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Corpus Médical – Faculté de Médecine de Grenoble
Corps étrangers des voies aériennes supérieures
(193b)
Professeur Emile REYT
Octobre 2003 (Mise à jour Mars 2005)
Pré-Requis :
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Anatomie laryngée, trachéale, bronchique
Broncho-pneumopathies de l'enfant
Résumé :
Les corps étrangers (CE) trachéo-bronchiques ont une gravité potentielle, qu'il importe
de ne pas sous-estimer. En effet 5 à 10 enfants en décèdent chaque année dans notre
pays. Hormis quelques cas exceptionnels d'asphyxie immédiate, lorsque le corps étranger
se bloque en travers des cordes vocales, la symptomatologie habituelle se résume à la
survenue brutale d'un syndrome de pénétration, chez un jeune enfant de 1 à 3 ans,
jusque-là bien portant. Cet accident est beaucoup plus rare chez le grand enfant et
l’adulte.
Mots-clés :
Corps étranger, nasal, larynx, manœuvre Heimlich, dyspnée.
Références :
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E. Deneuville, C. Jézéquel, Corps étranger des voie aériennes, site de la
Faculté de Médecine de Rennes : http://www.med.univrennes1.fr/etud/pediatrie/corps_etranger.htm#3.1
Recommandations et informations avant trachéobonchoscopie pour CE Collège
Français d’ORL et de chirurgie cervicofaciale : http://orl-france.org/ puis :
http://orl-france.org/college/corps_etranger_tracheo_bronchique.htm
Site du SAMU du Haut Rhin, gestes d’urgence manœuvre d’Heimlich :
http://clients.newel.net/particulier/macmi/gestes/heimlich.html#Sommaire
Liens :
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Site du SAMU du Haut Rhin, gestes d’urgence manœuvre d’Heimlich :
http://clients.newel.net/particulier/macmi/gestes/heimlich.html#Sommaire
Site de la Société Française d’Oto-Rhino-Laryngologie : http://orl-france.org/ puis
: http://orl-france.org/college/corps_etranger_tracheo_bronchique.htm
Site de la Faculté de Médecine de Rennes, corps étrangers des voies aériennes :
http://www.med.univ-rennes1.fr/etud/pediatrie/corps_etranger.htm#3.1
Exercices :
1. Conduite à tenir devant un corps étranger laryngo-trachéobronchique
1.1. Données épidémiologiques
1.1.1. Fréquence
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600 à 700 cas annuels.
1.1.2. Age et sexe
Deux tiers sont des garçons.
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un pic à 2 ans, 2° pic vers 6-8 ans (petits bricoleurs)
avant 3 ans = CE végétaux
après 3 ans = CE métalliques et plastiques.
1.1.3. Nature du CE
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végétaux = 75 %, dont cacahuète = 50 %. Ce type de CE donne en quelques heures
des réactions inflammatoires locales importantes
métalliques = <10 %, plastiques = <15 %, divers = 5 % (dent, morceau de crayon,
papier…)
85 % des corps étrangers sont radio-transparents.
Photo : corps étrangers bronchiques
(E. Reyt)
1.1.4. Circonstances de l'accident
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Au cours d’un repas, l’enfant fait une fausse route"avale de travers". C’est la
circonstance de survenue la plus fréquente chez l’adulte.
L’enfant peut inhaler une cacahuète, pendant l’apéritif, cas le plus fréquent entre 2 et 5
ans.
L’objet peut être introduit dans la bouche et inhalé fortuitement +++ (jeu, choc, effet
de surprise).
Il peut s’agir d’aspiration malencontreuse d'un jouet. Il est important en cas de
syndrome de pénétration de dénombrer les petits jouets et s’alerter quand il en manque
un (absence des parents au moment de l’inhalation).
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1.2. Signes cliniques
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Le syndrome de pénétration est un accident brutal et bruyant chez un enfant
apyrétique, jouant, en excellente santé. Ses efforts de toux sont caractéristiques
associés à une rougeur ou cyanose de la face et une suffocation intense, mais tout
peut se réduire à quelques secousses de toux. Le syndrome de pénétration est noté
dans 70 à 85 % des cas, mais il peut avoir été négligé puis oublié. Il est capital de le
faire préciser lors de l’interrogatoire.
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Rarement le corps étranger s'enclave dans la trachée et entraîne une gêne respiratoire
survenant aux deux temps de la ventilation avec toux et wheezing médio-thoracique.
