étude de benchmark sur la diversité aux Etats-Unis

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étude de benchmark sur la diversité aux Etats-Unis
ÉTUDE DE
BENCHMARK
SUR LA DIVERSITÉ
AUX USA
Amanda de Montal
Fondatrice du cabinet
WOMF LLC Consulting
Co nstruisons ensemble une diversité engagée et durable
33 avenue Mac Mahon, 75017 Paris, Tel: +33 (0)1 53 81 81 91
www.afmd.fr
SOMMAIRE
INTRODUC TION _____________________________________________________________________________ 4
1.
1.
Panorama de la diversité aux Etats-Unis en 2010 __________________________________________ 4
2.
Thèmes abordés ______________________________________________________________________ 6
LA FEMME DANSLES ENTREPRISES AMÉRICAINES___________________________________________ 9
1.1.
Contexte___________________________________________________________________________ 9
1.2.
Diagnostic_________________________________________________________________________ 14
1.2.1.
Une quasi absence de femmes dans l’entreprise en raison du secteur : exemple de
l’industrie _____________________________________________________________________________ 14
1.2.2.
1.3.
Peu ou pas de femmes dans le « sillon » au niveau intermédiaire et supérieur_________ 14
Les réponses des entreprises pour retenir et promouvoir les femmes_____________________ 15
1.3.1.
En faire une stratégie prioritaire pour l’entreprise _________________________________ 15
1.3.2.
Donner aux femmes les outils pour se battre à armes égales avec les hommes ________ 17
1.3.3.
Faire des femmes une force active de l’entreprise _________________________________ 18
1.3.4.
L’équilibre vie privée/vie professionnelle _________________________________________ 20
1.3.5.
Communiquer autour des mesures en faveur des femmes __________________________ 23
2.
TABLEAUX DE BORD DIVERSITÉ __________________________________________________________ 25
3.
DIVERSITÉ D ES FOURNI SSEURS __________________________________________________________ 28
4.
3.1.
Les acteurs externes d’une politique de diversité des fournisseurs________________________ 28
3.2.
Moteurs et freins de la politique de diversité des fournisseurs ___________________________ 28
3.3.
Freins à une généralisation massive de cette politique aux Etats-Unis _____________________ 29
3.4.
Recommandation pour la version française____________________________________________ 30
DIVERSITÉ ET MARKETING _______________________________________________________________ 32
4.1.
Promouvoir sa politique diversité à la source : dans les écoles et les universités____________ 32
2
4.2.
Se promouvoir comme une société diverse____________________________________________ 32
4.3.
Puiser dans les ressources diverses de l’entreprise _____________________________________ 33
4.4.
Cibler les diversités pour s’ouvrir de nouveaux marchés_________________________________ 34
4.4.1.
Sur le terrain __________________________________________________________________ 34
4.4.2.
Par la publicité ________________________________________________________________ 35
CONCLUSION_______________________________________________________________________________ 36
1.
L’aval des dirigeants au plus haut niveau ________________________________________________ 36
2.
Créer une équipe dédiée à la diversité et lui donner le pouvoir et les moyens nécessaires _____ 36
3.
Disposer de relais sur le terrain ________________________________________________________ 36
4.
Etablir un reporting transparent régulier sur les rémunérations ____________________________ 36
ANNEXES __________________________________________________________________________________ 37
Annexe 1 : Tableaux de bord Deloitte _______________________________________________________ 37
Annexe 2 : Tableaux de bord IPG____________________________________________________________ 40
3
INTRODUCTION
1. Panorama de la diversité aux Etats-Unis en 2010
Si sur le plan légal les Etats Unis ont édicté des lois contraignantes visant à réduire et pénaliser les
discriminations, telles le Titre VII du Civil Rights Act de 1964, L’Employment Act de 1967, et l’American
with Disabilities Act de 1990 ; sur le plan professionnel, les pratiques de diversité actuelles des
entreprises américaines répondent à des considérations d’efficacité économique, managériale et
d’innovation.
Aux Etats Unis, à l’exception de certaines entreprises ayant des contrats d’Etat (Philips) et qui sont donc
soumises à l’Affirmative Action Plan, on ne subit plus la politique diversité. Au contraire, la politique de
diversité et d’inclusio n est devenue un vrai levier de performance. Comme le dit si bien le rapport
Deloitte (2008) : « Diversity isa Bottom Line, not a finish line. »
Quelques éléments essentiels sont à prendre en compte pour comprendre ce changement d’approche :
1. En 2050, d’après les dernières prévisions du Census1 , la moitié de la population américaine sera
composée de minorités ethniques. Ainsi la diversité apparaît comme un argument économique
fort, et les rapports annuels aujourd’hui de la majorité des grandes sociétés américaines font
état de réalisations sur ce point. Sodexo affirme ainsi qu’en 2050, 70% de ses employés seraient
des femmes ou issus des minorités.
2. Les entreprises ont compris que la diversité pouvait également constituer un axe stratégique de
développement marketing. La diversité devient dès lors un atout concurrentiel, une stratégie de
différenciation, comme l’exprime Sodexo.
3. Les études sur l’efficacité managériale démontrent qu’un des facteurs clefs de réussite est que
chaque individu se sente respecté et reconnu pour l’intégralité de sa personnalité sur son lieu de
travail. Ainsi, cet espace doit être inclusif, le s valeurs de l’entreprise permettant de gérer les
attentes des différentes communautés, leur offrant des outils pour exprimer leur différence, et
de capitalisersur celle -ci.
L’obje ctif à moyen et long terme est évidemment de fidéliser les talents et de renforcer l’attractivité de
l’entreprise.
1
Le Census est l’équival ent américain de l ’INSEE, il produit des données chiffrées démographiques et économiques.
http://www.c ensus.gov/
4
France / USA : Le rôle du ca dre juridique dans la lutte contre les
discriminations et la promot ion de la diversité
Si les situations de la France et des Etats Unis sont si différentes, c’est qu’ell es se
fondent sur des principes historiques et juridiques distincts.
L’approche multiculturelle est fondamentale au x Etats-Unis, elle prend sa source
dans l ’origine m ême du pays qui valorise la d iversité de sa popul ation. La législation
anti-discrimination s’y appliqu e très tôt, dès le milieu des années 1960 , comme cela a
été souligné en introduction d e ce rapport. L’argument développé par la Cour
Suprême (en 19 70) ancre la justification de l’affirmative action (discrimination
positive) dans la nécessité d’avoir une masse critique de personnes d’origine ethnoraciale différente, celles-ci étant considérées comme porteuses d e visions du monde,
d’approches et d ’opinions distinctes de la population blanch e majoritaire. (Sabb agh,
2009). Le thème est repris par les entreprises dans le milieu d es années 1980.
L’approche diversitéau x Etats-Unis est largem ent catégorielle, comme l e montre l eur
dispositif marketing décrit dans cette étude, et s’appuie sur u n usage ancien des
statistiques ethniques.
Le sujet est beaucoup plus réc ent en France, où le modèle républicain originel a
rendu complexe le passage d’une culture de l ’assimilation d es différences vers un
idéal de citoyenneté universelle, à un multiculturalisme encore hésitant. La diversité
a cependant divers historiques selon les cibl es. Il existe ainsi des dispositifs déjà
anciens promouvant l’égalité femme-homm e ou l’int égration des travailleurs
handicapés dans l ’emploi. L’i mpulsion européenne avec l ’inscription du principe de
non discrimination dans le traité d ’Amsterdam (1997) est primordiale, ell ese traduit
concrètement par la directive RACE (2000). Cette dernière n’est qu e partiellement
transposée en 2004, m ais son application est él argie à un ens emble plus vaste de
critères de discrimination (l’âge, le sexe, l’origine, la situation de famille, l ’orientation
sexuelle, l es mœurs, les caractéristiques génétiques, l ’appartenance vraie ou
supposée à une ethnie, une nation, une race, l ’apparence physique, le handic ap, l’état
de santé, l e patronyme, l es opinions politiques, les convictions religieuses, l es
activités syndicales, l’état de grossesse). C’est cette année qui fonde égalem ent la
préoccupation pour la « diversité » en entreprise, largem ent promue en particulier
par l’I nstitut Montaigne notamm ent par des figures de l’entrepreneuriat français
(Yazid Sabeg, Claude Bébéar), mouvement q ui donnera naissance à d es initiatives
comme la charte de la diversité en 2004, puis le label diversité en 2008.
Au-delà de deu x approches philosophiquement différentes d e l’intégration, ce qui
distingue la France des Etats-Unis dans la lutte contre la discrimination et la
promotion de la diversité, c’est l’opposition entre une approche institutionnalisée,
largement définie et soutenue par la loi et l a jurisprudence aux USA, et une action
publique faible en France, essentiellem ent incitatrice, peu prescriptive (Béréni,
2009 ; Doytcheva, 2009). Faute d ’un réel engagem ent d es politiques et des
législateurs, l e discours sur la diversité en France n’a pas encore convaincu
l’ensembl e des entreprises ou des filial es de grands groupes.
Les articl es cités font tous réf érence au num éro spécial de la r evue Raisons Politiques, 2009/3,
n°35
5
2. Thèmes abordés
Si la diversité des contextes nationaux explique qu’une transposition des pratiques d’entreprises
américaines n’est pas possible telle quelle, une étude des politiques d’entreprise dans un autre pays est
aussi porteuse d’un autre regard, donc d’innovations dont peuvent s’inspirer les socié tés françaises. Par
ailleurs, les grandes entreprises, souvent moteur dans la promotion de la diversité, sont mult inationales
et ont un marché mondial ; elles ont en conséquence besoin à la fois de connaître et de mettre en
perspective ce qui est fait dans chaque pays pour promouvoir un tronc commun à leur politique groupe
sur la diversit é. L’AFMD souhaite les accompagner dans ces réflexions. Engagée dans une démarche de
partenariats et de réflexion internationaux, l’AFMD lance son deuxième opus d’une perspective
comparée des pratiques d’entreprises, après avoir mis l’accent sur les politiques Diversité en Europe en
2008.
Pour cette étude, nous avons choisi de nous focaliser sur des thèmes d’actualité sur lesquels l’approche
américaine était bien souvent plus étayée que l’approche française.
L’étude qui suit est donc articulée autour de 4 grands thèmes :
-
Les femmes dans l’entreprise, sujet particulièrement d’actualité en France et qui méritait d’être
nourri par une approche extra-européenne ;
-
La mesure de la diversité : les tableaux de bord ;
-
La diversité des fournisseurs ;
-
La diversité comme stratégie marketing.
Ces trois derniers thèmes ne sont encore qu’émergents dans l’hexagone quoiqu’ils se posent de maniè re
aigüe : c’est notamment le cas de la mesure de la diversité qui a fait l’objet d’une proposition d’article
dans le projet de loi relatif à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité, visant à imposer aux
entreprises cotées un bilan de leur actions menées en matière de lutte contre les discriminations.
