized controlled trial. J Am Coll Cardiol 2013 ; 62(15) : 1365-72.
5
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NT-proBNP : l’ange gardien
de l’insuffisant cardiaque ?
LeNT-proBNP:
dudiagnosticprécoceausuivi
del'insuffisancecardiaque
●
Cequ'ilfautsavoir
surlespeptidesnatriurétiques
L’augmentation de la pression intraventriculaire entraîne un étirement des cardiomyocytes et la synthèse des peptides natriurétiques (PN). La distension ventriculaire entraîne
la synthèse d’une pro-hormone, le pro-BNP, qui sera ensuite clivée en deux parties principales : une partie C-terminale active (32 acides aminés), le BNP, et une partie N-terminale, le NT-proBNP (76 acides aminés). Les peptides natriurétiques sont ainsi des indicateurs
fidèles de la souffrance cardiomyocytaire et constituent un reflet de la fonction ventriculaire. Ils sont augmentés en cas d’accroissement des pressions télédiastoliques ventriculaires gauches comme cela est le cas dans l’insuffisance cardiaque (IC) (figure 1).
Àretenir
● Âge, cardiopathies chroniques sous-jacentes et insuffisance rénale majorent
modérément les taux de PN, indépendamment de toute IC ;
L’interprétation des résultats doit tenir compte des seuils décisionnels de la
méthode de dosage utilisée et les résultats de BNP et NT-proBNP ne sont pas
interchangeables ;
●
Du fait des spécificités physiologiques et analytiques, il est important de se
référer systématiquement au même peptide pour le suivi d’un patient donné :
– pour le BNP, s’assurer que le dosage est effectué dans le même laboratoire et
avec le même analyseur ;
– pour le NT-proBNP, les kits de dosages sont standardisés (utilisation des
mêmes anticorps de capture), les résultats sont donc comparables pour juger
de l’évolution d’un patient donné quel que soit le laboratoire dans lequel ils
ont été pratiqués ;
●
Le NT-proBNP est plus stable que le BNP, il ne se dégrade qu’après 4 jours à
température ambiante(1), un atout certain dans tous les cas où il y a transport de
tube.
●
6
Contraintes
de volume
et de pression
Diurèse
Natriurèse
Filtration glomérulaire
Résorption sodée
Distension de la paroi
ventriculaire
Étirement
des cardiomyocytes
Action directe
Vasodilatation
périphérique
Figure1
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Action indirecte
Activité du SRAA
Stimuli hormonaux
Cardiomyocytes
R I S S
D
S
M
H P
S
K
R
G
G
L
F
L G
S P
G S
A S
SY
T L
proBNP
R
A P
R
S
P
K
M
V
Q
G
S
C
C
G
K
Circulation sanguine
H P
NT-proBNP
Y
T L
R
A P
R
M
K
R
G
F
BNP
S
P
K
M
V
Q
G
S
V
L
R
R
R I S S
D
L G
S P
G S
A S
G
H
S
S
G
L
C
G
C
G
K
V
L
R
R
H
Synthèse des peptides natriurétiques
7
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NT-proBNP : l’ange gardien
de l’insuffisant cardiaque ?
●
intérêtcliniqueduNT-proBNP
Avec le vieillissement de la population, la prévalence de l’insuffisance cardiaque (IC)
est en constante augmentation. Quel que soit le stade NYHA de l’IC à fraction d’éjection altérée, les peptides natriurétiques sont des indicateurs fidèles de la souffrance
cardiomyocytaire, avec des taux qui évoluent en fonction de l’évolution clinique de
l’IC. Les recommandations européennes (ESC)(2) et nord-américaines (ACCF/AHA)(3), respectivement édictées en 2013 et 2012, préconisent le dosage des peptides natriurétiques pour le diagnostic (classe I), l’évaluation du pronostic de l’IC (classe IIa) et l’optimisation du traitement en ambulatoire (classe IIa)(3) (figure 2).
Diagnostic de l’insuffisance cardiaque
Figure2
Les signes cliniques de l’IC sont peu sensibles et peu spécifiques. La dyspnée ne
présente pas de caractère d’orientation dans un contexte d’urgence chez des sujets
présentant des antécédents de pathologie pulmonaire et l’auscultation pulmonaire
NYHA I
IC asymptomatique
NYHA II
IC modérée
NYHA III
IC sévère
NYHA IV
IC sévère
NT-proBNP
(ng/L)
Risque de mort
subite
< 300 ou > 450/900/1 800(2,4,5)
125(2)
0
Temps
Évolution clinique
Épisodes aigus
Amélioration clinique au cours du suivi
Dégradation clinique au cours du suivi
Le NT-proBNP au cours de l’évolution
de l’insuffisance cardiaque
HF care at different stages of the disease natural history, HF in 2014 – Global Heart Failure Awareness
Programme ESC and Heart Failure Association of ESC, avec l'ajout des seuils de NT-proBNP
(d’après McMurray JJV et al(2), Januzzi et al(4,5))
8
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n’est souvent pas d’une plus grande aide. Par exemple, la présence de sibilants peut
évoquer une décompensation de BPCO, mais elle peut aussi être en rapport avec un
« asthme cardiaque ». L’auscultation cardiaque n’est pas toujours d’une grande spécificité et peut être rendue difficile par une surcharge pondérale. Quant aux œdèmes
des membres inférieurs, ils peuvent avoir une origine multifactorielle chez les sujets
âgés. Enfin, en cas de bas débit cardiaque, les signes cliniques peuvent être frustes et
discordants par rapport à la sévérité de l’IC et à son pronostic.
