Été 2012

Transcription

Été 2012
Un regard chrétien sur le monde actuel
Qu’est-ce que
l’Homme?
Été 2012
Volume 29 - Numéro 3
•
Dans
ce
numèro
•
Dossier : Qu’est-ce que
l’Homme?
Le Lien est un magazine chrétien
publié quatre fois par an. Interdénominationnel Il vise à édifier, à
stimuler la réflexion sur la vie chrétienne dans notre monde actuel,
et à être un canal pour faciliter la
diffusion de l’information au sein
de la communauté évangélique
québécoise. Il est commandité
par la CCEFM et ses partenaires et
4•
Dieu créa l’homme à son image
9•
L’image de Dieu en l’homme
dacteur en chef : Jean Biéri; Comité
de rédaction : Joëlle Basque, Wilner Cayo, Robert Dagenais, Soula
Isch, Jean-Calvin Kitata, Noémie
Le propre de l’humain
14•
Les dangers de la théorie du
genre
min. Illustration de la Page couverture: Jordi Sampere Abonnement :
Canada, 16 $ par an; Étranger, 20
$ par an.
Antoine Nouis
Alain Ledain
Parole vivante
16•
Leclerc, Richard Lougheed, Marc
Paré. Graphiste: Lucie Beauche-
Philippe Malidor
11•
soutenu par les lecteurs.
Le Lien est édité à Montréal. Ré-
Wilner Cayo
Quand tu seras vieux
Soula Isch
Vie chrétienne
18•
Déjeuner de prière à Montréal 4e édition
Mireille Mirambeau
Adresser toute correspondance à : Le
Lien, 4824 Côte-des-Neiges Suite
301, Montréal (Québec) H3V 1G4,
Canada. Tél. : (514) 331-0878 poste
222. Courriel : [email protected]
Téléc. : (514) 331-0879. ISSN 1716-
Actualités
20•
Glanures
22•
J’ai lu pour vous!
23•
Convention des Frères
mennonites
5016
2
François Gougoux
Richard Lougheed
Le Lien
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Éditorial
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Éditorial
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Entre poussière et
souffle
La singularité de l’humain est aussi une solitude
et le récit précise : « Il n’est pas bon pour l’humain
d’être seul.» La grande question est donc de
savoir ce qui va mettre fin à cette solitude fondamentale. La première tentative de Dieu pour
mettre fin à la solitude de l’humain est la création
des animaux que Dieu conduit à l’humain pour
qu’il les nomme, mais c’est un échec car l’animal
est trop éloigné de l’humain. Alors Dieu crée la
différence sexuée en séparant l’humain en deux
pour forger un homme et une femme. C’est
dans l’altérité homme-femme que l’humain
est invité à dépasser sa solitude fondamentale
et à relever le défi fondateur de notre humanité qui est l’accueil de l’autre dans sa différence.
Antoine Nouis,
directeur de la
rédaction du
magazine protestant Réforme
L’ennemi de l’humain et de Dieu - le serpent
- tente le couple pour qu’ils mangent le fruit
qui les ferait devenir comme les dieux. Être
comme des dieux réveille le vieux désir caché
en chacun de vouloir posséder les gens et les
choses, devenir le maître du bien et du mal.
En écrivant cette tentation sous les traits d’un
fruit qui a été mangé, les anciens ont voulu
signifier que la tension entre le bien et le mal
est devenue une réalité interne à l’humain.
Notre relation au bien et au mal est ambiguë. Je
ne choisis pas le bien et le mal comme je choisirais la couleur de ma cravate, je suis traversé par
des pulsions de bien et de mal. Comme le dit
l’apôtre Paul : « Je ne fais pas le bien que je veux,
mais je pratique le mal que je ne veux pas » (Rm
7,19), ce qui est une manière de confesser que
l’humain n’est pas transparent à lui-même. Le
désir de vouloir être Dieu, l’orgueil et la convoitise, la maîtrise du bien et du mal sont en
l’humain et le travaillent de l’intérieur plus qu’il ne
se l’avoue à lui-même. Une fois ces définitions
posées, l’histoire biblique peut commencer...
-
L
’humain est créé à partir de la
poussière du sol, puis Dieu lui insuffle son souffle vital. Dans la
Genèse, le souffle vital est ce qui
distingue l’humain de l’animal.
Dans la suite du chapitre cette distinction est
une question de nombre: l’humain est créé
être unique alors que les animaux sont créés
espèce. Dieu crée les girafes, les baleines et les
pingouins mais il crée l’humain. La création de
l’humain comme être unique fonde le dogme
de l’humanisme qui affirme l’unité entre tous
les hommes... La poussière est ce qu’il a de
commun avec les animaux et nous sommes
invités à prêter attention à l’animal qui est en
nous: l’humain a besoin de manger et de boire,
de se protéger et de s’abriter, de dormir et de
se reproduire. Comme le disait Martin Luther
King : « La religion s’occupe à la fois du ciel
et de la terre… Toute religion qui fait profession de s’occuper de l’âme des hommes sans
s’occuper des taudis auxquels ils sont condamnés, des conditions économiques qui les étranglent et des conditions sociales qui les mutilent
est une religion aussi stérile que poussière. »...
(Extrait d’un article paru dans Réforme).
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Dossier
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L’énigme de
«la personne»
humaine
demeure une question brûlante. Elle
l’est davantage
dans un contexte
postmoderne où
le déracinement
de l’identité ne
fait que s’accentuer.
Wilner Cayo
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Dossier
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Dossier
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Dossier
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Dieu créa
l’homme à
son image
Wilner Cayo.
pasteur et chargé de cours à
l’École de Théologie Évangélique
de Montréal / Institut Biblique VIE
P
our
l’Évangélique,
la Bible est la source
normative pour sa
compréhension
de
l’humain. Au cœur de
cette compréhension de l’humain
se trouve la doctrine de l’imago dei
ou image de Dieu. Reprenant le
théologien évangélique H. Bavinck,
Paul Wells affirme que «l’essence de
la nature humaine est d’être créée à
l’image de Dieu»1 . Selon ce dernier,
parler de l’image de Dieu, c’est «essayer d’élucider ce qui est constitutif
de l’humanité en tant que telle».
Si Genèse 1 affirme sans ambages
que l’humain est créé à l’image de
Dieu, il reste toutefois avare de détails sur l’interprétation d’une telle
déclaration: Dieu dit: «Faisons
l’humain à notre image, selon notre
ressemblance, pour qu’il domine sur
les poissons de la mer, sur les oi-
seaux du ciel, sur le bétail, sur toute
la terre et sur toutes les bestioles qui
fourmillent sur la terre.» Dieu créa
l’humain à son image; il le créa à
l’image de Dieu; Il les créa homme
et femme. Dieu les bénit et Dieu leur
dit: Soyez féconds, multipliez, remplissez la terre, et l’assujettissez, et
dominez sur les poissons de la mer,
sur les oiseaux du ciel, et sur tout animal qui se meut sur la terre (Gn 1,2628). Genèse 5,1-3 rapporte qu’Adam
engendra un fils à sa ressemblance,
selon son image. Selon Genèse 9,6,
l’image établirait l’inviolabilité de la
vie humaine. Le Psaume 8 précise que
l’humain a été créé de peu inférieur à
Dieu qui l’a couronné de gloire et de
magnificence, lui octroyant la domination sur le reste de la création.
Malgré les débats parmi les exégètes sur des détails au niveau de
l’interprétation des textes, les spécia-
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Dossier
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Dossier
La création de l’homme par Michel Ange
listes conviennent des points suivants jugés importants: Les mots image
(selem) et ressemblance (demut) sont
essentiellement des synonymes2.
Ils indiquent que les êtres humains
ressemblent à Dieu sans préciser la
nature de cette ressemblance. Les
prépositions en lien avec les termes
image et ressemblance sont interchangeables. La plupart des exégètes
les traduisent par «en», «d’après»;
certains préfèrent les traduire par
«comme», argumentant que les êtres
humains sont créés comme image
de Dieu plutôt que selon l’image de
Dieu ou d’après l’image de Dieu.
Tous les êtres humains, femme ou
homme, portent l’image de Dieu.
