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notre planète Zhou Qiang Transformer le développement Emmanuel Ze Meka Un prix bien justifié Ray C. Anderson C’est la nature Revue du Programme des Nations Unies pour l’environnement – June 2011 Yolanda Kakabadse Une croissance verte grâce aux forêts Forêts La nature à votre service PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service 1 page 4 ZHOU QIANG : Transformer le développement L’augmentation de l’étendue du couvert forestier, grâce à des efforts constants et à la coopération, permet de construire une société respectueuse de l’environnement et de promouvoir l’investissement. EMMANUEL ZE MEKA : Un prix bien justifié Une gestion durable des forêts est possible, tant que les biens et les services qu’elles procurent sont correctement évalués et rémunérés. page 6 page 8 FRANCES SEYMOUR : Surexploitées, sous-évaluées Il est temps de comprendre tous les avantages que constituent les forêts pour les communautés locales comme pour le monde entier. page 12 YEMI KATERERE : Une occasion unique Comment le Programme REDD+ a remis la conservation et la gestion durable des forêts sur le devant de la scène. SATINDER BINDRA : Sur le feu Comment l’amélioration des fourneaux de cuisine peut réduire la déforestation, sauver des vies humaines et combattre les changements climatiques. page 14 et aussi réflexions livres Le PNUE à l’œuvre produits people prix et événements star page 3 page 11 page 18 PAGE 21 RAY C ANDERSON : C’est la nature Comment le fait d’imiter la manière de faire d’une forêt a produit un succès commercial éclatant. page 24 page 30 PAGE 34 page 22 YOLANDA KAKABADSE : Une croissance verte grâce aux forêts Une meilleure gestion des forêts permettra de créer un climat environnemental et économique ne faisant que des gagnants. MARYANNE GRIEG-GRAN et STEVE BASS : Les arbres, sources d’économies Les forêts peuvent jouer un rôle primordial dans l’économie verte à condition que les nombreux avantages qu’elles offrent soient évalués à leur juste valeur. ANDREW W. MITCHELL : Investir dans le capital naturel Un investissement proactif est nécessaire pour payer pour les services écosystémiques et contribuer ainsi à sauver les forêts. 2 PNUE page 16 TENSIE WHELAN : Visiter les forêts, c’est aussi les conserver NOTRE PLANÈTE la nature à votre service La certification du tourisme durable peut être un moyen puissant de stimuler la conservation des forêts. page 31 page 26 page 28 L’Inde a lancé avec succès des projets permettant de suivre la santé des plantes, des animaux, des ressources en eau et d’autres ressources naturelles du pays, dont notamment les Sundarbans — la plus grande forêt deltaïque de mangroves du monde qui abrite l’une des espèces fauniques les plus emblématiques de l’Inde : le tigre. Parallèlement, le pays est de plus en plus à l’avant-garde de certaines initiatives favorisant la transition vers une économie verte qui émergent dans le monde entier. De la fabrication de turbines à énergie solaire et éolienne à l’adoption de la Rural Employment Guarantee Act assurant un travail rémunéré à des millions de ménages par le biais d’investissements dans des domaines allant de la conservation de l’eau à la gestion durable des terres, les fondations sont en train d’être posées pour une nouvelle voie de développement fondamentale et ambitieuse. réflexions Achim Steiner Secrétaire général adjoint de l’ONU et Directeur exécutif du PNUE Cette année marque une première dans les relations de longue date entre l’Inde et l’Organisation des Nations Unies. Pour la toute première fois, l’Inde accueillera les célébrations de la Journée mondiale de l’environnement. Peuplée de 1,2 milliard de personnes, dotée d’une économie rapidement croissante et caractérisée par un passé, un présent et un avenir culturels variés, l’Inde dispose d’un potentiel considérable pour catalyser et promouvoir le développement durable aux niveaux national et international. Cette année, le thème la Journée mondiale de l’environnement s’intitule « Les forêts : la nature à votre service ». Il souligne le lien intrinsèque entre les conditions de vie et le bien-être humain et la santé des forêts et des écosystèmes forestiers. L’Inde a joué un rôle de chef de file, par exemple, en instituant un système de plantation d’arbres pour lutter contre la dégradation des sols et la désertification par l’utilisation de brise-vent et de rideaux-abris pour protéger les terres agricoles. La « Mission pour une Inde verte », récemment lancée dans le cadre du Plan d’action national sur les changements climatiques, vise à améliorer le couvert forestier, sur plus de 10 millions d’hectares, tant sur le plan qualitatif que sur le plan quantitatif, avec un investissement d’environ 10 milliards de dollars au cours des dix prochaines années. Dans son récent rapport intitulé « A Transition to Green Economy: Pathway to Sustainable Development and Poverty Eradication », le PNUE souligne qu’une telle transition est non seulement possible mais appropriée pour les pays en développement comme pour les pays développés. La Journée mondiale de l’environnement 2011 a lieu avant la tenue de la Conférence des Nations Unies sur le développement durable (Rio+20) en 2012 qui portera sur les deux thèmes que sont l’économie verte dans le contexte du développement durable et de l’élimination de la pauvreté, et le cadre institutionnel pour le développement durable. Rio+20 se déroulera dans un contexte marqué par l’épuisement rapide des ressources naturelles et l’accélération du changement climatique, depuis la perte des récifs coralliens et des forêts jusqu’à la pénurie croissante de terres productives, la nécessité urgente de nourrir les populations et de stimuler les économies, et les incidences probables d’un changement climatique non maîtrisé. L’Inde compte parmi la série de pays mettant en lumière différents choix qui représentent une occasion de tenir les promesses du Sommet « Planète Terre » de Rio de 1992 afin d’assurer un développement pouvant répondre aux besoins de 7 milliards d’individus, qui atteindront 9 milliards d’ici à 2050. Un développement qui favorise la croissance, une plus grande équité et des possibilités d’emploi : un développement qui tente de garder l’empreinte carbone de l’humanité dans des limites acceptables pour la planète afin que la Nature demeure à notre service pour le bien des générations présentes et futures. JAIRAM RAMESH Ministre indien de l’environnement et des forêts « Nous avons besoin de solides fondements éthiques en matière de conservation et la Journée mondiale de l’environnement peut, à cet égard, jouer un puissant rôle de catalyseur et de plaidoyer. Nous devons fixer des limites à la manière dont nous empiétons sur la nature, car sans elle les habitats seront bétonnés, les fleuves pollués, les coraux blanchis et les forêts inconsidérément détruites pour faire place à l’agriculture ». PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service 3 © John Lund/Getty Images Zhou Qiang Secrétaire du Parti de la Province du Hunan et Champion de la Terre du PNUE Transformer le développement L’adoption d’une approche durable qui, à la fois, réponde à la dynamique économique de la société et protège l’écologie est devenu un défi international majeur. Dans la province du Hunan, en Chine centrale, nous sommes déterminés à atteindre cet objectif et nous collaborerons avec tous ceux qui sont concernés dans le monde pour y parvenir. Le Hunan est une province bénie des dieux – son couvert forestier est étendu, son climat excellent et les chutes de pluie y sont abondantes – mais elle se heurte à de graves problèmes environnementaux du fait de son industrialisation et de son urbanisation rapides. Ces dernières années, elle a répondu positivement et par l’action aux appels lancés pour une gestion des forêts propre à renforcer leur rôle de puits de carbone et à contrebalancer en partie les émissions de dioxyde de carbone comme le prévoit le Protocole de Kyoto. Conformément aux prescriptions du Gouvernement chinois et aux mesures qu’il a prises pour accélérer la transformation du mode de développement du pays, le principe fondamental que défend 4 PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service la province, et son objectif, est un développement économique et social durable, écologique et à faible intensité de carbone. En conséquence, nous promouvons globalement un nouveau style d’industrialisation, de modernisation de l’agriculture et d’urbanisation. Notre but est de construire une société respectueuse de l’environnement et économe en ressources, axée sur la réalisation d’une province « verte ». Pour atteindre cet objectif, il est essentiel d’amener la population à aimer les arbres et les forêts. Pendant plus de 30 ans, les dirigeants de la province ont été à l’avant-garde de la plantation volontaire d’arbres et de la mobilisation de la population du Hunan pour l’y engager – créant ainsi un programme de boisement à plusieurs niveaux faisant appel à des agents multiples. Pendant 14 années consécutives, la ville de Zhangjiajie, située au nord-ouest du Hunan, a organisé le Festival international pour la protection des forêts, sur le thème « Écologie pour la Terre et des forêts pour l’humanité » : ce n’est pas seulement un des dix festivals écologiques de la Chine mais le seul qui ait pour thème « la protection de la forêt ». « Ceux qui possèdent quelques biens fonciers et sont plus persévérants », comme disait le vieil érudit chinois Mencius, « planifient en général méthodiquement leur production et leurs moyens de subsistance ». Depuis 2008, le Hunan a vigoureusement encouragé la réforme du système de droits forestiers collectifs de manière à protéger les intérêts des planteurs et à les inciter à la fois à planter des arbres et à protéger les forêts. Ainsi, ils peuvent tous recevoir des certificats d’utilisation des terres forestières précisant leur appartenance et ils sont encouragés à « Notre but est de construire une société respectueuse de l’environnement et économe en ressources, axée sur la réalisation d’une province ‹ verte ›. Pour atteindre cet objectif, il est essentiel d’amener la population à aimer les arbres et les forêts » gérer les terres sous contrat de façon à pouvoir bénéficier de l’abattage rationnel de leurs propres arbres. Cette initiative a suscité un grand enthousiasme parmi les cultivateurs : beaucoup d’entre eux traitent les arbres avec attention comme de jeunes plants de céréales et ils sont prêts à en planter partout où il y a des terres désertes inutilisées. Nous sommes également déterminés à renforcer la protection environnementale des forêts en milieu urbain pour compenser les effets de l’abattage et de la réquisition de terres boisées en période d’urbanisation rapide. Par ailleurs, la province a fait du groupe de villes ChangshaZhuzhou-Xiangtan (CZT) une forêt viennoise – le couvert forestier étant supérieur à 45 % – en promulguant une loi pour sauvegarder le mont Zhaoshan, le cœur vert de ce groupe de villes, et en protégeant la zone centrale par sa transformation en un modèle de société respectueuse de l’environnement et de la conservation des ressources. Nous essayons aussi de transformer le fleuve Xiangjiang en Rhin d’Orient en traitant ensemble le fleuve et le lac Dongting et en construisant une ceinture touristique du Xiangjiang. Ainsi, la conservation et la protection du noyau du district écologique CZT seront assurées, la superficie du couvert forestier augmentera et les terres humides du Yangtze, du Xiangjiang et autres seront conservées et bien protégées. Les efforts