La méthodolog ie du benchmark :
La sélection des entreprises partenaires de l'étude est le fruit de :
-
L'analyse de Diversity Inc, Working Womens' magazine pour avoir une liste des
meilleures entreprises dans le domaine d e l a d iversité, des études de cas et des
« bonnes pratiques » ;
-
La volonté de rencontrer des sociétés embl ématiques dans les s ecteurs de la
grande consommation, la banqu e, la publicité, le conseil, l’industrie, à d es fins
decomparaisons sectorielles ;
-
Lesouhait de rencontrer plusieurs filial es am éricaines d’adh érents de l'AFMD.
6
Dans chaque entreprise, des responsables diversité ont été interviewés, à l'exception des structures plus
petites. Dans ce cas, c’est le/la responsable des Ressources Humaines (RH) également responsable de la
diversité qui a été interrogé(e).
Entreprises
interrogées
Secteur d’activité
Effectif aux USA *
Effectif Monde *
(chiffres 2009 ou 2010)
(chiffres 2009 ou 2010)
Adecco
Travail temporaire
Plus de 30 000
collaborateurs répartis
dans 70 pays ;700 000
intérimaires
American Express
Banque / Assurance
/ Voyagiste
58 300 salariés
BNP-Paribas
Banque
Colgate Palmolive
Grande
consommation
Crédit Suisse
Dannon
Banque
750 agences, 11 200 salariés
Plus de 200 000 salariés
38 000 salariés dans plus
de 200 pays
40 implantations sur le
continent américain (Nord et
Sud), 11 500salariés
405 implantations,
47 600 salariés
Agroalimentaire
80 976 salariés
Deloitte
Audit financier et
conseil
Réseau de cabinets
membres : 169 000
collaborateurs dans 140
pays
Google
NTIC
Gotham
Agence de
communication/
Publicité, filiale de
McCann
Interpublic (IPG)
Agence de
communication /
publicité
(Danone US)
45 000 personnes
20 304 salariés
43 000 salariés, dans une
centaine de pays
7
KPMG
Audit financier et
conseil
87 cabinets membres, soit 23
000 salariés et associés
Réseau (Coopérative de
droit suisse) présent dans
146 pays, regroupant 140
000 personnes
L’Oréal
Grande
consommation /
Cosmétique / Luxe
Environs 10 000 personnes
64 643 salariés
Philips
Grande
consommation /
santé /éclairage
27 069 en Amériq ue du Nord
115 924 salariés
Sodexo
Restauration
collective
120 000 employés pour
l’ensemble des USA, du Canda
et du Mexique
380 000 salariés, répartis
dans 80 pays
Sony
NTIC /industrie
audiovisuelle /
haute technologie
167 900 salariés
* les sources des chiffres présentés ci-dessous sont généralement les sites Internet des entreprises ou
leur rapport annuel.
8
1. LA FEMME DANS LES ENTREPRISES AMÉRICAINES
1.1.
Contexte
Situation des femmes sur le marché du travail aux Etats–Uni s
Un taux d’emploi plus faible , un plafond de verre poreux , et une hégémonie du
modèle de carr ière masculin
Hélène Périvier (2008) noteun progrès incontestable de l’é galité homm e-femm e sur
le marché du travail au x Et ats-Unis sur la période d e 197 0 à aujourd’hui. Ces
résultats sont cependant à nuancer, l ’inégalité entre les femmes étant
particulièrement marquée.
Contexte légal
« Les réussites américaines doivent beaucoup aux mouvem ents féministes, qui se
sont appuyés sur un arsenal législatif effic ace permettant d e lutter contre les
discriminations que subissent les femm es. Parmi les lois anti-discrimination, les
articles fondateurs sont l’article VII des Droits civils de 1964 q ui interdit l a
discrimination dans l’embauche et la promotion, ainsi qu e l’article IX des
amendements d e l’éducation de 1972, qui exige un égal traitement d es sexes dans les
programmes éducatifs, y compris dans les grand es écoles et l ’université. Ces lois ne
sont pas restées l ettres mortes comme en t émoignent qu elques exemples d e
sanctions ou de règl ements auxquels certaines grandes entreprises ont dû se
soumettre. En ayant des pratiques discriminatoires à l’égard d es femmes, les
entreprises s’exposent au risque de payer une am ende, dont le montant est
dissuasif. » 2 (cf. : cond amnation de Lucky St ore en 19 94 ; de Price Waterhou se en
1990)
Femmes et taux d’emploi : une progression quantitative
En dépit d’une évolution positive du taux d’emploi d es femmes dans les deux pays,
les Françaises de 25 à 5 4 ans 3 restent plus actives que l es Américaines, à 81%
contre 75,5% en 2006.
Aux Etats-Unis, « L es années 1970 et surtout 1980 ont été c elles de l’accroissement
de l’emploi des femmes en coupl e, rel ayé durant la d écennie suivante par celui des
mères isolées sous l’effet de politiques volontaristes qui se sont concentrées sur des
objectifs quantitatifs (augmentation des taux d’em ploi, et baisse du nombre d e
dossiers sociaux…), laissant de côté l ’aspect qualitatif des emplois créés. Les
tendances récentes montrent un essouffl ement de l’activité en général , qui affecte les
femmes, les plus qualifiées n’étant pas épargnées par cettetend ance. »
2
Les extraits sont tirés de : Hélène Périvier, 2008, Les femmes sur le marché du travail aux Etats-Unis, document de travail de
l’OFCE
3
La France se c aractér isant par de très faibles taux d’emploi des jeunes demoins de25 ans et des seniors de plus de 55 ans, ces
âges ont été volontairement exclus de la comparaison car considérés comme non significatifs
9
En revanche, d epuis l e milieu des années 1980 , l e tau x de chôm age d es femmes et
des hommes au x Etats-Unis est presque identiqu e, contrairement à la majorité des
pays européens où les femmes pâtissent davantage du chômage que leurs
homologues masculins.
Femmes et pla fond de verre : persistance d’ un modèle masculin de carr ière et
inégalité salaria le
« La réduction des inégalités entre les sexes ne vaut pas pour toutes les femmes :
pour les moins qualifiées les améliorations sont mod estes, voire inexistantes sur
certains points, et donc parallèl ement, l es inégalités entre les femmes qualifiées et
celles n’ayant pas ded iplôme ont augmenté. »
En effet, pour les Américaines diplômées, les inégalités avec les homm es en m atière
de carrière (tant l eur type qu e l eur d éroulement) sont moins fortes qu’en Europe, en
particulier qu’en France. Cepend ant, c es opportunités ont u n prix : celui de la
nécessité pour les femmes de se conformer à un modèle de carr ière masculin
qui exige une grande disponibilité hora ire. Cela éclaire, dans c e cadre, les
pratiques des entreprises américaines en faveur des femmes qui visent davant age à
les aider individuellem ent à progresser qu’à une réforme des modalités de carrière
dans les organisations.
Ce modèle de carrière masculine est fondé sur un travail chronophage : « Les
femmes ayant obtenu l’égalité ont dû se caler sur la carrière des hommes, ce qui
exigeun temps d e travail long et peu d e temps à consacrer à la famille. Les Etats-Unis
constituent l’un des rares pays d éveloppés où l a durée hebdom adaire d e travail est
de 40 heures, et où il n’existe aucune politique nationale d éterminant une d urée
obligatoire de congés payés. Les droits de congés payés sont laissés à l’appréciation
de l’employeur ».
Les inégalit és salariales persistent également, même si les Etats-Unis ont durant ces
20 dernières années comblé une partie de leur retard avec l es autres pays
développés. Selon une étude franco-québ écoise (Ve rs l’égalité entre les femmes et les
hommes ? Comparaison Europe - Amé rique du Nord, 2009), en France, en 2005 , l a
rémunération horaire brute moyenne des femm es était inférieure de 12 % à cell e
des hommes, contre15 % pour l a moyenned e l’U E, et 23 % pour les Etats-Unis.
La thématique de l’égalité professionnelle hommes/femmes fait partie des fondamentaux des pratiques
de diversité de toutes les sociétés rencontrées.
C’est une des thématiques qui fait consensus dans chacun des entretiens et qui bénéficie depuis 3 ans le
plus d’actions et de résultats, car elle est considérée comme un véritable atout de performance dans les
entreprises.
L’Agence Catalyst (Association de promotion des femmes dans l’entreprise) a publié en juillet 2008
l’étude Corporate Performance and Women’s Representation on boards. Au-delà du constat chiffré que
depuis 2001 le nombre de femmes ayant accès aux Comités Exécutifs a cru, cette étude met en avant le
lien entre une représentation accrue des fe mmes dans les Comités et le bilan fi nancier. Selon ses
conclusions, les sociétés ayant la plus grande proportion de femmes dans leur comité exécutifont :
10
-
De meilleurs retours sur les actions,
-
De meilleurs retours sur les ventes,
-
De meilleurs retours sur le capital investi,
-
De meilleurs résultats en termes de performance financière (cf. : encart 4).
Cette étude démontre également que les entreprises avec des femmes dans des positions stratégiques
clefs, et présentes au Comité Exécutif ont une tendance très prononcée, non seulement à favoriser
l’accès des autres femmes au comité, mais aussi à nommer les candidates femmes sur de vrais postes
exécutifs avec des responsabilités budgétaires, ce qui est essentiel pour prétendre au poste de CEO4 .
L’exemple le plus représentatif nous provient de Kraft Foods, dont la CEO est une femme, 5 membres sur
12 du Conseil d’Administration sont des femmes, et la part des femmes au Comité Exécutif est de 44,4%.
Néanmoins, le chemin à parcourir est encore long. Contrairement auxidées reçues, la représentation des
femmes dans les entreprises aux Etats-Unis n’est pas parfaite.
•
En 2010, sur les CEO de 500 plus grandes entreprises américaines « Fortune 5005 », 15 sont des
femmes, soit 3%,
Patricia A. Woertz, (#27)
57 ans, PDG d’Archer Daniels Midland Company (ADM) (agro-alimentaire)
•
Angela F. Braly, (#31)
48 ans, PDG de WellPoint, Inc. (assurance maladie)
•
Indra K. Nooyi,. (#50)
54 ans, PDG de PepsiCo, Inc, (agro-alimentaire)
•
Irene B. Rosenfeld, (#53)
57 ans, PDG de Kraft Foods Inc. (agroalimentaire)
•
Lynn Laverty Elsenhans, (#78)
53 ans, PDG de Sunoco (industrie pétrochimique)
•
Ellen J. Kullman, (#86)
PDG de DuPont (industriechimique)
4
Chief Exe cutive Officer, c’est-à-dire PD G
Liste des 500 plus grandes entreprises américaines éditée annuellement par le magazine « Fortune » sur la base
des Chiff res d’Affaire.