L’image est associée à l’idée de do-
mination (Genèse 1,26.28 ; Psaumes
8,6) et de dignité puisque l’humain
est la seule créature qui résulte d’une
délibération divine (Genèse 1,26),
à qui le créateur parle directement
(Genèse 1,28), et dont il est dit: «il a
été fait de peu inférieur à Dieu» (Ps
8,5). L’image de Dieu dans l’humain
ne s’est pas effacée avec la Chute.
Le Nouveau Testament mentionne
aussi l’imago dei. Le second Adam
serait lui-même la véritable image
de Dieu. L’auteur de l’épître aux
Hébreux (1,3) précise que Jésus, le
Christ, est l’empreinte de la personne
divine. Paul l’appelle l’image du Dieu
invisible. En Jn 14,9 et 12,45, Jésus
déclare: «Quiconque m’a vu a vu
le Père». La pleine participation à
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Dossier
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l’image de Dieu passerait par une incorporation au Christ et une conformité de la vie du croyant au Christ.
L’imago dei devient une réalité dynamique dans laquelle le chrétien, via
l’Esprit, se voit transformé de gloire
en gloire (2 Cor 3,18). Il est invité à
se dépouiller du «vieil homme» pour
revêtir «l’homme nouveau qui se renouvelle, dans la connaissance, selon
l’image de celui qui l’a créé» (Col
3,10). L’imago dei est aussi une réalité
eschatologique, l’espérance finale du
croyant appelé à être semblable à
l’image du Fils de Dieu (Rm 8,29),
réalité qui n’est pas encore pleinement manifestée; «lorsque cela sera
manifesté, nous serons semblables
à lui [i.e, Christ], parce que nous le
verrons tel qu’il est» (1 Jn 3,2). «Et de
même que nous avons porté l’image
du terrestre, nous porterons aussi
l’image du céleste» (1 Cor 15,49).
Ainsi pour ce qui relève du Nouveau
Testament: Christ est l’image de Dieu.
Les humains participent pleinement
à l’image de Dieu dans la mesure
où leur vie se conforme à Christ.
L’image de Dieu est une réalité dynamique et communautaire enracinée dans la rédemption. Puisque la
totale conformité à Christ attend l’âge
à venir, l’image se présenterait aussi
comme une réalité eschatologique.
Le concept de l’imago dei s’appliquerait
à tous les humains, selon l’Ancien
Testament, et cette image est appelée à être restaurée en Christ selon
le Nouveau Testament. L’histoire
des interprétations de l’imago dei
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Dossier
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dévoile de fortes divergences sans
que ne soient rendus impossibles
des rapprochements ou conciliations. Trois grandes interprétations
regrouperaient les différentes compréhensions évangéliques de l’imago
dei. La première insiste sur une conception substantialiste; elle est dite
ontologique; elle comprend l’image
en termes de caractéristiques constitutives de la nature humaine ou à
l’intérieur de la nature humaine. La
seconde appréhende l’image selon
une dimension relationnelle – relations de l’humain avec Dieu, relations
des humains entre eux et relations de
l’humain avec son environnement. La
troisième interprétation est dite fonctionnaliste ou vocationnelle insistant
sur le mandat donné à l’humain. Les
trois grandes compréhensions évangéliques de l’image ne s’excluent pas
les unes les autres mais permettent
d’appréhender l’articulation de cet
élément important de la pensée évangélique et de ses différents accents.
I- La compréhension
substantialiste ou ontologique de l’image
La compréhension substantialiste fut
l’une des plus dominantes du protestantisme depuis le 16e siècle jusqu’à
aujourd’hui. Selon elle, l’imago dei référerait à un constituant inaliénable
et distinctif de la nature humaine, un
don spécial de Dieu à cette créature.
Deux positions complémentaires
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Dossier
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Dossier
émanent de ce point de vue. La
première assimile l’imago dei au spirituel dans l’humain. Des théologiens
évangéliques, abordant la notion
de l’imago dei, se sont intéressés aux
analogies entre Dieu et l’humain sans
taire l’aspect des différences entre le
Créateur et la créature. Dans cette
recherche d’analogies, au nom de
l’incorporalitas Dei, le point commun
entre Dieu et l’humain serait la participation à l’esprit. L’interprétation
par la spiritualité remonte à Philon
et au livre judéo-grec de la Sagesse.
Elle a énormément nourri la réflexion des Pères de l’Église, s’est raffinée dans les conceptions de Saint
Augustin, de Saint Thomas et des
Réformateurs de façon plus limitée.
Par exemple, Calvin, l’un des plus illustres représentants protestants du
courant spirituel affirme que l’image
de Dieu en l’homme se retrouve dans
ses attributs spirituels et rationnels,
et que le corps n’y participe point.
Une deuxième position de la conception substantialiste plaide pour la
dimension morale de l’image en lien
avec la notion de justice originelle qui
serait perdue en Adam mais retrouvée en Christ. Le renouvellement de
l’humain, selon la lecture de Calvin,
implique un renoncement à l’ancien
pour le revêtement de celui qui se renouvelle selon l’image de celui qui l’a
créé. Le renouvellement et la restauration de l’image épousent ainsi une
dimension essentiellement éthique et
morale. La tradition calviniste soutient qu’après la Chute, l’imago dei a
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Dossier
•
été tellement corrompue que ce qui
en reste n’est qu’une horrible déformation mais non une disparition;
l’humain demeure un être à l’image
de Dieu; mais sa volonté et sa raison
s’éloignent de Dieu, étant viciées par
le péché. Il est incapable de se sauver
lui-même; il ne peut, sans la grâce efficace, connaître Dieu, choisir la vérité
et le bien ultimes. D’où l’accentuation
du sola gratia de la Réforme.
II- L’interprétation relationnelle de l’image
Karl Barth et Emile Brunner définissent l’imago dei dans une logique de
responsabilité relationnelle avec Dieu
et les autres créatures plutôt que de la
fonder sur des capacités supérieures
telles que la raison ou la moralité
que seul l’humain posséderait. Contre la compréhension substantialiste
de l’image, Brunner soutient que
la frontière entre les humains et les
animaux ne saurait reposer sur une
différence d’ordre biologique ni dans
les capacités rationnelles de l’humain.
Même s’ils n’ont pas toujours partagé
les mêmes convictions théologiques
quant à certaines spécificités, Brunner et Barth ont décrit l’imago dei
comme relevant systématiquement
de la relation et de la responsabilité
plutôt que de l’essence ou de la substance. Pour Barth, « l’image de Dieu
n’est pas une qualité de l’homme.
[…]. Elle ne consiste en rien en ce
que l’homme est ou fait ». Nous ne
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Dossier
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suivrons pas Brunner et Barth dans
toute leur élaboration ni ne serions
d’accord avec tout ce qu’ils avancent. Nous notons néanmoins leur
précieuse intuition d’une compréhension relationnelle de l’imago dei3.
Un point à souligner dans la compréhension relationnelle de l’image
de Dieu en l’homme est la différenciation sexuelle. La Genèse mentionne que l’humain fut créé mâle
et femelle (Gn 1,27). Excluant le
mythe de l’androgynie primitive, le
texte biblique passe au pluriel pour
ne laisser aucun doute: «il les créa»;
la dualité des sexes implique une
pluralité des personnes. L’homme
et la femme participent du privilège
de l’image, confirmant l’exclamation
d’Adam en saluant en Ève son alter ego, os de ses os et chair de sa
chair. L’idée d’Aristote qui jugeait
la femme d’une nature différente,
et inférieure est étrangère à la Genèse, malgré sa reprise dans l’histoire
de l’Église. La Genèse, dans son
récit, ne pouvait être plus claire:
c’est le genre humain (la femme et
l’homme) qui est à l’image de Dieu.
L’humain, image de Dieu, est dès
son origine un Mitsein, un être-avec,
dont la vie n’atteint sa plénitude que
dans une dimension communautaire. L’unicité de l’humain n’est pas
solitude, elle inclut la différence. Il en
est de l’image comme de la source.
Le Dieu créateur délibère avec son
Esprit. Il a suscité devant lui un autre semblable, un vis-à-vis analogue,
l’humain, son image. Il y a une analo-
Dossier
•
Dossier
gie certaine entre la non-solitude de
Dieu et la structure communautaire
de l’humanité; une communauté qui
s’élargit sur deux axes: horizontalement dans la relation maritale et les
relations avec le prochain, et verticalement pour la parentalité. C’est
à partir de la dualité du genre que
la filiation se conçoit; procréation et
sexualité seraient liées dans une anthropologie théologique évangélique.