constants déployés pour construire un « Hunan vert » ont donné des résultats remarquables. Les forêts du Hunan ont une superficie qui a atteint environ 12,87 millions d’hectares auxquels s’est ajouté un volume d’entreposage de 402 millions de mètres cubes. Le couvert forestier représente plus de 50 %, et il absorbe 60 millions de tonnes de dioxyde de carbone par an. En même temps, la qualité de plus de 90 % des eaux de surface de la province répond aux normes relatives à l’eau potable, tandis que celle de l’air de toutes ces villes et préfectures est conforme à la deuxième norme nationale sur la qualité de l’air ambiant. Cet environnement écologique a amené beaucoup d’entreprises bien connues - tant nationales qu’étrangères – à investir au Hunan, ce qui à son tour favorise son développement économique et social rapide et rationnel. Pour parvenir au développement durable, une coopération en profondeur et des efforts concertés, ayant une portée mondiale, s’imposent. Ces dernières années par exemple, le Gouvernement indonésien a adapté sa stratégie de développement pour améliorer la protection des forêts tropicales humides et il envisage de planter 1,5 milliard d’arbres chaque année. Ceci a inspiré notre vision du « Hunan vert ». À notre tour, nous sommes prêts à partager l’expérience que nous avons acquise dans des domaines tels que la protection des forêts et le développement durable avec l’Indonésie et d’autres pays et à renforcer la promotion des échanges mutuels et de la coopération pour protéger la planète - patrie de l’humanité toute entière. PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service 5 © Johner RF/Getty Images Un prix bien justifié Emmanuel Ze Meka Directeur exécutif Organisation internationale des bois tropicaux Bon nombre d’études récentes, dont celle du PNUE sur l’économie des écosystèmes et de la biodiversité, soulignent la valeur élevée des services écosystémiques que procurent les forêts, notamment les forêts tropicales. Elles montrent que la valeur économique des biens forestiers traditionnels, en particulier le bois, semble dérisoire par rapport à ses autres valeurs – à savoir l’entretien du cycle de l’eau, du stockage de carbone, des sols, de la préservation de la biodiversité, et d’autres fonctions écosystémiques. On estime que les forêts valent donc des milliards, ou plutôt des milliers de milliards de dollars. Pourtant, entre les années 2000 et 2010, environ 13 millions d’hectares de forêts tropicales, ainsi que leur précieuse biodiversité et les autres services écosystémiques, sont détruits chaque année. Pourquoi? La réponse est simple. En effet, si de récents rapports répertorient et évaluent la grande valeur des services écosystémiques grâce à des outils économiques sophistiqués, les marchés de transfert de paiements visant à rémunérer ces services, quand ils existent, n’en sont qu’à leurs balbutiements. Exception faite du marché mondial émergent du carbone, les pays tropicaux ne disposent pas de mécanismes de rémunération pour la valeur potentielle des forêts. Personne n’entend payer pour ces services. Il n’est donc guère surprenant que les propriétaires de forêts, majoritairement les États, mais aussi parfois le secteur privé, continuent de défricher leurs terres et les forêts qui s’y trouvent au profit d’activités économiques plus rentables, telles que l’agriculture. 6 PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service L’Organisation internationale des bois tropicaux (OIBT), organisation intergouvernementale basée à Yokohama (Japon), a vu le jour il y a un quart de siècle. Elle vise à promouvoir les marchés des bois tropicaux produits de manière durable. Cet objectif est toujours valable, mais l’organisation souhaite aider davantage les pays à gérer les forêts tropicales de manière durable et à valoriser tous les services qu’elles procurent. Elle est consciente que les revenus issus de ces services ne parviennent pas à compenser les bénéfices générés par des activités concurrentes, aux cycles de récolte relativement courts et nécessitant des gestions plus simples, telles que les cultures ou la production d’huile de palme. Le bois d’œuvre reste la plus importante source de revenus provenant des forêts tropicales. Ces dix dernières années, les pays tropicaux en ont tiré chaque année plus de 20 milliards de dollars en recettes d’exportations, si l’on compte l’ensemble des produits primaires et secondaires (comme les meubles). En effet, la contribution du secteur forestier au développement économique est bien supérieure si l’on considère les millions d’emplois et les revenus créés par les marchés nationaux. La gestion durable des forêts et la production durable de produits ligneux sont donc une réponse pour valoriser les forêts tropicales et mettre un terme à leur défrichage, tout en favorisant le développement économique. Ainsi, selon l’OIBT, il demeure essentiel d’intégrer la gestion durable des forêts, dont la production durable, aux activités approuvées dans le cadre des nouveaux programmes de financement en cours d’élaboration pour lutter contre le changement climatique (tels que le programme REDD+ de réduction des émissions liées à la déforestation et la dégradation des forêts). Nous avons acquis une expérience substantielle, en partie grâce aux projets menés par l’OIBT sur le terrain, en termes de production durable de bois d’œuvre et d’autres « La gestion durable des forêts et la production durable de produits ligneux sont donc une réponse pour valoriser les forêts tropicales et mettre un terme à leur défrichage, tout en favorisant le développement économique » produits forestiers - en prenant en compte l’écologie des différentes espèces d’arbres, en utilisant la technologie pour réduire l’impact de l’exploitation du bois, en restaurant ou en reboisant les forêts par la suite, et en diffusant des informations sur les tendances du marché pour assurer le juste prix des produits et le retour de fonds à la forêt. Il faut, bien sûr, lutter contre la corruption et la mauvaise gouvernance, qui touchent de nombreux secteurs et pays, pour mettre en place un système efficace et pour éviter les détournements de fonds. Des travaux importants sur la lutte contre ces fléaux ont été menés au niveau mondial ces dernières années. Depuis sa création, l’OIBT suit les progrès en matière d’aménagement forestier durable (AFD) dans les régions tropicales. Une des premières études de l’organisation, publiée en 1989 dans l’ouvrage de Duncan Poore « Pas de bois sans arbres », montre qu’à la fin des années 80, seul un pourcentage infime des forêts tropicales bénéficiait d’un aménagement durable. Une étude de suivi menée par l’OIBT, Situation de l’aménagement des forêts tropicales en 2005, montre que, malgré des améliorations, la zone relevant de l’AFD ne représentait à cette date qu’environ 5 % de la superficie forestière des pays tropicaux conservée pour la production et la protection. L’étude la plus récente de l’OIBT, Situation de l’aménagement des forêts tropicales en 2011, constate que les progrès se sont poursuivis au cours des cinq dernières années : chaque année, trois millions d’hectares supplémentaires sous les tropiques bénéficient de l’AFD. Il n’en demeure pas moins que plus de 90 % des forêts tropicales du monde restent peu ou pas aménagées. De toute évidence, il faut accélérer les progrès accomplis dans le cadre de l’AFD pour atteindre notre objectif commun, à savoir préserver de garantir l’avenir des ressources mondiales en forêts tropicales. Le PNUE, principal organisme des Nations Unies chargé de promouvoir la viabilité environnementale, porte une attention particulière aux forêts tropicales et à la valeur de leurs écosystèmes, qui auront une grande place lors du prochain Sommet de la Terre, Rio+20, l’an prochain. Cependant, il convient de rappeler la déception de nombreux acteurs, en particulier les pays en développement, où se situe la quasi-totalité des forêts tropicales, qui attendaient de la communauté internationale des ressources « nouvelles et additionnelles » pour faire appliquer les principes non contraignants pour la forêt adoptés lors du premier Sommet de la Terre en 1992. Au cours des deux décennies suivant cet événement historique, de nombreux services offerts par les forêts tropicales, tels que l’écotourisme, la bio-prospection, et plus récemment la REDD et le carbone, ont été identifiés comme susceptibles d’inverser la tendance à un appauvrissement constant. Des organismes tels que l’OIBT et le PNUE doivent collaborer avec les gouvernements, les ONG, le secteur privé et les autres parties prenantes pour développer des marchés justes et équitables pour les biens et services forestiers. Ainsi, nous pouvons contribuer à adresser à la communauté internationale un message clair : la gestion durable des forêts est une option viable pour l’utilisation des terres, à condition que la valeur des forêts soit clairement établie et qu’une rémunération soit mise en place pour les nombreux biens et services qu’elles procurent. PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service 7 © Stringer/Corbis Surexploitées, sous-évaluées Frances Seymour Directeur général du Centre pour la recherche forestière internationale (CIFOR) 2011 devrait être une année cruciale pour les forêts du monde. Cette année, proclamée par l’ONU Année internationale des forêts, a été précédée par un accord de bon augure en faveur de la réduction des émissions liées à la déforestation et à la dégradation des forêts (REDD) à la seizième réunion de la Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) qui s’est tenue en décembre à Cancún, qui lancera le tant espéré mécanisme pour intégrer les forêts dans le régime mondial de protection du climat. Les forêts du monde doivent également bien se positionner pour tirer parti de la nécessité de passer à une économie verte. Nous savons depuis longtemps que la valeur économique des forêts s’étend bien au-delà du bois qu’elles produisent. 