Résumé Exécutif Choix des marchés

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Résumé Exécutif Choix des marchés
TCHAD Mise à jour de la sécurité alimentaire
Analyse du Prix des Céréales de Base et Leur Impact
sur les Zones d’Economie Alimentaire
Mars 2008
Résumé Exécutif Ce rapport fournit une analyse du prix des céréales de base sur les quatre principaux marchés (N’Djamena, Moundou, Sarh, et Abéché) et leur impact sur les zones d’économie alimentaire au Tchad pour la période d’octobre 2002 à mars 2008. La hausse des prix des céréales observée dès la fin de l’année 2007 s’est poursuivie jusqu’en ce mois de mars 2008. Pour pouvoir cerner l’incidence de cette hausse sur les économies des ménages, l’évolution des prix des deux céréales de base (mil penicillaire, sorgho) les plus consommées dans le pays a été suivie à travers les quatre principaux marchés céréaliers du pays (N’Djamena, Sarh, Moundou, Abéché) sur la période couvrant octobre 2007 à mars 2008 comparée à la moyenne pour la même période des cinq années précédentes (2002/03‐2006/07). L’analyse à travers l’approche des zones d’économie alimentaire a été particulierement focalisée sur les régions du Ouaddaï et du Logone Occidental. Ces deux régions appartiennent respectivement aux Zones d’Economie Alimentaire (ZEA) « Cultures céréales pluviales » et « Culture de rente Coton et Arachide », dégagent des déficits alimentaires par rapport à leurs besoins céréaliers, et font face à une forte pression humaine. Le Ouaddaï est une zone d’accueil de réfugiés et personnes deplacées et le Logone Occidental le principal pôle économique du pays. La tendance à une hausse soutenue est de plus probable au fur et à mesure que l’on s’achemine vers la période de soudure alors que les faibles dispositions en matière de stock alimentaire strategique pourrait redouter une crise alimentaire en pleine période de soudure. Un suivi particulier de la situation alimentaire des ménages vulnerables dans ces zones et des disposions en mesures d’attenuation s’averrent nécessaires pour modérer les effets de cette hausse. Choix des marchés La base des données a été construite en tenant compte de l’influence des différents marchés intervenant dans les flux céréaliers dans le pays pour les deux denrées de bases préférentielles (mil penicillaire, sorgho) dans la consommation. En général, le mil pencillaire est la céréale la plus chère, et moins accessible à la catégorie des ménages pauvres qui consomment plus FEWS NET Tchad
N’djamena
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Figure 1. Zones d’économie alimentaire au Tchad
Zones d'economie alimentaire
1
Zone du Sud de Culture de Rente Coton et Arachide
2
Zone du Sud de Culture de Rente Riz
3
Zone du Sud-Est de Culture de Décrue
4
Zone de l’Est de Culture Pluviale Cérialière
5
Zone de l’Ouest Agropastorale
6
Zone Centrale Agro-Pêche-Elevage
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Zone Centrale de Culture de Décrue et Pêche
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Zone du Nord d’Elevage Transhumant
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Zone du Nord d’Elevage Camelin, Dattes et Sel (Natron)
Source : FEWS NET Tchad
Le Réseau de Systèmes d’Alerte Précoce Contre la Famine est une activité
financée par l’USAID. Les idées et opinions que ce document exprime ne
sont pas forcement ceux d’USAID ni du Gouvernement des États Unis.