III- La compréhension
vocationnelle et fonctionnelle de l’humain
La position fonctionnaliste avance
l’hypothèse que l’imago dei n’avait
pas besoin d’être clarifiée pour les
premiers lecteurs; les idées qui s’en
émanaient étaient généralement
connues et partagées par plusieurs
autres cultures du Proche-Orient
ancien. Le concept «image de Dieu»
qui est utilisé en Genèse trouve son
arrière-plan dans le Proche-Orient
ancien dont les rois mésopotamiens,
hittites, assyriens, babyloniens et
égyptiens étaient considérés comme
images des dieux particuliers qu’ils
représentaient. Si la Genèse reprend
le motif de l’image, c’est entre autres
pour «réagir contre l’idéologie du
pharaon image de Dieu, image vivante d’Amon […], contre la confiscation par quelques-uns du privilège
de l’homme comme tel». Tous les
humains sont vicaires de Dieu, vicesrégents du grand Roi, des représen-
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Dossier
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tants appelés à régner sur terre sous
la direction divine, et qui préparent la
voie pour le règne effectif de Dieu.
Ainsi, l’image, dans cette troisième
conception désigne un office royal,
la vocation de tous les êtres humains,
élus pour être des représentants de
Dieu et ses agents dans le monde,
investis de l’autorité nécessaire pour
prendre soin et partager les ressources de la planète selon le plan
de Dieu. Notons que le thème de
l’autorité déléguée à l’humain dans
la Genèse est clairement développé dans le contexte immédiat de la
déclaration sur l’image (Gn 1,26-28).
IV- L’humain, une
créature non banale
Une anthropologie théologique
évangélique biblique estimerait que
la paléontologie, la biologie et les
sciences connexes qui accentuent la
continuité entre l’humain et le reste de
la création n’ont pas tort. Ces sciences,
toutefois, n’appréhenderaient qu’une
partie de la vérité sur l’humain. Pour
l’évangélique, l’Écriture lève aussi le
voile sur la singularité de l’humain,
une singularité qui ne peut être
réduite à sa matérialité. Si l’animalité
de l’homme est indéniable, dans le
sens où il est difficile d’affirmer une
aptitude particulière qui différencierait l’humain des animaux, nous
constatons toutefois que nous sommes dotés d’un ensemble d’aptitudes
dont la combinaison aboutit à un
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Dossier
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niveau de conscience et à des capacités mentales sans pareils. Il serait
donc plausible de nous interroger
sur l’émergence d’un tel niveau de
conscience et de capacités mentales
uniques. Fukuyama, discutant de la
spécificité humaine, reprend un argument de Jean-Paul II qui corrigeait
l’encyclique Humani generis de Pie XII.
Ce dernier reconnaissait l’évolution
darwinienne comme une hypothèse
sérieuse mais encore à être prouvée.
L’argument de Jean-Paul II, que des
évangéliques intégreraient, veut que
l’Église reçoive l’opinion alléguant
que l’humain descendrait d’animaux
non-humains et qu’il y eut au cours
de ce processus une intervention de
Dieu créant un bond ou saut ontologique – « ontological leap » - qui
fait de l’humain actuel ce qu’il est.
Si rien ne peut, a priori, d’un point
de vue évolutionniste, expliquer
l’émergence de la conscience, une anthropologie théologique évangélique
y verrait un acte divin produisant
ce saut ontologique jusqu’alors non
nécessaire – La création de l’humain
n’étant pas obligatoire – mais voulu
et décrété souverainement par Dieu.
Mais même si l’hypothèse de cet acte
spécial de Dieu est digne de mention,
l’évangélique ne trouve pas de base
biblique pour en faire le fondement
de l’unicité de l’humain, malgré ce
qu’il pourrait en tirer comme intuitions. Il n’existe tout simplement pas
de support biblique véritable pour
une compréhension substantialiste
de l’image ou de la nature humaine.
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Dossier
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Dossier
Si les sciences contemporaines établissent une continuité entre l’humain
et les animaux, le statut de créature à
l’image de Dieu, d’un point de vue
biblique, demeure l’apanage exclusif
de l’humain. Les traditions juives
et chrétiennes sont généralement
d’accord sur ce point. L’humain ne
serait pas fondamentalement différent de l’animal au niveau de sa
nature, biologiquement ou intellectuellement. Il le serait par contre
par rapport à son élection divine;
il est une créature qui est dans une
position de relation spéciale avec
Dieu et avec le reste de la création.
Et pour vivre cette relation, il aurait
été doté de capacités biologiques
et intellectuelles supérieures. Mais
son caractère unique n’est pas fondé sur ces capacités. Elle est plutôt
fondée sur son élection divine et
la vocation que Dieu lui confère.
De fait, la compréhension vocationnelle / fonctionnelle de l’imago dei
sous-entend une dimension relationnelle et reconnait l’importance
des caractéristiques essentialistes de
l’humain. Mais elle n’est pas fondée
sur ces caractéristiques et ne se trouve
donc d’aucune façon menacée par
d’éventuels découvertes ou résultats
prouvés ou non, en cognition animale, qui révéleraient l’existence de
certaines capacités de raison et de
moralité chez des animaux. Dieu aurait élu une lignée qui serait l’homo
sapiens, lui insufflant son souffle et
faisant de lui le dépositaire de son
image, avec la vocation d’exercer son
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Dossier
•
règne sur la terre. Dans cette logique,
on se désintéresse des traits essentiels particuliers à l’humain pour
définir l’humain. Cette compréhension non-essentialiste permet la
non-discrimination entre les humains, qu’ils souffrent de déficience
mentale ou non, qu’ils soient plus
ou moins gratifiés physiquement
ou intellectuellement, qu’ils soient
moraux ou immoraux. Puisqu’ils
font partie de la lignée généalogique
homo sapiens, ils sont humains
et sont dépositaires de l’imago dei
au nom de l’élection divine et de
leur vocation. Via cette vocation,
l’humain est appelé à refléter ce
Dieu dans sa relation devant et avec
les autres créatures avec lesquelles
il partage le même espace. Le point
de vue vocationnel et fonctionnel a aussi le mérite de ne pas imposer au texte biblique une lecture
émanant d’anthropologies extrabibliques. Il voit dans l’humain un
être qui s’implique dans le monde,
s’accomplissant en s’investissant
pour le plus grand bien-être des autres, remplissant son mandat selon
l’exemple du Christ, s’actualisant
pleinement dans une vie de service.
1. Paul WELLS, « À la recherche de
l’image de Dieu … La théologie d’un
paradigme perdu », Hokma, 80/2002,
p. 13.
2. G. W. BROMILEY, « Image », op. cit.,
p. 803.
3. Voir Blocher, Wells et Sands pour
une appréciation et une critique
de l’élaboration de Barth et Brunner
d’une anthropologique biblique dans
une compréhension relationnelle.
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Dossier
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L’homme a
été créé à la
ressemblance
de Dieu. La dignité fondamentale de l’humain
est posée dans le
premier chapitre
de la Genèse; elle
ne lui sera jamais
ôtée avant d’être
pleinement accomplie en
Christ.
Dossier
Dossier
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Dossier
•
L’image de Dieu
en l’homme
Philippe Malidor,
journaliste
U
Philippe
Malidor
•
ne jeune fille de
treize ans violée, assassinée et brûlée
par un jeune homme
de dix-sept ans; un
gosse de trois ans asphyxié par
son père dans un lave-vaisselle;
une journaliste violentée en
Égypte par une horde déchaînée.
Autant
d’exemples
parmi
d’autres dans l’actualité récente
qui nous font douter que homo
sapiens soit créé, comme le dit
l’Écriture, « à l’image de Dieu ».
