Le couple et le droit du travail

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Le couple et le droit du travail
Le couple et le droit du travail
Université de Lille 2
- Droit et Santé Faculté des sciences politiques, juridiques et sociales
Le couple et le droit du travail
Céline LEBORGNE
Mémoire de D.E.A. de Droit social
Sous la direction de Monsieur le Professeur Pierre-Yves VERKINDT
Année universitaire 1999-2000
1
Le couple et le droit du travail
Remerciements
Je tiens à remercier toutes les personnes qui m’ont permis de réaliser ce travail, et
plus particulièrement Monsieur Verkindt pour sa disponibilité et ses précieux conseils.
2
Le couple et le droit du travail
SOMMAIRE
Table des abréviations…………………………………………………………………….4
Introduction………………………………………………………………………………..7
TITRE PREMIER : La prise en considération limitée d’une dépendance entre les
membres du couple……………………………………………………………………….18
CHAPITRE I : Une dépendance nécessaire des membres du couple……………...20
CHAPITRE II : Une dépendance voulue par le couple……………………………34
TITRE SECOND : L’autonomie des membres du couple favorisée …………………52
CHAPITRE I : L’indifférence de la situation de couple sur l’activité professionnelle
de ses membres…………………………………………………………………….54
CHAPITRE II : L’indifférence des agissements d’un membre du couple sur
l’activité professionnelle de l’autre………...……………………………………...69
Conclusion………………………………………………………………………………...82
Bibliographie……………………………………………………………………………...84
Table des matières……………………………………………………………………….94
3
Le couple et le droit du travail
TABLE DES ABREVIATIONS
A
Article
Art.
Assemblée nationale
AN
B
Bulletin des arrêts de la Cour de Cassation (Chambres civiles)
Bull. civ.
Bulletin social, Francis Lefebvre
BS Lefebvre
C
Cahiers prud’homaux
Cah. prud’h.
Cahiers sociaux du barreau de Paris
Cah.soc.barreau
Code civil
C. civ.
Code du travail
C. trav.
Confer
Cf.
Conseil d’Etat
CE
Cour d’appel
CA
Cour de cassation, assemblée plénière
Cass. ass. plén.
Cour de cassation, chambre commerciale
Cass. com.
Cour de cassation, chambre sociale
Cass. soc.
Cour de justice des communautés européennes
CJCE
D
Dalloz périodique
DP
Dalloz-Sirey
D.
Droit de la famille
Dr. de la famille
Droit ouvrier
Dr. ouvrier
Droit et patrimoine
Dr. et patrimoine
Droit social
Dr. soc.
4
Le couple et le droit du travail
E
Exemple
ex.
G
Gazette du palais
Gaz.pal.
I
Ibidem
ibid.
J
Journal officiel (Lois et décrets)
JO
L
La semaine juridique (édition générale, entreprise…)
JCP
Loco citato
loc.cit.
N
Numéro
n°
O
Observation
obs.
Opere citato
op.cit.
P
Page
p.
Paragraphe
§
Petites Affiches
PA
Q
Quotidien juridique
Quot.jur.
5
Le couple et le droit du travail
R
Répertoire du notariat Défrenois
Défrenois
Revue de jurisprudence sociale
RJS
Revue trimestrielle de droit civil
RTD civ.
Revue trimestrielle des droits de l’homme
RTDH
T
Tribunal de grande instance
TGI
6
Le couple et le droit du travail
INTRODUCTION
Le couple est, à l’heure actuelle, au cœur des débats essentiels en droit de la famille
et des personnes1, et d’une manière générale, dans la société. L’adoption récente de la loi
relative au pacte civil de solidarité du 15 novembre 19992 et les débats et prises de
position3 qui en ont résulté, constituent une parfaite illustration des préoccupations
actuelles du législateur en la matière.
Au vu de l’évolution de la société marquée par la banalisation de l’union libre, la
diminution des unions légitimes et l’augmentation croissante des divorces, certains auteurs,
déplorant une « crise du droit de la famille4 », invoquent la nécessité pour celui-ci de se
trouver « une boussole5 », laquelle pourrait être constituée par la notion juridique de
couple. Ainsi, Mme Brunetti-Pons souligne que : « l’importance quantitative du
phénomène du concubinage rend actuellement nécessaire une réflexion sur l’émergence
d’une notion qui a permis au législateur de tenir compte de ces nouvelles données
sociales6 ».
La tendance actuelle est donc à un intérêt croissant porté au concept de "couple".
Pour certains, la référence à une telle notion permettrait en effet de faire face aux
bouleversements qui agitent à l’heure actuelle le droit de la famille.
De cette façon, M. Normand s’interroge-t-il sur l’existence d’une notion juridique
de couple telle que « le couple serait affecté d’un statut propre, générateur d’effets
juridiques applicables à tous les couples répondant à sa définition, indépendamment de
savoir si ces couples sont mariés ou non 7».
1
LECUYER (H), La notion juridique de couple, Dr. et patrimoine, octobre 1997, n°53, p. 62
Loi n° 99-944 du 15 novembre 1999 relative au pacte civil de solidarité, JO du 16 novembre 1999, p. 16959
3
Cf. pour ex. MALAURIE (P), Un statut légal du concubinage ?, Defrénois 1998, n° 13, p. 871
4
BRUNETTI-PONS (C), L’émergence d’une notion de couple en droit civil ; RTD civ., janvier-mars 1999,
p.29
5
NORMAND (J), Rapport de synthèse lors du colloque sur « la notion juridique de couple » des 20 et 21
juin 1997, Etudes juridiques, Economica, Paris, 1998, 154 p.
6
BRUNETTI-PONS (C), op.cit., p. 28
7
NORMAND (J), loc.cit.
2
7
Le couple et le droit du travail
Ces questionnements mettent en valeur l’incertitude actuelle quant à la définition et
la conceptualisation de cette notion8.
Concrètement, la question qui se pose est de déterminer comment le droit
appréhende la notion de couple. Comme le souligne Anne-Marie Gilles : « Si comme le
disait Aristote : " l’être humain est par nature enclin et apte à former un couple ", le droit,
lui, est-il apte à saisir le couple ? 9». Dès lors, qu’est-ce qu’un couple au sens juridique du
terme ? Quelles caractéristiques reflètent la réalité de ce concept ?
Selon le Professeur Lécuyer : « à travers la notion de couple, ce sont la famille et la
société qui sont en cause10 ». L’étude de cette notion, telle qu’elle est appréhendée par le
droit se révèle donc primordiale : le couple est un composant essentiel de la vie de famille
et de la société. Il appartient par conséquent au droit de prendre en considération « cette
chose plus compliquée et plus confondante que l’harmonie des sphères11 », qu’est le
couple.
Le mot "couple" est tiré du langage commun et n’est donc pas une création du droit.
Il manifeste même, selon le Professeur Lécuyer, « un phénomène de double
appartenance 12». Aussi, ce mot est-il « à cheval sur le langage du droit et le langage
courant 13».
Etymologiquement, le mot "couple" est issu du latin copula : lien pour attacher
ensemble deux animaux14. De même, pour le Littré, il s’agit d’ « un lien pour attacher
ensemble deux ou plusieurs choses pareilles15 ». Concernant les êtres humains, il s’agit
donc d’un lien unissant deux personnes.
Ainsi, le couple peut classiquement être défini comme « un homme et une femme
unis par des relations affectives, physiques, et le langage commun accepte, par extension,
de qualifier couple deux personnes du même sexe vivant ensemble et unies par de mêmes
8
GILLES (AM), Le couple en droit social, Collection droit civil, Economica, p.7
ibid.
10
LECUYER (H), loc.cit.
11
citation de Julien Gracq, écrivain du XX ème siècle
12
LECUYER (H), loc. cit.
13
ibid.
14
Le Robert, cf. couple
15
LITTRE (E), Dictionnaire de la langue française, Tome 2, p. 1262
9
8
Le couple et le droit du travail
relations. Il peut aussi y avoir couple lorsque deux personnes sont simplement réunies par
un sentiment ou un intérêt commun. Enfin, dans un dernier sens commun, le couple est
compris comme un ensemble de deux choses16 ». Pareillement, le Professeur Cornu relève
que le couple est « l’union que forment un homme et une femme entre lesquels existent des
relations charnelles et en général une communauté de vie, soit en mariage, soit hors
mariage ; se dit parfois de deux individus du même sexe qui vivent ensemble 17».
Nombreuses sont ainsi les acceptions du mot « couple » en langage familier. Le
couple semble donc s’entendre de toute union affective et morale entre deux individus de
sexe différent ou du même sexe.
Quoiqu’il en soit, le couple se caractérise par deux éléments : la dualité et
l’existence d’un lien18. La première caractéristique nous amène donc à exclure de notre
étude, toutes les associations de personnes comprenant plus de deux individus. En outre, le
couple peut-être caractérisé par le lien qu’il implique, à savoir « l’union de deux êtres par
la volonté, le sentiment ou toute autre cause qui les rapproche19 ».
La question qui se pose ici est cependant de déterminer s’il existe une notion
juridique de couple ? Comment le couple est-il envisagé en droit ? Quelles sont les critères
et caractéristiques du couple permettant à celui-ci de se voir reconnaître un véritable statut
juridique ?
Pendant longtemps, la conception juridique française du couple s’est limitée au
mariage20.
Aussi, si le droit fiscal a utilisé le mot "couple" pour la première fois (1917)21,
celui-ci ne visait cependant pas le couple vivant en concubinage. Puis, prenant acte de
l’évolution du couple dans la société française et de l’importance statistique de l’union
libre, le droit de la sécurité sociale a usé de ce terme, visant ce faisant indifféremment
16
LECUYER (H), loc.cit.
CORNU (G), Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, PUF, 1992
18
GILLES (AM), loc.cit.
19
Dictionnaire Larousse, cf. couple
20
PANSIER (FJ), Aspects sociaux du PACS : présentation synthétique, Dr. et patrimoine, avril 2000, n° 81,
p. 71
21
MALAURIE (P), Couple, procréation et parenté, D. 1998, p. 127
17
9
Le couple et le droit du travail
tous les couples, mariés ou non. Ainsi, comme le rappelle le Professeur Malaurie, « le
couple de la sécurité sociale s’oppose aux personnes seules. Il ne distingue pas les
concubins et les époux : ce sont, pour elle, les mêmes 22».
En droit civil, il a fallu attendre 1994 pour que le terme même de "couple"
apparaisse dans la loi23.
Dès lors, ce mot est entré dans le langage législatif du droit civil 24 de manière
tardive, puisqu’il a fallu attendre la loi du 29 juillet 199425 sur la bioéthique pour que la
notion de couple soit définie par le législateur. En ce sens, aux yeux de nombre d’auteurs,
la notion de couple est une notion de droit civil26. Comme l’indique Madame Clotilde
Brunetti-Pons, l’importance du concept était soulignée par les sociologues depuis de
nombreuses années en ce qu’il permettait une assimilation du concubinage au mariage27, et
permettait de répondre aux réalités de fait.
Amorcée sur le plan légal par la loi Malhuret de 1987 et la loi du 08 janvier 1993,
la loi de 1994 a posé une définition juridique du couple à l’article L 152-2 du code de la
santé publique28. Ainsi, aux termes de cet article : « l’homme et la femme formant le
couple doivent être vivants, en âge de procréer, mariés ou en mesure d’apporte la preuve
d’une vie commune d’au moins deux ans… ». Ce texte vient fixer des limites à la notion de
couple en exigeant que celui-ci soit formé d’un homme et d’une femme, et qu’il présente
une certaine stabilité29.
Une notion juridique de couple est donc apparue en droit civil en 1994, plus précise
que dans le langage courant, même si celle-ci, née de la crise du mariage, a pu apparaître à
certains comme un « mythe30 », un artifice.
22
ibid.
PANSIER (FJ), loc.cit.
24
MALAURIE (P), loc.cit.
25
loi du 29 juillet 1994 relative au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humain, à
l’assistance médicale à la procrétion et au diagnostic prénatal , JO du 30 juillet 1994
26
DEKEUWER-DEFOSSEZ (F), Réflexions sur les mythes fondateurs du droit contemporain de la famille,
RTDC, avril-juin 1995, p. 249
27
BRUNETTI-PONS (C), loc.cit.
28
ibid.
29
BRUNETTI-PONS (C), op.cit., p. 29
30
DEKEUWER-DEFOSSEZ (F), loc.cit.
23
10
Le couple et le droit du travail
La conception juridique du couple en droit civil recouvrait donc, de par cette
disposition législative, les couples mariés ou vivant en concubinage. Toutefois, étaient
écartés les homosexuels : « privés de mariage civil, les homosexuels se trouvent exclus de
concubinage, dans la mesure où le droit ne reconnaît toujours pas leur communauté de
vie31 …».
Ainsi, malgré la loi de 1993 portant diverses mesure d’ordre social32 et intégrant la
situation de l’assuré homosexuel, le législateur de 1994 confirmait la position prise par la
Haute juridiction quelques années auparavant. Celle-ci avait rejeté en effet, dans un arrêt
du 11 juillet 1989, toute possibilité d’extension du terme « conjoint » aux homosexuels. En
l’espèce, un salarié de Air France, après avoir déclaré son homosexualité, revendiquait
l’application du statut du personnel aux termes duquel Air France s’engageait à accorder
aux agents et aux membres de leur famille, y compris aux couples « en état d’union libre »,
des billets à tarif réduit. Or, la Cour de cassation a considéré qu’une telle disposition « qui
étend le bénéfice de ladite mesure au conjoint en union libre, doit être comprise comme
ayant entendu avantager deux personnes ayant décidé de vivre comme des époux, sans
pour autant s’unir par le mariage, ce qui ne peut concerner qu’un couple constitué d’un
homme et d’une femme33 ». D’ailleurs, elle a confirmé cette « définition restrictive du
concubinage34 » dans un arrêt du 17 décembre 199735.
Pourtant, cette discrimination entre homosexuels et hétérosexuels était critiquable,
et cette non-reconnaissance du couple homosexuel sur le plan juridique contestable, même
si certains auteurs approuvent cette prise de position, à l’instar du Professeur Malaurie qui
considère que « la tricherie sur les mots est toujours le signe d’une dérive intellectuelle et
morale36 ».
Une intervention du législateur était donc nécessaire : « exclus du mariage, relégués
au secret de l’alcôve et à la confidentialité de leurs relations par le juge et le droit, il ne
31
MOUTOUH (H), La question de la reconnaissance du couple homosexuel : entre dogmatisme et
empirisme, D. 1998, p. 369
32
loi n° 93-121 du 27 janvier 1993 portant diverses mesures d’ordre social, JO 23 avril 1993, p. 6528
33
Cass. soc. 11 juillet 1989, X…c/ Air France ; X…c/ CPAM, D. 1990, p. 582, note Malaurie
34
MOUTOUH (H), op.cit., p. 370
35
Cass. soc. 17 décembre 1997, Vilela c/ Madame Weil, D. 1998, p. 111, conclusions Weber, note Auber
36
MALAURIE (P), note sous CASS soc. 11 juillet 1989, précité supra note n° 33
11
Le couple et le droit du travail
restait plus aux homosexuels que la difficile voie de l’intervention politique et
législative37 ».
En ce sens, la loi de 1999 relative au pacte civil de solidarité pose une « conception
polymorphe de la vie de couple 38». Définissant le concubinage comme « une union de fait,
caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, entre
deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple 39», celle-ci est
venue reconnaître le bénéfice du cadre juridique marital aux homosexuels, et poser une
égalisation de principe des effets juridiques entre mariage et contrat d’union civile.
Elle constitue ainsi une reconnaissance législative du couple homosexuel, même si
pour certains, il n’est guère cohérent de consacrer une notion de couple qui associe le
concubinage au mariage, et d’un autre côté, séparer le concubinage du mariage par
l’élaboration d’un statut légal propre à l’union libre40. En outre, elle vient rompre avec la
définition traditionnelle du concubinage telle qu’elle avait été posée par les juges en
198941, et par le législateur en 1994.
Aussi, il apparaît que prédomine l’idée d’« un pluralisme des couples42 » en droit
civil au détriment d’une notion juridique de couple à proprement parlé.
Comme l’indique Anne-Marie Gilles en effet : « les éléments constitutifs du couple
s’avèrent variés depuis que les conséquences positives du mariage ont été étendues au
couple non marié. Tantôt la stabilité et la continuité des relations sont nécessaires, tantôt la
relation doit être inscrite dans la durée. Parfois, une simple relation affective caractérise le
couple. En outre, depuis que le législateur a consacré la notion de couple dans la loi du 29
juillet 1994, il faut ajouter la procréation et la communauté de vie comme éléments
constitutifs du couple43 ».
37
ibid.
PANSIER (FJ), loc.cit.
39
C. civ. article 515-8
40
BRUNETTI-PONS (C), loc.cit.
41
Cass. soc. 11 juillet 1989, précité supra note n° 33
42
DEKEUWER-DEFOSSEZ (F), A propos du pluralisme des couples et des familles, PA, 28 avril 1999, n°
84, p. 29
43
GILLES (AM), op.cit., p. 9
38
12
Le couple et le droit du travail
La difficulté en droit civil, comme nous l’avons vu, est de poser des critères
permettant de dessiner les contours d’une notion juridique de couple. D’ailleurs, le
Professeur Lécuyer, constatant la multiplicité des critères permettant de distinguer la
notion de couple, s’interroge : « ne risque-t-on pas, dans la recherche de la notion de
couple, de trouver d’autres critères, d’être l’inventeur d’un trésor trop important et d’en
conclure, sans paradoxe, à l’existence d’une notion sans critère ?44 ».
Le couple fait donc l’objet d’un questionnement à l’heure actuelle en droit de la
famille, non facilité par la loi de 1999 relative au pacte civil de solidarité laquelle pose
clairement « qu’il existe plusieurs formes de vie à deux45 ».
L’objet de la présente étude sera de déterminer si le droit du travail, de par l’usage
qu’il fait de la notion de couple, est de nature à clarifier ce concept.
Quelle approche le droit du travail a-t-il de la notion de couple ? En quoi le couple
peut-il être pris en considération par le droit du travail ? Le droit du travail, de par l’usage
qu’ il fait de la notion de couple, apporte-t-il une contribution à la définition que le droit
civil peine à élaborer ?
Cette question peut a priori surprendre. En effet, la vie de couple fait partie
intégrante de la vie personnelle de tout individu, protégée en l’article 9 du code civil selon
lequel « chacun a droit au respect de sa vie privée ». En ce sens, nombreuses sont les
jurisprudences condamnant le non-respect de la vie sentimentale, laquelle présente un
caractère « strictement privé »46. Une quelconque référence au couple par le droit du travail
ne semble donc pas évidente.
Ce principe de respect de la vie privée, posé en l’article 9 du code civil, amenait
certains auteurs à mettre en exergue l’existence « d’une sphère secrète de vie d’où chacun
aura le pouvoir d’écarter les tiers47 », ou encore « le droit de tenir les tiers en lisière d’un
domaine réservé, de les tenir en respect, et de pouvoir dans ce domaine, échapper à leurs
44
LECUYER (H),op.cit.,p. 65
PANSIER (FJ), loc.cit.
46
pour ex. TGI Paris, 02 juin 1976, D. 1977, p. 364
45
13
Le couple et le droit du travail
interventions, leurs sollicitations 48». Ce principe doit être affirmé avec force : considéré
comme l’un des droits primordiaux de la personnalité49, il est nécessaire qu’il soit protégé
au mieux par le législateur et les juges.
Or, comme l’indique M. Waquet : « la notion de vie privée en droit du travail est
connue50 ». En effet, le contrat de travail conclu entre un salarié et son employeur est
classiquement considéré comme conclu « intuitus personae », c’est à dire en fonction de la
seule considération de la personne. Si le salarié se trouve soumis, du fait du rapport de
subordination, à exécuter son travail sous le contrôle du chef d’entreprise qui peut en
contrôler l’exécution et en sanctionner l’inexécution, « le principe est que cette
subordination est limitée à l’exécution de la prestation de travail…51 ». Dès lors, on ne
saurait concevoir que le chef d’entreprise ait égard à la vie de couple du travailleur. Celleci constitue en effet un élément à part entière de la vie privée du salarié : « le salarié est un
homme libre et son attachement volontaire et limité à l’employeur s’exerce dans un cadre
défini par un contrat de travail52 ».
Dans le reste de sa vie, le travailleur est libre : libre de mener sa vie comme il
l’entend, libre de se marier ou non, de vivre en concubinage, sous réserve qu’il ne nuise
pas à l’entreprise. A l’inverse, dans l’exercice de sa profession, le travailleur est
subordonné à son employeur qui ne peut légitimement prendre acte de la vie de couple du
salarié, « vie qui échappe à l’autorité de l’employeur, qui n’est pas soumise au lien de
subordination qui caractérise le contrat de travail 53».
Si la spécificité du contrat de travail est que le salarié place sa personne sous
l’autorité de l’employeur et en ce sens, renonce à une certaine autonomie dans la conduite
de sa personne, il « n’aliène pas sa personne 54». En dehors de l’accomplissement de la
47
BADINTER (R), Le droit au respect de la vie privée, JCP 1968, I, n° 2-136
CORNU (G), Droit civil, Tome 1, 5ème édition, n°513
49
GULPHE (P), De la non interférence de la vie privée sur la vie professionnelle du salarié en droit
français, JCP E 1990, II, 15 736, p. 219
50
WAQUET (P), Vie personnelle et vie professionnelle du salarié, Cah. Soc. Barreau, 1994, n° 64, p. 289
51
SAVATIER (J), La liberté dans le travail, Dr. soc. 1990, p. 49
52
ibid.
53
WAQUET (P), loc.cit.
54
SAVATIER (J), loc.cit.
48
14
Le couple et le droit du travail
tâche définie au contrat, il conserve sa liberté : le couple en tant qu’élément de la vie
personnelle du salarié ne doit pas avoir d’incidence dans la vie professionnelle de celui-ci.