Des examens complémentaires pour orienter le clinicien
Face à l’impossibilité de trancher devant un tel tableau clinique, les résultats des examens constituent une étape importante de la démarche diagnostique.
● La radiographie pulmonaire. Elle est souvent peu contributive, à moins que la
décompensation cardiaque soit massive. De plus, son interprétation est d’autant plus
délicate qu’il existe une surcharge pondérale importante.
L’ECG. Il a une bonne valeur prédictive négative, l’origine cardiaque pouvant le
plus souvent être écartée lorsqu’il est normal. Mais en cas de pathologie pulmonaire,
il n’est pas rare que des anomalies connues ou inconnues figurent sur le tracé.
●
● L’échographie cardiaque. Lorsqu’elle est disponible, la réalisation d’une échographie cardiaque en urgence est un très bon examen d’orientation. Toutefois, elle nécessite toujours le déplacement du patient vers un centre spécialisé, que cela soit l’hôpital
ou le cabinet du cardiologue. Dans le cas de patients présentant une IC à fraction
d’éjection conservée, les peptides natriurétiques ne permettent pas de trancher et l’échographie demeure l’examen clé.
● Le dosage du NT-proBNP. Il s’agit d’un examen simple qui peut être réalisé à l’hôpital, et qui est également accessible en ville. Les taux de PN augmentent avec l’âge,
mais les études cliniques ont permis de fixer des seuils en fonction de l’âge pour le
NT-proBNP en deçà et au-delà desquels le diagnostic est écarté ou au contraire très
probable (figure 3, p. 10) :
• < 300 ng/L : le diagnostic d’IC peut être exclu avec une valeur prédictive négative de
99 %(4, 5).
• Le diagnostic d’IC est très probable lorsque le taux est > 450 ng/L pour les moins de
50 ans, > 900 ng/L entre 50 et 75 ans, et > 1 800 ng/L au-dessus de 75 ans. Entre ces
valeurs seuils existe une zone grise où les éléments cliniques et paracliniques doivent
être soigneusement analysés pour décider la conduite à tenir. Cette zone grise est
toutefois plus étroite pour le NT-proBNP que pour le BNP puisqu’elle concerne respectivement 17 %(5) des patients avec dyspnée aiguë vs 27 %(6).
9
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Figure3
NT-proBNP : l’ange gardien
de l’insuffisant cardiaque ?
Radio Px - ECG - Clinique
1 seuil
d'exclusion
1 seuil de confirmation
par tranche d'âge
1 800
75 ans
< 300
900
VPN 98 %
50 ans
450
en ng/L
Interprétation du NT-proBNP
dans le diagnostic d'insuffisance cardiaque aiguë
(d’après Januzzi JL et al.(4,5))
Figure4
Aussi, l’ESC propose d’utiliser les PN pour le diagnostic de certaines formes atypiques
d’insuffisance cardiaque chronique, pouvant être utile notamment en médecine
générale, pour exclure l’IC (NT-proBNP < 125 ng/L) ou orienter le patient vers un cardiologue (figure 4).
Patients ayant
des symptômes
suggérant une ICC
dyspnée, œdèmes...
NT-proBNP
< 125 ng/L
ICC éliminée
Chercher une autre
origne aux symptômes
> 125 ng/L
Adresser le patient
à un cardiologue
pour réalisation
d’une échographie
ICC : insuffisance cardiaque chronique
Interprétation du NT-proBNP dans le diagnostic
d'insuffisance cardiaque chronique
(d’après McMurray JJV et al.(2))
10
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Pronostic de l’insuffisance cardiaque
Figure5
En plus de l’orientation diagnostique, le dosage du NT-proBNP permet d’évaluer le pronostic des patients admis à l’hôpital pour insuffisance cardiaque aiguë ou une décompensation :
● Pris de façon indépendante, les taux de NT-proBNP à l’admission et à la sortie donnent une indication pronostique : un taux à l’admission > 5 000 ng/L et un taux à la sortie > 3 000 ng/L témoignent d’un risque majeur de réhospitalisation ou de décès dans
les 6 mois(5, 7).
● Plus encore, l’évolution du taux de NT-proBNP entre l’admission et la sortie du
patient a une très forte valeur pronostique (figure 5) qui permet au clinicien d’orienter sa prise en charge (évaluer l’efficacité du traitement per-hospitalier, autoriser la sortie du patient ou non, définir le délai avant une consultation en ambulatoire, etc.).
