Le régime juridique particulier de l`assurance vie est

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Le régime juridique particulier de l`assurance vie est
Le régime juridique particulier de l'assurance vie est confirmé
Par quatre arrêts rendus il y a quelques mois, la Cour de cassation a tranché un débat qui
agitait le milieu des professionnels du droit, certains remettant en cause le statut juridique
particulier de l'assurance vie.
La règle est claire : « Le capital ou la rente stipulés payables lors du décès de l'assuré à un
bénéficiaire déterminé ou à ses héritiers ne font pas partie de la succession de l'assuré » (article L
132-12 Code des assurances). Le souscripteur d'un contrat d'assurance vie peut ainsi désigner la
personne (ou les personnes) de son choix qui, à son décès, percevra un capital ou une rente hors
succession. Les héritiers en titre du souscripteur décédé n'ont donc pas leur mot à dire, sauf s'il est
démontré que le montant des primes versées sur le contrat est «manifestement exagéré » (article L
132-13 Code des assurances). Dans ce dernier cas, les héritiers peuvent obtenir que le trop versé soit
réintégré dans la succession et partagé entre eux.
La remise en cause des contrats
Ce bel agencement juridique a été perturbé ces dernières années. En effet, l'assurance vie s'est
beaucoup développée sous la forme de contrats prévoyant non seulement le paiement de sommes en
cas de décès, mais également le reversement, en cas de survie du souscripteur au-delà d'un certain
délai, des primes investies éventuellement majorées d'un gain financier (assurance en cas de vie
avec contre-assurance décès). Certains ont alors avancé que ces contrats d'assurance vie modernes
ne se distinguaient plus d'une opération classique d'épargne et que le statut juridique particulier dont
ils jouissaient n'était pas justifié. Les tenants de cette thèse ont notamment cru pouvoir s'appuyer sur
une décision de la Cour de cassation du 18 juillet 2000 (affaire Leroux) par laquelle un contrat
d'assurance vie souscrit par une personne âgée peu avant qu'elle ne décède avait été requalifié en
contrat de capitalisation. Si une telle solution s'était confirmée, ce sont plusieurs millions de
Français qui auraient vu leur contrat remis en cause, les sommes y étant versées devant être
considérées comme appartenant à la succession. Toutefois, de nombreux commentateurs
soulignaient que la Cour suprême ne s'était pas prononcée sur la question précise de la qualification
à donner aux contrats d'assurance vie et n'avait fait que tirer les conséquences juridiques d'un cas
isolé.
La réponse de la Cour de cassation
Le débat semble désormais définitivement clos avec les quatre arrêts rendus par la Cour de cassation
le 23 novembre 2004 (chambre mixte, n° 224 à 227 P). Par ces décisions très attendues, la Cour de
cassation a solennellement réaffirmé que les contrats d'assurance vie prévoyant un paiement de
l'assureur soit à un bénéficiaire désigné en cas de décès du souscripteur, soit à ce dernier en cas de
survie, comportait un aléa lié à la durée de vie humaine. En conséquence, il n'y a pas lieu de
requalifier ces contrats en simples opérations de capitalisation ni, donc, d'écarter les règles spéciales
prévues par le Code des assurances.
La prudence reste de mise
Après quelques années d'hésitation, on en est donc revenu aux règles claires posées par le Code des
assurances. Les sommes versées au décès de l'assuré reviennent de droit au bénéficiaire et ne font
pas partie de la succession. Si ce rappel des principes est le bienvenu, il ne faut pas oublier que
l'utilisation abusive par certains des possibilités offertes par les contrats d'assurance vie est
sanctionnée. Ainsi, placer l'essentiel de son patrimoine en assurance vie est à proscrire, surtout en
présence d'héritiers réservataires (ceux qui, comme les enfants, ont obligatoirement droit à une part
de l'héritage). Il existe un contentieux grandissant en la matière, le juge n'hésitant pas à faire droit
aux demandes des héritiers floués par des investissements en assurance vie manifestement exagérés
au regard des possibilités financières du souscripteur.
Bérénice De Lahaye

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