5
11
•
Mary F. Sammons, (#89)
62 ans, PDG de Rite Aid Corporation (distribution pharmaceutique)
•
Carol M. Meyrowitz, (#119)
56 ans, PDG The TJX Companies, Inc. (distribution spécialisée)
•
Ursula M. Burns, (#152)
52 ans, première femme afro-américaine dirigeant une multinationale américaine et succédant à une
autre femme AnneMulcahy, PDG de Xerox Corporation (impression)
•
Brenda C. Barnes, (#180)
54 ans, PDG de Sara Lee Corporation (produits de grande consommation)
•
Andrea Jung, (#228)
49 ans, PDG de Avon Products, Inc. (cosmétique)
•
Laura Sen, (#232)
53 ans, PDG de BJ's Wholesale Club (distribution spécialisée)
•
Susan M. Ivey, (#272)
49 ans, PDG de Reynolds American, Inc. (Industriedu tabac)
•
Carol Bartz, (#343)
61 ans, PDG de Yahoo! Inc. (Informatique)
•
Christina A. Gold, (#413)
63 ans, ancienne PDG de Western Union Holdings, Inc. (Banque), elle a prissa retraite le 1er
septembre2010 et cédé la place à un homme, Hikmet Ersek (49 ans).
-
28 des entreprises des « Fortune 1000 » ont des femmes CEO.
-
Dans les Comites de Direction des US Top 500, 11,1% des membres sont des femmes, et 86% des
compagnies américaines ont au moins une femme au sein de leur Comité.
Si l’on élargit notre analyse en dehors des sphères des grandes entreprises, le même constat s’applique à
l’entrepreneuriat. Seulement 1/5 des entreprises qui réalisent 1 million de dollars ou plus de Chiffre
d’Affaires appartiennent à des femmes, et seulement 3% des entreprises appartenant à des femmes
atteindront le million de dollars contre 6% pour les hommes.
12
En résumé, la situation est meilleure qu’il y a 10 ans, mais la question du pourquoi il y a si peu de
femmes aux Comités de Direction et aux niveaux de responsabilité élevés dans les entreprises se pose
toujours.
Mixité et performance économique : quel lien ?
Le travail des femm es a longtemps été considéré comme une variable d ’ajustement
du marché du travail. Pour autant, en parallèle du développement d es politiques de
gestion de l a diversité au sein d es entreprises, l ’idée selon l aquelle mixité et égalité
professionnelle entrehommes et femm es riment avec performance économique s ’est
progressivement imposée.
Cetteidée repose sur qu atreargum ents principaux :
1. Une m eilleure gestion des ressources humaines : élargissement du vivier de
candidats (et donc d e tal ents) disponibles, solution contre la pénurie de main
d’œuvre, renforcement d e la motivation et du bien-être au travail des
collaborateurs et, par conséquent, augm entation de leur productivité et
diminution du turn-over.
2. Un style de m anagement différent, compl émentaire au style de management dit
«masculin » : plusieurs psychologues ont mis en évidence l ’existence d’un
«management féminin », reposant notamment sur l’écoute, la communication et
l’interactivité, lequ el répondrait à une demand ed ’ « h umanisation » des rapports
hiérarchiques dans l ’entreprise.
3. Un accroissement d es performanc es commerciales : d éveloppement de
l’innovation et de la créativité, répons e plus ad aptée aux dem andes d e la
clientèle, amélioration de l ’image de marque d e l ’entreprise (aux yeu x du
consommateur mais également des actionnaires)
4. Une au gmentation des performances financières : attrait grandissant des
investisseurs envers les entreprises actives d ans l e domaine d el a diversité (gage
d’une gestion efficace des ressources humaines d’autant que l a garantie d ’une
mise en conformité aux normes l égales prévient l’entreprise de tout risque
judiciaire)
Face à cette hypothèse, il convient néanmoins de s’int erroger quant au fondement
scientifique de tels arguments. En 2003, Nicole Ameline, alors qu’ell e ét ait Ministre
de la parité et de l’égalité professionnelle, a mis en évidence l e fait que très peu
d’études visant à démontrer le lien entre mixité et croissance économique ont été
réalisées en Franc e alors que la communauté scientifique anglo-saxonne s’était déjà
largement emparée de c ettequ estion. Pour combler ce retard, c elle-ci a commandité
une étude auprès de la DARES et d e l’INSEE. Dans ce cadre, Sophie LandrieuxKartochian a réalisé une revue d e littérature recensant l’ensembl e des étud es et
analyses ayant été élaborées sur ce sujet. Cet état d es lieux de l a connaissance
scientifique en la matière l’amène à la conclusion suivante : il est très difficile
d’appréhender et de mesurer l ’impact des politiques en faveur de l’égalité
homme/femme sur la performance économique et ce, pour trois raisons principales.
Tout d’abord, à l’heure actuelle, l a majorité des études menées en la matière sont
d’ordre expérim ental, c e qui pose donc la qu estion de l a viabilité des résultats
obtenus. Aussi, comme nous l ’avons souligné précédemment, ces études sont
principalement anglo-saxonnes. Il semble donc difficile de transposer les résultats au
13
contexte franç ais, différent à bien d es égards. Enfin, l a principale interrogation
soulevée vis-à-vis de ces études provient du fait qu e mettre en place un protocole
d’enquêt e permettant d’isoler l a variable « mixité homme/fem me » (toute chose
égal e par ailleurs) comme étant le seul facteur d’influence sur les performances
économiques d’u ne entreprise relève d u défi.
Face à ces limites, il convient donc de d’être prudent avec cette id ée.
1.2.
Diagnostic
Pour pouvoir accéder à de hauts niveaux de responsabilité et aux les comités, les femmes doivent au
préala ble être dans le « sillon », c’est-à-dire à des postes managériaux permettant d’y accéder. Or selon
les entreprises interrogées, c’est souvent loin d’être le cas. On observe plusieurs cas de figure.
1.2.1. Une quasi absence de femmes dans l’entreprise en raison du secteur : exemple
de l’industrie
Des entreprises comme Sony et Google ont longtemps souffert et souffrent toujours du manque de
femmes ingénieurs informatiques/technologiq ues. Très peu de femmes, il y a 15 ans, s’engageaient dans
des études scientifiques.
Afin de combler ce manque, ces sociétés ont développé des politiques « à la racine », très volontaristes,
en faveur des femmes, au moment de l’éducation et du recrutement.
Avec son programme K-12, Google développe l’amour pour les sciences, la technologie, l’ingénierie et les
mathématiques (STEM) chez les jeunes avec un accent particulier sur les filles. L’entreprise travaille en
étroite collaboration avec des écoles pour proposer ce programme complémentaire aux élèves qui
manifestent une facilité ou un intérêt prononcé pour ces matières.
En parallèle, Google travaille également sur les femmes, en créant des évènements forts
comme « Introduce a girl to Engineering day », des visites d’étudiants qui permettent de découvrir le
monde Google (plus de 5000 par an) et des workshops (ateliers) spécifiques aux femmes. Au travers
d’évènements internationaux tels the « Girl’s Day in London and Munich » et les « Google India Women
in Engineering Awards », l’entreprise communique sur sa féminisation et son posit ionnement
d’entreprise in contournable pour les femmes ingénieurs.
1.2.2. Peu ou pas de femmes dans le « sillon » au niveau intermédiaire et supérieur
Le dia gnostic le plus courant pour expliquer l’absence de femmes aux niveaux hiérarchiques élevés, est
le fait que les entreprises ne parviennent pas à retenir, promouvoir et accompagner les femmes au cours
de l’étape la plus problématique : celle du management intermédiaire.
14
C’est à cette étape que les directions doivent être capables d’améliorer leur taux de rétention, et
d’accompagnement des femmes ; leur donner les outils pour réussir et franchir le cap pour passer aux
fonctions de direction et se positionner par la suite comme candidates aux postes du comité.
Beaucoup d’analyses (issues d’enquêtes internes aux entreprises interrogées) ont été faites sur ce cap
important :
-
La faible féminisation de l’encadrement peut en partie s’expliquer par la persistance de stéréotypes
liés aux femmes ayant des postes à responsabilités, stéréotypes qui semblent d’ailleurs le plus
souvent être partagés etassimilés par les femmes elles-mêmes.
Les femmes sont placées devant un réel dilemme car, évaluées selon un standard de management
encore masculin, elles sont vues comme trop douces (si elles conservent leurs comportements
féminins) ou trop dures (si elles dupliquent les comportements masculins) pour réussir à un haut
niveau de responsabilité.
-
Les femmes sont plus dans l’attente et moins dans la mise en scène d’elles-mêmes et la promotion
de leurs résultats. Elles auront plus tendance à suivre les règles et attendre plutôt que de provoquer
des situations en leur faveur, ce qui implique que souvent un homme prendra avant la pla ce
convoitée.
-
Ce cap correspond souvent au moment où les femmes mettent en balance vie privée et vie
professionnelle. La maternité devient un argument majeur pour changer de poste, quitter une
société ou tout simplement évaluer l’intérêt de poursuivre son activité professionnelle d’une part ou
rester avec ses enfants d’autre part. Dans Top Talent, Sylvia Ann Hewlett, décrit cette situation avec
beaucoup de véracité. Elle parle d’une femme qui tous les matins confie son enfant à sa baby-sitter
pour aller travailler 10 heures. Le déchirement quotidien est supportable dès lors que la femme a
une vision de son évolution de carrière au sein de l’entreprise, qu’elle se sent valorisée et reconnue.
Lorsqu’elle a l’impression que l’entreprise ne la respecte pas, la balance penche en faveur de sa vie
familiale. L’appel de la maternité joue comme un balancier entre vie privée et vie professionnelle.
1.3.
Les réponses des entreprises pour retenir et promouvoir les femmes
1.3.1. En faire une stratégie prioritaire pour l’entre prise
Pour Philips, longtemps victime d’une image masculine et comptant seulement 6 femmes aux postes de
senior management, le recrutement de femmes est, depuis 3 ans, une priorité à tous les niveaux. A
compétences égales, entre un candidat homme et un candidat femme, la femme sera choisie. Cette
décision a été annoncée clairement par la Direction, et les Ressources Humaines sont mobilisées et
intéressées à ces résultats.
Dans le secteur financier, le défi est semblable. Lors d’une étude récente, 44% des femmes de Wall
Street ont déclaré ne pas avoir d’enfants, et ne pas souhaiter avoir d’enfant car cela est incompatible
avec leur vie professionnelle. Cette étude a alimenté de nouvelles réflexions chez Crédit Suisse, en
particulier parce qu’ils faisaient le même constat dans leur effectif.
15
Si au niveau des embauches et des premiers échelons, on peut compter 45% de femmes au sein de la
société, ce chiffre passe à 25% au niveau du management intermédiaire, et 10% au niveau du senior
management.