Taux cumulé de survie des patients IC
non hospitalisés
1,0
0,8
Diminution > 30 %
0,6
Évolution < 30 %
0,4
0,2
Augmentation > 30 %
p < 0,0001
0,0
0
100
Temps (jours)
200
Survie des patients en fonction de l'évolution
du NT-proBNP pendant l'hospitalisation
(d’après Bettencourt P et al.(7))
11
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NT-proBNP : l’ange gardien
de l’insuffisant cardiaque ?
Suivi de l’insuffisance cardiaque chronique
L’insuffisance cardiaque est une maladie chronique complexe dont la prise en charge
optimale ne peut se baser sur la seule clinique. Comme dans d’autres maladies chroniques, par exemple le diabète avec l’HbA1c, il est important de disposer d’un marqueur
biologique accessible et fiable capable d’améliorer le suivi ambulatoire de ces
patients qui, malgré les recommandations, restent souvent sous-traités(8, 9). Parce
qu’ils permettent d’évaluer le risque de mortalité et de réhospitalisation, ainsi que
l’amélioration ou l’aggravation de l’IC, et que leurs taux diminuent lorsque le traitement est efficace, les peptides natriurétiques sont d’excellents candidats pour remplir ce rôle(10).
Les méta-analyses qui ont inclus des études ayant comparé un suivi guidé par les taux
de peptides natriurétiques au suivi « classique », ont montré que cette stratégie permet d’abaisser la mortalité toutes causes de 26 % à 41 %, un bénéfice essentiellement
obtenu par la diminution des réhospitalisations(11, 12).
En pratique, un taux de NT-proBNP < 1 000 ng/L est un objectif thérapeutique qui permet de diminuer le nombre d’événements, d’améliorer la qualité de vie et d’obtenir
une meilleure réversion du remodelage ventriculaire (encadré ; figure 6)(13).
Les dosages répétés de PN n’augmentent pas les coûts de santé, au contraire, ils
contribuent à une diminution des réhospitalisations, source principale de dépenses
dans l’IC(14).
Àretenir
L’optimisation du traitement de l’insuffisance guidé par le NT-proBNP permet
d’améliorer l’espérance de vie et la qualité de vie des patients.
●
● L’objectif thérapeutique est un taux de NT-proBNP < 1 000 ng/L ou, à défaut,
le taux de NT-proBNP le plus bas possible aux doses maximales recommandées
et tolérées de traitement.
● En pratique, un dosage de NT-proBNP avant chaque consultation permet une
meilleure appréciation de l’évolution de la maladie que le jugement clinique
seul (au minimum tous les 6 mois dans le bilan).
En diminuant les réhospitalisations, le suivi guidé par le NT-proBNP permet
de diminuer les coûts de santé.
●
12
Survie sans événements
1,0
Suivi guidé par
le taux de NT-proBNP
(n = 75)
0,8
Figure6
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0,6
Suivi classique (n = 76)
0,4
0,2
Log rank p = 0,03
0,0
0
73
219
146
Jours depuis l’inclusion
202
365
Nombre d’événements cardiovasculaires chez les patients suivis
pendant 10 ± 3 mois avec un suivi classique (rouge)
ou un suivi guidé par le NT-proBNP (bleu)
(d’après l’étude PROTECT(13))
Diagnostiquer précocement l'insuffisance
cardiaque chez les diabétiques de type 2 ?
Comme la plupart des maladies chroniques, l’insuffisance cardiaque reste longtemps
asymptomatique et, dans les formes congestives, la fraction d’éjection se dégrade progressivement avant que les premiers signes ne se manifestent. Peut-on diagnostiquer
précocement cette lente dégradation chez les sujets à risque, et notamment les
patients diabétiques de type 2 ? C’est ce que semble indiquer plusieurs études.
Ainsi dans l’étude ADVANCE, le dosage de NT-proBNP et de la troponine a permis
d’évaluer le risque de décès et de survenue d’événements cardiovasculaires chez
3 500 patients diabétiques de type 2(15). Dans une étude danoise, un taux de
NT-proBNP > 125 ng/L s’est révélé être un facteur de mauvais pronostic chez 350 sujets
diabétiques de type 2, et ce indépendamment de la microalbuminurie(16).
Dans l’étude PONTIAC(17), 300 patients diabétiques de type 2 sans antécédents de maladies cardiaques et ayant un NT-proBNP > 125 ng/L ont été suivis soit en endocrinologie (groupe contrôle), soit en cardiologie où la posologie des traitements (bêtabloquants, IEC, ARA II, etc.) a été ajustée de façon plus intensive, avec notamment
13
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NT-proBNP : l’ange gardien
de l’insuffisant cardiaque ?
Figure7
l’objectif de diminuer de moitié les taux de NT-proBNP. Cette stratégie a permis de
diminuer les hospitalisations toutes causes, les événements cardiovasculaires et la mortalité (figure 7).
Bien que ces éléments nécessitent d’être confirmés par des études de plus grande
ampleur, l'identification précoce des diabétiques à haut risque grâce au taux de
NT-proBNP pourrait permettre d'en intensifier la prise en charge.
