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Les Cahiers L’ILEC de Comment internaliser l’empreinte CO2 des produits ? Rapport du groupe d’élèves de l'Ecole nationale du génie rural, des eaux et des forêts (Engref) Préface de Jean-François Molle N° 2/08 – Juin 2008 Préface Au cours de l’été 2007, il est apparu que la question des émissions de CO2 liées aux activités économiques serait au cœur des travaux du « Grenelle de l’environnement ». Les industriels de la grande consommation sont concernés à un double titre. – L’information du consommateur relative au « contenu CO2 » des produits qu’il achète. Doitelle figurer sur l’étiquette, et si oui, comment ? L’initiative d’étiquetage de Casino, largement médiatisée début octobre (en plein « Grenelle »), a montré l’actualité de la question. – « L’internalisation »* de ce « contenu CO2 ». La fiscalité, sous forme de taxe CO2 par exemple, est-elle ou pas l’outil le mieux adapté en la matière ? Or il est apparu que ces questions semblaient être moins maîtrisées par les membres de l’Ilec que celles relatives, par exemple, aux emballages. Il ne s’agit pourtant pas d’un enjeu pour les seuls secteurs de l’industrie lourde ou des transports. L’idée est donc venue de proposer à des élèves d’une grande école traitant des questions environnementales, l’Engref (Ecole nationale du génie rural, des eaux et des forêts), un stage de trois mois visant à faire le bilan des initiatives internationales concernant l’information du consommateur et l’internalisation du CO2). Le contenu de ce travail apporte les éclairages attendus, même si la complexité des questions posées ne permet pas de conclure, évidemment, en un temps si court sur des sujets qui sont encore d’actualité, voire l’objet de polémiques entre experts. Il nous conforte dans notre analyse quant aux informations environnementales : elles sont trop complexes pour être résumées, sans être dénaturées, sur l’espace restreint de nos étiquettes : oui à l’information environnementale du consommateur, mais pas obligatoirement sur les étiquettes ! Quant à l’internalisation du « contenu CO2 », ce travail ne se prononce pas en faveur de l’une ou l’autre des deux options fondamentales : taxer « en amont » sur les grands vecteurs énergétiques (tout le monde paie, mais les problèmes de comptabilité aux frontières, si la démarche n’est que nationale, sont très complexes), ou « en aval », sur les produits mis en marché (complexité de l’évaluation et de la collecte du prélèvement). Il a cependant permis de fixer les éléments des différentes options. On pourrait être rassuré, à bon compte, par ce constat : nous sommes tellement loin d’un consensus (méthode de calcul, périmètre des émissions prises en compte, point d’application et montant d’une éventuelle taxation, contribution sous une forme différente d’une taxe…) que la question de la mise en œuvre concrète de réglementations ou de taxes est bien lointaine. Mais de toute façon, les débats sont vifs, la présidence française de l’Union européenne devrait le confirmer, puisque ce point figure dans son programme. Un autre résultat non négligeable de ce travail : les élèves, hormis leur collègue chinoise, sont tous de futurs fonctionnaires, éventuellement du Meeddat (ministère de l’Écologie, de l’Énergie, du Développement durable et de l’Aménagement du territoire). Ils ont pu mesurer la complexité de la mise en œuvre de projets de décisions politiques apparemment simples… Ils ont pu aussi se rendre compte que les industriels de la grande consommation prenaient ces questions très au sérieux et les abordaient de façon approfondie. Jean-François Molle * « L’internalisation des externalités environnementales » (sic) appartient au jargon du secteur et correspond à une démarche économique précise : le coût environnemental d’une activité est évalué et intégré au prix de celle-ci. Ainsi, dans le prix de vente du produit emballé, le coût du Point vert d’Eco-Emballages est intégré (« internalisé »), alors qu’auparavant « l’externalité environnementale » que représente le coût de gestion des déchets d’emballages (en pratique leur collecte et leur tri) n’était pas prise en compte dans le prix payé par le consommateur. Martin COHEN, Vanina FORGET, Robert SCHOEN, Chen ZHANG Rapport de Travail en Groupe d’Elèves – février 2008 Comment internaliser l’empreinte CO2 des produits ? Tuteur ENGREF : Renaud CRASSOUS Commanditaire : Jean-François MOLLE Préambule La présente étude a été commandée en novembre 2007 par JFM Conseil, qui travaille pour le compte de l’ILEC (Institut de liaisons et d'études des industries de consommation). L’ILEC, créé en 1959, est une association qui réunit 84 groupes, parmi les plus importants, qui commercialisent des produits de marque dans tous les grands secteurs de la production alimentaire et non alimentaire. Dans le cadre du Grenelle de l’environnement, l’ILEC a défendu l’idée d’une éco-contribution universelle, à l’image de la « responsabilité élargie des producteurs » (REP), développée pour la mise en place d’éco-emballages ou du système des redevances des Agences de l’eau. Les avantages de la REP, mis en avant par l’ILEC, sont : - la possibilité d’utiliser les ressources collectées directement pour l’amélioration de l’environnement (au lieu de les diluer dans le budget général dans le cas de la taxe) ; une meilleure qualité de gestion du dispositif par les opérateurs propres du marché ; d’éviter une discrimination entre modes de production, la responsabilité étant laissée au producteur et donc une meilleure efficacité. Avertissement au lecteur Les données fournies dans le présent rapport sont à considérer comme indicatives compte tenu du manque d’information sur les méthodes de calculs de certaines d’entre elles. De même, les positions des différents acteurs, qu’elles soient émises par des personnes rencontrées dans le cadre du présent travail ou qu’elles aient été recueillies indirectement, ne sont pas des positions officielles et ne traduisent que la perception que nous en avons à partir de données partielles. Nous tenons d’ailleurs à remercier toutes les personnes qui nous ont consacré du temps pour répondre à nos questions ou qui nous ont aidé de quelque façon que ce soit au cours de cette étude. 2 Sommaire INTRODUCTION .................................................................................................................................................. 4 I. CONTEXTE................................................................................................................................................... 5 I.1. I.2. I.3. I.4. II. EMISSIONS A L ECHELLE MONDIALE ........................................................................................................ 5 EMISSIONS EUROPEENNES ET FRANÇAISES DUES A L'ENERGIE............................................................. 7 PART DES EMISSIONS DUES AUX PRODUITS DE CONSOMMATION EN FRANCE ....................................... 8 QUELQUES ELEMENTS DE COMPARAISON .............................................................................................. 9 THEORIES ET EXEMPLES D’INFORMATION ET D’« INTERNALISATION » .......................... 10 II.1. BILANS CARBONE ET MESURES D’IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX ....................................................... 10 II.1.a. Définition de l’empreinte carbone ............................................................................................... 10 II.1.b. Analyse de cycle de vie par processus........................................................................................... 10 II.1.c. Méthode input/output .................................................................................................................... 11 II.1.d. Méthode hybride............................................................................................................................ 11 II.1.e. Exemples de bilans carbone existants ........................................................................................... 12 II.2. INFORMATION ENVIRONNEMENTALE AU CONSOMMATEUR ................................................................... 14 II.2.a. Les Ecolabels ................................................................................................................................ 14 II.2.b. Les Autodéclarations..................................................................................................................... 15 II.2.c. Les Ecoprofils................................................................................................................................ 16 II.3. INTERNALISATIONS DE L’EMPREINTE CO2 : .......................................................................................... 18 II.3.a. La taxe carbone sur l’énergie (taxe amont) .................................................................................. 18 II.3.b. Les quotas d'émissions, ou permis de carbone.............................................................................. 21 II.3.c. La taxe ou mécanisme d’ajustement aux frontière ........................................................................ 22 II.3.d. Le bonus / malus écologique ......................................................................................................... 23 II.3.e. La modulation de TVA ou « TVA verte »....................................................................................... 24 III. PROJETS ET JEUX D’ACTEURS RELATIFS A L’EMPREINTE CO2 ......................................... 26 III.1. AU NIVEAU DES INSTITUTIONS INTERNATIONALES (OMC…) ........................................................... 26 III.2. L’UNION EUROPEENNE ET LES AUTRES ETATS MEMBRES ............................................................... 26 III.2.a. Le parlement européen.................................................................................................................. 26 III.2.b. La commission européenne (DG ENV) ......................................................................................... 27 III.2.c. L’Etat au Royaume-Uni ................................................................................................................ 29 III.3. L’ETAT FRANÇAIS ET SES ETABLISSEMENTS PUBLICS ...................................................................... 30 III.3.a. Le gouvernement et le Grenelle de l’environnement..................................................................... 30 III.3.b. Les administrations de l’Etat français .......................................................................................... 30 III.3.c. Discours commun Sarkozy Brown (TVA verte) ............................................................................. 31 III.3.d. Position de l’ADEME.................................................................................................................... 31 III.4. LA GRANDE DISTRIBUTION ................................................................................................................ 32 III.4.a. Casino ........................................................................................................................................... 32 III.4.b. La FCD ......................................................................................................................................... 34 III.4.c. Tesco ............................................................................................................................................. 35 III.4.d. BRC ............................................................................................................................................... 35 III.4.e. MIGROS et Walmart ..................................................................................................................... 35 III.5. LES ONG .......................................................................................................................................... 36 III.5.a. Position du WWF .......................................................................................................................... 36 III.5.b. Position de la Fondation Nicolas Hulot........................................................................................ 36 IV. NOTRE ANALYSE DES DEMARCHES PREVISIBLES ET SOUHAITABLES........................... 38 IV.1. IV.2. IV.3. PERSPECTIVES EN MATIERE D’INFORMATION ENVIRONNEMENTALE ................................................ 38 NOTRE « MINI-SONDAGE » SUR L’ETIQUETAGE ENVIRONNEMENTAL (CASINO) ............................... 39 PERSPECTIVES EN MATIERE D’INTERNALISATION ............................................................................. 43 CONCLUSION.................................................................................................................................................... 46 RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES .......................................................................................................... 47 ANNEXES ........................................................................................................................................................... 49 3 Introduction Le présent rapport a été effectué dans le cadre de l’exercice TGE (Travail en Groupe d’Elèves) en réponse à une commande de JFM Conseil, pour le compte de l’ILEC. Ces travaux, réalisés par des groupes de trois à quatre ingénieurs-élèves au cours de la première année de l’ENGREF, consistent en un travail d’enquête auprès de spécialistes, une phase de recherche d’information puis un temps d’analyse et de synthèse qui doivent conduire à un diagnostic et des propositions opérationnelles. Notre étude s’intitule : « Comment internaliser « l’empreinte CO2 » des produits ? ». Nous avons cherché à y répondre en quatre étapes. La première partie du rapport présente les grands enjeux de la problématique du changement climatique et du rôle que peuvent jouer les industriels des produits de grande consommation dans la réduction des émissions des gaz à effet de serre (GES). En deuxième partie, nous avons fait la synthèse de l’état de l’art en matière de mesure des émissions de GES par site ou par produit, puis présenté les théories et les outils existants relatifs à l’information environnementale et carbone des produits de grande consommation, et enfin analysé les méthodes d’internalisation du coût de l’empreinte CO2 des produits. La troisième partie propose une analyse de l’état actuel des enjeux et stratégies des différents acteurs, aux échelles internationale, européenne et nationale. En dernier lieu, nous nous sommes efforcés de tracer des perspectives sur l’évolution probable des démarches déjà engagées et de donner quelques éléments de prospective. Des propositions sont formulées pour soutenir des démarches cohérentes et efficaces dans ce contexte. Notre démarche Pour établir ce rapport, nous avons recherché et synthétisé l'information disponible sur le sujet, sous forme notamment d’articles scientifiques, de publications officielles et de coupures de presse. Nous avons également rencontré des experts, des acteurs et des institutions concernés par la question, ce qui nous a permis de mieux cerner le sujet, et de prendre la mesure de son actualité. La liste complète des personnes qui nous ont aidés est présentée en Annexe 1. La confrontation des différents témoignages et de l'étude bibliographique nous a permis d'évaluer les perspectives de l'internalisation de l'empreinte CO2 et d'écrire cette synthèse. 4 I. CONTEXTE L’objectif sous-jacent de la présente étude est de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) dues aux produits de grande consommation. Avant d’étudier dans le détail les enjeux de ce secteur, il est impératif de situer le thème de notre étude dans le contexte global du réchauffement climatique : quelles sont les quantités globales de GES émises dans le monde ? Quelle est la part due aux produits de grande consommation ? Combien « coûte » le réchauffement climatique ? Combien coûtent les actions préventives ? Quel est le niveau de réduction des émissions qu’il faut atteindre ? Avertissements : - Nous donnons ici quelques ordres de grandeur, ce sont des chiffres approximatifs mais ils permettent de mieux appréhender les réels enjeux en donnant une signification à des chiffres qui resteraient abstraits hors contexte. - 23% des émissions actuelles de GES ne sont pas du CO2, essentiellement du méthane (CH4) et de nombreuses études ne prennent en compte que le CO2, sans que ce soit toujours explicite. - les données sont fournies en GtCO2 avec ou sans « puits de carbone », sans que ce soit toujours explicite, ce qui change de manière significative les valeurs. Les émissions de CO2 sont données par la suite en équivalents CO2 en milliards de tonnes ou grammes (GtCO2 – eq ou gCO2 – eq). Cela signifie que les chiffres cités incluent parfois des GES autres que le CO2, mais que leur capacité de contribution au réchauffement du climat est convertie en valeur équivalente à celle du CO2. I.1. Emissions à l échelle mondiale (13) Les émissions anthropiques annuelles de GES dans le monde ont été évaluées à 49 GtCO2 en 2005, dont 75 % sont réellement des émissions de CO2, le reste étant principalement du méthane (CH4, 15 %) et du dioxyde d’azote (N2O, 8%). Le secteur de l'énergie est le plus gros contributeur mondial avec plus du quart des émissions, suivi par l'industrie et la modification des sols (utilisation des terres, déforestation) avec respectivement 19 et 17 % des émissions. Si l'on inclut dans l'énergie les transports, le chauffage et l'utilisation de l'énergie dans l'industrie, ce sont 27 GtCO2 des 49 GtCO2 qui sont dues à l’énergie au sens large (production et utilisation). 