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le sorgho. De plus, alors que la préférence pour le mil penicillaire est plus prononcée en zone sahélienne, la forte consommation du sorgho se précise en zone soudanienne. Le choix des quatre marchés de référence (N’Djamena, Moundou, Sarh, et Abéché) relève de leur importance dans le circuit de commercialisation céréalière à travers le pays. Ce sont les marchés des principales céréales de base au Tchad. En retenant deux marchés (N’Djamena, Abéché) en zone sahélienne et deux autres marchés (Moundou et Sarh) en zone soudanienne, l’analyse permet d’appréhender l’aspect spatial de la commercialisation céréalière. Prises ensemble, ces quatre localités constituent également les principales villes du pays, et leur position en régions frontalières avec certains pays limitrophes permet de cerner la dimension transfrontalière des flux céréaliers. Ci–après les caractéristiques de ces différents marchés: (a) Le marché de N’Djamena est le marché principal de consommation au Tchad, qui réunit essentiellement des céréales au moment de la récolte et assure le transit des céréales en provenance du Nigeria et du Cameroun vers l’intérieur du pays. Situé en ZEA « Agropastorale », Il assure donc un important débouché pour la production locale et à travers sa position charnière permet le stockage des excédents céréaliers en provenance des zones hautement productrices comme le Salamat pour un approvisionnement des zones structurellement déficitaires comme le Kanem en période de soudure. Plusieurs marchés de regroupements et de collectes assurent, par l’intermédiaire des différents acteurs économiques (commerçants navettes, agents de collectes, grossistes), son ravitaillement. Ces principaux marchés d’approvisionnement sont Amtiman, Bousso, Pala et Bokoro. (b) Le marché d’Abéché est le principal centre de transaction alimentaire en zone sahélienne après celui de la capitale. L’importance de ce marché est reflétée par une forte consommation provoquée ces derniers temps par la pression humaine (e.g., 240 000 réfugiés, 180 000 déplacés tchadiens) dans la zone, mais aussi son rôle de marché de transit pour ravitailler le Nord du Pays (zone du Borkou Ennedi Tibesti (BET)). Ce marché, situé en ZEA « Culture céréalière pluviale », est approvisionné essentiellement par des marchés de collectes de proximité (Birtawil, Adré, Abdi, Hadjer Hadid) et fait exceptionnellement recours aux ravitaillements en provenance du Dar Sila et de certains marchés frontaliers avec le Soudan. (c) Le marché de Moundou constitue également un important centre de consommation, car la ville de Moundou constitue le principal pôle économique du pays et se trouve en plein essor du fait de la proximité de la zone pétrolifère. Se trouvant en zone (Logone Occidental) traditionnellement déficitaire, ce marché situé en ZEA « Culture de rente Coton et Arachide » est approvisionné en sorgho et mil à partir des marchés de Benoye, Bebalem, Doher, Bao, Krim‐Krim, et Deli pour répondre à une forte demande de consommation. Les excédents de ces approvisionnements sont parfois transférés vers N’Djaména. (d) Le marché de Sarh constitue un centre de consommation non des moindres. La ville de Sarh est la troisième ville économique du pays après Moundou et la capitale N’Djamena. La région de Moyen Chari, dont Sarh est le chef lieu a renoué ces dernières années avec des déficits plus ou moins importants en dépit des embellies sur la production nationale à travers les trois dernières campagnes (2005/2006 à 2007/2008). Bien que ce marché de la ZEA « Culture de rente Coton et Arachide » soit approvisionné par le Logone Oriental et le Salamat, une grande partie de son approvisionnement provient des marchés de collecte et de regroupement du Moyen Chari. Contexte et Dispositions Alimentaires Le stock national de sécurité alimentaire au 29 février 2008 a été de 10771 tonnes, toutes céréales confondues. Le seuil du stock stratégique de sécurité alimentaire est de l’ordre de 35000 tonnes de céréales pour le Tchad. Cela représente une pénurie de 24229 tonnes. Les achats des céréales effectuées à travers le pays pour la reconstitution du stock de sécurité alimentaire commencés depuis les récoltes de 2007 et arrêtés en date du 29 février 2008 s’élèvent à 3398 tonnes. Une partie du stock national de sécurité soit quelque 9800 tonnes, retirées du stock de la campagne 2006‐2007, a été vendue à un prix modéré sur le marché des zones à risque en 2007, y compris les zones structurellement deficitaires (e.g., Kanem, Batha) et les poches à déficits céréaliers conjoncturels causés par les inondations, les secheresses localisées, les attaques par les ennemies de cultures (e.g., Mayo Kebbi, Mandou, Logone). En plus, 1000 tonnes de céréales ont été offertes par le Le Réseau de Systèmes d’Alerte Précoce Contre la Famine