Critère primaire
1,0
0,8
Traitement intensif
selon les taux de NT-proBNP (n = 150)
Traitement standard (n = 150)
p = 0,035
0,6
0
5
15
10
20
24
Mois
Courbes de Kaplan-Meier : mortalité et hospitalisations
en rapport avec une pathologie cardiaque
(d’après Huelsmann M et al.(17))
14
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Autres indications et perspectives
NT-proBNP et SCA
Chez un patient présentant un syndrome coronaire aigu (SCA) avec ou sans sous-décalage de ST, le dosage du NT-proBNP est indiqué dans une visée pronostique : des taux
élévés sont associés à un risque accru de décès, et ce indépendamment d’autres éléments
(âge, taux de troponines, FEVG, etc.). Ainsi, dans l'étude GUSTO IV qui a inclus
7 800 patients, les taux de NT-proBNP ont permis de stratifier le risque des patients et d'identifier ceux qui obtiennent le plus grand bénéfice d'une revascularisation immédiate(19).
Le remodelage ventriculaire est un processus actif après un infarctus du myocarde pouvant favoriser une dysfonction ventriculaire gauche parfois sévère. Elle peut apparaître
dans les semaines ou les mois qui suivent. L’échographie cardiaque reste l’examen de
référence pour évaluer ce remodelage, mais elle ne livre pas toutes les informations.
Chez des patients en post-IDM, une équipe britannique a montré que le paramètre le
plus puissant pour prédire l’indice de mobilité pariétale (wall motion index) à 4,5 j
(médiane) et 50 j (médiane) était le dosage du NT-proBNP à la 73e et 120e heure(20).
Le taux de NT-proBNP était bien corrélé à la dysfonction ventriculaire : élévé en particulier chez les patients qui avaient les altérations les plus sévères ou qui étaient décédés. En revanche un taux < 2 029 ng/L était prédictif d'une évolution favorable.
Surveillance de la fonction cardiaque des patients en chimiothérapie
Certaines chimiothérapies anticancéreuses ont un effet cardiotoxique, notamment les
anthracyclines dont les doses sont cumulatives avec un risque d'apparition de troubles
cardiaques (en particulier insuffisance cardiaque, mais aussi trouble du rythme supraventriculaire et ischémie myocardique) à partir de 450 mg/m2. Pour identifier les
sujets à risque d’événements cardiaques (notamment survenue d’une IC), le
NT-proBNP est plus informatif que la troponine ou les CKMB(21). Dans une étude, 34 %
des patients avaient en post-chimiothérapie une élévation ou une élévation transitoire
du NT-proBNP(22). Certains d’entre eux avaient une élévation persistante du NT-proBNP
liée à un risque accru de développer une IC à moyen terme. Les dosages de NTproBNP réalisés avant le traitement, puis en cours de traitement, permettent donc
d’identifier les sujets à risque et d’évaluer les effets cardiaques de ces thérapeutiques
et de potentiellement aider à la prise de décision : mise en place d’un traitement bloquant le SRAA pour prévenir l’apparition de la maladie.
Enfin, chez des femmes atteintes d’un cancer du sein recevant de la doxorubicine aux
effets cardiotoxiques connus, les taux de NT-proBNP étaient significativement plus
élevés chez celles dont la fraction d’éjection ventriculaire gauche allait diminuer
(p = 0,04)(23). La réduction de la fraction de raccourcissement ventriculaire gauche était
corrélée à des taux élevés de NT-proBNP.
15
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NT-proBNP : l’ange gardien
de l’insuffisant cardiaque ?
Un nouveau traitement de l’insuffisance cardiaque ?
L’étude PARADIGM-HF(24), qui a inclus 8 000 patients présentant une IC de classe NYHA
I à IV, a montré que le traitement par un inhibiteur de la néprilysine associé au valsartan
(LCZ696) et comparé à un traitement de référence par énalapril, permet, après 2 ans
de suivi, de diminuer de 20 % la mortalité d’origine cardiovasculaire et de 21 % les hospitalisations liées à l’IC. La néprilysine scinde la boucle des peptides natriurétiques actifs
(BNP, ANP, CNP) et les rend inactifs. Le LCZ696 agissant en inhibant la néprilysine, les
taux plasmatiques de BNP augmentent puisque sa dégradation est bloquée, et dans
le même temps ceux du NT-proBNP diminuent toujours proportionnellement à l'amélioration des contraintes ventriculaires (car non actif physiologiquement) et ceux de
la troponine également, reflétant une diminution de la souffrance cardiaque(25).
Des études complémentaires sont cependant attendues pour valider l'hypothèse
que le suivi biologique des patients traités par cette molécule devra faire appel au
NT-proBNP seulement, et non au BNP.
enpratique
● Le dosage du NT-proBNP est d’un grand secours en cas de doute diagnostique
sur l’origine cardiaque d’une dyspnée aiguë ou chronique.
● Il apporte également des informations à visée pronostique, que l’élévation soit
liée à une IC aiguë, un SCA ou une autre cause (embolie pulmonaire, etc.).
Après traitement de l’IC aiguë, la cinétique d’évolution du NT-proBNP entre l’admission et la sortie a une forte valeur pronostique à moyen et à long terme.
