Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd`hui et demain
Transcription
Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd`hui et demain
Avis « Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain » 20 novembre 2000 Vu la Loi n° 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions, Vu la Loi n°86-16 du 16 janvier 1986 relative à l’organisation des régions, Vu la Loi n° 92-125 du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la République, Vu la décision d’autosaisine du Bureau du Conseil Economique et Social d’Alsace, en date du 29 février 2000, Vu le projet d’avis transmis par les Commissions « Développement Economique et Social » et « Formation » du CESA le 16 novembre 2000, Vu la décision du Bureau du CESA en date du 20 novembre 2000, Monsieur Joseph ZORGNIOTTI, rapporteur, entendu LE CONSEIL ECONOMIQUE ET SOCIAL D’ALSACE EMET L’AVIS SUIVANT : POUR : 57 CONTRE : 7 ABSTENTION : 0 ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 . 2 INTRODUCTION Le retour de la croissance est aujourd’hui source de tensions significatives sur le marché de l’emploi en Alsace, alors que pendant de nombreuses années, la demande d’emploi a été nettement supérieure à l’offre. La longue période de crise que nous avons connue, a eu pour effet d’exclure de nombreux salariés de l’activité économique et d’empêcher un grand nombre, en particulier des jeunes, d’être intégrés socialement par le travail. Par ailleurs, la formation générale des jeunes s’est élevée pour répondre à la demande de qualification formulée, notamment par les entreprises, et pour permettre de réguler le nombre de chômeurs. Malgré la reprise, près de 62 300 demandeurs d’emploi restent inscrits dans les agences de l’ANPE, fin septembre 2000, dont 38 300 personnes à la recherche d’un CDI à temps plein (catégorie 1). Favoriser l’accès à l’emploi et l’intégration sociale par le travail de cette population est un défi collectif majeur, qui peut être relevé aujourd’hui plus facilement du fait d’une conjoncture plus favorable. Les difficultés de recrutement ont des conséquences sur l’activité de certaines entreprises et leurs délais de réactivité pour répondre aux demandes des clients. Leurs capacités de production peuvent se trouver bridées et leurs projets de développement revus à la baisse, voire abandonnés. Si la croissance actuelle de l’économie et la réduction du temps de travail sont sources de tensions sur le marché du travail, celles-ci seront accentuées, à plus long terme, par l’évolution démographique : départ en retraite des classes d’âges issues des années d’après guerre et leur remplacement par les générations issues des classes « creuses » à partir des années 2005/2010. La proximité des marchés du travail allemands et suisses, confrontés de manière plus précoce à ce phénomène démographique, accentuera nos difficultés en Alsace. Cette situation, interpelle les partenaires sociaux, les collectivités territoriales et l’Etat. Le Conseil Economique et Social d’Alsace a fait sienne la préoccupation des difficultés de recrutement à l’occasion d’une auto-saisine décidée par son Bureau, le 29 février 2000. ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 . 3 Le CESA s’est fixé plusieurs objectifs : - constater et analyser les difficultés de recrutement ; - identifier les leviers sur lesquels agir efficacement, à court, moyen et long termes ; - formuler des propositions à l’attention des collectivités territoriales et des services de l’Etat, de leurs établissements publics respectifs, ainsi que des partenaires sociaux. A cette fin, il a adopté une démarche d’analyse fondée sur une étude statistique, confiée à l’OREF, et sur des auditions d’acteurs socioprofessionnels et institutionnels. De nombreuses propositions ont été formulées parmi lesquelles le CESA n’a retenu que celles relevant de son champ de compétences. Les résultats de ces travaux sont présentés en deux parties complémentaires : la première revient sur le constat et l’analyse des difficultés de recrutement (I- DIAGNOSTIC), la seconde énonce les propositions du CESA (II- PROPOSITIONS). I- DIAGNOSTIC De 1990 à 1998 l’emploi a progressé de 6,2 % en Alsace. Cette progression s’est encore accélérée à partir de 1998, avec une augmentation moyenne annuelle de 1,8 %. Portée principalement par l’industrie automobile, les transports, la restauration, et les services aux entreprises, cette croissance n’explique cependant, qu’une partie des besoins de recrutement. Le renouvellement des effectifs, y compris dans les secteurs où les effectifs sont en diminution (commerce de détail, bâtiment, équipement mécanique,...), constitue une seconde explication. Le volume global des embauches et le taux de chômage en Alsace (de 5,5 % de la population active de catégorie 1 en Alsace, contre une moyenne nationale de 9,5 %) ont mis en évidence trois données principales : - la qualification insuffisante ou inadaptée de certains demandeurs d’emploi ; - le marché du travail qui recèle des métiers considérés comme peu attractifs par les demandeurs d’emploi ; - l’exclusion des personnes les plus éloignées de l’emploi. ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 . 4 Les caractéristiques des difficultés de recrutement et l’analyse des freins à l’emploi constituent les deux volets du diagnostic réalisé. 1. Les Caractéristiques des difficultés de recrutement Afin de repérer les secteurs confrontés à des difficultés de recrutement, le CESA s'est attaché à étudier l’offre et la demande d’emploi, pour identifier : - les métiers déficitaires ; - la nature des difficultés ; - les entreprises les plus concernées ; - les publics constituant un potentiel de main-d’œuvre ; - les disparités géographiques entre les différents bassins d’emploi. 1.1. Les métiers déficitaires L’étude pilotée par l’OREF, réalisée grâce à la mobilisation de nombreux partenaires institutionnels du secteur de l’emploi, a distingué 23 métiers sur 466 identifiés au Répertoire Opérationnel des Métiers et des Emplois, présentant des difficultés de recrutement avérées. Celles-ci concernent pour moitié des ouvriers et pour un tiers des employés. Les besoins en personnel, concernant notamment les métiers de niveau IV et V, demeurent importants. Parmi les métiers de production, ce sont ceux du bâtiment (ouvrier de maçonnerie, électricien du bâtiment et des travaux publics,…), de la mécanique (ajusteur mécanicien, opérateurrègleur sur machine outil,…), de la métallurgie (chaudronnier tôlier, soudeur,…), de l’industrie agroalimentaire (préparateur de produit carnés, …) et de la restauration (cuisinier, …), qui sont les plus sensibles. Parmi les métiers de services, ce sont les emplois commerciaux (représentant à domicile, attaché commercial en biens d’équipements professionnels,…), de la restauration (employé polyvalent de restauration, serveur) et de l’électronique / informatique (informaticien d’études, interconnecteur matériel électrique et électromécanique, …) qui sont les plus touchés. ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 . 5 D’autres secteurs d’activités, tels que les métiers de la maintenance et de la logistique, connaissent des difficultés. Le secteur de la fonction publique, notamment hospitalière et territoriale, n’est pas épargné par ces difficultés (cf. certains métiers de l’entretien, du secteur sanitaire et social, comme par exemple le métier d’infirmière, …). 1.2. La nature des difficultés Les difficultés affectant les métiers déficitaires sont de nature diverse. Si la classification proposée ci-dessous ne se veut pas figer, elle présente cependant l’intérêt d’apporter une appréciation qualitative sur ces difficultés. En effet, selon qu’elles soient conjoncturelles ou structurelles, qualitatives ou quantitatives, elles appellent des solutions différentes. Il convient de distinguer : Les difficultés à caractère structurel et quantitatif, liées à l’insuffisance des effectifs formés (sont par exemple concernés, les métiers d’ouvrier qualifié du bâtiment, d’employé médical et paramédical, …) ; Les difficultés à caractère structurel et qualitatif, générant des comportements de rejet de la part des personnes à l’entrée en formation comme de la part des personnes formées (sont par exemple concernés, les métiers de représentant à domicile, de conducteur transport routier, …) ; Les difficultés à caractère conjoncturel et quantitatif, liées à l’émergence rapide d’importants besoins de main-d’œuvre sur des missions de courte durée, ne laissant pas à l’appareil de formation le temps d’adapter ses moyens (sont par exemple concernés, les métiers de soudeur, d’informaticien, …) ; Les difficultés à caractère conjoncturel et qualitatif, liées à la présence de demandeurs d’emploi dont le niveau de qualification ne correspond pas aux besoins requis pour certains emplois, ou liées aux délais incompressibles d’adaptation de l’appareil de formation aux besoins des entreprises (sont par exemple concernés, les métiers de vendeur en équipement de la personne, d’agent d’usinage des métaux, …). ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 . 6 1.3. Les entreprises les plus concernées Bien des entreprises rencontrent des difficultés de recrutement, en raison notamment : - des conditions d’emploi proposées : * niveau des rémunérations et avantages sociaux ; * contrat (à durée déterminée, de travail temporaire), statut (contractuel, vacataire) ; * contenu et organisation du travail ; * conditions d’exercice des métiers. - de la concurrence entre les entreprises en particulier entre les entreprises de type artisanales et les autres ; - de l’image dépréciée de certaines d’entre elles. Par ailleurs, la gestion prévisionnelle des emplois insuffisante voire inexistante, tant dans le secteur public que dans le secteur privé, a pour conséquences des exigences professionnelles trop élevées, un encadrement des postes de travail insuffisant, des perspectives d’évolution interne incertaines. Parmi les entreprises concernées, les TPE-PME éprouvent des difficultés spécifiques supplémentaires, en raison des profils recherchés, nécessitant davantage d’autonomie, de polyvalence, voire de spécialisation technique. 1.4. Les publics constituant un potentiel de main-d’œuvre Certains demandeurs d’emploi sont confrontés à des difficultés particulières du fait de leur sexe, de leur origine, de leur parcours personnel,…. Ces difficultés sont souvent cumulatives. Il existe un potentiel important de main d’œuvre disponible en Alsace parmi les catégories de demandeurs d’emploi : les femmes, les personnes issues de l’immigration, les jeunes des quartiers en difficultés, les étudiants sortant du 1 er cycle de l’enseignement supérieur sans avoir obtenu de diplôme. D’autres catégories, encore exclues du monde du travail représentent également un potentiel : les personnes à faible qualification, les adultes de plus de 50 ans, les personnes en ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 . 7 contrat d’insertion, les bénéficiaires des minima sociaux, les travailleurs reconnus handicapés. 1.5. Les disparités géographiques entre les différents bassins d’emploi Le faible taux de chômage régional masque des réalités très contrastées selon les bassins d’emploi. Dans certains secteurs ruraux, la précarité existe, même si elle est moins visible. Les zones urbaines, mieux desservies en équipements et en infrastructures ne sont cependant pas homogènes. Les zones urbaines dites « sensibles » se caractérisent par un taux élevé de chômage et une forte proportion d’allocataires du RMI. Les bassins d’emplois situés en zones frontalières, en particulier les bassins de Haguenau – Wissembourg au Nord et Saint-Louis au Sud, présentent les taux de chômage les plus bas, du fait de l’interpénétration des marchés du travail et de l’attractivité des zones économiques de Karlsruhe et de Bâle. Les difficultés de recrutement y sont plus prégnantes en raison de l’emploi, pour des raisons financières, d’une partie de la population active qualifiée ou non, dans les pays limitrophes. 2. Les freins à l’emploi en Alsace Identifier les freins à l’emploi dans notre région a constitué une étape importante du diagnostic. S’il s’avère délicat de rendre compte de la complexité des mécanismes animant le marché du travail, cette démarche préalable présente l’intérêt de mettre en évidence les principaux leviers, sur lesquels agir. 2.1. Les freins inhérents aux métiers et à leur environnement Parmi les freins inhérents aux métiers et à leur environnement, certains sont apparus déterminants car cités de façon récurrente par des sources diverses. Les conditions de travail (pénibilité…), les rémunérations perçues, les perspectives d’évolution de carrière ainsi que les rythmes de travail (temps partiel, temps partagé, horaires décalés) proposés ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 . 