Le père Édouard Cothenet, professeur honoraire de l’Institut
catholique de Paris, et le professeur Paul Wells, doyen et professeur de théologie systématique
à la faculté Jean Calvin d’Aixen-Provence, trouvent nécessaire de préciser ce que cette
expression recouvre, dans une
tradition qui est très allergique
aux images: « Dès son premier
chapitre, l’Écriture nous dit que
l’homme est créé à l’image de
Dieu. Cette affirmation, replacée dans son contexte historique
et culturel, est assez étonnante,
remarque Paul Wells. Quel en
est le sens? Il s’agit évidemment d’un usage métaphorique,
car l’homme n’est pas semblable
à une reproduction de Dieu en
modèle réduit, comme celle de
César sur la monnaie romaine. »
« Dans un monde peuplé d’images
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Le Lien
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Dossier
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Dossier
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Dossier
Quelle que soit sa situation, l’homme reste créé à l’image de Dieu
divines, l’interdit des représentations caractérise le judaïsme,
souligne Édouard Cothenet. Or,
en présentant l’homme comme
image de Dieu, la Genèse inculque le respect auquel tout
homme a droit en lui-même,
quelle que soit sa naissance.»
Une fois affirmée, cette dignité
ne donne cependant pas le droit
à l’homme de faire n’importe
quoi: elle implique des devoirs
et le sens de la modération: « Au
couple originel, précise le père
Cothenet, Dieu accorde la suprématie sur tous les animaux.
Mais le pouvoir doit être exercé
dans un esprit de douceur, signi-
10
fié dans un premier temps par
le régime végétarien. La consommation de la viande ne sera
autorisée qu’après le Déluge.»
Déchu mais rendu
digne
«Dans les chapitres suivants de la
Genèse, nous assistons à une dégradation constante de l’humanité,
commente Édouard Cothenet. À
la suite du meurtre d’Abel, Caïn
banni de la présence de Dieu n’en
reçoit pas moins une marque de
protection (Gn 4,15s). Mais la
corruption de toute chair entraîne
•
Dossier
•
le Déluge. La prolifération du
mal signifie-t-elle que l’homme a
perdu sa dignité d’image? Non,
car lorsque Noé sort de l’arche,
Dieu lui donne le code fondamental: “Qui verse le sang de
l’homme verra son sang versé.
Car à l’image de Dieu, Dieu a fait
l’homme.” (Gn 9,6) Quelle que
soit sa situation, l’homme reste
donc créé à l’image de Dieu.» Le
Psalmiste ira même jusqu’à affirmer: «Qu’est donc l’homme
pour que tu penses à lui... Tu en
as fait presque un dieu. » (Ps 8,5s)
Le quasi-dieu donne cependant
beaucoup de fil à retordre à son
créateur : « Dire que l’homme est
créé à l’image de Dieu signifie
qu’il est créé à la fois dans la sainteté, la justice et la vérité, mais
aussi dans une situation fragile
où la déformation de l’image est
possible», souligne Paul Wells.
Et la situation est grave, ainsi
que le formule Calvin: « Bien que
nous confessions que l’image de
Dieu n’a point été entièrement
anéantie et effacée, elle est tellement corrompue qu’il n’en reste
qu’une affreuse déformation1.»
Un avenir et une
espérance
Tout espoir n’est cependant
pas anéanti car le message de
la nouvelle alliance parle aussi
de restauration: «Nous pouvons
(Suite en page 13)
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Dossier
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Dossier
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Dossier
Dossier
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Le propre
de l’humain
À leur suite, des
hommes et des
femmes ont refusé
de suivre le courant et ont résisté,
en parlant en « je ».
Antoine Nouis,
pasteur, directeur de la rédaction
du magazine protestant Réforme
L
e Seigneur Dieu forma
l’homme de la poussière
du sol; il insuffla dans
ses narines un souffle de
vie, et l’homme devint un
être vivant. » Dans le second récit
de création, l’humain est formé
à partir de la poussière du sol,
comme le seront plus tard les animaux. Mais à l’humain seul, Dieu
insuffle le souffle de vie. Cette expression évoque ce qui est particulier à l’humain et le distingue des
animaux. Ce mot en hébreu (nechamah) a une connotation éthique,
il correspond à la conscience.
Dans la suite du chapitre, la différence entre l’humain et les animaux réside dans le fait que ces
derniers sont créés espèces alors
que l’humain est créé être de solitude. Parce qu’il est un être unique,
l’humain est capable de dire « je »,
de se comporter à partir de sa conscience et non de se laisser conduire par le plus grand nombre.
Antoine
Nouis
•
Luther et
Martin Luther King
Être capable de dire « non » quand
tout le monde dit « oui », et réciproquement, n’est pas donné à tous,
il faut avoir une belle confiance
en soi. Le plus souvent, la société
nous invite à suivre le chemin de
plus grande pente. Comme le disait un slogan de Mai 68: « Qui sort
du moule dérange la foule ! » Un de
ceux qui ont éveillé les consciences
a été Luther. Lorsqu’en 1521 il a été
convoqué à la diète de Worms, devant les représentants de l’empereur
et du pape qui lui ont demandé de
se rétracter, il a demandé vingtquatre heures de réflexion. Au
bout de ce temps, il a refusé d’obéir
en faisant appel à sa conscience
« captive de la parole de Dieu ».
En élevant sa conscience contre les
autorités civiles et religieuses de son
époque, Luther a posé l’importance
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Été 2012
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Dossier
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Dossier
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Dossier
Luther et Martin Luther King
du sujet face aux autorités. Il a ouvert un mouvement qui a débouché deux siècles plus tard sur la
Déclaration des droits de l’homme et
du citoyen qui, dans son article 2, a fait
de la résistance à l’oppression un « droit
naturel et imprescriptible de l’homme ».
Dans ce texte fondateur, la conscience
est première par rapport à l’institution
politique. C’est elle qui a conduit Martin
Luther King à se réclamer de la désobéissance civile pour mener la lutte
contre la ségrégation et pour les droits
civiques. Dans sa Lettre de la geôle de
Birmingham, il écrivait : « Je soutiens que
quiconque enfreint une loi parce que sa
conscience la tient pour injuste, puis
accepte volontairement une peine de
prison afin de soulever la conscience sociale contre cette injustice, affiche en réalité un respect supérieur pour le droit. »
Chaque fois qu’un mouvement a essayé
d’éteindre la conscience, il a glissé dans
le totalitarisme. Marx disait que la con-
12
science n’est que la conséquence des
modes de production : « Ce n’est pas la
conscience des hommes qui détermine
leur être, mais c’est au contraire leur être
social qui détermine leur conscience. » Si
la conscience est le fruit des conditions
matérielles, alors l’humain n’est qu’une
machine qu’il convient d’éduquer
pour le soumettre aux impératifs de
l’Histoire… et du parti. La conscience
est une protestation qui rappelle que
l’humain ne se réduit pas à son être social.
Les reins et les cœurs
Dans l’anthropologie du Premier Testament, les reins sont le lieu de la conscience. À plusieurs endroits dans la Bible,
il est dit de Dieu qu’il scrute les reins et
les cœurs. Pourquoi les reins ? Parce que
leur tâche est de filtrer le sang. Comme le
rein, la conscience est chargée de faire le
tri entre les idées justes et les idées injustes,
•
Dossier
•
les bonnes et les mauvaises actions.
Lorsque Dieu défend au premier couple humain de manger le fruit de l’arbre
de la connaissance du bien et du mal,
il ne lui demande pas de renoncer à la
conscience, bien au contraire. Dans ce
passage, la connaissance n’est pas tant
une question de savoir que de possession. Dieu n’est pas contre le savoir, la
Bible contient de nombreux versets
qui appellent au renouvellement de
l’intelligence. La connaissance dont il
est question ici est la domination sur le
bien et le mal. Cela renvoie à ce qu’on
appelle la privatisation des valeurs: je
décide ce qui est bien et ce qui est mal.
Prenons l’exemple d’un comportement
jugé mauvais au regard de notre propre
conscience: tromper son conjoint, tricher avec le fisc, mépriser son prochain.
Lorsque nous le faisons pour la première
fois, nous nous sentons coupables. Si
nous poursuivons dans la même voie,
nous avons des remords puis nous nous
trouvons des excuses et enfin nous
finissons par revendiquer notre attitude
en déclarant que, dans notre cas, le mal
est un bien. Nous sommes devenus les
maîtres du bien et du mal alors que la Bible et notre conscience nous disent: «Le
bien et le mal ne t’appartiennent pas.»