● En ville, le NT-proBNP permet une meilleure évaluation de l’IC chronique
que le jugement clinique seul. Un seuil < 1 000 ng/L ou, à défaut, le taux le plus
bas possible aux doses maximales de traitements recommandées, est un objectif thérapeutique qui permet de diminuer la mortalité, les événements cardiovasculaires et d’améliorer la qualité de vie.
● À l’avenir, le NT-proBNP permettrait d’identifier les patients à risque nécessitant un traitement intensif pour prévenir l’apparition d’une IC (diabétiques de
type 2, patients sous chimiothérapie, etc.).
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Références
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Cas cliniques
1
Diagnostic
del’insuffisancecardiaque
●
insuffisancecardiaque
etpathologiesmultiples
M. GALINIER, CHU Rangueil, Toulouse
Ce cas clinique illustre les difficultés diagnostiques des
dyspnées aiguës chez les patients présentant des
pathologies à la fois cardiaques et bronchopulmonaires
ainsi que chez les obèses. Cette situation est fréquente,
30 % des insuffisants cardiaques étant porteurs d’une
BPCO(1) et l’obésité risquant de devenir une des
principales causes d’insuffisance cardiaque.
Clinique
Monsieur T., âgé de 68 ans, obèse (110 kg pour 1 m 72), hypertendu artériel, diabétique
de type 2, tabagique, porteur d’une bronchopneumopathie obstructive, est hospitalisé au Service d’accueil des urgences pour une dyspnée aiguë apparue dans les
suites d’un syndrome infectieux bronchique.
À l’examen, le pouls est irrégulier aux environs de 120 batt/min, la tension artérielle à
190/100 mmHg aux deux bras, la fréquence respiratoire à 30/min, la saturation en oxygène en air ambiant à 83 %, la température est de 37,8°.
L’auscultation cardiaque retrouve une tachyarythmie avec un souffle systolique de faible
intensité au foyer aortique où le B2 est conservé. L’auscultation pulmonaire, rendue difficile par le morphotype, retrouve des râles inspiratoires des deux bases, associés à des
ronchi bilatéraux et à quelques sibilants.
Son traitement comporte : amlodipine 10 mg/j et metformine 1 000 mg x 2/j.
Un électrocardiogramme et un cliché thoracique sont réalisés et en attendant les résultats des prélèvements biologiques, le patient reçoit 2 ampoules de furosémide 20 mg,
une injection IV de 3 mg de dinitrate d’isosorbide, 80 mg de corticoïdes, et est mis sous
héparinothérapie intraveineuse et sous oxygénothérapie à 2 litres.
En effet, le diagnostic de sa dyspnée aiguë hésite entre une origine cardiaque – OAP
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NT-proBNP : l’ange gardien
de l’insuffisant cardiaque ?
sur passage en fibrillation atriale et poussés hypertensives –, ou respiratoire – décompensation d’une BPCO sur sur-infection bronchopulmonaire.
Quelques minutes plus tard, les données biologiques sont disponibles sur l’ordinateur :
● la fonction rénale est normale, sans désordre électrolytique ;
● la numération retrouve une hyperleucocytose à 14 000 globules blancs, sans
anémie ;
● la CRP est à 70 mg/L, le NT-proBNP est à 2 550 ng/L, la troponine T hypersensible (TnT Hs)
est à 28 ng/L (99e percentile : 14 ng/L) au premier dosage et à 33 ng/L quelques heures
plus tard.
Le diagnostic est un œdème aigu du poumon à l’occasion d’une sur-infection bronchique à l’origine d’un passage en fibrillation atriale associé à une poussée hypertensive, sans syndrome coronarien aigu malgré le cumul des facteurs de risque d’athérosclérose. La SaO2 étant à 90 % et la PSA à 150/90 mmHg, une ventilation non invasive est
mise en route, et l’injection de 40 mg de furosémide renouvelée. Le dinitrate d’isosorbide
à la seringue électrique à 2 mg/h est poursuivi, et un traitement antibiotique après
prélèvement bronchique et sanguin est instauré : amoxicilline/acide clavulanique à 3 g/j.
Le patient est transféré à l’USIC où l’échocardiographie objective une hypertrophie
ventriculaire gauche concentrique modérée avec une fraction d’éjection à 65 %, sans
anomalie de la cinétique segmentaire, avec des sigmoïdes aortiques remaniées et
modérément calcifiées, sans sténose significative, avec une oreillette gauche dilatée
et une PAP systolique à 50 mmHg, sans dilatation des cavités droites. L’évolution est
dès lors favorable avec un retour spontané en rythme sinusal. Une scintigraphie myocardique confirme l’absence d’ischémie silencieuse, l’HbA1c est à 6,8 %, le patient
regagne son domicile sous AVK, IEC, carvédilol, amlodipine, furosémide et biguanides.