8 PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service © Nacivet/Getty Images « Avec 13 millions d’ hectares de forêts perdus chaque année, l’urgence se fait sentir » l’artisanat, la décoration, etc. sont autant de sources de revenus. Malheureusement, très peu de ces revenus sont pris en compte dans les enquêtes statistiques nationales ou sont comptabilisés, de sorte qu’ils restent imperceptibles aux responsables politiques nationaux. Les enquêtes menées par les bureaux nationaux de statistiques doivent être perfectionnées pour apporter un nouvel éclairage sur l’importante contribution des forêts aux revenus de certaines des communautés les plus pauvres et les plus vulnérables du monde. La diversité biologique, les produits forestiers non ligneux, les services écosystémiques, et le réconfort spirituel qu’elles procurent sont tout aussi importants. Et maintenant plus que jamais, elles sont appréciées pour leur contribution à l’atténuation des changements climatiques et à l’adaptation à ces changements. Pourtant, beaucoup de ces valeurs restent imperceptibles aux décideurs politiques et au grand public, surtout au regard des rapides profits que l’on peut tirer de l’agriculture commerciale et de l’extraction minière. L’importance des forêts restera longtemps fragile dans l’imagination du grand public et des politiques, tant que leur contribution économique demeurera invisible ou sous-évaluée. Et mettre au jour le montant de cette contribution nécessitera une évolution de la gouvernance et des marchés. Les chercheurs présument depuis longtemps que les communautés qui vivent à l’intérieur et autour des forêts tirent une grande partie de leurs revenus de la consommation et de la vente directe des produits forestiers. Une nouvelle base de données présentant les résultats d’enquêtes sur les revenus de plus de 8 000 ménages (www.cifor.cgiar. org/pen) confirme qu’en moyenne 24 % de leur revenu provient de produits forestiers. Le bois de feu et le bois d’œuvre, le gibier, les fruits, les noix, le miel et les champignons comestibles ainsi qu’un large éventail de produits utilisés pour les médicaments, Une autre raison de cette opacité est qu’une grande partie du revenu est, au moins techniquement, illégale – et qu’une proportion importante de celui-ci est versée sous forme de pots de vin. Lorsque les négociations ont commencé il y a plusieurs années sur un accord entre le Gouvernement camerounais et la Commission européenne, afin de s’assurer que le bois exporté vers l’Union européenne était d’origine légale, on pensait que le bois abattu de manière informelle pour le marché intérieur représentait une part inférieure à la part du secteur formel. Or, les recherches menées par le CIFOR ont révélé qu’elle est en fait environ quatre fois plus importante qu’on ne l’avait cru au départ, fournissant des emplois et des revenus à quelque 45 000 personnes. PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service 9 « Tout le monde se porterait mieux si le La répression de l’abattage illégal du bois a tendance à cibler les bûcherons armés de tronçonneuses, plutôt que les grands exploitants dotés de comptes bancaires. Tout le monde se porterait mieux si le bois produit de manière informelle pour le marché intérieur entrait dans un cadre réglementaire approprié qui protège à la fois la viabilité de l’environnement et les moyens de subsistance des producteurs locaux. La professionnalisation plutôt que la criminalisation constitue un bon moyen d’avancer. Les mécanismes du marché pour protéger les forêts jouent un rôle, mais ils ne s’avèrent pas suffisants pour inverser la déforestation et la dégradation des forêts. Les systèmes de certification - par exemple par le Forestry Stewardship Council - reconnaissent les producteurs qui prennent en compte la valeur réelle des ressources forestières dans la pratique. Mais les dirigeants industriels se plaignent que la plupart des consommateurs ne semblent pas encore prêts à payer un prix majoré couvrant les coûts de la protection des ressources forestières. Les modes de consommation reflétant la préoccupation au sujet de la durabilité des forêts du monde sont plus motivés par le souci de réputation des détaillants que par la préférence des petits consommateurs. Plus d’attention devrait être accordée aux interventions politiques pour uniformiser les règles du jeu afin de favoriser les producteurs soucieux de la durabilité. Les forêts dites « dégradées » continuent d’être des cibles de choix pour être converties à d’autres usages - en dépit des richesses qu’elles renferment souvent, en carbone, en biodiversité, et en tant que moyen de subsistance pour les communautés locales (gibier). Une planification spatiale plus réfléchie et plus responsable devrait 10 PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service bois produit de manière informelle pour le marché intérieur entrait dans un cadre réglementaire approprié qui protège à la fois la viabilité de l’environnement et les moyens de subsistance des producteurs locaux » orienter l’expansion agricole vers les zones incontestablement dégradées, et reconnaître aux utilisateurs actuels le droit de profiter tant des opportunités existantes que de celles qui peuvent être créées par la REDD, et aussi du paiement pour les services écosystémiques. La possibilité d’utiliser un tel régime pour sauver la forêt impliquerait qu’il y ait un « vendeur » officiel des services environnementaux en question, mais elle est compromise par le manque de clarté et les conflits concernant les droits de propriété. Les recherches du CIFOR ont mis en lumière l’ampleur de ces obstacles pour l’utilisation des outils de l’économie verte dans les conditions caractéristiques de la plupart des forêts tropicales. Selon lui, la moitié seulement des forêts de l’Amazonie brésilienne serait économiquement viable grâce aux paiements pour services écosystémiques dans le cadre de la réduction des émissions ayant des incidences sur le climat, tant le régime foncier est chaotique. La fragilité du soutien pour la protection des forêts, en l’absence de preuves tangibles de leur valeur économique réelle, est peut-être mieux illustrée par les récents débats sur la façon d’assurer la sécurité alimentaire. Ces débats ont tendance à présenter la préservation des forêts comme un obstacle a l’expansion agricole - et ne mettent pas en évidence le rôle important qu’elles jouent dans la sécurité alimentaire, non seulement en fournissant des moyens de subsistance et des revenus, mais aussi en soutenant la productivité agricole durable. Les produits forestiers sont une composante essentielle des moyens de subsistance en milieu rural. C’est ainsi que 80 % du bois abattu en Afrique subsaharienne sert à produire de l’énergie; la viande de gibier provenant des forêts du Bassin du Congo équivaut à la production de l’industrie du bœuf au Brésil. Et les services écosystémiques des forêts indispensables à l’agriculture - comme ceux nécessaires au maintien des flux hydrologiques et à la pollinisation - seraient coûteux, voire impossible à remplacer. Même ceux qui comprennent la nécessité de préserver les forêts dans le cadre de stratégies intégrées de gestion des paysages, se concentrent presqu’exclusivement sur l’accroissement de la productivité agricole comme moyen de réduire la pression qui s’exerce sur elles. De tels gains de productivité sont certainement nécessaires, et souhaitables pour d’autres raisons, mais ils ne constituent pas une fin en soi. En effet, la recherche a montré que, en fonction des prix et des marchés, accroître la productivité agricole peut au contraire inciter à accélérer la déforestation. Ces efforts doivent donc aller de pair avec la réforme de la gouvernance forestière afin de créer parallèlement des incitations à protéger les forêts. Alors que nous célébrons l’Année internationale des forêts, les gouvernements et autres décideurs doivent reconnaître leur vraie valeur pour les communautés locales, les pays et le monde entier. Avec 13 millions d’hectares de forêts perdus chaque année, l’urgence se fait sentir. livres www.unep.org/publications Rapport annuel 2010 du PNUE www.unep.org 0U[LNYH[LK(ZZLZZTLU[ VM)SHJR*HYIVU HUK;YVWVZWOLYPJ6aVUL :\TTHY`MVY+LJPZPVU4HRLYZ ANNUAL REPORT 2010 ;OPZKVJ\TLU[Z\TTHYPaLZMPUKPUNZHUKJVUJS\ZPVUZVM[OLHZZLZZTLU[YLWVY[!0U[LNYH[LK (ZZLZZTLU[VM)SHJR*HYIVUHUK;YVWVZWOLYPJ6aVUL;OLHZZLZZTLU[SVVRZPU[VHSSHZWLJ[Z VMHU[OYVWVNLUPJLTPZZPVUZVMISHJRJHYIVUHUK[YVWVZWOLYPJVaVULWYLJ\YZVYZZ\JOHZ TL[OHUL0[HUHS`ZLZ[OL[YLUKZPULTPZZPVUZVM[OLZLZ\IZ[HUJLZHUK[OLKYP]LYZVM[OLZL LTPZZPVUZ"Z\TTHYPaLZ[OLZJPLUJLVMH[TVZWOLYPJWYVJLZZLZ^OLYL[OLZLZ\IZ[HUJLZHYL PU]VS]LK"KPZJ\ZZLZYLSH[LKPTWHJ[ZVU[OLJSPTH[PJZ`Z[LTO\THUOLHS[OJYVWZPU]\SULYHISL YLNPVUZHUKLJVZ`Z[LTZ"HUKZVJPL[HSYLZWVUZLZ[V[OLLU]PYVUTLU[HSJOHUNLZJH\ZLKI`[OVZL PTWHJ[Z;OL(ZZLZZTLU[L_HTPULZHSHYNLU\TILYVMWV[LU[PHSTLHZ\YLZ[VYLK\JLOHYTM\S LTPZZPVUZPKLU[PM`PUNHZTHSSZL[VMZWLJPMPJTLHZ\YLZ[OH[^V\SKSPRLS`WYVK\JL[OLNYLH[LZ[ ILULMP[ZHUK^OPJOJV\SKILPTWSLTLU[LK^P[OJ\YYLU[S`H]HPSHISL[LJOUVSVN`(UV\[SVVR\W [VPZKL]LSVWLKPSS\Z[YH[PUN[OLILULMP[ZVM[OVZLLTPZZPVUTP[PNH[PVUWVSPJPLZHUK TLHZ\YLZMVYO\THU^LSSILPUNHUKJSPTH[L;OL(ZZLZZTLU[JVUJS\KLZ[OH[YHWPKTP[PNH[PVU VMHU[OYVWVNLUPJISHJRJHYIVUHUK[YVWVZWOLYPJVaVULLTPZZPVUZ^V\SKJVTWSLTLU[JHYIVU KPV_PKLYLK\J[PVUTLHZ\YLZHUK^V\SKOH]LPTTLKPH[LILULMP[ZMVYO\THU^LSSILPUN ;OL:\TTHY`MVY+LJPZPVU4HRLYZ^HZWYLWHYLKI`H^YP[PUN[LHT^P[OPUW\[ZMYVT[OL TLTILYZVM[OL/PNOSL]LS*VUZ\S[H[P]L.YV\WHUK^P[OZ\WWVY[MYVT<5,7HUK>46 0[PZPU[LUKLK[VZLY]LKLJPZPVUTHRLYZH[HSSSL]LSZHZHN\PKLMVYHZZLZZTLU[WSHUUPUNHUK THUHNLTLU[MVY[OLM\[\YL United Nations Environment Programme 0:)5! 1VI5V!+,>5( Donnant un aperçu général des activités du PNUE en 2010, ce rapport examine un large éventail d’activités menées par l’organisation dans le cadre de son mandat : assurer le leadership dans le contexte de l’environnement et promouvoir le développement durable. Le Rapport annuel trace le début d’une ère nouvelle de stratégie et de transformation pour le PNUE qui a commencé à mettre en œuvre sa Stratégie à moyen terme pour 2010-2013 dans six domaines : changements climatiques, catastrophes et conflits, gestion des écosystèmes, gouvernance environnementale, substances et déchets dangereux, efficience de l’utilisation des ressources, consommation et production durables. Évaluation intégrée du carbone noir et de l’ozone troposphérique – Résumé à l’intention des décideurs Vers une économie VERTE — la voie du développement durable et de l’élimination de la pauvreté Ce rapport a pour objectif de donner des avis fondés sur des données scientifiques concernant les mesures propres à réduire les conséquences de polluants dangereux pour l’atmosphère comme le carbone noir, l’ozone troposphérique et ses précurseurs. Ces polluants sont souvent appelés agents climatiques éphémères car, en comparaison avec le dioxyde de carbone, ils ont une courte durée de vie dans l’atmosphère; le rapport fait une analyse détaillée des agents responsables des émissions, des tendances des concentrations et des incidences de ces polluants sur le climat, la santé des êtres humains et les écosystèmes. Ce rapport a pour but de déboulonner plusieurs mythes et idées fausses au sujet de l’aspect économique du processus visant à rendre l’économie mondiale plus écologique et il donne opportunément, aux responsables de l’élaboration des politiques, des orientations pratiques sur les réformes qu’ils doivent entreprendre pour débloquer le potentiel d’une économie verte dans les secteurs de la production et de l’emploi. Le rapport présente des arguments économiques et sociaux convaincants en faveur d’un investissement de 2 % du PIB mondial pour rendre plus écologiques 10 secteurs importants de l’économie afin de réorienter le développement et de libérer des flux de capitaux publics et privés vers une voie économe en ressources et à faible intensité de carbone. Climat Action 2010-2011 Climat Action offre une tribune importante aux gouvernements, guides d’opinion internationaux, experts du secteur, universitaires et écologistes pour discuter du développement durable et de la neutralité carbone. Climat Action 2010-11 aide les entreprises et les organisations à réduire leur empreinte carbone, en soulignant que des opérations environnementalement responsables peuvent aussi être rentables. Il donne Glaciers de haute montagne et changements climatiques — un aperçu des questions Défis pour les moyens de subsistance de l’homme et adaptation pressantes concernant les Compilé par le PNUE en partenariat avec des scientifiques et des centres de recherche du changements climatiques monde entier, notamment le Polar Institute et Norut Alta de Norvège, ce rapport met en et la viabilité tout en évidence une tendance générale de la fonte des glaciers liée au réchauffement climatique. présentant des « mesures » Le rapport signale les conséquences de cette tendance, par exemple diminution saisonnière pratiques, permettant pode la disponibilité de ressources en eau dans les zones arides, accélération de la fonte de tentiellement de faire des nombreux glaciers moins étendus de faible altitude qui constituent souvent une ressource économies, qui peuvent en eau d’importance cruciale dans les zones sèches, augmentation des inondations dues au