Après avoir mangé le fruit défendu, la Genèse précise que l’homme
et la femme se cachent l’un devant
l’autre et devant Dieu. Se cacher devant Dieu revient à éteindre la voix
de sa conscience. Parce qu’ils l’ont
enterré, Adam et Ève ne peuvent se
montrer l’un devant l’autre dans la vérité de leur humanité. Ni devant Dieu.
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Dossier
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La protestation de
la conscience
L’écrivain Christiane Singer a relaté
sa rencontre avec un ami viennois de
quatre-vingts ans qui avait participé à la
résistance en Autriche. Il racontait que,
le jour où Hitler a tenu au Heldenplatz
son fameux discours, toute la ville
déferlait vers cette place. Lui, seul, jeune homme, montait en sens inverse
la rue pour aller à une réunion de résistants. Seul à contre-courant de la
foule, il se disait : « Mais tu ne peux
pas avoir raison contre tous. Ce n’est
pas possible. Tu ne peux être seul à
avoir raison. » Et au fond de lui, une
voix lui disait : « Mais oui, tu peux. »
Dans la même veine, Vassili Grossman, dans son roman Vie et Destin, qui
se passe en URSS pendant la guerre,
met dans la bouche d’un de ses héros,
le physicien Sturm, les propos suivants:
«Tout notre drame vient de ce que
nous refusons ce que nous dicte notre
conscience. Nous ne disons pas ce que
nous pensons. Nous sentons les choses d’une façon mais nous agissons
d’une autre. Rappelez-vous ce que
Tolstoï disait à propos des exécutions :
“Je ne peux me taire !” Mais nous nous
sommes tus, quand, en 37, on a exécuté des milliers d’innocents… Nous
nous sommes tus au moment des horreurs de la collectivisation. Nous avons
trop vite clamé que le socialisme était
arrivé. Le socialisme n’est pas seulement l’industrie lourde. C’est, avant
tout, le droit à la conscience. Priver un
homme de ce droit, c’est terrible ! »
(Article paru dans Réforme)
Dossier
•
Dossier
(Suite de la page 10)
discerner ce que cette image a
perdu et ce qui est restauré en
Christ: la justice, la sainteté et
la vérité (Col 3,10 ; Ep 4,24).»
«Il existe, dans le message biblique, toute une dynamique de restauration, centrée sur Christ et animée
par lui vis-à-vis de nous-mêmes, des
autres et du monde, soutient Paul
Wells. Le rétablissement de l’image est
global, même s’il n’est pas encore total dans ce monde, avant le retour de
Christ et avant la nouvelle création.»
Édouard Cothenet partage cette
même espérance, précisant bien,
avec Irénée, que «c’est l’homme,
dans sa condition de chair animée,
qui a été créé à l’image du Verbe
de Dieu fait chair». Origène insiste sur le rôle des efforts humains
dont Augustin, lui, se méfie en mettant l’accent sur la grâce imméritée par laquelle Dieu nous restaure.
Don total du salut en Jésus-Christ
et liberté humaine: « Cette conception dynamique du salut permet de
conclure que l’homme n’est pas prisonnier de son passé, selon Édouard
Cothenet. Tant qu’il vit, tous les retournements sont possibles. La Parole
de vie peut encore atteindre le cœur
de pierre et le transformer en cœur
de chair, comme celui du bon larron
introduit au paradis avec le Christ.»
(Article paru dans Réforme)
1. Calvin, Institution chrétienne,
I. xv. 4, cf., II.ii.17, éd. Kerygma, éd. Excelsis, 2009, p.139.
•
Dossier
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* Image et ressemblance
Dans la Genèse (1,26), y a-t-il une
différence réelle entre les deux
termes çèlèm (image) et demûth
(ressemblance)? Les hébraïsants
en discutent. Les traducteurs de
la Septante utilisent les mots grecs
eikôn et homoiôsis; le second
terme pourrait indiquer un niveau
de ressemblance plus achevé.
Le Dictionnaire biblique Westphal
refuse de distinguer entre l’image
(qui, chez les catholiques, ferait
référence aux qualités naturelles
de l’humain) et la ressemblance
(qui ferait référence aux dons surnaturels) et ne voit dans l’emploi
consécutif de ces deux termes
qu’une «répétition par parallélisme».
Chez les Pères grecs, on évoque
une évolution de l’image vers la
ressemblance mais il n’y a pas
unanimité sur le processus. Irénée
a une vision «holistique» du salut,
dirions-nous aujourd’hui, qui concerne l’être humain dans toutes ses
dimensions, et l’image de Dieu en
l’homme doit mûrir jusqu’à devenir ressemblance à Dieu. Origène,
lui, est plus proche de Platon: allergique à l’anthropomorphisme, le
maître d’Alexandrie considère que
c’est par son âme que l’homme
est à l’image de Dieu. Dans son
traité Sur les Principes, Origène écrit:
«L’homme a reçu, lors de la création première, la dignité de l’image,
mais la perfection de la ressemblance lui a été réservée pour la fin.»
www.monretour.com
Ce site se veut un lieu
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et d’accompagnement
pour tous ceux qui veulent
revenir à Christ. Visitez
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encourager ceux qui
ressentent ce besoin.
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Le Lien
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Dossier
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D’abord
promu par
des
féministe, la « théorie du genre»
part d’une conception faussée
de l’égalité entre
les sexes et d’une
volonté de «libérer» l’individu de
tout cadre normatif
donné
par la nature,
la tradition, la
révélation
et Dieu luimême.
Alain
Ledain
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Dossier
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Dossier
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Dossier
•
Les dangers
de la théorie
du genre
Alain Ledain,
enseignant évangélique,
président et fondateur d’Actes 6
L
a « théorie du gender » ou
«théorie du genre» est apparue dans les années 90
aux États-Unis. Les partisans de cette idéologie
refusent toute idée d’une identité
sexuelle qui serait reçue ou inscrite
dans notre corps et qui nous déterminerait comme homme ou femme.
Ils préfèrent utiliser le concept de
genre: genre féminin ou genre
masculin. Le genre serait le résultat
du contexte culturel dans lequel on
aurait grandi. Ce genre serait donc
modifiable à souhait et en aucun
cas ne serait lié au sexe qui est une
détermination inscrite dans notre
nature. La différence corporelle
appelée sexe est ainsi minimisée.
Une conséquence de cette théorie
est d’expliquer l’hétérosexualité
comme la conséquence d’un climat culturel qui la favoriserait. En
aucun cas, elle ne serait inscrite
dans la nature de l’homme et de la
femme. Elle ne serait pas un élément fondateur des relations humaines mais plutôt la conséquence
d’un formatage culturel qu’on
nous aurait imposé depuis tout
petit. Il n’y aurait pas de complémentarité naturelle entre l’homme
et la femme, pas d’inclinaison
naturelle vers l’autre sexe.
L’homme tombe ainsi dans l’orgueil
de penser qu’il ne doit rien à personne, qu’il ne dépend de rien, et
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Dossier
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Les adeptes de la théorie du genre nient
la différence corporelle appelée sexe.
surtout pas d’une loi naturelle qui
l’aurait précédé. L’individu veut
se créer lui-même; quelle illusion!
À priori, il refuse l’identité sexuelle qu’il n’a pas choisie et veut
construire son genre. Mais est-ce là
la liberté? Présenter la doctrine du
gender comme une vérité scientifique est une imposture éducative
et éthique. Il est vrai que toute
identité se construit et que cette
construction a une dimension culturelle. Toutefois, nous ne pensons
pas que cette dimension soit primordiale pour l’identité sexuelle.
Une personne est son corps, le
genre doit être construit confor-
Dossier
•
Dossier
mément au sexe et, dans notre
vivre ensemble, les codes culturels
du masculin et du féminin doivent
être nettement différenciés. C’est,
à mon avis, le sens de cette interdiction de l’Ancien Testament:
«Une femme ne portera point
un habillement d’homme, et un
homme ne mettra point des vêtements de femme; car quiconque
fait ces choses est en abomination
à l’Éternel, ton Dieu.» (Dt 22,5).
Ceci étant dit, le donné de nature
(le sexe biologique) «ne prédispose pas automatiquement à un
rôle préétabli par la société sur
le plan social ou professionnel.
