Actualité jurisprudentielle

Transcription

Actualité jurisprudentielle
Tribunal de Grande Instance –
Jugement du 20 février 2012
 Les juges du fond ont cependant considéré que, dans cette affaire, les acquéreurs devaient être déboutés de
leur demande de garantie formée à l’encontre de l’agence immobilière.
Quels étaient les faits ?
Dans un compromis de vente signé par l’intermédiaire d’une agence, les acquéreurs ont déclaré effectuer
l’acquisition d’une maison individuelle sans recourir à un prêt. Ils ont versé entre les mains du notaire la somme de
18 000 € à titre d’acompte sur le prix de vente. Il était également prévu dans l’acte sous seing privé que la vente
serait réitérée devant notaire dans un délai de 4 mois. Avec l’accord des parties, la signature de l’acte notarié a été
reportée au-delà de ce délai. 7 mois après la date du compromis, le vendeur a sommé les acquéreurs par acte
extrajudiciaire de régulariser l’acte authentique de vente. Ces derniers ne sont pas présentés au rendez-vous fixé en
indiquant que leur propre bien n’ayant pas été vendu, ils ne pouvaient procéder à cette acquisition. Après avoir fait
dressé un procès-verbal de carence le jour du rendez-vous, le vendeur a finalement signé un mois plus tard un
compromis avec un nouvel acquéreur, mais à un prix inférieur de 44 000 €.
Il a alors assigné les premiers acquéreurs afin d’obtenir :
• le paiement de la somme de 37 000 € au titre de la clause pénale insérée dans le compromis ;
• la restitution de la somme de 18 000 € à titre d’indemnité d’immobilisation.
Ces derniers ont demandé à être garantis par l’agence des condamnations prononcées à leur encontre.
Ils lui ont reproché :
• d’une part, d’avoir commis une faute dans l’exercice de son mandat en n’ayant pas inséré dans le
compromis une condition suspensive relative à la vente de leur propre bien ;
•
d’autre part, d’avoir manqué à son devoir de conseil et d’information en n’attirant pas leur attention sur
le risque encouru et en excluant tout recours possible à un prêt.
Les juges du fond ont condamné les acquéreurs à payer au vendeur 25 000 € au titre de la clause pénale.
Ils ont retenu que la réitération de la vente par acte authentique n’avait pu avoir lieu du fait des acquéreurs, qui
n’avaient pas disposé des fonds nécessaires et n’avaient pu se prévaloir du non-accomplissement d’une condition
suspensive relative au financement du bien.
Sur le sort de la somme séquestrée par le notaire, ils ont rappelé au préalable que :
• Cette somme versée lors de la signature du compromis l’avait été à titre d’acompte sur le prix de vente ;
• elle ne pouvait être assimilée à une indemnité d’immobilisation ;
• son sort était lié au montant de la clause pénale.
Ils ont jugé que la somme de 18 000 € devrait donc être remise par le notaire au vendeur et qu’elle viendrait
en déduction de la condamnation de 25 000 €.
Le Tribunal a en outre décidé qu’il ne pouvait être fait grief à l’agence de ne pas leur avoir déconseillé de
s’engager avant la vente effective de leur propre bien.
Pour justifier leur décision, les juges ont relevé au préalable que :
• le compromis stipulait que les acquéreurs déclaraient effectuer cette acquisition sans recourir à un prêt et
reconnaissaient que s’ils y recouraient néanmoins, ils ne pourraient se prévaloir de la condition
suspensive de son obtention ;
• Les acquéreurs avaient ajouté la mention manuscrite qu’ « ils n’avaient pas la surface financière suffisante
pour recourir à un prêt et ne pouvaient donc acheter le bien que si leur propre maison était vendue ».
Les magistrats ont alors estimé que cette mise en garde était dépourvue d’ambiguïté et les avertissait du risque
encouru.
Notons que les juges du fond ont réduit le montant de la clause pénale, en application de l’article 1152 alinéa 2 du
code civil. Selon leur appréciation, celle-ci s’avérait manifestement excessive. Certes le vendeur prétendait avoir
subi un préjudice lors de la vente définitive du bien, à un prix inférieur de 44 000 € (soit une baisse de 12 % par
rapport au prix initialement obtenu). Mais les juges ont retenu que le vendeur n’établissait pas que la revente, très
rapidement après l’établissement du procès-verbal de carence, l’ait été au prix du marché. Il faut dire que les
acquéreurs affirmaient que le vendeur avait bradé la maison, comptant sur l’application de la clause pénale pour
compenser la perte. De son côté, l’acquéreur justifiait la baisse du marché immobilier par :
•
un document relatant une baisse de 9 % dans l’ancien sur une période amorcée plus de 6 mois avant la
er
signature du 1 compromis et achevée 3 mois après la signature du second, ce qui ne couvrait pas
uniquement la période concernée par cette affaire ;
er
•
des évaluations effectuées par des agences uniquement avant la signature du 1 compromis, lesquelles
mettaient en évidence de surcroît que les acquéreurs avaient conclu dans la fourchette la plus haute.
Retenons que les acquéreurs avaient surtout pleinement conscience du risque encouru puisque :

Ils ont exposé à l’audience qu’ils avaient demandé l’insertion d’une condition suspensive relative à la
réalisation effective de leur pavillon, laquelle avait été refusée par le vendeur ;

Les mentions insérées dans le compromis de vente étaient très explicites et suffisantes pour les informer.
Sur la condition suspensive, les magistrats ont par ailleurs indiqué que, contrairement à ce que soutenait l’agence,
une condition qui lierait la vente du bien à celle effective par l’acquéreur d’un autre bien ne serait pas
nécessairement considérée comme potestative c’est à dire dépendante de la seule volonté d’un des contractants.
Nous vous conseillons de veiller à vous assurer que chacune des parties ait pris conscience de la mesure de son
engagement et de conserver éventuellement une mention manuscrite en ce sens, émanant de celle qui prend un
risque important. Votre responsabilité, en qualité de rédacteur de l’acte, peut effectivement être engagée par le
vendeur comme par l’acquéreur. C’est bien là l’une des difficultés de votre métier de remplir votre devoir de
conseil et d’information envers chacune des parties, dont les intérêts sont divergents.