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Gouvernement français au profit de quelques 41000 personnes déplacées dans la zone de Koukou Angarana en fin janvier 2008. L’ancien stock arrêté avant l’opération des achats pour la nouvelle campagne commerciale 2007/2008 était de 7373 tonnes de céréales. Près de 3234 tonnes de céréales du stock national de sécurité alimentaire actuel proviennent d’un fonds de la coopération française, alors que l’autre partie est financée sur un fonds public du revenu pétrolier tchadien. La période du 2 au 8 février 2008 a coïncidé avec l’attaque de la capitale par les rebelles, la sortie et le retour des habitants de N’Djamena, le trafic commercial avec le Cameroun a été considérablement ralenti, et les moyens de communications ont été coupés pendant presque une semaine. Les flux céréaliers vers N’Djamena ont été interrompus pendant la dite semaine et sont restés précaires tout le long du mois de fevrier 2008. Une grande partie du marché central de N’Djamena a été incendié pendant les événements. La partie sauvée a été pillée. La perte de 500 tonnes du stock commercant incendiées ou pillées a exacerbé la hausse des prix des denrées sur la capitale et cette cherté a été progressivement transmise sur les marchés de collecte du reste du pays. La perte de l’attaque en matière de capitaux de commercialisation et d’infrastructures commerciales détruites est estimée à prés de quatre milliards de FCFA. Après l'attaque, le gouvernement a instauré un état d'urgence qui a consisté en une série de mesures sécuritaires dont la réglementation de la circulation des biens et des personnes à travers des contrôles plus rigoureux. Il n’y a pas eu de changements significatifs sur les taxes aux importations et exportations pendant la période d’analyse, octobre 2002 à mars 2008. Toutefois, suite à l’attaque du 2 et 3 février 2008, le gouvernement aurait promis de réduire les taxes aux importations pour indemniser les commerçants, promouvoir un retour au commerce, et augmenter la consommation des ménages dont le pouvoir d’achat a été érodé. Cependant, suite à l’inflation de 2007 (une variation annuelle de 12 mois de 7,68 pour cent en février 2007), l’intersyndicale des travailleurs tchadiens a déclenché une grève en mai 2007 pour l’amélioration des salaires afin de palier à l’érosion de leur pouvoir causée par les effets collatéraux de l’ère pétrolière. En terme d’incidence sociale des mesures gouvernementales, aux revendications de 200 pour cent d’accroissement, le Gouvernement a proposé une augmentation de 10 pour cent, et a mis sur place un arsenal juridique dont la loi No. 008/PR/2007 portant réglementation de l’exercice de droit de grève dans les services publics. Cette situation affecte considérablement les capacités d’accès à la nourriture des vulnérables urbains intégrant une grande partie des fonctionnaires de catégories moyenne à pauvre. Prix et marchés Incidence des prix de céréales par secteur géographique et catégories des ménages L’information du prix des céréales à travers le pays est à relativiser par rapport au degré d’utilisation de la céréale dans un espace géographique donné, aux habitudes alimentaires et aux possibilités de substitution alimentaire. Ainsi, dans la zone méridionale, où l’utilisation du sorgho est prépondérante, une variation de prix de cette céréale (hausse) sur les marchés de Moundou et Sarh est plus ressentie dans cette zone que celle relative au prix du mil penicillaire. Les populations locales de ces localités aux régimes alimentaires moins diversifiés, même si relativement peu nombreuses, seront par conséquent plus touchées par la hausse de cette denrée. En zone sahelienne, la population du Ouaddaï demeure avec un régime alimentaire largement ancré sur l’utilisation du mil penicillaire. Elle demeure très sensible à une hausse de cette céréale par rapport au sorgho. Dans la capitale N’Djamena, l’utilisation du mil penicillaire et du sorgho est de plus en plus concurrencée par les possibilités de substitution de repas où la panification prend une place de choix. Une hausse sur le mil penicillaire est, par contre, plus ressentie par la population du Ouaddaï où le régime alimentaire est resté largement tributaire des céréales, mais aussi par les populations rurales dans ces deux régions aux possibilités de substitutions limitées. Analyse temporelle et spatiale du prix de céréales de base (mil penicillaire, sorgho) Les deux campagnes excédentaires consécutive 2005‐2006 et 2006‐2007, conjuguées à une troisième 2007‐2008 largement prometteuse jusqu’en août 2007, ont permis une relative stabilité voire même une baisse des prix sur les principaux marchés céréaliers du pays dont les quatre marchés suivis par FEWS NET. Toutefois, les aléas climatiques (inondations, sécheresses localisées) et autres ennemis de cultures (sautereaux, chenilles, oiseaux granivores) enregistrés dès Septembre 2007 et la recrudescence de l’insécurité dans le pays ont affecté les disponibilités et l’accessibilité des céréales et entraîné Le Réseau de Systèmes d’Alerte Précoce Contre la Famine
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une certaine hausse des prix de céréales. De plus, les productions complémentaires de contre saison sont restées en déça des espérances, par rapport aux previsions de la même campagne; ce qui a influencé le comportement des paysans producteurs et de commerçants détenteurs de stocks céréaliers pour plus de retenue dans la ventilation des stocks reconstitués avec les céréales pluviales. Les facteurs exogènes, tels les perturbations dans l’approvisionnement ayant conduit à une relative hausse de cinq pour cent du prix du carburant, la faible production agricole enregistrée dans la partie Nord du Nigeria, la forte demande des céréales occasionnée par le développement de l’aviculture, et surtout le contexte international caractérisé par une hausse du cours de céréales, sont autant des facteurs qui ont plaidé pour une hausse de prix inhabituelle des céréales. Cette hausse a affecté graduellement trois des quatre principaux marchés à partir du mois de décembre 2007, et la tendance s’est maintenue jusqu’en mars 2008. Pour cerner de manière plus précise cette hausse à travers les quatre principaux marchés céréaliers (N’Djamena, Moundou, Sarh et Abéché), FEWS NET a conduit l’analyse du prix de céréales. L’analyse comparative menée sur Graphique 1.
