Evangéliser un peuple, c`est entrer dans son histoire derrière

Transcription

Evangéliser un peuple, c`est entrer dans son histoire derrière
PARTAGE 1 : NOTRE SERVICE D’EVANGELISATION AUPRES DES PAUVRES DE NOTRE TEMPS
Evangéliser un peuple, c’est entrer dans son histoire derrière laquelle, se trouvent entre
autre: la terre, qui constitue une partie de sa vie, de son organisation, de son pouvoir et de
son économie et la langue qui est le témoin et le véhicule de toute sa culture, sa tradition, ses
coutumes, son mode d’expression et de communication avec le monde extérieur et intérieur.
Pour notre intervention, nous avons choisi de partager avec vous deux réalités sur
lesquelles s’étend notre action d’évangélisation : la première à Ouesso, au nord du CongoBrazzaville sur « les peuples autochtones » ;
et la seconde à Syracuse en Sicile au sud de
l’Italie « sur les migrants ». Cette dernière est une action récente qui s’ajoute à l’activité
principale de la communauté qui est celle de l’accueil des pauvres locaux et étrangers.
I. Service F. M. M. auprès des peuples autochtones dans le diocèse d’Ouesso
Ouesso est une ville d’une superficie de 124.050 km2
avec une
population de 389.400 habitants et une densité de 8.5 habitants au km2. Les
catholiques représentent
38, 1%. En général, c’est un diocèse de première
évangélisation. Notre présence F. M. M. dans ce milieu remonte en 1956. Nous
avons été appelées
par Mgr Biechy, spiritain, pour collaborer avec eux au
service de l’évangélisation. Aujourd'hui, l'ordinaire du lieu, Mgr Yve Monot,
spiritain, est un des rares prêtres d'origine européenne à qui fut confié le diocèse.
Jusqu’en 2013, le diocèse comptait : 28 paroisses, 9 prêtres, 3 religieux, 18 religieuses.
L’accès dans les villages est très difficile à cause de l’état défectueux des routes. Cependant,
le peu de missionnaires que compte le diocèse, travaillent inlassablement à l’annonce de
l’évangile.
En dehors de l’enseignement catéchétique et scolaire qu’assurent les sœurs, elles
s’investissent particulièrement dans l’éducation des peuples autochtones à M’Balouma, un
village situé à 7 km de Ouesso. Qui sont les peuples autochtones ?1
Ce sont des groupes ethniques originaires, que l’on trouve disséminés le long des grandes
forêts équatoriales de l’Afrique centrale comme par exemple: le Cameroun, le Gabon, le Congo 1
Les peuples autochtones est ce peuple appelé autrefois « Pygmées », se référant à leur petite taille, un terme qui est
aujourd’hui inapproprié.
1 Brazzaville, la République Démocratique du Congo (RDC), le Rwanda, le Burundi et l’Ouganda.
Ils conservent un mode de vie nomade et ne vivent exclusivement que de cueillette, de chasse et
de
pêche. A part ceux qui commencent petit à petit à se sédentariser, généralement, ces
populations ne pratiquent ni la culture ni l’élevage et ne vont presque jamais à l’école et même
ceux qui y vont, n’ont pas facilement accès à divers secteurs publics tels que : l’éducation,
l’emploi, la santé. A la demande des parents, nous avons fait une première tentative d’envoyer 20
enfants à l’école. Mais ils ont tous fuit, soit parce que les autres enfants les méprisent et nous
savons que personne n’accepte d’être méprisée- soit parce qu’ils ne veulent pas être soumis à des
structures rigides. Ils veulent être libres. Ils sont souvent victimes du racisme.
A cause de leur vie nomade, ils sont sans terre, le plus souvent ils sont marginalisés et
discriminés à cause de leur mode de vie différente. Pire encore, ils n’ont pas la possibilité
d’accéder aux soins de base, soit, par faute de papiers d’identité qui ne leur ont pas été délivrés à
la naissance, soit à cause de refus d’enregistrement. En plus, une fois en ville, leur intégration
est très difficile.
L’initiative pour nous d’ouvrir une école dans le village de M’Balouma, est née d’un
jeune garçon autochtone qui avait fréquenté jusqu’en classe de 4ième. Et qui se trouvant libre, a
pris l’initiative de réunir ses petits frères dans une classe abandonnée pour les alphabétiser.
Saisissant
avec
joie cette occasion, nous avons ouvert une école de trois classes
multigrade construites en banco, pour leur instruction en collaboration avec un enseignant
retraité, et 3 moniteurs pygmées que nous avons eu à préparer qui ont accepté de diriger l’école
aujourd’hui dénommée « Ecole Marie de la Passion ».
En 2012, avec l’aide de la Caritas Italienne et Allemande, nous avons pu réaliser pour la
rentrée scolaire, un cycle complet de 6 classes plus un petit dispensaire en annexe, afin d’assurer
les soins aux élèves et en même temps à d’autres enfants des peuples autochtones, souvent
malades à cause de manque d’hygiène et de conditions de vie très dures en forêt : accidents,
paludisme, dysenterie, mycoses, parasites intestinaux, et tuberculose. L’objectif visé par cet
annexe est, tout en leur procurant les soins primaires, les sensibiliser à l’observance de l’hygiène
des enfants, et des adultes malades qui viennent à nous.