Une des premières décisions a été de nommer une femme au Comité Exécutif en 2009. Il ne s’agit pas
d’une figure représentative pour se donner une image, une bonne conscience, mais une femme admirée
et respectée par les salariés du groupe. Cette nomination a été très positivement accueillie par les
collaboratrices féminines, qui voient en elle un réel modèle.
Parall èlement, Crédit Suisse a fait du recrutement des femmes sa priorité, à la fois concernant les jeunes
diplômés, mais également aux autres niveaux.
Sodexo, championne de la diversité, est également confrontée à ce défi. Avec 57% de femmes au niveau
mondial, l’entreprise n’en compte que 16% parmi les 250 cadres dirigeants de la société. George Chavel
(PDG Sodexo US A) s’est engagé à accroitre ce pourcentage à 23-25% en se concentrant sur les fonctions
logistique/production. Afin d’y parvenir un programme visant à identifier les femmes à haut potentie l a
été développé. L’entreprise s’est engagée à leur fournir des formations pour acquérir les compétences
nécessaires afin d’être promues managers desite.
Femmes et quotas , quest ion d’actualité en France
Le colloque «La parité et la diversité dans l’entreprise : une égalité (encore) sous
conditions » organisé par l ’AFMD et Les M ariannes de la Diversité le 12 octobre 2009
à l’Assemblée National e, a ét é l’occasion d’aborder la notion de quotas de femmes
dans les conseils d ’administration.
La loi constitutionnelle n°2008-724 du 23 ju illet 200 8, l’article 1 er alinéa 2 de la
Constitution Française prévoit en effet que : « la l oi favorise l'égal accès des femmes et
des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu'aux re sponsabilités
professi onnelles et sociales. »
Ce texte amène à se poser la question du sens et des implic ations du mot
« favoriser ». Est-il possible, comme cela est déjà l e cas pour le h andicap, de prévoir
des obligations de recrutement de femm es dans les organisations ? C’est en tous cas
ce que préconise Brigitte Grésy, membre d e l’Inspection Général e des affaires
sociales, qui a rendu le 7 juillet 2009 un rapport à Xavier Darcos, alors Ministre du
Travail, des relations sociales, de l a famille, de la solidarité et de l a ville.
Ce rapport présente un état d es lieux de l a qu estion en France ainsi qu ’une
quarantaine de propositions sur les questions d’égalité professionnell e, de précarité
et de gouvernance. Il préconise l’imposition d ’un quota de 4 0% « du sexe sous
représenté » d ans les Conseils d ’Administration, dans l es 6 ans à venir avec un
objectif intermédiaire d e 20% dans les 2 ans. Le non-respect des seuils successifs
emportera nullité d es nominations, sauf lorsque cell es-ci porteront sur le sexe sous
représenté ; les délibérations intervenues entre t emps resteront cepend ant valides.
Ces objectifs concernent les entreprises publiqu es et les sociétés dont les titres
financiers sont admis aux négociations sur un marché réglem enté, avec un critèrede
tailleà 1000 salariés.
16
Evoquée pour la première fois lors du colloque organisé par l ’AFMD à l ’A ssemblée
Nationale, Jean-François Copé, président du groupe UMP et M arie-Jo Zimm ermann,
députée UMP de la Moselle, ont ainsi d éposé une nouvelle proposition de loi en ce
sens le 3 décembre 2009 . Cosignée par 135 déput és du groupe UMP, elle vise à
instaurer une représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des
conseils d’administration et de surveillance. Le texte a été adopté le 20 janvier 2010
par l’Assemblée Nationale et le 27 octobre par le Sénat. La loi pourrait être
définitivement votéed’ici fin 2010.
1.3.2. Donner aux femmes les outils pour se battre à armes égales avec les hommes
Au-delà d’une politique de recrutement féminine, toutes les entreprises interrogées ont créé des
programmes spécifiquement pour les femmes, du « sur-mesure » en termes de formation et de
mentoring. Selon les entreprises, ces formations peuvent se compter en heures ou en jours.
Chez Crédit Suisse, la volonté est de préparer les femmes aux différents challenges politiques propres à
chaque niveau de la hiérarchie, leur apprendre à mieux faire leur promotion, à faire du réseau, à gérer
les changements. L’entreprise propose un catalogue de formation : Leadership Training Catalogue, avec
une offre variée de formations spécifiques aux objectifs ci-dessus. Une des formations qui est
particulièrement suivie est « Managing Maternity by Talking Talent ». L’objectif de cette formation est
d’aider à retenir les talents féminins pendant cette phase clef du départ en congé maternité
(planification du départ/retour, communication, ré-intégration, flexibilité, psychologie).
ChezAmerican Express, l’approche est semblable. Retenir les femmes senior managers et promouvoir les
femmes dans le management intermédiaire est tout aussi problématique : alors que les femmes
représentent 63 % de l’effectif, elles ne sont que 30% dans le top management et 15% dans le Comité
Exécutif.
Pour garantir que les femmes atteignent la ligne d’arrivée, Amex6 a concentré son énergie sur un trio de
mesures :
-
Une enquête de satisfaction (« engagement survey ») remplie par tous les salarié s, qui le ur permet
d’avoir une vision nette de la satisfaction des salariés vis-à-vis de leur entreprise et de comprendre
les motivations propres aux salariés. Ceux-ci sont ensuite regroupés en petits groupes thématiques
de façon inclusive pour discuter des différents défis et proposer des solutions qui seront après
remontées au Conseil de la Diversité.
-
Des formations pour les femmes sur le leadership, la constitution de réseaux, mais aussi une
formation qui s’adresse spécifiquement aux hommes (mais qui est ouverte à l’ensemble des salariés)
pour mieux comprendre les femmes : cette formation se base en partie sur des études scientifiques
qui expliquent aux hommes/femmes leurs différences afin de mieux les accepter et les gérer.
6
American Express
17
L’adhésion et le soutien des hommes à cette politique en faveur des femmes est essentiel. Ils deviennent
des mentors, participent aux formations de développement du leadership. Dès lors les
choix/nominations de femmes se passent plus sereinement, avec l’aval des salariés masculins.
Femmes dans le t op management : approche individuelle et a pproche
organisationnelle des fre ins à la par ité e nent repr ise
« On ne naît pas femm e, on le d evient », cette phrase introductive de l’ouvrage de
Simone d e Beauvoir Le deuxième sexe, rappell e que les différenc es entre les hommes
et les femmes sont essentiell ement culturelles : elles sont le résultat d ’une
socialisation« genrée » (selon l e genre, c’est-à-direen fonction d’u ne codification des
conduites à tenir fondée sur l’appartenance à la catégorie homme ou fem me). Les
sociologues du genre vont plus loin montrant qu e la répartition même de l’humanité
en deux c atégories présentées comm e opposées est un phénomène culturel. Les
biologistes utilisent en effet plusieurs critères pour définir l es sexes : l e patrimoine
génétiqu e (chromosome XX, ou XY) les hormones, et les organes sexu els principaux
ou secondaires. Il n’y a pas toujours concordance parfaite entre ces différents
éléments, montrant que les individus se situent davantage sur une échelle du
masculin-féminin que d ans une catégorie exclusive. Les comportements féminins et
masculins ne sont donc pas d éterminés par la nature ou notre physiologie mais par
notre éducation. Les formations telles que celles présentées ici veill ent à contrebalancer l a socialisation, en formant les femm es sur l es comportements
professionnels attendus dans l’entreprise mais avec lesqu els elles ne sont pas
toujours familières.
Cette approche est également privilégiée par de nombreux réseaux d e femmes en
France qui mettent en place des dispositifs de parrainage, ou de coaching.
L’AFMD lance début 2011 une commission qui propose u ne orientation
complémentaire : il s’agit de ne plus se focaliser sur les individus mais d’interroger
les modalités organisationnelles qui bloquent l’accès d es femmes au x instances
dirigeantes dans les entreprises (compatibilité des modèles de carrières m asculins
dominants avec les parcours féminins, mod e d e sél ection et de cooptation des
dirigeants…). L a commission « gouvernanc e et fem mes » sera co-pilotée par
Jacqueline Lau fer, professeur ém érite à HEC, et Brigitte Dormion, Directrice du
Développement des Cadres Stratégiques, à La Banq ue Postale. Elle s ’appuiera sur
l’expertise de Brigitte Gresy (IGAS), et sera ouverte à l ’ensembl e des adhérents de
l’association.
1.3.3. Faire des femmes une force active de l’entreprise
1.3.3.1.
Au niveau du top management
KPMG a compris très vite l’impact positif de la présence des femmes et l’a inscrite dans sa charte de
valeurs à la fois sur la société, mais aussi sur les résultats de l’entreprise.
18
Pour donner corps à cette valeur, KPMG crée en 2003 « WAB » (Women’s advisory board), un comité
ouvert aux hommes et aux femmes, avec pour objectif de conseiller le Comité Exécutif sur les mesures
en faveur des femmes et l’exécution de celles-ci, pour répondre au fort turn-over et aux problèmes
d’évolution en interne des femmes. En détectant les différents freins tels que la prévalence de la culture
masculine caractéristique des sociétés de conseil, l’inégale valorisation des compétences, le déséquilibre
dans le temps de vie/travail, le WAB a défini une stratégie de reconquête des femmes et ceci à travers
d’initiatives au niveau national et local.
Au travers de KNOW (KPMG’s Network of Women), qui rapporte mensuellement au WAB, des sessions
de mentoring, des formations thématiques avec des intervenants extérieurs, des « life mapping
sessions7 », sont proposées aux femmes pour les aider à trouver leur place et à l’occuper. Depuis son
lancement en 2003, KNOW est passé d’un statut de pilote dans 3 bureaux à une implantation pérenne
dans 60 bureaux.
En 2009, 50% des nouvelles embauches étaient des femmes, et grâce au travail de WAB et de KNOW
(KPMG’s Network of Women), les succès ont été nombreux :
-
Depuis 2003, le nombre de femmes associées a cru de 48%,
-
Les femmes représentaient 27% des nouveaux associés de 2009,
-
Les femmes représentaient 45% des promotions au niveau de manager en 2008,
-
Dans leur dernier questio nnaire en interne, 4/5 des femmes répondent que KPMG est un endroit
formidable pour travailler et pour construire leur carrière.
Au sein d’IPG, (Interpublic group), un groupe organisé en silos (puisqu’il s’agit d’une réunion de diverses
agences qui travaillent de manière indépendante) et à très grande représentation masculine aux postes
de direction, the Women ‘s Leadership Network (WLN) a été crée pour facili ter les échanges entre des
femmes du même secteur et pour donner une voix aux femmes, qui se sentaient jusqu’à là peu écoutées
par la direction.
Alors que les participantes allaient à la première session à reculons du fait de cette culture très
cloisonnée, les succès ont été considérables : mise en commun de compétences, collaboration sur des
appels d’offre, brainstorming sur des sujets très divers allant du recrutement, au management, à la
stratégie du groupe. Aujourd’hui WLN rencontre le comité de direction 3 fois par an pour partager ses
succès et proposer des plans d’action en faveur des femmes.