5 Fig : Extrait du Contribution of Working Group III to the Fourth Assessment Report of the Intergovernmental Panel on Climate Change Selon le rapport Stern (2006), le coût mondial global des dommages que pourraient provoquer des émissions non contrôlées à l’horizon 2050 sur nos économies serait , en régime permanent, compris entre 5% et 20 % du PIB mondial. Ce coût représente ce que les économistes appellent la valeur sociale du carbone, qui correspond au coût du dommage marginal. En d’autres termes, une tonne de carbone supplémentaire produite provoquerait une perte de PIB comprise entre 30 et 120 euros. Pour information, ces valeurs peuvent être comparées avec les suivantes : - le rapport Boiteux II (2001) évaluait le coût de l’externalité CO2-transport à 27 €/tCO2. Le Centre d’analyse stratégique (CAS) a lancé le 11 décembre 2007 un appel d’offres pour une étude d’actualisation des valeurs de référence de la tonne de Carbone qui sont aujourd’hui utilisées dans les évaluations des projets d’investissement de transports ; - le cours actuel de la tCO2 sur le marché à terme européen est d’environ 20 €/t. 6 Fig : Extrait du Contribution of Working Group III to the Fourth Assessment Report of the Intergovernmental Panel on Climate Change I.2. Emissions européennes et françaises dues à l'énergie (13) L'Union Européenne à 27 membres émet chaque année plus de 4 GtCO2 pour le seul secteur de l'énergie au sens large. Parmi ces 4 GtCO2, la France est responsable de 0,4 GtCO2 (soit 400 MtCO2) avec une proportion moindre due à la production d'énergie en raison de la forte nucléarisation de son « mix » énergétique. 7 Emissions annuelles de GES par secteur 1,6 1,4 GtCO2 1,2 1 0,8 0,6 0,4 0,2 0 Transports (dont 93% route) Production électricité et chaleur Résidentiel tertiaire UE à 27 états membres Autre combustion d'énergie Industrie France Le protocole de Kyoto commande à l’Union européenne de réduire globalement ses émissions de 8% en 2012. Cette charge a été partagée entre les différents Etats membres, en fonction de leur niveau de développement. Par exemple, par rapport à 1990 : -21% pour l’Allemagne, une stabilisation pour la France et + 15% pour l’Espagne. En mars 2007, la Commission européenne a proposé que l’UE se fixe comme nouvel objectif de réduire de 20 à 30% ses rejets de GES d’ici à 2020. Cette diminution est un premier pas indispensable pour atteindre l’objectif à 2050 de limiter le réchauffement climatique à +2°C par rapport à l’ère préindustrielle. En France, cela impliquerait d’avoir réduit par quatre nos émissions de GES actuelles d’ici à 2050. I.3. Part des émissions dues aux produits de consommation en France Il est difficile d’évaluer la contribution des produits de grande consommation aux émissions de GES en France. Selon le champ des émissions prises en compte, les valeurs sont très différentes. Une internalisation complète des GES, du champ jusqu’au magasin, impliquerait de prendre en compte : - une bonne partie des émissions de l’agriculture en CH4, N2O et CO2 (hors exportations et biocarburants notamment) - les transports tout au long de la chaîne de production et de distribution - les émissions des IAA (industries agro-alimentaires) auxquelles il faut ajouter une part des autres industries pour les produits non – alimentaires (emballages, etc.) - les émissions dues au stockage, notamment dans la grande distribution (chauffage, réfrigération, etc.). Nous avons utilisé et comparé les valeurs issues du Centre Industrielle Technique d’Etudes de la Pollution Atmosphérique (CITEPA) (18), de l’Agence européenne de l’environnement reprises par la Caisse des Dépôts (13) et celles calculées à l’aide d’un outil développé par Renaud Crassous(19) à partir de données statistiques de l’INSEE et d’ENERDATA qui portent sur les différents secteurs économiques. Cet outil permet de convertir des Euros de chiffres 8 d’affaires en tonnes de CO2, secteur par secteur, exprimés en émissions directes et indirectes (émissions dues aux filières amont). Il s’agit d’une méthode de calcul dite input – output, que nous développerons dans la partie II.1. de ce rapport. Les calculs que nous proposons ici ne sont donc que des ordres de grandeur, mais ils permettent de comparer les contributions relatives des différentes étapes de la vie des produits agro-alimentaires. On peut ainsi évaluer les contributions : - agriculture CH4 (ruminants, rizières…) (18) : 41 Mt éq.CO2 dont bétail : 30 Mt éq.CO2 - agriculture N2O (fertilisants azotés…) (18) : - agriculture CO2 (direct) : - agriculture CO2 (direct+indirect) : - IAA hors transport (13) : - IAA (direct) : - IAA (direct+indirect) : - produits grande consomm. (direct) : - produits grande consomm. (direct+indirect) 56 Mt éq.CO2 10 MtCO2 27 MtCO2 12 MtCO2 6 MtCO2 36 MtCO2 8 MtCO2 40 MtCO2. En résumé, les produits de grande consommation émettent en France environ 40 MtCO2 sur la chaîne complète. Ceci correspond à 10 % des émissions globales de CO2 françaises pour l’énergie au sens large (c.à.d. que sont exclues notamment les émissions de CH4). Si on prend en compte le CH4 et le N2O, l’ordre de grandeur est plutôt de 140 Mt éq.CO2, soit pratiquement un quart du total. Il est à noter que ce chiffre n’est que très indicatif, puisqu’il ne prend pas en compte les produits exportés et importés. I.4. Quelques éléments de comparaison Les chiffres précédents sont globaux et donc peu explicites quant à la contribution aux émissions de GES à l’échelle de l’individu. Nous reportons ci-dessous quelques valeurs d’émissions d’objets ou d’activités de la vie courante (telles que données par Carbone Trust ou la marque Innocent): - 1 paquet de chips Walkers : 75 gCO2 (hors CH4 et N2O) 1 flacon de shampoing Botanics : 148 gCO2 1 blue-jeans : 375 gCO2 1 yaourt de 125 g : 38 gCO2 (hors CH4 et N2O) 1 km avec une voiture de taille moyenne : 160 gCO2 aller-retour Paris - New York en avion (par personne) : 3 tCO2 émission moyenne CO2 énergie par personne et par an en France : 6 tCO2 En cas d’internalisation complète du CO2, en reprenant l’exemple des chips et du yaourt, l’augmentation de prix (sur la base de 30 €/tCO2) est de l’ordre de 0,25 %, c'est-à-dire un changement de prix imperceptible. En intégrant le CH4 et le N2O et en se basant sur un prix du CO2 de 120 €/tCO2, on pourrait atteindre des valeurs de l’ordre de 1 à 2 % selon les produits. 9 II. THEORIES ET EXEMPLES D’INFORMATION ET D’« INTERNALISATION » Un préliminaire indispensable à l’internalisation du coût carbone d’un produit est l’estimation de son empreinte carbone. Dans cette partie, nous présentons ainsi quelques-unes des différentes méthodes existantes pour quantifier cette empreinte carbone et leurs fondamentaux théoriques. Sont ensuite passés en revue les divers types d’affichages d’information environnementale qui sont aujourd’hui utilisés. Enfin, nous décrirons d’un point de vue théorique les outils d’internalisation du coût carbone des produits, que nous illustrerons. II.1. Bilans carbone et mesures d’impacts environnementaux II.1.a. Définition de l’empreinte carbone (52) La notion d’« empreinte écologique » a été élaborée il y a une quinzaine d’années par William Rees et Mathis Wackernagel. Elle évalue la surface nécessaire en hectares pour produire les ressources naturelles que nous utilisons, et pour absorber les déchets (y compris le CO2) que nous produisons. Elle peut s’appliquer à un pays, une collectivité, une entreprise, un individu. D’après le Rapport Planète Vivante du WWF, en 2003, l’empreinte écologique de l’humanité dépassait de 26% la biocapacité de la planète. La Commission Européenne a sélectionné l’empreinte écologique comme un des indicateurs clefs pour ses objectifs environnements de 2010. L’ « empreinte carbone » est aujourd’hui la part la plus importante de l’empreinte écologique. Elle estime la surface de forêts nécessaire pour séquestrer le CO2 émis par la combustion des énergies fossiles, en partant des valeurs moyennes de séquestration des forêts mondiales, et après avoir retiré la part absorbée par les océans. II.1.b. Analyse de cycle de vie par processus • Principe L’analyse de cycle de vie (ACV) est une méthode type «bottom –up » qui permet : - d'avoir une vision globale de l'impact environnemental d'une filière ; - de prévoir les potentiels déplacements de pollution (réduction d’un type de pollution, mais augmentation d’un autre) ; - d'évaluer quel type d'impact environnemental est dominant dans la réalisation d'un produit et quelles étapes (étape de production, utilisation, mise au rebut) ou quels éléments particuliers du produit contribuent le plus en terme d'impacts environnementaux. Les différentes étapes de la réalisation d’une ACV sont standardisées via la série des normes ISO 14040 à ISO 14044 (2006). Si un bilan carbone peut se baser sur une logique d’ACV, il n’en constitue pas une à proprement parler puisqu’il ne concerne qu’un seul type d’impact. 10 • Limites Parce qu’elle est rigoureuse et approfondie, la méthode d’ACV est coûteuse, complexe et lente à établir. Une des difficultés principales de mise en œuvre réside dans la délimitation des frontières du système concerné. De plus, il est quasi-impossible d'obtenir l'intégralité des flux utilisés pour un produit : il faut alors se contenter de données génériques manquant de précision. D’autre part, plusieurs choix méthodologiques demeurent assez subjectifs comme les choix d'imputation et les méthodes de caractérisation des impacts. Il n'est pas rare, dans le cadre d'une comparaison, de voir le classement entre plusieurs produits être inversé selon la méthode d'évaluation choisie. Enfin, si l’ACV est aujourd’hui la méthode la plus complète pour établir un bilan carbone, elle ne vise pas à couvrir l’ensemble de la problématique environnementale : seul ce qui est quantitatif (mesurable), et extensif (sommable), est pris en compte. On parle de comptabilité environnementale.(c).(d) II.1.c. Méthode input/output • Principe L’analyse Input-Output (AIO) est une méthode « top - down » basée sur la comptabilité nationale et les bilans globaux de GES. Une empreinte carbone est ainsi obtenue par secteur d’activité à partir d’une matrice hybridant flux monétaires et flux physiques. Chaque entrée qui contribue à la réalisation du produit fini peut être attribuée à un secteur économique (construction mécanique, agriculture…). Le cycle de vie d'un produit est ensuite défini comme un ensemble d'activités économiques. (1) En fonction de la qualité des données utilisées pour construire la matrice, cette méthode peut s’avérer plus facile et moins coûteuse à mettre en œuvre puisqu’elle repose sur des statistiques sectorielles. Elle est plus générale et agrégée, d’où sa moindre précision. Elle se prête de plus facilement à l’utilisation des outils de l’analyse économique pour élaborer des scénarios. • Limites La principale limite de l'AIO réside dans le fait que chaque produit est identifié au produit moyen du secteur qui l'englobe. Un secteur comprend pourtant un large éventail de produits pour lesquels le rapport entre le prix et l'utilisation d'énergie n'est pas nécessairement le même. La méthode input/output n’est donc pas assez précise pour différencier des produits de même catégorie. Une deuxième limite réside dans le nombre limité de secteurs disponibles. De plus, elle ne prend en compte ni l’utilisation, ni la fin de vie du produit. II.1.d. Méthode hybride 53 • Principe Les deux méthodes précédentes peuvent être combinées afin d’aboutir à une ACV partielle sur les étapes clés d’un produit. Les processus clés sont analysés par ACV, jusqu’à une certaine limite au-delà de laquelle on utilise des statistiques sectorielles. • Limites Cette méthode nécessite pour être robuste et diffusée d’élaborer des critères pour délimiter les frontières du système de façon homogène. Elle repose sur l’existence d’Inventaires de 11 Cycle de Vie dont la fiabilité est établie. Elle rencontre toutefois les mêmes limites que les deux méthodes sur lesquelles elle est fondée. Input 1 Input 2 Input 1 Extraction des matières 1ères Input 1 Transport Production Input 1 Input 2 Input 2 Input 3 Transformation Input 4 Cycle de vie d’un produit Distribution Input 3 Utilisation Déchets / recyclage Input 5 ACV sur étapes choisies Données sectorielles : méthode Input / output Schéma : application de la méthode hybride sur un cycle de vie d’un produit Tableau récapitulatif des méthodes de « bilans carbone » Méthode Précision Distinction entre Facilité de mise en oeuvre Coût +++ Produits + +++ Analyse de cycle de vie + Secteurs +++ + Input / Output ++ Catégories de produits ++ ++ Hybride +++ important ; ++ moyen ; + faible II.1.e. Exemples de bilans carbone existants • Normes encadrant les bilans carbone La série des normes ISO 14064, parue en 2006, est un nouvel outil qui permet d’évaluer et de promouvoir la réduction des gaz à effet de serre et les échanges de droits d'émission. La norme ISO 14065 (2007) fixe les exigences pour les organismes fournissant des validations et des vérifications des gaz à effet de serre en vue de l'accréditation, ou d'autres formes de reconnaissance. • Méthode de l’ADEME (France) Le bilan carbone proposé par l’ADEME est basé sur une logique d’ACV hybride. Il comptabilise les émissions de gaz à effet de serre à partir de données facilement disponibles pour parvenir à une bonne évaluation des émissions directes ou induites (transport, construction des bâtiments, fin de vie des déchets engendrés, etc.) par une activité ou un territoire. Ce bilan constitue pour l’ADEME la première étape indispensable pour réaliser un diagnostic « effet de serre » de l’activité ou du territoire. Son but est de hiérarchiser les postes d’émissions en fonction de leur importance pour permettre de prioriser les actions de réduction des émissions les plus efficaces pour une entreprise ou un territoire. La démarche est compatible avec la norme ISO 14064. 12 Grâce à cette méthode, toute entreprise ou administration peut ainsi diagnostiquer sa contribution aux émissions de GGE, ses marges de manœuvre à court et long terme pour la la diminue. De plus, le bilan permet de lancer un plan d’actions de réduction des émissions GES, soit de consommation d’énergies fossiles, et donc une baisse des charges. • Méthode de Carbone Trust (Royaume Uni) Carbon Trust est une agence privée mise en place par le gouvernement britannique, pour la réduction des émissions de GES. Carbon Trust s’est intéressé à l’optimisation des process et la réduction des émissions de carbone tout au long de la chaîne logistique selon une logique similaire (14). Sa méthodologie consiste tout d’abord à réaliser une analyse préliminaire pour cartographier la chaîne logistique de l’entreprise depuis l’extraction des matières premières jusqu’au traitement des déchets. Puis une approche type cycle de vie des produits est effectuée en mesurant les émissions de GES en équivalent CO2 à toutes les étapes de la chaîne logistique (chez tous les fournisseurs) d’une unité de produit. Ceci permet d’identifier les principales sources d’émissions afin de développer, en les hiérarchisant, les opportunités de réduction des émissions. Cette démarche permet simultanément de réduire les coûts et de créer de nouvelles opportunités commerciales. Carbon Trust a développé de nombreux bilans carbone avec des entreprises depuis plusieurs années (170 grandes entreprises en 2006). En mars 2007, cet organisme a lancé le programme « product carbon footprinting and labelling initiative » (cf. partie III). Carbon Trust a mené 2 études pilotes afin de valider cette méthodologie : l’une sur les encas avec Walkers et l’autre sur les journaux avec Trinity Mirror. Ils ont mis en évidence la possibilité de réduire de 28 000 tonnes (= équivalent à la consommation de 5 000 foyers britanniques) les émissions de CO2 et de 2,7 millions de livres en optimisant la logistique de ces 2 produits (par exemple pour Trinity Mirror en changeant de fournisseurs) (d). • Méthode de l’Environmental Product Declaration et EPD ® system (Suède) (e) Une “Environmental Product Declaration” (EPD) est définie comme la collecte des données environnementales quantifiées sur un produit, provenant de catégories prédéterminées de paramètres basés sur la série de normes ISO 14040, en tenant compte également de toute information environnementale additionnelle. Il existe un certain nombre de programmes EPD dans le monde, dont les objectifs, structures et demandes diffèrent les uns des autres. Cependant, la procédure générale d’une EPD est toujours la même, reposant comme celle de l’ADEME et de Carbon Trust sur une logique d’ACV et de bases de données de référence, appelées Product Category Rules (PCRs). Avant de pouvoir apposer le logo EPD® sur un produit, le résultat doit être soumis à consultation publique. L’origine de la démarche EPD, à vocation mondiale, est l’EPD®system, géré par un opérateur indépendant, the Swedish Environmental Management Council, SEMC. L’EPD®system est applicable à tous les types des produits et services qui rentrent dans les catégories prédéfinies (électronique…). 