l’évolution du prix du mil penicillaire sur la période couvrant octobre 2007 à mars 2008 comparée à la moyenne du prix de Mil: P rix nominaux de de tail à N'D jame na
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la même denrée pour la même période 2002/03 ‐ 2006/07 A V E
des cinq années précédentes (2002/03‐
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2006/07) a permis de dégager les 2007/08
constats suivants: 230
Au marché de N’Djamena, la 180
comparaison du prix courant en février 130
2008 avec celui de la moyenne des cinq dernières années (2002/03‐2006/07) 80
dégage une augmentation de 12 pour cent (Graphique1). Toutefois, cette hausse du prix ne s’est pas maintenue et s’est infléchie vite à quatre pour cent en Source : SIM. Analyse: FEWS NET Tchad
mars 2008. En fait, l’attaque menée par les rebelles en début de février a Graphique 2.
suffisamment perturbé l’approvisionnement de la capitale et crée des demandes conjoncturelles Mil: P rix nominaux de detail à Abéc hé
additionnelles (stock de sécurité des 240
ménages) pour booster la hausse des prix 2002/03 ‐ 2006/07 A V E
220
en février. La faible production dans le 2004/05
200
Nord Nigeria ainsi que la situation 2007/08
180
alimentaire relativement difficile dans le 160
Nord Cameroun, augmentant la demande 140
sur l'approvisionnement alimentaire, 120
n’ont pas permis de jouer le rôle de 100
soupape de régulation traditionnelle vis‐
à‐vis de ce marché. Avec l’infiltration des 80
rebelles en début d’année et leur attaque sur la capitale en février, l’interruption de moyens de communications (voie Source : SIM. Analyse: FEWS NET Tchad
routière, téléphone) a momentanément déconnecté le marché de N’Djamena de ces marchés d’approvisionnement, ce qui a créé un déficit d’information à travers les marchés du pays et contribué en partie à la surenchère de cette céréale. Le Réseau de Systèmes d’Alerte Précoce Contre la Famine
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Graphique 3.
Mil: P rix nominaux de detail à Moundou
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Graphique 4.
S org ho: P rix nominaux de detail à Moundou
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Source : SIM. Analyse: FEWS NET Tchad
Graphique 5.