Ainsi, « la sphère de la vie de couple est généralement distincte de celle de la vie
professionnelle, et les deux domaines ne devraient donc pas interférer l’un sur l’autre55 ».
Donc, a priori, la vie de couple, en tant qu’élément de la vie privée du salarié, ne
doit pas interférer avec le travail de l’un ou l’autre de ses membres. Ainsi, « il est
traditionnellement affirmé qu’il doit exister une cloison étanche entre la vie professionnelle
et la vie extra professionnelle du salarié. Dans les rapports entre employeur et salarié, c’est
l’exécution correcte du travail convenu qui importe et dans l’appréciation portée par
l’employeur sur la façon dont le salarié effectue la tâche qu’il lui a confiée, ne doivent pas
venir interférer des considérations relatives à la vie privée ou publique du salarié. Il s’agit
là d’une garantie importante de la liberté individuelle qui permet à chaque individu de se
ménager une sorte de domaine réservé sur lequel la vie professionnelle ne saurait avoir
aucune emprise 56».
Ainsi adapté au droit du travail, cet impératif de protection de la vie privée a pour
conséquence de poser en principe l’absence de relation entre la vie de couple du salarié et
sa vie professionnelle.
A noter que, pendant longtemps, pour désigner « la part inaltérable de liberté que
conserve un salarié malgré le lien de subordination qui l’unit à son employeur 57», la
jurisprudence utilisait le terme de « vie privée ». Ainsi, dans le célèbre arrêt Rossard du 22
janvier 1992, la Cour de cassation pouvait proclamer que « dans sa vie privée, le salarié est
libre d’acheter les biens, produits ou marchandises de son choix 58». Cette expression était
cependant discutable, et à ce titre discutée. Quant à l’expression utilisée par le Professeur
55
SAVATIER (J), Vie de couple et rapports de travail, Ecrits en hommage à Gérard Cornu, PUF, 1994, p.
415
56
DESPAX (M), La vie extra professionnelle du salarié et son incidence sur le contrat de travail, JCP I
1176, 1963, p. 26
57
WAQUET (P), En marge de la loi Aubry :travail effectif et vie personnelle du salarié, Dr. soc. 1998, n° 12,
p. 1
58
Cass. soc. 22 janvier 1992, Mme Rossard c/ Société Robuchon et fils, Dr. soc. 1992, p. 334
15
Le couple et le droit du travail
Despax, c’est à dire « la vie extra professionnelle59 », tout en ayant le mérite de désigner
l’ensemble des actes accomplis par le salarié en dehors de l’entreprise et du temps de
travail, ne visait pas les actes exécutés par le salarié aux lieux et temps de travail, mais ne
correspondant pas à une instruction de l’employeur. Aussi, la Cour de cassation a-t-elle
substitué à ces expressions, la notion de « vie personnelle », même si certains précisent que
la distinction entre « vie privée » et « vie professionnelle » avait au moins le mérite « de ne
pas nier que le travail est une des formes de la vie des personnes, et que le droit du travail
relève autant du droit des personnes que du droit des obligations60 ».
Quoiqu’il en soit, cette notion de « vie personnelle », plus large, inclut « l’ensemble
du comportement du salarié, qu’il relève de l’intimité de la vie privée ou du comportement
public, qui échappe à l’autorité de l’employeur, pendant ou en dehors de la durée du
travail 61». La vie personnelle du salarié, y compris sa vie de couple, doit donc en principe
demeurer étrangère à la vie professionnelle de ses membres62.
Toutefois, on ne peut légitimement ignorer les « inévitables empiètements de l’une
sur l’autre63 ». Nul ne peut nier les interférences qui existent ainsi nécessairement entre le
couple et le travail. En effet, « si l’activité humaine peut-être découpée en tranches de
temps, consacrées respectivement à la vie familiale et à la vie du travail, la personne
humaine est une64 ». Dès lors, on ne peut considérer qu’il existe une cloison étanche entre
la vie de couple et les relations de travail de ses membres : il existe de nombreuses
interférences entre ces deux « sphères65 », que le droit du travail sera amené à réguler. Le
Professeur Despax résume en ce sens parfaitement ces phénomènes : « il semble que les
relations de travail sont plus perméables qu’il ne le paraît au premier abord à des
considérations qui tiennent à la vie privée du salarié ou à l’exercice par celui-ci des libertés
publiques. Il en résulte une plus grande fragilité des rapports de travail… 66».
59
DESPAX (M), loc.cit.
SUPIOT (A), Les nouveaux visages de la subordination, Dr. soc. 2000, p. 131
61
WAQUET (P), Vie personnelle et vie professionnelle du salarié, loc.cit.
62
GULPHE (P), loc.cit.
63
ESCANDE-VARNIOL (MC), note sous CASS soc. 16 décembre 1997, Delamaere c/ Office notarial de
Mes Ryssen et Blondel, JCP G, 1998, II 10101,p. 1119
64
SAVATIER (J), Vie de couple et rapports de travail, loc.cit.
65
ibid.
66
DESPAX (M), op.cit., p. 27
60
16
Le couple et le droit du travail
Ainsi, le droit du travail sera en certaines circonstances appelé à prendre en compte
cet élément de la vie personnelle du salarié. Il doit se préoccuper dans une certaine mesure
de la vie de couple des salariés. Mais, de par l’usage qu’il fait de la notion de couple, le
droit du travail apporte-t-il une contribution à la définition du couple que le droit civil
élabore avec difficulté ?
De l’étude des textes et de la jurisprudence, il nous importera de mettre en évidence
cette conception " travailliste " du couple, de mettre en exergue les situations
d’interférence entre le couple et le travail.
Dans nombre de situations, la vie de couple et les rapports de travail de l’un ou
l’autre de ses membres, vont être enchevêtrés. Le droit du travail sera donc amené à opérer
une conciliation entre les deux. Il en résultera nécessairement une approche spécifique au
droit du travail de la notion de couple.
Le couple est par définition composé de deux personnes, exerçant parfois chacune
une activité professionnelle autonome, mais unies par un lien affectif qui ne peut-être
totalement occulté par leurs employeurs respectifs. Il revient dès lors au droit de concilier
l’exigence d’autonomie des membres du couple dans l’exercice de leur profession, eu
égard au principe de respect de la vie privée et au caractère « intuitus personae » du contrat
de travail, avec ce lien d’affection qui caractérise le couple.
Ainsi, selon les situations, il appartiendra, tant aux juridictions du travail qu’au
législateur, de promouvoir cette autonomie ou au contraire tenir compte de cette
interdépendance.
Or, il semble résulter de l’étude du droit du travail que celui-ci privilégie
l’autonomie des membres du couple (Titre II), au détriment de leur interdépendance
(Titre I).
17
Le couple et le droit du travail
TITRE PREMIER :
La prise en considération limitée d’une dépendance entre les membres du
couple :
18
Le couple et le droit du travail
Même s’il est « traditionnellement affirmé qu’il doit exister une cloison étanche
entre la vie professionnelle et la vie extra professionnelle du salarié… »67, nul ne peut nier
les interférences qui existent entre le couple et le travail. La vie professionnelle de chacun
est en effet ponctuée de rencontres et de contraintes, qui rejaillissent nécessairement sur la
vie de couple. Ainsi, « le couple (…) ne peut vivre dans une bulle d’où seraient évacuées
les activités professionnelles de chacun de ses membres 68». A contrario, le droit du travail
ne peut légitimement ignorer cet aspect essentiel dans la vie de la majorité des salariés,
qu’est la vie de couple.
Il importe de relever, dans un premier temps, que certaines dispositions ou
jurisprudences, en faisant découler de la vie de couple nombre de conséquences sur la
relation de travail de l’un ou de l’autre, tendent à mettre en avant l’existence d’un lien de
dépendance entre ses membres.
Cependant, cette prise en compte d’une dépendance du couple s’avère limitée. En
effet, l’existence d’un lien d’interdépendance dans le couple ne sera révélée en droit du
travail que dans les stricts cas où elle apparaît nécessaire au regard de certains impératifs,
ou lorsque les parties l’auront décidé en ce sens.
Le droit du travail met ainsi parfois en évidence une dépendance entre les membres
du couple, que celle-ci soit nécessaire ( Chapitre I ), ou voulue ( Chapitre II ).
67
68
DESPAX (M), loc.cit.
SAVATIER (J), Vie de couple et rapports de travail, op.cit., p. 416
19
Le couple et le droit du travail
CHAPITRE I :
Une dépendance nécessaire des membres du couple
Des éléments tenant à la vie personnelle du salarié et plus particulièrement à sa vie
de couple sont exceptionnellement pris en compte, tant par le juge, que par le législateur69.
Il en résulte nécessairement une dépendance entre les membres du couple puisque
l’exécution et le maintien de la relation de travail d’un salarié seront influencés par la
qualité de conjoint ou concubin de celui-ci. Celle-ci ne semble toutefois pouvoir être
déduite, en droit du travail, que d’hypothèses où se voit révélée la nécessité de respecter
certaines exigences.
Ainsi, au nom du droit de chaque travailleur à une « vie familiale normale », le
couple pourra apparaître dans la relation professionnelle d’un quelconque de ses membres
comme un facteur permettant l’octroi d’avantages, de compensations ou de faveurs. Au
contraire, dans d’autres situations, l’existence d’une vie de couple et d’une relation
amoureuse entre ses membres pourra se révéler être un obstacle à la relation
professionnelle de l’un d’eux, eu égard au trouble causé à l’intérêt de l’entreprise ou à la
possibilité de trouble causé à celle ci. Aussi, au vu de l’existence du conjoint, concubin ou
partenaire, un travailleur se verra accorder tel ou tel avantage ou, à l’opposé, supportera
telle ou telle contrainte.
La prise en considération d’une dépendance entre les membres du couple est donc
en ce sens limitée, qu’elle n’a pour objectif que de répondre à deux impératifs : la
conciliation de la vie de couple et de la vie professionnelle et le respect du « droit de
chacun à une vie familiale normale » ( Section I ) ou le respect de l’intérêt de l’entreprise
(Section II ).
69
LEVENEUR (J), Vie privée et familiale et vie professionnelle, in La personne en droit du travail, p. 47
20
Le couple et le droit du travail
Section I ) Une dépendance nécessaire dans l’intérêt du couple :
Comme le souligne le Professeur Savatier « le législateur impose parfois à
l’employeur de tenir compte de l’existence du couple pour permettre à celui ci une vie
familiale normale …70». Cette prise en considération du couple par l’employeur relève
alors du bon sens. L’objectif est de permettre au salarié de mener à bien sa carrière
professionnelle tout en lui offrant les moyens de profiter de son entourage.
Certains avantages ou « discriminations positives71 » seront alors accordés au
salarié au regard de sa situation familiale et plus précisément de sa vie de couple. La
question qui se pose étant de déterminer l’usage fait par le droit du travail de la notion de
couple, il convient de souligner que, sans user expressément du vocable ″couple ″, cette
dépendance nécessaire des membres du couple est tantôt expressément stipulée par le
législateur ( §1 ), tantôt sous-jacente ( §2 ).
§ 1 – Manifestations légales expresses de l’interdépendance :
Nombreuses sont les dispositions imposant à l’employeur de prendre en
considération la vie de couple des salariés travaillant à son service, afin de réaliser la
conciliation la plus favorable entre leur vie de couple et leur vie professionnelle.
En matière de réglementation des horaires de travail et de congés, le législateur
pose ainsi un certain nombre de règles, incluant comme critère de décision à charge de
l’employeur, l’existence d’un conjoint ou concubin. A ce titre, des auteurs expriment en
effet le souhait « que la vie sociale soit rythmée par des moments où pourront se retrouver
dans un loisir commun, tous ceux que leur travail aura séparé dans la vie courante72 ». Ceci
explique sans doute la référence directe au couple faite par le législateur, en matière de
congés notamment.
Ainsi, l’article L 223-7 du code du travail, relatif aux congés payés, dispose que
« les conjoints travaillant dans une même entreprise ont droit à un congé simultané ». A
70
SAVATIER (J), Vie de couple et rapports de travail, op.cit., p.421
LEVENEUR (J), loc. cit.
72
SAVATIER (J), L’assouplissement des règles sur le repos dominical, Dr. soc. 1994, p.180
71
21
Le couple et le droit du travail
noter toutefois que l’employeur peut imposer des horaires de travail différents aux
conjoints travaillant dans la même entreprise « sous réserve qu’il pourrait se voir reprocher
un abus du droit s’il refusait de tenir compte de leurs aspirations, alors qu’une coordination
de leurs horaires ne nuirait pas à l’entreprise 73». L’exigence de prise en compte du couple
par l’employeur ne semble donc expressément sanctionnable qu’en matière de congés
payés.
Au contraire, si les deux époux ne travaillent pas dans la même entreprise, l’article
L 223-7 du code du travail prévoit en son alinéa 3 à la charge de chaque employeur, de
tenir compte pour l’ordre des départs en congés « de la situation de famille des
bénéficiaires, notamment des possibilités du conjoint dans le secteur privé ou public… ».
A l’origine, ce texte ne concernait que les conjoints et donc, le couple ne s’entendait que
du couple marié. Dorénavant, la loi du 15 novembre 199974 prévoit l’obligation pour
l’employeur de tenir compte d’un pacte civil de solidarité. Ainsi, l’emploi dans une même
entreprise de deux personnes « pacsées », accorde à celles-ci le droit de bénéficier de
l’article L 223-7 du code du travail.
Néanmoins, il semble que les contraintes pesant sur l’employeur ne soient pas
excessives. En effet, mis à part l’hypothèse où le couple travaille au service d’un
employeur identique et a « droit » à un congé simultané, l’alinéa 3 de l’article L 223-7 du
code du travail n’impose en aucune manière à l’employeur de calquer les vacances de son
salarié sur celles de son conjoint. En ce sens, la Cour de cassation est venue rappeler que
« les dispositions de la convention collective alléguée par une salariée n’imposent pas à
l’employeur de calquer la date des congés sur ceux du conjoint si l’activité de l’entreprise
ne peut s’en accommoder75 ». On imagine en effet aisément la difficulté d’ordre matériel si
chaque employeur devait tenir compte des dates de congés des conjoints, concubins ou
partenaires de chacun de ses salariés. Cette solution conduit d’ailleurs le Professeur
Savatier à considérer que ce texte demeure « exceptionnel76 ». Toutefois, il n’en constitue
pas moins une référence directe au couple par le législateur, une manifestation de l’intérêt
porté par le droit du travail à la vie familiale du salarié.
73
SAVATIER (J), Vie de couple et rapports de travail, loc.cit.
loi n° 99-944 du 15 novembre 1999, art. 18, JO du 16 novembre 1999
75
Cass. soc. 19 juin 1997, Meusnier c/ SARL La feuille Rose, RJS 8-9/97, n°987, p. 615
74
22
Le couple et le droit du travail
En outre, certains évènements, liés à la vie de couple du salarié, permettent l’octroi
de plein droit de jours de congés en cas de demande de celui ci. Issu d’une loi du 19 janvier
1978, l’article L 226-1 du code du travail prévoit la possibilité pour un salarié de bénéficier
de congés pour évènements familiaux, en l’occurrence, d’une autorisation exceptionnelle
d’absence de quatre jours pour le mariage du salarié ou de deux jours pour le décès du
conjoint (ces jours d’absence n’entraînent pas de baisse de rémunération et sont assimilés à
des jours de travail effectif pour la détermination de la durée du congé annuel). Ces
dispositions sont également applicables aux partenaires liés par un pacte civil de
solidarité77, et illustrent encore une fois la nécessité de tenir compte, dans la détermination
des droits du salarié à l’égard de son employeur, des évènements de sa vie de couple. La
mise en valeur d’une dépendance entre les membres du couple est rendue nécessaire dans
une optique de conciliation de sa vie privée et sa vie professionnelle.
D’autres textes font expressément référence au conjoint d’un travailleur pour lui
accorder certaines faveurs. Comme l’indique Jean Leveneur : « les vacances sont une
chose, mais il y a aussi le reste de l’année, et il est inutile de dire combien la vie
matrimoniale des deux époux se trouve amputée lorsque les nécessités de la vie
professionnelle de chacun les conduisent à travailler, et parfois à résider, dans des endroits
très éloignés l’un de l’autre78 ».
Ainsi, en matière de fonction publique, la loi du 30 décembre 192179 prévoit « le
rapprochement des fonctionnaires qui étrangers au département sont unis par le mariage,
soit à des fonctionnaires du département, soit à des personnes qui y ont fixé leur
résidence ». De cette façon, cette loi, dite « Roustan », impose de réserver 25 % des postes
vacants dans le département aux fonctionnaires souhaitant se rapprocher de leurs conjoints.
Complétant ce dispositif, une loi de 198480 en matière de fonction publique d’Etat, prévoit
que « dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service, les
affectations prononcées doivent tenir compte des demandes formulées par les intéressés et
de leur situation de famille (…) Priorité est donnée aux fonctionnaires séparés de leur
76
SAVATIER (J), Vie de couple et rapports de travail, loc.cit.
loi du 15 novembre 1999, précitée supra note n° 2
78
LEVENEUR (J), op.cit., p.54
79
loi du 30 décembre 1921, article 1er
80
loi du 11 janvier 1984, articles 60 et 62
77
23
Le couple et le droit du travail
conjoint pour des raisons professionnelles… ». La même loi indique également « si les
possibilités de mutation sont insuffisantes dans leur corps, les fonctionnaires séparés de
leur conjoint pour des raisons professionnelles peuvent dans toute la mesure compatible
avec les nécessités de fonctionnement du service compte tenu de leur situation particulière,
bénéficier en priorité du détachement… ».
Ces règles, identiques en matière de fonction publique hospitalière81 et territoriale82,
sont en outre étendues aux personnes liées par un PACS83. A noter cependant, qu’elles ne
constituent pas un droit pour les fonctionnaires concernés mais une simple priorité.
Toutefois, là encore, la vie de couple est intégrée au dispositif mis en place afin de
permettre aux fonctionnaires de mener « une vie familiale normale ».
De la même façon, l’article L 321-1-1 du code du travail prévoit comme critère
pour fixer l’ordre des licenciements pour motif économique « les charges de famille et
celles de parents isolés ». La vie de couple sera donc nécessairement un indice à prendre en
considération par l’employeur pour définir l’ordre des licenciements. Cette disposition
s’inscrit sans conteste dans un esprit de faveur aux salariés vivant en couple, tout comme
l’article L 432-8 du code du travail prévoyant que « le comité d’entreprise assure ou
contrôle la gestion de toutes les activités sociales ou culturelles établies dans l’entreprise
au bénéfice des salariés ou de leur famille… ».
L’employeur est ainsi tenu dans certaines hypothèses de prendre en considération la
vie de couple des salariés et leur accorder certaines facilités ou priorités afin de respecter
leur « droit à une vie familiale normale ».
§2 - Manifestations indirectes de l’ interdépendance :
D’autres dispositions mettent en valeur de manière sous-jacente l’incidence que
peut jouer la vie de couple sur la vie professionnelle de chacun de ses membres, pour
souligner l’interdépendance des membres du couple.
81
loi du 09 janvier 1986, article 38
loi du 26 janvier 1984, article 54
83
loi du 15 novembre 1999, précitée supra note n°2
82
24
Le couple et le droit du travail
Certaines réglementations, sans pour autant faire référence directement au couple,
reflètent cependant la volonté de respecter la vie de couple du salarié. Ainsi, et comme
l’indique le Professeur Savatier « le souci de permettre aux salariés de mener une vie
familiale inspire également les règles sur les horaires de travail. S’il faut lutter contre le
travail de nuit ou maintenir le principe du repos dominical, c’est notamment pour permettre
aux travailleurs de se retrouver en couples en dehors des heures où le travail hors du foyer
les sépare 84».
A n’en pas douter en effet, le principe du repos dominical posé en l’article L 221-5
du code du travail tend à permettre aux salariés de passer du temps avec leur famille et
donc leur conjoint ou concubin : « il ne s’agit pas seulement de disposer d’un temps à soi,
que l’on ne donne pas au patron, mais de partager le temps avec les autres, de célébrer
ensemble une fête qui rompt avec le quotidien85 ». Il est à souligner que cette règle donne
actuellement lieu à un débat86 opposant les tenants d’une suppression de ce principe
(milieux d’affaire) et les tenants du maintien du repos dominical lequel est considéré
comme la base d’une vie sociale « équilibrée particulièrement autour de la cellule
familiale87 ».
De la même façon, la rigoureuse réglementation entourant encore actuellement le
travail de nuit des femmes en France88 illustre indirectement cette prise en compte par le
législateur français du couple en droit du travail. En outre, l’ensemble du dispositif relatif
aux heures supplémentaires89 et le strict encadrement mis en place « dessinent une sphère
minimale de vie privée 90» tendant encore une fois à protéger la vie de couple du salarié.
En effet, ces réglementations visent à éviter des horaires trop lourds ou trop contraignants
de nature à nuire à l’équilibre de la vie de famille et donc, du couple.
84
SAVATIER (J), Vie de couple et rapports de travail, op.cit., p. 426
SAVATIER (J), L’assouplissement des règles sur le repos dominical, loc.cit
86
LYON-CAEN (J), PELISSIER (J), SUPIOT (A), Droit du travail, Précis Dalloz, Droit privé, 18ème édition,
Paris, 1996, p. 428
87
COUTURIER (G), Droit du travail : les relations individuelles de travail, PUF, 1994, p. 423
88
C. trav. art. L 213-1
89
C. trav. art. L 212-5 et suivants
90
LEVENEUR (J), loc.cit.
85
25
Le couple et le droit du travail
Dans la même optique, la jurisprudence sera parfois amenée à se référer à la vie de
couple du salarié pour régler différents litiges auxquels elle se trouve confrontée. La
référence à la situation de couple, en des espèces où la loi ne l’impose pas, permettra ainsi
parfois au juge d’accorder tel ou tel avantage au salarié.