13 II.2. Information environnementale au consommateur II.2.a. Les Ecolabels • Définition (50) L’écolabel est une certification officielle, multi-critères et multi-étapes, délivrée par une tierce partie indépendante et reconnaissant officiellement la qualité écologique d’un produit selon des critères révisés tous les 2 ou 3 ans. Ils sont définis par la norme internationale (reprise par l’Union Européenne et la France) NF EN ISO 14024 (2001). Les écolabels ont pour objectifs : - de promouvoir la conception, la commercialisation et l’utilisation de produits ayant un impact moindre sur l’environnement pendant tout leur cycle de vie - de mieux informer les consommateurs de l’impact des produits sur l’environnement. Ils offrent une double garantie : l’aptitude à l’usage des produits d’une part (référence aux normes existantes), et la limitation de leur impact sur l’environnement d’autre part. Les critères d’écolabellisation sont définis par catégorie de produits, après consultation des parties intéressées (producteurs, distributeurs, associations de consommateurs ou de protection de l’environnement, pouvoirs publics), et sont fondés sur une analyse du cycle de vie des produits. Les impacts environnementaux sont en effet étudiés depuis l’extraction des matières premières jusqu’au devenir en fin de vie des produits, en passant par les étapes de production, distribution et utilisation. Les critères des cahiers des charges sont assortis de seuils à respecter. • Exemples en France et en Europe On peut actuellement trouver deux écolabels en France, délivrés par AFNOR Certification: l’écolabel français de NF Environnement et l’écolabel européen, respectivement créés en 1991 et 1992. Parmi les écolabels existants dans les autres pays de l’UE, on peut citer le « Cygne blanc » commun aux cinq pays du Conseil Nordique (Danemark, Islande, Finlande, Norvège, Suède), des exemples britanniques (22) (23) ou encore « l’Ange bleu » allemand, premier écolabel créé, en 1977. • Reconnaissance et parts de marchés de l’écolabel européen (48) Une enquête Eurobarometer (TNS Opinion & Social) (50) menée entre novembre et décembre 2006 dans 25 pays de l’Union Européenne, sur 24 732 citoyens, a permis de mettre en évidence le faible impact de l’écolabel européen. Seules 11% des personnes interrogées le reconnaissent comme signalant les produits et services écologiques. Les Français figurent en 14ème place du classement, avec 12% de reconnaissance, loin derrière les 24% de la Finlande. 14 Les parts de marchés des produits écolabellisés restent faibles (généralement inférieur à 1%) en raison de l’exigence des critères d’octroi. Toutefois, certains produits connaissent de vrais succès économiques, comme les peintures et vernis écolabellisés qui représentent 20% du marché ; 50 % de ces produits sont vendus sous marque propre par Auchan, Carrefour et Leroy-Merlin (données AFAQ-AFNOR Certification, 2004). De plus, on assiste à une croissance très importante ces dernières années du nombre d’entreprises bénéficiant de produits écolabellisés : 588 l’ont au 31/01/08 contre 288 au 31/10/05 (+ 104%) et 215 au 30/12/04 (+40 %). • Limites Plusieurs travaux de recherche (10), (45) ont souligné les dérives qui peuvent accompagner les écolabels et ternir leurs bénéfices. L’une d’entre elles est l’effet « tâche d’huile » que peut avoir un produit écolabellisé sur l’ensemble de la gamme d’un producteur : le consommateur peut considérer que, si une marque possède un écolabel, tous les produits non-labellisés de cette marque ont aussi les mêmes qualités écologiques. Si l’industriel bénéficie de cette bonne image, l’environnement peut lui en pâtir. Un autre argument souvent avancé est le fait que l’écolabel incite à la consommation, ce qui, de façon globale, est nuisible à l’environnement. D’autre part, compte tenu de la lourdeur du dispositif d’écolabellisation et de l’investissement qu’il représente, les industriels qui viennent de l’obtenir ne sont plus incités à l’innovation. Une fois l’écolabel obtenu, un pallier est atteint qui n’est que très rarement dépassé. Enfin, l’écolabel signale les produits les moins néfastes pour l’environnement, mais il n’existe pas d’équivalent pour ceux qui à l’inverse sont les moins vertueux, puisque la démarche est volontaire. II.2.b. Les Autodéclarations • Définition Une autodéclaration environnementale est une information sur un produit apparaissant sur son emballage ou dans une publicité, devant en principe avoir un lien avec les aspects environnementaux de ce produit. Cette affirmation environnementale d’un produit est avancée par un producteur ou un distributeur sous sa seule responsabilité, et généralement sans contrôle par tierce partie. Il peut s’agir de slogans, labels et pictogrammes mais également du nom d’une marque, d’un produit ou d’un producteur. Les autodéclarations correspondent à ce que les anglo-saxons appellent « green claims ». • Limites La réalité de l’avantage environnemental auto-déclaré est très relative. Certaines allégations floues, imprécises, exagérant l’avantage environnemental d’un produit peuvent tromper le consommateur. Mais on trouve également des labels collectifs, portés par tout un secteur industriel ou initiés par un organisme indépendant, qui assurent au consommateur que le produit qui les porte respecte les critères du cahier des charges défini pour chaque label. Des normes internationales ont été rédigées par l’ISO (International Organization for Standardization) pour encadrer l’utilisation de ces autodéclarations : - ISO 14020, qui correspond aux principes généraux des étiquettes et déclarations environnementales ; - ISO 14021, qui porte plus spécifiquement sur les autodéclarations environnementales, ou étiquetage de type II). 15 D’applications volontaires et certifiables par un organisme externe, ces normes rappellent les bonnes pratiques à suivre en matière d’autodéclaration, définissent les exigences à respecter en matière de symboles, pictogrammes, graphiques ou affirmations. Les caractéristiques environnementales telles que « consommation énergétique réduite », « économe en ressources », « recyclable », « dégradable » ou encore « longue durée de vie », y sont clairement définies, tout comme les modes de preuves à respecter pour chacune d’entre elles. Le cadre fixé par la norme 14021 assure ainsi au consommateur que l’autodéclaration repose sur des informations claires, transparentes, scientifiquement solides et documentées. Non réglementées, ces déclarations n'ont malheureusement aucune valeur et contribuent même à la confusion pour le grand public. Généraliser par exemple l’application des normes ISO pourrait permettre de supprimer progressivement la diffusion d’autodéclarations environnementales non fiables. C’est un des points envisagés lors du Grenelle de l’Environnement par le gouvernement français (cf. III.3.a). Au Royaume-Uni a été mis en place en 1998 le Green Claims Code (GCC) sous la houlette du gouvernement et en large concertation avec les différents acteurs. Il a été aligné sur la norme ISO 14021. • Exemples d’autodéclarations : II.2.c. Les Ecoprofils • Définition Un écoprofil est une information environnementale visant à fournir aux consommateurs ou aux professionnels des informations précises, quantitatives, sur l’empreinte environnementale d’un produit, par opposition à l’exemple précédent des autodéclarations. Les écoprofils sont en effet des affichages retranscrivant partiellement les résultats de l’analyse de cycle de vie (ACV) du produit : des données quantitatives (sous forme de diagrammes ou valeurs numériques), parfois accompagnées de données plus qualitatives sont ainsi mises à la disposition du client. Les informations diffusées portent généralement sur la consommation de ressources, les émissions de gaz à effet de serre et les déchets produit. Un écoprofil informe donc le client de certains des impacts environnementaux dus à la production du produit. • Intérêts et limites Très récent, ce type d’information nécessite l’intérêt et la compréhension du public visé. Un écoprofil actualisé régulièrement permettra au consommateur avisé d’observer les éventuels progrès accomplis par l’industriel. Cependant, les indicateurs retenus et la méthode utilisée 16 pour l’ACV sont choisis par l’industriel. Charge au consommateur d’en apprécier le bienfondé. La présence d'un encadrant institutionnel (ADEME, Carbon Trust) dans la démarche peut favoriser l'acceptation par le consommateur de tels affichages. Afin de normaliser les écoprofils, la norme internationale ISO TR 14025, portant sur les « marquages et déclarations environnementaux », établit les exigences en matière d’élaboration d’écoprofils, appelés également « déclarations environnementales de type III ». La norme décrit plus spécifiquement les déclarations environnementales destinées à la communication inter-entreprises. • Exemples On peut souligner le fait qu'il est parfois délicat de classer certains affichages environnementaux. Des pictogrammes sont ainsi à la limite entre un écoprofil et une autodéclaration. Il en est ainsi des « Food Miles » (démarche principalement allemande et anglo-saxonne), indiquant le nombre de kilomètres parcourus par le produit entre la ferme et le magasin, ou du symbole « by air » utilisé par le distributeur suisse Coop (36) pour ses fruits, légumes et viandes transportés par avion et dont les émissions ont été compensées. En revanche, nous considérons qu'un étiquetage indiquant les grammes de CO2 émis (à l'instar de l'étiquetage CO2 de Carbon Trust au Royaume-Uni) (16) est un écoprofil à part entière, même s'il est très simple. Etiquetage CO2 de Carbon trust : visible sur les chips de la marque Walkers (groupe PepsiCO) au Royaume-Uni depuis avril 2007, ce pictogramme fait partie d'une démarche plus générale de réduction des émissions mise en place avec Carbon Trust (cf. partie III). Walkers a ainsi pu réduire ses émissions de 2000 T de CO2 avec une économie sur la facture énergétique de 225 000 £. Carbon Trust a également mis en place le même type de démarche avec Innocent (jus de fruits « smoothies ») et Boots (shampoing). Ces derniers n’affichent cependant pas le label sur les produits mais sur leur site internet pour le premier et sur des présentoirs en magasin pour le second. Les démarches et projets d'écoprofils à l'attention du grand public se multiplient en Europe à l’image de Casino (cf. partie III) et Tesco. Une grande variété d'écoprofils simples devrait être lancés dans les prochaines années. A terme, et vraisemblablement après réglementation, cet affichage permettra la diffusion d’une information standardisée : le consommateur pourra alors comparer les produits les uns par rapport aux autres. C’est déjà le cas d’un écoprofil très répandu, l’étiquette énergie, que l’on peut observer sur les emballages des ampoules, sur les fiches produits des gros appareils électroménagers (réfrigérateurs, lave-linge, sèche-linge, lavevaisselle, fours...) ou devant les véhicules des concessionnaires. Ces étiquettes relativement simples indiquent par une lettre (entre A++ et G) et un code couleur la consommation énergétique du produit, qui correspond à un seul des aspects de son ACV. Dans le cas des appareils électroménagers, l’étiquetage énergétique a conduit à une croissance significative des ventes des appareils les plus performants au détriment des moins performants. 17 Un autre cas intéressant est celui de Timberland (article de presse du Boston Globe, 11/09/2007), qui a apposé un étiquetage multi-critères sur cinq de ses chaussures techniques de plein air. Pour ce qui concerne le CO2, l’index va de 0 (moins de 5,5 livres de CO2 émis) à 10 (plus de 220 livres de CO2). Cette société cherche à élargir le cercle des adeptes de cette méthode et a pris des contacts en ce sens avec Nike, North Face et REI. II.3. Internalisations de l’empreinte CO2 : II.3.a. La taxe carbone sur l’énergie (taxe amont) Dans son premier article sur les externalités de 1924, Alfred Pigou a identifié la différence entre les bénéfices sociaux marginaux et les bénéfices privés, et la nécessité de la corriger avec une taxe ou une subvention. Le CO2 est une externalité négative puisque chacun en produit sans avoir à en supporter le coût. Selon Pigou, on rétablit l’équilibre du marché en internalisant ce coût. Récemment, la prise de conscience des gouvernements et du grand public vis-à-vis du rôle des émissions de CO2 dans le changement climatique a permis l’essor de politiques de réduction des émissions de CO2 et en particulier de la consommation d’énergie fossile. Une des politiques envisagées pour internaliser son coût est la taxe carbone. La taxe carbone est une taxe sur les émissions de GES générées lors de la combustion d’énergie fossile et de la production de certains matériaux (ciment). Parmi les trois énergies fossiles majeures, le charbon est le plus gros émetteur de CO2 par unité énergétique, suivi par le pétrole puis le gaz. La particularité de la taxe carbone est d’avoir un coût fixé par tonne de CO2 émis, que l'on peut convertir par tonne de charbon ou par baril de pétrole. Ce coût n’évolue pas en même temps que fluctue le coût de l’énergie, comme le ferait une TVA. L’implémentation d’une taxe carbone demande de prendre en compte un certain nombre d’aspects, notamment le recyclage du revenu et l’évolution du taux : ¾ Organisme de collecte L’organisme de collecte de la taxe pourrait être national ou international. La création d’une agence continentale ou internationale qui gérerait une taxe carbone avec un taux unique harmonisé limiterait les problèmes de concurrence entre Etats et permettrait une utilisation à bon escient des fonds collectés. Toutefois, cette agence serait probablement inacceptable pour les Etats qui y verraient une atteinte à leur souveraineté. ¾ Quel taux ? Quel profit temporel ? Fixer le niveau d’un taux harmonisé nécessiterait d’arbitrer entre d’une part ce qui serait progressivement implémentable sans dommage économique majeur, et ce qui devrait être fait pour l’environnement. Un taux trop haut inciterait de plus les Etats-membres à vouloir disposer du revenu de la taxe et à s’opposer à la création ou au bon fonctionnement de l’agence. ¾ Que faire de la recette de la taxe ? 18 Deux utilisations sont envisageables : le financement de subventions environnementales (modèle de la taxe affectée) et la réduction d'autres taxes (modèle du double dividende) en respectant ainsi la contrainte de neutralité budgétaire. Si une taxe carbone est implémentée sans modification des autres politiques, le revenu supplémentaire dans le budget de l’Etat peut avoir des impacts macro-économiques négatifs : baisse des offres d’emplois, baisse des volumes réels de production. Cependant, ces baisses peuvent être évitées si des réformes fiscales correspondant bien avec l’implémentation de la taxe carbone sont mises en œuvre. Il est possible par exemple de réduire les taxes dites distorsives (c'est-à-dire incitant des agents économiques à modifier leur comportement dans un sens contradictoire avec l'intérêt général), comme les charges salariales par exemple. Les effets macro-économiques de ce « double dividende » restent encore très incertains. ¾ Quel serait l’impact d’une telle mesure sur le pouvoir d’achat ? Les dépenses en énergie occupent une part plus grande du budget des foyers défavorisés que des foyers aisés. Par conséquent, si une taxe carbone est adoptée sans adaptation des autres taxes ou introduction de programmes de redistribution, le fardeau sera plus lourd à porter pour les foyers défavorisés. Toutefois, cet effet dépend principalement du système fiscal préexistant. ¾ Quels seraient les impacts sur la macro-économie à court et long terme? En créant une augmentation du prix de l’énergie fossile par rapport aux autres sources d’énergie, la taxe peut induire une substitution vers d’autres énergies et une baisse de la consommation énergétique. Même si ces changements peuvent être bénéfiques du fait de son effet sur le changement climatique à long terme, ils entraînent une distorsion de la production et de la consommation par rapport à un scénario sans taxe. Les coûts associés à ces distorsions doivent être comparés aux bénéfices à long terme attendus. D'après le groupe de travail III du GIEC (groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat), stabiliser la concentration de CO2 dans l'atmosphère entre 535 et 590 ppm d'ici 2050 aurait par exemple un coût annuel inférieur à 0,1% du PIB mondial. Le GIEC a également mis en évidence l’existence de très fortes disparités inter - pays des impacts. ¾ Comment évoluerait le comportement de la population face à une telle taxe ? Les effets de la taxe sur la population sont aujourd’hui extrêmement incertains, la majeure partie des études s’étant concentrée sur les impacts sur le secteur industriel et les analyses technologiques. Il ne faut pas négliger les effets possibles sur le prix de l’immobilier et les demandes d’emplois liés de l’adaptation des comportements à la taxe carbone : des déménagements sont à attendre afin de rapprocher domiciles et lieux de travail. ¾ Est-ce qu’une taxe carbone ne portant que sur le CO2 serait suffisante, doit-on prendre en compte également les autres GES majeurs ? Les parts du méthane et du N2O dans l’effet de serre sont moindres mais non négligeables (cf. partie I). Cependant, il est plus difficile de mesurer les émissions de ces gaz, qui proviennent en grande partie de pratiques agricoles. Peut-être peut-on imaginer une taxe sur les vaches ? Par ailleurs, on pourrait également internaliser le coût des autres gaz non responsables de l’effet de serre mais polluant l’environnement. Par exemple, le charbon contribue de manière importante à la pollution atmosphérique (SO2 et particules). Prendre en compte ces autres gaz donnerait une flexibilité à la taxe carbone (transferts possibles d’un gaz à l’autre) et faciliterait la mise en place de stratégies acceptables. 