Mil: P rix nominaux de detail à S arh
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Au niveau du marché d’Abéché, cette tendance à la hausse du prix courant par rapport à la moyenne des prix nominaux des cinq dernières années a été enregistrée au premier trimestre 2008 (Graphique 2), de six pour cent pour le mois de janvier, un pour cent en février, et se située à quatre pour cent en mars. La forte pression démographique due à la concentration humaine (240 000 réfugiés soudanais, 180 000 déplacés internes tchadien) dans la zone, conjuguée aux autres facteurs exogènes et endogènes précédemment cités plus haut, concourent à une tension sur l’offre et contribueraient à une tendance à la hausse. La gamme d’insécurité (attaques rebelles, coupeurs de route), et les restrictions administratives sécuritaires (état d’urgence) ont souvent ralenti la fluidité des échanges, crée des distorsions entre offre et demande, et, par consequent, entretenu cette hausse de prix sur ce marché. Cependant, cette hausse est relativement faible comparée aux trois autres marchés, en raison des distributions alimentaires gratuites effectuées par les agences humanitaires et le gouvernement et dont souvent une partie non négligeable se retrouve monnayer sur le marché. Au niveau de Moundou, la hausse du prix courant du mil penicillaire par rapport à la moyenne des prix nominaux pour les cinq dernières années a été de 11 pour cent à partir du mois de février, augmentant à 14 pour cent en mars 2008. En plus des même facteurs externes et internes ayant affecté le prix de cette céréale de base, la zone de Moundou est confrontée aux effets collatéraux des réfugiés centrafricains et du séjour des chercheurs d’emploi, qui constitue une source de pression sur l’offre céréalière soutenant, ainsi, une tendance à la hausse (Graphique 3). L’analyse du prix du sorgho montre également au niveau du marché de Moundou, une tendance à la hausse du prix courant de sorgho par rapport à celui de la moyenne à partir de Mars 2008
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novembre 2007, et s’est maintenue au courant du premier trimestre 2008. En fait, cette hausse, qui a été amorcée avec la période de festivités rituelles traditionnelles (fêtes annuelles, mariages), se justifie par la forte consommation (culinaire, bière locale) en sorgho dans cette zone alors que l’offre est limitée dans la zone méridionale (Graphique 4). Au niveau du marché de Sarh, où peu de facteurs d’insécurité civile ont été signalés et dont la pression humaine est relativement faible, les prix du mil penicillaire courant mars 2007 à mars 2008 est resté durant toute cette période en déca de celui de la moyenne pour la même période retenue des cinq dernières années. Cette stabilité trouve aussi, entre autres justifications, l’effet modérateur de l’approvisionnement de proximité à partir du Salamat grenier céréalier du pays, surtout pour le sorgho de décrûe ou Berberé (Graphique 5). Par contre, au niveau des deux autres marchés (Moundou et Abéché), bien que l’effet induit de deux campagnes excédentaires (2005‐2006 et 2006‐2007) et le début d’une campagne 2007‐2008 aient conduit à une quasi‐stabilité voire une baisse de prix du mil penicillaire au courant de l’année 2007, une tendance à la hausse a été enregistrée dès la fin de cette année. Incidence de la tendance en hausse des prix des céréales sur les zones d’économie alimentaire Il se dégage de l’analyse sur les prix de céréales que les perspectives alimentaires pour les six prochains mois présagent une tendance à la hausse. Deux Zones d’Economie Alimentaire (ZEA) pourraient être particulièrement affectées par cette hausse: (1) la ZEA culture pluviale céréalière; et, (2) la ZEA culture de rente coton et arachide. Des difficultés alimentaires sont à redouter de manière relativement précoce pour les catégories des populations moyennes à pauvres dans ces deux zones, et pourraient être exacerbées avec l’installation de la soudure (avril à juin). Des stratégies de réponses plus ou moins sévères pourraient être envisagées pour les populations de ces zones à travers les profils de leurs économies alimentaires. Caractéristiques des zones d’économie alimentaires affectées et stratégies de survie (sources de nourriture, de revenue, et accès au marché): Figure 2. La ZEA culture pluviale céréalière
(1) La ZEA culture pluviale céréalière (ZEA 4): La région du Ouaddaï, (Ouaddaï)
dont le chef lieu Abéché abrite le principal marché céréalier sahélien après celui de la capitale, est une partie intégrante de la ZEA dépendante des céréales pluviales (Figure 2). En dépit des potentialités agricoles dont regorge cette zone, la production agricole Abeche
fluctue aux caprices des aléas climatiques et phytosanitaires, entre Adre
déficit et léger excédent. L’autoproduction de la plupart des ménages ne couvre qu’une partie de leurs besoins alimentaires annuels, ce qui les contraint selon leurs catégories sociales à s’adresser plus ou moins au marché pour assurer le complément de leurs besoins alimentaires. L'estimation des vulnérables dans le Ouaddai zone d'accueil des Am-Dam
réfugiés et des deplacés internes est de l'ordre de 560000 personnes. Goz-Beida
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Culture Puviale Cerialiare Source: FEWS NET Tchad
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Sources de Nourriture D’une manière générale, les ménages moyens et mieux lotis Figure 3. Sources de nourriture, ZEA 4
dans cette zone couvrent plus des trois quarts de leurs besoins annuels en nourriture par leur propre production 100%
paiem ent en nat.
soit avec leurs récoltes de céréales ou de leur bétail, et ils 80%
achat
achètent le restant (Figure 3). Les ménages pauvres, d’un 60%
prod. de cueil.