1.3.3.2.
Au niveau detoute l’entreprise
Si les programmes tels que WIN (Women’s Intiative) chez Deloitte, WAB chezKPMG et WLN chez IPG,
peuvent agir comme de réelles locomotives, le relais terrain est indispensable pour garantir le succès
d’unestratégie de reconnaissance, de rétention et de promotion des femmes.
7
Ateliers accompagnant les femmes dans la déf inition de le ur plande carrière.
19
Les réseaux locaux (Affinity groups) agissent comme de véritables acteurs au niveau local pour la
promotion et la rétention des femmes. On considère souvent les Women’s groups comme la réponse aux
parties de golf, squash, déjeuners d’affaires masculi ns au cours desquels les hommes se connectent,
partagent, se positionnent. Les femmes, ne disposaient pas auparavant de ce levier.
Aujourd’hui toutes les entreprises interrogées, à l’exception de BNP Paribas et L’Oréal, ont mis en pla ce
des Women Affinity groups aux Etats-Unis. BNP Paribas a néanmoins créé en France l’association BNP
Paribas MixCity qui s’a dresseaux femmes cadres du groupe qui veulent agir pour que le rôle des femmes
dans l’entreprise et dans la société contin ue d’être valorisé. Ell e a pour objectif d’étendre son
rayonnement à l’international.
Colgate-Palmolive compte aujourd’hui 30 réseaux de femme dans le monde, un vrai ciment international
de femmes du groupe qui se rencontrent annuellement, qui disposent de leur propre portail, de leur
propre budget et de leurs propres objectifs business ou humains. Ces groupes remontent leurs
demandes, leurs conseils au Comité de la Diversité, et deux fois par an, des représentants des plus
grands groupes, viennent présenter leurs travaux au CEO.
ChezSony, WAVE (Women, Action, Value and Empowerment), est née sur le terrain et n’émane pas de la
Direction de la diversité. Il compte aujourd’hui 270 membres, propose des webinar8 sur des thèmes très
variés orientés pour les femmes, tels que « La prise de décision financière intelligente ». Il suffit
d’appeler un numéro depuis n’importe quel lieu pour participer à la conférence. Dans le cas de Sony,
c’est la dynamique entre coll ègues qui est le réel moteur du travail sur l’égalité homme/femme. Elle a
inspiré des décisions au comité de direction plutôt que d’en être l’exécutante. Grace à leurs
recommandations, Sony est devenu sponsor officiel de la Women’s week, véhicule formidable de
promotion de la marque auprès des potentielles recrues, consommatrices.
1.3.4. L’équilibre vie privée/vie professionnelle
Aux Etats-Unis, l’équilibre vie privée et vie professionnelle est fondamental. Les Américains ayant
beaucoup moins de vacances que leurs confrères français, ils tiennent beaucoup à des horaires
respectueux de leur vie privée pendant la semaine.
Il était donc tout naturel que les Etats-Unis soient précurseurs en termes de flexibilité et force de
proposition pour améliorer le quotidien de leurs salariés. C’est le cas notamment du télétravail : 7 % de
salariés sont télétravailleurs en 2004 en Europe, au sens de l’accord cadre européen, contre 25 % aux
USA (8,9% de salariés européens, selon le Conseil d’Analyse Stratégiq ue, ont pratiqué le télétravail plus
de 8h par mois entre 2000 et 2010).
1.3.4.1.
La Flexibilité
Les différentes rencontres ont permis de montrer une courbe d’a pprentissage de la flexibilité des
entreprises qui ont pu parfaitement intégrer la flexibilité dans leurs règles et de celles qui cherchent à le
faire.
8
Séminaires multimedia et interactifs e nligne
20
Google est une des entreprises qui va le plu s loin dans la promotion de l’équilibre vie
privée/professionnelle afin de se positionner comme une des sociétés les plus attirantes pour les
candidats potentiels. La flexibilité fait partie des valeurs fondatrices de la société : ce qui compte c’est le
résultat final, que le travail soit fait et bien fait, et non la façon dont il a été fait. Ce message vient du
PDG lui-même.
Cette approche très positive permet plus spécifiquement auxmères de famille de ménager leurs horaires
en fonction de leurs besoins, sans culpabiliser. Certaines salariées vivant loin du siège aménagent leurs
horaires, quand elles n’ont pas de réunions, pour éviter les embouteillages, pour prendre des rendezvous personnels, pour assister aux spectacles/réunions de leurs enfants.
Sodexo affirme très clairement sa position vis-à-vis de la flexibilité dans son rapport annuel. L’entreprise
croit en la flexibilité pour attirer les meilleurs candidats et retenir les employés les plus investis. Elle
décline pour les managers à tous les niveaux plusieurs formes de flexibilité horaire :
-
Le flextime : les salariés peuvent faire varier le début et la fin de leur journée de travail.
-
Le telecommuting : les salariés ont un bureau mais peuvent quand ils le souhaitent, travailler de chez
eux, ou d’un autre site.
-
Le remote work : les salariés travaillent exclusivement de la maison ou d’un autre site.
-
Le part-time (temps partiel) : les salariés travaillent moins d’un temps ple in, avec salaire/avantages
au prorata.
-
Le job-sharing (temps partagé): 2 employés partagent des missions et les responsabilités avec
salaire/avantagesau prorata.
Les sociétés de conseil également, telles KPMG, Deloitte, de par le caractère intellectuel de leur activité
qui ne nécessite pas de présence en continu sur le lieu de travail, offrent une grande sélection d’options
« AWA » alternative work arrangements, tels que des semaines écourtées, du télétravail, du flextime
(emploi du temps flexible), et même du partage de poste.
La flexibilité est une orientation évidente pour toutes les entreprises interrogées. Pour autant, si
certaines comme Sodexo, Google et les sociétés de services sont très avancées, d’autres doivent encore
travailler sur la mise en place « officielle » des différentes options et encourager leurs salariés à en
profiter.
L’Oréal, Philips, BNP-Paribas, Dannon, Crédit Suisse, Gotham ont toutes des politiques de flexibilité mais
celles-ci le plus souvent discrétionnaires, dis cutées au cas par cas entre chaque manager et chaque
salarié.
Devant la diversité des profils des salariés, les sociétés peinent à imposer une forme de flexibilité qui soit
un réel contrat gagnant-gagnant pour les deux parties et qui tienne compte de la spécificité de l’activité.
Le cas de Crédit Suisse parait intéressant. En 2009, la société a introduit le flextime pour ses salariés à
partir du niveau manager. Mais le résultat n’a pas été celui escompté, très peu de personnes l’ayant
21
utilisé. Les RH ont identifié que le 1 er frein était que personne n’osait être le 1er à en bénéficier, par peur
d’être montré du doigt dans un milieu très concurrentiel. Pour y remédier, la réflexions’est orientée vers
l’obligation pour les managers de travailler une journée de chez eux pour montrer l’exemple et
déculpabiliser les échelons inférieurs.
Cette approche confirme un élément indispensable dans la mise en place de cette politique : si elle n’est
pas annoncée et portée par le haut, elle n’aura pas l’impact voulu sur le bas.
1.3.4.2.
Les avantages pour les femmes
Du parking pour femmes enceintes chez Philips, aux crèches et école s privées sur site pour Google, les
entreprises ont compris qu’elles doivent sortir les grands moyens pour attirer et garder les femmes, leur
simpli fier la vie et leur témoigner leur attachement. Cette approche qui favorise le bien-être au travail et
une meilleure conciliation de la vie privée et professionnelle, bénéficie en retour à l’ensemble des
salariés.
Ci-dessous quelques exemples
-
de ce qui est aujourd’hui pratiqué :
Réseaux non professionnels de mamans/femmes pour échanger/conseiller/aider (toutes les
entreprises auditées),
-
Parking femmes enceintes (Philips),
-
Salles de lactation (toutes les entreprises auditées),
-
Salles de massage (Google ),
-
Salles de sport (Google),
-
Congé maternité allongé (16 semaines chez Google), pour rappel il n’existe pas de congé légal
rémunéré aux Etats-Unis pour la maternité,
-
Nourriture livrée chez les jeunes mamans (Google),
-
Programme de perte de poids (Boog Allen),
-
Conseiller en carrière (Accenture),
-
Réduction sur les frais de scolarité (Bristol Meyers), aide financière (300$ Bristol) pour la garde à
domicile ou en crèche. Pour comparaison, les frais mensuels de garde d’enfant aux Etats-Unis
s’élèvent en moyenne à 800 à 1400 $ par mois,
-
Coach pour le management du stress.
22
Au-delà de cette liste non-exhaustive de mesures, ce qui ressort c’est la volonté des sociétés de prendre
en compte le bien-être et la conciliatio n entre la vie personnelle et professionnelle des salariés, de créer
un vrai partenariat avec eux pour l’avenir et de les fidéliser en dehors avantages financiers.
Deuxexemples chez KPMG et Dannon l’illustrent parfaitement :
-
Consciente des risques liés aux voyages, KPMG déconseille à toutes ses salariées subissant des
traitements dans le cadre de fécondation in vitro de voyager en avion, préférant des vidéoconférences, l’envoi de collègues pour les rempla cer. Elle propose également des aides financières
adaptées aux mères qui doivent beaucoup voyager, et donc faire souventappel à des babysitteurs.
-
Dannon, dont la configuration d’organisation très plate limite les promotio ns, parie sur les
mouvements horizontauxavec changement de métier pour les femmes. Les cas se multiplient depuis
2 ans permettant de répondre aux demandes de promotions des femmes.
1.3.5. Communiquer autour des mesures en faveur des femmes
Pour conclure, le fait de proposer des façons de travailler plus flexibles et de créer un catalogue de
services spécifiques pour le bien-être des salariés et une meilleure articulation de leur vie familiale et
professionnelle, est devenu un avantage compétitif essentiel pour les entreprises, sur le quel elles
communiquent largement pour accroitre leur attractivité.
Tous les ans, le magazine Working Mother’s Magazine publie la liste des 100 meilleures entreprises pour
lesquelles travailler en tant que mère. En 2009, parmi les gagnants, on trouve Amex, Colgate-Palmoli ve,
Procter, BCG, Crédit Suisse, GE, Glaxo, J&J, KMPG.
Le magazine détaille les positions respectives de chaque entreprise vis-à-vis des mères, leurs dernières
initiatives. Cela permet aux candidates potentielles d’avoir une vision très claire de la position de chaque
entreprise en faveur des femmes et aux sala riées de reconnaître la valeur de la société pour laquelle
elles travaillent.