19 ¾ Comment imposer la taxe sur les produits importés et comment assurer la compétitivité des produits exportés sur le marché mondial ? Il est plus difficile de donner une évaluation des externalités des produits intermédiaires ou finaux importés qui sont produits avec des énergies fossiles. Une coopération continentale et internationale doit être rapidement mise en œuvre pour éviter les distorsions de compétitivité et le phénomène de fuite de carbone (les gros émetteurs de CO2 fuiraient les pays dont les réglementations carbone sont les plus coûteuses, et émettraient du CO2 ailleurs plutôt que de baisser leurs émissions). Un mécanisme d’ajustement aux frontières peut ainsi être instauré si la taxe n’est pas internationale (voir 3-c). Même si les questions ci-dessus sont toujours débattues et en l’absence d’une solution parfaite, certains pays, principalement les pays de l’Europe du Nord, ont déjà pris la décision au niveau national d’implémenter non seulement une taxe carbone mais aussi d’autres taxes environnementales. Les taxes adoptées sont listées dans le tableau ci-après. Country Taxes raised on Magnitude Sweden (1990) • CO2 • SO2 • Various • Various(gasoline, electricity, water, waste, cars) • CO2 • SO2 • Capital gains • CO2 Denmark (1994) Netherlands (1996) United Kingdom (1996) Finland (1997) Norway (1999) • Landfill • CO2 • Landfill • Corporate profits • CO2 • SO2 • Diesel oil Carbon tax rate 2.4% of total tax revenue 1997, SEK/tCO2 -Industry, horticulture : 185 -Households, commercial, and motor fuels : 370 Around 3% of GDP by 1995, DKK/tCO2 2002, or over 6% of total - Space heating: 600 tax revenue - Light processes, no agreement: 90 - Light processes, agreement: 68 - Heavy processes, no agreement: 25 - Heavy processes, agreement: 3 0.3% of GDP in 1996, or around 0.5% of total tax revenue Around 0.1% of total tax revenues in 1999 0.3% of GDP as of March 1999, or around 0.5% of total tax revenue 0.2% of total tax revenue in 1999 1998 102 FIM/tCO2 1999, NOK/tCO2 -Gasoline : 397 -Light oil: 174 ; -Heavy oil: 148 -North Sea supply fleet : 100 -Coastal goods transport: 100 -Pulp and paper industry : 87/74 -Fish meal industry : 87/74 -Coal : 189 ; - Coke : 144 -Oil burned on continental shelf : 336 -Gas burned on continental shelf : 381 Germany • Petroleum products Around 1% of total tax (1999) revenue in 1999 Italy • Petroleum products Less than 0.1% of total (1999) tax revenue in 1999 Source : J. Andrew Hoerner and Benoît Bosquet, Environmental tax reform-the european experience, 2001 La taxe carbone a commencé à être introduite récemment par les pays nordiques principalement, mais avec un coût de la tonne de CO2 relativement faible, afin de limiter son impact potentiel sur la concurrence internationale, qui reste un facteur majeur pour les gouvernements. L’implémentation de la taxe augmente les dépenses des pollueurs, soit parce qu'ils paient la taxe, soit parce qu'ils décident de modifier leur processus de production pour baisser leurs 20 émissions, ce qui nécessite un certain investissement. Ces dépenses supplémentaires se répercutent en partie sur le prix des produits. II.3.b. Les quotas d'émissions, ou permis de carbone Avec l’instauration d’un système de quotas échangeables, les parties impliquées ont droit d’émettre une certaine quantité de GES. Si elles émettent plus, elles peuvent acheter des quotas supplémentaires aux agents émettant moins que leurs objectifs, ou elles peuvent aider financièrement des parties à baisser leurs émissions de GES (mécanisme de développement propre). Le paiement peut prendre plusieurs formes : liquide, actions, créances, ou par transfert de technologies permettant de réduire les émissions de GES… Le point clé du système des quotas, qui le différencie fondamentalement de la taxe carbone est que la quantité globale de CO2 que l'on peut émettre est imposée, comme pour une norme d'émission. Mais ce système diffère de la réglementation du fait de la possibilité de s'échanger ces quotas, ce qui minimise de surcroît les coûts de dépollution. Deux systèmes de transactions de quotas ou de crédits d’émission existent : • Transactions basées sur les allocations L’acheteur se voit allouer un quota d’émissions par les régulateurs dans le cadre de régimes de « cap and trade ». C’est le cas des AAUs (Assigned Amount Units) du Protocole de Kyoto, ou des EUAs (EU emission allowances) mis en place pour l’Emission Trading System de l’Union Européenne. Ce type de système combine performance environnementale et flexibilité. Les participants répondent ainsi aux objectifs fixés à moindre coût. • Transactions basées sur les projets L’acheteur obtient des crédits d’émissions en mettant en œuvre un projet de réduction des émissions de GES, s'il peut apporter des preuves sur ces réductions. Les deux systèmes les plus importants de cette catégorie sont le mécanisme de développement propre (MDP ou CDM en anglais) et la Mise en Oeuvre Conjointe (MOC ou JI mechanism) dans le cadre du Protocole de Kyoto. Les MDP permettent à un pays développé signataire d’obtenir des crédits d’émission (CERs) en investissant dans un projet réducteur d’émissions dans un pays en développement ayant ratifié le Protocole de Kyoto. Le mécanisme des MOC est semblable au MDP mais entre deux pays industrialisés ayant signé le Protocole de Kyoto. Le principe des MOC est un moyen d’inciter les pays industrialisés à réduire leurs émissions par des efforts de coopération. Ils obtiennent dans ce cas des unités de réduction d'émissions (ERUs). Le tableau qui suit fait une synthèse des avantages et inconvénients des différentes options envisageables pour réduire les émissions de GES en amont : Minimisation du coût Certitude du résultat environnemental Incitation à l'innovation Acceptabilité par les pollueurs Norme d'émission Taxe carbone - + + + + - + + -- + - + + - ++ - 21 Permis (gratuits) Permis (enchères) II.3.c. La taxe ou mécanisme d’ajustement aux frontières (2, 3, 12, 20, 21) • Définition Comme son nom l'indique, un mécanisme d'ajustement aux frontières (MAF), ou taxe aux frontières, permet un ajustement fiscal visant à compenser la différence entre des mesures appliquées à l'intérieur d'un territoire (par exemple une taxe carbone ou un système de quotas) et l'absence de ces mesures en dehors des frontières du territoire. Cet instrument n'est donc à envisager que s'il y a des politiques différenciées selon les pays. Il permet d'équilibrer les charges fiscales s'appliquant sur les produits locaux et importés en taxant les importations. Les produits exportés sont quant à eux exonérés de taxe, ou subventionnés, pour pouvoir être compétitifs sur les marchés extérieurs. La définition exacte des MAF, écrite par l'OCDE, date de 1970. Il s'agit de : « Toute mesure fiscale qui met en oeuvre, totalement ou partiellement, le principe de destination, i.e. celle qui autorise les produits exportés d’être exemptés d’une partie ou de la totalité des taxes supportées dans le pays d’exportation en rapport à des produits domestiques similaires vendus aux consommateurs du pays et qui autorise les produits importés vendus aux consommateurs d’être sujets en partie ou en totalité aux taxes en vigueur dans le pays importateur en rapport avec des produits domestiques similaires ». Cela correspond donc à ce que le gouvernement français appelait en novembre 2006 : « le principe d'une taxe carbone sur les importations de produits industriels en provenance des pays qui refuseraient de s'engager en faveur du Protocole de Kyoto après 2012 » (de Villepin, voir Annexe 6). Cet affichage politique serait un projet audacieux : c'est en effet la première fois que cette proposition de taxe serait reprise par un pays. • Pourquoi une telle taxe aujourd'hui ? L’objectif est d’éviter les distorsions de concurrence à l’encontre des industries européennes qui subissent le coût du Protocole de Kyoto et d’inciter les grands concurrents de l’Europe à rejoindre celui-ci. Il y a un véritable enjeu de compétitivité, car les politiques de réduction engagées en Europe ont un coût, coût qui va même s'accentuer prochainement avec la fin de la gratuité des permis d'émissions. Les entreprises européennes subiraient des coûts que les entreprises du reste du monde ne subiraient pas, et donc une perte de compétitivité. En l'absence de MAF, les politiques de réduction augmentent en effet le prix de l’énergie consommée pour la production, ce qui fait baisser les profits ou les ventes des entreprises. Les parts de marché des entreprises européennes pourraient ainsi chuter sur le marché européen mais aussi sur le marché mondial. Ces politiques incitent également à la délocalisation les entreprises attirées par une baisse des coûts. On peut imaginer une « course vers le fond», où les pays abaissent les uns après les autres leurs exigences en termes de réglementation environnementale afin d’attirer les entreprises sur leur territoire. Remarquons toutefois que ce phénomène est rapidement limité en pratique et qu’on le mesure peu empiriquement aujourd'hui. En effet, il existe peu de telles situations purement bilatérales. Le commerce international, multilatéral, réduit cet effet de « paradis environnementaux ». Cependant, le coût environnemental est encore à ce jour négligeable comparé par exemple à ceux de main d’œuvre. Mais un carbone fortement taxé pourrait changer les choses. 22 Les conséquences de l'absence de taxe aux frontières se feraient sentir principalement sur les secteurs à forte intensité énergétique avec une concurrence internationale importante, à savoir la sidérurgie, la métallurgie, les industries du ciment, du verre, du papier et le raffinage (ce qui correspond au périmètre actuel de l’ETS, mis à part pour les producteurs d'électricité supérieurs à 20MW, car l'électricité s'exporte très mal). Il est donc vraisemblablement que l'absence, comme la présence d'un MAF, ait peu d'effets pour les produits de grande consommation, le coût environnemental étant moins conséquent pour ces derniers. • Méthode de calcul de la taxe aux frontières La théorie d'Ismer et Neuhoff (2004) est la plus aboutie que nous ayons trouvée sur le sujet. Il s'agirait de calculer la taxe avec comme référence le producteur domestique le plus efficient dans une zone géographique déterminée, selon le principe de la « meilleure technologie disponible ». Cela correspond en quelque sorte à une prime à la meilleure technologie : la taxe incite les entreprises plus polluantes à adopter cette technologie. Malheureusement, il ne sera pas toujours évident de définir cette « meilleure technologie disponible », qui devra être revue périodiquement pour s'adapter aux progrès réalisés. • Compatibilité avec les règles de l’OMC Certains points du MAF posent problème et doivent être discutés. L'OMC interdit à un pays d'imposer une taxe aux autres pays si celle-ci n'existe pas chez lui. Or le MAF serait mis en place en Europe pour limiter l’effet des quotas. Donc pour être acceptée, la taxe doit être jugée de même nature qu'un quota. Par ailleurs, les exportations devront être exonérées pour être compétitives par rapport aux pays non contraints ; la nécessité de ces subventions devra être bien argumentée devant l'OMC très réticente aux subventions. Par ailleurs, il faudra résoudre le problème de la définition de deux produits identiques. Si le fait qu'un produit a émis plus de CO2 ne le rend pas différent d'un produit similaire moins émetteur, la taxe sera irrecevable d'après le régime de l'OMC. Un MAF poserait aussi un problème politique essentiel : faudra-t-il taxer tous les pays de la même manière, y compris ceux qui sont parties au protocole de Kyoto mais à qui on a reconnu le droit de ne pas avoir d’engagement quantitatif, l'OMC acceptera-t-elle de différencier les taxes selon les pays et les situations, ce qui n'est pour le moment jamais arrivé ? Il est difficile de répondre aujourd'hui à cette question. Il est donc malaisé de conclure quant à la faisabilité d'un MAF. Le régime et la jurisprudence de l'OMC autorisent l'élaboration de mesures ciblées contre le changement climatique, mais sous certaines conditions non systématisables. Tout devrait par conséquent se décider en procédure de règlement des différends. Si elle souhaitait faire passer une telle mesure, l'Union Européenne devrait être soudée. L'instauration d'une taxe CO2 aux frontières de l'Europe serait un vrai signal diplomatique. Pour la France, il s'agit d'une sorte de test des volontés politiques en matière de politiques environnementales. II.3.d. Le bonus / malus écologique • Principe : Le « bonus – malus » est un système de fiscalité auto - compensée favorisant une catégorie de produits, que l'on finance en pénalisant une autre catégorie. Pour l'État, l'opération est en théorie financièrement neutre, aux frais de gestion près. Pour les produits, on obtient la baisse du coût d’un produit et l'augmentation du coût de l'autre. 23 • Limites : Une faiblesse de ce système est qu'il ne prend pas en compte l'énergie consommée sur l'ensemble du cycle de vie des produits. Une technique peut ainsi diminuer la consommation pendant l’utilisation, mais peut nécessiter trois fois plus d'efforts à la construction et au recyclage. Une autre faiblesse du dispositif est le fait de subventionner en soi une dépense de CO2. Il ne constitue donc pas un système d’internalisation de l’empreinte (le prix de revient moyen est inchangé). Par ailleurs, le résultat global n’est pas obligatoirement une réduction des émissions : son efficacité est loin d’être démontrée. Enfin, toute la difficulté de ce système repose sur un bon calibrage du coût carbone. Mal calibré, ce système a un véritable effet distorsif. Or pour que le bonus/malus aboutisse à un signal prix lisible pour le consommateur, le coût attribué au carbone doit être bien supérieur aux préconisations que nous avons exposées dans la Partie I. Le bonus/malus ne saurait donc avoir un effet sur le consommateur à moins d’être distorsif. • Exemple : le bonus / malus automobile, ou l’écopastille (cf Annexe 4) Mise en place le 5/12/2007 pour sa partie bonus et le 01/01/2008 pour le malus, l’écopastille automobile fait partie des premières mesures issues du Grenelle de l’Environnement (cf. III.3.a). Basé sur les émissions de CO2 par km des véhicules, ce dispositif vise à inciter les acheteurs à privilégier les voitures les plus sobres en carbone. Concrètement, les automobilistes qui achètent une voiture émettant plus de 160 grammes de CO2 au kilomètre s'acquittent d'une taxe au moment du paiement de la carte grise (de 200 à 2.600 €). À l'inverse, l'automobiliste achetant une voiture moins consommatrice, émettant moins de 130 grammes de CO2 par kilomètre bénéficie d'une prime à l'achat s'échelonnant entre 200 et 1.000 € (demande de subvention à effectuer après l’achat par l’acquéreur). II.3.e. La modulation de TVA ou « TVA verte » • Définition et fonctionnement de la TVA La taxe sur la valeur ajoutée (TVA) est un impôt indirect sur la consommation qui est directement facturé aux clients sur les biens qu'ils consomment ou les services qu'ils utilisent. Cette charge ne touche pas les entreprises, elle joue seulement un rôle d'intermédiaire entre l'État et le client, sauf quand elle est modulable. Le montant de la taxe est proportionnel au prix de vente hors taxe (HT). Les taux de TVA mis en œuvre dans chaque Etat membre sont fixés au niveau communautaire, à l’unanimité des 27 Ministres de Finances (Conseil Ecofin). Le texte de référence en matière de TVA communautaire est la directive 2006/112/CE adoptée par le Conseil de l'Union Européenne le 28 novembre 2006. Celle-ci consolide en un texte unique les directives préexistantes 67/227/CEE (1ère directive, fondements et principes du système communautaire des taxes sur le chiffre d'affaires) et 77/388/CEE (6ème directive, harmonisation). Aucun accord n’ayant pu être trouvé sur un taux normal maximal, il existe une grande disparité des taux actuels dans la Communauté. Une refonte des différents taux de TVA en 2010 a été annoncée par la Commission Européenne. Les règles européennes actuelles sur la TVA, stipulées dans cette directive de 2006, permettent des taux réduits pour la consommation d’énergie afin que les ménages les plus pauvres y aient accès. Ces règles autorisent également un certain nombre de taux réduits 24 pour une série de biens et de services, mais ce ne sont généralement pas des considérations écologiques qui ont été prises en compte pour établir cette liste. Une TVA verte serait donc une TVA dont les taux varieraient en fonction de critères écologiques. • Limites de l’outil TVA en général et de la TVA verte Les taxes sur la consommation pèsent identiquement sur la consommation des ménages pauvres ou riches, mais en proportion du revenu, elles pèsent davantage sur les bas revenus. Cet impôt n’est pas redistributif. Une grande partie du budget de l'État étant issue de la TVA, elle incite l'État à favoriser une bonne croissance pour financer ses projets. Une TVA verte abaissée sur des produits plus vertueux écologiquement pourrait avoir pour effet d’augmenter la consommation de ces biens, ce qui ne va pas dans le sens d’une réduction des émissions de CO2. Enfin, c’est un outil très statique et lourd à remettre en question ou à modifier. Or les technologies des produits de consommation évoluent très rapidement, de sorte que la taxe ne pourrait s’adapter à leur consommation réelle d’énergie ou à leur impact environnemental. 