être prises pour réduire les débordement des lacs glaciaires dans de nombreux pays au cours des 40 dernières années. empreintes carbone. The ocean has become a global repository for much of the waste we produce. Scientists are concerned that plastic debris in the ocean can transport toxic substances which may end up in the food chain, causing potential harm to ecosystems and human health. The Year Book also explores the wider implications of the use of phosphorus in food production. Phosphorus is an essential nutrient whose supply is limited. Since demand for fertilizer in agriculture rocketed in the 20th century, large amounts of phosphorus are flowing into the environment. New perspectives are also emerging on how biodiversity conservation can be integrated in forest management. Forests are receiving increasing attention, not least because of their role in climate change mitigation. Halting loss of forest biodiversity is essential if forests are to adapt to mounting pressures, including climate change and pest outbreaks. L’Annuaire du PNUE a pour objectif de renforcer l’interface entre la science et la politique. Il présente les faits récents et ouvre de nouvelles perspectives ayant un intérêt particulier pour les décideurs. L’Annuaire 2011 examine, entre autres, les progrès accomplis dans la gouvernance environnementale, les effets de la dégradation et de la perte constantes des écosystèmes du monde, leur impact sur l’atmosphère qui est à l’origine de changements climatiques, les substances et les déchets dangereux qui affectent la santé des êtres humains et l’environnement, les catastrophes et les conflits liés à l’environnement et l’utilisation non viable des ressources. The Year Book’s overview of events and developments during 2010 shows how cutting edge science reveals new opportunities to mitigate climate change while improving air quality. Stimulated by technological innovation and green investments, renewable energy supply is growing rapidly. This and other developments are summarized in key environmental indicators that present the latest data and trends for the global environment. www.unep.org 81(3<($5%22.(0(5*,1*,668(6,1285*/2%$/(19,5210(17 Annuaire 2011 du PNUE : questions émergentes concernant notre environnement mondial 81( 3 <($5 % 22. (0(5*,1*,668(6 ,1285*/2%$/(19,5210(17 United Nations Environment Programme Améliorer la compétitivité au niveau mondial grâce à la gestion durable de l’environnement Subhash C. Jain et Ben L. Kedia (Edward Elgar) Cet ouvrage examine l’impact que les changements climatiques et autres facteurs environnementaux ont sur les affaires. C’est une collection de résultats de recherche qui montre que les entreprises qui prennent proactivement des mesures pour atténuer leur exposition aux risques des changements climatiques en tireront de nouvelles possibilités de profit et auront, sur leurs concurrents, un avantage compétitif dans un avenir sur lequel pèsent les limites imposées par le carbone. Politiques environnementales mondiales sur les forêts – Comparaison internationale Constance McDermott, Benjamin Cashore et Peter Kanowski (Earthscan) Cet ouvrage offre une comparaison extrêmement détaillée et systématique des politiques environnementales sur les forêts et leur application dans 20 pays développés, à économie en transition et en développement. L’objectif visé est d’améliorer les enseignements qu’il est possible de tirer de ces politiques et de promouvoir des solutions politiques bien documentées et soigneusement adaptées qui, il faut l’espérer, conduiront à une plus grande responsabilité internationale en matière de gestion des forêts PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service 11 © Image Werks/Corbis Une occasion unique Réduire les émissions de carbone des forêts, voilà peut-être la raison d’être du Programme des Nations Unies sur la réduction des émissions liées à la déforestation et à la dégradation des forêts, appelé REDD+. Il est toutefois généralement admis que c’est aussi une occasion de relever nombre des défis liés aux causes sous-jacentes de la disparition de la forêt tropicale dans le monde. C’est donc potentiellement un instrument politique puissant à utiliser pour exercer une influence sur la gestion et l’évaluation des forêts tropicales. Et pourtant, bien qu’il n’y ait dans cette option ni gagnant ni perdant, du moins en apparence - ou peut-être pour cette raison même – des 12 PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service Yemi Katerere Chef du Secrétariat du Programme ONU-REDD débats passionnés se poursuivent sur la façon dont le mécanisme REDD + devrait être conçu et mis en œuvre. Sa complexité est une explication. Chaque pays a une structure institutionnelle qui lui est propre, ses capacités, ses engagements politiques et sa dotation en ressources forestières. Tous les pays essaient de voir comment, par le biais du Programme REDD+, ils pourront parvenir à équilibrer leurs objectifs sociaux et environnementaux, tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre. Le caractère unique de chaque nation exige de comprendre l’importance relative des différents mobiles du déboisement et les rôles que les divers acteurs y jouent. Il n’existe assurément pas de réponses ou de solutions simples à ces questions. En même temps, il y a lieu de croire que le mécanisme REDD+ pourra profiter de la même manière à toutes les forêts, à toutes les communautés et à tous les pays, et que ces avantages pourraient être substantiels. D’aucuns sont convaincus par exemple que ce programme offre des moyens financiers sans précédent pour la conservation des forêts et de la biodiversité. L’élargissement récent du champ d’application du mécanisme REDD+ par rapport à son objectif initial, à savoir réduire les émissions dues à la déforestation et à la dégradation des forêts, pour y inclure la conservation et l’amélioration des stocks de carbone forestier et la gestion durable des forêts – d’où le signe + ajouté à REDD – est considéré comme offrant à un plus grand nombre de pays la possibilité de participer au Programme et d’en tirer profit. Mais il sera difficile de concilier toutes ces attentes, d’autant plus que, dans certains contextes nationaux la stratégie REDD+ pourrait ne pas être aussi bon marché qu’on le pensait : ceci est particulièrement vrai si les petits agriculteurs n’opèrent pas dans un système de marché qui fonctionne bien et s’ils ne sont pas prêts à assumer le risque potentiellement important d’abandonner leurs sources de revenu actuelles pour d’hypothétiques compensations carbone que personne ne peut encore garantir. Ajoutez à cela l’inquiétude que suscite le fait que le financement du mécanisme REDD+ est encore loin d’atteindre le niveau nécessaire pour réduire les émissions liées à la perte de forêts, et nous nous retrouvons avec un mécanisme qui nécessitera probablement des tractations difficiles. Il est à la fois sain et important de mettre en évidence les problèmes que pose ce mécanisme car ceci oblige ceux qui participent aux premières étapes de sa conception et de sa mise en œuvre à passer au crible toute la gamme des problèmes connexes. En effet, c’est grâce à une telle ouverture que la valeur globale du mécanisme tient bon, à en juger par les premiers enseignements tirés des pays qui élaborent des stratégies REDD+. Pour progresser, il est important que toutes les parties prenantes soient prêtes à abandonner les modèles habituels qu’elles utilisent depuis longtemps. La stratégie REDD+ a remis les forêts sur le devant de la scène, forcé le débat et obligé à réexaminer des questions liées à la gestion durable des forêts. Elle a par exemple progressé beaucoup plus vite et fait davantage l’unanimité que pratiquement toute autre solution d’atténuation proposée dans le cadre des négociations au titre de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques au cours des deux dernières années. Le mécanisme REDD+ a aussi mobilisé des ressources financières importantes de « démarrage rapide », qui permettent de voir d’un œil neuf les problèmes associés à un mode de gestion des forêts susceptible d’aider à réduire les émissions au niveau mondial tout en profitant aux populations et aux services écosystémiques forestiers. Il permet effectivement aux pays d’approfondir leur réflexion pour définir le rôle des forêts dans leur développement économique national, déterminer les superficies de forêts qu’ils doivent préserver et transformer leur économie pour qu’elle soit à faible intensité de carbone. Dans les pays riches en forêts, par exemple, il peut servir de catalyseur pour négocier un équilibre entre la conservation de forêts intactes et la promotion du développement économique par le biais de concessions de terre pour de grandes plantations d’hévéas, de palmistes et de canne à sucre, créant de nombreux emplois, générant des revenus et ayant un potentiel d’exportation. Il peut de même servir de catalyseur pour examiner d’un œil critique les choix difficiles que les gouvernements doivent faire entre différentes options politiques. Le mécanisme REDD+ pourrait également offrir des possibilités de synergies entre avantages environnementaux et sociaux. Il a offert une tribune à beaucoup de peuples autochtones et de communautés tributaires de la forêt, leur permettant d’intervenir aux niveaux national et international. Si les premiers résultats obtenus n’ont pas répondu aux attentes, il facilite néanmoins le dialogue et renforce la confiance entre eux, l’État et les organisations de la société civile. Enfin, les questions d’importance critique pour la réussite du Programme REDD+ sont celles que les pays devraient aborder pour parvenir à la viabilité, que ce mécanisme existe ou non. Indépendamment de la question de savoir si une nation échange une seule tonne de carbone, il est indispensable qu’il y ait un débat à l’échelon du pays pour déterminer la place de ses forêts dans ses politiques de développement économique national : le Programme REDD+ est le meilleur catalyseur qui soit à cette fin. Le lancement du concept REDD+ en 2008 est venu à point nommé, car il était visionnaire. La conception de ce mécanisme et les accords de Cancún donnent une idée de l’ampleur de l’engagement de la communauté internationale. Il présente donc une occasion unique de relever le défi de la réduction des émissions de carbone des forêts tout en limitant les effets négatifs que pourraient avoir sa conception et sa mise en œuvre sur l’environnement et les hommes. Le Programme ONU-REDD est l’initiative de collaboration des Nations Unies sur la réduction des émissions liées à la déforestation et à la dégradation des forêts (REDD+) dans les pays en développement. Ce Programme, lancé en 2008, fait fond sur le rôle et les connaissances techniques de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE). Le Programme ONU-REDD soutient des initiatives REDD+ nationales et favorise la participation valable et en connaissance de cause de toutes les parties prenantes, y compris les peuples autochtones et autres collectivités tributaires de la forêt, à la mise en œuvre de ce programme à l’échelon national et international. PNUE NOTRE PLANÈTE LA NATURE À VOTRE SERVICE 13 Satinder Bindra Directeur de la communication, PNUE « La recherche incessante de combustible met une pression énorme sur les forêts : la plupart des 700 millions d’Indiens y prennent leur bois » J’ai grandi en Inde et un de mes plus anciens souvenirs d’enfance est que je regardais ma grandmère près du « chulha » qui fumait. Le « chulha », c’est ce fourneau rudimentaire en terre glaise à trois côtés qui sert encore de foyer à des millions de familles rurales en Asie du Sud. Non pas que j’y restais longtemps : toute la fumée et la suie que dégageait ce fourneau inefficace garantissaient que je ne m’attardais jamais plus d’une minute dans la cuisine de ma grand-mère. Cette image de mon passé correspond encore à la réalité d’aujourd’hui en Asie du Sud et dans de nombreux pays en développement. Environ 1,6 milliard de personnes à travers le monde n’ont toujours pas accès à l’électricité et quelque 3 milliards utilisent toujours des fourneaux inefficaces qui brûlent de la biomasse traditionnelle pour la cuisson comme le bois de feu, les résidus de récoltes et la bouse. 