` Gagner sa vie en faisant du sexe, c`est romantique.
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` Gagner sa vie en faisant du sexe, c`est romantique.
Témoignage de MARIE, entraîneuse dans un bar à champagne, 28 ans ‘‘ Gagner sa vie en faisant du sexe, c’est romantique. ’’ ‘‘J e suis salariée comme serveuse quatre nuits par semaine, payée au Smic, soit environ 700 euros bruts. On travaille de 23 heures jusqu’à ce qu’il n’y ait plus personne, 6 heures du matin, voire plus tard s’il reste des clients. Chaque jour, on se partage 20 % des ventes de champagne entre les filles qui ont fait la nuit. Le prix des bouteilles va de 200 à 1 000 euros. Aujourd’hui, il y a moins de clients à cause des contrôles d’alcoolémie. J’ai commencé par hasard, je suis entrée dans le bar par curiosité et on m’a proposé d’y travailler. Je n’aurais jamais cru que je serais capable de faire ça, mais je me suis aussi promis que si je ne le sentais pas, j’arrêterais tout de suite. Finalement, c’était génial, pas du tout glauque, les clients et les serveuses m’ont guidée. On fait des câlins aux clients, on les masse à travers le pantalon, mais il n’y a pas de prostitution. La patronne sait qu’il est bien trop dangereux de faire des passes dans le bar à cause de police et de la loi. Une fille a été licenciée pour avoir fait des fellations dans les toilettes. Une fois que les clients ont couché avec l’une des filles, ils ne reviennent plus. La fille, c’est la carotte dans ce genre d’endroit. Tout se joue sur le désir. Il y a des habitués, des réguliers, de bons clients qui finissent à poil sur la piste de danse. Les limites sont floues, c’est ça qui est intéressant. Aujourd’hui, je suis blindée au niveau relationnel et, après dixhuit mois, j’ai envie de passer à autre chose. On a souvent des sollicitations, les mecs se font beaux pour venir au bar, on nous propose de l’argent, jusqu’à 500 euros pour aller à l’hôtel. Et puis, un jour, j’ai dit oui à un client que je connaissais. Je le sentais bien, on s’est amusés. Le matin, le client dormait, j’ai pris mon argent et je suis partie. En passant devant l’hôtel de police, je leur ai fait un beau pied de nez imaginaire. J’ai fait deux passes en dix-huit mois. Escort-girl, c’est mieux que serveuse Maintenant, je veux devenir escort-girl. Je n’ai jamais dépassé 2 000 euros de salaire en tant que serveuse, dans le meilleur mois, alors que ce boulot est quand même crevant. On boit, on fume... Être escort-girl me permettra de gérer ma vie, de travailler sans patron, mais ce qui m’embête le plus, c’est le jugement des autres, ma famille. Je ne ferai pas ça toute ma vie, parce que c’est usant. C’est un boulot qui n’est pas donné à tout le monde, même si c’est une chance de pouvoir le faire. Cela va me permettre d’économiser et de reprendre mes études sans être au RSA, comme avant. Pour le statut, j’ai un client qui est comptable et qui me tuyaute pour être en règle. Pour l’instant, je m’organise. J’achète des préservatifs, des trucs pour prendre soin de ma chatte, je vais faire des photos pour mon annonce Internet. Tout ça coûte de l’argent, et je vais commencer par utiliser un site gratuit. Puis, si ça marche, j’irai sur du payant. Mon objectif, aujourd’hui, c’est de me sécuriser au maximum. Je ne crains qu’une seule chose, l’agression. Pour cela, je prends des conseils auprès de filles qui sont escort-girls. Gagner sa vie en faisant du sexe, c’est romantique, je trouve ça assez beau. Faire l’amour, c’est que du plaisir, et moi, je cherche à vivre bien. Et si je fais dix passes par mois, ça devrait suffire. » Propos recueillis par Adélaïde RobaulT Photo : Ulrich Lebeuf/Myop