8 par certaines entreprises, sont des freins au recrutement, voire au maintien en poste des salariés. Le déficit d’information sur la nature de certains métiers, notamment les métiers manuels de niveau V, leurs conditions d’exercice et d’évolution induit une perception négative. Celle-ci semble largement partagée par les jeunes, mais également par les parents et les personnes en charge de l’orientation, qui privilégient souvent les formations généralistes longues au détriment des formations professionnelles. Ces métiers connaissent également une désaffection au niveau de la formation professionnelle continue, où de nombreux stages enregistrent des effectifs incomplets, voire sont annulés, faute de candidats. La démarche de rapprochement de l’offre et de la demande, pratiquée par l’ANPE, laisse encore nombre d’employeurs et salariés insatisfaits, malgré les efforts déployés. L’insuffisance des procédures d’évaluation des besoins au sein de l’entreprise, et donc des compétences réellement recherchées par les intermédiaires, est également évoquée. 2.2. Les freins inhérents aux dispositifs de formation Le dispositif de formation a lui aussi été évoqué. Plusieurs constats relatifs aux conditions d’organisation et de fonctionnement ont permis d’identifier des freins majeurs au recrutement : - l’inadaptation des qualifications des demandeurs d’emploi aux besoins des entreprises : avec l’augmentation globale des offres d’emploi et la diminution corrélative du nombre de demandeurs d’emploi, la probabilité de rencontrer des personnes pas ou peu qualifiées, parmi les personnes encore disponibles, augmente ; - les délais et les conditions d’adaptation des formations aux besoins des entreprises : ils demeurent longs et complexes, du fait notamment, de la difficulté des employeurs publics et privés à anticiper l’évolution de leurs besoins, mais également des contraintes réglementaires et techniques encadrant la définition et la mise en œuvre des programmes de formation ; ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 . 9 - les modalités de recrutement : elles donnent encore la priorité aux personnes immédiatement adaptées au poste à pourvoir, sans utiliser la formation interne des salariés en place, qui reste pourtant un moyen privilégié de construction des compétences, à l’intérieur de l’entreprise. - le manque de candidats à l’emploi issus des lycées techniques et des lycées professionnels aussi bien que de l’apprentissage : * l’apprentissage au niveau V a des effectifs globalement stagnants, voire en baisse dans certains secteurs professionnels, * les effectifs des lycées professionnels, longtemps stables, viennent de connaître une forte baisse, qui ne s’explique que pour une part modeste par la légère croissance des lycées d’enseignement général ou technique. Les départs vers la vie active semblent expliquer, en grande partie, ces deux phénomènes. Par ailleurs, si le débauchage de jeunes entrés en formation professionnelle s’amplifiait, il réduirait les effectifs des diplômés de ces filières. Enfin, le CAP, référence de base de nombreux métiers manuels, tend à être dévalorisé. En effet, cette qualification est de plus en plus fréquemment considérée comme un outil d’insertion au détriment de sa vocation initiale de formation professionnelle. 2.3. Les freins connexes Ces freins ne sont pas immédiatement associés à l’emploi. Cependant, leur influence sur la disposition des personnes au chômage à accepter une offre d’emploi, si elle est plus difficilement perceptible, n’en demeure pas moins réelle. Les freins immatériels Ils ont une incidence soit sur la disposition d’un demandeur d’emploi à accepter une offre, soit sur celle d’un dirigeant à recruter un demandeur d’emploi : - l’assimilation trop systématique, entre un métier et le sexe masculin, a pour conséquence d’exclure les femmes de certains postes de travail (cf. certains emplois industriels ou du BTP, traditionnellement réservés aux hommes) ; ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 10 - l’acceptation des différences, gage d’intégration d’une personne dans une entreprise, une équipe de travail, est encore trop faible. Or, quelle que soit leur origine, il semble que cette difficulté soit un frein important au recrutement des personnes issues de l’immigration ; - les entreprises concernées par l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés et qui ont la possibilité d’offrir des emplois adaptés à ces personnes, privilégient le versement d’une contribution annuelle à l’AGEFIPH pour s’acquitter de leur obligation ; - le manque de repères de certains demandeurs d’emploi, la méconnaissance des contraintes élémentaires de la vie en société (respect de soi-même et acceptation de l’autre, intégration au travail et respect de ses règles,…) constituent un obstacle au recrutement de ces personnes ; - la perception de l’Alsace, enfin, est trop souvent partielle, voire partiale, ce qui nuit à l’attractivité de la région auprès d’une main-d’œuvre en provenance d’autres régions. Les freins matériels Les contraintes matérielles associées à certains emplois influent sur le mode de vie et sur le budget des demandeurs d’emploi. Les facteurs de mobilité Les conditions de déplacement ou de logement ont une incidence directe sur l’acceptation d’une offre d’emploi. Malgré les efforts réalisés par les collectivités territoriales, l’insuffisance, voire l’absence, de transports collectifs dans certains bassins d’emploi et entre bassins a été relevée. L’organisation des différents modes de transport collectif et de leur interconnexion reste imparfaite. Les aides publiques consenties se limitent, en outre, souvent aux personnes en recherche d'un emploi et ne bénéficient pas toujours à celles ayant repris un travail ; or le coût du transport est un facteur dissuasif pour l’acceptation des emplois les moins rémunérés. Avec le transport, le logement est un facteur de mobilité fort entre bassins d’emploi ; il est un vecteur contribuant à la fluidité du marché du travail. Parmi les caractéristiques de la situation alsacienne relevées par le CESA dans son avis sur le logement (mai 2000), le prix élevé du logement en Alsace ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 11 et un parc locatif relativement restreint, connaissant une faible rotation et concentré dans les agglomérations, tout particulièrement en matière de logement social, ont été soulignés. Les services de garde d’enfants La question de la garde des enfants est incontournable pour un nombre important de personnes susceptibles de prendre ou de reprendre une activité professionnelle. Cette question est trop souvent associée aux emplois féminins, alors qu’elle devrait concerner les deux parents. Parfois d’ordre financier, notamment pour les revenus proches ou inférieurs au SMIC, les problèmes posés par la garde d’enfants relèvent plus fréquemment des contraintes horaires liés aux systèmes de garde et aux postes de travail. L’insuffisance des structures existantes – du moins en milieu urbain- et plus généralement l’absence d’une information centralisée sur les places disponibles imposent des délais qui empêchent fréquemment les candidats à répondre favorablement et rapidement à des offres d’emploi ou à des opportunités de formation. Les difficultés des parents isolés se trouvent accrues. Il se pose une question du même ordre pour la garde à domicile de parents âgés / invalides. La question des prestations sociales et des revenus de remplacement La complexité et les délais des procédures d’accès à ces dispositifs en cas de perte d’un emploi ou d’arrivée du terme d’un contrat sont des freins à l’acceptation de contrats de travail à durée déterminée. La perte immédiate ou différée de prestations sociales, en cas de reprise d’activité à faible rémunération, peut être un obstacle au retour à l’emploi. ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 12 II- PROPOSITIONS Les propositions qui suivent visent à remédier aux difficultés de recrutement identifiées. Parmi celles-ci, le CESA a distingué les propositions susceptibles d’avoir des effets à moyen et long terme des propositions à plus court terme. Cependant, l’acuité des problèmes rencontrés impose de s’engager dans les deux directions dès aujourd’hui. Trois priorités seront abordées successivement : - intervenir sur la mise en relation entre offre et demande, et sur les conditions du recrutement ; - promouvoir la compétence, mobiliser la formation ; - privilégier les bassins d’emploi, espaces de concertation et de projet. 1. Intervenir sur la mise en relation entre offre et demande, et sur les conditions de recrutement Actions à court et moyen terme 1.1. Mieux évaluer les compétences des demandeurs d’emploi et mieux définir les profils recherchés Les critères pris en compte lors des recrutements, tant du côté de l’offre que de la demande, ne sont pas toujours suffisamment précis. Les procédures de recrutement écartent, parfois à tort, certains publics. En effet, en raison de la situation de l’emploi dans le passé, de nombreuses embauches ont été effectuées à des niveaux de qualification supérieurs aux exigences réelles des emplois. Face aux difficultés de recrutement actuelles, l’amélioration de ces procédures est une réelle nécessité. Le recours simultané à l’évaluation des qualifications et compétences des demandeurs d’emploi d’une part, et à l’analyse de l’emploi à pourvoir d’autre part, affine le positionnement des candidats par rapport à cet emploi et accroît la probabilité d’une bonne adéquation. En outre, ceci doit permettre de proposer au candidat un éventuel complément de formation dès l’embauche réalisée. ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 13 Les outils d’évaluation de compétences Exceptés les bilans de compétence, ces outils d’évaluation diffèrent selon qu’ils s’adressent aux demandeurs d’emploi jeunes ou adultes. - pour les jeunes : l’outil mis en œuvre par la Région est le banc d’essai ; - pour les adultes : les EMT et ENCP sont gérés par l’ANPE. Ils devraient s’adresser tout particulièrement aux publics éloignés de l’emploi. Le CESA propose que ces outils apprécient, d’une part l’aptitude professionnelle et, d’autre part, la capacité à s’intégrer dans un collectif de travail. Le plus souvent mis en œuvre en situation de travail, ils devraient se dérouler sur des périodes plus longues. Ces évaluations devraient être réalisées par ou avec l’appui de professionnels et faire l’objet d’une prise en charge financière par l’Etat ou les collectivités territoriales selon les publics visés. Ces évaluations pourraient viser plus particulièrement les demandeurs d’emploi recherchant des postes de niveau CAPBEP dans des métiers déficitaires. Un cadre de référence commun entre les acteurs de l’emploi et ceux de l’Education Nationale (codification des niveaux,…) doit être mis en place. Les outils d’analyse des postes et de définition de profils Certaines entreprises, notamment les TPE/PME, ne disposent pas toujours des compétences internes pour réaliser l’analyse des emplois à pourvoir. Le recours à un conseil afin d’établir une définition objective, détaillée et opérationnelle des fonctions, et plus généralement, d’ouvrir une réflexion sur les ressources humaines dans l’entreprise, pourrait être encouragé. Le CESA propose que des conseils soient mis à la disposition des TPE/PME, à titre expérimental, sur un ou plusieurs territoires, et ce en concertation entre les partenaires sociaux et la Région. ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 14 1.2 Optimiser l’intervention des intermédiaires et le recours aux structures permettant un rapprochement entre l’offre et la demande L’action des intermédiaires devrait être différenciée selon les publics : jeunes à la recherche d’un premier emploi, demandeurs d’emploi adultes et personnes en situation d’exclusion sociale et professionnelle. Elle doit avoir pour objectif de renforcer leur accompagnement. Les intermédiaires institutionnels Les interfaces entre offre et demande sont assurées par des intermédiaires qui constituent un maillon essentiel dans la construction des parcours d’accès à l’emploi. L’action de ces intermédiaires porte, selon les cas, sur le savoir-être, sur la qualification ou sur l’aide à l’élaboration d’un projet professionnel. Avec la diminution du nombre de demandeurs d’emploi jeunes et adultes, les personnels des ML/PAIO et de l’ANPE se trouvent confrontés à des personnes de plus en plus éloignées de l’emploi. Celles-ci requièrent un suivi individualisé les accompagnant vers l’emploi. Aussi, la poursuite de la professionnalisation de ces intermédiaires devra t-elle passer par une disponibilité du personnel pour ce suivi et un contact renforcé avec l’entreprise afin de mieux identifier la demande et de mieux construire les parcours vers l’insertion. Les structures d’insertion par l’activité économique (SIAE) Les SIAE recrutent sur les postes aidés des personnes en situation d’exclusion sociale et professionnelle pour les conduire vers un emploi durable. Si leur pédagogie les amène, dans un premier temps, à intervenir sur l’insertion sociale de ces personnes (respect des horaires, présentation, intégration dans une équipe, autonomie…), elle leur permet également d’acquérir les gestes professionnels. Cette formation devrait faire l’objet d’une procédure de validation, reconnue par les branches professionnelles, afin d’augmenter les possibilités d’insertion ultérieure des personnes concernées et de valoriser leur parcours. La formation dispensée par ces structures d’insertion, passerelles pour les personnes les plus éloignées de l’emploi, vers le monde de l’entreprise, doit faire l’objet d’un financement ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 15 spécifique, correspondant tant à l’activité pédagogique en situation de travail qu’aux interventions