Mais, il prédispose la femme à
être mère, c’est-à-dire à porter
l’enfant, et l’homme à être père. »
Pour les adeptes de la théorie du
genre, la vocation de la femme en
tant que mère et épouse est considérée comme une construction
sociale contraire à l’égalité, comme
un « stéréotype » à déconstruire.
Parler de complémentarité homme-femme est devenu discriminatoire et contraire à l’éthique.
Au risque de déplaire, il faut oser
écrire que nous ne sommes pas
en tout point « égaux »; ce qui ne
signifie pas qu’il y a des inférieurs
et des supérieurs, des dominés
et des dominants, des seigneurs
et des subordonné(e)s! Nous
avons reçu, marquée dans notre
corps, une vocation différente.
On comprend que les femmes réagissent à la violence des hommes, à
•
Dossier
•
leur discrimination, au machisme,
à l’autoritarisme, au patriarcat… en
résumé, à la domination de l’homme
qui est une conséquence du péché
(Gn 3,16). Une profonde repentance doit se vivre chez l’homme
et son comportement doit changer.
Malheureusement, par le gender, il
est répondu au péché de l’homme
par la révolte (la guerre des sexes) et
non par l’amour et la réconciliation.
Cette réconciliation devrait s’opérer
entre l’homme et la femme d’une
part, mais aussi entre la femme et sa
vocation en dépassant les conformismes sociaux: Une femme épanouie
n’est pas seulement celle qui a réussi
socialement ou professionnellement !
Nous sommes dans une période de
déconstruction culturelle et le gender y participe. Cette déconstruction remplace l’anthropologie biblique par une conception non chrétienne de l’homme et de sa vie en
société; elle participe à l’apostasie.
Une grande confusion règne et déstabilise la communauté humaine.
Ne nous arrêtons pas à ce constat mais travaillons à « construire une
société pacifiée, fondée sur le respect et la coopération plutôt que sur
la rivalité et la compétition. » Manifestons « de nouveaux rapports
entre les hommes et les femmes,
égaux en droits et d’une égale dignité.» Et, comme je l’ai souvent
écrit, le premier endroit où ces choses doivent se vivre, c’est dans l’Église
de Jésus-Christ et ses familles.
(Article paru dans Horizons Évangéliques)
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Le Lien
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Parole vivante
J e
trouve
le passage
de Jn 21,15-22
extraordinaire.
On sent toute
l’affection et l’amour
que le Seigneur a
pour Pierre. Il ne lui
reproche pas son reniement; Il lui confie
plutôt une tâche
très importante,
celle de paitre
ses brebis.
Soula
Isch
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Parole vivante
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Parole vivante
•
Quand tu seras
vieux
Soula Isch,
missionnaire de la SIM
C
ependant, il ajoute
une chose à laquelle
Pierre ne s’attendait
probablement pas.
Le Seigneur ressuscité prévient son disciple réhabilité que
sa vieillesse sera difficile, qu’il ferait face à
la souffrance. Avant la crucifixion, Pierre
avait dit au Seigneur qu’il était prêt à souffrir et même à donner sa vie pour lui. Il
le fera pour sûr, mais quand il sera vieux.
Avec le vieillissement nous perdons notre
autonomie; nous sommes confrontés à toutes sortes de limitations; nous
devenons dépendants des autres, de la
famille, des amis et des circonstances.
Je me demande si Pierre a vécu le reste
de sa vie en pensant à sa vieillesse qui allait, selon le Seigneur, être empreinte de
souffrance. Comment cette annonce l’at-il affecté ? Qu’est-ce que nous aurions
fait à sa place ? Comment aurions-nous
envisagé le reste de notre vie ? Dans les
Actes des Apôtres on trouve un Pierre
dynamique et déterminé à répandre
l’Évangile, et prêt à souffrir pour son
Seigneur. Il a été persécuté et emprisonné pour sa foi, mais il n’a pas bronché. Lorsque nous lisons les deux épî-
tres qu’il a probablement écrites depuis
Rome, nous voyons un Pierre qui, comme le Seigneur l’avait dit, est le berger
qui console et qui encourage ses brebis.
On ne le voit nulle part se plaindre ou
abhorrer sa vieillesse; bien au contraire,
il laisse Dieu conduire toutes choses et
lui donner la grâce au moment voulu
pour supporter la souffrance de sa
vieillesse (1 Pi 2,11; 4,7; 5,7; 2 Pi 1,10.1215; 3,18). Nous pouvons nous aussi
nous sentir parfois coincés, cloisonnés,
pour différentes raisons, sans pouvoir
nous en sortir. Sachons que Dieu à qui
nous avons confié nos vies est capable
de nous aider jusqu’au bout. Demandons-lui de nous accorder sa grâce pendant cette phase de notre vie. Il est fidèle.
Un stade inéluctable
Aucun d’entre nous ne peut éviter le
vieillissement. À moins que le Seigneur
ne revienne quand nous sommes encore
jeunes, un jour le vieillissement aura raison de nous. Les rides vont se succéder
et notre corps s’affaiblira. Mais en attendant, nous devons faire face à la vie telle
qu’elle se présente à nous, savoir accueil-
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Été 2012
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Parole vivante
•
Parole vivante
de nous morfondre.
Nous avons besoin de
la sagesse de Dieu pour
pouvoir vivre notre vie
à n’importe quel stade
où nous nous trouvons. Moïse avait compris cela. Lorsque tout
le peuple d’Israël s’est
rebellé contre Dieu
dans le désert, il a été
puni. Moïse s’est rendu
compte qu’il avait besoin de la sagesse de
Dieu pour savoir comment vivre différemUne ride, ce peut être le sillon que laissent en nous
l’expérience et la sagesse
ment et le servir efficacement. Il a fait alors
une prière: «Enseigne-nous à bien
lir ce que la vie nous apporte et ne pas
compter nos jours afin que nous applinous laisser vieillir avant l’heure. «Une
quions notre cœur à la sagesse», Ps 90,12.
ride, ce peut être le sillon que laissent en
nous l’expérience et la sagesse. Et ce qui
compte c’est de savoir si le corps et l’esprit
sont enrichis de ce temps passé, s’ils ont
Une nouvelle phase
transmuté les années écoulées en savoir,
sans perdre la vigueur! Voilà l’important.»
Nous vieillissons tous et au même
(Au nom de tous les miens, Martin Gray).
rythme, un jour à la fois, une heure à la
fois, une minute à la fois. Si nous pouVieillir est un art qui s’apprend, comme
vions accepter ce fait comme quelque
toute autre chose ou toute saison de la
chose de normale et d’inévitable et si
vie. On peut s’inquiéter en nous demannous étions assez sages pour utiliser cette
dant ce que nous allons devenir, si nous
période de notre vie afin de transmettre
aurons les moyens pour faire face à nos
aux plus jeunes, que ce soit dans nos
besoins matériels et physiques. C’est
familles ou dans nos églises, les leçons
à ce moment que nous devons nous
que nous avons apprises tout au long
rappeler les promesses du Seigneur qui
de notre vie, rien ne serait perdu. Bien
nous a formellement dit de ne pas nous
sûr il faudrait aussi que l’on nous donne
inquiéter pour l’avenir car notre Père
l’occasion de partager notre savoir. Vicprendra soin de nous. Mais nous somtor Hugo a écrit : «On voit de la flamme
mes tellement humains, et c’est plus fort
aux yeux des jeunes gens, mais dans l’œil
que nous de nous inquiéter et même
du vieillard on voit de la lumière.» Et un
•
Parole vivante
•
proverbe africain dit: «Le vieux qui est
assit voit plus loin que le jeune qui est
débout.» J’aime observer les personnes
âgées en Afrique, surtout dans les villages; elles sont souvent assises avec des
plus jeunes en train de palabrer. Et quand
les personnes âgées parlent, les jeunes les
écoutent avec respect. C’est une manière
de faire passer d’une génération à l’autre
leur histoire et leurs valeurs. L’âge de la
retraite n’est pas la fin d’une vie mais le
début d’une nouvelle phase qui pourrait être très utile et fructueuse jusqu’au
bout. Lise Thibaut, ancienne Lieutenant Gouverneure du Québec a dit lors
d’une interview: «Les gens qui voient la
retraite comme la fin de leurs activités
deviennent des moribonds et des consommateurs des médicaments. Il faut
rester actif, il faut se donner aux autres».