14 PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service Sur le feu Les inefficacités du fourneau se situent à de nombreux niveaux. Leur structure de glaise est un piètre isolant, entraînant une consommation de combustibles plus importante que nécessaire. Ensuite, l’arrivée d’air ne peut être contrôlée : trop peu d’air produit une fumée épaisse, trop d’air affaiblit les flammes. Tout cela représente un lourd fardeau social pour les femmes et met leur santé – et celle de leurs enfants – en danger. Je me rappelle encore de manière très nette la journée habituelle de ma grand-mère, dont elle passait une grande partie à se préoccuper de ses réserves de combustibles. Elle dépendait de la bouse de vache, qu’il fallait minutieusement ramasser, puis mélanger avec du foin et faire sécher en forme de petites pizzas. Dans un certain sens, elle avait de la chance : dans certaines régions d’Asie du Sud, les femmes doivent aller chercher le bois de feu dans des jungles lointaines et courent souvent le risque de se faire agresser, malmener voire blesser lorsqu’elles quittent la sécurité de leurs maisons. Dans les collines du Népal par exemple, les femmes passent près de 2,5 heures par jour à ramasser du fourrage, de l’herbe et du bois de feu. À cause de la déforestation, elles doivent aller plus loin, ce qui augmente leur fardeau de près d’1,1 heure par jour, leur laissant moins de temps à consacrer à l’agriculture, à l’éducation de leurs enfants ou à des activités génératrices de revenus. La recherche incessante de combustible met une pression énorme sur les forêts : la plupart des 700 millions d’Indiens y prennent leur bois. La déforestation au Pakistan voisin est parmi les plus élevées au monde. De nombreux activistes pensent qu’elle a joué un rôle crucial en aggravant les inondations dévastatrices de 2009, qui ont fait près de 2 000 morts, ont déplacé 18 millions de personnes et provoqué des milliards de dollars de dégâts. © oytun karadayi/iStockphoto © Bartosz Hadyniak/iStockphoto © Gawrav Sinha/iStockphoto Plus ravageuses encore sont les émissions de suie, constituées de particules de carbone noir. L’Organisation mondiale de la Santé estime que l’exposition domestique à ces particules provoque 1,6 million de morts prématurées par an, principalement parmi les femmes et les enfants. Des études en Inde montrent que les femmes qui ont cuisiné pendant des années sur des fourneaux consommant de la biomasse présentent une prévalence accrue de maladies pulmonaires chroniques, par rapport aux autres. Le carbone noir provoque ou aggrave également les pneumonies, les bronchites, les cataractes, les maladies cardiaques, l’hypertension et un faible poids à la naissance. Les effets des chulhas dépassent le foyer et la maison. Lorsque la fumée s’échappe à l’extérieur, elle subit des transformations chimiques sous l’effet du rayonnement solaire, formant des nuages bruns et de l’ozone. Rien qu’en Asie, les nuages bruns peuvent provoquer 500 000 morts supplémentaires chaque année, alors que l’ozone provoque des milliards de dollars de dégâts aux cultures. Le carbone noir est également responsable de 10 à 40 % du réchauffement planétaire, étant donné que les particules réchauffent l’air comme de minuscules pull-overs noirs qui absorbent la chaleur. Et lorsque ces particules se déposent sur la neige ou la glace, elles rendent celles-ci plus foncées, accélérant la fonte. Cependant, du changement s’annonce. Des fourneaux beaucoup plus efficaces sont actuellement mis au point. Une étude récente de la Banque mondiale menée au Rwanda montre que – pour juste quelques dollars de plus – ces fourneaux peuvent ramener l’utilisation de charbon de bois de 0,51 kg à 0,33 kg par personne par jour. Une famille pourrait économiser annuellement 84 dollars en combustibles – un montant substantiel puisque le revenu annuel moyen dans les pays d’Afrique centrale et orientale varie entre 300 et 370 dollars. En Inde, pays qui accueillera cette année les festivités de la Journée mondiale de l’environnement, le PNUE participe à un projet passionnant appelé « Surya » (lumière du soleil), qui permettra d’équiper une région rurale, d’environ 100 km 2 et comptant 50 000 habitants, de fourneaux plus propres. Le PNUE documentera l’impact sur la qualité de l’air, le climat et la santé, en utilisant des téléphones portables et une technologie avancée de la NASA, et prévoit d’utiliser cette information pour tenter d’obtenir des compensations pour des crédits carbone, afin de promouvoir l’utilisation de ces fourneaux. En septembre dernier, le PNUE s’est rallié à l’Alliance mondiale pour des fourneaux de cuisine propres, lancée par la Secrétaire d’État américaine Hillary Clinton. Le Gouvernement américain a donné 50 millions de dollars de capital de démarrage pour le projet, qui devrait permettre de distribuer 100 millions de fourneaux propres dans des villages d’Afrique, d’Asie et d’Amérique du Sud d’ici 2020. Une étude publiée dans The Lancet montre qu’un programme décennal visant à introduire 150 millions de fourneaux à faibles émissions en Inde pourrait éviter quelque deux millions de morts prématurées. Par ailleurs, les études de terrain du PNUE démontrent que pour ralentir le réchauffement global, réduire les émissions d’à peine une tonne de carbone noir équivaut à réduire les émissions de 250 à 3 000 tonnes de dioxyde de carbone. Contrairement au dioxyde de carbone qui reste dans l’atmosphère pendant de nombreuses années, la suie retombe après quelques semaines à peine. L’amélioration des fourneaux de cuisine doit maintenant devenir une politique générale. Des millions de fourneaux plus propres ont été distribués gratuitement en Inde au cours des 20 dernières années, par le biais de campagnes gouvernementales, mais en raison du manque d’informations sur leurs avantages, beaucoup d’entre eux sont restés inutilisés. Institutionnaliser le changement en faveur des « chulhas verts » doit devenir une priorité nationale, grâce à une campagne de sensibilisation publique mettant en lumière la sécurité pour la santé, la qualité de l’air, la réduction des changements climatiques et, en fin de compte, la création d’une économie verte et le développement économique général pour les populations rurales en Inde et dans le monde. Ma grand-mère a vécu jusqu’à l’âge avancé de 97 ans, et si elle a infirmé la tendance en ne développant aucune maladie pulmonaire, le temps passé auprès du foyer lui a donné de très nombreux maux de dos. Actuellement, les femmes indiennes, les gardiennes du chulha, ont la possibilité d’améliorer à la fois leur propre vie et l’état du monde en général. PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service 15 © Nacivet/Getty Images C’est la nature Ray C. Anderson Fondateur et Président de la société Interface, Inc. Lorsque je m’adresse à des auditoires, je demande souvent à tout le monde de fermer les yeux et d’imaginer un endroit de paix et de repos, de tranquillité et de créativité, l’endroit qui les fait se sentir les plus heureux – leur parfaite zone de confort. Ensuite, tout le monde ayant toujours les yeux fermés, je demande à ceux qui pensent à un endroit extérieur de lever la main. Je demande ensuite à tout le monde d’ouvrir les yeux et de regarder autour de soi. Que voient toutes ces personnes ? Une salle pleine de mains levées et beaucoup d’expressions étonnées. 16 PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service Presque tout le monde pensait qu’il ou elle seul(e) imaginait une forêt, une prairie ou une rivière bondissante. En fait, c’était le cas de presque tout le monde. Dans des centaines de cas, avec des publics différents partout dans le monde, la réaction est toujours la même. Alors, qu’est-ce que la nature a à dire à une société comme la nôtre – le plus grand fabricant mondial de dalles de moquette commerciale – sur la manière dont nous menons nos affaires et créons nos produits ? Pas mal de choses en fait, comme je l’explique dans mon livre, Business Lessons from a Radical Industrialist, où je raconte toute l’histoire. Nous nous sommes demandé : « Comment la nature crée-t-elle ses propres tapis et sols ? » et il y a cinq ans, notre équipe de créateurs a organisé un séminaire avec Janine Benyus, Présidente du Biomimicry Institute et Championne de la Terre du PNUE. Elle a introduit le concept de biomimétisme – utiliser la nature comme guide dans la création et comme source d’inspiration – nous mettant au défi d’intégrer les principes de la nature dans la conception des dalles de moquette. Suite à cela, notre créateur principal de produit, David Oakey, envoya son équipe dans la forêt pour voir ce qu’ils pouvaient apprendre sur la manière dont la nature concevrait un revêtement de sol. Ils étaient déconcertés au début, pensant devoir copier des fleurs et des feuilles, mais ils ont ensuite découvert quelque chose de bien plus intéressant. Ce qu’ils nous ont ramené était le « chaos organisé ». Le sol de la forêt ne présente pas deux mètres carrés identiques et pourtant ceux-ci se confondent tous parfaitement en un tout harmonieux. Nos créateurs ont réalisé qu’il n’y a pas de fleur parfaite ni de couleur parfaitement unie: c’est juste un système varié, caractérisé par le terme « entropie ». Ils ont alors entrepris de créer une moquette modulaire de la même façon. Dans la nature, le motif et la couleur sont légèrement différents sur chaque « module », et c’est là que résidait toute la difficulté. Il était difficile pour les créateurs d’abandonner l’esthétique de la « perfection » et de la monotonie. Ils avaient également besoin de l’aide de nos ingénieurs. Comment faire pour que dans une même chaîne de production, la couleur et le dessin de chaque dalle individuelle soient légèrement différents ? Ceci nous a amené à réunir les créateurs et les ingénieurs pour trouver des solutions, quelque chose que nous n’avions jamais fait auparavant. Le problème fut résolu et ainsi fut lancée une nouvelle gamme de produits, appelée – en l’honneur de cette promenade une après-midi dans la forêt de Géorgie – Entropy. Créer des moquettes à la façon de la nature comporte de nombreux avantages. Nous pouvons poser les dalles au hasard plutôt que de le faire de façon systématique. Nous avons découvert qu’il est facile de faire des réparations, puisque que les dalles ne sont pas exactement identiques. Cela ne fait rien si l’aspect est un peu différent, en fait, c’est mieux. Les articles de mauvaise qualité ont quasiment disparu; les inspecteurs « Le sol de la forêt ne présente pas deux mètres carrés identiques et pourtant ceux-ci se confondent tous parfaitement en un tout harmonieux » ne peuvent trouver des défauts dans cette « imperfection » délibérée de ne pas fabriquer deux dalles identiques. Et cela a pratiquement éliminé les déchets lors de la pose. Désormais, chaque dalle peut trouver une place dans une symphonie de couleurs et de motifs, tous différents, tous harmonieux et agréables, dont