Sur les 100 meilleures entreprises jugées par les mères actives :
-
100% offrent des horaires flexibles et du télétravail,
-
98% offrent le partage du poste,
-
94% offrent des semaines compressées,
-
86% offrent du soutien parental en cas de problème (garde à domicile, crèche)
Contrairement aux idées reçues, participer et figurer sur cette liste n’est pas uniquement le fruit du
jugement du magazine. C’est un travail de longue haleine, qui demande de consacrer un important
budget pour être candidat et de répondre à un questionnaire qui comprend plus de 300 points. C’est la
version américaine pour les entreprises de « Produit de L’Année » dans le domaine de la consommation.
23
La remise d’un trophée aux entreprises encourageant les politiques en faveur des femmes, en a fait un
réel axe de développement pour les entreprises.
24
2. TABLEAUX DE BORD DIVERSITÉ
Bien que la taille et l’importance des équipes gérant la diversité soient variable d’une société à une
autre, toutes les entreprises interrogées s’accordent pour dire que l’étape finale et nécessaire pour une
politique de diversité et d’inclusion réussie, est de disposer d’un tableau de bord et de responsabiliser les
managers sur la diversité. Certaines ont déjà adopté les tableaux de bord, d’autres sont en cours,
estimant qu’il s en disposeront d’ici 1 à 2 ans.
Aux Etats-Unis, comme en France, on ne mesure que ce qui est autorisé par la loi. Les Américains
disposent donc d’informations concernant les femmes et les minorités (personnes de culture hispanique,
africains, noir américains, asiatiques, Caraïbes, indiens et double minorité) mais ne prennent pas en
considération les évaluations selon l’âge et ou le handicap de leurs salariés.
Si, pendant plusieurs années, le suivi était essentiellement quantitatif, chiffres absolus et pourcentages
des différentes minorités, évolution, ce modèle a été progressivement complété par un suivi qualitatif
prenant en compte plusieurs éléments tels les questionnaires de satis faction, les actions en faveur de la
diversité comme la formation à la non-discrim ination (contenu, fréquence), le mentoring (nombre et
diversité des personnes concernées), les réseaux de salariés et la communication autour de la diversité.
Les tableaux de bord sous ce format (Exemples : Sodexo, L’Oréal, Deloitte, Crédit Suisse, IPG en annexe),
permettent de réellement établir un état des lieux, listant les moyens utilisés, de mesurer les progrès et
de faire du reporting sur l’a tteinte des objectifs fixés. Ils sont dans la majorité des cas, présentés
trimestriellement aux responsables RH et au PDG pour permettre des éventuels ajustements. Une fois
par an, les résultats sont consolidés sous la forme d’un bilan de la diversité présenté au Comité Exécutif.
Le rapport mesure les progrès accomplis dans les différents axes, en utilisant des codes de couleur : vert
= objectif atteint, jaune = objectif en voie d’être atteint, rouge = objectif non atteint.
Étude des différents tableauxde bord
-
Sodexo-L’Oreal-Deloitte
Dans le tableau de bord établi par ces entreprises en accord avec Diversity Best Practices
(Association d’échange entre entreprises adhérentes sur la thématique de la diversité aux EtatsUnis), on a peut-être une des visions les plus complètes d’un reporting diversité.
*Un reporting chiffré très précis, qui analyse tousles niveaux de l’entreprise : top management, mid,
et embauche.
-% de femmes/minorités dans le senior management,
- % de femmes/minorités parmi les prétendants aux 200 postes les plus seniors,
- % de femmes/minorités parmi les promotions,
- % rétention des femmes/min orités aux postes élevés (départs volontaires/non volontaires),
- % de femmes minorités/femmes dans les embauches,
25
*une analyse despartenariats extérieurs
- association avec des communautés,
- sponsoring.
*une approche plus qualitative des initiatives diversité internes
- étude de satisfaction des salariés
- les réseauxde salariés
- la formation
*une vision des dépenses et de la communication extérieure de la diversité,
*la diversité desfournisseurs.
-
IPG :
« The IPG Scorecard » est fait de deux composants : premièrement, une partie chiffrée qui analyse
les changements par niveaux du management : O&M1 (EEO Executive/Senior level managers), et
O&M2 (1er /Mid-level managers). Elle comptabilise le nombre d’embauches de femmes, le nombre
d’embauches de minorités, et le nombre de promotions pour chacune de ces cibles. Elle met en
parallèle les objectifs, les chiffres et les résultats de la stratégie de l’entreprise. Deuxièmement, une
étude d’inclusion est envoyée à tous les salariés et aux réseaux de salarié s. Elle permet d’avoir une
vision très claire de la satisfaction par minorité et de recueillir une appréciation plu s subjective.
La grande particularit é de Sodexo, qui n’est pas visible dans son tableau de bord, est d’avoir, dès ses
débuts lié diversité et reconnaissance. On récompense les champions de la diversité, même pour des
contributions qui peuvent paraître en apparence peu significatives (liées par exemple aux aspects
qualitatifs du tableau de bord). La valorisation est financière (25% du bonus de l’équipe dirigeante est lié
aux engagements en matière de diversité, 10-15% du bonus pour les managers, et ceci indépendamment
des résultats financiers de la société) mais aussi humaine. Les champions de la diversité sont portés en
véritables moteurs ausein de l’entreprise au travers un Hall of Fame of Diversity Champions :
-
Crédit Suisse :
Leur table au de bord présente une approche très semblable auxprécédentes avec une analyse en %
de la représentation des femmes/minorités à tous les niveaux hiérarchiques.
La vraie différence provident de l’accent mis sur 3 critères :
26
§ la participation aux formations,
§ la participation des salariés à un “Employee Network Group”,
§ les résultats de l’étude de satisfaction.
L’AFMD se mobilise pour mesurer la diversité
Pour répondre à une question essentiell e pour l e pilotage d ’une politique diversité,
des premiers travaux de défrichage sur la mesure, organisés par l’AFMD, ont donné
lieu en 2009 à l a publ ication du Livre Blanc « Mesurer la diversité et la
discrimination. Eléments de Réponse », réalisé par Hédia Z annad et Pete Stone,
enseignants chercheur à Rouen Business School.
Fort de ce travail, l’A FMD se mobilise avec Equity Lab pour construire un rapport
annuel « Ce qui ne se mes ure pas n’existe pas ».
Les entreprises se sont engagées à d évelopper d es politiques diversité, notamment
en signant la Ch arted e l a Diversité dès 20 04. Six ans après, ces politiques atteignant
une certaine m aturité, les entreprises qui les ont portées ne sont pas reconnues sur
les résultats qu’elles ont obtenus faute d’un référentiel d’indicateurs de m esure
structuré pour l’ensemble des champs d e la diversité, d ’une part, et d ’une
réglementation adéquate d’autre part.
Anticiper la réglementation
Par ailleurs, le rapport Héran publié à l’issue des travaux du COMEDD, préconise la
mise en pl ace d’un observatoire des discriminations et de la diversité auprès de la
HALDE et l’élaboration d’un rapport de situation comparée en matière de diversité.
Aussibien l’observatoire que le rapport de situationcomparée s ’appuieraient sur des
indicateurs quantitatifs et qualitatifs.
Afin d ’anticiper cette évolution, l’A FMD et Equity L ab se sont lanc és avec des
entreprises volontaires dans un travail d’élaboration conjoint d’un référentiel
d’indicateurs qui formerait le socle d’u n « rapport annu el diversité».
Ce référentiel d’indicateurs sera porté auprès du législateur, d es pouvoirs publics et
des institutions afin d’en faire le socle commun pour le reporting des entreprises en
matière de diversité.
Ce projet est placé sous le patronage du Commissaire à la Diversité et à l’Egalité des
chances.
Les résultats de ces travaux seront disponibles début 2011.
27
3. DIVERSITÉ DES FOURNISSEURS
Aux Etats-Unis la politique de diversité des fournisseurs est très réglementée et structurée. En France, la
situation est différente. La diversité des fournisseurs est encore un thème récent et où l’impossibilité de
compter le nombre de minorités visibles freine une éventuelle labellisation accompagnerait une réelle
politique sur ce sujet.
3.1.
Les acteurs externes d’une politique de diversité des fournisseurs
Des organismes tels WBENC (Women’s Business Enterprise National Council) et le NMSDC (National
Minority Supplier Development Council) sont mandatés par les entreprises pour accorder aux
fournisseurs détenant au minimum 51% de leur capital par des femmes ou des minorités visibles, une
labell isation « Women owned business » ou « Minority owned business ». Ces organismes constituent un
réel pont entre les grandes entreprises désireuses d’étendre leurs actions de diversit é à leurs
fournisseurs, en servant d’agent d’audit, de certification. Les entreprises disposent ainsi d’une
plateforme géante de fournisseurs diversifiés.
Le NMSDC propose à lui toutseul 15 000 fournisseurs divers à 3500 membres corporate.
L’Objectif de toutes les entreprises interrogées est qu’à moyen ou long terme 25% (chiffres minorités du
Census) de leurs dépenses soient au profit des entreprises détenues par des minorités. Chez L’Oréal USA,
le recours à des fournisseurs diversifiés se fait selon exactement le même processus et sur les mêmes
critères de sélection que les fournisseurs classiques. En revanche, à compétences égales, le choix se
portera sur le fournis seur dit diversifié. Aujourd’hui 15% des dépenses de L’Oréal USA sont réalisées
auprès de fournisseurs diversifiés, ce qui est un pourcentage très encourageant pour l’avenir de cette
politique.
Walmart dispose d’un Comité de diversité des fournisseurs, composé des dirigeants issus de toutes leurs
directions opérationnelles (Logistique, Marketing, Opérationnel, Informatique, International, Juridique et
immobilier), responsable de la mise en œuvre d’une politique de diversification des fournisseurs, axée
sur les femmes et les minorités. Aujourd’hui Walmart compte 2500 fournisseurs divers. Les dépenses en
faveur des fournisseurs divers sont passées de $2 million en 1994 à $6 milliards en 2008 (+25% par
rapport a 2007).
Pour faciliter la mise en œuvre de cette stratégie, Walmart a développé des liens très forts avec des
agences de développement et de certification locales, comme les Chambres de Commerce AfricainAmericain, Hispanique, Indien, Asiatique, WBENC et NMSDC.
3.2.
Moteurs et freins de la politique de diversité des fournisseurs
Là où elle a été implantée, la politique de diversité des fournisseurs rencontre de grands succès. Souvent
petits, très réactifs, les fournisseurs diversifiés répondent mieux aux impératifs de temps des grandes
28
entreprises, notamment en période de crise, période pendant lesquelles ils parviennent à produire des
plus petites séries. Les grands défenseurs de la diversité estiment aussi que cette diversification est
essentielle pour accompagner des clientèles de plus en plu s diverses, pour mieux répondre à leurs
attentes.
Sodexo, qui a été parmi les premiers à s’engager vis-à-vis dans la diversité des fournisseurs, et dont les
efforts permanents ont été récompensés cette année par 5 prix, parle de « la spirale positive avec ses
clients et fournisseurs ».