Les fils de David Livingstone, qui a été
trouvé mort à genoux, ont découvert
une note écrite par leur père la veille:
«Mon Jésus, mon Roi, ma vie, mon tout;
je te consacre de nouveau toute ma vie».
Pour ce grand homme de Dieu chaque
jour était une autre occasion pour servir
et pour grandir spirituellement, et cela
jusqu’au bout de sa vie. Est-ce cela notre
but et notre ambition ? Je l’espère. Alors
nous n’aurons pas peur de «devenir»
vieux. Juste avant que le Seigneur dise à
Pierre : «Quand tu seras vieux… », il lui
demande par trois fois : «M’aimes-tu?»
La question a visiblement gêné Pierre,
mais elle lui a donné l’occasion de dire
ouvertement au Seigneur qu’il l’aimait.
C’est la chose qui compte le plus pour le
Seigneur et c’est ce qu’il nous demande,
de l’aimer jusqu’au bout de notre vie.
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Vie chrétienne
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Vie chrétienne
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Vie chrétienne
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Déjeuner de prière à
e
Montréal - 4 Édition
Mireille Mirambeau
Membre du comité organisateur
Pour la 4e année consécutive, l’Église Méthodiste
Évangélique de Montréal,
dirigée par le révérend
pasteur Moise Isidore, a
organisé un déjeuner de
prière sous le thème «Nous
avons la victoire, Alleluia ! ». Environ 500 personnes
ont pris part à cet événement qui s’est déroulé le
4 août dernier au Centre
Mont-Royal à Montréal.
18
L
’assistance a pu louer,
adorer avec des artistes et
groupes tels Luc Gingras,
Ichthus, Joël Lorquet, Claude
Doucet, Jude Deslouches,
le groupe de louange de l’Église Méthodiste et la chorale de l’Église Méthodiste. Le témoignage d’Eryc Kernisan
a rappelé combien Dieu veille sur nous
dans tous les moments de notre vie et
surtout que nous devons écouter sa
voix. Une pièce théâtrale présentant
les femmes victorieuses de la Bible a
été chaudement applaudie. Le Pasteur
Gingras avec sa femme Nathalie ont
transporté le public par leurs chants.
Dans sa méditation le Pasteur Gingras
a rappelé l’amour et la bonté de Dieu
et l’importance de s’accrocher à notre
Seigneur. La vidéo qui appuyait son
message a touché les cœurs. Ce fut
ensuite un moment de prières intenses, prières pour les maladies, pour les
couples, les familles, prières de renouvellement et de consécration. Au coup
de 12 h 30, la matinée s’achevait avec le
chant «Nous avons la victoire Alléluia ! »
Dans l’assistance on pouvait voir le
Député Emmanuel Dubourg accompagné de son Conseiller politique, Mme
Marjorie Michel, Monsieur Franz Benjamin, Conseiller de la Ville, Monsieur
André Joly Directeur de CKZW, le son
Gospel du Québec, de même que les
représentants de l’émission Écho évangélique du samedi matin. Le consulat
d’Haïti à Montréal avait été représenté
par Madame Djinah Thomas. Certains
participants avaient fait le voyage de Boston, d’Ottawa et d’Haïti afin de pouvoir
prendre part à cette matinée de prière. En
outre, plusieurs pasteurs de différentes
confessions religieuses avaient également participé à cette matinée spéciale.
Comme ce fut le cas durant les trois
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Été 2012
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Vie chrétienne
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Vie chrétienne
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Vie chrétienne
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De gauche à droite: le pasteur Gingras et sa femme Nathalie; les actrices du choeur parlé Les femmes victorieuses de la Bible
années précédentes, les chrétiens ont
apprécié ce moment d’échange et de
ressourcement spirituel. En effet, autour d’un repas fraternel, les participants ont eu l’occasion d’entendre des
témoignages vivants, des chants de
louange et d’adoration exécutés par des
artistes de talents et de déposer leurs
fardeaux aux pieds du Seigneur. Pour
cette 4e édition, ils pouvaient se pro-
curer de la littérature spirituelle grâce
à la libraire CLC qui était présente et
aussi des versets bibliques sur des cadres
réalisés par Ken cadres évangéliques.
Les conseils donnés ont été de continuer à prier les uns pour les autres
et, dans ce monde troublé, d’avoir les
yeux fixés sur la croix. Les participants
ont quitté la salle remplis d’espoir,
car ils attendent la réponse de Dieu à
leurs requêtes. Notre Seigneur avait
répondu à la prière de plus d’un les
années précédentes et Il est le même
Dieu hier, aujourd’hui et éternellement.
Le rendez-vous prochain est pour août
2013 sachant que plusieurs qui avaient
participé à ce déjeuner de prière viendront partager leurs expériences avec
ce Dieu de délivrance et faire connaitre
leurs victoires. À l’année prochaine !
De gauche à droite: l’artiste Claude Doucet et le groupe de louange
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Été 2012
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Glanures
François Gougoux,
journaliste
Une
promenade
à
travers l’actualité reliée
au monde chrétien.
20
T
rois médecins anglais m’ont
dit récemment que tous leurs
collègues de 55 et plus sont
opposés à l’euthanasie mais
les jeunes médecins y sont très
favorables. Pourquoi cela? Autrefois,
l’enseignement que recevaient les médecins parlait constamment de préserver la vie et de ne jamais l’ôter. Le serment d’Hippocrate datant du 4e siècle
avant Jésus Christ et prononcé par tous
les médecins visait autrefois à rétablir,
préserver ou promouvoir la santé. Il promettait entre autres d’éviter la séduction
des patients, l’extorsion, l’avortement et
de ne pas offrir du poison aux patients.
Les éditions récentes du serment des
médecins, comme celle du Québec, ne
comportent plus d’interdit et se contentent d’affirmer ce qui doit être fait
(comme par exemple, je remplirai mes
devoirs de médecin envers tous les
patients avec conscience, loyauté et intégrité; je donnerai au patient les informations pertinentes et je respecterai ses
droits et son autonomie). Comme quoi,
le progrès n’a pas que des avantages !
Un sondage de l’Association d’Études
Canadiennes faite durant Pâques 2012
a révélé que seulement 42% des Canadiens affirment que «la religion est
importante dans ma vie» (parmi eux
il y a 46% de femmes et seulement
30% des 18 à 24). Pour le Québec ce
pourcentage baisse à 33% (contre 54%
au Manitoba et Saskatchewan), même
si 62% croient encore que Dieu existe.
On remarque que le pourcentage québécois est approximativement le même
que celui des 18 à 24 ans au niveau du
Canada. Ce qui semble indiquer qu’une
tendance répandue parmi les jeunes au
niveau du Canada affecte le Québec
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Été 2012
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Actualités
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Actualités
de façon plus globale. Il est aussi triste
de constater qu’au Canada, seulement
48% des répondants considèrent que
les pasteurs et le clergé sont fiables. Le
pourcentage n’est pas meilleur lorsque
l’on considère la fiabilité des croyants
laïques. Tous les croyants sont vus
quasiment comme des Témoins de
Jéhovah, la Mafia ou les Communistes
autrefois. On se fie plus aux personnes
non-religieuses et moins aux croyants
et encore moins aux pasteurs. C’est un
cinglant avertissement pour les pasteurs,
et aussi un appel aux chrétiens pour les
épauler et les encourager dans leur tâche!
Quelques autres découvertes du précédant sondage indiquent que: 76% des
Canadiens (dont 81% des femmes)
croient que les bonnes œuvres seront
éventuellement récompensées, mais
seulement 63% croient qu’il y aura un
châtiment pour les mauvaises actions.
Fait intéressant, les 65 ans et plus sont les
plus croyants et les plus affirmatifs sur
l’existence de la vie après la mort et les
récompenses pour les bonnes actions
(79%), mais aussi les moins certains pour
ce qui concerne les châtiments (58%).
Les 18 à 24 ans par contre, malgré leur
plus grande incroyance, montrent une
certitude sur les récompenses (77%) et
les punitions (72%) plus grande qu’au
niveau de leur croyance en Dieu. Cela
voudrait-il dire que les personnes âgées
font preuve de plus de magnanimité
sur les égarements humains et pensent
que Dieu agit de la même façon?