Ainsi, par exemple, pour déterminer les critères de validité des clauses de nonconcurrence en droit du travail, certains auteurs soulèvent l’opportunité pour les juges de
tenir compte de la vie familiale du salarié et donc de sa vie de couple : « en effet, la
possibilité de retrouver un emploi pour un salarié célibataire, n’est pas la même que celle
d’un salarié marié avec trois enfants scolarisés et dont le conjoint est fonctionnaire. Pour ce
dernier, le périmètre de la recherche est plus restreint, le changement de domicile plus
problématique91 ». D’ailleurs, des arrêts ont dans ce sens annulé une clause de nonconcurrence au motif qu’elle « aurait obligé la salariée à s’expatrier très loin pour retrouver
du travail 92» ou ont validé une telle clause car celle ci ne privait pas le salarié de la
« possibilité de trouver un emploi dans les agglomérations proches et importantes sans
avoir à déménager93 ». A n’en pas douter, la vie familiale semble avoir été un critère pour
les juges du fond qui viennent restreindre par là même les pouvoirs de l’employeur et
l’impact de telles clauses.
De même, une jurisprudence récente de la Cour de cassation en matière de clause
de mobilité admet que l’on retienne les éléments de la vie personnelle (en l’espèce la
situation du conjoint) pour mettre en évidence l’absence de faute dans le refus opposé par
le salarié à la directive de l’employeur94. La Cour de cassation condamne ainsi
l’employeur, pour usage abusif d’une clause de mobilité, pour avoir imposé au salarié, qui
se trouvait dans une situation familiale critique ( référence à son épouse enceinte de sept
mois), un déplacement immédiat dans un poste qui pouvait être pourvu par d’autres
salariés. Cet arrêt est novateur95. En effet, la référence à la situation de famille pour le
respect d’une procédure de mutation pouvait être prévue dans des conventions collectives.
Mais, pour la première fois, en l’absence de toute convention collective le prévoyant
expressément, la Haute juridiction vise la vie de couple du salarié : « situation qualifiée de
91
GAVALADA (N), Les critères de validité des clauses de non concurrence en droit du travail, Dr. soc.
1999,p. 582
92
CA Toulouse 24 avril 1998, Jurisdata 42404
93
CA Rennes 31 mars 1998, Jurisdata 41692
94
Cass. soc. 18 mai 1999, Société Legrand c/ M. Rochin, Dr. soc.1999, p 734, note Gauriau
26
Le couple et le droit du travail
critique, tant la soudaineté de la décision eut un impact psychologique auprès de la future
mère et laissa présager quelques difficultés relatives à la période de l’accouchement. Du
moins aurait-il fallu donner un peu de temps au couple pour qu’il soit en mesure de
réorganiser sa vie de famille…96 ».
Ainsi les juges, en l’absence de tout texte, prennent parfois l’initiative de se référer
à la vie couple du salarié. Ils créent ainsi un lien de dépendance entre les membres de
couple en ce qu’ils viennent limiter, de par l’existence du conjoint, concubin ou partenaire,
les possibilités d’imposer au salarié une restriction à son contrat de travail. La vie de
couple est donc un élément essentiel de la vie du salarié non occulté par les juges.
Un autre exemple significatif de cette dépendance entre les membres du couple en
droit du travail peut être trouvé dans l’application de l’article L 351-1 du code du travail
relatif aux garanties de ressources des travailleurs privés d’emploi. En l’occurrence,
l’allocation de remplacement ne peut être versée qu’aux travailleurs involontairement
privés d’emploi. La démission d’un salarié ne pourra donc lui permettre de se voir octroyer
un tel revenu. Néanmoins, il est des hypothèses où la démission sera assimilable à une
perte involontaire d’emploi en ce qu’elle a été causée par un motif reconnu légitime par la
Commission paritaire de l’Assedic97. A cet égard, la jurisprudence a été amenée à
considérer qu’ « est un motif légitime de démission le fait pour une employée de
collectivité locale de quitter son emploi pour suivre la personne avec qui elle vit depuis
plusieurs années en concubinage notoire et qui fait l’objet d’une mutation professionnelle
dans une ville éloignée98 »
Dans toutes ces hypothèses, le juge et le législateur font référence, directement ou
non, au couple formé par le salarié et son conjoint ou concubin, pour lui accorder certains
avantages au nom du droit à une vie familiale normale. Les membres du couple sont donc
en ce sens dépendants l’un de l’autre, mais à leur profit. Il est toutefois des circonstances
où la vie de couple et l’existence d’un lien affectif entre deux salariés, de la même
95
GAURIAU (B), note sous Cass. soc. 18 mai 1999, précité supra note n° 94
ibid.
97
Cass. soc. 20 mars 1990, RJS 1990, p. 295
96
27
Le couple et le droit du travail
entreprise ou non, doivent être nécessairement prises en compte à leur détriment au vu
d’un intérêt supérieur : celui de l’entreprise.
Section II ) Une dépendance nécessaire dans l’intérêt de l’entreprise:
Comme l’indique Marie-Cécile Escande-Varniol : « le statut de salarié ne peut
faire perdre à un individu son identité propre ; législateur, jurisprudence et doctrine se sont
souvent montrés attentifs à protéger la vie privée ou extra professionnelle du salarié afin de
résoudre le difficile problème de la rencontre de deux sphères qui se repoussent et qui
s’attirent en se recouvrant partiellement : la conciliation des intérêts de l’entreprise et de
l’exercice des libertés fondamentales des salariés99 ». Il appartient donc à l’employeur,
contrôlé par le juge, d’opérer une conciliation entre la vie de couple du salarié et la
nécessité de protéger les intérêts de son entreprise.
Or, il est des cas où l’existence d’une relation amoureuse apparaît comme un frein à
la bonne exécution de la relation de travail d’un salarié. Il est ainsi des circonstances où
existe une incompatibilité entre la vie de couple et le travail de l’un ou l’autre des
membres, au regard de la spécificité de certaines fonctions ( §1 ) ou du trouble au bon
fonctionnement de l’entreprise qu’entraîne une telle relation ( §2 ).
§1 – Incompatibilité du couple avec l’exercice de certaines fonctions :
Certaines dispositions législatives prennent en compte la vie de couple d’un salarié
pour refuser à son conjoint ou compagnon d’exercer des fonctions spécifiques au sein de
l’entreprise. Ces fonctions sont présumées incompatibles avec la qualité de conjoint de
l’employeur.
Ainsi, concernant l’élection des délégués du personnel, l’article L 423-8 du code du
travail indique que les membres de la famille du chef d’entreprise y compris son conjoint
98
CE 25 septembre 1996, Quot. Jur. 09 janvier 1997
ESCANDE-VARNIOL (MC), Les éléments constitutifs d’une cause réelle et sérieuse de licenciement pour
motif extraprofessionnel, RJS 7/93, p. 403
99
28
Le couple et le droit du travail
ne sont pas éligibles à cette fonction et ne peuvent ainsi valablement représenter le
personnel. Cette règle est identique en matière d’élection des membres du Comité
d’entreprise (article L 433-5 du code du travail). Donc, le conjoint du chef d’entreprise ne
peut-être ni délégué du personnel, ni membre du Comité d’entreprise. Cette règle n’a pas
toujours existé et ainsi, avant 1973, rien n’empêchait le conjoint d’occuper l’une ou l’autre
de ces fonctions. Cependant, et comme le soulignait le Professeur Rouast en 1962 : « il est
vraisemblable que le fait qu’ils ont des relations familiales sera toujours un obstacle à ce
qu’ils soient choisis par les autres employés pour les représenter dans ces diverses
fonctions 100». La qualité de conjoint du chef d’entreprise est donc aujourd’hui un obstacle
à son éligibilité, le législateur faisant ici prévaloir le lien de dépendance unissant les
membres du couple.
De la même façon, en matière de mandatement syndical prévu par la loi Aubry
II101, l’alinéa 3 de l’article 19 VI énonce que « ne peuvent être mandatés les salariés qui en
raison des pouvoirs qu’ils détiennent, peuvent être assimilés au chef d’entreprise, ainsi que
les salariés apparentés au chef d’entreprise mentionnés au 1er alinéa des articles L 423-8 et
L 433-5 du code du travail ». Rappelons simplement ici que le mandatement est une
délégation de pouvoirs d’une organisation syndicale à un salarié de l’entreprise en vue de
la négociation et de la conclusion d’un accord d’entreprise. Il permet en quelque sorte
d’accréditer ponctuellement un salarié pour une négociation d’entreprise.
En ces hypothèses, le législateur prend acte de l’absence de compatibilité de la
qualité de représentant du personnel ou de mandaté syndical, avec celle de conjoint du chef
d’entreprise. En effet, le risque est trop grand de voir le conjoint de l’employeur subir des
pressions importantes de la part de celui-ci et ne pas pouvoir remplir les fonctions qui lui
sont assignées avec suffisamment de crédibilité. L’existence d’un lien affectif entre les
membres du couple implique trop de risques. Il est à noter cependant que le législateur ne
vise pas les concubins en la matière : pourtant, les risques sont identiques.
100
101
ROUAST (A), Le droit du travail familial, Dr. soc., p. 160
loi n° 98-461 du 13 juin 1998, article 19 VI, JO du 14 juin 1998
29
Le couple et le droit du travail
Quoiqu’il en soit, l’intérêt de l’entreprise et la bonne exécution des mandats
explique que le législateur n’admette pas l’éligibilité du conjoint du chef d’entreprise. Le
risque d’atteinte à l’intérêt de l’entreprise est trop grand : la crainte est ici légitime.
§2 - Incompatibilité de la vie de couple avec le bon fonctionnement de l’entreprise :
La Cour de cassation tire du droit au respect de la vie privée, l’impossibilité de
rompre le contrat de travail d’un des membres du couple pour une cause liée à sa vie
personnelle102. Ainsi, en principe, la vie de couple est sans incidence sur la vie
professionnelle de chacun. Cependant, une exception doit venir limiter ce principe :
l’hypothèse où, du fait de la vie de couple, un salarié trouble le bon fonctionnement de
l’entreprise.
Ce n’est, comme l’indique le Professeur Savatier, « que l’application du principe
posé à l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme : ″ la liberté consiste à pouvoir
faire tout ce qui ne nuit pas à autrui ″103 ». Il est ainsi légitime de penser que la liberté de
tout salarié dans sa vie de couple est totale, tant qu’elle ne crée pas au sein de l’entreprise
un trouble. Si tel est le cas, il découlera de l’existence d’une relation affective, une
dépendance entre les membres du couple, au détriment du salarié.
Dès lors, « il est possible que des agissements en lien avec la vie de couple du
salarié soient une cause réelle et sérieuse de licenciement quand ils apportent un trouble à
l’entreprise104 ». Cette constatation résulte d’un arrêt du 20 octobre 1976 selon lequel
l’employeur ne pouvait se prévaloir à l’encontre du salarié « de faits de sa vie privée, dès
lors qu’il n’était pas établi que ses liaisons féminines auraient été à l’origine d’un scandale
et auraient eu des répercussions sur l’exécution de ses obligations professionnelles105 ». A
contrario, l’existence de preuves que les liaisons du salarié aient été de nature à mettre en
102
Cass. soc. 17 avril 1991, Painsecq c/ Association Fraternité Saint Pie X, JCP 1991 II, 21724, note Sériaux
SAVATIER (J), Le licenciement, à raison de ses mœurs, d’un salarié d’une association à caractère
religieux, Dr. soc. 1991, p. 489
104
GILLES (AM), op. cit., p. 130
105
Cass. soc. 20 octobre 1976, Foyer de retraite du combattant c/ Dumas, Bull. civ. V, n° 508
103
30
Le couple et le droit du travail
péril le bon fonctionnement de l’entreprise, aurait constitué une justification du
licenciement. En ce sens, un cadre marié et père de cinq enfants, entretenant une liaison
avec une jeune employée de l’entreprise, a pu être considéré comme ayant eu un
comportement portant atteinte au bon ordre de l’établissement et justifiant son
licenciement106. De la même façon, a été licencié pour faute grave un salarié, homme
d’entretien et charcutier, entretenant des relations adultères avec la femme de l’employeur
laquelle avait quitté le domicile conjugal pour vivre avec lui. En l’espèce, le licenciement a
été tiré d’une cause liée à la vie privée mais au regard du « comportement déloyal et
injurieux au sein de l’entreprise familiale107 ». Ainsi, du fait du « caractère malsain
résultant de la situation108 », le juge a pu considérer que l’existence d’un lien affectif au
sein du couple formé par le salarié et l’épouse de son employeur, créait un trouble à
l’entreprise.
Dès lors, la référence au « bon fonctionnement de l’entreprise » permet parfois de
justifier une sanction prise à l’encontre d’un salarié au regard de sa vie de couple. Depuis
un arrêt du 17 avril 1991, les juges rappellent ainsi que « si en principe il ne peut être
procédé au licenciement d’un salarié pour une cause tirée de sa vie privée, il en est
autrement lorsque le comportement de l’intéressé, compte tenu de ses fonctions et de la
finalité propre de l’entreprise, a créé un trouble caractérisé au sein de cette dernière109 ».
Comme l’indique Jean Savatier « la référence à la nature des fonctions et à la
finalité de l’entreprise implique une appréciation in concreto des motifs justifiant le
licenciement 110». Ainsi, la référence à la vie de couple pourra constituer ou non une cause
réelle et sérieuse de licenciement selon les tâches confiées au salarié ou selon la nature de
l’entreprise.
Aussi, une société a pu reprocher à un cadre d’avoir volontairement frappé sa
compagne elle-même salariée « à proximité de l’usine où il avait travaillé dans le passé et
était connu des salariés, à l’heure où l’équipe de l’après-midi quittait son poste… » pour
106
Cass. soc. 19 juillet 1965, L c/ Société des établissements F, Dr. soc. 1966, p. 35
CA Versailles 27 mai 1986, Volovick c/ Masseboeuf, D. 1986, IR, p. 420
108
CA Paris 13 février 1985, Delot c/ Celis, D. 1985, IR, p. 269
109
Cass. soc. 17 avril 1991, précité supra note n°102
110
SAVATIER (J), Le licenciement, à raison de ses mœurs, d’un salarié d’une association à caractère
religieux, op. cit. , p. 488
107
31
Le couple et le droit du travail
justifier son licenciement111. Pareillement, le fait pour une salariée d’avoir eu une liaison
avec son employeur, désormais décédé, entraîne un état permanent de tension entre la
salariée et la veuve ayant succédé à son époux à la tête de la société, de nature à nuire à
l’entreprise112.
Surtout, la notion de finalité propre de l’entreprise à laquelle se réfère la Cour de
cassation n’est pas sans rappeler la célèbre jurisprudence Dame Roy ayant opposé une
institutrice à l’établissement privé d’enseignement catholique qui l’avait licencié en raison
de son remariage après divorce. L’Assemblée plénière de la Cour de cassation, après avoir
posé en principe qu’il ne pouvait « être porté atteinte sans abus à la liberté du mariage par
un employeur que dans des cas très exceptionnels où les nécessités des fonctions l’exigent
impérieusement113 », avait justifié le licenciement de l’enseignante au motif que
l’établissement « attaché au principe de l’indissolubilité du mariage, avait agi en vue de
sauvegarder la bonne marche de son entreprise, en lui conservant son caractère propre et sa
réputation 114».
Certains ont pu se demander si cette jurisprudence n’était pas « périmée 115» avec
l’introduction des articles L 122-45 du code du travail et L 123-1 du code du travail ,
interdisant respectivement les sanctions et licenciements en raison de la situation de
famille, et les discriminations en fonction du sexe ou de la situation de famille. Cependant
au regard de l’arrêt précité du 17 avril 1991116 touchant un litige opposant une association
religieuse et un salarié homosexuel, il semble que cette solution demeure valable pour les
entreprises de tendance. Il a été ainsi jugé que « dans certaines entreprises à tendance
idéologique, l’employeur est en droit d’exiger de ceux de ses salariés chargés par lui d’une
mission spirituelle un mode de vie et de pensée conformes à leurs finalités117 ». Ainsi,
lorsque le salarié, dans sa vie de couple, est en contradiction avec les valeurs morales ou
les doctrines promues par l’entreprise au service de laquelle il s’est engagé, et qu’en raison
111
Cass. soc. 1er avril 1992, Oberle c/ SAIC Velcorex, RJS 5/92, n° 576, p. 328
Cass. soc. 1er avril 1992, Gaillard c/ SA Bourrée et fils, RJS 5/92, n° 577, p. 329
113
Cass. Ass. Plén. 19 mai 1978, Dame Roy c/ Association pour l’éducation populaire Sainte Marthe,
D. 1978, p. 541
114
Ibid.
115
SAVATIER (J), Vie de couple et rapports de travail, op.cit., p. 425
116
Cass. soc. 17 avril 1991, précité supra note n° 102
117
CA Paris, 29 janvier 1992, Association Fraternité Saint Pie X c/ Painsecq, Dr. soc. 1992, p. 335
112
32
Le couple et le droit du travail
de ses fonctions, il apporte un trouble caractérisé à l’entreprise, une sanction apparaît
justifiée aux yeux des juges.
Dans toutes ces hypothèses, le salarié voit dans sa vie de couple une justification
d’une sanction prise à son égard. Le juge fait en effet prévaloir l’intérêt de l’entreprise au
vu du trouble apporté à son fonctionnement. Ainsi, « sous couvert du critère de l’intérêt de
l’entreprise, le comportement du salarié dans sa vie personnelle peut avoir des incidences
sur sa relation de travail 118».
Le droit du travail se réfère ainsi dans nombre de cas à la vie de couple du salarié
afin de concilier celle-ci avec la relation de travail de ses membres.
Dans d’autres circonstances, le droit du travail permet la création entre les membres
du couple d’une relation contractuelle particulière ayant pour effet de créer entre ses
membres un lien d’indivisibilité : le contrat de couple.
118
BROCHETON (P), Vie personnelle et vie professionnelle, l’art de l’équilibre, Semaine sociale Lamy,
janvier 1999, n° 915, p. 7
33
Le couple et le droit du travail
CHAPITRE II :
Une dépendance voulue par le couple
Il est généralement admis
que « le contrat de travail procède d’une relation
purement individuelle entre employeur et salarié 119». Le contrat de travail s’analyse en
effet, comme la convention par laquelle une personne s’engage à mettre son activité à la
disposition d’une autre sous la subordination de laquelle elle se place moyennant une
rémunération120. La conclusion d’un contrat de travail lie ainsi deux parties : la salarié qui
s’engage à fournir personnellement une prestation de travail et l’employeur qui contrôle
l’exécution du travail et en sanctionne l’inexécution.
Cependant, ce schéma contractuel classique peut être écarté dans quelques
hypothèses. Ainsi en est-il, par exemple, lorsqu’un salarié s’engage à effectuer une
prestation de travail pour plusieurs employeurs tenus solidairement envers lui. A l’inverse,
il arrive qu’un employeur ait à recruter pour une même tâche ou pour des tâches
complémentaires plusieurs salariés. Ainsi, un seul et même contrat pourra généralement
lier les salariés qui seront considérés solidaires l’un de l’autre, leur engagement étant
indivisible121. Apparaît donc ici la notion de contrat de travail collectif lequel peut être
défini comme « unissant pour l’accomplissement d’une tâche moyennant le versement
d’un salaire un employeur à plusieurs personnes agissant ensemble et de concert
solidairement et individuellement122 ».
Les contrats de travail collectifs étaient déjà connus en matière de travaux agricoles
saisonniers123 (pour exemple Cass soc 24 février 1961124) et encore aujourd’hui dans le
119
MOUVEAU (E), Le contrat de couple et le droit du travail, D. 1998, p. 385
C. trav. article L 120-2
121
Cass. soc. 04 mars 1981, Boudaud c/ Ranger, Bull. civ. V, n° 177
122
PANSIER (FJ), Le contrat de couple, Cah .soc. barreau, n° 115, p. 349
123
ibid.
124
Cass. soc. 24 février 1961, Consorts Baudon et Miquel, Dr. soc.1961,p. 359
120
34
Le couple et le droit du travail
domaine du spectacle125, même s’il semble qu’ils ne connaissent pas actuellement un grand
développement126.
A vrai dire, la situation la plus fréquente est celle du contrat conclu avec un couple
de travailleurs dont la vie commune facilite l’exécution de la prestation de travail, sans que
le mariage ne soit une condition de validité du contrat127 : on parlera alors de contrat de
couple. Ce type de contrat est utilisé notamment pour les employés de maison, gardiens
d’immeuble ou encore gérants salariés de magasins.
Il convient dès à présent de différencier ce contrat de couple, des hypothèses de
partage d’un même poste de travail occupé alternativement par deux travailleurs, mais qui
ne forment pas nécessairement un couple au sens affectif du terme. Ces situations seront
donc écartées de la présente étude. En effet, « si rien n’empêche la mise en place de cette
pratique, il nous semble opportun de ne pas utiliser le terme de couple pour éviter une
confusion128 ».
Comme l’indique le Professeur Jean Mouly, le contrat de couple est « une pratique
avérée dans les relations sociales, même si l’usage de ces contrats reste relativement
marginal, limité à certaines professions (...) et s’il est peu probable que la promotion
actuelle dans le droit civil contemporain de la notion de couple puisse faire sortir ce type
de convention de sa marginalité 129».
Au regard d’un certain nombre d’incertitudes textuelles, le contrat de couple est
aujourd’hui critiqué et remis en cause130. Ces contrats semblent en effet poser problème eu
égard à certaines dispositions impératives du code du travail, et donc au vu de leur légalité.