25 III. PROJETS ET JEUX D’ACTEURS RELATIFS A L’EMPREINTE CO2 Cette partie a pour objectif de faire un état des lieux des enjeux politiques et économiques actuels, ainsi que des tendances et stratégies qui se dégagent de la part des différents acteurs, institutionnels ou privés. Nous présenterons dans un premier temps les contraintes réglementaires et fiscales qui sont susceptibles de voir le jour à court et moyen terme et dans un second temps nous analyserons les attentes des acteurs privés quant aux orientations publiques et leurs stratégies en termes d’actions volontaires. III.1. Au niveau des institutions internationales (OMC…) L’OMC (organisation mondiale du commerce) est la principale institution internationale dont les décisions ont un impact significatif sur la fiscalité et les ajustements aux frontières (cf. II.3.c). Le directeur de l’OMC, Pascal Lamy, dans son discours du 9/12/07 à Bali, a indiqué que le négociations de Doha pourraient déboucher sur des accords favorables à la fois à l’environnement et au commerce et que la boîte à outils de l’OMC permet de développer des mesures efficaces contre le réchauffement climatique. Néanmoins il juge indispensable d’attendre un consensus global sur la manière de traiter cette question. De l’avis des différentes personnes que nous avons rencontrées, les règles de l’OMC peuvent en effet être compatibles avec des mécanismes d’ajustement aux frontières sur critères CO2, à condition évidemment que les différents Etats concernés puissent négocier un compromis acceptable par tous. III.2. L’Union Européenne et les autres Etats membres III.2.a. Le parlement européen Le 29/11/07, le Parlement européen a adopté une résolution (non contraignante) approuvant un rapport d'initiative établi par le député européen Alain Lipietz sur le commerce et le changement climatique (5). Estimant que l'UE peut faire davantage pour prévenir les émissions de CO2, les députés soulignent l’importance de sensibiliser les consommateurs au coût environnemental total des produits. Ils invitent dès lors la Commission et le Conseil à proposer des mesures en matière d'information sur la consommation d'énergie et les gaz à effet de serre émis pour la fabrication et le transport des produits mis en vente dans l'UE. Les députés demandent, entre autres : l’élaboration d’une procédure permettant de déterminer et d'afficher l'empreinte écologique et d'élaborer des logiciels permettant aux entreprises de calculer les émissions de GES liées à tous les processus de production. l’introduction de normes d'étiquetage climatique pour informer les consommateurs de l'empreinte écologique des produits, compatibles avec les règles de l’OMC 26 l'adoption de mesures d'incitation en faveur de la production et de l'utilisation des produits contribuant à réduire les émissions de dioxyde de carbone, consistant respectivement à octroyer des aides nationales et communautaires et à réduire la taxe sur la valeur ajoutée. III.2.b. La commission européenne (DG ENV) Le 11/02/08, nous avons rencontré Pavel Misiga, directeur de l’unité environnement et Industrie, à la DG Environnement de la Commission européenne L’unité mène de nombreux projets sur les instruments volontaires d’augmentation de la performance environnementale des produits. D’autres unités travaillent sur la réduction de l empreinte CO2 des entreprises. Mesure de l’empreinte CO2 La DG ENV pense que les différentes méthodologies de mesure de l’empreinte CO2 (cf. partie II) n’offrent pas des garanties et une homogénéité suffisante pour être fiables, ce qui pose problème lorsque la mesure sert de base à des « green claims », ou a fortiori si l’objectif est de s’en servir comme base pour une éventuelle fiscalité environnementale. Elle encourage par conséquent l’harmonisation et la normalisation des méthodes. Une réunion est prévue en mars 2008 pour proposer aux Etats membres d’harmoniser leurs approches. Le projet de standard du BSI (British Standards)(11) est sans doute celui qui est le plus avancé. L’allemagne a aussi des projets en cours. Des discussions avaient déjà été engagées sur la une harmonisation au niveau européen et international, alignées sur le système ISO. Cette idée a été reprise par le comité européen de normalisation (european committee for standardization). L’UE pourrait chercher a en promouvoir une normalisation ou une certification des bases de données d’ACV. La réunion de mars permettra de soumettre ces deux idées aux Etats membres. Les méthodologies envisageables sont les suivantes : - - - L’UE pourrait imposer un mandat au comité européen de normalisation, à condition qu’il y ait un accord des Etats membres sur le financement (plusieurs millions d’Euros). La mise en place d’une norme prendrait 2 ou 3 ans. Accords volontaires (open coordination) : même le BSI, pourtant le plus avancé, reconnaît qu’un Etat ne peut avancer seul. Il est donc très probable que même en l’absence de démarche européenne les démarches nationales s’harmonisent progressivement de manière bilatérale ou multilatérale. Mise en place d’un législation européenne : cela imposerait une méthodologie et c’est très peu probable. La plus probable : une combinaison des 3 précédentes, avec une harmonisation imposée par un cadrage communautaires avec des déclinaisons locales. La démarche prendrait 3 a 5 ans. Etiquetage CO2 La DG ENV pense qu’une approche multicritère correspond à la demande du consommateur, mais qu’elle est très complexe. Elle reconnaît le risque de transfert de pollution si on n’informe que sur le CO2 mais le besoin est réel. Les méthodologies envisageables sont les suivantes : • • intégrer le CO2 dans l’écolabel européen, mais sous quel forme ? un chiffre unique ? quelles limites fixer a l’attribution (les 20-25 % de produits les plus performants) ? De plus, l’écolabel n’est pas assez connu. eco design : il existe une directive européenne de 2005 sur les produits qui utilisent beaucoup d’énergie. Seuls les produits atteignant un certain seuil de critères sont autorisés sur le marche. L’idée serait d’élargir cette directive à d’autre produits, prendre en compte l’efficacité de gestion des ressources, les matériaux dangereux, l’empreinte CO2… 27 • Enfin, créer un label « environmental best practice » (EPB), appliqué aux 20-25 % des meilleurs produits. Cette directive pourrait s’appliquer aussi bien aux produits de l’UE qu’aux produits importés : ne sont importés que les produits qui atteignent le seuil. Cela pose néanmoins le problème du monitoring de ces produits. Exemple de design possible d’éco-label : Efficacité énergétique A EPB B C D Seuil minimum E A B C D E X X X X CO2 Ressource Efficacité énergétique Toxicité Internalisation de l’empreinte CO2 Cette question n’est pas traitée dans l’unité de Pavel Misiga. Toutefois, il a décrit plusieurs méthodes envisageables : - incitations pour les produits EPB : avantages fiscaux, ou baisse de TVA. Pose des problèmes d acceptabilité politique dans l’union a 27 bonus et crédits d’impôt (cf. exemples de la Belgique et des frigos A, de la France et des chaudières, de l’Allemagne et des panneaux photovoltaïques). Peut être lié à l’écolabel. monétarisation des externalités négatives (cf. directive sur les marches publics et les émissions des voitures). Cette démarche pourrait être étendue. Une réunion des Etats membres a eu lieu début février 2008 pour évoquer la modification de la directive sur l’efficacité énergétique des produits (label énergie) pour une prise en compte du CO2 (label carbone). Refus catégorique des Etats membres en raison de la différenciation du « mix » énergétique entre les Etats des problèmes méthodologiques évoques ci-dessus. Par ailleurs, selon la DDD du MEDAD (cf. III.3.b), la Commission a un projet de directive européenne sur les marchés publics relatifs aux véhicules terrestres (prise en compte du CO2, des particules et des hydrocarbures sous forme de coûts supplémentaires à intégrer dans les offres). Selon la DDD, c’est la toute première démarche de réglementation intégrant une monétarisation des externalités négatives. Un projet similaire existe sur les marchés publics d’ordinateurs, et autres appareils en intégrant le coût énergétique. 28 III.2.c. L’Etat au Royaume-Uni Dans l’« Energy White Paper » (2003), le gouvernement britannique a fixé l’objectif de réduction de 60% des émission de carbone par rapport aux émission de 1990 d’ici à 2050. Dans l’« Energy White Paper » (2007)(a), le gouvernement britannique a lancé le Carbon Reduction Commitment (CRC), qui est un système de quotas échangeables inspiré du système européen, mais plus souple et appliqué à des secteurs nouveaux : administration, grande distribution, hôtellerie etc., pour une réduction totale obligatoire de 1,1MtCO2 par an jusqu’en 2020. En mars 2007, Carbon Trust a lancé au Royaume-Uni le programme « product carbon footprinting and labelling initiative » (16) qui comprend 4 volets : • en partenariat avec le Defra (ministère de l’environnement) et le BSI(11) (agence de normalisation), mise en place de la norme PAS 2050 (publicly available specification) pour la mesure précise de l’empreinte CO2 (tous les GES sont pris en compte) de la source au magasin (hors stockage en magasin) et y compris le devenir des déchets. En revanche, les émissions indirectes comme celles des travailleurs se rendant à l’usine, ne sont pas prises en compte) • Une norme pour définir en quoi consiste une politique de réduction des émissions de l’entreprise : norme PERS (Product-related Emissions Reduction Standard) • Un cadre méthodologique de communication, y compris un label (cf. infra) • Un label indiquant le contenu en CO2 du produit qui n’est attribué qu’avec un engagement de réduction des émissions. En cas de non-atteinte de l’objectif en 2 ans, le label est retiré. Ce projet est mené dans le cadre d’une large consultation (entamée en octobre 2007, 2e phase en cours en février 2008) des industriels, de la distribution, des ONG, de universitaires et des institutions publiques. La version 1 est prévue en juin 2008. La méthode est faite pour être applicable à l’international (des participants étrangers ont contribué aux travaux). Outre PepsiCo (Walkers), Innocent et Boots, déjà mis en œuvre, 10 nouveaux projets sont en cours, dont Cadbury-Schweppes (barres de chocolat), Coca-Cola (une boisson gazeuse et une non gazeuse), the Co-operative Group (fraises), Kimberly-Clark (Andrex et Huggies nappies), Müller Dairy (Yoghurts), Scottish & Newcastle (bière Fosters et cidre Bulmer) et Tesco (5 différentes catégories de produits : tomates, pommes de terre, jus d‘orange, ampoules, détergents). Ils utiliseront la version 1 des normes. Des industriels fabricant des pavés sont également engagés. Une question qui n’est pas tranchée à ce jour par Carbon Trust est celle du méthane (CH4) émis par le bétail ruminant et qui impacte fortement l’empreinte en GES des produits laitiers et de la viande. Ce n’est probablement pas par hasard que les produits engagés dans la démarche à ce jour ne soient pas concernés par ce type d‘émissions. 29 III.3. L’Etat français et ses établissements publics III.3.a. Le gouvernement et le Grenelle de l’environnement Le Grenelle de l’environnement Les engagements du Grenelle des 24, 25 et 26 octobre 2007 sont issus de 6 groupes de travail. Les deux groupes concernés par notre sujet sont le groupe 1 « lutter contre les changements climatiques et maîtriser la demande d’énergie » et le groupe 6 « promouvoir des modes de développement écologiques favorables à la compétitivité ». Depuis fin décembre 2007, 33 chantiers (comités opérationnels ou « comop », missions interministérielles, groupes d’étude...) travaillent à la mise en oeuvre des engagements issus des tables rondes du Grenelle de l’environnement (phase 4 opérationnelle du Grenelle). Le comop 23 travaille notamment sur l’information environnementale et le système bonusmalus qui sera appliqué à une nouvelle série de produits (cf. compte-rendus des représentants de Danone). Déclarations récentes du gouvernement Au sujet du bonus-malus automobile, la secrétaire d’Etat Nathalie Kosciusko-Morizet a précisé (interview sur Planète Terra Politique, 18/12/07) que selon elle, l’objectif principal est d’amener les constructeurs à déplacer leurs gammes vers les petites voitures. Elle affirme par conséquent être réticente à évaluer l’impact sur l’environnement du bonus-malus. Implicitement cela revient à reconnaître que l’impact global n’est pas forcément une réduction des émissions de CO2. L’idée, confirmée depuis dans le cadre du Grenelle (cf. supra) est d’étendre ce système de fiscalité auto-compensée à d’autres produits. Le 29/01/08, au cours d’une interview de Nathalie Kosciusko-Morizet, et Jean-Louis Borloo au micro d Europe 1, Mme Kosciusko-Morizet a indiqué que la grande distribution (convention avec la FCD cf. III.5.b) va lancer en 2008 une opération pilote d'étiquette écologique sur 300 produits de consommation courante, afin de faciliter le choix du consommateur. "Mais l'étiquette ne peut pas non plus comporter trop de critères, au risque de perdre en lisibilité", a-t-elle estimé. III.3.b. Les administrations de l’Etat français Position de la DDD (MEDAD) Le 28/01/08, nous avons rencontré Rémy Risser, chef du bureau des productions et consommations de la DDD (délégation au développement durable) du MEDAD et Eric Corbel, chargé de mission. Rémy Risser pense que la normalisation est nettement plus avantageuse que l’étiquetage volontaire puisqu’elle est homogène et à vocation internationale. Dans l’attente des conclusions du « comop » (comité opérationnel) n°23 du Grenelle de l’Environnement qui travaille sur différents chantiers liés à la consommation, dont l’étiquetage et le bonus/malus, la DDD n’a pas de position officielle sur ces questions. L’idée actuelle pourrait être de se fonder sur des normes existantes comme la 14021 sur les autodéclarations 30 environnementales en vue de et soit soit d'en faire une contrainte légale (modification du code de la consommation et/ou décret) soit de la faire certifier par une tierce partie. Ces décisions sont susceptibles d’impacter les politiques d’étiquetage carbone. Celui-ci serait également plus efficace s’il est aligné sur une norme européenne, qui n’existe pas aujourd’hui. La démarche pourrait être très coûteuse puisque devant reposer sur une ACV pour être exhaustive et réaliste. Rémy Risser est réservé sur l'étiquette carbone dans la mesure où il s'agit d’une signalétique monocritère qui risque de se développer aux dépends d'autres critères environnementaux. Son intérêt est toutefois l'éducation des citoyens sur l'impact écologique des produits. Position de la DGTPE Nous avons rencontré le 18/02/2008 Elodie Galko, du bureau agriculture - environnement de la Direction générale du Trésor et de la politique économique. La DGTPE est défavorable au système du bonus-malus, en raison de ses limites (présentées en II.3.d), et préfère la taxe carbone amont, plus simple à mettre en œuvre, plus efficace et qui peut être mise en place à l’échelle nationale sans attendre un consensus européen. Cette position est défendue par la DGTPE dans le cadre des « comop » du Grenelle. Elle pense que toute fiscalité ou défiscalisation doit réellement être alignée sur le coût des externalités, pour éviter de grosses distorsions et des dépenses fiscales inutiles. Le contreexemple des subventions pour l’isolation des habitations est édifiant. Le niveau relatif des subventions en équivalent €/tCO2 pour les fenêtres isolantes est disproportionné par rapport à celles relatives à l’isolation des murs. Un autre exemple est celui de la défiscalisation des chaudières moins polluantes, qui a représenté une dépense fiscale de 2 milliards d’€ au lieu des 500 millions prévus. III.3.c. Discours commun Sarkozy Brown (TVA verte) Le Premier ministre britannique avait fait en 2006 une demande de TVA réduite auprès de la Commission européenne, pour les produits à faible consommation d’énergie. La Commission européenne a proposé début juillet 2007 une refonte générale des taux de TVA réduits à l’horizon 2010. A la Commission, on se dit «ouvert» à ce genre de propositions qui participent à la lutte contre le réchauffement. Une proposition de TVA verte, portée par les gouvernements français et britanniques a été évoquée au conseil Ecofin de décembre 2007, puis, semble-t-il, écartée. Elle pourrait consister à abaisser le taux de TVA à 5,5% sur les produits « écologiques ». Cela n’affecterait donc pas les produits alimentaires courants, dont c’est déjà le taux. III.3.d. Position de l’ADEME Le 4/01/2008, nous avons rencontré Christine Cros, chef du Département éco-conception et consommation durable à l’ADEME. L’agence a participé à la démarche Casino d’étiquetage environnemental (cf. III.5.a). L’entretien a par ailleurs abordé les autres questions étudiées dans le cadre de notre étude. L’ADEME propose qu’un étiquetage multicritère soit préféré à un étiquetage uniquement carbone, sous peine de transferts massifs de pollution. Toutefois, l’indicateur carbone présente l’avantage d’avoir le bilan le plus simple à établir, puisqu’il s’agit essentiellement de la consommation d’énergie. De plus, cet indicateur est transversal, il s’applique à tous les 31 produits. Enfin, il s’inscrit bien dans l’objectif de division par 4 des émissions CO2 à horizon 2050. Ceci dit, sa pertinence peut être remise en question : peut on vraiment comparer du poulet à du produit vaisselle ? Que veut-on réellement comparer ? Selon Christine Cros, le CO2 n’est pas en général le principal enjeu environnemental pour les produits de grande consommation. Un indicateur par type de famille de produits pourrait être plus pertinent. La meilleure méthode à ce jour pour analyser l’impact environnemental reste l’ACV, outil normalisé internationalement et qui intègre les émissions du champ au recyclage, évitant ainsi les transferts de pollution. Concernant l’écolabel européen, qui reprend en partie les principes de l’ACV, elle pense qu’il souffre d’une mauvaise communication et d’un manque de notoriété, plus que d’une lourdeur administrative. Les marques ne s’y investissent pas, au contraire des MDD, car trop peu de consommateurs s’y intéressent : 12% des Français seulement le reconnaissent (souvent ceux qui consomment bio). Il représente moins de 1% du marché français. Christine Cros (ce n’est pas une position officielle de l’ADEME) est favorable à une TVA réduite sur les produits écolabellisés (européen et NF environnement). Elle pense que c’est peu réalisable à court terme en raison des modes de décision communautaires (cf. II.3.e et III.3.c). III.4. La grande distribution III.4.a. Casino Certains produits Casino ont déjà l’écolabel européen, mais celui-ci n’est pas assez connu des consommateurs. Le Groupe Casino a annoncé le 31 août (17) 2007 sa démarche environnementale innovante lors de la présentation de ses résultats semestriels. Avec le soutien de l’ADEME et le concours du cabinet BIO Intelligence Services (BIO IS), le Groupe Casino