Après l’inauguration de nos bâtiments en octobre 2012, plus de 300 enfants et adultes
sont soignés dans ce petit dispensaire qui ne dispose que peu de matériel, ce qui est d’ailleurs,
2 une de nos grosses difficultés quotidienne. Nous manquons de produits pharmaceutiques de
première nécessité pour procurer à tous, les soins qu’il faut. A l’école, c’est le manque de
moyens financiers pour se procurer le matériel didactique qu’il faut pour le bon fonctionnement
de l’école, et
pour soutenir les quelques rares enseignants qui nous aident. Certains se
découragent et finissent par nous quitter.
Notre travail d’éducation dans ce milieu autochtone est un travail de longue haleine qui
n’est pas du tout facile. Il nécessite de l’amour, du courage, de la patience et une longue attente
avant de voir les fruits. Depuis 24 ans que nous travaillons, c’est à peine si nous voyons les
résultats.
Mais cela n’arrête pas notre élan missionnaire. Ces peuples sont très timides avec les
étrangers tant qu’ils n’ont pas senti que les rapports sont sincères et n’entravent pas leur
liberté. Ce complexe d’infériorité, conséquence de notre complexe de supériorité les
marginalise. Le fait de les considérer tous comme étant de petite taille – ce qui n’est pas
toujours vrai - , leur mode de vie très précaire dans un milieu difficile, et la manière dont ils
sont traités par leurs voisins les Bantous, expliquent cette attitude qui paralyse leurs rapports.
Malgré tout, nous constatons de petits signes d’évolution : petit à petit, ils se rapprochent
près des agglomérations Bantous. Ceci donne beaucoup d’espoir. Ecoutons le témoignage récent
d’une sœur engagée à plein dans ce ministère. Elle m’écrit en disant ceci :
« Tu sais, nous avançons doucement avec nos petits frères pygmées, le nombre augmente petit à
petit, l'inscription cette année est passée à 135 élèves, pas trop de fuites, en plus ils ont la
cantine scolaire, ceci est sans doute un motif de plus pour rester à classes, même si nous
continuons la sensibilisation des parents pour les aider à lire à la maison, c’est toujours
difficile. »
Mais notre grande joie, « nous avons 3 enfants au collège, 2 autochtones et une bantou ».
Les missionnaires y trouvent leur joie à se mettre au service d’un peuple dont le monde se
préoccupe fort peu. Avec l’Eglise locale, qui s’efforce d’améliorer la vie des gens, surtout les
plus pauvres, et de préparer l’avenir en éduquant les jeunes et les cadres de la société
d’aujourd’hui et de demain, nous tentons, par notre pastorale de proximité, d’assurer une
éducation intégrale aux enfants des peuples autochtones, de leur fournir des atouts pour le
respect de leur dignité et surtout de faciliter leur intégration dans les milieux urbains.
3 Cependant, quelques préoccupations ou défis pastoraux nous habitent :
La ville d’Ouesso, est une région dont les grandes forêts, attirent beaucoup d’opérateurs
économiques. Des sociétés occidentales se sont implantées plus particulièrement dans ces forêts
pour une exploitation intensive du bois. Chaque jour, des arbres de 60 m de haut sont abattus et
transportés hors du pays emportant avec eux quantité de tiges d’avenir.
Dans le village de M’Balouma où nous travaillons, la population connaît progressivement
des changements dans leur mode de vie traditionnel. Quelques-uns quittent le milieu forestier,
pour se sédentariser ou gagner les milieux citadins. Outre ce déplacement, certains sont parfois
chassés par l’exploitation forestière de ces grandes compagnies internationales. Or, faire partir
ce peuple autochtone de sa forêt qui constitue tout son univers de vie, n’est-ce pas lui enlever la
vie ?
Nous voyons de plus en plus que c’est une population vulnérable, exposée
continuellement à la marginalisation et à divers formes d’abus : discrimination sociale,
économique et politique, manquant de capacités pour revendiquer leurs droits.
L’ONU tire la sonnette d’alarme. En 2010, lors d’une visite en République
Démocratique du Congo, l’un de leur rapporteur spécial sur les droits des peuples
autochtones, James Anaya faisait noter « que les peuples autochtones au Congo vivent dans
des conditions de marginalisation extrême».
Une loi à été élaborée en 2004 et promulguée en 2011par le gouvernement Congolais
afin de les protéger, mais l’application sur le terrain des protections prévues par cette loi est
loin d’être évidente.
Avec l’exploitation de ces forêts équatoriales, de nouveaux peuples s’installent tout
autour
de M’Balouma, poussant les populations autochtones qui historiquement sont
considérés les premiers habitants du Congo à quitter les lieux pour aller plus loin, mettant
ainsi leur survie en question. On note une perte rapide de leur identité et un taux d’alcoolisme
de plus en plus élevé parmi eux et la prolifération du VIH. Leur situation est vraiment un
grand défi à relever. Nous cherchons les possibilités de les réduire et donner satisfaction a
toutes ces urgences.
4 

Documents pareils