Ainsi, certains auteurs relèvent-ils « la contrariété de principe131 » entre le contrat de
couple, contrat collectif, et le droit du contrat de travail par essence individuel. En effet, la
125
C. trav. Art. L 762-1 alinéa 4
PANSIER (FJ), loc. cit.
127
Cass. soc. 07 mai 1986, Madame Genco c/ SARL Gérance Varoise, Bull. civ. V, n° 204
128
GILLES (AM), op. cit., p. 138
129
MOULY (J), note sous Cass. soc. 18 novembre 1998, Duarte c/ copropriéte Le Buffon, D. 1999, p. 443
130
MOUVEAU (E), loc. cit. ; MOULY (J), op. cit., p. 445
131
MOUVEAU (E), loc.cit.
126
35
Le couple et le droit du travail
stipulation d’un lien d’indivisibilité entre les engagements des membres modifie la nature
du contrat de travail et influe sur le régime juridique applicable.
Il n’apparaît pas nécessaire de développer ici davantage les objections à l’encontre
du contrat de couple, elles-mêmes développées par divers auteurs, sauf à considérer que
celles ci pourraient, à terme, venir remettre en cause l’application pratique de ces contrats,
leur utilisation par les employeurs. Ainsi, pour certains auteurs, l’avenir du contrat de
couple s’avère « passablement écorné132 ».
Ces critiques, quant à l’incompatibilité de certaines dispositions impératives du
code du travail avec le contrat de couple, peuvent s’expliquer d’autant plus facilement que
le contrat de couple n’est régi par aucune disposition du code du travail. Cependant, bien
que non visé par les textes légaux, le contrat de couple doit être présumé valable dès lors
qu’il n’est pas expressément interdit133. D’ailleurs, « la jurisprudence admet, malgré le
silence de la loi, la liceité de ces contrats de couple134 ».
C’est donc aux juges qu’il faut se référer en la matière, ceux ci ayant été amenés à
faire face à cette question de la conciliation du droit du travail avec la volonté des membres
d’un couple de lier leurs engagements professionnels. La difficulté majeure à relever est
que le contrat de couple fait appel tant à des mécanismes propres au droit du travail qu’à
des notions intégrées au droit commun des contrats135. Aussi, le recrutement par un
employeur d’un couple de travailleurs est-il rendu plus complexe du fait du rapport
d’indivisibilité établi entre eux.
Face à la carence de la loi, les tribunaux ont eu à intervenir pour établir les
conditions de validité de tels contrats et préciser les effets entre les membres de
l’indivisibilité des engagements. Destiné à répondre à certaines situations spécifiques de
travail, le contrat de couple suscite moult interrogations.
Prise en considération par le droit du travail de la vie de couple, il se caractérise par
la volonté de ses membres de lier leurs engagements et donc de créer un lien de
132
ibid.
PANSIER (FJ), loc.cit.
134
SAVATIER (J), Vie de couple et rapports de travail, op.cit., p.423
135
SORDINO (MC), Réflexions sur le contrat de travail conclu avec un couple de travailleurs, PA, 31 juillet
1996, n° 92
133
36
Le couple et le droit du travail
dépendance. L’intérêt de la présente étude sera, afin de déterminer l’usage dont il est fait
de la notion de couple dans cette hypothèse, de souligner comment se manifeste cette
interdépendance entre les membres du couple ( Section I ) pour en déterminer les effets
entre eux ( Section II ).
Section I ) Le contrat de couple ou la stipulation d’engagements indivisibles :
Les tribunaux sont régulièrement appelés à trancher les différends liés à
l’application des contrats de couple. Découle de cette jurisprudence un certain nombre de
règles permettant d’apprécier les conditions de validité d’un tel contrat et ses effets sur les
membres du couple.
La jurisprudence sociale utilise le terme d’ « indivisibilité » pour caractériser le lien
entre les deux travailleurs136. En effet la Cour de Cassation a expressément reconnu
l’indivisibilité des engagements souscrits entre deux époux dans un arrêt de 1981 :
« l’engagement de B… était, de l’aveu même de ce dernier qui avait invoqué la nécessaire
collaboration de son époux pour lui permettre de remplir les fonctions à lui proposées par
la société, concomitant et indivisible, de celui de Dame B…137 ». Depuis, cette
qualification a toujours été réaffirmée par la jurisprudence et emporte avec elle nombre de
conséquences pour les parties au contrat.
Quoiqu’il en soit, avant de déterminer les effets d’une telle indivisibilité, encore
faut-il constater comment elle se manifeste concrètement ; c’est à dire déterminer comment
le contrat de couple est significatif d’une dépendance entre les membres du couple.
Or, cette interdépendance se voit révélée dès la conclusion du contrat de couple,
tant par les conditions de fond de celui-ci, à savoir l’adéquation du couple au regard des
fonctions à accomplir (§1) que par les conditions de forme, à savoir la volonté des
membres du couple de lier leurs engagements (§2).
136
137
GILLES (AM), op. cit., p.139
Cass. soc. 04 mars 1981, précité supra note n° 121
37
Le couple et le droit du travail
§1- L’ adéquation du couple à la spécificité des fonctions à accomplir :
Le contrat de couple n’est admissible que sous certaines conditions, à savoir
l’existence d’un couple (A), et la complémentarité des fonctions à exercer (B).
A) Le couple, condition essentielle de validité du contrat de couple :
La conclusion d’un contrat de couple nécessite la signature, conformément à son
intitulé même, d’un couple. Mais dans cette hypothèse, qu’entend-t-on sous ce terme ? Le
contrat de couple est- il exclusivement réservé aux époux ?
Selon Fréderic-Jérome Pansier, « la notion de couple ne se confond pas avec le
statut du mariage. Il suppose seulement qu’il existe entre les deux salariés des relations
présentant un caractère suffisant de stabilité, de continuité et de notoriété, manifesté par la
vie commune, afin que le travail en commun concorde avec la situation personnelle des
salariés, et soit présumée conforme à leurs désirs138 ».
Dès lors, le mariage n’est pas une condition de validité du contrat de couple qui
s’étend à toute relation affective entre deux individus. Ainsi, la Cour de cassation, dans un
arrêt du 07 mai 1986139 donne effet à un contrat de couple conclu entre une salariée
engagée en qualité de concierge et son concubin recruté en tant que surveillant jardinier.
De même, ont vocation à signer un tel contrat et lier leurs engagements de manière
indivisible, les relations impliquant une communauté de vie telles l’union libre ou encore le
PACS. Cependant, ces relations doivent présenter un degré suffisant de stabilité et de
sérieux. Comme l’indique le Professeur Savatier : « dans ces contrats de couple,
l’employeur ne consent au contrat qu’en raison de la vie commune des deux salariés,
nécessaire pour l’exécution des prestations de travail140 ».
Cette condition de validité qu’est l’existence d’un couple a pour corollaire la
résiliation du contrat de couple en cas de disparition du couple pour quelque cause que ce
138
PANSIER (FJ), loc.cit.
Cass. soc. 07 mai 1986, précité supra note n° 127
140
SAVATIER (J), op.cit., p. 423
139
38
Le couple et le droit du travail
soit141. Ainsi, en cas de divorce, de séparation des concubins ou des partenaires, ou encore
en cas de décès, la condition déterminante qu’est l’existence d’une vie de couple, disparaît.
En toute logique, le défaut d’un élément essentiel a pour conséquence que soit vidé de tout
sens le contrat de couple.
Au regard de cette conséquence néfaste du contrat de couple, il est à relever
l’intervention de la Cour d’appel de Paris dans un arrêt du 10 mars 1994142. Elle vient en
effet rappeler que le fait de lier le sort du contrat de travail d’un couple de concubins
engagés en qualité de gérants de magasins à la séparation ou au divorce du couple
constitue une restriction apportée par l’employeur au droit des époux ou des concubins de
se séparer. Or, en l’espèce, avait été inscrite dans deux contrats une clause prévoyant leur
résiliation automatique en cas de séparation ou de divorce. Au nom de la liberté pour un
couple de se séparer, les juges du fond considèrent qu’une telle clause n’est pas admissible,
la société n’apportant aucun élément propre à justifier de son obligation de recourir à
l’emploi d’un couple de gérants. La cour de Paris vient donc poser en principe, sur le
fondement de l’article L 120-2 du code du travail, que la relation de cause à effet selon
laquelle la disparition du couple entraîne la résiliation du contrat de travail ne pourra être
prévue que dans des cas strictement et évidemment nécessaires. Elle vient par la même
réduire au strict minimum les possibilités de recours à un contrat de couple.
En outre, le contrat de couple n’est légitimement admissible que dans certaines
professions impliquant des fonctions liées.
B) L’ interdépendance des fonctions occupées par le couple :
Le contrat de couple trouve sa cause dans la volonté, tant de l’employeur que du
couple, de lier les engagements des deux salariés de manière indivisible, au regard de
l’activité et de la tâche à accomplir qui leur est commune et complémentaire. Dans cette
optique, ce type de contrat régit le plus souvent la situation des employés de maison (même
si le recrutement de ce personnel est en nette régression), mais aussi des gardiens
d’immeuble ou encore des gérants.
141
PANSIER (FJ), op.cit., p. 350
39
Le couple et le droit du travail
Dans ces hypothèses, l’utilisation de ce type de contrat s’explique et trouve sa
légitimité dans l’interdépendance existant entre les fonctions et missions à charge des
travailleurs. En effet, « l’exécution de ces prestations de travail doublée parfois de
l’attribution d’un logement de fonction, implique une collaboration étroite entre
salariés…143 ». Comme l’indique le Professeur Savatier, « l’interdépendance des contrats
liant chaque membre du couple à l’employeur n’est admissible que si ces contrats portent
sur des emplois complémentaires et si les salariés concernés trouvent un avantage à l’union
de leur contrat144 ». Ces conditions expliquent que le recours au contrat de couple soit
assez limité.
Antérieurement, le recours au contrat de couple était courant pour le personnel
domestique145 : ainsi, un couple était embauché à charge pour l’époux d’être jardinier ou
chauffeur et pour la femme d’être cuisinière ou femme de ménage. Aujourd’hui, le
contentieux a trait surtout aux gardiens d’immeuble ou encore aux gérants salariés de
magasins. Ces emplois se caractérisent en effet par l’intérêt et la nécessité de recourir à un
couple au vu de la complémentarité et l’absence de dissociabilité des fonctions. Les
concierges et employés d’immeuble à usage d’habitation sont visés par le code du travail
depuis une loi de 1977146. L’article L 771-1 du code du travail précise les conditions qui
doivent être remplies pour bénéficier des dispositions légales : un immeuble d’habitation,
être salarié, assurer la garde, la surveillance et l’entretien de l’immeuble ou une partie de
ses fonctions. Or, souvent, des couples sont engagés pour assurer l’ensemble de ses
fonctions. De la même façon, des contrats de couple seront fréquemment signés par des
gérants ( concernés par le droit du travail).
Le contrat de couple nécessite ainsi que la relation de travail se situe pour les deux
membres du couple dans un même cadre d’activité et dans l’accomplissement de tâches
similaires ou proches : « l’unicité du contrat signifie que les tâches à réaliser, pour les
142
CA Paris,10 mars 1994, D. 1994, IR p. 139
REYNES (B), Contrat de travail et indivisibilité des engagements, PA,27 juillet 1994, n° 89, p.29
144
SAVATIER (J), Les contrats de travail conclus avec un couple de travailleurs, Dr. soc. 1994, p.239
145
ibid.
146
GILLES (AM), op. cit., p. 136
143
40
Le couple et le droit du travail
deux salariés, sont étroitement liées147 ». L’activité de chaque membre du couple est si
étroitement liée à celle de l’autre qu’on ne peut imaginer que ces tâches soient attribuées à
deux salariés totalement indépendants l’un de l’autre. Cette interdépendance des tâches est
illustrée de manière significative dans un arrêt de la Cour de cassation du 14 octobre
1993148. En cette espèce, la Haute juridiction reproche à l’employeur d’avoir rompu le
contrat de travail du couple sans tenir compte de la complémentarité des tâches. S’agissant
de conjoints gardiens d’immeuble, l’épouse victime d’un accident du travail voulut
reprendre son poste mais avec une inaptitude temporaire partielle d’un mois. Suite au
licenciement des époux, la Cour de cassation est amenée à préciser que « les engagements
d’un couple de gardiens concierges étant indivisibles et sauf impossibilité de maintenir le
contrat de travail, les intéressés ne pouvaient être licenciés en raison de l’inaptitude
momentanée de l’un d’eux que l’autre peut suppléer dans ses tâches149 ». Une telle
solution, soucieuse du maintien du contrat, a pour intérêt de fournir ici un excellent
exemple de la complémentarité des fonctions.
Au-delà de ces conditions de fond que sont l’existence d’un couple et la
complémentarité des fonctions, existent des conditions de forme. Celles-ci permettront de
déterminer les sources de l’indivisibilité des engagements entre les deux salariés.
§2 -Le contrat de couple ou la dépendance conventionnelle des membres du
couple :
Il est à noter que les conditions de forme sont celles applicables à tout contrat
individuel de travail. Cependant, au vu de la particularité du contrat de couple, certaines
règles spécifiques seront à prendre en considération
Quand un employeur veut engager de manière indivisible un couple de travailleurs,
une question essentielle de pure forme va apparaître : « les époux sont-ils engagés par
deux contrats ou par un seul et même contrat ? En d’autres termes, le rapport
147
PANSIER (FJ), loc.cit.
Cass. soc. 14 octobre 1993, Gentil c/ SA Gautard immobilier, D. 1994, p. 251
149
ibid.
148
41
Le couple et le droit du travail
d’indivisibilité unit-il deux contrats distincts ou existe t-il un acte juridique unique qui
comprend deux engagements indivisibles ?150 ».
Le doute est ici permis en ce que la jurisprudence fait tantôt référence à un contrat
unique, tantôt à des contrats distincts. De même, les conventions collectives pourront
prévoir la dualité des contrats ou non. A titre d’exemple, la convention collective des
« gardiens, concierges et employés d’immeuble » prévoit en son article 2 que « si un
employeur, pour le service de l’immeuble, doit répartir les tâches demandées entre deux
conjoints, un contrat de travail devra être établi pour chacun d’eux aux conditions de la
convention collective nationale151 ». A l’inverse, d’autres conventions collectives
sembleront plus favorables à un contrat unique lorsqu’un couple est engagé152.
La jurisprudence semble faire preuve d'hésitation. Ainsi, dans certains arrêts, la
Haute juridiction fait référence à « un seul et même contrat153 », ou à l’expression «
contrat de travail commun aux deux époux154 » ou vise
« le contrat qui les liait à
l’employeur155 ». Mais, et à la suite de Marie-Claire Sordino156, il convient de se demander
si ces expressions visent une unité de negotium ou d’instrumentum. Sachant que la
formation de plusieurs negotia n’est pas exclusive d’un unique instrumentum, évoquer un
seul contrat de travail n’est ainsi pas forcément significatif. D’ailleurs, d’autres
jurisprudences se réfèrent à une dualité de contrats de travail157 : encore récemment, un
arrêt de la Cour de cassation du 18 novembre 1998158 vise les contrats de travail des époux.
La doctrine semble elle-même être favorable à cette solution159. En fait, la jurisprudence
semble admettre que « les deux manières de procéder sont également valables160 ».
150
SORDINO (MC), loc.cit.
Convention collective des « gardiens, concierges et employés d’immeuble », Avenant départemental
Alpes Maritimes, n° 1, novembre 1981, article 2
152
MOULY (J), note sous CA Limoges 17 décembre 1990, SNC Cuff et compagnie c/ Madame Sparato,
Dt.soc. 1991, p.596
153
Cass. soc. 04 mars 1981,précité supra note n° 121
154
Cass. soc. 14 octobre 1993, précité supra note n° 148
155
Cass. soc. 17 mars 1993, Sag c/ Koziel, RJS 4/93, n° 423, p. 255
156
SORDINO (MC), note sous Cass. soc. 14 octobre 1993, précité supra note n° 148
157
Cass. soc. 30 novembre 1977, Epoux Radenac c/ Société Hochet et compagnie, Bull. civ. V, n° 654 ; Cass.
soc. 07 mai 1986, précité supra note n°127
158
Cass. soc. 18 novembre 1998, précité supra note n° 129
159
MOULY (J), note sous CA limoges 17 décembre 1990, précité supra note n° 152
160
PANSIER (FJ), loc.cit.
151
42
Le couple et le droit du travail
Donc, pour produire effet, les engagements du couple peuvent être souscrits tant
dans le cadre de deux contrats distincts que dans un seul contrat de travail. « Dans un souci
de simplicité, l’expression générique ″contrat de couple ″ communément employée,
désigne ici indifféremment les deux situations161 » : soit le dispositif contractuel est
organisé en un groupe indivisible de deux contrats, soit un contrat unique comprend deux
engagements indivisibles.
Reste maintenant à déterminer comment se manifeste cette indivisibilité, comment
elle naît.
Par définition, l’indivisibilité apparaît comme « l’état de ce qui ne peut être
divisé 162». Lorsque deux époux ou concubins sont embauchés ensemble, leurs
engagements pourront être dits indivisibles, que cette indivisibilité résulte d’une
manifestation expresse ou non de volonté des parties. Comme l’indique Marie-Claire
Sordino, « la volonté est la source primordiale de l’indivisibilité 163». Il est en effet
nécessaire que les époux acceptent de travailler l’un avec l’autre et acceptent que le sort de
l’engagement de l’un soit lié au sort de l’autre de manière indissociable.
L’indivisibilité des engagements peut être expressément stipulée par le biais d’une
clause d’indivisibilité, insérée par les parties dans le contrat de travail des salariés. La
prestation de travail est alors indivisible « intellectuellement » en ce que l’objet de
l’obligation, envisagé in abstracto, n’est pas nécessairement indivisible, mais le devient en
raison du but que les parties ont assigné à l’obligation164. Nombreux sont les cas où le
couple recourt à une telle stipulation : le contrat précise alors que les obligations devront
être exécutées conjointement et solidairement, ou encore que la cessation des fonctions de
l’un entraînera la cessation des fonctions de l’autre165. Un arrêt de la Cour d’appel de
Toulouse du 25 juin 1999166 vient cependant rappeler qu’ « une clause d’indivisibilité des
contrats de travail consentis à deux époux ou concubins ne peut être librement stipulée
161
NEVIERE (E), note sous Cass. soc. 18 novembre 1998, Duarte c/ copropriété Le Buffon, Défrenois 1999,
n°15-16, p.855
162
SORDINO (MC), note sous Cass. soc. 14 octobre 1993, précité supra note n° 148
163
ibid.
164
REYNES (B), op.cit., p. 30
165
Cass. soc. 07 mai 1991, M.X c/ Agence Martinet, Bull. civ. V, n° 221
166
CA Toulouse 25 juin 1999, SA Mutilchauss c/ Klelifa, RJS 11/99, n° 1415
43
Le couple et le droit du travail
quels que soient les emplois en cause, dans la mesure où elle reviendrait à écarter pou l’un
des deux conjoints les garanties d’ordre public en matière d’emploi ». En l’espèce, la Cour
d’appel considère que l’interdépendance des deux contrats n’est admissible que si ces
derniers portent sur des emplois complémentaires, si l’activité des deux conjoints est
indissociable et si l’employeur est dans l’impossibilité de maintenir l’un des emplois sans
l’autre. Le dispositif contractuel ainsi mis en place met les engagements des deux époux ou
partenaires dans la dépendance l’un de l’autre. Mais parfois, l’indivisibilité des
engagements doit être déduite non d’une clause expresse de volonté mais de certains
éléments caractéristiques.
En l’absence de clause expresse d’indivisibilité, le principe est la divisibilité des
engagements. En effet, la création d’un tel lien nécessite une volonté non équivoque des
parties. Cependant, parfois, le juge pourra déduire l’indivisibilité des modalités d’exercice
des fonctions. Certains éléments pourront ainsi aider le juge dans sa recherche de la
commune intention des parties : l’existence d’un salaire global167, d’un logement de
fonction168…Il appartiendra donc aux tribunaux de déduire de la présence de ces éléments
l’existence d’un rapport d’indivisibilité entre les membres du couple.
Une fois définies ces conditions de validité du contrat de couple et par la même les
marques de l’interdépendance entre les membres du couple, il convient d’en déterminer les
effets.
Section II) Les effets entre les membres du couple de l’indivisibilité des engagements :
Le contrat de couple institue entre les membres du couple un lien d’indivisibilité.
Mais quels sont les effets d’un tel lien ? Comme l’indique le Professeur Mouly « ces
contrats ne manquent pas de faire difficulté car ils comportent le plus souvent des
stipulations qui sont de nature à tenir en échec nombre de dispositions impératives du code
167
168
Cass. soc 19 mai 1969, Bull. civ. V, n° 333
Cass. soc 14 octobre 1993, précité supra note n° 148
44
Le couple et le droit du travail
du travail, en particulier dans le domaine de la rupture. C’est d’ailleurs à ce propos que se
noue le contentieux, régulier sinon abondant…169 ».
L’indivisibilité des contrats signifie que l’existence d’un engagement est la
condition sine qua non de l’existence de l’autre, et donc, que la cessation de l’un entraîne
celle de l’autre. Ainsi, « la distinction entre un contrat interdépendant divisible et un
contrat interdépendant indivisible est importante car les conséquences de la rupture d’un
seul contrat ne sont pas semblables170 ». Incontestablement, si les contrats interdépendants
divisibles sont en principe sans effets l’un sur l’autre ; en cas d’indivisibilité, la rupture de
l’un aura des incidences sur celle de l’autre.
Le Professeur Savatier souligne à cet effet : « il y a des cas où la prestation de
travail promise par les deux membres d’un couple est indivisible de sorte que l’un ne peut
exécuter cette prestation dès lors que l’autre n’y participe plus, soit à la suite d’un
licenciement, soit pour toute autre cause 171».