Ce même sondage révèle le fait suivant: 46% des francophones cana-
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diens appuient l’affirmation selon
laquelle il existe une puissance supérieure
qui gouverne le monde, contre 60%
des anglophones (avec 73% au Manitoba et Saskatchewan). Le pourcentage
relatif à cette question est élevé chez
les moins riches et semble diminuer
avec chaque tranche d’augmentation
du revenu familial. Il semble aussi que
les pourcentages soient approximativement les mêmes pour les riches,
les Francophones, et les jeunes, pour
toutes les questions sur la religion. Les
hommes se révèlent plus sceptiques
que les femmes. On peut se demander
quel est l’aspect du message biblique et
quels sont les moyens qui pourraient
permettre de rejoindre ces gens qui
paraissent réfractaire à l’Évangile.
Il semble que les immigrants contribuent
à améliorer les pourcentages favorables
à la croyance religieuse qui seraient autrement plus bas. Si les croyances et
les pratiques de certains immigrants
peuvent être sujet à débats, il demeure
aussi vrai que l’Église dans les grandes
villes et particulièrement au Québec
serait très faible sans ces personnes venues de loin. La plupart des étudiants
en théologie au Québec viennent des
églises ethniques. Les dénominations
sans églises ethniques courent le risque
de disparaître. De plus en plus d’églises
composées de québécois de souche
ont des pasteurs venus d’ailleurs. Un
étudiant de parents immigrants, et qui
a vécu au Québec depuis son enfance,
a affirmé qu’il n’avait jamais rencontré
un chrétien blanc avant d’aller à un collège chrétien. Autrefois, la Marche pour
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Jésus et la Mission en Fête regroupaient
plusieurs groupes ethniques et permettaient aux chrétiens de développer
un sens d’appartenance plus grand.
Notons aussi que par le passé, les chrétiens avaient en commun des magazines
évangéliques interdénominationnels tels
que L’Aurore et Le Vigneron, et aussi des
associations communes (Association
des Églises Évangéliques du Québec,
Association des collèges de théologie,
Tremblement de Cœurs pour les jeunes,
Marche pour Jésus, Mission en Fête,
etc.). La perte de ces institutions fructueuses est à déplorer. Mais comme on l’a
vu récemment pour Mission en Fête,
faute de leadership, de bénévoles et de
financement, églises et institutions ont
à la longue tendance à perdre l’énergie
et la vision. L’expérience montre que
l’énergie et la vision viennent souvent
des plus jeunes. D’où l’importance de
faire de la place aux jeunes visionnaires.
Un livre récemment publié parle des
sites-web et possède comme titre Don’t
Make Me Think ou «Évitez de me faire
réfléchir». Le principe enseigné est que
les gens ne prennent que quelques secondes sur un site web. Si le site ne les
accroche pas assez vite et s’il n’est pas
simple, ils vont le quitter pour un autre
site. Quelle pression pour les programmeurs! C’est aussi un enseignement que
les églises peuvent appliquer à leurs affiches devant leurs bâtiments, leurs messages téléphoniques. cultes, réunions de
jeunesse et études bibliques. Il est crucial
de bien nous représenter comment les
autres perçoivent ce que nous faisons.
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Été 2012
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J’ai lu pour vous
Richard Lougheed,
chargé de cours et bibliothécaire
à L’École de Théologie Évangélique
de Montréal / Institut Biblique VIE
Le livre de Fath et Willaime
présente non pas la Nouvelle
France mais la France protestante telle qu’elle est constituée aujourd’hui dans les premières années du XXIe siècle.
Cette étude de 483 pages
sous la direction de deux
des plus grands sociologues
français des religions est un
bijou que devraient lire tous
les leaders d’ici, même si elle
ne mentionne jamais le Québec, sauf pour une entrée
dans la bibliographie de 30
pagesoùonseréfèresouvent
à la Suisse, à la Belgique et à
la plupart des pays de la francophonie. L’oeuvre est d’une
telle richesse qu’elle mérite
qu’on s’y arrête longuement.
22
C
e livre qui fait intervenir
plusieurs auteurs est
une étude extrêmement fouillée sur les
protestants en France
quelle que soit leur appartenance confessionnelle. On peut qualifier cette étude de
véritable instrument de travail, outil pour
une réflexion féconde sur les tendances
présentes de ces confessions. Comme on
aurait aimé qu’une telle analyse s’étende
aussi au Québec! En attendant qu’elle soit
faite, nous ne pouvons qu’admirer leur approche méthodologique et tenter pour
nous-mêmes quelques comparaisons.
On y apprend que la sécularisation de la
France rend les catholiques minoritaires
tout autant que les protestants l’étaient.
Mais au lieu d’éliminer la religion, le pluralisme laisse une place à la diversité qui
a toujours caractérisé les protestants. De
plus, les chercheurs constatent que c’est la
venue en France d’immigrants en si grand
nombre qui a, à n’en pas douter, renforcé
les ailes évangéliques et pentecôtistes/charismatiques.. On calcule que les protestants
représentent 2% de la population française
actuellement alors qu’ils en formaient 12%
en 1560, mais seulement déjà 2,17% en
1851. Il est difficile d’évaluer leur nombre
exact selon ce qu’on compte, le fort noyau
des fidèles qui assistent au culte une fois
par mois ou l’ensemble des adhérents.
Le livre aborde différents sujets tels que : la
variété des groupes pentecôtisants, les approches des Églises pour l’action sociale,
une analyse de l’ecclésiologie protestante,
une typologie des Églises ethniques et
multiethniques, les problèmes de financement, de ceux liés à la jeunesse, et bien
d’autres encore. On n’a que l’embarras
du choix selon ses intérêts propres.
Pour une revue plus détaillée, voir. le Bulletin de
la Société d’Histoire du Protestantisme Franco-Québécois (SHPFQ) de septembre 2012
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Convention des Frères mennonites
L
e rassemblement national des
délégués des Églises canadiennes de Frères mennonites
(FM) a eu lieu du 11 au 14 juillet dernier à Winnipeg. Ce rassemblement qui a lieu tous les deux ans
est l’occasion de faire le point sur les réalisations passées et d’instaurer un nouveau
souffle pour l’avenir. Le présent rassemblement s’est distingué par une augmentation
substantielle du budget des ministères de
la Conférence canadienne des Églises
FM. Un accent particulier a été donné à
l’implantation de nouvelles églises à travers
le Réseau C2C1. Gord Fleming, le directeur de C2C prévoit que 54% du montant
alloué à l’implantation de nouvelles Églises couvriront les coûts de départ et les
salaires des pasteurs et etc., 34% iront aux
salaires du personnel, 7% à la formation
des implanteurs et 5% au fonctionnement
administratif. Des délégués ont exprimé le
souhait de voir C2C refléter de manière
consistante les valeurs des FM et s’intégrer
dans leurs structures de formation.
Se basant sur un rapport d’évaluation des
ministères nationaux de la Conférence2,
Willy Reimer, directeur exécutif de la Conférence, a exhorté l’assemblée à «faire ensemble ce qu’aucune Église ne peut faire
toute seule». Nombre de délégués se sont
plaint de ne pas avoir eu accès au rapport
complet et aux recommandations de Terry
Mochar. La parole prophétique de Mochar
publiée dans le MB Herald de juillet 2012 a
aussi été accueillie avec un certain malaise
par plusieurs délégués. Le Comité Foi et
Vie national (BFL) a été chargé d’examiner
le rapport afin « d’aider à évaluer les observations et les conclusions du rapport
d’une manière qui soit en accord avec
l’identité des Frères mennonites» a affirmé
Brian Cooper le président du BFL.
Willy Reimer, directeur de l’exécutif,
s’adresse à l’assemblée.
1. C2C sigle de «Sea to Sea» (inspiré
du Psaume 72,8), réseau canadien
d’implantation d’Églises regroupant différentes dénominations.
2. Rapport de 139 pages soumis par le consultant Terry Mochar. Le rapport a mis en
évidence un climat de méfiance à travers
la dénomination et le fait que les différentes
entités fonctionnent indépendamment les
unes des autres.
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Été 2012
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