autre coté, couvrent moins de la moitié de leurs besoins annuels en nourriture de leur propre production et ils 40%
leur lait, viande,
beurre
dépendent très fortement du marché. 20%
propres récoltes
Même si l’excèdent potentiel en céréales réalisé dans la 0%
zone de culture de décrue (ZEA 3, y compris Salamat) Pauvres
Moyens
Mieux lotis
pourrait contribuer à atténuer la tendance actuelle du prix à la hausse, le contexte sécuritaire dans ces deux régions Source: FEWS NET Tchad
(conflit militaire, raquettes par des coupeurs de routes, etc.) n’est pas de nature à faciliter le transfert des céréales entre ces deux ZEA. Ainsi, les perspectives d’une hausse soutenue de prix avec l’approche de la soudure (avril en zone Soudanienne, juin en zone sahelienne) sont des plus probables. Ceci conduirait à des difficultés d’accès à la nourriture, en particulier pour la catégorie des ménages pauvres dont les réserves alimentaires sont généralement épuisées avec l’approche de soudure alors que le prix est des plus élevés dans l’année. Le degré plus ou moins élevé de la précarité alimentaire de ces ménages est tributaire des stratégies de réponses traditionnellement pratiquées par ces derniers et de l’environnement économique qu’offre le pays pour une diversification des sources de revenus. Sources de Revenus La source de revenus la plus importante pour les Figure 4. Sources de revenus, ZEA 4
ménages pauvres est de travailler dans les champs 100%
des mieux lotis et en ville. En dépit de la faiblesse petit commerce
de leur production céréalière, des prélèvements y 80%
emploi
sont effectués pour subvenir à d’autres besoins 60%
vente prod. de
essentiels. La diversification des sources de revenus cueillette
affectés aux achats alimentaires complémentaires 40%
ventes lait, beurre
est généralement assurée par la prestation de ventes du bétail
20%
service de la main d’œuvre pour les activités agricoles ou dans les grands centres urbains 0%
notamment la capitale (Figure 4). La période Pauvres
Moyens
Mieux lotis
propice de la migration temporaire vers la capitale pour la recherche d’emploi (décembre‐mars) a été Source: FEWS NET Tchad
exceptionnellement perturbée cette année par les actes d’insécurité ayant touché à la fois la zone, mais aussi la capitale pourvoyeuse d’emploi. Ceci affecte sérieusement leur pouvoir d’achat, et pourrait les exposer à une précarité alimentaire avancée en période de soudure. Cette situation est d’autant plus préoccupante que la zone héberge quelques 240 000 réfugiés et prés de 180 000 déplacés internes, que le conflit dans l’Ouest du Soudan continue de drainer des nouveaux réfugiés, et que faute d’un accord politique entre gouvernement tchadien et les groupes rebelles, la confrontation armée entre ces belligérants reste de plus probable. Accès au Marché Les principaux marchés d’échanges vivriers auxquels est ouverte traditionnellement la zone sont les marchés d’Abéché, Biltine, Bir Tawil, Abdi et Goz Beida à l’échelle locale; tandis que les marchés transfrontaliers concernent principalement l’Ouest du Soudan et la Libye. La zone produit aussi des légumes, spécialement les oignons et l’ail, qui sont achetés systématiquement aux marchés locaux par des intermédiaires pour approvisionner les grands centres de consommation du pays. Depuis la dévaluation du franc CFA en 1994, la filière oignon et ail est devenue compétitive dans la sous région et une grande partie de ces deux produits est destinée pour l’exportation au Congo, en République centrafricaine et à un degré Le Réseau de Systèmes d’Alerte Précoce Contre la Famine