Mais dans quelle mesure la rupture de l'engagement d’un membre du couple aura telle une incidence sur l’autre ? Quelle est la valeur de cette interdépendance, le degré de
cette dépendance ? La question des effets entre les membres du couple de l’indivisibilité
des engagements a fait l’objet d’une évolution jurisprudentielle très importante. De cette
évolution pouvons nous retirer un riche enseignement quant à l’appréhension par le droit
du travail et ses juridictions de la notion de couple.
L’évolution en la matière est en effet significative en ce qu’elle marque un passage
d’une rupture automatique de la relation de travail de l’autre membre du couple en cas de
cessation de l’activité de l’un (§1 ) à une rupture contrôlée ( §2 ).
§1- Une rupture automatique critiquable :
Dans un premier temps, la jurisprudence faisait découler de l’indivisibilité des
engagements du couple, la justification d’une rupture « par voie de conséquence » de la
169
MOULY (J), note sous 18 novembre 1998, précité supra note n° 129
GILLES (AM), loc. cit.
171
SAVATIER (J), Vie de couple et rapports de travail, op. cit. , p.424
170
45
Le couple et le droit du travail
relation de travail de l’époux dont le conjoint avait vu son contrat de travail rompu. Ainsi,
la Cour de cassation dans un arrêt du 30 novembre 1977 pouvait estimer que
« l’interdépendance des fonctions ne permettait pas de dissocier l’exécution de leurs
contrats de travail et que la rupture justifiée de celui du mari avait constitué en l’espèce une
cause réelle et sérieuse de rupture de celui de la femme172 ». Dès lors, un motif de
licenciement à l’encontre du mari justifiait le licenciement de l’épouse pour une cause
réelle et sérieuse. De la même façon, en 1988173, la Cour de cassation faisait produire effet
à la clause d’un contrat de couple prévoyant que celui-ci était conclu sous la condition
essentielle et déterminante de l’emploi des deux époux et qu’en cas d’empêchement d’un
d’eux, le contrat se trouverait résilié.
Ce mécanisme de rupture par ricochet suscitait toutefois un certain nombre de
questions, en ce qu’ il conduisait notamment à l’exclusion des règles protectrices du
licenciement.
En outre, un arrêt de 1981 décidait, à la suite d’une démission de la femme, que le
contrat unique, concomitant et indivisible de l’époux devait être rompu « du fait de celui
ci ». En l’espèce, la Cour de cassation approuvant les juges du fond, décidait donc qu’une
seule et même qualification devait être donnée aux ruptures. Ainsi, elle affirmait que « le
départ de Madame B… avait eu pour résultat d’entraîner la rupture du contrat de travail
unique par le fait des deux salariés 174», et donc que les deux salariés étaient
démissionnaires. Cette solution sera reprise, mais appliquée cette fois aux concubins, en
1986175.
En résumé, la jurisprudence posait le principe de la rupture automatique de
l’engagement du conjoint en cas de cessation de l’activité de l’autre, mais retenait surtout
la thèse de l’unité de qualification. L’interdépendance entre les époux était donc à son
maximum. Mais cette jurisprudence n’était pas exempte de critiques.
172
Cass. soc. 30 novembre 1977, précité supra note n° 157
Cass. soc. 14 avril 1988, Bull. civ. V, n° 235
174
Cass. soc. 04 mars 1981, précité supra note n° 121
173
46
Le couple et le droit du travail
La thèse de la rupture automatique et celle de l’unité de qualification présentent
l’inconvénient majeur de tenir en échec l’application des dispositions impératives du droit
du licenciement176. En effet, en faisant découler du rapport d’indivisibilité une rupture
automatique et un motif réel et sérieux, la jurisprudence permettait aux parties d’éluder
l’application du droit du licenciement, pourtant d’ordre public. Ces solutions étaient donc
mises à rude épreuve par la doctrine laquelle relevait perpétuellement les inconvénients
qu’elles pouvaient représenter. Ainsi, cette jurisprudence est vite apparue exagérée, comme
pouvant conduire à « des aberrations juridiques inextricables177 ».
De même, selon Fréderic-Jérome Pansier : « cette solution, cohérente en soi
puisque la disparition du couple mettait nécessairement fin au contrat de couple, pouvait
apparaître comme manifestant une injuste rigueur puisque le licenciement, que nous
supposons justifié pour fautes commises par un salarié, aboutissait à un second
licenciement atteignant le deuxième salarié de plein droit, sans que celui ci ait été en
mesure de faire état de l’absence de grief formulé à son encontre et de contester utilement
l’existence à son endroit d’une faute réelle et sérieuse178 » Si du fait du caractère
d’indivisibilité qui unit les engagements du couple, la rupture de l’un entraînant celle de
l’autre est justifiée, l’unité de régime juridique jusque dans la qualification des ruptures,
pouvait sembler excessive.
Ainsi, et comme le souligne le Professeur Pélissier, la thèse de l’unité de
qualification « ne traduit pas la réalité des situations de fait 179». En effet, dans l’espèce de
1981, l’époux qui est directeur conseil hôtelier est considéré comme démissionnaire du
seul fait de la démission de son épouse, les époux étant liés par un seul et même contrat et
l’engagement de la salariée, indivisible de celui de son mari, ayant été la condition de
l’accord de ce dernier . Or, cette solution est difficilement conciliable avec l’idée selon
laquelle une démission doit être claire et non équivoque. L’indivisibilité fait peser sur le
couple un lien tel, que l’un ou l’autre des membres du couple, pourra voir son contrat de
travail rompu à son détriment, alors qu’il n’a lui-même exprimé aucune volonté en ce sens.
175
Cass. soc. 07 mai 1986, précité supra note n° 127
MOULY (J), note sous Cass. soc. 18 novembre 1998, précité supra note n°129
177
ibid.
178
PANSIER (FJ), loc.cit.
179
PELISSIER, note sous Cass. soc. 04 mars 1981, D. 1982, p. 81
176
47
Le couple et le droit du travail
En outre, cette solution est limitée. Ainsi, lorsqu’un salarié est mis à la retraite et
que l’autre ne remplit pas les conditions légales prévues en la matière ( article L 122-14-13
du code du travail ), nul doute qu’il ne pourra bénéficier du même type de rupture.
En fait, pour certains auteurs, la rupture devrait obéir à un régime particulier qui
tirerait les conséquences juridiques du caractère conditionnel de l’engagement de l’autre.
Pour ces derniers, la rupture ne serait donc ni un licenciement, ni une démission, mais la
conséquence de la réalisation d’une condition extinctive180.
Face à ces difficultés, la jurisprudence a subi une nécessaire évolution.
§2 - Une rupture « contrôlée » privilégiée :
Les juges sont intervenus en limitant les conséquences de l’indivisibilité et donc de
l’interdépendance voulue par les parties (A). Cette évolution marque une certaine
diminution de la spécificité du contrat de couple et, est significatif d’une conception du
couple privilégiant l’autonomie de ses membres (B).
A) La réduction des effets de l’indivisibilité :
La jurisprudence récente semble rompre avec cette idée de rupture automatique et
avec la thèse de l’unité de qualification.
Ainsi, elle impose dorénavant à l’employeur qui veut rompre le contrat d’un des
époux par suite d’un évènement ayant entraîné la rupture de l’autre, qu’il ne « se borne pas
à prendre acte d’une rupture qui se serait produite automatiquement, mais respecte les
règles du licenciement181 ». Dès lors, il apparaît que les juges tendent à réduire l’impact sur
le contrat de travail du comportement de l’entourage familial du salarié182. La Cour de
cassation indique en effet, qu’en présence d’un contrat de travail prévoyant sa résiliation
automatique avec préavis légal en cas d’impossibilité pour l’un des membres d’un couple
de gardiens d’immeuble d’exercer ses fonctions, la rupture sur l’initiative de l’employeur
suite au divorce des époux et à la demande de l’autre s’analyse en licenciement.
180
ibid.
Cass. soc. 07 mai 1991, précité supra note n°165
182
GAUDU (F), Le licenciement pour perte de confiance, Dr. soc. 92, p. 35
181
48
Le couple et le droit du travail
Aussi, « la rupture du contrat de travail du conjoint non démissionnaire doit s’analyser
comme un licenciement quand l’employeur est à la base de la rupture183 ». Cette
jurisprudence condamne par la même l’analyse faite par la Cour d’appel de Limoges en
1990, qui considérait que devait être appliquée « la clause selon laquelle la rupture du
contrat entre la société et l’un des gérants entraîne ipso facto et dans les mêmes conditions
la rupture de ce contrat à l’égard de l’autre184 ».
Donc, le licenciement par ricochet sera soumis à la procédure et aux effets de droit
commun du licenciement. Comme l’indique Jean Mouly185 : « La résiliation d’un contrat
de couple par voie de conséquence est une rupture autonome par rapport à la rupture
initiale ; d’autre part, elle n’intervient pas de plein droit mais suppose, si l’employeur
entend s’en prévaloir, qu’il prenne l’initiative d’un licenciement »
Néanmoins, la Cour de cassation, dans l’arrêt Gentil du 14 octobre 1993186, vient
souligner que le licenciement d’un couple de gardiens, au motif de l’inaptitude partielle de
l’un d’eux, n’avait pas été accepté car l’époux pouvait assumer les tâches que sa conjointe
ne pouvait temporairement effectuer. L’employeur ne se trouvant pas dans l’impossibilité
de maintenir le contrat de travail, le licenciement du couple n’était pas justifié.
L’indivisibilité des engagements joue donc ici en faveur du maintien des contrats :
l’employeur devra prouver qu’il lui est impossible de remplacer l’un des salariés. En outre,
la jurisprudence rappelle que la première rupture doit être justifiée. Ainsi, un arrêt du 17
mars 1993187 vient souligner qu’en cas d’irrégularité du premier licenciement ( en l’espèce,
il s’agissait d’une autorisation administrative de licenciement non obtenue), le
licenciement de l’autre était irrégulier compte tenu du caractère indivisible des deux
engagements.
Ainsi, « le licenciement par ricochet demeure un licenciement, et non une
résolution du contrat automatique188 » : les règles légales du licenciement trouveront donc
183
ibid.
CA Limoges 17 décembre 1990, précité supra note n° 152
185
MOULY (J), note sous 18 novembre 1998, précité supra note n° 129
186
Cass. soc. 14 octobre 1993, précité supra note n° 148
187
Cass. soc. 17 mars 1993, précité supra note n° 155
188
SAVATIER (J), Les contrats de travail conclus avec un couple de travailleurs, op. cit., p. 240
184
49
Le couple et le droit du travail
à s’appliquer si l’employeur justifie d’une première rupture régulière et de l’impossibilité
pour lui de maintenir les contrats.
B) L’ « autonomie des ruptures » favorisée :
Dorénavant, en cas de rupture de l’engagement de l’un des membres du couple,
l’engagement de l’autre sera rompu, mais la rupture ne sera plus automatique et il
appartiendra à l’employeur de prendre l’initiative du licenciement.
Qui plus est, même si le premier licenciement est justifié, la Cour de cassation dans
un arrêt récent est venue exiger des juges du fond qu’ils vérifient l’existence d’une cause
réelle et sérieuse pour le second licenciement. Par cet arrêt du 18 novembre 1998189, la
Haute juridiction vient opérer un revirement de jurisprudence. En l’espèce, des gardiens
d’immeuble sont licenciés en juillet et en septembre 1990. Tous deux, considérant que le
licenciement n’avait pas de cause réelle et sérieuse, agissent devant les tribunaux. Les
juges du fond estimaient, en vertu de l’ancienne jurisprudence, que le congédiement pour
faute de l’un constituait une cause réelle et sérieuse du licenciement de l’autre. Cependant,
la Cour de cassation vient poser en principe qu’ « une clause de résiliation ne dispense pas
les juges de rechercher si la rupture a une cause réelle et sérieuse190 ».
Ainsi, dans un contrat de couple, l’indivisibilité des engagements des salariés ne
constitue plus nécessairement et automatiquement, en cas de licenciement de l’un, une
cause réelle et sérieuse du licenciement de l’autre : « la spécificité du contrat de couple ne
suffit pas pour considérer que la légitimité du licenciement initial constitue une
justification automatique du licenciement second 191». Comme le souligne le Professeur
Mouly : « cet arrêt signifie seulement que la stipulation d’une indivisibilité entre les
engagements ne suffit pas à elle seule à justifier le licenciement du second salarié…192 »
Toute cette évolution jurisprudentielle est intéressante dans cette étude de
l’approche par le droit du travail et ses juridictions de la notion de couple. En effet, les
189
MOULY (J), note sous Cass. soc. 18 novembre 1998, précité supra note n° 129
ibid.
191
ibid.
192
ibid.
190
50
Le couple et le droit du travail
juges soumettent la rupture « par voie de conséquence » aux règles du licenciement, et
surtout refusent de faire de la première rupture une cause réelle et sérieuse de la seconde.
Apparaît ainsi une certaine autonomie entre les ruptures, et une atténuation des
effets de l’indivisibilité des engagements et donc de la spécificité du contrat de couple.
Pourquoi ne pas considérer une telle évolution comme caractéristique du couple de
manière générale, c’est à dire plus significatif par l’indépendance qui unit ses membres que
par l’interdépendance ? Ainsi, même le contrat de couple, qui caractérise pourtant
l’interdépendance voulue des membres du couple, connaît une évolution telle que les
conséquences de l’indivisibilité sont nettement réduites pour faire prévaloir l’idée
d’autonomie entre les membres.
Il résulte de l’étude du droit du travail que les juridictions du travail et le législateur
se réfèrent parfois à la vie de couple d’un salarié pour mettre en exergue l’existence d’un
lien d’interdépendance entre celui-ci et son conjoint ou compagnon. Cependant, ces
hypothèses sont limitées en ce qu’elles n’ont pour autre finalité que de concilier la vie
professionnelle du travailleur avec sa vie de couple, protéger le bon fonctionnement de
l’entreprise ou encore répondre à la volonté même du couple de voir ses engagements liés
de manière indivisible.
51
Le couple et le droit du travail
TITRE SECOND :
L’autonomie des membres du couple favorisée :
52
Le couple et le droit du travail
A vrai dire, il semble résulter de l’étude du droit du travail, une nette volonté de la
part tant de la loi, que des juges, de faire prévaloir l’autonomie des membres du couple
dans l’accomplissement de leur prestation de travail respectives.
En effet, « subordonné à l’employeur dans l’exécution de son travail, le salarié est
libre dans sa vie de couple193 ». Or, si l’on admet que tout salarié est libre de vivre en
couple ou non, on ne peut légitimement concevoir que le statut de couple puisse être pris
en considération par l’employeur au détriment de son subordonné. Cela constituerait en
effet une discrimination avérée par rapport aux salariés célibataires, lesquels échapperaient
à tel ou tel risque de sanction puisque ne vivant pas en couple.
Aussi, hors les cas où l’interdépendance entre les membres du couple s’avère
nécessaire ou expressément voulue, le contrat de travail d’un salarié ne saurait être
influencé par l’existence d’une quelconque relation affective : le mariage ou le
concubinage d’un salarié, de même que le comportement du conjoint ou compagnon de
celui-ci, ne sauraient avoir une quelconque incidence sur la relation de travail de l’un ou
l’autre des membres du couple. L’autonomie des membres du couple est en ce sens
caractérisée.
Le droit du travail manifeste cette indépendance des membres du couple de par
l’indifférence de la situation de couple sur la situation professionnelle d’un des membres
( Chapitre I ) et par la protection de l’activité de chacun des membres des agissements de
l’autre ( Chapitre II ).
193
SAVATIER (J), Vie de couple et rapports de travail, op. cit., p. 416
53
Le couple et le droit du travail
CHAPITRE I :
L’indifférence de la situation de couple sur l’activité professionnelle de
ses membres :
Le fait d’être marié ou de vivre en concubinage peut-il constituer un obstacle à la
conclusion ou au maintien du contrat de travail d’un des membres du couple ?
L’employeur peut-il justifier un refus de recrutement ou une sanction à l’égard d’un salarié
en raison de sa situation de couple ?
Ces questions peuvent apparaître aujourd’hui dénuées d’intérêt, en ce que le
législateur est intervenu à plusieurs reprises pour régir ces situations. Toutefois, il est
intéressant de mettre en évidence cette conception du droit du travail, selon laquelle la
situation de couple est sans incidence sur le statut professionnel de l’un ou l’autre des
membres.
Cette autonomie se manifeste à deux niveaux. Le droit du travail, au regard d’une
jurisprudence constante et d’une législation relativement récente, refuse de prendre en
considération la situation de famille du salarié pour le recruter ou le sanctionner (Section I
). De même, l’affirmation récente de la validité des contrats entre époux tend à prouver
cette autonomie en ce que la situation de couple n’empêche en aucune manière un époux
d’être salarié de l’autre ( Section II ).
Section I ) La protection de la vie familiale du salarié :
Au-delà de l’article 9 du code civil prévoyant expressément que « chacun a droit
au respect de sa vie privée », nombre de textes travaillistes prévoient expressément
l’impossibilité pour l’employeur de tenir compte de la situation de famille d’un salarié.
Selon Mme Hennion-Moreau : « la notion de situation de famille est plus vaste que
celle de situation matrimoniale (…) les textes visent à notre avis, non seulement les
54
Le couple et le droit du travail
interdictions à mariage ou à remariage, mais aussi la nullité des engagements de ne pas
avoir d’enfants pendant la durée du contrat ou encore la prise en compte de la situation de
concubinage du salarié194 ».
La vie familiale du salarié comprend donc la vie de couple de celui-ci, que celle-ci
soit caractérisée par un lien de mariage ou non.. De par ce principe de protection de la vie
familiale du salarié, l’autonomie des membres du couple est affirmée. Elle se manifeste en
droit du travail, tant au moment de l’embauche de l’un d’eux ( §1 ), qu’au cours de la vie
professionnelle de chacun ( §2 ).
§1- L’ autonomie des membres du couple lors du recrutement de l’un d’eux :
Comme l’indique le Professeur Savatier : « la disponibilité du travailleur pour se
consacrer à ses fonctions dans l’entreprise peut, il est vrai, se trouver réduite par ses
obligations familiales195 ». Aussi, il n’est pas rare dans la pratique des entretiens
d’embauche que l’employeur questionne le postulant sur sa situation de famille et sa vie
affective196. Nombre de candidats à un emploi affirment ainsi avoir été interrogés sur
l’existence ou non d’un conjoint, voir d’un concubin ou partenaire, et éventuellement sur la
profession de ce dernier. Il pourra ainsi arriver qu’une entreprise prenne en considération la
vie de couple du postulant pour ne pas le recruter. Or, « ce n’est pas parce qu’un individu
est dans une situation de dépendance lors de l’entretien d’embauche, que pour autant
l’employeur a le droit de demander des informations sur son conjoint 197».
Ces considérations, bien évidemment tues des employeurs, n’en restent pas moins
illégitimes et illégales. Elles font en effet de la vie de couple un obstacle à la relation de
travail de l’un ou l’autre.
Aussi, le droit du travail prévoit expressément l’impossibilité pour un employeur de
tenir compte de la situation de famille et donc de la vie de couple du salarié à l’embauche.
194
HENNION-MOREAU (S), note sous Cass. soc. 10 juin 1982, Société des éditions Quo Vadis c/ Dame
Leemann, JCP 1984 II, 20230
195
SAVATIER (J), Vie de couple et rapports de travail, op. cit., p. 425
196
GILLES (AM), op. cit., p. 127
197
ibid.
55
Le couple et le droit du travail
Il a fallu attendre une loi du 31 décembre 1992, pour que soit étendue l’interdiction
des discriminations prévues en l’article L 122-45 du code du travail, à l’embauche. Ainsi,
cet article dispose : « Aucune personne ne peut-être écartée d’une procédure de
recrutement (…) en raison de son origine, de son sexe, de ses mœurs, de sa situation de
famille… ». Or, en visant les mœurs et la situation de famille, le législateur protège la vie
de couple du postulant. De la même façon, l’article L 123-1 du code du travail, mis en
place suite à la loi du 13 juillet 1985 relative à l’égalité professionnelle entre les hommes et
les femmes, indique que « sous réserve des dispositions particulières du présent code et
sauf si l’appartenance à l’un ou l’autre sexe est la condition déterminante de l’exercice
d’un emploi ou d’une activité professionnelle, nul ne peut : mentionner ou faire mentionner
dans une offre d’emploi (…) le sexe ou la situation de famille du candidat recherché ;
refuser d’embaucher une personne (… ) en considération du sexe ou de la situation de
famille ou sur la base de critères de choix différents selon le sexe ou la situation de
famille ». Enfin, l’article L 121-6 du code du travail dispose que « les informations
demandées, sous quelque forme que ce soit, au candidat à un emploi ou à un salarié, ne
peuvent avoir comme finalité que d’apprécier sa capacité à occuper l’emploi proposé ou
ses aptitudes professionnelles. Ces informations doivent présenter un lien direct et
nécessaire
avec
l’emploi
proposé
ou
avec
l’évaluation
des
aptitudes
professionnelles … ».Or, tel ne semble pas être le cas des éléments qui relèvent de la vie
affective du candidat198.
Un des objectifs évident de cet arsenal législatif est donc d’éviter que l’employeur
ne tienne compte de faits relevant de la vie de couple du candidat et à ce titre, « sans
rapport avec l’exécution du travail 199», pour refuser de l’embaucher. Aussi, l’employeur
« ne doit pas prendre en considération le fait que le salarié est marié ou non ou qu’il a une
liaison hors mariage 200» pour apprécier la capacité du candidat à occuper tel ou tel poste.
Le droit d’investigation de l’employeur dans sa recherche de salariés et donc, dans la
personnalité de ceux-ci, connaît des limites201. Selon M. Leveneur : « le législateur vise à
198
LEVENEUR (J), op.cit., p. 39
Cass. soc.17 mars 1971, Société Lyonnaise de Dépôts et de Crédit industriel c/ Dame Courtia, JCP 1971
II, 16870
200
SAVATIER (J), Vie de couple et rapports de travail, loc.cit.