développe un étiquetage environnemental des produits à sa marque (2900 produits) qui devrait être mis en place progressivement en 2008. Cet étiquetage comprend 3 indicateurs : masse et contenu CO2 de l’emballage, recyclabilité, et distance parcourue. Il ne garantit pas des impacts minimisés, comme c’est le cas de l’écolabel officiel (NF-Environnement ou Ecolabel Européen) mais donne une information relative qui permet au consommateur de faire des choix éclairés sur la base des critères proposés. La collecte de détails a été commencée en janvier 2007 auprès des 450 fournisseurs directs et de leurs propres fournisseurs afin de couvrir l’ensemble du cycle de vie. Par la suite, seront ajoutés des indicateurs carbone incluant le mode de production, la transformation des produits et l’enjeu environnemental. Ainsi, pour le cabillaud, le problème est moins le carbone que l’épuisabilité de la ressource. L’étiquette a été testée par des panels consommateurs à l’automne 2007. BIO IS a contacté l’ADEME pour obtenir leur avis, leur soutien et leur garantie techniques (crédibilité de la démarche), et enfin leur appui financier. Leur accord a été un facteur déclencheur. En échange, ils ont incité Casino à annoncer son projet en amont du Grenelle 32 de l’environnement, pour faire avancer les questions d’étiquetage. L’idée de base de l’étiquette était de fournir une information brute au consommateur. Mais le Grenelle a développé l’approche carbone, qui a donc été préférée, même si Casino pensait que le multicritère était plus pertinent. BIO IS a donc : - cartographié les méthodes existantes : bilan carbone, cycle de vie, empreinte écologique… La méthode idéale serait une ACV multicritères. - conclu qu’il n’existait pas de méthode directement transférable sur 3000 produits à un coût acceptable, l’ACV étant longue et coûteuse à mettre en place. - Elaboré une méthode sur mesure basée sur une logique d’ACV - Testé cette méthode sur 15 produits tests : les fournisseurs ont répondu à un questionnaire ce qui a permis d’identifier quelles étaient les données qu’ils étaient prêts à fournir. - Elaboré un étiquette à 3 indicateurs : une ACV pour le transport (jusqu’au magasin), une ACV sur l’emballage et une info sur les déchets. - est en train de collecter des données pour réaliser cela sur les 3000 produits. D’autres indicateurs ont été envisagés : - consommation en eau / énergie : faisable chez les fournisseurs, mais pas sur toute la chaîne puisqu’on ne peut techniquement remonter jusqu’à l’agriculteur - déchets : beaucoup de fournisseurs sont des PME dont la connaissance de leurs propres flux est imparfaite. A ce jour, on ne sait pas mesurer tout le CO2 sur toutes les étapes. L’étiquette a été soumise à des tests de consommateurs en octobre, et à nouveau en janvier 2008. Elle pose un problème de packaging, avec ses nombreuses pastilles. La notion de km équivalent camion apparaissait aussi comme trop complexe. Elle semble néanmoins plus souvent comprise par les consommateurs que ce à quoi on aurait pu s’attendre. Reste que les consommateurs passent en moyenne 2 secondes à choisir un produit… Par contre ils lisent le packaging chez eux, donc mieux vaut que l’étiquette soit sur le produit plutôt que sur l’étalage. Selon BIO IS, certains acteurs se demandent si ce n’est pas du suicide pour les MDD (marques de distributeurs) que d’arborer un gros point rouge. L’objectif de Casino est réellement d’améliorer son impact environnemental, en commençant par lancer cette initiative, et non pas d’augmenter ses ventes, en espérant que celles-ci ne seront pas trop impactées négativement. Les produits les plus polluants auront progressivement à s’améliorer pour maintenir leurs parts de marchés. De même pour les fournisseurs, avec lesquels Casino travaillera pour aider cette amélioration. Elle ne permettra pas de distinguer 2 yaourts dans des pots en plastique, mais la différence entre un pot en verre et un en plastique existera. Cette démarche BIO IS / Casino / ADEME sera rendue publique, afin d’être adaptable par d’autres grands distributeurs. Ceux-ci ont en effet été marqués par l’échec de l’information nutritionnelle, où chacun a lancé ses indicateurs, pour au final noyer le consommateur. Selon Rémy Risser (DDD du MEDAD, cf. III.3.b), le projet d’étiquette a déjà évolué vers quelque chose de très différent et de plus simple à lire pour le consommateur. La nouvelle étiquette à l’étude chez Casino est du type : 33 AGRICULTURE EMBALLAGES Indication globale type g de CO2 TRANSFORMATION TRANSPORT ATTENTION : schéma indicatif, à vérifier (code couleur aléatoire) III.4.b. La FCD Nous avons eu le 30/01/08 un entretien téléphonique avec Agathe Grossmith, responsable environnement et transport de la FCD (Fédération des entreprises du commerce et de la distribution). Démarche Casino : la FCD n’est pas intervenue, c’est une initiative Casino avec l’appui de l’ADEME. Travaux en cours à la FCD : La FCD a mis en place un groupe de réflexion sur le développement durable, portant sur la santé et l’environnement, suite à un consensus pour la mise en place d’une méthodologie commune. L’hypothèse d’une ACV complète n’est pas une piste de travail (coût trop élevé), mais plutôt l’utilisation de données statistiques assez généralistes. Le groupe réfléchit notamment à la mise en place d’une information honnête, généraliste (sans détailler le CO2) et ciblée selon les types de produits (ex : pour le cabillaud, communiquer sur le problème central qui est la biodiversité). L’idée est d’inclure par la suite les industriels dans la réflexion et l’ADEME. La FCD a signé le 29/01/2008 une convention avec le MEDAD (25), qui engage les distributeurs à notamment : « Informer les consommateurs sur les principaux impacts environnementaux des produits de consommation courante : expérimentation dès 2008 sur un échantillon représentatif d’environ 300 produits. Cette démarche collective et concertée, une première en Europe, sera progressivement étendue, à compter de 2010, en fonction des résultats obtenus ». doubler en 3 ans le nombre de produits à éco-label généraliser les bilans carbone 34 Fiscalité : la FCD serait plutôt défavorable à une démarche de taxation ou d’éco-contribution, car la priorité est selon elle le pouvoir d’achat qu’il ne faut pas entamer. Elle est également défavorable aux systèmes bonus - malus. En revanche, elle est favorable à une TVA réduite pour les produits écologiques. III.4.c. Tesco Ce groupe de grande distribution (n°1 au Royaume-Uni) a annoncé en janvier 2007 le prochain étiquetage de tous ses produits alimentaires sous marque de distributeur (70.000 produits), dans le cadre d’un partenariat avec Carbon Trust (cf. infra). Dans un deuxième temps, reconnaissant des difficultés de mise en œuvre, Tesco a annoncé qu’il commencerait avec 30 produits, répartis dans 5 catégories (cf. Carbon Trust en III.2.c). Selon M. Misiga de la DG ENV (cf. III.2.d), Tesco s’est rendu compte que la démarche initialement envisagée serait trop chère, trop complexe et trop longue à mettre en oeuvre. Tesco a par ailleurs annoncé en septembre 2007 la création d’un institut de recherche sur l’impact environnemental des produits (« consommation durable »), en partenariat avec l’université de Manchester (25 millions £). III.4.d. BRC Le British Retail Consortium est l’équivalent de la FCD française au Royaume-Uni. BRC a soutenu le Green Claims Code (cf. II.2.b). Aujourd’hui (communiqué de presse du 30/01/2008), cette association soutient des démarches concertées de plans d’actions avec des objectifs à atteindre en termes de réduction des émissions de CO2. Considérant que le Royaume-Uni est en avance dans ce domaine avec le Carbon Reduction Commitment (CRC, cf. III.2.c), elle propose d’élargir cette méthodologie à l’Europe entière. Le BRC insiste sur la priorité du maintien du pouvoir d’achat et soutient donc une fiscalité réduite pour les produits écologiques, y compris une réduction des taxes douanières européennes existantes qu’il considère comme de l’anti-dumping orienté notamment vers la Chine. III.4.e. MIGROS et Walmart En Suisse, selon la presse l’étiquetage carbone. (29) , la MIGROS a mis en place un groupe de travail sur le Aux Etats-Unis, le groupe Walmart de grande distribution (n°1 aux Etats-Unis) s’est engagé dans différentes démarches de réduction de son empreinte CO2. Il a annoncé qu’il allait demander à ses fournisseurs de mesurer leurs émissions de CO2. 35 III.5. Les ONG III.5.a. Position du WWF Nous avons rencontré le 06/02/2008 au WWF France Damien Demailly (chargé de mission Energie Climat) et Grégoire Even (responsable des partenariats entreprises). A propos de l’étiquetage : le WWF a des projets de partenariat, notamment avec Carrefour, Castorama et la Caisse d’Epargne. De façon générale, WWF soutient un étiquetage multicritère, pas uniquement centré sur le CO2. Le WWF reçoit de nombreuses sollicitations sur le sujet et prévoient donc le développement de partenariats, mais sans proposer des labels avec logo WWF, pour ne pas se substituer aux politiques publiques. Pour ce quoi concerne Carrefour, est prévu un étiquetage avec empreinte écologique (impacts énergie, eau, biodiversité… pondérés qui donnent une note globale, peut-être en équivalents de nombre d’hectares de ressources). Pour l’électroménager, les critères pourraient être l’extraction de matières premières, la recyclabilité, la consommation énergétique et pour l’alimentaire, les pesticides, l’emballage… Pour ce qui concerne la Caisse d’Epargne, le WWF va contribuer avec le cabinet de consultants Utopies à une méthode d’étiquetage des produits financiers d’un point de vue environnemental. L’originalité de la méthodologie est sa transparence totale, avec des logiciels en open source et donc vérifiables, ce qui facilite sa réappropriation par d’autres acteurs. Fiscalité : Le WWF considère que la taxe à l’aval est trop complexe à mettre en place. De plus, les quotas carbone créant déjà une internalisation pour les grands groupes, il faudrait alors les détaxer. Il est en revanche favorable à une taxation à l’amont, tout à fait faisable selon lui, même au niveau français. Pour Damien Demailly, un système de taxation à l’aval sur les produits pousserait les lobbies à défendre des niveaux de taxation qui modifieraient pas les parts de marché (ce qui selon lui était le cas pour Eco-emballages) et ne permettraient donc pas d’atteindre l’objectif de modification des comportements. Pour ce qui concerne une modulation de TVA, le WWF y serait favorable, en incluant l’environnement dans les clauses permettant les taux réduits. Ce dispositif ne sera possible de manière simple que sur des classes de produits, par exemple les ampoules à basse consommation. Le WWF ne participant pas aux « comop » du Grenelle, il est dans l’expectative et déplore que l’Etat considère que les ONG n’y ont pratiquement plus leur place, sauf au cas par cas. III.5.b. Position de la Fondation Nicolas Hulot (l) Au cours de la campagne présidentielle, la FNH a fait adhérer à son « Pacte Ecologique » les candidats des principaux partis, dont Nicolas Sarkozy. Les discours des pouvoirs publics actuels se sont en partie inspirés des cinq propositions qui y ont été faites. Parmi celles-ci, la seconde porte spécifiquement sur le carbone : « Il est donc indispensable de mettre en place une taxe carbone qui permette de provoquer volontairement une baisse de nos émissions de gaz carbonique et de notre consommation d’énergie fossile avant que nous y soyons brutalement contraints. Cette taxe, applicable au 36 pétrole, au gaz et au charbon, croîtrait de manière progressive, jusqu’à ce que la division par quatre des émissions soit atteinte. La taxe s’appliquera à tous, administrations, entreprises et ménages. Elle permettrait une évolution de nos systèmes d’organisation économique et de transport, en encourageant le changement des comportements ainsi que le recours à d’autres sources d’énergie. Elle serait accompagnée de mesures compensatoires pour les secteurs économiques et les ménages les plus fragiles. » 37 IV. NOTRE ANALYSE DES DEMARCHES PREVISIBLES ET SOUHAITABLES Cette quatrième partie présente notre vision de l’avenir, quant aux démarches qui se préparent et celles qui ont le plus de chances d’aboutir, et formule des propositions sur les méthodes qui nous semblent être les plus efficaces. Le premier paragraphe trace les perspectives en termes d’étiquetage et d’information. Le deuxième présente une synthèse du « mini-sondage » que nous avons réalisé sur la base du projet initial d’étiquetage de Casino. Enfin, le troisième paragraphe trace les perspectives en matière de fiscalité et d’internalisation des coûts. IV.1. Perspectives en matière d’information environnementale De manière certaine il y a un avenir pour l'information environnementale des produits. Que cela soit du côté des industriels ou de celui des institutions, la volonté de développer une information environnementale pour tous les produits de consommation est présente. De nouvelles démarches sont régulièrement révélées. Le développement d'une telle information sera donc assez rapide, d'autant plus que l’intérêt des consommateurs pour une « étiquette environnementale »se confirme, ce que souligne notamment et le sondage que nous avons effectué, malgré la taille réduite et le biais de l’échantillon testé. Avec l’ADEME en France ou Carbon Trust au Royaume-Uni, les gouvernements ont établi des structures pour mettre progressivement en place des mesures et des plans de réduction des GES de concert avec le secteur privé. Leurs méthodes se sont basées sur des approches simplifiées d’ACV développées sur l’étude de quelques produits. En s'appuyant sur ces organismes, et n'attendant pas une réglementation, certains industriels et entreprises de la grande distribution lancent des projets d’étiquette environnementale. La difficulté technique à laquelle ces projets se heurtent est bien supérieure à leurs attentes : mesurer de façon fiable l’impact écologique de leurs produits se révèle complexe, long et donc coûteux. Bien trop pour l’étendre à 70 000 produits, même pour un groupe comme Tesco. Mais le bénéfice d'image à en retirer est suffisamment intéressant pour tenter de nombreux groupes. Ces démarches volontaires du privé peuvent prendre des formes différentes selon les cas : Walkers, avec ses chips, a affiché sur ses produits les grammes de CO2 ; Innocent propose une information plus complète, mais uniquement sur son site web ; et Casino va proposer de son côté une étiquette multicritères. Cette diversité va dans un premier temps être vraisemblablement préjudiciable, mais elle est à notre avis nécessaire : l'expérimentation sur le consommateur permettra aux meilleures démarches de ressortir. Avec le temps, une uniformisation s'opérera, on peut espérer vers la meilleure démarche. Il est vraisemblable qu'une information environnementale standardisée s'établira très prochainement en France, et probablement en Europe également. Déjà, la FCD a signé sa convention avec le MEDAD s’engageant à étiqueter 300 produits d’ici la fin 2008. Et Eurocommerce avancerait de même avec l’Union Européenne. En revanche, il est peu vraisemblable que l'on ait recours à une norme, le processus pouvant très certainement 38 s'enclencher sans elle. Etablir une norme prend du temps, on peut penser qu'une information standardisée pourra, si la volonté des pouvoirs publics est là, apparaître d'elle-même plus rapidement, la norme n'arrivant éventuellement que par la suite. Dans cette course vers l'information environnementale, la grande distribution a une longueur d'avance sur les industriels de la grande consommation. Prendre trop de retard dans ces démarches par rapport à la grande distribution signifierait rendre les industriels tributaires des méthodes imposées par la grande distribution. Tout le problème pour les industriels est de définir le but final de l’information : s'agit-il simplement d'une information transmise au consommateur, ou servira-t-elle à terme à l'instauration d'une taxe ? En ce qui concerne le contenu de l'information, nous pensons qu'il serait dommage de limiter l'information environnementale au seul carbone, ce qui pourrait amener le consommateur à faire l'amalgame entre émissions de CO2 et pollution de l'environnement. Il existe selon nous une demande du consommateur en faveur d'une information plus large. Elle ne doit néanmoins pas être trop complète non plus, ce qui pourrait perturber, tromper l'acheteur. Complexe, elle perdrait son rôle explicatif. Il est néanmoins souhaitable que le consommateur puisse trouver tout complément d'information sur l'affichage environnemental qu'il souhaite sur un site web dédié. Si l'on veut tendre vers le plus simple, on peut imaginer une information CO2, quantifiée, complétée par l'écolabel européen par exemple, ce qui favoriserait les meilleurs produits. Ceci, bien entendu, nécessite un développement conséquent de l'écolabel européen. Un parallèle rapide peut être fait avec l'information nutritionnelle qui propose de la même manière des données quantifiées, auxquelles s'ajoutent une mention valorisante (0%, light...) uniquement dans le cas des produits les plus « sains ». Plus efficace peut-être serait un diagramme multicritères bien construit, du type Green Index proposé par Timberland (cf. partie II), complété par une valeur en grammes de CO2 émis, ou semblable à ce que construit Casino (cf. partie III). De multiples tests consommateurs seraient nécessaires pour juger de son efficacité, mais on peut penser qu'un tel diagramme pourrait davantage marquer le consommateur. L'impact sur l'achat serait plus grand et le consommateur mieux informé et donc plus conscient des problèmes environnementaux en jeu. IV.2. Notre « mini-sondage » sur l’étiquetage environnemental (Casino) • Hypothèse testée La pertinence d’une information environnementale à destination du consommateur nous semble devoir être au cœur de son élaboration. L’argument selon lequel les acteurs de la grande distribution ont été conduits à entreprendre leurs différentes démarches d’étiquetage suite à leur prise de conscience d’une véritable demande du consommateur a été récurrent lors de nos entretiens. Cela nous semblait une hypothèse à valider : les consommateurs sont-ils en demande d’une étiquette environnementale, et dans l’affirmative, qu’en attendent – ils ? Au Royaume-Uni, un sondage (GfK NOP survey) (16) montre que 65% des consommateurs seraient plus enclins à acheter un produit avec une empreinte CO2 réduite. Plusieurs autres sondages sont disponibles au Royaume-Uni sur le sujet (16). En France, il n’existe pas de sondage d’envergure relatif à cette question. 