Commentaires
L’apport des peptides natriurétiques en cas de doute diagnostique après réalisation
d’un ECG et d’un cliché thoracique est alors essentiel, son utilisation étant recommandée
par les sociétés savantes. Le NT-proBNP grâce à ses 3 valeurs seuils supérieures différentes en fonction de l’âge, permet de diminuer la zone grise d’incertitude diagnostique nécessitant la réalisation rapide d’une échocardiographie, examen non toujours disponible aux Urgences.
Son utilisation nécessite cependant de connaître quelques pièges diagnostiques
notamment celui engendré par l’obésité. En effet, cette dernière est à l’origine de taux
plus bas de peptides natriurétiques, qui peuvent pratiquement être divisés par un facteur 2, du fait de l’élimination de ces peptides par le tissu adipeux. À l’inverse, la fibrillation atriale peut être à l’origine d’une élévation des taux plasmatiques alors même
qu’il n’existe pas d’insuffisance cardiaque. Ainsi, l’interprétation des valeurs de peptides
natriurétiques nécessite toujours leur intégration au tableau clinique.
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Cas cliniques
2
Pronosticetsuivihospitalier
●
Unecinétiqueparlante
C. MEUNE, Hôpital Avicenne, Bobigny
Le diagnostic d’une insuffisance cardiaque chez un
patient présentant des comorbidités n’est pas toujours
aisé en urgence. Le dosage du NT-proBNP permet le plus
souvent de clarifier ces situations difficiles, tout en
fournissant un premier élément d’évaluation pronostique.
Référence
1. Arnaudis B et al. Clin Res Cardiol 2012 ; 101 (9) : 717-26.
Clinique
Vous recevez Mme B. pour une dyspnée brutale. Il s’agit d’une femme de 74 ans qui a
dans ses antécédents un asthme évoluant depuis l’enfance traité par aérosol de bêtamimétiques et corticoïdes. Elle est régulièrement suivie en médecine du travail, sa tension est « normale » avec des valeurs habituelles de 140/80 mmHg-150/80 mmHg.
● À l’examen vous notez : pouls à 105/min, tension artérielle à 210/120 mmHg, fréquence respiratoire à 28/min, saturation en ventilation spontanée à 85 % ; l’auscultation cardiaque retrouve des bruits assourdis sans souffle audible ; l’auscultation pulmonaire retrouve des râles crépitants bilatéraux des bases pulmonaires remontant
jusqu’à mi-champ.
● L’ECG montre un rythme sinusal avec une hypertrophie ventriculaire gauche et ne
retrouve pas d’anomalie de repolarisation surajoutée.
● À la radiographie du thorax, la silhouette cardiaque n’est pas élargie et il existe un
syndrome alvéolaire bilatéral évocateur d’OAP.
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NT-proBNP : l’ange gardien
de l’insuffisant cardiaque ?
Biologiquement, l’ionogramme sanguin et la NFS sont normaux, la troponine est
< 14 ng/L (99e percentile) et le NT-proBNP est à 3 200 ng/L, signant l’origine cardiaque de la dyspnée. Avant sa sortie, vous décidez de contrôler le dosage de NT-proBNP
qui est mesuré à 490 ng/L. Elle rentre finalement chez elle avec un traitement associant
un IEC, un diurétique de l’anse et un inhibiteur calcique type dihydropirydinique.
Quinze jours plus tard, elle se plaint d’une toux sèche. Votre examen ne retrouve pas
de signe de surcharge. Un nouveau contrôle de NT-proBNP est à 290 ng/L excluant une
nouvelle décompensation d’IC. 15
Cas cliniques
●
Commentaires
Ce cas clinique illustre les difficultés diagnostiques chez les patients insuffisants cardiaques. La répétition des dosages de NT-proBNP peut apparaître surprenante au
premier abord (3 dosages dans cette observation), mais ils paraissent pleinement
justifiés :
● À l’admission, le 1er dosage permet de confirmer le diagnostic d’insuffisance cardiaque
aiguë. Chez cette patiente avec des facteurs de risque cardiovasculaires et une maladie respiratoire chronique, le diagnostic est le plus souvent difficile à faire en urgence.
La réalisation de ce dosage s’appuie sur les recommandations de la Société Européenne
de Cardiologie qui le préconise en première intention après la radio du thorax et
l’ECG. En revanche, il ne permet pas de faire la différence entre dysfonction systolique
et diastolique.
● Au-delà de sa valeur diagnostique, ce dosage permet également d’évaluer le pronostic.
Une valeur de 3 200 ng/L est certes élevée mais permet de considérer cette patiente
comme à faible risque de décès ou de complication grave précoce.
● Le 2e dosage effectué à J7 (avant la sortie) permet, là encore, d’évaluer le pronostic
et la réponse au traitement. En effet, les patients qui ont une décroissance importante
du taux de NT-proBNP sous traitement ont un meilleur pronostic que ceux qui ont un
NT-proBNP stable sous traitement, et bien évidemment que ceux dont le taux augmente. Une décroissance de plus de 30 %, comme chez cette patiente, peut être
considérée comme un objectif à atteindre en cours d’hospitalisation.