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Si le corps étranger est méconnu, celui-ci se révélera par des affections bronchopulmonaires à répétition, fébriles, peu ou pas sensibles à la thérapeutique :
o bronchite asthmatiforme,
o syndrome pneumonique,
o bronchite bactérienne,
o toux spasmodique.
Ces symptômes vont se succéder jusqu'à ce qu'une radiographie pulmonaire soit demandée
devant la persistance de la symptomatologie et/ou la notion d’un syndrome de pénétration ou
la perspicacité du médecin à la recherche du CE.
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La radiographie pulmonaire objectivera alors des troubles de ventilation avec
atélectasie lobaire, voire de tout un poumon (20%), des images de condensation
attestant l'existence de foyers pulmonaires le plus souvent uniques, un emphysème
obstructif localisé à un lobe ou à tout un poumon et bien mis en évidence par des
clichés en inspiration et expiration forcée (50%), exceptionnellement l'image d'un
abcès du poumon. Mais le cliché peut être normal et l'enfant ne plus avoir le moindre
signe lors de l'examen et du diagnostic (15% des cas).
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Un corps étranger peut obstruer complètement les voies aériennes, plus
particulièrement le larynx, et déterminer une asphyxie aiguë.
1.3. Conduite à tenir
S'il n'y a pas d'asphyxie aiguë : tant que le sujet tousse, il faut respecter cette toux et surtout
n’appliquer aucun geste sur le sujet!
Si le sujet s'épuise ou est asphyxique, tout va dépendre des circonstances dans lesquelles on se
trouve.
1.3.1. En milieu non médical
Il faut faire la manœuvre d'Heimlich. Le sauveteur se place derrière le sujet en enserrant sa
taille avec ses bras. Il place ses deux mains jointes dans le creux épigastrique puis appuie
brutalement de bas en haut. La manœuvre est répétée 3 à 5 fois de suite. La poussée sous
diaphragmatique en augmentant de façon brutale la pression trachéo-bronchique a pour but de
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désenclaver le corps étranger sus ou sous-glottique. Le siège du coup doit être épigastrique et
non latéralisé (risques de lésions hépatiques et spléniques).
Schéma : la manœuvre d’Heimlich
(E. Reyt)
Chez le nouveau-né ou le petit enfant, on préfère la manœuvre de Mofenson moins
traumatisante au niveau du thorax. Il faut lui appuyer sur le ventre en maintenant une main à
plat sur le dos, et maintenir la tête vers le bas après l'avoir posé à plat ventre sur l’avant-bras.
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Schéma : la manœuvre d’Heimlich chez le jeune enfant
(E. Reyt)
1.3.2. En milieu médical non spécialisé
Si l'état respiratoire d'un sujet qui a inhalé un corps étranger, soit d'emblée, soit
secondairement, s'aggrave, il faut l'intuber. Si le corps étranger est sus-glottique, il sera mis en
évidence au cours de l'exposition du larynx puis enlevé avec une pince (pince de Magil
servant à l’intubation). S'il n'est pas visible, le corps étranger est sous-glotto-trachéal. On peut
espérer le refouler dans une bronche souche et permettre une ventilation. Après amélioration
de la ventilation, le patient sera immédiatement dirigé vers un service ORL où sera extrait le
CE sous bronchoscopie au tube rigide.
1.3.3. En milieu spécialisé
Le patient est adressé pour suspicion de CE. Le symptôme le plus évocateur de CE des voies
aériennes inférieures et le syndrome de pénétration. La simple notion de syndrome de
pénétration impose une endoscopie trachéo-bronchique.
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Le syndrome de pénétration a pu passer inaperçu.
Certains signes font penser au CE (infections broncho-pulmonaires à répétition…)
La conduite à tenir est univoque : c'est une endoscopie bronchique au tube rigide sous
anesthésie générale ou au tube souple (fibroscopie).
o Si l'enfant arrive en état d'asphyxie, l'endoscope rigide sera glissé par voie
orale au travers du larynx sans anesthésie.
o Si l'enfant n'est pas asphyxique, il faut réaliser une endoscopie. Si les
conditions ventilatoires sont satisfaisantes, l'endoscopie peut être effectuée au
tube souple. Mais en cas de corps étranger diagnostiqué et visualisé, il ne peut
être enlevé qu'avec un tube rigide. Seule l'extraction au tube rigide optimise la
sécurité de l'extraction sans risquer un blocage du corps étranger dans la
trachée ou le larynx source d'asphyxie gravissime.
o Si la présence du corps étranger ne fait pas de doute, il faut réaliser une
endoscopie au tube rigide sous anesthésie générale dans de bonnes conditions :
ƒ Enfant à jeun,
ƒ Équipe entraînée,
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ƒ
Après une préparation par antibiotiques et corticoïdes si le CE semble
d’origine végétale ou en place depuis longtemps.
