un Rendement au pluRiel

Transcription

un Rendement au pluRiel
fin a nce / oblig atio n s
Un rendement au pluriel
Entretien avec Mario Geniale ,
CIO, Banque CIC Suisse
Sur les emprunts en francs suisses, le moindre
« s » peut faire la différence. Telle est la thèse
défendue par le « High Yields CHF Primus » qui
va chercher la performance à la frontière de
l’investissable.
Il est généralement admis que la dénomination de « high yield » ou haut
rendement s’applique aux obligations dont la notation est inférieure à BBB-.
Or, le nouveau « high yields » de la Banque CIC (Suisse) SA se concentre sur
le segment BBB. Il s’agit donc de l’univers investissable. Comment expliquer
cette apparente contradiction ? « Au travers de la dénomination « high yields »,
c’est-à-dire rendement mis au pluriel, nous avons voulu rendre l’investisseur
attentif au fait que le but du fonds était d’aller chercher davantage de rendement que ne le permettent les fonds limités aux débiteurs de qualité (ndlr :
ils restent souvent majoritairement exposés aux meilleures notations AAA
jusqu’à A-, alors que les meilleurs émetteurs du Primus CHF, de qualité A
et A-, ne représentent que 13 % de ses actifs), explique Mario Geniale, CIO
de la banque et gérant du fonds. Encore très étroit il y a quelques années, le
segment des obligations BBB a plus que doublé et son volume actuel est de
l’ordre des 45 milliards; les entreprises ont en effet profité de la faiblesse des
taux pour emprunter à bon compte. Les gérants bénéficient donc aujourd’hui
d’un marché plus liquide et d’une palette de quelque 170 émissions de taille
raisonnable (en moyenne 150 à 200 millions de francs). Reste à choisir celles
de débiteurs peu susceptibles de réserver de mauvaises surprises et donc de
chutes marquées des cours de leurs obligations. C’est précisément la raison
pour laquelle les deux gérants du fonds s’appuient sur la longue expérience
(24 ans) de leur analyste débiteurs.
La diversification est également un autre moyen de limiter le risque. Mais
peut-on parler de diversification lorsqu’on constate que près de 70 % des
émetteurs sélectionnés viennent du secteur bancaire ? Comme l’explique
Mario Geniale : « Certains émetteurs, quoique classés dans ce secteur, n’en
dépendent pas directement. Je pense par exemple à Peugeot, Gazprom,
Holcim ou Renault (ndlr : en novembre dernier, Fiat Finance & Trade Ltd a
émis un emprunt de 450 millions de francs offrant un coupon de 4 %. Bien
que classé « finance » au niveau de la répartition sectorielle du fonds, il ne
représente pas un risque bancaire mais bien un risque automobile). Ainsi
le fonds présente-t-il, en réalité, une exposition sectorielle assez similaire
à celle du marché suisse. Cela dit, le secteur financier peut être surpondéré
temporairement dans la mesure où les obligations du secteur offrent un
écart de rendement très intéressant, ce qui a été le cas en 2013 ». Au chapitre
des risques, la duration n’est pas des moindres, d’autant plus que la hausse
des taux sur le marché suisse pourrait intervenir en 2014 déjà. Affichant
une duration de 4,1, le « High Yields Primus CHF » paraît très exposé. Mais,
comme l’explique Mario Geniale : « nous gérons activement la duration et
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Mario Geniale
pouvons la modifier rapidement au travers d’instruments dérivés. Mais il s’agit essentiellement
de mouvements tactiques qui nous servent soit à
couvrir temporairement le risque de taux, soit à
profiter d’évolutions des taux favorables à court
terme ». Le but n’est donc pas de prendre des paris
marqués quant à l’évolution des taux, par exemple,
en allant jusqu’à une duration négative. Corollaire de cette approche, en cas de baisse marquée
du marché, le fonds ne pourra, au mieux, que
l’atténuer. Petit défaut de la stratégie proposée : le
montant des frais imputés au fonds, à savoir 1 %
de frais de gestion et 0,45 % de frais courants ! C’est
malheureusement le prix à payer pour espérer
faire mieux que les emprunts traditionnels en
francs suisses, un prix qui ne rebute apparemment pas les investisseurs. Malgré une année
exceptionnellement difficile pour les véhicules
obligataires et un historique de performance
d’une année seulement, le fonds avoisine les 50
millions d’actifs et son gérant table sur un doublement de ses avoirs d’ici la fin 2014. \