● Enfin, le dernier dosage est également pertinent car il permet d’écarter une nouvelle décompensation cardiaque à cet épisode de toux. Le diagnostic pouvait hésiter
entre une nouvelle poussée d’insuffisance cardiaque, un asthme déstabilisé et une toux
sous IEC.
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Cas cliniques
3
Suividel’insuffisancecardiaque
●
Suividel’insuffisancecardiaque
enambulatoire
C. MEUNE, Hôpital Avicenne, Bobigny
Le pronostic de l’insuffisance cardiaque chronique s’est
nettement amélioré au cours des dernières décennies.
Outre le perfectionnement des thérapeutiques, le suivi en
ambulatoire s’est doté des outils de surveillance et
d’ajustement du traitement que sont les peptides
natriurétiques.
Clinique
M. M., âgé de 74 ans, est suivi depuis plus de 15 ans suite à un infarctus du myocarde
inaugural antérieur, revascularisé précocement. Du fait de lésions tritronculaires, il
avait été ponté dans un deuxième temps mais présentait, dès son arrivée à l’hôpital,
une fraction d’éjection altérée à 45 %.
L’évolution a été marquée par plusieurs complications :
– survenue de troubles du rythme supraventriculaires (FA), d’abord paroxystiques
puis permanents ;
– un autre épisode de revascularisation ;
– dégradation de la FEVG nécessitant une intensification du traitement pharmacologique ;
– pose d’un défibrillateur pour resynchronisation cardiaque.
Du fait de ces multiples complications, le suivi a été de plus en plus rapproché et a progressivement intégré les nouveaux outils d’évaluation, en particulier les peptides
natriurétiques.
Lors de la dernière visite d’évaluation, voici les résultats de M. M. :
● À l’examen clinique il n’y a pas de signes congestifs.
● L’échographie a évalué la FEVG < 30 %.
● L’ECG montre une FA avec une fréquence cardiaque à 100/min, des troubles de la
repolarisation antérieurs et un QRS < 120 ms.
22
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NT-proBNP : l’ange gardien
de l’insuffisant cardiaque ?
● Biologiquement, la fonction rénale est modérément altérée avec une créatininémie
à 120 μmol/L, soit une clairance estimée de 45 mL/min/1,73 m2. Enfin, le dernier
dosage de NT-proBNP est à 2 462 ng/L. Cas
● Le traitement de M. M. comprend :
– coumadine : 4 mg/j ;
– aspirine : 100 mg/j ;
– bisoprolol : 10 mg/j ;
– ramipril : 10 mg/j ;
– rosuvastatine : 10 mg/j ;
– furosémide : 80 mg/j ;
– spironolactone : 25 mg/j.
Commentaires
Les objectifs
À ce stade de l’insuffisance cardiaque, le premier objectif du traitement est d’allonger
l’espérance de vie et, de ce point de vue, on peut considérer l’histoire de M. M. comme
un succès pour une maladie considérée, il n’y a pas si longtemps encore, comme
mortelle à 5 ans. Le deuxième enjeu est l’amélioration de la qualité de vie en préservant le maximum de capacité à l’effort et en évitant les hospitalisations. Enfin, il ne faut
pas négliger l’aspect économique car cette maladie est longue et coûteuse.
La fréquence du suivi
La fréquence du suivi dépend surtout de la gravité de l’insuffisance cardiaque. L’autosurveillance représente une dimension importante de ce suivi. De plus en plus de
services mettent en place une éducation thérapeutique et une unité de premier
recours que le patient pourra joindre à tout moment.
L’intérêt du NT-proBNP
De ce point de vue les connaissances ont beaucoup progressé et la première indication du dosage du NT-proBNP est désormais l’optimisation du traitement de l’IC chronique, qui a été validée par plusieurs études en montrant une diminution de la morbimortalité grâce à cette stratégie. Le dosage permet d’identifier des patients qui ne sont
pas stables alors qu’ils le paraissent à l’examen clinique. À chaque fois que les taux de
NT-proBNP augmentent, il faudra optimiser le traitement et notamment augmenter
les doses de médicaments aux doses recommandées.
En pratique, l’objectif thérapeutique est d’atteindre un seuil validé de NT-proBNP
≤ 1 000 ng/L, ou à défaut le plus bas possible. L’idéal est de disposer d’un dosage avant
chaque consultation afin de juger de l’évolution de l’IC par rapport à la précédente.
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Cas cliniques
4
Parcoursdesoins
●
LeNT-proBNPdel’admission
auxurgencesausuiviambulatoire
I. CORMAN, Hôpital Lariboisière, Paris
Du diagnostic d’insuffisance cardiaque aiguë (ICA)
au suivi de l’insuffisance cardiaque chronique en ville,
les dosages de NT-proBNP apportent au clinicien des
informations utiles à la prise en charge.
C’est ce que montre ce cas clinique à épisodes.
Clinique
M. D., âgé de 62 ans, présente une dyspnée d’aggravation progressive associée à une
toux, sans fièvre ni douleur thoracique. Il a par ailleurs un tabagisme actif à 10 cigarettes
par jour.