aucun ne doit être rejeté comme étant « mauvais ». Les bains de teintures différents se confondent maintenant de manière indiscernable, et il est donc devenu inutile de garder quelques dalles supplémentaires de chaque bain en cas de besoin. L’utilisateur peut changer ses dalles de place pour égaliser l’usure, de la même manière que nous changeons les pneus de place sur nos voitures pour en prolonger la durée de vie. Pareillement, alors que la réparation de moquettes traditionnelles exige le recours à des professionnels spécialement formés, la nature aléatoire du concept d’Entropy permet une souplesse bien plus grande. Ainsi par exemple, si une dalle est endommagée dans une chambre d’hôtel, le personnel d’entretien peut la remplacer – sans se soucier du sens dans lequel il faut la poser – et la chambre est de nouveau prête en quelques minutes. Comment le marché a-t-il accueilli tout cela ? En un mot, de façon spectaculaire ! Entropy est devenu le produit le plus vendu dans la période de temps la plus courte dans toute l’histoire de la société Interface. Et ceci n’est pas dû seulement aux nombreux avantages techniques qui découlent de l’imitation de la nature. Ce succès est aussi très étroitement lié à cet endroit parfait que je demande à mes auditoires d’imaginer. « Les motifs de la nature sont organiques » déclare David Oakey. « Les formes naturelles dépendent de leurs fonctions. Elles ne sont pas linéaires. Elles ne sont pas basées sur des lignes et ne sont donc pas limitées par celles-ci. Ainsi, ces dalles sont belles sur un sol pour la même raison qu’un tapis de fleurs, de brindilles, de terre et de pierres est beau sur le sol de la forêt ». En d’autres termes, Entropy reproduit cet endroit parfait que nous imaginons tous lorsque nous fermons les yeux et il amène de manière inconsciente pour nous l’extérieur à l’intérieur. Pas étonnant que ce produit se vende aussi bien ! Lorsque vous créez votre motif sur la base d’un modèle naturel, les résultats sont positifs et les gens sont enthousiastes. Nous disons parfois : « C’est la nature » pour désigner la façon correcte de faire quelque chose, et « Ce n’est qu’humain », pour parler d’une erreur – et il y a une différence essentielle entre la manière dont nous faisons les choses et la manière dont les fait la nature. La nature apprend de ses erreurs et élabore une meilleure réponse. Nous, les humains, trouvons parfois difficile de nous libérer du statu quo, même si celui-ci peut nous mener à la faillite voire nous tuer. Combien de temps, selon les lois de la nature, un organisme qui refuserait d’apprendre pourrait-il survivre ? La responsabilité des industriels est de trouver des manières de travailler avec ce que la nature nous a donné, et d’en imiter les aspects les plus efficaces afin d’éliminer le concept même de déchets, pour fabriquer ce dont nous avons besoin à partir des ressources renouvelables disponibles, boucler la boucle et alimenter nos chaînes de production pour fabriquer nos produits avec des matières premières renouvelables ou recyclées. A long terme – et peut-être même bien avant cela – il n’y a pas d’autre issue. PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service 17 Le PNUE à l’œuvre © BTC/UNEP Le PNUE mène un large éventail d’activités pour promouvoir et faciliter le développement et l’adaptation de technologies propres. Vous trouverez ci-après un certain nombre d’exemples récents. Pour avoir plus de renseignements sur le travail que fait le PNUE dans le domaine des changements climatiques, vous pouvez consulter le site www.unep.org/unite/30Ways Planter une graine pour protéger le climat Le problème : L’utilisation effrénée des forêts produit environ 17 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. En Afrique, les moyens de subsistance de quelques 600 millions de personnes sont assurés par les forêts et les bois. Malgré le développement rapide des transactions financières sur le carbone, il arrive souvent qu’en Afrique sub-saharienne des projets soient tout simplement ignorés à cause de l’idée fausse très répandue que le potentiel de cette région est limité. La solution : Le Mécanisme pour un développement propre (MDP), établi au titre du Protocole de Kyoto, permet aux pays industrialisés de recevoir des crédits carbone pour financer des projets d’atténuation et de piégeage du carbone dans des pays moins avancés. Depuis 2007, le Programme CASCADe du PNUE — Financement carbone pour l’agriculture, la sylviculture, la conservation et des mesures de lutte contre le déboisement — a ouvert aux pays africains des possibilités de participation au Mécanisme et aux marchés volontaires du carbone. 18 PNUE NOTRE PLANÈTE la lanature natureààvotre votreservice service Ce qu’a fait le PNUE : La mise en œuvre du Programme CASCADe est assurée par le PNUE et son Centre Risoe, avec l’appui du FFEM (le Fonds français pour l’environnement mondial). Au Bénin, au Cameroun, en République démocratique du Congo, au Gabon, à Madagascar, au Mali et au Sénégal, le Programme a aidé à produire des crédits carbone en fournissant une assistance technique et une formation aux concepteurs de projets, aux communautés et aux institutions nationales concernées par les changements climatiques. Le Programme CASCADe a soutenu plus de 20 projets de reboisement communautaires, de foresterie commerciale, de construction de fours et d’installations de fumage du poisson énergétiquement efficaces ainsi que dans le domaine de la bioénergie, et il a évité le déboisement de sept pays africains. Le succès : Le succès des projets pilotes du Programme CASCADe est garant de son expansion dans d’autres pays pour renforcer encore les cadres règlementaires nationaux pour des projets de financement carbone. Le PNUE envisage la mise en place d’un programme de suivi qui soutiendra toute une gamme de projets susceptibles d’ouvrir des possibilités de participation des pays africains au MDP et aux marchés volontaires du carbone. © Sung-Il Kim/Corbis Des cartes pour un Programme REDD+ plus écologique La solution : Le problème : La REDD+ (sur la réduction des émissions liées au déboisement et à la dégradation des forêts) est un mécanisme ayant pour objectif de donner une valeur financière au carbone emmagasiné dans les forêts, en offrant des incitations aux pays en développement pour qu’ils réduisent les émissions provenant des terres boisées et investissent dans des programmes à faible intensité de carbone afin de parvenir au développement durable. Mais l’opinion n’a pas encore vraiment pris conscience du potentiel de la REDD+, et bien souvent les pays n’ont pas les moyens d’assurer sa mise en œuvre. Le Programme ONU-REDD aide notamment les pays à reconnaître le potentiel de la REDD+ et à l’exploiter avec un appui technique. L’un des principaux outils qu’il propose est la capacité de réaliser des relevés cartographiques du carbone indiquant les quantités de carbone stockées dans les écosystèmes, en mettant en évidence les zones importantes du point de vue de la diversité biologique et des services écosystémiques et les dangers pour les forêts elles-mêmes. Associée à d’autres outils d’appui à la prise de décisions, cette capacité aide les pays à élaborer des stratégies nationales de REDD+ qui optimisent le potentiel de développement qu’offrent les forêts. Ce qu’a fait le PNUE : Le Programme ONU-REDD est un partenariat entre la FAO, le PNUD et le PNUE ayant pour but d’aider les pays en développement à préparer et mettre en œuvre des stratégies et mécanismes nationaux de REDD+. Dans le cadre de ce programme, le PNUE fournit un appui financier, technique et stratégique et collabore étroitement avec des spécialistes des systèmes d’information géographique des institutions nationales et provinciales de nombreux pays en développement, afin de rassembler et collationner des informations qui servent d’outils d’analyse spatiale à l’appui de l’élaboration des stratégies de REDD+. Le succès : Au niveau mondial, le Programme ONU-REDD soutient les pays dans les efforts qu’ils déploient pour intégrer des avantages multiples dans leurs stratégies de REDD+ et leurs plans de développement. Des initiatives qu’il est possible de reproduire, activités d’analyse spatiale par exemple, permettent de garantir que les forêts continuent de fournir de multiples avantages, qu’il s’agisse de moyens de subsistance ou de conservation de la biodiversité de la planète, et de servir de dépôts importants de carbone. PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service 19 Protéger et évaluer les mangroves de Guinée-Bissau Composées d’arbres, de buissons, de palmiers ou de fougères, les forêts de mangroves se sont adaptées aux eaux salées des régions tropicales. À la frontière entre terre et mer, elles jouent un rôle important pour la subsistance des communautés avoisinantes et procurent des services écosystémiques précieux, tels que la protection des littoraux contre les tempêtes et l’érosion, la stabilisation des sols en retenant les sédiments, la préservation de la qualité de l’eau, le piégeage du dioxyde de carbone, la sécurité alimentaire pour les pêches vivrières et commerciales, le miel, les matériaux de construction, la médicine traditionnelle, les revenus du tourisme. Ces services se traduisent en bénéfices économiques directs. Selon le Centre mondial de surveillance de la conservation de la nature (WCMC) du PNUE, la valeur des mangroves peut atteindre 500 000 dollars par km2 par an. D’après l’Atlas mondial des mangroves, publié en 2010 par le PNUE-WCMC, la mangrove de Guinée-Bissau s’étend sur près de 3 000 km2, soit la plus grande superficie dans la région après celle du Nigéria. Cette mangrove est essentielle pour la biodiversité puisqu’elle abrite 180 espèces d’oiseaux, 40 espèces de mammifères terrestres et 5 espèces de tortues de mer, en plus des hippopotames, des lamantins, des dauphins et des crocodiles nains. Elle est aussi essentielle pour la pêche. Les huîtres, les crabes, les crevettes et les poissons sont sources de revenus et de nourriture, et près de 70 % de la production nationale de poissons dépend des mangroves. Pourtant, les mangroves sont menacées par la surexploitation et par l’expansion agricole et urbaine. Afin de protéger ces ressources naturelles, le Gouvernement de la Guinée-Bissau a créé un système de zones protégées couvrant 12 % de la superficie du pays. Elles englobent les riches mangroves du Parc 20 PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service naturel des mangroves du Rio Cacheu et le Parc national des îles d’Orango. Cependant, il était jusqu’ici difficile de préserver ces espaces protégés et de mettre un terme au braconnage et à l’exploitation forestière illégale, faute de surveillance, de personnel et d’infrastructures suffisants. Dans le cadre du projet espagnol Lifeweb, le PNUE travaille en collaboration avec l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) pour améliorer la gestion de ces parcs. Il mène un travail de formation et de sensibilisation auprès des gardes-forestiers nationaux et des communautés locales de pêcheurs qui participeront à la gestion des parcs. Le PNUE s’est associé à l’UICN pour l’achat de trois bateaux à moteur et des équipements GPS et radio indispensables pour assurer l’application des règlements dans les parcs. Les autorités locales et les ONG disposent ainsi de données satellites indiquant l’étendue actuelle et passée des mangroves et le taux de déboisement. Protéger les mangroves contre le déboisement et la surexploitation, cela signifie préserver une riche diversité biologique et d’importantes ressources halieutiques