des organismes de formation ou de validation. En outre, les SIAE devraient être davantage sollicitées pour la mise en œuvre de diagnostics relatifs à l’évaluation des compétences de ces publics en situation de travail. La conjoncture favorable doit être mise à profit pour développer les passerelles entre les SIAE et les entreprises du secteur marchand afin de construire de véritables parcours vers l’emploi. Les Entreprises de Travail Temporaire (ETT) Pour certains publics, l’intérim peut être un moyen de rebondir. En effet, il constitue pour une partie des jeunes une étape avant une intégration dans l’entreprise. Confronté à la raréfaction de la main d’œuvre, ce secteur ne s’attache plus exclusivement à faire la mise en relation entre offre et demande mais pratique également l’analyse des postes de travail dans un souci d’élargir la recherche de candidats. Les ETT s’attachent, par ailleurs, à intervenir sur la qualification des intérimaires. Des actions de formation ont d’ores et déjà été aidées par la Région Alsace. Le soutien de ce secteur en matière de formation pourrait être poursuivi par la Région sous réserve que les contributions des OPCA aient bien été épuisées. Actions à moyen et long terme 1.3. Améliorer les conditions rencontrant des difficultés fortes d’emploi dans les secteurs Des raisons matérielles ou les conditions d’accueil dans l’entreprise peuvent être à l’origine des difficultés de recrutement dans certains secteurs professionnels. Elles ont fait l’objet d’un développement dans la partie 21 du diagnostic. Pour les métiers connaissant un fort taux de rotation des emplois et/ou des différentiels importants entre l’offre et la demande, le CESA propose que, dans les meilleurs délais, des réflexions ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 16 soient, selon les cas, développées ou engagées par les partenaires sociaux. 1.4. Agir face à la discrimination afin de mobiliser une main d’œuvre disponible L’analyse conjointe des emplois à pourvoir et des compétences des demandeurs d’emploi élargit le champ des candidats potentiels et participe, à ce titre, à la lutte contre les discriminations. Elle ne constitue cependant qu’un premier niveau de réponse. Si elle est inscrite dans la loi, l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ne se traduit pas toujours dans les faits. Certaines branches professionnelles devraient mobiliser davantage les dispositions existantes, encore trop méconnues, afin de faciliter l’intégration des femmes dans leur secteur d’activité. Dans les entreprises, certains postes de travail, encore réservés aux hommes, demandent à être adaptés (vestiaires, assistance/ automatisation des tâches les plus lourdes,…). Une information plus large des aides disponibles devrait être diffusée. Les Commissions Départementales d’Accès à la Citoyenneté, créées récemment, constituent des lieux de prise de conscience, de réflexion, voire d’action, sur le thème de la discrimination. Le CESA propose que soit élaborée, dans ce cadre, une charte régionale qui prenne position contre toutes les formes de discrimination sur les lieux de travail auxquelles sont confrontées les personnes issues de l'immigration. Pour être opérationnelle, cette charte devrait être proposée à la discussion dans le cadre des instances représentatives du personnel (entreprises, administrations, services publics,…) et donner lieu à des résolutions et à des actions concrètes. De plus, elle pourrait être relayée en direction du grand public. Les difficultés de recrutement des demandeurs d’emploi de plus de 50 ans doivent être soulignées ; leur expérience professionnelle devrait être davantage mise en valeur. ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 17 1.5. Promouvoir l’Alsace au plan national et/ou de l’Union européenne Le recours à une main d’œuvre extérieure à l’Alsace semble opportun pour les qualifications pour lesquelles des difficultés aggravées peuvent être identifiées. Afin de renforcer l’attractivité de l’Alsace auprès de candidats potentiels, plusieurs types d’actions peuvent être engagés : - mieux valoriser l’image de la région, de sa population et de son savoir-faire, par des campagnes de communication ; - communiquer sur les métiers déficitaires en Alsace et sur les conditions d’emploi proposées ; - mettre en place un N° vert et tout autre moyen (NTIC,…) susceptible d’apporter les informations utiles à d’éventuels candidats. 2. Promouvoir la compétence, mobiliser la formation Actions à court et moyen terme 2.1. La construction de compétences au sein de l’entreprise La formation au sein de l’entreprise reste un moyen privilégié pour construire les compétences adaptées à ses besoins. Face à la raréfaction du personnel immédiatement opérationnel, les entreprises seront amenées à réorienter la formation dans l’entreprise pour faire évoluer le personnel en place et pour intégrer le personnel nouvellement recruté. La négociation concernant la formation professionnelle, entre les partenaires sociaux d’une part, entre ces derniers et l’Etat d’autre part, devrait conduire à une évolution de la formation davantage en phase avec l’évolution du marché de l’emploi. Mobiliser l’outil « formation » dans l’entreprise s’inscrit dans une démarche de GPEC et suppose une réflexion stratégique relative aux besoins en personnel à moyen terme. Le CESA propose que la Région aide les entreprises qui développent une réflexion stratégique en matière de ressources humaines : au delà du recours à un conseil pour la ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 18 GPEC déjà évoqué en supra, il convient de développer l’aide à l’ingénierie de formation via les organismes collecteurs. La formation professionnelle continue des salariés Face à la raréfaction de certaines compétences, le plan de formation de l’entreprise constitue un outil intéressant pour l’entreprise et pour le salarié. Pour un poste donné, il peut en effet s’avérer plus pertinent de proposer à un salarié de nouvelles fonctions au sein de l’entreprise, moyennant le recours à une ou plusieurs actions de formation. Le recrutement à opérer portera par conséquent sur le poste libéré par le salarié. Le SAE3, dispositif aidé par la Région, finance la formation du salarié qui change de fonctions, à la condition que ce changement permette le recrutement d’un demandeur d’emploi. Le CESA soulignait d’ailleurs dans son avis sur la Promotion Sociale (octobre 1999) l’intérêt du recours à la VAP qui participe pleinement à l’objectif de diversification et d’individualisation des parcours des salariés. La promotion des dispositifs et des aides aux entreprises qui privilégient la formation des salariés