39 • Méthodologie : sondage et échantillon choisis Afin de nous donner quelques pistes de réponse, nous avons construit un questionnaire que nous avons diffusé autour de nous (texte en Annexe 2). Celui-ci visait à : - définir les principaux critères d’achat de l’interrogé; - appréhender sa sensibilité environnementale : intérêt pour les questions environnementales, perception de son propre impact et de ses leviers d’actions, volonté de réduire son empreinte. - Obtenir son avis sur le premier projet d’étiquette de Casino (pertinence, lisibilité, intérêt…). - Lui demander ce qu’il attendrait en général de ce type d’étiquette. Nous tenons à souligner que notre échantillon de 200 personnes n’est pas et ne se veut pas représentatif de l’ensemble des consommateurs français. Nous avons collecté des réponses en provenance de nos réseaux respectifs, de sorte que l’échantillon regroupe : - des étudiants d’AgroParisTech cursus Agronomie, de niveau bac +2 à bac + 5, sensibilisés à l’environnement par leur formation. - des étudiants de l’ESPCI, de niveau bac +2 à bac + 6, de formation scientifique et spécialisés en physique / chimie. - des étudiants de l’ENGREF, de niveau bac + 5 à bac + 7, sensibilisés à l’environnement par leur formation. - des étudiants chinois de niveau bac +2 à bac + 5 en formation dans les différentes écoles d’ingénieurs de ParisTech. - 31% d’échantillon aléatoire, regroupant des personnes d’âge, de situations professionnelles et de localisations variés (catégorie « divers »). Composition de l'échantilllon Caractéristiques : Agros 31% 37% Engref Moyenne d’âge : Espci 25,9 ans Ecart type : 7,2 ans Elèves chinois à Paris Age maximum : 59 ans autres Age minimum : 18 ans 10% 12% 10% • Principaux résultats (résultats complets en Annexe 3) Les critères d’achat de l’échantillon global sont, par ordre d’importance classé de 1 à 5 : Prix 1 2 Qualité environnementale Commerce équitable 3 4 Très imp. 5 Pas imp. Composition Marque Les trois catégories d’étudiants français placent le prix en 1er critère de choix, alors qu’il n’est que 2nd derrière le critère « composition » pour les catégories « étudiants chinois » et 40 « divers ». Le critère « qualité environnementale » arrive en 3ème critère, sauf pour les étudiants chinois qui lui préfèrent le critère « marque ». Vis-à-vis des problèmes liés à l'augmentation de l'effet de serre, vous sentez vous … ? 6% 1% très concernés Les personnes interrogées se sentent massivement concernées ou très concernées par les problèmes liés à l’augmentation de l’effet de serre (cf. graphe ci-contre). assez concernés Parmi les catégories qui composent l’échantillon, on peu concernés peut noter qu’il n’y a aucun 47% pas concernés « ESPCI » ni aucun « Engref » qui se sentent peu ou pas concernés. 80 % des personnes interrogées déclarent essayer de réduire leurs émissions de CO2, et en particulier les catégories « ESPCI » (88%) et « divers » (87%). A l’inverse, seuls 45 % de la catégorie « étudiants chinois » l’affirment. 46% Les principaux moyens mis en oeuvre pour cela sont : l’utilisation de moyens de transport moins polluants que la voiture individuelle (34% des moyens cités), la réduction de la consommation d’électricité (17%) et la baisse du chauffage (13%). Les leviers d’action de type achat responsable représentent en cumulé 20 % des actions : - 8% achètent des produits locaux ou de saison ; - 5% des produits considérés comme moins polluants, soit sur la base de green claims (détergents), soit reconnus comme tels (viande blanche vs viande rouge) - 5% achètent des produits ayant le moins d’emballage possible ; - 2% mangent bio. Il est à souligner que les écolabels n’ont été nommés qu’une seule fois. Les personnes qui citent ces leviers d’actions liés à leur mode d’achat les évoquent presque toujours en complément des autres moyens. 56 % d’entre elles sont des « agros ». Ainsi, 34% des « agros » utilisent ce levier, 21% des « divers », 15% des « Engref » et 15% des « étudiants chinois », et enfin 4,2% des « ESPCI». Une étiquette sur les produits de grande consommation indiquant leur bilan environnemental vous semblerait : 9% 37% 1% 53% Très utile assez peu inutile 90 % des personnes interrogées trouvent qu’une étiquette environnementale serait assez ou très utile. La catégorie la plus demandeuse est la « divers » dont 61 % la trouvant « très utile ». A l’opposé, la catégorie « étudiants chinois » n’en compte que 30%. C’est également la seule catégorie dont 5% juge l’étiquette « inutile ». Le 1er projet d’étiquette Casino a reçu en tant qu’étiquetage environnemental la note globale de 6,7/10. Des écarts types importants ne permettent pas de conclure sur des différences majeures entre catégories, mis à part la faible note d’impact attribuée par les « étudiants chinois » (4,9/10, seule note inférieure à 5). 41 Notes du 1er projet d'étiquetage environnemental Casino 10,0 9,0 8,0 7,0 6,0 5,0 4,0 3,0 Lisibilité Compréhensibilité Impact Note globale 2,0 moyenne 1,0 écart type 0,0 Les commentaires libres sur cette étiquette ont consisté en : - Des critiques de la forme (47,6% des commentaires) : critique de la lisibilité, du manque de clarté, des unités choisies pour le transport, de l’excès d’information. - Des critiques du fond (13,1%) : interrogations sur la robustesse des données, l’absence de prise en compte des autres impacts environnementaux, de la fabrication et de l’aspect social du développement durable. - Des remarques sur l’utilité de l’étiquette (25%): elle serait utile si l’on possédait un référentiel CO2 et/ou si elle était généralisée à tous les produits. 4,8% pensent qu’elle ne changera pas les comportements si le prix n’évolue pas en fonction, contre 3,8% qui pensent l’inverse. 2,8% la trouvent si utile qu’ils n’achèteraient pas le produit… Les autres remarques consistent essentiellement en des commentaires positifs sur le principe de cette étiquette (13,1%). Interrogées sur ce que devrait comporter une étiquette environnementale, les personnes de notre échantillon souhaiteraient : - Que soient pris en compte d’autres aspects (52,3%) : empreinte écologique de la fabrication du produit (18,4%), épuisabilité des ressources / environnement hors CO2 (9,8%), recyclabilité du produit ou quantité de matières recyclables utilisées (8,6%), origine du produit (7,0%), aspect social du développement durable (3,1%), effort général de l’entreprise pour réduire ses émissions de CO2 (2,0%), … - Qu’elle soit plus simple (33,2%) : préféreraient une seule note globale (12,1%), pouvoir comparer rapidement les produits grâce à un référentiel (8,2%), une information plus claire (7%), plus lisible (5,5%). On peut identifier deux groupes cohérents et distincts entre ceux qui souhaitent voir apparaître une étiquette plus complète d’une part, et ceux qui en veulent une simplifiée de l’autre. La catégorie appuyant le plus la version simplifiée est la catégorie « divers » (38,2% des commentaires), ce qui représente 41,9% de ces personnes. 42 Recommendations sur l'étiquette environnementale 100% 90% 80% 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0% souhaitent une étiquette plus complète souhaitent une étiquette simplifiée souhaitent une note globale agros IV.3. espci engrefs divers étudiants chinois Perspectives en matière d’internalisation De nombreuses mesures fiscales sont envisageables pour internaliser en tout ou partie l'empreinte CO2 des produits. Nous allons ici discuter leur faisabilité à court terme au regard des problèmes théoriques inhérents à chacune et des propos recueillis dans le cadre de l’étude. Dans le cas de la TVA, il est quasiment certain qu'une TVA verte ne se fera pas dans les prochaines années. Modifier les taux de TVA est très complexe, se décide à l'unanimité des 27 Ministres des Finances des Etats-membres de l'Union Européenne. Or, la TVA verte va à l’encontre des intérêts de nombreux pays comme les pays scandinaves. En imaginant que la mesure fiscale soit un minimum incitative, on peut penser que les producteurs dont les produits subissent une TVA plus élevée amélioreraient assez rapidement leurs procédés ; il faudrait donc réévaluer les taux de TVA qui leur seraient attribués. Vu la complexité des modifications de la TVA, revoir le système périodiquement est inenvisageable. De plus, un tel outil ne serait pas totalement satisfaisant car, en l'absence d'une méthode normalisée et peu coûteuse de calcul des émissions, il serait impossible de moduler la TVA en fonction des émissions et donc en fonction des impacts réels des produits. Seule une modulation par classe de produits, ou attribuée aux produits bénéficiant d’un label officiel, pourrait être proposée. Enfin, les revenus de la TVA ne sont pas attribués à un fonds particulier mais sont intégrés au budget global des Etats. Il serait donc difficile de savoir si l'argent recueilli servirait dans les faits à la réduction des émissions de GES. En tout état de cause, la TVA sera rediscutée en 2010, mais elle a peu de chances d’être instaurée. Plus en amont, une taxe carbone serait la solution la plus simple pour internaliser les empreintes carbone. La taxe toucherait les produits énergétiques et se répercuterait sur toute la chaîne jusqu'au consommateur, le prix des produits augmentant alors d'une valeur correspondant exactement à leur impact. Cependant, instaurer un tel système ne serait efficace qu’à l’échelle internationale, ou accompagné d'un ajustement de taxes aux frontières. Or, dans un cas comme dans l'autre, la France ou l'Europe se heurteraient à des difficultés diplomatiques trop importantes pour les gouvernements en place. Il ne semble pas que les gouvernements européens aient la volonté de porter cet outil fiscal à ce niveau. Les 43 discussions entre membres sont repoussées année après année. Personne ne semble croire à la possibilité d'une telle taxe à moyen terme. La mise en place des quotas carbone va peut-être changer la donne. La décision de faire payer les quotas a été repoussée à 2011 et il est vraisemblable que la fiscalité environnementale ne sera que peu modifiée d'ici là. Cette décision ne s’appliquera qu’aux industries lourdes. Avec une tonne de CO2 à 20 ou 30€, l'impact sera très faible. Mais si le prix des permis augmente, il y aura une vraie répercussion sur l’ensemble de la chaîne de production. Là encore, la mesure devra être accompagnée d'un ajustement de taxes aux frontières, avec les problèmes diplomatiques qui l'accompagnent. En revanche, le bonus/malus semble avoir le vent en poupe en France, et devrait être établi pour quelques catégories de biens d'ici quelques mois. Il a pour avantage, et inconvénient, de s'auto-compenser. Le budget de l'Etat n'est pas modifié, le pouvoir d'achat n'est pas ou peu touché, cependant aucun fonds supplémentaire ne peut être attribué à la lutte contre le changement climatique. De plus, sa portée est limitée puisque la mesure ne touche que certaines catégories de biens. Par ailleurs, l'assiette des bonus/malus ne sera malheureusement pas calculée en fonction des impacts réels des produits, pour les mêmes raisons que celles évoquées dans le cas de la TVA. Enfin, techniquement il est aujourd'hui possible de créer des bonus/malus pour des critères portant sur l'utilisation (du type consommation énergétique) mais cela ne semble pas envisageable à court terme pour les phases de conception, encore une fois pour des raisons de méthodes et de coûts des calculs d'émissions de GES. Il semble donc que d'ici 2011, seul le bonus/malus puisse être appliqué. Malheureusement, cet outil n'apporte qu'une solution partielle et peu efficace au problème. En effet, l'assiette des mesures fiscales envisagées n'est pas proportionnelle aux impacts des produits. On peut se demander également si taxer les produits par catégories sera incitatif pour les producteurs, ce qui doit être un des buts d'une telle mesure. Il faudrait envisager une responsabilité élargie des producteurs (REP) prenant en compte les émissions de CO2. Principe de la REP : Initialement promu par l'OCDE, c'est un dispositif qui transfère la responsabilité en matière de gestion des déchets vers les producteurs. Il y a donc internalisation des coûts, avec si elle est bien construite, incitation à prévention, car le déchet le moins cher à recycler est celui qu'on ne produit pas. Pour cela il faut que la contribution soit suffisamment élevée, car le producteur réduit à la source tant que le coût de prévention est inférieur au niveau de la contribution, puis il se contente de payer la contribution résiduelle sans chercher à réduire plus ses déchets. Comment construire une REP ? Il serait déjà aujourd'hui impossible de construire un système équivalent à Ecoemballages, avec une contribution quantifiable par produit, et ce tant qu'aucune méthode d'ACV complète ne pourra discriminer deux produits similaires pour un coût relativement faible. Leurs émissions de CO2 seraient moyennées et la contribution CO2 calculée sur ces moyennes. Par conséquent, un producteur ne serait pas incité à diminuer ses émissions sur le produit, puisqu'il paierait toujours la même contribution. En revanche, on peut imaginer une éco-contribution portant sur le bilan carbone des entreprises. On calculerait leurs émissions globales, on définirait une contribution à la tonne de carbone émise, et par une simple multiplication, la contribution totale peut être trouvée. Des questions se posent néanmoins. Peut-on faire des bilans carbone assez précis, rendre ses bilans obligatoires pour toutes les entreprises au niveau national ? Qui gérerait la somme des contributions ? Un parallèle peut être fait ici avec la mission biodiversité de la Caisse des Dépôts, qui prélève une contribution pour les grands projets (autoroutes, aéroports...) correspondant à l'impact de ces projets sur la biodiversité, mutualise les différentes contributions et les affecte à des projets de 44 restauration ou de préservation de la biodiversité. Un fonds équivalent pour le carbone permettrait de mutualiser toutes les éco-contributions carbone et les redirigerait vers des projets permettant de réduire les émissions de CO2 comme les énergies renouvelables, les transports en commun, l’isolation... Reste la question des produits importés. Faudra-t-il les taxer ? Cela dépendra du niveau d'une telle contribution. A 20€ la tonne, nous avons vu que l'effet sur le prix du produit était négligeable. 45 CONCLUSION La prise de conscience de l'enjeu lié aux réductions des émissions de gaz à effet de serre est réelle, à la fois du côté des consommateurs, comme le montre à son échelle le sondage que nous avons réalisé, mais aussi du côté des industriels et des pouvoirs publics. L'information environnementale est un domaine en plein essor, de nombreuses démarches se mettent en place, principalement sous l'impulsion des distributeurs en France. La diversité des démarches risque dans en premier temps de dérouter le consommateur et il est souhaitable qu'à terme seules quelques démarches subsistent, espérons-le les meilleures. L'internalisation de l'empreinte CO2 quant à elle est en discussion. Il nous paraît impossible d'internaliser aujourd'hui le coût carbone produit par produit à grande échelle, mais le faire par catégorie est réalisable. Une taxe carbone serait la solution la plus simple à mettre en oeuvre et la plus efficace, mais serait probablement la plus difficile à faire passer politiquement. Cependant, ce sont plutôt les bonus/malus et la TVA verte qui semblent aujourd'hui sortir du lot. Il en résultera une grande variété de systèmes, distorsifs, coûteux, complexes à mettre en place, et même parfois contre-productifs, qui seront peut-être trop opaques pour le consommateur. 46 Références bibliographiques 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 LOERINCIK (Yves), Environmental impacts and benefits of information and communication technology infrastructure and services, using process and input-output life cycle assessment, Thèse EPFL, no 3540, 2006. ABBAS (Mehdi), L’Organisation mondiale du commerce et l’environnement : Aspects institutionnels et réglementaires, Cahier de recherche LEPII, Série EPIID, N° 2, 2004. 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Etiquetage : généralités 1. Classez par ordre d’importance (de 1 à 5) ces différents critères de choix d’un produit de grande consommation (1=le plus important ; 5=le moins important): Æ Æ Æ Æ Æ Composition du produit Prix Marque Qualité environnementale Commerce équitable _ _ _ _ _ 2. Quel temps passez-vous à choisir un produit (en secondes) ? Æ Produit alimentaire Æ Produit d’entretien _ _ 3. Vis-à-vis des problèmes liés à l’augmentation de l’effet de serre, vous vous sentez : Très concerné Assez concerné Peu concerné Pas concerné 4. Essayez-vous de diminuer vos émissions de CO2 ? Oui Non Si oui, comment ? …………………………………………………………………………………………………………………… ………………………………………………………………………………………………………………….. 