201
LYON-CAEN (G), PELISSIER (J), SUPIOT (A), op.cit., p. 183
199
56
Le couple et le droit du travail
rendre la plus étanche possible la cloison en évitant d’avoir à révéler lui-même des aspects
de sa vie privée202 ».
De la même façon, tant les juges que le législateur, sont intervenus afin de protéger
la vie familiale de tout salarié dans sa vie professionnelle.
§2- L’autonomie des membres du couple dans leur vie professionnelle :
Dès lors que des salariés sont embauchés dans une entreprise, le principe est que
« l’employeur ne doit pas s’immiscer dans la vie privée de ceux-ci203 ». Au soutien de cette
idée, nombre de textes prévoient ainsi l’interdiction pour un employeur de tenir compte de
la situation familiale d’un salarié pour le sanctionner. L’article L 120-2 du code du travail
introduit par la loi du 31 décembre 1992 prévoit qu’« il ne peut apporter aux droits des
personnes et aux libertés individuelles des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la
tâche à accomplir ou proportionnées au but recherché ». De même, l’article L 122-35 du
code du travail interdit à l’employeur d’inscrire dans le règlement intérieur « des
dispositions lésant les salariés dans leur emploi ou leur travail en raison de leur sexe, de
leurs mœurs, de leur situation de famille ». En outre, de la même façon qu’ils prohibent les
discriminations à l’embauche, les articles L 122-45 du code du travail et L 123-2 du code
du travail interdisent à l’employeur de licencier en raison de la situation de famille.
Tout comme en matière de recrutement, l’ambition de ces textes est d’éviter que le
mariage ou le concubinage du salarié, de même que son divorce ou sa séparation, n’aient
une incidence sur son contrat de travail. Cependant, ces dispositions sont récentes et
expliquent que les juges aient eu à poser eux-mêmes les principes gouvernant à l’heure
actuelle notre droit en la matière.
Ainsi, le mariage ou le concubinage du salarié ne saurait justifier en eux seuls la
rupture de son contrat de travail ( A ). A fortiori, l’employeur ne peut conventionnellement
202
203
LEVENEUR (J), loc. cit.
SAVATIER (J), Vie de couple et rapports de travail, op. cit., p. 416
57
Le couple et le droit du travail
prévoir de porter atteinte aux « libertés civiles 204» du salarié, au nombre desquelles la
liberté de mariage et la liberté du divorce ( B ).
A) Le rejet de la situation de couple comme justification de la rupture du contrat de
travail d’un salarié :
Bien avant que le législateur n’intervienne sur la question, il était acquis en
jurisprudence que le simple fait pour un salarié d’être marié, d’envisager de se marier ou
encore de vivre en concubinage, ne pouvait justifier son licenciement205. En d’autres
termes, le statut de couple ne pouvait pas constituer un juste motif de sanction à l’égard
d’un salarié.
Ainsi, était considéré comme abusif, le licenciement d’un salarié motivé par son
refus de régulariser par le mariage des relations intimes entretenues avec une employée de
la même entreprise206. En effet, « la liberté du mariage comporte le volet négatif de toute
liberté, à savoir le droit de n’en pas user 207». Dès lors, les pressions de l’employeur, se
manifestant par le licenciement du salarié, ne pouvaient légitimement être admises.
Pareillement, ont été jugés abusifs des licenciements fondés sur le projet de mariage
de la salariée déplaisant à l’employeur208 : « l’employeur n’avait pu sans abus rompre le
contrat de travail de demoiselle J… au seul motif que cette employée lui annonçait qu’elle
allait prochainement contracter mariage, circonstance sans rapport avec l’exécution du
travail 209». Enfin, dans la célèbre affaire Dame Roy relative à une enseignante d’une
institution privée licenciée pour son remariage après divorce, l’Assemblée plénière de la
Cour de cassation est venue poser en principe « qu’il ne peut être porté atteinte sans abus à
la liberté du mariage par un employeur que dans les cas très exceptionnels où les nécessités
des fonctions l’exigent impérieusement210 ».
204
WAQUET (P), Les libertés dans l’entreprise, RJS 5/00, p. 335
LEVENEUR (J), loc.cit.
206
CA Paris, 1er juin 1900, DP 1904, 1, p. 299
207
BENABENT, Droit civil : la famille, Litec, 8ème édition, Paris, 1997, p. 75
208
Cass. soc. 05 février 1959, Crépin c/ Duval, Bull. civ. V, n°61 ; cf. aussi Cass. soc. 17 mars 1971, précité
supra note n°199
209
Cass. soc. 17 mars 1971, précité supra note n°199
210
Cass. Ass. Plén. 19 mai 1978, précité supra note n°113
205
58
Le couple et le droit du travail
Dès lors, en principe, la simple vie en couple ne peut justifier la décision de
l’employeur de rompre le contrat de travail d’un salarié.
De la même façon, nombre de jurisprudences reflètent cette protection de la vie
familiale de tout salarié en refusant d’avaliser des dispositions conventionnelles portant
atteinte, tant à la liberté du mariage, liberté publique fondamentale de tout salarié211, qu’à
la liberté du divorce.
B) Le refus de toute restriction conventionnelle aux « libertés civiles212 » du
salarié :
Antérieurement à la loi du 04 août 1982 instituant l’article L 122-35 du code du
travail susvisé, les juges étaient souvent appelés à trancher des litiges relatifs à des clauses
de célibat introduites dans les contrats de travail « de femmes dont les fonctions exigeaient
une particulière disponibilité, ou des déplacements lointains et nombreux 213». L’arrêt le
plus célèbre en la matière est l’arrêt Barbier dans lequel une hôtesse de l’air à Air France,
ayant informé son employeur de sa volonté de contracter mariage avec un autre salarié de
la compagnie, s’était vue rayée des contrôles en application du règlement fixant les
conditions de travail du personnel. Le problème en cette affaire « était de savoir si les
règles de la profession pouvaient interdire aux hôtesses de l’air le droit au mariage. En
d’autres termes, la clause de célibat comme accessoire au contrat de travail était-elle
licite ? 214». En imposant une clause de célibat aux hôtesses de l’air, l’employeur venait
restreindre au maximum la liberté pour celles-ci de se marier puisqu’elles se voyaient dans
l’obligation de choisir entre le mariage et donc la rupture du contrat de travail, ou le
maintien de ce contrat. Aussi, ces clauses furent-elles fortement décriées par la doctrine :
« le célibat contractuel des hôtesses de l’air est difficile à justifier. Les raisons qu’on peut
211
en ce sens, le Conseil Constitutionnel affirme dans une décision du 18 août 1993 que « figure parmi les
droits fondamentaux et les libertés…la liberté du mariage »
212
WAQUET (P), loc.cit.
213
SAVATIER (J), Vie de couple et rapports de travail, op. cit. , p. 425
214
BROCHETON (P), op.cit. , p. 8
59
Le couple et le droit du travail
imaginer à cet égard sont fragiles sinon choquantes215 ». Les raisons invoquées en l’espèce
se résumaient en l’incompatibilité entre la vie de couple et la disponibilité constante et sans
restriction nécessaire à cette catégorie de travailleurs.
Cependant, la Cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 30 avril 1963 est venu poser
en principe que « le droit au mariage est un droit individuel d’ordre public qui ne peut se
limiter ni s’aliéner ; il en résulte que, dans le domaine des rapports contractuels de droit
privé à titre onéreux, (…), la liberté du mariage doit en principe être sauvegardée et, à
moins de raisons impérieuses évidentes, une clause de non – convol doit être déclarée nulle
comme attentatoire à un droit fondamental de la personnalité216 ».
Aussi, le droit de se marier est fondamental et ne peut être à l’avance restreint :
l’individu reçoit le droit de se marier comme une prérogative d’ordre public. Comme
l’indique Jean Morrelet : « A la vérité, mariage ou célibat ne sauraient être ni interdits ni
prescrits par des stipulations contractuelles. La personne humaine a des droits qui, par leur
nature, échappent au domaine du contrat217 ». De même, une clause du contrat de travail
d’une assistante sociale prévoyant que celui-ci serait rompu sans indemnité en cas de
mariage de la salariée a pu être déclarée illicite comme contraire à la liberté du mariage. La
Cour de cassation est venue rappeler que : « la clause de célibat insérée dans le contrat de
travail d’une assistante sociale rurale, restrictive du droit au mariage et à la liberté du
travail, est d’une portée exceptionnelle. En l’absence de justification de nécessités
impérieuses, tirées de la nature des fonctions ou de leurs conditions d’exercice, les juges du
fond peuvent allouer les indemnités de rupture à une assistante, congédiée au moment de
son mariage en application d’une telle clause 218». La Haute juridiction venait donc, en
cette affaire, se prononcer en faveur d’une interprétation très restrictive de telles clauses219.
Elle a d’ailleurs maintenu cette solution en annulant la clause d’un règlement intérieur
prohibant l’emploi simultané de deux conjoints dans l’entreprise220.
215
MORELLET (J), Le célibat contractuel ? le cas des hôtesses de l’air, Dr. soc. 1961, p. 287
CA Paris, 30 avril 1963, Epoux Barbier c/ Air France, D. 1963, p. 428
217
MORELLET (J), note sous CA Paris 30 avril 1963, Dr. soc. 1963, p. 485
218
Cass. soc. 07 février 1968, Fédération de la mutualité agricole de l’Aube c/ Dame Forestier, Bull. civ. V,
n° 84
219
HENNION-MOREAU (S), note sous Cass. soc. 10 juin 1982, précitée supra note n° 194
220
Cass. soc. 10 juin 1982, précité supra note n° 194
216
60
Le couple et le droit du travail
Il
résulte
de
cette
jurisprudence
que
l’employeur
ne
peut
prévoir
conventionnellement que le mariage ou le concubinage d’un salarié emportera rupture de
son contrat de travail.
Pareillement, une jurisprudence récente de la Cour d’appel de Paris, vient rappeler
que le principe d’une protection de la vie familiale des salariés, dégagé à l’occasion d’une
atteinte abusive à la liberté du mariage, concerne tout autant la liberté pour un couple de se
séparer221. Ainsi, le fait de lier le sort du contrat de travail d’un couple de concubins à leur
séparation ou divorce constitue une restriction apportée par l’employeur au droit des époux
et concubins de se séparer. L’employeur n’ayant pu justifier de la nécessité d’une telle
clause, celle-ci a été annulée.
Au nom de la protection de la vie familiale des salariés, le droit du travail affirme
l’indépendance de la vie de couple sur la vie professionnelle, et donc l’autonomie des
membres du couple dans leurs relations de travail respectives. Un autre témoignage de
cette autonomie est à relever dans l’affirmation par le droit du travail de la validité des
contrats de travail conjugaux.
Section II ) Les contrats de travail au sein même du couple ou la marque d’une
autonomie entre ses membres :
« Que le couple formé entre le dépositaire du pouvoir patronal et le salarié soit
consacré par un mariage ou qu’il demeure en l’état de concubinage, il est fondé sur une
relation amoureuse qui échappe à la logique des rapports entre employeur et subordonnée
dans le contrat de travail. Ce qui est en cause, ce n’est pas le fonctionnement de
l’institution matrimoniale, mais l’application des règles du droit du travail entre les
membres du couple 222».
En la matière, il a été jugé que le mariage d’une employée avec le chef d’entreprise
ou la liaison d’une salariée avec son employeur ne modifiait pas la nature de la relation de
221
CA Paris 10 mars 1994, Kretzer c/ Société Myris Chaussures, précité supra note n° 142
61
Le couple et le droit du travail
travail les unissant jusqu’alors223. Dans le même esprit, si la rupture de la liaison entre un
chef d’entreprise et une salariée incite celle-ci à quitter son emploi, la rupture ne doit pas
s’analyser nécessairement en démission224. Il apparaît donc que l’existence d’une relation
affective n’a aucune incidence sur le statut professionnel de l’autre membre du couple.
Toutefois, cette autonomie n’a pas toujours été évidente : longtemps s’est posée la
question en effet de savoir si la situation de couple était compatible avec un contrat de
travail entre ses membres.
Même si selon certains auteurs, les « données du problème ont changé 225» et à ce
titre, la discussion sur le contrat de travail entre époux serait dénuée d’intérêt, l’admission
de ce type de contrat par le législateur est révélatrice de l’approche par le droit du travail
de la notion de couple ( §1 ). En effet, en affirmant la possibilité pour un membre du
couple d’être salarié(e) de son conjoint, le droit du travail met en valeur l’indépendance de
chacun dans l’exécution de sa prestation de travail ( §2 ).
§1- La compatibilité de la vie de couple avec un contrat de travail entre ses
membres :
Cette admission de la compatibilité de la situation de couple avec la conclusion
d’un contrat de travail n’a pas toujours été admise par la doctrine (A). Il a fallu attendre
une loi de 1982 pour que soit posé en principe la validité du contrat de travail conjugal (B).
A) La difficile admission du contrat de travail entre époux :
« S’il est un domaine où il a semblé pendant longtemps que le Droit n’avait pas
accès, c’est celui de travail effectué à l’intérieur de la famille. Tout pouvait sembler être
régi sans discussion possible par les principes de l’autorité maritale et ceux de la puissance
paternelle. La femme étant subordonnée à son mari par l’effet de son mariage, le travail
222
SAVATIER (J), Vie de couple et rapports de travail, op.cit., p. 416
Cass. soc. 03 juin 1981, Consorts Rouquette c/ Madame Delon, Bull. civ. V, n° 492, p. 371
224
Cass. soc. 02 juillet 1992, D Groeta c/ SA Disanto, RJS 8-9/92, n° 970, p. 544
223
62
Le couple et le droit du travail
qu’elle pouvait fournir se référait soit à sa fonction normale dans le ménage, soit à son
devoir de collaboration avec son mari pour assurer la vie de ce ménage… 226». De la même
façon, Charles Freyria souligne : « il est des formules utilisées par le droit social moderne
qui au siècle dernier, eussent parues incompréhensibles : telle est bien la notion d’un
rapport de travail entre époux qui constitue l’un des conjoints le salarié de l’autre227 ».
Cependant, tant au vu de l’évolution des idées et des mœurs quant à la place de la
femme dans le ménage et dans la société, qu’au vu de la fréquence accrue du concours
apporté par l’un des époux à son conjoint, la question d’un contrat de travail entre époux se
faisait persistante228.
Concrètement, la question s’est longtemps posée de savoir si un époux pouvait
apporter une collaboration salariée à l’entreprise et à l’activité professionnelle de son
conjoint, en étant lui-même considéré comme un salarié de droit commun. Le problème
essentiel était donc de déterminer si un contrat de travail était ou non licite entre époux229.
A cet égard, la doctrine était divisée : le principe de l’admission d’un contrat de
travail entre époux n’était pas unanimement accepté en ce qu’on craignait « une
incompatibilité entre deux statuts antinomiques : celui du droit du travail et celui du droit
de la famille, sinon du moins des difficultés d’adaptation des droits et obligations nées de
ces deux statuts230 ». La validité d’un contrat entre époux fit donc l’objet de doutes. Ainsi,
à la question de savoir si les rapports de travail entre deux conjoints pouvaient faire l’objet
d’un contrat de travail distinct de la simple entraide conjugale, le Professeur Cornu
répondait par la négative : « Il n’est pas seulement malaisé de dégager le contrat de travail
de l’aide familiale ; il est même douteux qu’il présente entre époux la moindre
nécessité 231».
225
SAVATIER (J), Vie de couple et rapports de travail, loc. cit.
ROUAST (A), Le droit du travail familial, Dr. soc. 1962, p. 154
227
FREYRIA (C), La notion de relation de travail entre époux, Dr. soc. 1952, p. 378
228
FREYRIA (C), op. cit., p. 379
229
ROUAST (A), op. cit., p. 155
230
FREYRIA (C), op. cit., p. 381
231
CORNU (G), Le contrat entre époux ; Recherche d’un critère général de validité, RTD civ., 1953, p. 461
226
63
Le couple et le droit du travail
Peu à peu, cette validité a pu se concevoir même si récemment encore, certains
auteurs considéraient qu’un contrat de travail ne pouvait être valablement conclu au sein
d’un même couple du fait de la dépendance d’un époux par rapport à l’autre résultant de la
subordination232.
« dépassées
233
Cependant,
ces
discussions
doctrinales
semblent
aujourd’hui
» : la compatibilité du lien de subordination propre au contrat de travail avec
le statut conjugal a été définitivement posée en principe par la loi du 10 juillet 1982
relative aux conjoints d’artisans et de commerçants234.
B) La validité de principe des contrats de travail entre époux :
Affirmant la validité du contrat de travail entre époux, le législateur est intervenu en
1982, admettant ainsi « la compatibilité des liens affectifs avec un contrat de travail235 ».
La loi du 10 juillet 1982 propose aux conjoints de commerçants et artisans trois
statuts. Ils peuvent exercer leur activité en qualité de collaborateur, associé ou salarié.
Deux articles de la loi sont consacrés au conjoint salarié. L’article 10 décide ainsi de
l’affiliation au régime de sécurité sociale du conjoint qui participe à titre habituel,
professionnel et onéreux à l’activité de son époux. L’article 11 instituant l’article L 784-1
du code du travail le fait bénéficier des dispositions du code du travail.
Ainsi, « les dispositions du présent code sont applicables au conjoint du chef
d’entreprise salarié par lui et sous l’autorité duquel il est réputé exercer son activité dès
lors qu’il participe effectivement à l’entreprise ou à l’activité de son époux à titre
professionnel et habituel et qu’il perçoit une rémunération horaire minimale égale au
salaire minimum de croissance236 ». A noter que la récente loi relative au pacte civil de
solidarité prévoit l’application de cet article au partenaire et donc, son assimilation au
conjoint237.
232
TEILLIAIS (G), Salariat conjugal et régimes matrimoniaux, PA n° 15 du 13 décembre 1996
LYON-CAEN (G), PELISSIER (J), SUPIOT (A), op. cit., p. 106
234
Loi n° 82-596 du 10 juillet 1982, D. 1982, p. 323
235
LARERE (MA), Délimitation de l’entraide et du contrat de travail en jurisprudence, BS Lefebvre 3/00,
p. 117
236
C. trav. Art. L 784-1
237
loi n° 99-944 du 15 novembre 1999, article 18, JO du 16 novembre 1999
233
64
Le couple et le droit du travail
Quoiqu’il en soit, l’article L 784-1 du code du travail met fin à la polémique sur la
validité du contrat de travail entre époux238. Selon certains auteurs, « le seul problème sera
donc de rechercher si en fait, la collaboration s’explique par la simple entraide familiale ou
par l’exercice réel de l’activité d’un travailleur salarié 239». Pour ce faire, afin de
caractériser l’existence d’un contrat de travail entre époux, les juges devront constater la
réunion des critères posés par l’article L 784-1 du code du travail. A noter dès à présent un
arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation selon lequel « ce texte n’est pas
applicable au conjoint qui se prétend salarié d’une société dont son époux ou son épouse
est le dirigeant240 ». Comme le souligne le Professeur Le Cannu, l’intéressé doit être salarié
du conjoint et non de la société dirigée par le conjoint : « dans le contexte de la loi de
1982, il n’y a à ce sujet guère de doutes : c’est l’entreprise individuelle du conjoint, ou son
activité personnelle indépendante qui sont visées (…) la faveur très appréciable consentie
au conjoint subordonné, malgré les traditionnelles réticences à admettre le salariat entre
époux, ne peut qu’être l’objet d’une interprétation restrictive241 ».
§2- La reconnaissance légale de l’indépendance des membres du couple :
La vie de couple n’est ainsi pas un obstacle à la conclusion d’un contrat de travail
au sein même du couple.
La conclusion d’un tel contrat ne suppose le respect d’aucune procédure
particulière mais relève de l’application pure et simple du code du travail. Il apparaît
cependant souhaitable, au vu de la qualité des contractants, de formaliser cet accord dans
un écrit afin d’en faciliter la preuve en cas de contestation de la réalité de celui-ci242. En
outre, le contrat de travail entre époux doit respecter les conditions de fond propres à tout
contrat de travail à savoir une prestation de travail, une rémunération et un lien de
subordination. Plus précisément, l’article L 784-1 du code du travail impose deux
238
GILLES (AM), op. cit., p. 126
LYON-CAEN (G), PELISSIER (J), SUPIOT (A), loc. cit.
240
CASS com. 05 juillet 1995, Despinoy c/ Assedic de la Réunion, PA n° 2 du 03 janvier 1996
241
LE CANNU (P), note sous Cass. com. 05 juillet 1995, précité supra note n°240
242
TEILLIAIS (G), loc. cit.
239
65
Le couple et le droit du travail
exigences243 : le conjoint doit recevoir une rémunération au moins égale au SMIC et il doit
participer effectivement à titre professionnel et habituel.
Comme l’indique Georges Teilliais244 : « le versement d’un salaire semble être une
condition essentielle et nécessaire à la validité d’un contrat de travail entre époux ». On
imagine en effet sans mal un époux employant son conjoint en qualité de salarié pour lui
faire bénéficier des avantages résultant du droit du travail et de la protection sociale, mais
convenant par avance une rémunération ne donnant lieu en fait à aucun paiement effectif
afin de dispenser l’entreprise d’une charge supplémentaire245. Or, dans cette hypothèse, on
ne saurait légitimement appliquer au conjoint le statut de salarié. Même s’il est concevable
qu’un conjoint fournisse un travail non rémunéré, le statut de salarié ne saurait être admis
en cette situation. En ce sens, l’article L 784-1 du code du travail indique que la
rémunération horaire minimale du conjoint doit être au moins égale au SMIC, de même
que l’article L 243 du code la sécurité sociale requiert que le salarié perçoive « un salaire
correspondant au salaire normal de sa catégorie professionnelle ». Dès lors, le conjoint du
salarié doit pouvoir bénéficier d’un salaire au moins égal à celui versé à un autre salarié
exerçant les mêmes fonctions. A noter qu’en cas de non-paiement effectif d’un salaire ou
de non-respect des dispositions légales relatives au salaire minimum, les conjoints
pourraient faire l’objet de poursuites pénales246.