Ses constantes à l’admission sont : PA : 124/64 mmHg ; FC : 110/min ; FR : 36/min et saturation à 98 % en air ambiant. L’auscultation met en évidence des bruits du cœur
réguliers, tachycardes, sans souffle audible et des crépitants bilatéraux aux bases pulmonaires.
●
L’ECG est en tachycardie sinusale à 110/min sans trouble de la repolarisation.
● La radiographie thoracique montre une surcharge vasculaire et une cardiomégalie.
● Le bilan biologique montre : natrémie : 138 mmol/l ; kaliémie : 4 mmol/L ;
créatinine : 74 mol/L ; ASAT : 120 UI/L ; ALAT : 100 UI/L ; NT-proBNP : 4 600 ng/L.
Le diagnostic retenu est celui d’une ICA révélant une cardiopathie non connue.
Commentaires
Le dosage du NT-proBNP est justifié chez les patients présentant une dyspnée d’apparition récente, ce d’autant que le diagnostic n’est pas certain. De part sa très bonne
valeur prédictive négative, il est possible d’exclure le diagnostic d’IC lorsque le taux de
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NT-proBNP : l’ange gardien
de l’insuffisant cardiaque ?
NT-proBNP est < 300 ng/L. À l’inverse un taux élevé (> 450 ng/L pour les moins de
50 ans, > 900 pour les 50-75 ans et > 1 800 pour les plus de 75 ans) est très en faveur
d’une IC. Dans le contexte de suspicion d’IC, le NT-proBNP est un argument supplémentaire pour le diagnostic et oriente vers la réalisation d’une échocardiographie permettant de confirmer le diagnostic.
Clinique (suite)
Monsieur D. est hospitalisé dans le service de cardiologie où est réalisée une échocardiographie transthoracique (ETT). Un traitement par IEC, bêtabloquant, antagonistes
des récepteurs aux minéralocorticoïdes (ARM) et diurétiques de l’anse est introduit.
Le bilan complémentaire réalisé est en faveur d’une cardiomyopathie dilatée à coronaires saines (coronarographie, dosages TSH, fer et calcémie normaux). Après quelques
jours, l’IC de Monsieur D. semble stabilisée et le patient souhaite sortir.
Le bilan biologique montre : natrémie : 136 mmol/L, kaliémie : 4,2 mmol/L,
NT-proBNP : 2 300 ng/L.
L’interne fait remarquer que le NT-proBNP a diminué de moitié et que c’est plutôt
rassurant.
●
Commentaires
Les taux des peptides natriurétiques varient avec les conditions de charge et diminuent
sous traitement déplétif. Le dosage du NT-proBNP a une valeur diagnostique, mais également pronostique très forte, ce dernier étant en général d’autant plus mauvais que
le taux de NT-proBNP est élevé. Une baisse de plus de 30 % lors de l’hospitalisation est
associée à un meilleur pronostic. Cependant, une valeur de NT-proBNP toujours élevée à la sortie est associée à un risque accru de réhospitalisation précoce et de décès.
Cette valeur pronostique du NT-proBNP permet d’identifier les patients les plus à
risque comme dans le cas présent.
Le taux de NT-proBNP étant toujours élevé à la sortie de M. D., un suivi intensif est souhaitable même s’il n’y a pas de recommandations précises sur ce point, excepté un rendez-vous de consultation dans le mois qui suit l’épisode de décompensation. Cependant, plusieurs études récentes ont montré l’intérêt clinique d’un suivi plus intensif,
notamment en se référant au dosage de NT-proBNP.
Clinique (suite et fin)
M. D. est revu 15 jours après sa sortie et il se dit pas ou peu gêné pour ses efforts de
vie quotidienne. À l’examen clinique il n’y a pas de signes de surcharge, la TA est à 110/80
mmHg, la FC à 80/min.
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Cas cliniques
● Le bilan biologique montre une kaliémie à 4 mmol/L, une créatinine à 80 mol/L et
un NT-proBNP à 2 000 ng/L.
Commentaires
La diminution du taux de NT-proBNP n’est pas significative ici. On estime qu’il faut une
variation d’au moins 25-30 % du taux de NT-proBNP pour qu’il y ait une modification
significative des conditions de charge. On poursuit donc la majoration du traitement
en augmentant les doses de bêtabloquants et d’IEC devant la bonne tolérance clinique
et biologique. Les doses de diurétiques pourront être progressivement diminuées en
l’absence de signes congestifs, et ce d’autant que les doses d’IEC ont été augmentées,
mais ces modifications se font en plusieurs étapes.
Différentes approches ont été étudiées pour le suivi du patient insuffisant cardiaque
par le NT-proBNP, d’une valeur cible individuelle à une valeur absolue identique pour
tous. Les études récentes s’accordent sur une cible de NT-proBNP < 1 000 ng/L, en dessous duquel le risque d’événement (réhospitalisation, décès) est diminué. Ces études
ont montré qu’en se fixant une cible < 1 000 ng/L, le pronostic des patients était certainement amélioré par une prise en charge plus agressive, avec des doses d’IEC,
d’antagonistes d’ARM et de bêtabloquants plus souvent aux objectifs.
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