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moindre au Gabon et en RDC. Le revenu issu de ces produits vient généralement en complément d’appoint aux achats des céréales. Les populations de cette zone étant des agro pasteurs, le bétail contribue pour une part non négligeable dans la reconstitution des réserves céréalières. En dépit de ces opportunités dont dispose cette zone d’économie alimentaire, et qui laissent supposer des difficultés moindres d’accès à la nourriture, le contexte sécuritaire très volatile dans cette zone constitue une contrainte majeure à l’accessibilité alimentaire, et un suivi de proximité de cette zone s’averre nécessaire. En terme de pouvoir d’achat, les ménages pauvres tirent leurs sources de revenus en monnayant leur main‐d’œuvre dans les champs des mieux lotis ou en ville. Néanmoins, l’offre excessive de la main d’œuvre agricole fournie par les réfugiés et déplacés tchadiens dans la zone affaiblit considérablement sa valeur marchande, tandis que la morosité économique qui guette actuellement le pays n’offre pas l’assurance d’un travail urbain rémunérateur. Ces possibilités limitées d’accès aux revenus, confrontées à une cherté croissante des denrées alimentaires, altèrent considérablement le pouvoir d’achat des ménages vulnérables, ce qui réduit leur accessibilité alimentaire à travers le marché. Stratégies de Réponses D’une manière générale, les stratégies adoptées par les ménages pauvres dans cette zone d’économie alimentaire évoluent dans le temps et prennent des formes adaptatives diverses au fur et à mesure que l’on se rapproche de la période de soudure. Le maraîchage de contre saison et la cueillette des produits sylvo pastoraux sont des stratégies préliminaires classiques. Le départ des membres actifs des ménages à la recherche d’emploi dans les grands centres et la vente des petits ruminants constituent une étape intermédiaire d’adaptation. Les stratégies sévères intègrent, entre autres, la réduction de prise/qualité de repas/jour, la liquidation progressive du capital productif et de prestige, et l’exode temporaire ou définitif des ménages entiers vers les zones plus nanties en vivres (Salamat). (2) La ZEA culture de rente coton et arachide (ZEA 1): Moundou, Figure 5. La ZEA culture de rente coton et
chef du Logone Occidental, constitue également le pole arachide (Logone-Occidental) économique par excellence du pays, mais aussi un important marché céréalier par sa consommation (Figure 5). La récolte du coton (janvier à mars), dont l’approvisionnement en intrants et la vente sont assurés par la société cotonnière Coton Tchad, s’est Benoye
longtemps développée au détriment des cultures vivrières et a Beinamar
constitué la principale source de revenus monétaires dans cette Moundou
zone. La récolte des vivriers autoproduits par les ménages pauvres est nettement en déca de leurs besoins alimentaires annuels, ce qui les astreint à recourir à une diversification des sources de revenus, mais aussi alimentaire, pour assurer leur survie. Les perspectives alimentaires de ces ménages sont préoccupantes car une hausse 0
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anormale du prix des céréales (mil et sorgho) est actuellement observée sur le marché. En outre, le maintien de cette tendance à la hausse est à redouter avec la soudure, car la zone a enregistré de Kilometers
déficits céréaliers consécutifs pendant les dernières campagnes agricoles. Source: FEWS NET Tchad
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Sources de Nourriture Au niveau de cette ZEA, les principales sources de nourriture Figure 6. Sources de nourriture, ZEA 1
proviennent pour plus de la moitié des besoins alimentaires pêche/chasse
annuels à partir de la production agricole des ménages. Les 100%
80%
ménages pauvres couvrant moins de 60 pour cent de leur besoin prod. de cueill.
60%
à partir de cette production font recours aux produits de 40%
cueillettes, de la pêche, et de la chasse pour diversifier leur lait/viande
20%
source de nourriture, et sont dépendants du marché pour plus 0%
achat
de 20 pour cent afin d’assurer leur complément en nourriture. Pauvres
Moyens
Mieux
L’actuelle hausse constatée sur le mil et le sorgho est de nature à lotis
propres récoltes
limiter les possibilités d’approvisionnement de ces ménages à Source: FEWS NET Tchad partir du marché (Figure 6). Des stratégies de diversification de revenus extra exploitation s’averrent nécessaire afin que ces ménages parviennent à atténuer les difficultés liées à la période de soudure. Sources de Revenus Pour subvenir à leurs besoins essentiels, les ménages Figure 7. Sources de revenus, ZEA 1
pauvres minimisent les risques en diversifiant les 100%
sources de revenus. La vente de produit de rente vente prod. cueill.