En outre, le contrat de travail entre époux implique que le salarié participe
effectivement à l’activité de son conjoint à titre professionnel et habituel, quelle que soit la
nature de la prestation à effectuer. L’article L 784-1 du code du travail exclut ainsi toute
aide occasionnelle du conjoint247. Cependant, ce critère d’habitude n’implique pas que
l’activité du conjoint soit nécessairement à temps plein248 : « ce statut de salarié ne remet
243
LARERE (MA), loc. cit.
TEILLIAIS (G), loc. cit.
245
ibid.
246
C. trav.art. R 154-1 et R 154-3
247
CA Paris 17 décembre 1997, Sarl Différence c/ Crestot, RJS 3/99, n° 370, p. 221
248
RANDOUX (D), Le conjoint du chef d’une entreprise artisanale ou commerciale : collaborateur, salarié
ou associé ?, JCP éd. E, 1983, n° 3103
244
66
Le couple et le droit du travail
pas en cause la possibilité reconnue au conjoint d’occuper plusieurs emplois pour obtenir
un revenu décent249 ».
Une fois ces conditions remplies, le conjoint est réputé exercer son activité sous
l’autorité du chef d’entreprise. Une présomption de salariat est ainsi posée. Cependant,
celle-ci n’est pas irréfragable même si « le législateur a voulu faciliter l’accès du conjoint
travaillant dans l’entreprise aux avantages du droit du travail en lui épargnant les
difficultés de preuve250 ». Il appartiendra à quiconque voulant faire tomber cette
présomption de prouver que le conjoint n’exerçait pas son activité sous l’autorité du chef
d’entreprise.
La validité du contrat de travail entre époux marquée par cette présomption, montre
la volonté du législateur de mettre en valeur l’autonomie des membres du couple.
La qualité de salarié ne dépend pas en effet de la qualité de conjoint du chef
d’entreprise mais de la réunion de critères limitativement énumérés. Présumant la
compatibilité de la vie de couple avec un contrat de travail entre ses membres, il admet
ainsi l’absence d’incidence de la qualité de l’un sur le statut de l’autre. D’ailleurs, les
avantages sociaux découlant de ce statut de conjoint salarié prouvent cette indépendance
des membres du couple. En effet, la conclusion d’un contrat de travail conjugal permet
l’affiliation à titre de droit propre et non en qualité d’ayant droit de l’employeur251. En
contrepartie, le conjoint bénéficie des prestations sociales servies au titre du régime général
de la sécurité sociale. En outre, le conjoint se trouve soumis aux règles du droit du travail.
Ainsi, en cas de rupture de la relation de couple, le conjoint salarié pourra bénéficier des
règles relatives au licenciement, la rupture du lien affectif ne constituant en aucun cas une
cause réelle et sérieuse de licenciement252.
La réflexion formulée en 1962 par le Professeur Rouast trouve ici tout son intérêt :
« on doit constater d’abord que la notion de contrat de travail entre époux jadis presque
249
LARERE (MA), loc. cit.
Ibid.
251
TEILLIAIS (G), loc. cit.
250
67
Le couple et le droit du travail
inconnue, s’est implantée et s’est largement manifestée (… ) l’évolution sociale de la
famille y a largement contribué en tendant à l’indépendance des divers membres qui la
composent253 ».
Ainsi, la situation de couple, marié ou non, n’exclut en aucune façon la validité
d’un contrat de travail entre ses membres (validité des contrats entre époux…), de même
qu’il n’a d’influence sur la conclusion ou le maintien de la relation de travail d’un salarié
(interdiction de principe des clauses de célibat…) : le mariage ou le concubinage, de même
que le divorce ou la séparation du couple, ne peuvent constituer en soi un obstacle à la
relation professionnelle de l’un des membres du couple.
Reste à déterminer si le comportement de l’un peut avoir une incidence sur le
contrat de travail de l’autre.
252
253
Cass. soc. 04 février 1976, Bull. civ. V, n° 72
ROUAST (A), op. cit., p. 163
68
Le couple et le droit du travail
CHAPITRE II :
L’indifférence des agissements d’un membre du couple sur
l’activité professionnelle de l’autre :
Un employeur peut-il valablement sanctionner un salarié au regard de l’attitude de
son conjoint, en invoquant l’incompatibilité d’intérêts entre l’entreprise et le lien affectif
caractérisant le couple formé par le salarié et le conjoint ?
La question qui se pose n’est donc plus de savoir si un salarié peut se voir opposer
sa situation de couple comme un obstacle à la conclusion ou au maintien de son contrat de
travail, mais de déterminer si un salarié peut-être sanctionné au vu des agissements de son
conjoint. Si tel est le cas, nous serions amenés à considérer que le droit du travail, de par
l’usage qu’il fait de la notion de couple, fait prévaloir un lien d’interdépendance entre ses
membres.
Cette question fit l’objet d’une jurisprudence nourrie et évolutive. Les juges ont
ainsi longtemps admis que le comportement de l’un des époux254 ou concubins255 puisse
justifier une sanction à l’encontre de l’autre sur le plan professionnel. Cette solution qui
trouvait son fondement dans l’idée de « perte de confiance », amenait certains auteurs à
considérer que « la vie sentimentale ou familiale du salarié n’est donc pas sans incidence
sur sa vie professionnelle 256».
Créant « une solidarité conjugale de fait257 » critiquable, les juges ont
progressivement abandonné cette conception (Section I), pour faire prévaloir la seule prise
en considération de la personne comme motif de licenciement ou de sanction d’un salarié
(Section II).
254
Cass. soc. 26 juin 1980, Dame Voisin c/ SARL Atlas Levage et autres, Bull. civ. V, n° 573, p. 431
CA Paris 04 juin 1987, SARL Bergerat-Monnoyeur c/ Landgraf, D. 1987, p. 610, note Mouly
256
DESPAX (M), op. cit., p. 32
257
CHIREZ (A), La perte de confiance par l’employeur constitue-t-elle une cause réelle et sérieuse de
licenciement ?, D. 1981, p. 193
255
69
Le couple et le droit du travail
Section I ) Abandon d’une « solidarité conjugale de fait » critiquable :
« Alors qu’en règle générale le mariage d’un salarié est un événement qui ne doit
(en dehors du congé accordé à cette occasion) avoir aucune conséquence sur les rapports
de travail, il peut arriver que la personnalité du conjoint choisi par le salarié soit un
élément de gêne dans les rapports unissant le salarié et son employeur. La communauté de
vie et d’intérêts existant entre conjoints est dans certains cas une donnée de fait dont il est
impossible de faire abstraction sans qu’il en résulte un préjudice pour l’employeur et on ne
saurait dans certains cas, lui faire grief d’en avoir tenu compte en licenciant le salarié dont
la situation personnelle est devenue incompatible avec l’exécution normale de ses
fonctions258 ». Le Professeur Michel Despax justifie ici le courant jurisprudentiel qui
admettait le licenciement d’un salarié dû au comportement répréhensible de son conjoint
ou concubin, ou à l’activité concurrente de celui-ci. Le fondement invoqué alors était « la
perte de confiance » qui en résultait entre l’employeur et le salarié259.
« La perte de confiance » pouvant être caractérisée comme un « état d’esprit, une
opinion, bref un phénomène subjectif260 », l’idée qui prédominait alors était que
l’employeur ne pouvait conserver à son service un salarié qui n’a plus sa confiance du fait
des agissements de son conjoint261.
Cette solution pouvait apparaître à certains comme curieuse et discutable262, en ce
que la Cour de Cassation admettait que « la perte de confiance » ne reposant sur aucun fait
imputable au salarié, soit considérée cependant comme une cause réelle et sérieuse de
licenciement. Ainsi, « par l’effet d’une curieuse culpabilité d’emprunt263 », le
comportement d’un époux liait l’autre jusque dans sa relation de travail. A noter dès
maintenant que cette jurisprudence s’appliquait tant aux époux, qu’aux personnes vivant en
concubinage264.
258
DESPAX (M), loc. cit.
CHIREZ (A), op.cit., p. 196
260
GAUDU (F), Le licenciement pour perte de confiance, Dr. soc. 1992, p. 32
261
COUTURIER (G), op.cit., p. 227
262
DESPAX (M), loc. cit.
263
CHIREZ (A), loc.cit.
264
KUHNMUNCH (O), Personnes, entreprises et relations de travail, éléments de jurisprudence, Dr. soc.
1988, p. 398
259
70
Le couple et le droit du travail
Le principe d’une dépendance entre les membres du couple semblait posé ( §1 ).
Toutefois, sous le poids des critiques, cette position ne pouvait que tomber dans le sens
d’un revirement caractéristique de l’évolution de la notion du couple en droit du travail
( §2 ).
§1- Une traditionnelle admission de la « perte de confiance » du fait du conjoint :
Nombreuses sont les jurisprudences justifiant le licenciement d’un salarié par le
comportement répréhensible ou l’activité concurrente du conjoint, ayant eu pour effet de
faire disparaître la confiance de l’employeur265. Cependant, une distinction doit être opérée
entre les arrêts antérieurs à la loi du 13 juillet 1973 attribuant un rôle majeur à la cause
réelle et sérieuse de licenciement, et ceux qui lui sont postérieurs.
Les motifs invoqués consistaient en ce que la faute d’un salarié avait
nécessairement pour conséquence la disparition de la confiance que l’employeur pouvait
avoir en la personne de l’autre conjoint. De la même façon, était justifié le licenciement
d’un salarié dont l’époux travaillait dans une entreprise concurrente au motif que l’intérêt
du couple était alors en totale contradiction avec l’intérêt de l’entreprise. Selon M.
Chirez : « le salarié, dont le conjoint se livre à une activité concurrente, est perçu comme
un possible cheval de Troie au sein de l’entreprise à cause du risque de diffusion
d’informations, de détournement de clientèle, bref d’infidélités, qu’il représente 266».
Avant la réforme de 1973, les juridictions du travail avaient pu ainsi considérer
comme non abusif le licenciement d’un clerc de notaire au vu de certaines opérations
immobilières effectuées par son épouse, ayant placé le notaire dans une situation délicate
vis à vis de certains clients et ayant pu lui faire croire que la bonne réputation de son étude
était en jeu267. De la même façon, a pu être justifié le congédiement d’une salariée pour
« se prémunir contre le risque de la diffusion de secrets par l’intermédiaire du mari (…)
265
GAUDU (F), loc. cit.
CHIREZ (A), loc.cit.
267
Cass. soc., 23 avril 1959, Bull. civ. IV, n°512, p. 421
266
71
Le couple et le droit du travail
précédemment employé à l’entreprise et engagé par une maison concurrente ».268 Dans la
même optique, la jurisprudence a admis le licenciement d’un visiteur médical marié à une
visiteuse médicale d’un laboratoire concurrent269. De même, a été autorisé le licenciement
d’une sténodactylographie au motif qu’elle projetait de se marier avec un ancien employé
de l’établissement passé au service d’un concurrent270, ou d’un directeur commercial
adjoint dont l’épouse avait constitué une société concurrente271. En ces affaires, il existait
entre les deux époux une communauté d’intérêts et de réputation telle, que l’employeur
était considéré comme légitime à rompre le contrat de travail de son salarié. A noter que
l’employeur ne pouvait aucunement reprocher à la personne licenciée une quelconque
faute de sa part dans l’exécution de sa prestation de travail.
La loi de 1973 posant l’exigence d’une cause réelle et sérieuse de licenciement272,
sans modifier la jurisprudence relative à « la perte de confiance », en a toutefois quelque
peu modifié les données. Au cours des débats parlementaires, le ministre du travail
soulignait que « la cause est réelle si elle présente un caractère d’objectivité, ce qui exclut
les préjugés et les convenances personnelles 273». La cause réelle est donc nécessairement
objective en ce qu’elle doit se traduire par des manifestations extérieures susceptibles de
vérification274.
Comme l’indique Anne-Marie Gilles, la Cour de cassation « a été dans le sens de
ces espérances sans hâte 275». Il a fallu en effet attendre un arrêt du 30 mars 1982 pour que
les juges exigent la présence de ce caractère d’objectivité, et pour « que l’attitude du
conjoint du salarié n’entraîne plus une présomption de perte de confiance 276». En cette
affaire, le licenciement d’une salariée est jugé sans cause réelle et sérieuse, faute pour la
société d’alléguer un fait précis justifiant la « perte de confiance », dans la mesure où
268
Cass. soc. 09 octobre 1959, Etablissements Marchand Boldoduc c/ Dame Dufrenois, D. 1960, p. 8
Cass. soc. 20 janvier 1960, Lacombe c/ Labo Civa, D. 1960, sommaire p. 31
270
Cass. soc. 09 janvier 1963, Demoiselle Matheus c/ Etablissements Trumel, Dr. soc. 1963, p. 351
271
Cass. soc. 02 décembre 1964, D. 1965, p. 97 ; v. aussi Cass. soc. 04 novembre 1976, Bull.civ. V, n° 556,
p. 455 ; Cass. soc. 13 octobre 1976, Bull. civ. V, n° 485, p. 399 ; Cass. soc. 04 avril 1979, Bull. civ. V, n°
315, p. 230
272
C. trav. Art. L 122-14-3
273
JO débats AN 23 mai 1973, p. 1445, col.2
274
LYON-CAEN (G), PELISSIER (J), SUPIOT (A), op.cit., p. 288
275
GILLES (AM), op. cit., p. 131
269
72
Le couple et le droit du travail
« l’existence de relations de nature affective entre (les époux) ne saurait constituer un motif
suffisant de la réalité d’une connivence entre eux pour nuire aux intérêts de la
société… 277». Cette jurisprudence va donc dans le sens d’une limitation des licenciements
de salariés dont le conjoint travaille dans une entreprise concurrente, puisque les juges
imposent un fait précis et objectif pour justifier la « perte de confiance ». Or, de nombreux
arrêts ont précisé que l’objectivité ainsi recherchée, était établie, tant au vu de l’importance
des fonctions occupées par le salarié, qu’au vu de la taille de l’entreprise.
Déjà en 1980, la Cour de cassation a jugé qu’une salariée pouvait être
régulièrement licenciée sur le fondement de la « perte de confiance », au regard de ses
fonctions notables dans l’entreprise. L’attendu de la Cour de cassation dispose ainsi qu’ :
« en raison de l’importance de son poste de chef comptable et des rapports tendus existant
entre la société Atlas Levage et son mari, la Dame Voisin ne pouvait plus accomplir son
travail dans des conditions normales, ce dont il résultait une absence de confiance
réciproque mettant obstacle en l’espèce au maintien des relations de travail278 ». Le
licenciement de l’épouse trouvait donc son origine dans les désaccords opposant la société
et son époux ayant abouti au licenciement de ce dernier, et non dans une quelconque
négligence ou faute de sa part. La Cour de cassation justifie ici le licenciement de la
salariée par les risques accrus de divulgations d’informations concernant la société du fait
de sa qualité de chef comptable, poste de confiance et à responsabilités dans l’entreprise.
De la même façon, a été retenue l’existence d’une cause réelle et sérieuse pour le
licenciement d’une collaboratrice directe du directeur administratif et financier, en raison
des rapports tendus existant entre son mari récemment licencié et l’employeur279.
Qui plus est, la jurisprudence a confirmé l’existence de risques objectifs au vu de la
petite dimension de l’entreprise, qui aurait favorisé la diffusion à l’intérieur de celle-ci
d’informations d’ordre commercial et légitimé la crainte de l’employeur à l’égard de la
salariée. La Cour d’appel de Paris justifie ainsi le licenciement pour cause réelle et sérieuse
276
ibid.
Cass. soc. 30 mars 1982, SA Serinox c/ Madame Hervé , Bull. civ. V, n° 229
278
Cass. soc 26 juin 1980, précité supra note n° 254
279
Cass. soc. 06 juillet 1983, Madame Goupil c/ SA Boussac Saint-Frères, Bull.civ. V, n° 395, p. 281 ; cf.
aussi Cass..soc. 06 mars 1986, Cah. Prud. 1987, n°1, p. 10 ; Cass. soc. 07 mai 1987, LS, J 388, p. 15
277
73
Le couple et le droit du travail
d’une secrétaire commerciale par le fait qu’elle vive maritalement en concubinage avec un
ancien salarié dorénavant au service d’une entreprise concurrente, et surtout au vu de la
petite taille de l’entreprise où elle travaillait280. L’originalité de cet arrêt réside en ce que
la solution s’applique à des concubins. Comme l’indique le Professeur Mouly : « Ce n’est
pas le mariage en soi qui occasionne la perte de confiance, mais la communauté de vie
qu’il implique, parce qu’elle favorise la divulgation d’informations. Dès lors que cette
circonstance objective se retrouve dans l’union libre, elle doit produire les mêmes effets.
Ce qui suppose que le concubinage ait une certaine épaisseur, une certaine stabilité281 ».
En matière de « perte de confiance », le couple s’entend donc du couple marié
comme du couple de concubins.
La jurisprudence a ainsi longtemps considéré que le comportement ou l’activité du
conjoint ou concubin du salarié pouvait justifier le licenciement de ce dernier. Même si
l’influence du comportement de l’entourage du salarié s’est trouvée réduite du fait de
l’exigence d’un risque objectif et précis pour justifier la perte de confiance, il n’en
demeurait pas moins que la rupture du contrat de travail d’un salarié pouvait être due à
l’autre membre du couple.
§2- Une interdépendance des membres du couple injustifiée :
La « perte de confiance » liée au fait du conjoint ou concubin, phénomène
purement subjectif282, était ainsi admise comme motif réel et sérieux de licenciement au
détriment du salarié, alors qu’il n’avait commis lui-même aucune faute. Le salarié subissait
donc le comportement de l’autre membre du couple à un point tel que l’on aurait pu parler
de licenciement pour "motif conjugal". Comme l’indique M. Kuhnmunch283,
si
l’indépendance professionnelle des époux était consacrée par le code civil, celle-ci se
heurtait à des obstacles importants.
280
CA Paris 04 juin 1987, précité supra note n° 255
MOULY (J), note sous CA Paris 04 juin 1987, précité supra note n°255
282
GAUDU (F), op. cit., p. 33
283
KUHNMUNCH (O), loc.cit.
281
74
Le couple et le droit du travail
Notamment, cette admission de la seule « perte de confiance » comme motif de
licenciement pouvait être considérée comme une entorse à la loi de 1973284. En effet,
même fondée sur les fonctions du salarié ou la taille de l’entreprise, la perte de confiance
n’en demeure pas moins un état d’esprit, une opinion de l’employeur285. Ainsi, même si la
jurisprudence imposait que l’employeur allègue un fait précis pour justifier la perte de
confiance, « la portée du principe était dans la pratique ramenée à peu de choses286 ».
Effectivement, le chef d’entreprise « suppose » qu’il ne pourra plus accorder sa confiance à
son salarié du fait du comportement de son conjoint : « il s’agit d’un motif exclusivement
subjectif et invariable287 ». Or, l’ensemble de la jurisprudence relative à la « perte de
confiance » du fait du conjoint a trait à des affaires ou le chef d’entreprise craignait pour
son entreprise sans justifier réellement d’un acte de concurrence à son égard. L’employeur
était donc admis à licencier parce qu’il redoutait que la salariée épouse les querelles de son
mari ou que celle-ci divulgue des informations confidentielles288.
Critiquable, la jurisprudence admettait ainsi qu’un simple risque de révélation
d’informations ou une absence de confiance mettant obstacle aux relations de travail,
entraîne le licenciement du salarié. Elle ne répondait en ce sens aucunement aux exigences
de réalité et de sérieux des motifs de licenciement posés par la loi. La simple preuve de la
réalité d’un soupçon suffisait à justifier le licenciement.
Mais surtout, elle admettait que le licenciement puisse être dû au conjoint. En effet,
dans tous les arrêts relatifs aux licenciements de salariés fondés sur le comportement de
l’entourage du salarié, la faute du salarié n’était en général pas établie289.
Certes, l’existence d’une communauté de vie et d’une relation affective est un
élément à prendre en compte en ce qu’il peut entraîner une gêne pour l’entreprise. Ainsi,
les éléments relatifs à l’entourage du salarié peuvent constituer des faits objectifs de nature
à justifier « la perte de confiance290 ». Toutefois, licencier un salarié pour cause réelle et
284
CHIREZ (A), op. cit., p. 196
LYON-CAEN (G), PELISSIER (J), SUPIOT (A), loc.cit
286
GAUDU (F), loc.cit.
287
CHIREZ (A), loc. cit.
288
LYON-CAEN (G), PELISSIER (J), SUPIOT (A), loc. cit.
289
GAUDU (F), loc.cit.
290
ibid.
285
75
Le couple et le droit du travail
sérieuse sur le fondement du seul comportement de l’autre est critiquable. Sa faute était en
effet simplement redoutée et il n’appartenait pas à l’employeur de démontrer la
participation active du salarié dans les actes déloyaux291. Ainsi, la Cour d’appel de Paris a-t
-elle pu justifier le licenciement d’une salariée alors « qu’aucune violation de ses
obligations vis-à-vis de son employeur ne lui sont reprochées292 ».
Enfin, une telle position jurisprudentielle apparaît à certains, en réelle contradiction
avec « le droit au mariage » proclamé par la Cour d’appel de Paris dans la célèbre affaire
Barbier293 : en effet, admettre le licenciement d’un salarié au motif que celui-ci ou celle-ci
projette de se marier ou est mariée avec un concurrent, semble porter atteinte au caractère
d’ordre public de ce droit294.