5. Une étiquette sur les produits de grande consommation indiquant leur bilan environnemental vous semblerait : Très utile Assez utile Peu utile 51 Inutile L’étiquette environnementale de Casino 6. L’entreprise Casino va proposer prochainement sur ses produits une étiquette environnementale. En voici un exemple pour un paquet de 4 filets de cabillaud : Æ Notez sur 10 la lisibilité de cette étiquette : Æ Notez sur 10 sa compréhensibilité : Æ Notez sur 10 son impact sur vos achats : _/10 _/10 _/10 Commentaires : ……………………………………………………………………………………………………………… ……………………………………………………………………………………………………………… ……………………………………………………………………………………………………………… Æ Par rapport à ce que vous attendriez d’un étiquetage environnemental, quelle note donneriez-vous à l’étiquette Casino ? _/10 7. Que devrait indiquer selon vous une étiquette environnementale ? Sous quelle forme ? ………………………………………………………………………… ………………………………………………………………………… ………………………………………………………………………… ………………………………………………………………………… ………………………………………………………………………… Informations vous concernant (pour l’analyse des résultats) Age : Activité (précisez le domaine de compétence) : Commune de résidence : 52 Annexe 3: Résultats du sondage Echantillon : Echantillon complet nombre réponses 200 age moyen 25,9 écart type age max 59 age min Agros 74 37 % 7,16 18 Echantillon complet Composition 2,01 Prix 1,96 Marque 3,76 Qualité environnementale 3,24 Commerce équitable 3,99 Engrefs 20 10 % Espci 24 12 % Et. chinois 20 10 % espci 2,0 1,8 3,7 3,0 3,7 Et.chinois 1,9 2,1 3,1 3,9 4,2 divers 31% 62 Question 1 : agros 2,2 1,8 3,5 3,2 4,1 engrefs 1,9 1,8 4,0 3,2 4,2 divers 1,9 2,2 4,2 3,1 3,9 Représentation graphique : notes inversées (1=moins important, 5 =très important) Composition du produit 3,5 3,0 2,5 agros 2,0 1,5 Commerce mmerce équitable engref Prix Prix 1,0 équitable espci 0,5 0,0 élèves chinois autres Marque Qualité environnementale Question 2 : Pas exploitable. L’unité et le pas de temps auraient du être précisés dans la question. Question 3 : Echantillon complet très concernés assez concernés peu concernés pas concernés total en % 92 46% 94 47% 12 6% 2 1% agros total en % 39 53% 28 38% 7 9% 0 0% engrefs total en % 9 45% 11 55% 0 0% 0 0% 53 espci total en % 13 54% 11 46% 0 0% 0 0% Et.chinois total 4 12 3 1 en % 20% 60% 15% 5% divers total en % 27 44% 32 52% 2 3% 1 2% Les Agros - concernés par l'environnement ? 0% Les ENGREF 9% 0% 0% Très concerné assez 45% 53% 38% peu 55% pas 2% Les ESPCI 0% Divers Les étudiants Chinois en France 3% 0% 5% 20% 15% 44% 46% 54% 52% 60% Question 4a): Echantillon complet oui 160 80% non 39 20% agros oui 61 82% non 13 18% engrefs espci 16 80% 4 20% 21 88% 3 13% Et.chinois divers 9 45% 11 55% 53 87% 8 13% Question 4 b) ouverte : type de solution citée choix de produits ayant le moins d'emballages réduction de la consommation d'électricité (lumière, veille…) utilisation des transports en commun ou du vélo réduction du gaspillage (papier, encre, sacs plastiques) baisse du chauffage tri sélectif réduction de l'eau (douches) acheter des produits moins polluants (- de viande rouge, détergents écologiques) manger des produits locaux/de saisons manger bio label européen achats de marques à bonne image environnementale total citations 54 nombre de citations 20 64 131 20 51 31 11 18 31 8 1 1 387 % citations 5,2% 16,5% 33,9% 5,2% 13,2% 8,0% 2,8% 4,7% 8,0% 2,1% 0,3% 0,3% Question 5 : Echantillon complet agros Engrefs Très utile ” 106 53% assez 74 37% peu 18 9% inutile 1 1% total 199 39 53% 29 39% 6 8% 0 0% 74 espci 10 50% 8 40% 2 10% 0 0% 20 Les Agros: 14 58% 8 33% 2 8% 0 0% 24 Les ENGREF 8% 0% Et.chinois divers 6 30% 10 50% 3 15% 1 5% 20 37 61% 19 31% 5 8% 0 0% 61 0% 0% Très utile 45% assez peu 53% 39% 55% inutile Les étudiants Chinois en France Les ESPCI Divers 8% 0% 5% 8% 0% 15% 30% 31% 33% 58% 61% 50% Question 6 a) : Echantillon complet lisibilité compréhensibilité impact note globale 6,8 écart type 7,0 6,5 6,7 agros 1,98 2,08 2,57 1,86 engrefs 7,1 7,6 6,2 7,1 6,0 5,8 6,7 6,1 espci 7,0 7,3 6,5 6,6 Et.chinois 6,5 6,2 4,9 5,2 divers 6,8 6,8 6,6 6,4 10,0 Agros 9,0 8,0 ENGREF 7,0 6,0 ESPCI 5,0 4,0 3,0 Etudiants Chinois à Paris 2,0 Les gens Lisibilité Compréhensibilité Impact 10 55 Note globale Question 6 b) ouverte : critique critique Nombre % de Encoura de fois du du utilité - qements citations cités format fond Commentaires sur l'étiquette Casino veut un benchmark CO2 / un référentiel trouve que c'est bien d'indiquer les déchets trouve les km/camion incompréhensibles trouve que c'est utile si généralisé trouve qu'il y a trop d'informations trouve ça illisible (trop petit) se demande si l'étiquetage est rentable? utile si rigoureux (pas de tricherie) ; quel contrôle ? intéressant mais ne changera pas les comportements intéressant et changera les comportements trouve qu'on a oublié la fabrication ne comprend pas veut rajouter les autres impacts environnementaux achètera plus le produit veut rajouter l’impact social trouve ça pertinent préfèrerait une note globale ne serait utile que si c'est taxé Total critique de la forme critique du fond utilité encouragements total 120 33 63 33 x x x x x x x x x x x x x x x x x 15 6,0% 7 2,8% 20 7,9% 19 7,5% 14 5,6% 28 11,1% 3 1,2% 7 2,8% 12 4,8% 9 3,6% 10 4,0% 45 17,9% 14 5,6% 6 2,4% 2 0,8% 26 10,3% 13 5,2% 2 0,8% 252 47,6% 13,1% 25,0% 13,1% 98,8% Question 7 ouverte : Recommandations pour l’étiquette: parler des ressources/ environnement hors CO2 parler de l'énergie consommée pour la fabrication donner une comparaison rapide, un référentiel être parlant, simple pouvoir lui faire confiance (rigueur, organisme référend) Identique à celle de Casino être plus lisible indiquer l'effort d'amélioration de l'entreprise avoir une standardisation EU donner une note globale prendre en compte l'impact social indiquer la recyclabilité/ la qté de matériaux recyclés idem Casino mais moins effrayant (pb image de marque) indiquer l'origine du produit indiquer uniquement l'impact principal pr l'env. indiquer la présence d'OGMs donner plus d'informations doit être accompagnée d'une taxe 56 veut d'autres veut moins nombre % de fois infos d'infos de citations cités x 25 9,7% x 47 18,3% x 21 8,2% x 18 7,0% 5 1,9% 25 9,7% x 14 5,4% x 5 1,9% 3 1,2% x 31 12,1% x 8 3,1% x 22 8,6% 4 1,6% x 18 7,0% x 1 0,4% x 4 1,6% x 5 1,9% 1 0,4% 257 souhaitent une note globale % direct % de la catégorie agros 10 29,4% 13,5% espci 3 8,8% 12,5% engref 3 8,8% 15,0% divers 14 41,2% 22,6% et. chinois 4 11,8% 20,0% total 34 souhaitent une information simplifiée agros espci engrefs divers étudiants chinois total 24 4 8 26 6 68 % de la nombre % direct catégorie 74 35,3% 32,4% 24 5,9% 16,7% 20 11,8% 40,0% 62 38,2% 41,9% 20 8,8% 30,0% 200 100,0% Recommendations sur l'étiquette environnementale 100% 90% 80% 70% 60% souhaitent une étiquette plus complète souhaitent une étiquette simplifiée 50% 40% 30% 20% 10% 0% souhaitent une note globale agros espci engrefs divers étudiants chinois 57 Annexe 4 : déclarations sur les bonus / malus écologiques : A) Interview de Nathalie Kosciusko-Morizet sur Planète Terra Politique (Article publié le : 18/12/2007) Planete Terra : Avez-vous évalué l’impact pour l’environnement du bonus-malus automobile ? Nathalie Kosciusko-Morizet [1] : J’ai toujours beaucoup de réticences à mesurer cet impact. Nous nous trouvons à un moment de l’histoire où l’évolution technologique est très rapide et où la sensibilité des acheteurs est très forte. Les vendeurs l’ont bien compris puisque les publicités sont de plus en plus écolos. L’un des objectifs du bonus-malus consiste à amener les constructeurs à déplacer la gamme. Les constructeurs auront en effet du mal à faire de la publicité écolo sur des voitures frappées par un malus. Notre mesure a un impact sur l’élasticité des prix mais elle possède, selon moi, un impact beaucoup plus fort sur la cohérence pour l’image de ces entreprises, que les études ne peuvent calculer. Planete Terra : Souhaitez-vous étendre le bonus-malus à d’autres produits que la voiture ? Nathalie Kosciusko-Morizet : Oui. Notre idée est de développer progressivement des systèmes de fiscalité auto-compensée à l’intérieur d’une même gamme de produits. Ce que nous faisons pour les voitures est à l’étude pour les ordinateurs et les télés, avec par exemple un malus pour celles dont les veilles consomment trop d’énergie. Le fait de créer des catégories est une façon de dire aux consommateurs : « Mettez vos achats en accord avec votre éthique ». Et d’obliger les producteurs à retirer du marché les produits moins bien classés, comme l’ont fait les fabricants de réfrigérateurs après l’étiquetage. Les études d’impact avaient sous-estimé cet aspect. Planete Terra : Les voitures françaises qui bénéficient du bonus sont les moins consommatrices. Beaucoup d’entre elles sont des véhicules diesel, émettrices de particules. Ne craignez vous pas de déplacer le problème ? Nathalie Kosciusko-Morizet : La France a obtenu l’obligation a partir de 2010 d’imposer des filtres à particules sur tous les véhicules diesel. Nous allons donc répondre à une partie du problème. Mais je crois que les constructeurs français se sont enfermés eux-mêmes dans la solution diesel, dont le bilan carbone est, c’est vrai, meilleur que l’essence. Mais ils se sont piégés dans leur argumentaire car pour le consommateur, de plus en plus sensible à l’argument écologique, on ne peut pas considérer qu’une voiture qui roule au pétrole est propre. La question n’est pas ce qu’elle consomme, mais les perspectives technologiques qu’elle ouvre. La voiture hybride (moteurs électrique et thermique), même si elle ne consomme à l’heure actuelle pas moins qu’un diesel, c’est nouveau. Les constructeurs français en sont conscients et travaillent sur de nouvelles technologies. Peugeot prépare par exemple une voiture hybride-diesel pour 2009. B) Interview de Jean Louis Borloo, RMC / Info / France, Thème n° 1 : Le bonusmalus, le 26/10/2007 J-J B : Pour le système de bonus-malus des plus ou moins polluants, quel est le montant de la taxe ? J-L B : Il n’est pas encore arrêté. Le principe est très clair : ce qui est sensiblement plus polluant à l’achat que la moyenne du parc aura une taxe annuelle et cette taxe va revenir en ristourne à ceux qui achètent des voitures moins polluantes que la moyenne de notre pays. 58 C’est un principe très simple bonus-malus. C’est d’ailleurs un principe qu’on va étendre à une vingtaine de familles de produits en grande consommation. J-J B : Lesquels par exemple ? J-L B : On va en débattre bientôt. Les produits qu’on pourra trouver dans les grandes surfaces, on va mettre ça au point. J-J B : Ça veut dire des produits alimentaires ? J-L B : Oui. Le principe est assez simple. Il y a une phrase qui dit « le Communisme est mort parce qu’il ne laissait pas dire la vérité économique. L’économie de marché va mourir si elle ne laisse pas dire la vérité écologique ». On a donc un prix d’achat quand on va dans un supermarché, mais son prix écologique n’est pas indiqué. L’idée c’est d’étiqueter l’ensemble des produits et parmi cela, tester dix ou vingt familles de produits. Les yaourts par exemple. Voir ceux qui peuvent bénéficier de ristourne parce qu’ils sont vertueux écologiquement, tandis que d’autres seront coûteux écologiquement et donc auront, indépendamment du prix d’achat, une petite taxe. Ça ne change rien pour le pouvoir d’achat des français puisqu’ils ont le choix entre un même produit. Payer la taxe économique ou avoir la ristourne écologique. 59 Annexe 5: Détail du bonus / malus automobile Basé sur les émissions de CO2 par km des véhicules, ce dispositif est un exemple de mise en pratique du principe de pollueur-payeur et vise à inciter les acheteurs à privilégier les voitures les plus sobres en carbone. • Montant et fonctionnement du bonus : L'automobiliste achetant une voiture propre, émettant moins de 130 grammes de CO2 par kilomètre bénéficie d'une prime à l'achat s'échelonnant entre 200 et 1.000 euros. Le bonus est déduit du prix d'achat TTC du véhicule et sera clairement identifié et visible sur la facture. • Montant et fonctionnement du malus : Les automobilistes qui achètent une voiture émettant plus de 160 grammes de CO2 au kilomètre s'acquittent d'une taxe au moment du paiement de la carte grise (de 200 à 2.600 euros). Le malus s'applique à la première immatriculation des véhicules en France depuis le 1er janvier 2008. Si c'est le concessionnaire qui procède à l'immatriculation du véhicule en préfecture, le montant du malus sera inclus dans la facture dans la catégorie des « frais d'immatriculation ». Si l'acheteur procède lui-même à l'immatriculation du véhicule en préfecture, il paiera le malus en même temps que la carte grise. • Cas des véhicules importés Les véhicules neufs directement achetés à l'étranger sont aussi soumis au bonus-malus. Les particuliers doivent impérativement conserver la facture ainsi que le certificat de conformité européen pour bénéficier du bonus. Le malus sera versé au moment de l'immatriculation. • Véhicules non concernés : Aucun malus ne sera prélevé et aucun bonus ne sera versé, en cas d'acquisition d'un véhicule dont les émissions sont comprises entre 130 et 160 g CO2/km, soit environ 45% des acquisitions nouvelles. • Inscription dans les systèmes de taxation préexistants : Le malus remplace la taxe additionnelle à la taxe sur les certificats d'immatriculation qui est en vigueur depuis le 1er juillet 2006. En revanche, la taxe est maintenue pour toute immatriculation d'un véhicule d'occasion. L'aide de 2.000€ aux véhicules GPL, GNV et véhicules hybrides est maintenue. Les personnes concernées par cette aide et les seuils (140 gCO2/km) ne sont pas modifiées. Seule modification : à compter du 1er janvier 2008, cette aide ne sera plus versée sous la forme d'un crédit d'impôt mais directement au moment de l'achat. Elle sera déduite du prix d'achat et identifiée sur la facture. • Perception du consommateur de ce système Selon une enquête TNS Sofres, réalisée auprès d'un échantillon de 1.000 personnes possédant un véhicule et déclarant vouloir le changer dans les deux prochaines années, 76% des personnes interrogées jugent que cette mesure contribuera à la protection de l'environnement et 62% estiment qu'elle est une bonne incitation à l'achat d'une voiture peu polluante. L'enquête révèle également que le dispositif est déjà connu par la quasi-totalité des futurs acheteurs (97%). 69% des personnes interrogées ont déclaré que cette mesure aurait un impact sur l'achat de leur prochaine voiture notamment sur le choix de la motorisation ou le choix de la gamme du véhicule. Enfin, près de 48% des automobilistes interrogés considèrent que cette mesure profitera aux constructeurs français, bien présents sur le segment des petites voitures. 60 • Textes législatifs : Le 26 décembre 2007, le gouvernement a confié (décret n° 2007-1873) au Cnasea, établissement public national, la mission de gérer le Fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres (article 7 du décret). Un décret instituant une aide à l'acquisition des véhicules propres et un arrêté relatif aux modalités de gestion de l'aide à l'acquisition des véhicules propres ont été publiés au Journal officiel du 30 décembre et du 2 janvier 2008. • Remise en question : exemple de la Toyota Prius La Toyota Prius profite d'un important bonus pour ne rejeter que 104 g de CO2 par kilomètre parcouru. Toutefois, une étude de la société américaine CNW Marketing Research a affirmé que, sur l'ensemble de son cycle de vie, la Prius consommait plus d'énergie qu'un 4x4 Hummer H3. Celui-ci est construit en acier aisément recyclable, alors que celle-là est faite d'un système de motorisation essence - électrique (Hybrid synergy drive) dont la fin de vie est problématique. 61 Annexe 6 : Extrait du discours de Dominique de Villepin, le 13 novembre 2006 « L'environnement est un enjeu mondial. Nos efforts ne serviraient à rien si nous étions seuls à nous engager pour l'avenir de la planète. Sous l'impulsion du Président de la République, la France est en première ligne dans le combat en faveur de l'environnement. Protocole de Kyoto, projet d'organisation des Nations Unies pour l'environnement, sur tous ces sujets, notre pays se mobilise sans relâche pour convaincre l'ensemble de nos partenaires de nous rejoindre. Avec le développement des éco-technologies, nous disposons désormais d'un argument efficace pour convaincre nos partenaires que l'environnement n'est pas seulement une contrainte, mais aussi une formidable opportunité de développement économique. Pour un industriel, développer les meilleures solutions techniques pour produire plus avec moins d'énergie, c'est s'ouvrir des marchés internationaux considérables. C'est créer des emplois. Plus de 150 000 en France d'ici 2010 pour le marché des éco-technologies et les nouveaux métiers de l'énergie. C'est pour cela que nous sommes déterminés à soutenir ce secteur, comme vient de le recommander Thierry CHAMBOLLE, à qui j'avais demandé d'examiner cette question. Pour autant, la difficulté des négociations à Nairobi le montre, certains pays pourraient être tentés de refuser de s'engager à de nouveaux efforts après 2012. Face à cela, je veux être très clair. L'Europe doit peser de tout son poids pour refuser cette forme de dumping environnemental. Je souhaite donc que nous étudiions dès maintenant avec nos partenaires européens le principe d'une taxe carbone sur les importations de produits industriels en provenance des pays qui refuseraient de s'engager en faveur du protocole de Kyoto après 2012. Nous ferons des propositions concrètes à nos partenaires européens en ce sens au premier trimestre 2007. Ce choix résolu en faveur de la protection de l'environnement, il est au coeur des valeurs portées par l'Union européenne. Ces valeurs, nous sommes les seuls à les porter dans le monde. Elles sont pour les peuples européens un facteur de cohésion et de rassemblement autour d'un idéal commun. Elles sont aussi un facteur de puissance politique dans le monde de demain. » 62