Uruguay 2

Transcription

Uruguay 2
Yémanja, déesse de la mer
Séjour en Uruguay
Bonjour,
Je veux partager avec vous une expérience assez inusitée, vécue il y a
quelques jours. Je vous ramène au bord de la mer, oui, mais cette fois,
bien différemment.
Mario, mon locateur, passe par l’appartement pour me saluer et s’enquérir
du même coup si je suis intéressée à aller voir le « Yemanja ».
- Le quoi lui dis-je?
- Yemanja est le nom de la déesse de la mer et sa fête se célèbre le 2
février, donc aujourd’hui. L’événement n’a lieu que ce jour, ni
demain ni encore pendant trois jours. Si tu le désires, je te prends
dans 30 minutes et nous irons à pied.
- Allons-y lui dis-je. Je ne veux pas manquer cela.
Après tout, je suis là pour voir tout ce qu’il y a de pittoresque en Uruguay
non? Mais auparavant, sur les recommandations de Mario, je dois me
vêtir tout de blanc, rien d’autre. Aussi, je décide de porter mes babouches
afin de pouvoir marcher à mon aise dans le sable et même dans l’eau.
Trente minutes plus tard, Mario bien ponctuel, m’attend au bas de
l’escalier. Je suis prête. Dans la rue, il y a un courant de personnes allant
toutes dans le même sens. La cérémonie a lieu à la plage Ramirez, sur
l’Atlantique, tout près du gîte.
- Attention dit Mario, il y a beaucoup de monde et il te faudra
surveiller tes affaires.
Je n’ai avec moi que mon appareil photo que je cache sous un chandail ….
blanc. Ce sera peut-être frais au bord de l’eau en soirée, ai-je pensé. Mais
pas du tout, aucun frisson. La chaleur des vents du large flotte autour de
la peau. Un simple T-shirt suffit.
La cérémonie (désolée un peu embrouillé e la photo). Il n’est pas facile de
se frayer un chemin dans la foule.
Mario m’explique que tous les ans, sur la plage Ramirez, les adeptes du
«Candoble» (musique typique de carnaval, à la fois uruguayenne et
noire), viennent rendre hommage à la déesse de la mer. Ces exaltés
convaincus, étant reliés à une religion originaire d’Afrique transmise au
Brésil par la venue des esclaves des siècles passés, déposent des offrandes
(fleurs, fruits frais, bijoux de pacotilles, images, demandes spéciales,
statuettes) dans de petites barques fabriquées, peintes, souvent ornées de
dentelle qu’ils déposeront plus tard sur l'eau en avançant le plus loin
possible. L’Uruguay étant tout près du Brésil, la tradition a traversé la
frontière.
L’événement, un spectacle spirituel ou mystique, débute en fin d’aprèsmidi et se prolonge jusqu’aux petites heures du matin. Nous arrivons sur
les lieux vers 21h30. En prévision d’une noirceur prochaine, les participants
creusent des trous profonds dans le sable et y déposent des bougies qu'ils
allument le moment venu. Nous sommes au bord de la mer et il y a une
brise. A voir ces trous partout, on dirait des pièges.. Il faut faire attention
où on met les pieds.
Nous entrons dans un monde de vaudou, de transes, de prières,
d’incantations. Les initiés rendant hommage à Yemanja, passent la
journée à tourner sur eux-mêmes, au rythme des tambours, accédant à un
état d’esprit qui nous est inconnu. Avant de mettre leurs barquettes à
l’eau, des rassemblements ont lieu sur la plage, où on prêche, on demande
pardon, on absout !! Le bord de la mer est couvert de fleurs fraîches et de
décorations diverses.
En attendant le signal donné
Différentes offrandes
Parallèlement et ironiquement, de l’autre côté de la rue face à la plage,
des mouvements catholiques ou autres, anti vaudous, hurlent, tentent de
convaincre, distribuent énergiquement des circulaires arguant que ce ne
sont que des fadaises, de ne pas s’y laisser prendre.
Je regarde Mario en souriant, un peu éberluée et je prends des photos. Je
crois rêver. L’ambiance est bien particulière. Mario reste là, tout près de
moi, m’attend et m’explique. Il est un « caballero » (gentleman).
Lorsque le soleil se couche, le moment est venu de déposer sur l’eau les
embarcations de toutes sortes et de les pousser vers le large. Le rituel
s’accomplit, au sein de différents groupes, en processions solennelles. Les
fidèles, selon leur état, s’avancent loin dans la mer, dont le fond est peu
profond, restent les pieds dans l’eau à regarder leurs présents disparaître.
L’effet est plutôt féérique, touchant même car les petites barques
illuminées de bougies, recouvrent les abords de lueurs… malicieuses,
ésotériques? Qui sait.
Mario et moi reprenons le chemin de la maison. Il y a de l’exaltation dans
l’atmosphère. Je me demande bien dans quel état la ville retrouvera sa
plage demain !!!!! Mais une fois l’an n’est pas coutume et puis cela attire
tellement de gens. Je n’étais pas la seule touriste sur les lieux.
Je me couche ce soir-là, un peu moins ignorante qu’hier. L’important c’est
d’apprendre un peu plus chaque jour. Voilà une autre expérience de
voyage vécue.
Christiane
Fin