« Les gens se marient aussi "pour le pire"; qu’on se le dise ! Une nouvelle solidarité
conjugale de fait vient s’ajouter aux solidarités ménagères légales existantes 295». Fort
contestable, la jurisprudence relative à la perte de confiance du fait du conjoint allait
heureusement connaître un revirement, dans le sens d’une autonomie des membres du
couple dans l’exercice de leurs relations professionnelles. Les juges vont ainsi poser en
principe, la protection de l’activité de chacun des membres des agissements de l’autre.
Section II ) La seule prise en considération de la personne comme motif de sanction :
A la question de savoir si le comportement du conjoint du salarié peut constituer en
lui-même un juste motif de licenciement de ce dernier, nul doute n’est permis depuis un
revirement de jurisprudence significatif de la Cour de Cassation. Désormais, le
comportement de l’entourage du salarié a une influence très restreinte et toute sanction
prise à l’encontre d’un salarié doit être justifiée par des éléments objectifs qui lui sont
291
GILLES (AM), loc.cit.
CA Paris 04 juin 1987, précité supra note n°255
293
CA Paris, 30 avril 1963, précité supra note n°216
294
DESPAX (M), loc.cit.
295
CHIREZ (A), loc. cit.
292
76
Le couple et le droit du travail
inhérents ( §1 ). Or, cette évolution de la jurisprudence est caractéristique de l’approche du
couple par le droit du travail ( §2 ).
§1- L’indifférence du comportement de l’entourage du salarié sur sa relation de
travail :
« Un licenciement pour une cause inhérente à la personne du salarié doit être fondé
sur des éléments objectifs ; la perte de confiance alléguée par l’employeur ne constitue pas
en soi un motif de licenciement296 ». La Cour de cassation dans l’arrêt Fertray du 29
novembre 1990, opère un véritable bouleversement des solutions jusque là affirmées en
matière de « perte de confiance ».
Les faits sont intéressants en ce qu’ils sont sensiblement similaires aux arrêts
précédents. En l’espèce, la salariée était secrétaire comptable dans une entreprise dans
laquelle son époux était employé comme cadre. Suite au licenciement de ce dernier,
l’employeur est venu notifier à la salariée la rupture de son contrat de travail au vu de
« l’incompatibilité entre les fonctions de secrétaire exercées dans les secrets de la vie de la
Sté Wagner et le fait d’être épouse d’un ancien salarié qui nous (la société) attaque devant
les tribunaux 297». Condamnant le licenciement ainsi justifié par l’employeur, la Haute
juridiction décide que la rupture du contrat de travail d’un salarié doit reposer sur des faits
objectifs lesquels, seuls de nature à fonder un licenciement pour motif personnel, doivent
être inhérents au salarié, « et pour ainsi dire lui être imputables298 ».
Aussi, « la perte de confiance » n’est plus en soi un motif de licenciement. Il ne
faut pas en déduire qu’elle ne peut constituer une cause réelle et sérieuse299. Mais pour être
acceptée comme telle par le juge, elle devra nécessairement se fonder sur des faits objectifs
découlant du comportement personnel du salarié. Donc, il semble désormais exclu que le
licenciement d’un salarié puisse être justifié par le seul comportement de son entourage,
296
Cass. soc. 29 novembre 1990, Mme Fertray c/ SA Etablissements R. Wagner et Cie, D. 1991, p. 191, note
Jean Pélissier
297
ibid.
298
GAUDU (F), loc.cit.
299
RAY (JE), Fidélité et exécution du contrat de travail, Dr. soc. 1991, p. 377
77
Le couple et le droit du travail
même à considérer que les données relatives au conjoint ou concubin puissent constituer
des éléments objectifs.
Cet arrêt met ainsi fin « aux dérapages antérieurs300 » dont la jurisprudence
Voisin301 était une illustration brillante. Il prend le contre-pied de l’ancienne jurisprudence
qui admettait, au vu de la relation affective existant entre le salarié et son époux ou
compagnon, le licenciement d’un salarié du fait de son conjoint.
Il est intéressant de remarquer que cette obligation de preuve d’un fait personnel au
salarié, avait déjà été retenue par la Cour de cassation en 1986 lorsqu’elle considérait que
« la perte de confiance, seul motif invoqué par la société, ne peut résulter que du
comportement personnel du salarié (…) ; ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse, le
licenciement motivé par la perte de confiance de l’employeur dans son salarié mais fondé
exclusivement sur des faits imputables au conjoint de ce salarié302 ». Cependant, elle ne
tirait à l’époque aucune conséquence de ce principe303. Pareillement, le Conseil d’Etat en
1987 avait pu considérer qu’ « en l’absence de toute faute, n’est pas de nature à justifier le
licenciement d’une salariée (…) le fait que son époux exerce une activité concurrente dans
une autre société, le risque de communication de renseignements à son mari par la salariée,
représentant du personnel et membre de comité d’entreprise, constituant une simple
éventualité304 ».
Quoiqu’il en soit, le principe est, depuis 1991, définitivement posé : le licenciement
pour motif personnel doit être inhérent à la personne du salarié, ce qui implique qu’il ne
puisse être fondé sur le seul comportement
de l’entourage du salarié. En outre,
l’employeur ne peut plus licencier un salarié en raison de simples soupçons.
La chambre sociale a, à de nombreuses reprises, été amenée à confirmer cette
position. Ainsi, a été considéré abusif le licenciement d’un salarié, l’employeur lui ayant
300
PICOD (Y), note sous Cass. soc. 27 novembre 1991, Ferrand c/ SA Librairie Larousse, D. 1992, p. 296
Cass . soc. 26 juin 1980, précité supra note n°254
302
Cass. soc. 03 juillet 1986, Société Anonyme Crit intérim c/ Mme Pioche, Bull. civ. V, n° 348, p. 268
303
GAUDU (F), loc. cit.
304
CE 17 juin 1987, Société Comarfa c/ Mme Buffeteau, D. 1988, som. comm. , p. 215
301
78
Le couple et le droit du travail
simplement reproché de faire éventuellement bénéficier l’entreprise concurrente de sa
femme de ses connaissances concernant l’élaboration des produits de la société305. Qui plus
est, dans un arrêt de 1993, la Cour de cassation est venue préciser qu’ « un licenciement
pour une cause inhérente à la personne du salarié doit être fondé sur des éléments objectifs
et imputables au salarié 306». Cette spécification vient encore fortifier l’orientation
protectrice de la vie de couple du salarié, et d’une manière générale de sa vie privée.
Récemment encore, le Professeur Paul- Henri Antonmattéi rappelait ainsi que tout fait
objectif n’est pas susceptible de justifier le licenciement pour perte de confiance : tel est le
cas de faits empruntés à la vie personnelle du salarié307.
A noter enfin une tendance récente de la jurisprudence, pour des faits sensiblement
similaires aux anciennes jurisprudences relatives à la « perte de confiance », de sanctionner
par le biais de l’article L 122-45 du code du travail toute sanction autre que le
licenciement, fondée sur les liens conjugaux. Ainsi, a été qualifié de discriminatoire en
raison de la situation de famille un déclassement professionnel d’une salariée « motivé par
la crainte que la salariée ne se livre à un espionnage industriel au profit de son époux
exerçant une activité concurrente308 ».
Donc, désormais, pour être valablement sanctionné, le salarié doit avoir lui-même
commis un acte objectif détruisant la confiance de son employeur. Si le conjoint ou
concubin, commet une faute ou travaille dans une entreprise concurrente, « la perte de
confiance » qui peut en résulter n’est en soi pas suffisante. Le chef d’entreprise devra
prouver l’acte fautif du salarié. De par cette protection accrue de la vie privée des salariés,
les membres du couple recouvrent une totale indépendance dans l’exercice de leurs
fonctions.
305
Cass. soc. 09 janvier 1991, M. Tible c/ société Billot, Bull. civ. V, n°1, p. 1 ; cf. aussi Cass. soc. 10
décembre 1991, Mme Deram c/ Sté Sdez industrie services et autres, D. 1992, IR, p. 35
306
Cass. soc. 07 décembre 1993, Mlle Steinbess c/ Sté Ufifrance patrimoine, D. 1994, som.comm., p. 309,
note A. Lyon-Caen et C. Papadimitriou
307
ANTONMATTEI (PH), observations sous Cass. soc. 26 janvier 2000, Verrier c/ Sté Casino France, Dr. et
patrimoine, n° 83, juin 2000, p. 117
308
Cass. soc. 10 février 1999, Mme Spender-Rocher c/ SA SATMA, Dr. soc. 1999, p. 410, obs. Bonnechère
79
Le couple et le droit du travail
§2- L’affirmation de l’autonomie des membres du couple :
L’ancienne jurisprudence qui admettait le licenciement d’un salarié fondé sur la
« perte de confiance » du fait du conjoint, incluait une interdépendance entre les membres
du couple en ce que les agissements de l’un avaient des incidences sur la relation de travail
de l’autre.
Toutefois, l’évolution de la jurisprudence en la matière tend à montrer la volonté de
la chambre sociale d’évincer les motifs fondés sur le comportement d’un membre de
l’entourage du salarié. En effet, « le comportement de l’époux, les vicissitudes de la vie
conjugale, et plus largement familiale, entrent difficilement dans le champ contractuel309 ».
En posant en principe que le comportement de l’époux ne peut justifier le licenciement
pour cause réelle et sérieuse du salarié, la Cour de cassation atténue ainsi à son maximum
la prise en considération de la relation affective entre les membres du couple.
A ce titre, il apparaît intéressant de relever la comparaison effectuée par le
Professeur Gaudu310 entre la jurisprudence relative au contrat de couple et celle relative à
« la perte de confiance ». Comme nous l’avons souligné, l’indivisibilité entre les contrats
de travail des membres du couple entraînait, en cas de rupture de l’un, la rupture
automatique de l’autre. Cependant, un arrêt de 07 mai 1991311 est venu limiter ce principe
en précisant que la démission de l’un, si elle entraînait la rupture du contrat de travail de
l’autre, n’impliquait pas nécessairement une démission de celui-ci. Ainsi, « la
jurisprudence tend à réduire l’impact sur le contrat de travail du comportement de
l’entourage familial du salarié, ici en n’admettant pas que ce comportement fonde un
licenciement pour perte de confiance, là en n’admettant pas qu’il entraîne une rupture
automatique du contrat 312».
309
GAUDU (F), loc.cit.
ibid.
311
Cass. soc. 07 mai 1991, précité supra note n°163
312
GAUDU (F), loc.cit.
310
80
Le couple et le droit du travail
En outre, et comme l’indique Madame Escande-Varniol313, l’abandon de
cette jurisprudence est d’autant plus nécessaire « qu’à une époque où les trois quarts des
femmes travaillent et où la majorité des couples ont fait des études identiques, le nombre
de ménages travaillant dans des entreprises concurrentes est important ». Ainsi, conserver
l’ancienne jurisprudence aurait été inadapté et aurait abouti à un nombre de licenciements
pour perte de confiance du fait du conjoint invraisemblable.
Ce faisant, le droit du travail, de par l’usage qu’il fait de la notion de couple,
privilégie sans aucun doute possible l’idée d’indépendance des membres du couple dans le
cadre de leur activité professionnelle salariée. Et pourquoi en irait-il autrement ? En effet,
l’ordre des médecins ne radie pas le praticien dont l’épouse est indiscrète, de même que
l’Etat ne révoquera pas le fonctionnaire à raison du comportement ou de la profession de sa
femme…314. Cette situation est donc incontestablement adaptée à l’évolution de la société
laquelle ne saurait admettre un nouveau motif de licenciement : le licenciement
conjugal…315
313
ESCANDE-VARNIOL (MC), Les éléments constitutifs d’une cause réelle et sérieuse de licenciement
pour motif extraprofessionnel, RJS 7/93, p. 403
314
ibid.
315
ibid
81
Le couple et le droit du travail
CONCLUSION
De l’étude du droit du travail, nous avons pu souligner que celui-ci privilégiait
l’autonomie des membres du couple dans l’exercice de leurs relations professionnelles.
En effet, l’interdépendance des conjoints ou concubins ne peut-être déduite que
d’hypothèses où elle apparaît comme une nécessité, eu égard à l’intérêt de l’entreprise ou
au respect du « droit à une vie familiale normale ». Au contraire, le couple est envisagé
comme l’union de deux êtres totalement autonomes l’un de l’autre, en ce que le statut de
couple n’a aucune influence sur la relation professionnelle de l’un ou l’autre des membres,
et en ce que l’un des membres du couple est désormais protégé des agissements de l’autre.
En ce sens, le droit du travail ne fait que refléter l’évolution et la transformation du
couple perceptible en droit civil, telle qu’elle est soulignée par Anne-Marie Gilles :
« malgré la variété des formes, un point commun réunit néanmoins les couples : la
progression de l’autonomie des membres316 ».
Cette évolution semble avoir eu une importance sur la conception du couple par le
droit de la famille317. Celui-ci en effet est passé d’une conception strictement liée au
mariage, à une prise en considération croissante de l’individualité de chaque membre du
couple. Cette faveur accordée à l’indépendance des membres du couple, s’est ainsi
manifestée par la progression de l’autonomie et de l’égalité des époux, par la possibilité
pour les époux de conclure des contrats de droit commun entre eux…
Or, de la même façon, le droit du travail souligne cette évolution dans le couple.
Ainsi, il est intéressant de remarquer, tant au vu de la jurisprudence relative au contrat de
couple ou encore relative à « la perte de confiance », qu’au regard de la validité des
contrats entre époux, que le droit du travail tend à privilégier l’autonomie des membres du
316
317
GILLES (AM), loc.cit.
ibid.
82
Le couple et le droit du travail
couple, lequel « n’est plus vécu comme un lieu de contraintes, où les membres doivent
sacrifier leur liberté, mais comme le moyen d’assurer l’épanouissement de l’individu318 ».
La conception que le droit du travail a du couple se rapproche donc sensiblement du
droit civil, c’est à dire plus significatif par l’autonomie qui existe entre ses membres, que
par un quelconque lien d’interdépendance.
318
ibid.
83
Le couple et le droit du travail
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573, p. 431, (perte de confiance)
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20 230, note Hennion Moreau, (liberté du mariage)
- Cass. soc. 06 juillet 1983, Madame Goupil c/ SA Boussac Saint Frères, Bull. civ. V, n°
395, p. 281, (perte de confiance)
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- Cass. soc. 06 mars 1986, SA Philips c/ Madame Pépin, Cahier prud’homaux 1987, n° 1,
p. 10, (perte de confiance)
- Cass. soc. 07 mai 1986, Madame Genco c/ SARL Gérance Varoise, Bull. civ. V, n° 204,
(contrat de couple)
- CA Versailles 27 mai 1986, Volovick c/ Masseboeuf, D.1986, IR p. 420
- Cass. soc. 03 juillet 1986, SA Crit intérim c/ Madame Pioche, Bull. civ. n° 348 , p. 268,
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- Cass. soc. 09 janvier 1991, Tible c/ Société Billot, Bull. civ. V, n° 1, p.1, (perte de
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- Cass. soc. 17 avril 1991, P...c/ Association Fraternité Saint Pie X, JCP 1991 II, 21 724,
note Sériaux, Dr. soc. 1991, p. 489, (vie personnelle du salarié, trouble à l’entreprise)
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- Cass. soc. 10 décembre 1991, Madame Deram c/ Société Sdez industrie services et
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- Cass. soc. 22 janvier 1992, Madame Rossard c/ Société Robuchon et fils, Dr. soc. 1992, p.
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- Cass. soc. 1er avril 1992, Gaillard c/ SA Bourrée et Fils, RJS 5/92, n° 577, p. 329
- Cass. soc. 02 juillet 1992, D Groeta c/ SA Disanto, RJS 8-9/92, n° 970, p. 544
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note Sordino, (contrat de couple)
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som.comm., p. 309 ; Dr. social 1994, p. 213, (perte de confiance)
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(article L 784-1 du code du travail )
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(article L 223-7 du code du travail )
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- Cass. soc. 18 novembre 1998, Duarte c/ copropriété Le Buffon, Répertoire du Notariat
Défrénois 1999, n° 15-16, p. 854, note Nevière ; D. 1999, p. 443, note Mouly ;
Jurisprudence sociale Lamy, n° 28 ,p. 19, (contrat de couple)
- Cass. soc. 10 février 1999, Madame Spender-Rocher c/ SA Satma, Dr. soc. 1999, p. 410 ;
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- Cass. soc. 04 mai 1999, Hezyszyn c/ Paul Jacottet SA, D. 2000, sommaire p. 85, note
Frossard
- Cass. soc. 18 mai 1999, Société Legrand c/ M. Rochin, Dr. soc. 1999, p. 734, note
Gauriau ; D. 2000, som.comm. , p. 84, note Escande-Varniol , (usage abusif d’une clause
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- Cass. soc. 19 mai 1999, OPAC Val de Marne c/ Merel, Juridisque Lamy, n° 2316
- Cass. soc. 01 juin 1999, Banque populaire savoisienne de crédit c/ Meynet et autres, RJS
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- CA Toulouse 25 juin 1999, SA Multichauss c/ Klelifa, RJS 11/99, n° 1415, (contrat de
couple)
- Cass. soc. 26 janvier 2000, Madame Verrier c/ Société Casino France, Dr. et Patrimoine,
juin 2000, n° 83, p. 117, observations Paul-Henri Antonmattéi, (perte de confiance)
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- Loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction
publique d’ Etat, JO du 12 janvier 1984, p. 271
- Loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction
publique territoriale, JO du 27 janvier 1984, p. 441
- Loi n° 86-33 du 09 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction
publique hospitalière, JO du 11 janvier 1986, p. 535
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Le couple et le droit du travail
- Loi n° 94-965 du 29 juillet 1994 relative au don et à l’utilisation des éléments et produits
du corps humain, à l’assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal, JO du
30 juillet 1994, p. 11060
- Loi n° 98-461 du 13 juin 1998, JO du 14 juin 1998, p. 9029 ; JCP G, 24 juin 1998, p.
1179
- Loi n° 99-944 du 15 novembre 1999 relative au pacte civil de solidarité, JO du 16
novembre 1999, p. 16959
93
Le couple et le droit du travail
TABLE DES MATIERES
Remerciements…………………………………………………………………………… 2
Sommaire……………………………………………………………………………….….3
Table des abréviations…………………………………………………………………….4
Introduction………………………………………………………………………………..7
TITRE PREMIER : La prise en considération limitée d’une dépendance entre les
membres du couple……………………………………………………………………….18
CHAPITRE I : Une dépendance nécessaire des membres du couple………………………….20
Section I : Une dépendance nécessaire dans l’intérêt du couple…………………….……21
§1 : Manifestations légales expresses de l’interdépendance………………………21
§2 : Manifestations indirectes de l’interdépendance………………………………24
Section II : Une dépendance nécessaire dans l’intérêt de l’entreprise……………………28
§1 : Incompatibilité du couple avec l’exercice de certaines fonctions……………28
§2 : Incompatibilité de la vie de couple avec le bon fonctionnement de
l’entreprise ...……………………………………………………………………...30
CHAPITRE II : Une dépendance voulue par le couple………………………………………...34
Section I : Le contrat de couple ou la stipulation d’engagements indivisibles……………37
§1 : L’ adéquation du couple à la spécificité des fonctions à accomplir………….38
A : Le couple, condition essentielle de validité du contrat de couple…………38
B : L’interdépendance des fonctions occupées par le couple ….………….…..39
94
Le couple et le droit du travail
§2 : Le contrat de couple ou la dépendance conventionnelle des membres du
couple…......……………………………………………………………………….41
Section II : Les effets entre les membres du couple de l’indivisibilité des engagements….44
§1 : Une rupture automatique critiquable………………….………………….…..45
§2 : Une rupture « contrôlée » privilégiée………………..…………………….…48
A : La réduction des effets de l’indivisibilité entre les membres du couple…....48
B : L’ « autonomie des ruptures » favorisée…………….………...…….……...50
TITRE SECOND : L’autonomie des membres du couple favorisée………………….52
CHAPITRE I : L’indifférence de la situation de couple sur l’activité professionnelle de ses
membres…………………………………………………………………………………………...54
Section I : La protection de la « vie familiale » du salarié………………………………..54
§1 : L’autonomie des membres du couple lors du recrutement de l’un d’eux……55
§2 : L’autonomie des membres du couple dans leur vie professionnelle….……...57
A : Le rejet de la situation de couple comme justification de la rupture du
contrat de travail d’un salarié………………………………………………….58
B : Le refus de toute restriction conventionnelle aux « libertés civiles » du
salarié…………………………………………………………………………..59
Section II : Les contrats de travail au sein même du couple ou la marque d’une autonomie
entre ses membres……………………………………….…………………………………61
§1 : La compatibilité du couple avec un contrat de travail entre ses
membres…………………………………………………………………………...62
A : La difficile admission du contrat de travail entre époux…………………..62
B : La validité de principe des contrats de travail entre époux………………..64
§2 : La reconnaissance légale de l’indépendance des membres du couple…..……65
CHAPITRE II : L’indifférence des agissements d’un membre du couple sur l’activité
professionnelle de l’autre….……………………………………………………………………...69
Section I : Abandon d’ « une solidarité conjugale de fait » critiquable …………………..70
§1 : Une traditionnelle admission de la « perte de confiance » du fait du
conjoint……………………………………………………………………………71
§2 : Une interdépendance des membres du couple injustifiée……………………74
95
Le couple et le droit du travail
Section II : La seule prise en considération de la personne comme motif de sanction……76
§1 : L’indifférence du comportement de l’entourage du salarié sur sa relation de
travail…………………………………………………………………………...…77
§2 : L’affirmation de l’autonomie des membres du couple……………….……....80
Conclusion………………………………………………………………………………...82
Bibliographie……………………………………………………………………………...84
Table des matières………………………………………………………………………..94
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