afin de leur permettre de progresser au sein de l’entreprise (notamment la VAP, le SAE3) devra être renforcée en sollicitant notamment l’implication des organisations professionnelles et partenaires sociaux. Les formations en apprentissage, en alternance ou alternées La réussite de ces diverses voies de formation repose tout d’abord sur la qualité du tutorat en entreprise : qualification, disponibilité, expérience professionnelle et pédagogique du maître d’apprentissage ou du tuteur,…. La qualité de l’alternance sera également fonction de l’articulation et de la complémentarité entre apports théoriques et pratiques. Une collaboration suivie entre organisme de formation et entreprise doit s’instaurer. Préconisés par le CESA dans son avis sur « l’insertion des jeunes en situation d’exclusion sociale et professionnelle » (juin 1997), les Actions de Formation Alternées (AFA) qui incluent une forte alternance en entreprise ont fait la preuve de leur efficacité. Les méthodes pédagogiques mises en œuvre privilégient l’élaboration d’un contenu de formation à partir de l’analyse préalable des situations de travail, et permettent d’adapter les actions de ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 19 formation précisément à la réalité de l’entreprise. Ces modalités supposent un accompagnement fort dans l’entreprise. Dans cette perspective, le CESA propose différentes actions complémentaires : - les actions de formation à forte alternance devraient être généralisées pour les publics en difficultés relevant du CFI. Dans ce cadre, le double tutorat, qui prévoit l’accompagnement et le suivi en entreprise par un formateur, doit être étendu ; - le temps consacré à la personne en cours de formation par l’entreprise, et tout particulièrement par la TPE/PME devrait, sous certaines conditions et évaluations, donner lieu à un soutien voire à une prise en charge financière. - parmi les mesures à l’embauche, le contrat d’orientation mérite d’être promu en direction de publics ciblés. - la palette des mesures existantes devrait être complétée par un stage de formation professionnelle ou un contrat en alternance réservé aux jeunes demandeurs d’emploi titulaires d’une formation générale de niveau IV visant prioritairement l’acquisition de gestes professionnels ; le contenu et la durée des parcours de formation proposés devraient être aménagés pour ce public pour lequel les fondamentaux généraux sont considérés comme acquis ; ces actions sont à cibler prioritairement pour les métiers déficitaires avec pour objectif l’obtention d’un diplôme professionnel. Le CESA demande à la Région, dans le cadre du Plan Régional de Développement des Formations Professionnelles des Jeunes, d’organiser une concertation élargie à l’ensemble des partenaires pour définir des actions prioritaires. Actions à moyen et long terme 2.2. Les contrats d’objectifs et autres mesures structurelles S’il revient d’abord à chaque entreprise de se préoccuper de la gestion prévisionnelle de ses effectifs, certaines actions ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 20 collectives peuvent néanmoins être entreprises à la faveur des groupements ou branches professionnelles dans la perspective de faciliter la résolution de difficultés de recrutement et d’impulser des évolutions structurelles par la formation. Différents financements sont mobilisables à cet effet : FSE, EDDF, ligne Contrats d’Objectifs. Les contrats d’objectifs constituent le stade le plus avancé d’une telle réflexion. La Région Alsace, acteur pivot de ce dispositif, s’est fortement mobilisée en faveur de l’élaboration de ces contrats. Ces efforts méritent d’être encore amplifiés, notamment pour les branches qui connaissent des difficultés de recrutement structurelles. La réflexion devrait également porter sur les métiers transversaux du tertiaire et des techniques industrielles afin de permettre l’élaboration de contrats d’objectifs de métiers transversaux. Une attention particulière doit être apportée à l’évaluation et au suivi de ces contrats par la mise en place d’indicateurs. 2.3. L’image des métiers à fort déficit de main d'œuvre et l’orientation C’est avant tout l’image des métiers à fort déficit de main d’œuvre qui doit être restaurée en améliorant leur condition d’exercice et donc leur attractivité. Ainsi les élèves choisiront leur cursus scolaire, professionnel technique ou général, davantage en lien avec les besoins identifiés du marché du travail. Ces derniers sont très évolutifs et nécessitent une grande adaptabilité des salariés. Une bonne formation générale de base est une condition nécessaire à cette exigence d’adaptation permanente demandée par les entreprises. Dans son avis sur le PRDF (novembre 1997), le CESA soulignait que « l'orientation relève non pas d'une action ponctuelle mais d'une démarche permanente qui associe, sans les confondre l'information et l'aide à la réflexion individuelle portant sur les choix d'orientation,... même si un renforcement du nombre de Conseillers d'Orientation Psychologues est nécessaire, il importe que les équipes éducatives (professeurs principaux,...) ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 21 s'impliquent dans la démarche d'éducation à l'orientation notamment par les projets d'établissement. Elles doivent aussi pouvoir s'appuyer sur une formation approfondie à l'élaboration et au suivi d'une démarche d'orientation, conduite en partenariat avec d'autres acteurs et avec les professions. » Ces propositions restent d'actualité. Le CESA demande que soient renforcés rapidement les outils et moyens nécessaires à leur réalisation. Face aux difficultés de recrutement actuelles, le CESA rappelle que « l'amélioration des outils de communication et la pertinence de l'information », constituaient des axes prioritaires de ses avis antérieurs sur l’orientation. A ce titre, le CESA propose d’étendre les actions suivantes, déjà expérimentées à diverses échelles (communes, bassins d’emploi,…) et à l’initiative de multiples partenaires (établissements scolaires, employeurs, branches professionnelles,…) : - favoriser toutes les occasions de contacts entre jeunes, familles et professionnels dans les entreprises, au plus près des postes de travail et des réalités professionnelles ; - rendre compte de la réalité des métiers et des besoins par des campagnes de promotion par branche ou secteur professionnel,… A ce titre l’initiative du CRA « la météo de l’emploi » mérite d’être renforcée ; - mener une campagne de communication dans la durée, du point de vue de l’identité visuelle et du message, sous l’égide du CRA et en direction du grand public, des parents et des jeunes ; - faire la promotion de filières de formation professionnelle qualifiantes qui valident à l’issue du CAP/BEP, une première aptitude professionnelle, et offrent l’accès à des diplômes de niveau 4 (Bac pro, BP, BTM) et de niveau III (BTS, BM,…) ; accompagner les professions dans cette démarche ; - promouvoir auprès des universités les métiers à orientations technologiques, en direction des étudiants ayant suivi les enseignements de 1ers cycles universitaires (DEUG). Il serait souhaitable que le projet régional « Cité des Métiers » prenne en compte ces différentes préoccupations. ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 22 Au vu de l’évolution de l’emploi, une analyse plus fine de la portée et de la pertinence des manifestations du type « FORUMS de l’emploi » paraît nécessaire. Le CESA propose qu’une évaluation soit réalisée par la Région, qui devrait s’affirmer davantage dans sa fonction de coordination. Une mission permanente de collecte de l’information et de veille sur les difficultés de recrutement et sur l’évolution des métiers devrait être confiée à l’OREF. Le CESA estime que l’ensemble des acteurs, et particulièrement les organisations professionnelles et partenaires sociaux, devrait être associé à cette démarche. 3. Les bassins d'emploi, espaces de concertation et de projet Si les difficultés de recrutement peuvent s’analyser globalement, certaines réponses sont à rechercher localement. Dans ses précédents avis, le CESA avait déjà souligné la pertinence de l’échelon territorial en tant que lieu d’analyse et de concertation. Les territoires, et tout particulièrement les bassins d'emploi, revêtent un caractère stratégique pour un certain nombre de leviers identifiés en matière de difficultés de recrutement : formation, mais aussi logement, transport, services … Si l’Alsace a connu un fort développement de la coopération intercommunale, ce premier niveau s’est révélé trop étroit pour certaines thématiques. La loi d’orientation du 25 juin 1999 place les « pays » au centre des politiques territoriales. Ils préfigurent des espaces de projet ou de coopération dans la perspective de renforcer la cohérence territoriale sur des espaces plus vastes. Le CESA propose que des plans d’action locaux soient élaborés par bassins d'emploi en faveur de l'emploi et de la formation, et que ces plans intègrent les aspects périphériques à l'emploi. Outre les collectivités territoriales, les usagers, les organisations professionnelles et partenaires sociaux et, selon le cas les services compétents de l'Etat et les organismes para-publics, devront y être associés. ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 23 3.1. Elaborer des plans d'action locaux en matière d'emploi / formation Un diagnostic, cadre de référence pour l’emploi local, constituera un préalable aux plans d'action locaux. Ceux-ci pourraient donner lieu à une contractualisation sur objectifs, chaque partenaire y apportant sa contribution en fonction de ses compétences dans le but de développer une réelle synergie des interventions et des moyens autour des actions retenues. Afin de repérer les besoins non satisfaits et d’analyser la nature des difficultés de recrutement, la production de données de référence territorialisées par l’ANPE et l'OREF s'avère indispensable. Des outils sont à mettre en place dans les bassins d’emploi en référence à ces plans. Ainsi en matière d'orientation la "Cité des métiers" devra, si elle se réalise, être mise à la disposition des acteurs concernés pour une utilisation adaptée aux orientations retenues. Le CESA rappelle que dans son avis sur la Promotion Sociale (octobre 1999) il avait proposé que « sur chaque territoire correspondant aux zones Emploi-Formation, un lieu d’accueil destiné aux salariés soit rendu visible… Les regroupements de type Maison pour l’Emploi et la Formation qui rassemblent différents services sont à encourager. La collaboration des municipalités et des structures intercommunales sera recherchée ». Par ailleurs, la Région devra veiller à ce que l’offre de formation professionnelle continue proposée (programmes demandeurs d'emploi jeunes et adultes, programme destiné aux salariés) réponde aux besoins identifiés par les plans d’action locaux. Le programme de formation en faveur des demandeurs d’emploi devrait être articulé avec les SIAE afin de construire des parcours individualisés vers l’emploi, notamment pour les personnes les plus en difficultés. Il est également nécessaire, pour les TPE/PME, d’organiser une réflexion autour des besoins en emplois et en formation pour proposer des outils adaptés (type SAE3). ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 24 Le CESA propose que, du fait de sa compétence en matière de formation, la Région, avec l’appui de ses animateurs territoriaux, soit le pivot de cette concertation. 3.2. Etendre les plans d'action locaux à des aspects périphériques à l'emploi Parmi les aspects périphériques ayant une forte incidence sur l’emploi, la mobilité des demandeurs d'emploi, le logement et les services de garde d'enfants, pour lesquels les collectivités disposent de leviers d'action, ont été plus particulièrement relevés. Le CESA propose que ces aspects fassent partie intégrante des plans d'action locaux. Les déplacements domicile- travail Les transports devraient faire l’objet d’une réflexion dans chaque bassin d’emploi et plus particulièrement dans les zones rurales qui connaissent des carences plus affirmées en matière de transports collectifs. Si les efforts de la Région et des Départements en terme de maillage et de cadencement des transports collectifs (ferroviaires et routiers) doivent être poursuivis, d’autres aspects se révèlent également déterminants : création et sécurisation de parkings-relais, aménagement des gares, … Le CESA propose plusieurs pistes d’action en vue de favoriser le transport : - l’instauration d’un « chèque transport » à financement mutualisé, lorsque le réseau de transport collectif est inexistant ou que son organisation ne permet pas au salarié de l’utiliser. Cette aide pourrait être accordée aux salariés disposant de revenus proches du SMIC.; - davantage de cohérence est à rechercher entre les autorités organisatrices -les collectivités locales- dans l’accès aux différents modes de transport et dans les politiques tarifaires. Le développement du titre de transport multimodal doit être encouragé. L’instauration en région Alsace d’un système de tarification intégré de type « carte orange » doit être mis en place à court terme ; - le covoiturage présente un intérêt pour des trajets significatifs ; il devrait être soutenu par une promotion sur les lieux de travail et la création de parkings-relais ; ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 25 - les expériences facilitant les déplacements des personnes en difficultés qui ont accédé à un stage ou à un emploi sont à étendre ; - les formules de transports collectifs légers, de type transports à la demande, qui offrent une souplesse horaire et des délais d’intervention courts, doivent être développées. Le logement et la mobilité inter-bassins d’emploi Dans une logique d’aménagement du territoire, il importe que le développement d’activités hors des grandes agglomérations s’accompagne d’une offre de logements adéquate. En outre, il semble opportun de mieux faire connaître l’aide à la location par l'avance des dépôts de garanties et la sécurisation des loyers, actuellement en place dans le cadre de la participation des employeurs à l'effort de construction, et des fonds départementaux de solidarité logement. Les services de garde d’enfants La mise en place de ces services doit s'appuyer sur des diagnostics locaux. De telles initiatives devront être stimulées par des financements appropriés. Les études préalables pourraient être prises en charge par la Région au titre de son intervention en matière d’aménagement du territoire, les Départements, les services de l’Etat et les Caisses d’Allocations Familiales, étant compétents pour l’investissement et le fonctionnement. Le CESA demande que des services de garde à horaires d’accueil compatibles avec les horaires de travail décalés soient expérimentés dans le respect de l’enfant. Ces services devraient par ailleurs offrir des possibilités d’accueil sans délais d’attente, même si la durée en est limitée, afin de permettre une réactivité plus grande des demandeurs d'emploi. Le « chèque garde », aide destinée aux personnes relevant de minima sociaux et ayant accédé à un emploi, mérite d’être mis en place et financé par voie de mutualisation. ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 26 CONCLUSION Au cours des auditions qui ont jalonné l’élaboration de cet avis, un constat s’est imposé : l’analyse des difficultés de recrutement procède d’une grande complexité. Le diagnostic a mis en évidence des raisons diverses et multiples. Aussi, les leviers d’action à mobiliser ne sauraient-ils être ni simples, ni à effet immédiat. C'est sans aucun doute la conjonction des efforts et des initiatives qui apportera les réponses attendues. L’évolution démographique laisse supposer que les difficultés de recrutement pourraient se poursuivre, voire s’accentuer ; l’anticipation par une réflexion prospective sur le Bassin Rhénan, qui n’existe pas à l’heure actuelle, s’impose pour tous les partenaires. Les propositions du CESA s’articulent autour de trois idées forces : - améliorer la mise en relation entre offre et demande, en mettant l’accent sur les modalités de recrutement et les conditions d'emploi, - considérer la formation comme un outil stratégique pour l'entreprise et pour le salarié dans la perspective d'élever les qualifications et les compétences, - s’attacher à élaborer des plans d'action locaux à l'échelle des bassins d'emploi aujourd'hui, des "pays" demain, comme support de l'intervention régionale. Pour les métiers rencontrant des difficultés de recrutement importantes, la situation présente exige la mise en œuvre d’un véritable plan d’urgence reposant sur : - le développement de stages de formation professionnelle ou de contrats d’alternance pour les jeunes titulaires d’une formation générale de niveau IV, visant prioritairement l’acquisition de compétences professionnelles, - une action sur l’image des métiers par une forte opération de communication sous l’égide du Conseil Régional d’Alsace. ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 27 Le CESA a constaté que face aux difficultés et demandes exprimées, de nombreux outils et mesures existent mais sont insuffisamment connues. Un effort collectif de la part des organisations professionnelles et partenaires sociaux et des services publics devra porter dans les mois à venir sur la promotion et les conditions de mobilisation des dispositifs auprès de ceux qui éprouvent des difficultés à recruter ou à être embauchés. Le CESA demande à la Région de prendre l'initiative de réunir l'ensemble des acteurs concernés par les difficultés de recrutement (organisations professionnelles et partenaires sociaux, Etat, collectivités) dans le cadre d'une conférence régionale annuelle pour examiner les suites réservées aux propositions de cet avis. Il souhaite également que les partenaires sociaux engagent des négociations pour trouver des réponses aux problèmes identifiés par métier ou par branche professionnelle afin de surmonter les difficultés de recrutement. L’Alsace est à la conjonction de trois marchés du travail, tant par l’implantation d’entreprises que par le travail frontalier. Demain, les évolutions démographiques du bassin d’emploi transfrontalier transformeront les données actuelles. Il est nécessaire dès aujourd’hui, pour les responsables des systèmes de formation (initiale et continue) en Alsace, d’impulser une réflexion sur la formation pour permettre à l’économie alsacienne d’aborder le XXIème siècle et son marché transfrontalier. ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 28 GLOSSAIRE AFA : Actions de Formation Alternées AGEFIPH : Association de Gestion du Fonds pour l’Insertion Professionnelle des Personnes Handicapées ANPE : Agence Nationale pour l’Emploi BEP : Brevet d’Etudes Professionnelles BM : Brevet des Métiers BP : Brevet Professionnel BTM : Brevet Technique des Métiers BTP : Bâtiment Travaux Publics BTS : Brevet de Technicien Supérieur CAP : Certificat d’Aptitude Professionnelle CFI : Crédit Formation Individualisé EDDF : Engagement de Développement de la Formation EI : Entreprises d’Insertion EMT : Essai en Milieu de Travail ENCP : Evaluation du Niveau des Compétences Professionnelles ETT : Entreprise de Travail Temporaire ETTI : Entreprise de Travail Temporaire d’Insertion FSE : Fonds Social Européen GPEC : Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences ML/PAIO : Mission Locale / Permanence d’Accueil d’Information et d’Orientation NTIC : Nouvelles Techniques d’Informations et de Communication OPCA : Organisme Paritaire Collecteur Agréé OREF : Observatoire Régional Emploi-Formation PLIE : Plan Local pour l’Insertion et l’Emploi RMI : Revenu Minimum d’Insertion SAE3 : Stage d’Accès à l’Entreprise 3 SIAE : Structures d’Insertion par l’Activité Economique VAP : Validation des Acquis Professionnels ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Les difficultés de recrutement en Alsace, aujourd’hui et demain - Avis CESA n°7-2000 – Novembre 2000 29