et assurer ainsi le bien-être futur des populations locales. En plus des efforts visant à renforcer le suivi et la mise en œuvre des projets, le PNUE s’attache à estimer la valeur économique des mangroves de Guinée-Bissau et des services écosystémiques qu’elles offrent. Ce travail mettra à la disposition des décideurs et des communautés locales les données et les justifications économiques nécessaires pour protéger ces précieuses forêts. En mesurant le piégeage du carbone dans les forêts de mangroves, il sera possible de développer des projets pour les mangroves dans le cadre de la REDD + et donc d’avoir accès à un financement carbone international pour la conservation des mangroves en Guinée-Bissau. Gabriel Grimsditch produits Un cerf-volant sub-aquatique « Deep Green » se comporte exactement comme un cerf-volant qui vole avec les courants des marées au lieu de le faire avec le vent. Attaché au plancher océanique par un long filin, il glisse d’un côté à l’autre. L’eau qui l’entoure fait tourner une turbine placée sous son « aile » et produit de l’électricité. Plus d’énergie tirée d’un plus petit système et la capacité de maîtriser l’énergie produite par des eaux qui bougent lentement sont au nombre des avantages qu’il a sur d’autres concepts d’énergie marémotrice. Il en est encore au stade du prototype mais, selon les estimations, un système Deep Green installé sur les côtes du Royaume-Uni pourrait produire assez d’électricité verte pour répondre aux besoins annuels de 4 millions de ménages britanniques environ. www.minesto.com/ Une voiture à vent traverse l’Australie La Wind Explorer est le premier véhicule électrique , propulsé par le vent, à traverser un continent. Ce véhicule léger a traversé l’Australie, de l’océan Indien à l’océan Pacifique – soit 4 800 kilomètres – en 18 jours. Piloté par les sportifs allemands de l’extrême Dirk Gion et Stefan Simmerer, cette voiture qui pèse 200 kg a enregistré trois nouveaux records : première traversée d’un continent par un véhicule fonctionnant à l’énergie éolienne, plus longue distance globale couverte par un véhicule terrestre propulsé exclusivement par l’énergie éolienne et distance la plus grande parcourue en 36 heures. La Wind Explorer était dotée d’un moteur électrique alimenté par une batterie Lithium Ion, rechargée lorsque les conditions le permettent par une éolienne télescopique portable qui fonctionne à l’arrêt. www.wind-explorer.com Un ordinateur portable intégralement recyclable Aux États-Unis, environ 2 millions de tonnes de produits électroniques sont devenus obsolètes en 2005, mais moins de 380 000 tonnes ont été recyclées. Aussi, l’idée à l’origine du Bloom Laptop était de réduire la quantité de déchets électroniques jetés dans les décharges. Cet ordinateur portable peut être entièrement recyclé en deux minutes, en suivant 10 étapes simples— point n’est besoin d’avoir un tournevis. Tous ses composants peuvent aisément être séparés du cadre pour être recyclés sans difficulté. Il est l’invention d’un groupe d’étudiants en construction mécanique de l’Université Stanford, aux États-Unis, et de l’Université Aalto, en Finlande. Les auteurs de ce projet ont reçu le Prix de l’invention du mois décerné par Autodesk, le géant du logiciel. http://inhabitat.com Les robes bleues sont vraiment vertes La toge bleue revêtue pour la cérémonie de remise des diplômes de l’Université de Caroline du Nord est devenue verte. Encouragé par des étudiants respectueux de l’environnement préférant que la toge qu’ils ne porteront probablement qu’une seule fois dans leur vie soit fabriquée dans des matériaux recyclés, le styliste primé Alexander Julian, ancien élève de l’Université, a collaboré avec les fabricants Oak Hall Cap & Gown, pour créer la première toge de cérémonie de remise des prix. Outre le fait qu’il a la couleur « bleu californien », ce vêtement est fabriqué à partir de bouteilles vides en plastique, recyclées à 100 %. Pour chaque robe il faut vingt-trois bouteilles en plastique. L’étiquette est imprimée directement sur le vêtement au lieu d’être cousue séparément. http://uncnews.unc.edu/content/view/4310/75/ Le navire porte-conteneurs le plus vert jamais construit La compagnie de navigation Maersk a annoncé qu’elle allait acheter dix des navires porte-conteneurs les plus grands et les plus performants jamais construits. Curieusement, ces bateaux de transport maritime seront à la fois les plus grands et les plus écologiques qui aient jamais pris la mer. Ils sont plus respectueux de l’environnement pour des raisons d’économie d’échelle — ils transportent plus de cargaison mais il y a moins d’émissions par conteneur. Ces énormes bateaux produisent moitié moins de CO2 que la norme industrielle pour les trajets Asie-Europe et leur consommation de carburant par conteneur est de 35 % inférieure. Ils auront 400 m de longueur, 59 m de largeur, 73 m de hauteur et transporteront 16 % de plus que la normale. http://inhabitat.com/ Des planches de surf en détritus tirés de l’océan Le surfer Kevin Cunningham a trouvé un moyen tout à fait génial de recycler les détritus qui polluent les océans. Fatigué de voir tous les débris qui jonchent les plages locales, il a décidé d’en faire des planches de surf. Des fragments de débris d’origine humaine comme le plastique et le verre sont recyclés et réutilisés dans la couverture de la planche de surf, des sacs en plastique sont tissés pour en faire une toile de renfort, des bouteilles en plastique sont découpées et réassemblées pour en faire des ailerons et il y a encore bien d’autres possibilités à explorer, dit Cunningham. Sa société Spirare Surfboards produit une série limitée de planches fabriquées à partir de débris récupérés qui seront présentées dans une exposition publique; elle sera suivie d’une ligne de 100 planches qui seront vendues sur commande. PNUE NOTRE PLANÈTE http://spiraresurfboards.com/ la nature à votre service 21 © Pete McArthur/Corbis Une croissance verte grâce aux forêts animaux et les ressources naturelles, pendant combien de temps encore continuera-t-il à fonctionner pour les quelques privilégiés dont les modes de vie sont les moins viables? Yolanda Kakabadse Présidente du WWF International « À quoi ressemblera l’économie verte? ». C’est un sujet brûlant qui passionne autant les petits comptables que les écolos. De plus en plus on se rend compte que le modèle économique actuel ne donne pas les résultats escomptés. Il ne répond pas aux attentes des quelque 3 millions de personnes dans le monde qui vivent avec l’équivalent de 2 dollars par jour ou moins, ni à celles des espèces. L’indice Planète vivante du WWF montre que la biodiversité a diminué de 30 % depuis 1970. Il ne répond pas non plus aux attentes dans le cas des forêts, dont 13 millions d’hectares disparaissent chaque année. Donc, si ce modèle ne donne pas les résultats qu’en attendent les pauvres, les 22 PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service Réponse : pour bien peu de temps encore. Le rapport Planète vivante du WWF montre que les pays riches continuent à dépendre des ressources d’autres pays et contribuent ainsi à un appauvrissement alarmant de la biodiversité dans les pays à faible revenu. De fait, les nations les plus pauvres et les plus vulnérables subventionnent le train de vie des nantis. Dans son ensemble, l’humanité utilise les ressources d’une planète et demie. Point n’est besoin d’être économiste pour savoir que tôt ou tard il faudra payer la note. C’est pour cela que le concept d’économie verte présente un tel intérêt. Les PDG et les chefs d’État, les écologistes et les dirigeants communautaires jettent enfin les bases d’un système qui assurera le bien-être et pas uniquement la richesse. Les forêts ont une importance cruciale parce que leurs produits et les services rendus par leurs écosystèmes touchent tous les secteurs de l’économie. On peut établir une corrélation entre leur situation périlleuse et les imperfections de notre modèle économique actuel : mauvaise gouvernance, avidité des grosses entreprises, déni de leurs droits aux pauvres. Un modèle économique vert permettrait de corriger ces défauts grâce à de nouvelles mesures d’incitation et de progrès. L’Indonésie offre un exemple intéressant de la manière dont ces mutations pourraient fonctionner. Elle s’est engagée publiquement à assurer une croissance de 7 % du PIB et à une réduction de ses émissions de carbone de l’ordre de 41 % (avec une aide internationale) d’ici à 2020. Ces objectifs ambitieux ne pourront être atteints que grâce à une gestion plus responsable des forêts et à la planification de l’utilisation plus durable des terres. Plus de la moitié des émissions de carbone de l’Indonésie étant imputable au déboisement et à la dégradation des forêts – et 15 % de son PIB provenant de la sylviculture et de l’agriculture – il est indispensable « Nous avons encore de belles forêts parce que les gens savent que leur vie en dépend. Si nous avons besoin de nourriture, nous allons à la rivière ou dans la forêt » que ce pays réajuste sa politique dans ce domaine. Si nous gaspillons les forêts, c’est qu’il est certes plus facile de couper des forêts naturelles d’origine que de confronter une bureaucratie tatillonne peu encline à autoriser l’utilisation de terres déjà déboisées. Si les problèmes fonciers concernant ces terres dégradées - dont la superficie est estimée à 30 millions d’hectares en Indonésie – étaient réglés, les perspectives de leur développement pour de nouvelles plantations produisant de l’huile de palme ou du bois d’œuvre seraient nettement améliorées. Ce genre de réformes politiques - assorties des incitations créées par un marché qui fait de plus en plus preuve de discernement en ce qui concerne l’empreinte carbone des produits et qui est prêt à récompenser les réductions d’émissions – créera un climat environnemental et économiques ne faisant que des gagnants. Pour leur part, beaucoup d’entreprises ont déjà réalisé que leur résultat financier dépend de forêts saines et elles ont volontairement adopté des normes telles que celles du Forest Stewardship Council et de la Table ronde pour l’huile de palme durable. À court terme, ces normes peuvent atténuer les pertes dues à une mauvaise gestion des forêts. (Tout comme une personne responsable ne se transforme pas en voleur simplement parce que le propriétaire du magasin ne regarde pas, les entreprises responsables ne profitent pas d’une mauvaise gouvernance pour faire des bénéfices). À long terme, ces groupements des secteurs public et privé amènent à de meilleures politiques qui valent pour toutes les sociétés. Il est possible, en Indonésie, de reconnaître la valeur traditionnelle de la conservation, qui est le produit de générations de dépendance à l’égard de la générosité des forêts, des fleuves et des mers – et de les récompenser comme il se doit. Le Programme REDD+, qui comprend de fortes mesures de protection sociale, pourrait marquer un important pas en avant dans la prévention de changements climatiques galopants et la réduction du fardeau de la pauvreté. Alors même que nous nous efforçons d’améliorer le mécanisme REDD+, quelques étincelles de progrès jaillissent, qui prouvent que les communautés autochtones peuvent tirer parti de leur gestion de l’environnement dans le cadre d’une nouvelle économie verte. Prenez par exemple Long Pahangai à Bornéo, dans le Kalimantan oriental. Les Dayaks qui le peuplent vivent encore comme leurs ancêtres et entretiennent des liens très forts avec la terre. « Nous avons encore de belles forêts parce que les gens savent que leur vie en dépend. Si nous avons besoin de