En s’engageant très fermement en faveur de la diversité des fournisseurs, l’entreprise justifie une
formule gagnante à tous les niveaux: les fournisseurs, les économies locales et les clients. Des produits
et services provenant d’une plateforme diverse permettent de proposer de meilleurs produits pour les
menus, un meilleur service, des offres clients plus compétitives. Les fournisseurs, à leur tour, bénéficient
d’une plus meilleure visibilité, et de l’e xpérience de Sodexo.
Aujourd’hui Sodexo a développé des relations professionnelles avec 1800 fournisseurs divers et en 2009,
l’entreprise a constaté une hausse de 22% du nombre de clients qui ont demandé à leur tour à voir
augmenter les dépenses en faveur des fournisseurs divers. Ce chiffre de 22% est pour l’équipe diversité
une des plus belles récompenses, car cela veut dire que la spirale positive englobe aujourd’hui un
nombre croissant d’entreprises pour qui la diversité des fournisseurs est devenue une priorité.
ATT (American Telephone and Telegraph) dispose d’un programme de Diversité des fournisseurs depuis
1968 (Minorit y Business enterprise), enrichi en 1980 par le programme en faveur des entreprises
détenues par les femmes, et en 1993, par celui en faveur des Vétérans. En 2009, les dépenses avec ces
fournisseurs ont atteint $9 milliards, soit $50 milliards en cumul depuis la création du programme.
Leurs objectifs sont ambitieux : 21.5% de dépenses annuelles avec des fournisseurs diversifiés (15% avec
les minorités, 5 % avec les femmes, 1.5% avec les vétérans.). Pour les atteindre, la stratégie d’ATT passe
par le mentoring des fournisseurs pour les accompagner dans leur développement. En 2009, par
exemple, ATT a lancé WOCB (Women of Color Businesses), une initiative qui a duré un an et qui visait à
former un groupe pilote de propriétaires d’entreprises et à le s aider à développer les outils et stratégies
nécessaires pour gagner de gros contrats. Le programme était basé sur 6 grands thèmes : accès au
capital, initiatives « vertes, durables », utiliser des solutions de business technologiques, améliorer leur
expertise sur les appels d’offre.
3.3.
Freins à une généralisation massive de cette politique aux Etats-Unis
Le seul frein à une généralisation et une accélération de la diversité des fournisseurs que nous pourrions
évoquer, est la peur, notamment peur d’échanger des fournisseurs fiables pour des plus petits
fournisseurs, mêmes divers. Pour beaucoup de sociétés, un mauvais fournisseur peut être dramatique
pour la production, mettant en péril le chiffre d’affaires. Si la crise a permis à certains fournisseurs divers
de montrer leur solidité, cela a aussi rendu les grandes entreprises plus frileuses.
29
3.4.
Recommandation pour la version française
La version originale américaine de diversité des fournisseurs ne pourra jamais être intégralement
transposable en France, dans la mesure où en France, on ne peut ni compter, ni identifier les minorités. Il
n’en demeure pas moins que pour réussir une véritable politique de diversité en France, la méthode
américaine présente beaucoup d’idées intéressantes comme la certification indépendante et une
plateforme de fournisseurs potentiels triés en amont.
La France pourrait recourir à ce type de centralisation et de certification pour des entreprises détenues
par des femmes, par des personnes situées en Zones Urbaines Sensibles (ZUS), des associations de
jeunes ou des personnes éloignées de l’emploi, labels possibles car il s’agit de critères identifiables et
chiffrables. Dans ce cadre, il convient de souligner l’initiative innovante de l’ADIVE. L’Agence pour la
Diversité Entrepreneuriale (ADIVE) a été créée en janvier 2009 (Association Loi 1901) pour mettre en
relation les entrepreneurs issus de la diversité (extra-européens) ou installés en France dans un territoire
« politique de la ville » (Zones Urbaines Sensibles) avec des grandes entreprises.
Mais une recommandation pour aller une étape plus loin et rassurer les entreprises, serait de créer une
plateforme supplémentaire sur les portails des organismes de certification, qui permette auxentreprises
de noter / partager leurs expériences avec les différents fournisseurs.
Ainsi une grande entreprise voyant qu’un autre acteur du même secteur d’activité a travaillé avec tel ou
tel fournisseur de façon positive, sera moins récalcitrant à l’idée de travailler avec un fournisseur divers,
et ainsi se lancer dans le cercle vertueux.
Diversité et Four nisse urs
L’AFMD a choisi de se mobiliser sur cette question, au travers d’une commission de
travail ouverte aux entreprises adhérentes. En effet,
- Lacroissance des PM E est l’un des enjeux économiques majeurs d e la France,
- LaFrancecompte de nombreuses petites entreprises mais peu de moyennes,
- Les PME peinent à accéder aux commandes des grands comptes.
Le constat d’un « pl afond de verre» pour les PME a été établi dans la plu part des
économies développées. Consid éré comme un frein à la croissance, il a abouti à la
mise en plac e du Small Business Act américain dès 1953, incluant un volet « Supplier
Diversity » pour les PME dirigées par d es femm es, des minorités ou des vétérans de
guerre.
Dans le prolongem ent du débat sur le Sm all Business Act à la française, l ’association
EQUITY LAB a mis au point un référentiel achat « Diversité d es fournisseurs » en
collaboration avec l’agence VIGEO et 10 grands comptes (Groupe Auchan, BMS,
Bouygues SA et Bouygu es Telecom, Groupe Casino, Coca-Cola France, Elior, Page
Personnel, L’Oréal, Sano fi-Aventis)
Il porte sur trois engagem ents :
30
1. Contribuer aux progrès économiqu es et sociaux des territoires d’impl antation en
facilitant l’accès des TPE-PME aux circuits d’achat ;
2. Promouvoir des relations équilibrées avec les PME afin d’assurer l’accès effectif
aux circuits d’ach ats ;
3.
Valoriser les TPE/PME qui s’inscrivent dans une démarche sociale et
environnementale
Les motivations principales exprimées par les directions ach ats pour développer une
politique « diversité des fournisseurs » auprès des PME sont les suivantes :
-
Accès à des marchés de niche, contribution à l ’innovation
Flexibilité, réactivité
Maintien d’un marché d e fournisseurs concurrentiels
Contribution à la politiqu edes achats responsables, RSE
Contribution au développement économique d es territoires d’implantation
Anticipation d’une évolution régl ementaire sur l’attribution des m archés publics
Examiner les opportunités et les freins dans la mise en œuvre d’une démarche
diversité des fournisseurs en interne
Faire expérimenter l e ré férentiel achat par un noyau d ’entreprises volontaires
Auditer des entreprises en phase d’expérimentation du référentiel
Recenser les bonnes pratiques d es entreprises, y compris à l’international
Rédiger u nlivre bl anc en fin d e commission pour diffusion au près des entreprises
membres,des partenaires spécialisés et des pouvoirs publics.
Donner un c adre commun à une expérimentation d’un noyau d’entreprises dans
la mise en place d’une d émarche Diversité des fournisseurs
Valider les outils et compét ences néc essaires à la mise en œuvre d’une politique
Diversité des fournisseurs
Valider le référentiel achat comme outils d e monitoring et d’évalu ation reconnu
dans le cadre d ’une politique Diversité des fournisseurs
Partager une expérienc e pionnière en matière de RSE
Promouvoir la démarche Diversité des fournisseurs auprès des donneurs d’ordre
& pouvoirs publics
Cettecommission débutera au premier trimestre 2011.
31
4. DIVERSITÉ ET MARKETING
La diversité aux Etats-Unis répondant à un business case très puissant avec des vraies considérations
économiques et d’innovation, il est tout naturel d’utiliser la diversité comme un outil marketing. Elle
devient progressivement une évidence pour aller séduire un public de plus en plus divers. On le constate
au niveau du recrutement, de la communic ation autour de l’entreprise et au niveau business pour
s’ouvrir à de nouveaux marchés.
Tout comme pour les tableaux de bord et la diversité des fournisseurs, le perfectionnement de
l’utilisation de cet outil dépend de la façon dont se positionnement les entreprises sur la courbe
d’apprentissage de la diversité.
4.1.
Promouvoir sa politique diversité à la source : dans les écoles et les
universités
Les relations entre le s entreprises et les écoles sont un élément essentiel de la stratégie de toute
entreprise qui souhaite intégrer la diversité en amont du recrutement. C’est au travers des partenariats
qu’une entreprise établit et par les équipes qu’elle met en avant, qu’elle va réussir à attirer des candidats
divers à potentiel.
Toutes les sociétés s’accordent à dire qu’aujourd’hui elles envoient sur les campus des équipes de
recrutement diverses, à la fois en termes de mixité mais aussi de minorité. On est très loin de l’époque
où les banques envoyaient 5 hommes blancs en costume/cravate sur les campus. Maintenant, c’est une
équipe diverse qui a pour mission de vendre les couleurs d’une société et ses différentes composantes.
L’Oréal USA reconnait que pour réussir sa politique de recrutement diversifié, il faut « aller pêcher dans
différentes mares », c’est-à-dire aller chercher les candidats dans des campus ou quartiers où l’on ne va
habituellement pas, s’engager avec des associations axées sur la promotion d’étudiants minoritaires tels
les LGBT (Lesbian Gay Bisexuel, Transsexuel), noirs, asiatiques, hispaniques. C’est le fait de se positionner
comme un employeur divers qui permet d’accroitre la crédibilité des sociétés vis-à-vis de certaines
communautés.
4.2.
Se promouvoir comme une société diverse
Toutes les entreprises rencontrées, sans exception, font état de nombreuses récompenses de leurs
différentes initiatives en termes de diversité.
Avant de lister les différentes possibilités, il est essentiel de souligner que ces « Awards », font partie
d’une réelle stratégie marketing d’une société par une véritable recherche de différenciation sur le
marché, car elles représentent un coût, des investissements en temps. Il existe environ 50 types de prix
différents qui récompensent la diversité, que cela soit Diversity INC, Best Working Mother’s companies,
Supplier Diversity, mais surtout l’ensemble les prix donnés par les différentes communautés ethniques.
Les sociétés ciblent les différents prix en fonction des candidats, communautés dont ils souhaitent
s’approcher.
32
La majorité des grandes sociétés cherchent à être présentes dans la liste des «élus ».
Ainsi, L’Oréal donne la priorité à la communauté noire améric aine avec des relations privilégiées avec la
NY Coalition of 100 Black Women, National Black MBA. Le Crédit Suisse a travaillé depuis 4 ans pour
rester parmi le top 100 des entreprises dans l’étude réalisée par Working Mother’s magazine. C’est
Sodexo va le plus loin dans la compétition. Elle se positionne comme étant l’entreprise la plus diverse du
monde : « Employer of choice ». Sur son site, dans son bilan, elle le formule très clairement : « Nous
reconnaissons que l’avantage concurrentiel de Sodexo, est l’ensemble des personnes qui la composent.