(e.g., coton, arachide) constitue la principale source 80%
de revenu (Figure 7). En fait, si le prix relativement travail
rémunérateur de l’arachide en cette période (due à la 60%
petit com m erce
forte demande du Nigeria) permet des plus values pouvant compenser en partie la hausse du sorgho, le 40%
vente de prod. bétail
prix du coton reste relativement faible et la lenteur 20%
de paiement contraint certains ménages pauvres à vente des céreales
brader leurs récoltes de coton à bas prix pour se 0%
vente des cultures
procurer de la liquidité. La prestation de la force de Pauvres
Moyen
Mieux
loti
travail dans les exploitations agricoles des mieux lotis ou en milieu urbain, la vente des produits de Source : FEWS NET Tchad cueillettes (e.g., beurre de karité, grain de Neré), tout comme le petit commerce, constituent d’autres sources de revenus auxquels les ménages pauvres recourent pour subvenir à leurs besoins. Accès au Marché Les principales cultures de rentes commercialisées dans cette ZEA sont le coton et l’arachide, et dans une moindre mesure le riz. Le coton était principalement vendu aux points de ventes. Toutefois, la proximité du Cameroun, et parfois le prix relativement rémunérateur proposé à la frontière avec ce pays, fait qu’une partie de la production échappe au circuit mis en place par la Coton Tchad. Les principaux marchés de ventes des arachides et des achats de céréales sont ceux de Pont Carol et de Fianga, une partie non négligeable de l’arachide vendue dans ces marchés est orientée vers l’exportation à destination du Cameroun et le Nigeria. Les revenus dégagés par les ventes des produits tels que le coton et l’arachide interviennent en grande partie dans l’achat des céréales complémentaires. Stratégies de réponses La situation de hausse actuelle du prix des céréales dans cette ZEA déficitaire en produits céréaliers pourrait conduire à des difficultés d’accès à la nourriture, surtout avec l’installation de la saison pluvieuse (avril à mai) où les besoins alimentaires nécessaires pour assurer les travaux s’accroissent. Pour pallier aux difficultés de la soudure, les ménages pauvres pratiquent diverses stratégies plus ou moins sévères. Ces stratégies comprennent: • L’installation des variétés culturales précoce (maïs, arachide, sorgho); Le Réseau de Systèmes d’Alerte Précoce Contre la Famine
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Guetter les opportunités potentielles de travail sur les petites usines de transformations et les services créés autour de la zone pétrolifère; Fabrication de charbon de bois; Vente de petits et de gros bétail (animaux de trait); Emprunt auprès des usuriers à des taux très élevés (50‐75 pour cent) ; et/ou Vente des ustensiles de cuisine. Cette situation conduit souvent à une mauvaise conduite de la campagne agricole et pourrait en cas d’usage de stratégie sévère (décapitalisation des moyens de production) compromettre la reproductibilité du système de production de ces ménages. Le suivi de la situation alimentaire de cette catégorie de ménage est nécessaire pour cerner un appui adapté et en temps opportun. V – Stratégies et planifications de réponses du Gouvernement et ses partenaires au développement Pour atténuer l’impact de l’actuelle hausse des prix et ses conséquences ultérieures prévisibles avec la période de soudure, les stratégies de réponses ci‐ après sont planifiées pour le court, moyen et long termes: • Une assistance alimentaire régulière par le PAM à travers une ration de plus 1770 Kcal/ personne/ jour aux 240000 réfugiés soudanais et près de 180000 déplacés internes à L’est du Tchad, et des rations ponctuelles de protection de semences élargies aux populations hôtes; • La mobilisation du stock stratégique de Sécurité alimentaire par le Gouvernement et ses partenaires pour la vente subventionnée au profit des personnes vulnérables pendant la période de soudure. • Le renforcement de capacité de production aux producteurs vulnérables à travers la dotation en semences maraîchères, outils agricoles et produits phytosanitaires, par la FAO; et • Des actions ponctuelles (dotation en semences pluviales) aux producteurs vulnérables dans le cadre du Programme National de Sécurité Alimentaire (PNSA).
VI – Conclusion et recommandations Compte tenu des implications de la hausse des prix observée sur les marchés de N’Djamena, Sarh, Moundou, et Abéché, les recommandations suivantes sont proposées: • Face à la hausse actuelle soutenue des prix pouvant être exacerbée avec la période de soudure, le suivi rapproché et plus specifique de la situation alimentaire, ciblant les ménages vulnérables urbains et ruraux des zones à risques, s’impose; • Le niveau du stock National de sécurité alimentaire actuel est très faible pour pouvoir répondre à une éventuelle crise alimentaire en période de soudure. Rehausser le stock à son optimum strategique de 35000 tonnes est salutaire pour pouvoir atténuer les effets d’une crise alimentaire; et • Les ménages pauvres à moyens des zones structurellement déficitaires, et ceux des poches victimes des aléas climatiques et des attaques des enemies des cultures ont récoltés des faibles réserves alimentaires qui sont quasiment épuisées. L’organisation d’une vente subventionnée ciblée en période de soudure au profit de ces ménages et la dotation en semences aux agriculteurs constituent un facteur de stabilité pour ces derniers. Le Réseau de Systèmes d’Alerte Précoce Contre la Famine
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