Photo : extraction de corps étrangers bronchiques
(E. Reyt)
Photo : matériel pour trachéo bronchoscopie
(E. Reyt)
Photo : fragment de cacahuète enclavé dans la bronche souche droite
(E. Reyt)
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Tout l'arbre aérien doit être soigneusement exploré. Si la sténose est trop importante, ou
l'extraction risque de blesser la bronche, on préférera différer l'extraction de quelques jours le
temps de réaliser un traitement antibiotique et corticoïde. On vérifie toujours les 2 arbres
bronchiques après l'extraction afin de s'assurer qu'il n'y a pas d'autres fragments et pour faire
l'état des lésions bronchiques en aval de la zone d'enclavement.
Exceptionnellement, l'extraction se révèle impossible par bronchoscopie, une bronchotomie
par thoracotomie s'impose alors.
Après l'extraction, une surveillance de quelques jours en milieu hospitalier est nécessaire pour
poursuivre une corticothérapie avec antibiothérapie systémique de quelques jours, tandis
qu'une radiographie effectuée après l'examen et avant la sortie de l'enfant permettra de
confirmer la normalisation totale des images pulmonaires.
Une deuxième endoscopie est nécessaire si le corps étranger était responsable d'inflammation
localisée importante avec ou sans sténose.
1.4. Complications
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les décès sont devenus rares : 0,5% des cas .
pneumopathies d'allure trainante dans 15% des cas.
sténoses bronchiques.
infections bronchiques récidivantes.
bronchectasies avec BPCO.
1.5. Conclusion
La prévention repose sur une information à 3 niveaux :
• En milieu médical, des signes broncho pulmonaires non expliqués et qui se répétent
doivent faire évoquer le diagnostic.
• En milieu scolaire, la manœuvre de libération des voies aériennes d’Heimlich doit être
connue
• En milieu familial, il faut s’abstenir de laisser à portée des petits enfants des
cacahuètes ou dragées, la période de l’apéritif étant la plus dangereuse.
Il faut absolument informer les parents des risques encourus par l'enfant qui ingère des
cacahuètes (50% des accidents). Assister au syndrome de pénétration et en connaître sa valeur
devrait faire adresser immédiatement l'enfant en milieu spécialisé. Cela permettrait d'éviter
l'évolution vers les broncho-pneumopathies à répétition, avec leur gravité potentielle, leurs
risques de séquelles, voire de décès.
2. Corps étranger des cavités nasales
L'enfant fait pénétrer plus ou moins en force et, en général, dans une seule narine des petits
objets, (morceau de papier, bouton, perle) des fragments de jouet (élément de Lego, roue de
petite voiture) ou des graines alimentaires (petit pois, haricot, graine de maïs). Les corps
étrangers alimentaires gonflent et augmentent de volume avec les sécrétions nasales et
peuvent devenir rapidement difficiles à extraire.
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Si l’adulte à ses côtés a assisté à l’accident, il doit faire moucher l'enfant le plus vite possible,
ce qui pourra expulser le corps étranger en totalité, mais le jeune âge de l'enfant est souvent
une cause d'échec (avant 2 ans).
Si après mouchage ou en cas d’impossibilité, il ne doit pas tenter de l’extraire mais amener
l’enfant dans un service d’urgences ou à la consultation d’un spécialiste ORL, en prenant soin
que l’enfant ne s’allonge pas sur le dos.
En effet, une tentative d’extraction infructueuse risque de refouler le CE qui peut migrer dans
le larynx ou l’arbre trachéo bronchique, ceci d’autant que l’enfant est assis ou allongé sur le
dos.
Certains CE peuvent s'enclaver entre les cornets et la cloison nasale ou dans les méats (reliefs
entre les cornets). Leur extraction peut être difficile car le CE est mal visible et le traumatisme
de la muqueuse nasale entraîner un saignement qui complique le geste.
L’extraction doit être conduite :
• par un spécialiste si possible,
• sous très bon éclairage (miroir de Clarr ou microscope),
• après anesthésie locale avec de la xylocaïne naphazolinée (vasoconstricteur
responsable d’une rétraction muqueuse facilitant la visualisation des cavités nasales),
• avec l’aide d’un crochet,
• chez un enfant calmé et maintenu fermement.
Si le corps étranger a été méconnu, le médecin doit y penser devant
• un écoulement unilatéral purulent du nez
• et une odeur nauséabonde du nez.
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