Recruter des talents divers et hautement qualifiés est la base de notre politique de diversité et
d’inclusion. En fait 91.5% de nos candidats représentent la diversité ethnique ou de genre. Notre focus
pour devenir « Employeur de choix » est alimenté par une stratégie d’embauche ambitieuse et
innovante». Cette stratégie se solde par un éventail de prix: Numéro 1 de Diversity Inc, Top 100 Best
Places to work for Working Mothers, Diversity Leadership Award. Pour Rohini Anand, Chief Diversity
Officer of Sodexo, la plus grande victoire de cette stratégie est le fait qu’aujourd’hui des personnes se
portent candidates chez Sodexo pour ses valeurs de diversité sans forcément connaître l’activité de
l’entreprise.
4.3.
Puiser dans les ressources diverses de l’entreprise
Google nous offre un des meilleurs exemples d’utilisation de la diversité comme ressource marketing.
Selon, le dernier rapport de e-marketing aux Etats Unis, il y a aujourd’hui 23 millions d’hispaniques en
ligne, ce qui ne représente que 52% de la population hispanique américaine. D’ici 2012, plus de 29
millions seront en ligne, soit une pénétration de 58.6%. Pour capter ce marché croissant avec Adsense et
Adwords, deux offres de Google pour accroitre les ventes en li gne, les employés du service des ventes en
ligne et du service opérationnel ont lancé un groupe de réflexion afin de coordonner les efforts de
salariés disséminés dans toute l’organisation.
Ce groupe, appelé les Guguelitos, travaille sur le fait rendre Google plus top of mind chez les
Hispaniques, de faire prendre conscience aux annonceurs des opportunités croissantes dans le marché
hispanique, et d’attirer les investissements sur ce marché afin de le faire croître. Le réseau s’appuie sur
un réseau interne hispanique pour leur donner des meille ures clefs de compréhension du peuple
hispanique, leur demandant de faire de la formation en interne et en externe et de les aider à optimiser
leurs offres pour les futurs clients hispaniques.
Grâce au travail des Guguelitos, Google commence à remporter de vrais succès auprès de cette cible.
L’entreprise constateainsi une meilleure pénétration d’Adsense et Adwords.
Colgate-Palmolive, pour sa part, utilis e beaucoup ces réseaux internes pour trouver de nouveaux relais
d’innovation. On peut citer deux types d’action :
-
Un concours d’innovation ouvert à tous le urs salariés et réseauxd’employés. Le Vice-Président de la
diversité préside ce concours et annuellement le Conseil de la diversité accorde un budget de $500
000, ce qui a permis le développement de projets à fort potentiel. Un des exemples les plus
marquants fut le lancement du dentifrice Colgate avec strip.
33
En effet, les études avaie nt révélé une habitude des consommateurs hispaniques : le mâchage de
strips mentholés. Afin d’améliorer la pénétration sur le marché hispanique, un groupe d’employés
avaient eu l’idée de lancer un dentifrice avec strip intégré, ce qui s’est avéré être un des meilleurs
lancements aux Etats-Unis.
-
Les réseaux de salariés (Affinity groups) sont mis à contribution dans des réflexions spécifiques à
certains marchés. Chez Colgate-Palmolive, on estime que la diversité doit être incluse dans toute
approche marketing. Si une personne issue d’une minorité peut être plus à même d’anticiper les
besoins de celle-ci, car il n’y a pas de courbe d’apprentissage, il ne va pas du tout de soi qu’il sera le
plus à même réaliser des opérations de promotion. La richesse vient justement de la rencontre entre
les différentes cultures. Les responsables marketing prenant appui sur les réseaux de minorités pour
comprendre les codes, le langage, apportent également leur vision. Un cas récent valorise cette
démarche.
Lors du lancement en 2009 de WISP (la brosse à dents « on the go »), l’équipe marketinga beaucoup
travaillé avec les Affinity groups sur le lancement. Identifiant le public LGBT comme une cible à fort
potentiel, très tendance, nocturne, le marketing et le réseau LGBT ont établi un plan de lancement
musclé. Un des évènements clés fut de sponsoriser une des plus grandes réunions à Washington
avec les sénateurs et leaders d’opinions LGBT, décorant la salle comme une boîte de nuit, avec des
WISP partout.
4.4.
Cibler les diversités pour s’ouvrir de nouveaux marchés
Avec les chiffres actuels et les prévisions du Census aux Etats-Unis, il va sans dire que les minorités sont
un public impératif à atteindre, si les entreprises veulent garantir une croissance de leur chiffre
d’affaires. Plusieurs possibilités s’offrent aux entreprises.
4.4.1. Sur le terrain
4.4.1.1.
Volunteer day
Aller à la rencontre des différentes minorités sur le terrain, pour renforcer la crédibilité de l’entreprise
par des actes concrets. Aux Etats-Unis, le volunteer day est généralisé dans toutes les sociétés.
Concrètement cela signifie que pendant une journée, les salariés délaissent l’entreprise pour travailler
ensemble autour d’une bonne cause : nettoyer un quartier, construire une maison, planter des arbres,
aider des personnes âgées. C’est un acte important pour consolider l’esprit d’équipe mais c’est avant
tout une opportunité pour une société de communiquer ses valeurs sur le terrain en dehors des sphères
habituelles de la publicité sur les produits. L’Oréal USA travaille avec NY Cares (Association newyorkaise
de lutte contre l’exclusion), Dannon s’est mobilisé pour nettoyer un quartier.
4.4.1.2.
Créer des partenariats sur le terrain
Sodexo en 2009 a créé un partenariat avec les Hotels Hyatt pour organiser la première compétition
culinaire pour le NAACP (National Association for the Advancement of Colored people). Grâce à l’aide de
34
l’Alliance Black Culinarian, qui a sélectionné les candidats, les participants, aidés des chefs de Sodexo,
devaient créer un menu utilisant les ingrédients et recettes traditionnelles de leur communauté. Ce fut
un tel succès que l’évènement s’étendra à 4 nouvelles villes en 2010.
4.4.1.3.
Travailler avec ses clients pour développer et utiliser la diversité sur le t errain
L’équipe de vente/marketingd’American Express en 2008 a été avant-gardiste, donnant à voir toutes les
possib ilités qui s’offrent sur le terrain. Souhait ant se développer auprès de la cible LGBT, cette entreprise
cherchait des opportunités pour augmenter sa notoriété. Elle s’est appuyée sur les nouveaux défilés
LGBT en Angleterre pour proposer aux commerçants Amex de faire du marketing ciblé. Ainsi les
commerçants tout le long du parcours du défilé valorisaient Amex dans leurs vitrines, proposaient des
réductions au public LGBT. Cette expérience a été très positive en termes de ventes et notoriété. Amex a
décidé de la continuer et d’en faire un axe de développement pour sa cible LGBT.
Colgate-Palmolive a développé un outil de terrain marquant qui est le programme Bright Smiles, Bright
Futures. Grâce à un camion qui sill onne le pays, visitant les communautés défavorisées rurales et
urbaines, une équipe de dentistes bénévoles fait un bilan dentaire, offre des outils pédagogiques sur le
soin des dents, et donne le 1er kit Colgate aux enfants et aux parents, créant une véritable relation de
confia nce entre l’entreprise et les individus. Aujourd’hui, plus de 100 millions d’enfants ont profité de ce
programme.
4.4.2. Par la publicité
Un e-mail récemment envoyé par la direction de Procter & Gamble à toutes ses agences de publicité
donne le ton sur la diversité. Non seulement, il encourage très fermement les agences à l’aider à
atteindre son objectif de 16% de dépenses auprès des fournisseurs fe mmes/minoritaires (embauche de
sociétés de retouche/production/casting divers), mais également à se positionner plus intelligemment
pour se connecter et/ou maintenir le contact avec une population de plus en plus diverse.
Cet e-mail résume parfaitement l’état d’esprit de toutes les entreprises : trouver des solutions
publicitaires qui permettent de s’adresser plus efficacement aux femmes et aux minorités. Certaines
entreprises partagent le fait qu’elles font appel à des agences très spécialisées pour partir à la conquête
d’une cible (les agences LGBTpour une publicité gay par exemple) et qu’elles recrutent des porte-paroles
divers pour atteindre un public spécifique. Contrairement à la France où le projet de mettre des quotas
dans les publicités est fortement avancé, les Etats-Unis n’ont pas encore de proposition dans ce sens.
35
CONCLUSION
Ce qui est apparu au fil des rencontres est que 4 conditions doivent êtres réunies pour qu’une politique
de diversité soit une réussite, à la fois pour les femmes, la mesure de la diversité, la politique de diversité
des fournisseurs et le marketing de celle-ci.
1. L’aval des dirigeants au plus haut niveau
Une politique de diversité/inclusion ne peut et ne doit pas être une simple communication du PDG, mais
un politique dans laquelle il croit profondément. L’engagement du leader permet de donner une vision
claire de cette politique en interne comme en externe. Cela génère une plus forte implication des
collaborateurs qui deviennent de véritables relais du message et de décisions.
2. Créer une équipe dédiée à la diversité et lui donner le pouvoir et les
moyens nécessaires
Toutes les différentes politiques de diversité et d’inclusio n, que ce soient les affinity groups, le
mentoring, la formation… impliquent des coûts et beaucoup d’organisation. Une entreprise qui souhaite
que cette politique fonctionne doit à tout prix donner les moyens à une équipe dédiée qui travaille main
dans la main avec l’opérationnel pour que performance économique et diversité ne se perdent jamais de
vue.
3. Disposer de relais sur le terrain
Comme le dis ent les américains une vraie politique de diversité /inclusion réussit quand est elle TopBottom et Bottom–up. Cela signifie que le message du PDG est très clair sur sa position et celle de
l’entreprise au sujet de la diversité, mais que le terrain est le garant de la déclinaison/reproduction de la
politique de diversité d’un groupe national ou international, en assurant la descente de l’information et
la remontée des pratiques innovantes du terrain vers le siège.
4. Etablir un reporting transparent régulier sur les rémunérations
Un reporting régulier, tous les 3 mois entre le PDG, les RH et l’équipe en charge de la diversité, et une
fois par an au travers d’un Bilan de la Diversité permet :
1. De se protéger contre tout recours judicia ire,
2. Se donner une vraie vision du passé/présent/futur, faire un réel état des lieux et engager une
démarche volontariste pour le futur,
3. Communiquer sur les objectifs et progrès, en interne et externe, de nommer des « champions de la
diversité », de créer une vraie fierté d’être un acteur de la diversité,
4. D’intéresser financièrement les équipes aux résultats pour qu’à terme, la diversité occupe la même
place que les autres objectifs de l’entreprise.
36
ANNEXES
Annexe 1 : Tableaux de bord Deloitte
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38
39
Annexe 2 : Tableaux de bord IPG
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