nourriture, nous allons à la rivière ou dans la forêt », dit Iskander Idris, le secrétaire du village. La conservation de Long Pahangai a encore d’autres avantages. Les forêts intactes ont protégé tout le bassin versant, y compris un affluent qui coule à proximité du village vers le fleuve Mahakam et qui produira de l’énergie électrique pour amener l’électricité au village. En créant ce genre de petites installations hydroélectriques, le WWF et ses partenaires tentent de rendre la conservation rentable pour les communautés rurales. Il y a globalement 1,4 milliard de personnes qui n’ont pas accès à une source fiable d’électricité; ceci a des répercussions sur leur état de santé, leur éducation, leurs possibilités de revenu et leur capacité à participer pleinement à la vie de la société. « Ce projet est un partenariat entre le gouvernement provincial, les autorités locales, la communauté et le WWF», dit Data Kusuma, dirigeant du projet pour le WWF. « Au départ, le gouvernement provincial avait proposé d’installer la micro-turbine hydraulique dans une autre communauté. Mais le WWF leur a fait comprendre que la forêt était trop dégradée – la rivière était envasée et ne coulait même pas toute l’année. Cette communauté aurait été très déçue d’avoir un système ne fonctionnant pas bien ». « À Long Pahangai, la rivière peut supporter la micro-turbine et cela peut servir de modèle à d’autres communautés; si elles remettent en état et reboisent leurs bassins versants, des micro-turbines pourraient aussi leur être utiles ». Le Chef du sous-district, Tigang Himang, ajoute encore : « Les villages de ce sous-district sont tributaires de la nature et vivent en harmonie avec leur environnement. Mais nous devons aussi nous développer économiquement. Ici, nous faisons tout à la sueur de notre front. Avec l’électricité, nous pourrons produire davantage et tirer parti de la technologie ». Nous ne comprenons peut-être pas encore très bien ce qui fait une « économie verte » mais ceci est certainement un bon point de départ. PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service 23 people Champion du climat, le Président Calderon du Mexique a dit très clairement lors de la dernière réunion de Cancún qu’il voulait faire de son pays le leader mondial des mesures prises en faveur du climat et il s’est montré très actif pour promouvoir l’économie verte, en particulier en ce qui concerne les forêts. Mme Olga Speranskaya, scientifique russe, a fait la une des journaux du monde entier pour ses travaux visant à réduire les effets néfastes des substances chimiques toxiques en Europe orientale, au Caucase et en Asie centrale; en 2009, elle a remporté le prestigieux Prix Goldman pour son travail d’identification et d’élimination des substances chimiques toxiques dans l’environnement, héritage soviétique. 24 PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service Angélique Kidjo, Bénin. Des milliers d’admirateurs du monde entier adorent la voix de la chanteuse et chansonnière Angélique Kidjo qui est également un ardent défenseur du changement humanitaire et environnemental. Décrite par le Time Magazine comme la « première diva de l’Afrique », Kidjo, née au Bénin, se sert de son statut de célébrité pour s’exprimer franchement en faveur d’un certain nombre de causes importantes, en particulier l’éducation des filles et le développement durable. Zhang Yue – Président et fondateur du Groupe BROAD en Chine. « La responsabilité est plus importante que la croissance » : c’est l’une des devises du Groupe. Diplômé des beaux arts, Zhang Yue a fait appel à son pouvoir créateur et il se concentre maintenant sur la construction, dans le monde entier, de bâtiments durables ayant une efficacité énergétique cinq fois supérieure à celle des bâtiments conventionnels. L’aventurier suisse Louis Palmer, donnant une orientation verte au fameux voyage de Jules Vernes, a réussi à faire le tour du monde l’année dernière avec une flottille de voitures électriques. Les équipes de la « Zero Race » ont traversé le globe en quatre-vingt jours, mettant en évidence deux des principaux problèmes environnementaux auxquels est confronté le monde d’aujourd’hui : la nécessité de disposer de moyens de transport plus durables et de sources d’énergie plus propres. PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service 25 © BASE/Corbis Maryanne Grieg-Gran Économiste principale, de l’Institut international pour l’environnement et le développement Steve Bass Chef du Groupe marchés durables, de l’Institut international pour l’environnement et le développement Les arbres, sources d’économies Face à la récession et à la difficulté de réduire leur dette publique, de nombreux pays commencent à repenser leurs stratégies économiques. L’économie verte permet de sortir de la récession, grâce à des modes de développement utilisant efficacement les ressources, respectueux de l’environnement et équitables, sources d’un véritable bien-être. En considérant l’ensemble des services écosystémiques fournis par les forêts, et non pas seulement la production de bois et de fibres, on leur permet de jouer un rôle économique primordial. Les statistiques économiques relatives aux forêts se limitent au bois et aux produits fibreux, qui ne représentent que 1 % du PIB mondial et 0,4 % de l’emploi dans le secteur formel. Dans certains pays africains, ils tiennent 26 PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service une place plus importante, jusqu’à 13 % du PIB. Mais cette contribution, non négligeable, est inférieure à la réalité. Plus de 2 milliards de personnes utilisent du bois pour la cuisine, le chauffage et la conservation des aliments. Les forêts assurent l’emploi et la subsistance de centaines de millions de personnes (entre 119 millions et 1,4 milliard selon les estimations). Les services assurés par les écosystèmes forestiers sont beaucoup moins visibles. Pourtant, plus de 50 % des espèces terrestres vivent grâce aux forêts, qui régulent le climat mondial par le stockage du carbone et la protection offerte par les bassins versants. De plus, elles ont une grande importance culturelle. Les forêts sont une ressource renouvelable, fournissant des produits recyclables et biodégradables. L’efficacité de la transformation de ces produits a fait des progrès, y compris l’utilisation de résidus de bois et le recyclage des produits du bois et du papier. Nous serons donc en mesure de répondre à une demande mondiale de bois et de fibres qui va doubler d’ici 2030 avec seulement 40 % de croissance dans le secteur du bois. De plus, la réponse à cette plus forte demande viendra majoritairement des forêts plantées, dont la production a également augmenté. Grâce à cette utilisation efficace des ressources, le secteur forestier reflète parfaitement l’économie verte en action. Toutefois, la création d’une économie verte ne va pas sans le renoncement aux mauvaises pratiques. Actuellement, une bonne partie des arbres ne sont pas remplacés, cédant la place aux cultures de rapport et à l’élevage, beaucoup plus rentables. La déforestation, jugée alarmante par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), touche environ 13 millions d’hectares par an, essentiellement sous les tropiques. De mauvaises pratiques d’exploitation et l’abattage illégal, très répandu, entraînent la dégradation de vastes étendues de forêts et, avec elle, la disparition de précieux services écosystémiques et de réelles perspectives économiques. Aucune rémunération n’a été déterminée pour ces services et, par conséquent, les décisions en matière de gestion n’en tiennent pas compte, sauf dans les rares innovations que sont les systèmes de paiements pour les services environnementaux (PSE). Pourtant, le bilan de ces dix dernières années n’est pas si sombre. Investir dans la réduction de la déforestation pour atténuer les changements climatiques est un bon choix économique, comme cela est de plus en plus reconnu. Selon les estimations, les avantages pour la régulation du climat d’une réduction de moitié de la déforestation valent trois fois les investissements engagés. Cela contribue à privilégier une atténuation basée sur la forêt lors des négociations internationales sur le climat, tout d’abord avec le programme REDD (réduction des émissions liées à la déforestation et à la dégradation des forêts) puis, plus récemment, avec le mécanisme REDD+ (inscrivant la conservation, la gestion durable des forêts et le renforcement des stocks de carbone sur la liste des activités éligibles). L’attrait des investissements forestiers est d’autant plus évident si l’on prend en compte non seulement le bois et les fibres mais aussi l’ensemble des services écosystémiques forestiers. Il faut donc investir d’avantage dans la protection des forêts, principalement en assurant plus d’avantages aux communautés locales; en améliorant la gestion des forêts de production pour minimiser les impacts sur les services écosystémiques, et en intensifiant la plantation des types de forêts capables de fournir le plus grand nombre de services écosystémiques. Qu’il s’agisse de la production de bois certifié et des marchés pour les services écosystémiques, ou des partenariats récompensant les populations locales pauvres protégeant les forêts, nous disposons d’exemples suffisamment probants pour attirer une plus grande attention politique sur l’économie verte basée sur les forêts. Il faut évaluer toutes les possibilités, les services écosystémiques qu’elles offrent et la répartition des coûts, leurs avantages et leurs risques afin de les promouvoir plus largement dans le cadre des négociations REDD+. « Les décideurs et le grand public seraient plus à même d’apprécier les nombreux rôles des forêts, véritables usines produisant une variété de produits allant du bois aux aliments, infrastructure écologique régulant le climat et les cycles de l’eau, et prestataires de services d’ innovation et d’assurance grâce à la résilience de la biodiversité des forêts » Le modèle économique utilisé dans le rapport du PNUE sur l’économie verte indique que les investissements verts dans les forêts peuvent stimuler les économies nationales, tout en protégeant les services écosystémiques. En ne consacrant que 0,035 % du PIB mondial annuel entre 2010 et 2050 à l’investissement public pour rémunérer les propriétaires des forêts afin de les conserver, et en y ajoutant des investissements privés pour le reboisement, la valeur ajoutée du secteur forestier pourrait augmenter de 20 % et la quantité de carbone stockée pourrait croître de 28 %. Un accord mondial dans le cadre du mécanisme REDD+ pourrait être la meilleure solution pour préserver les forêts et investir dans leur rôle au sein de l’économie verte. Jusqu’à présent, les projets PSE ont été limités par le manque de fonds. Mais un accord pourrait marquer un changement radical en termes de fonds disponibles. De nouvelles perspectives s’ouvriraient à nous en créant de nouveaux types d’emplois liés aux forêts, des moyens de subsistance et des revenus pour rémunérer les populations locales, gardiennes des forêts et des services écosystémiques. Il faudra adopter des mesures de protection pour garantir aux populations tributaires des forêts le respect de leurs droits, surtout s’ils sont l’héritage de systèmes traditionnels et non pas de cadres juridiques formels, et ainsi s’assurer que ceux qui prennent en charge les coûts d’opportunité du mécanisme REDD+ reçoivent la part des avantages qui leur revient. Une vision du rôle du secteur forestier dans l’économie verte se dessine. Les décideurs et le grand public seraient plus à même d’apprécier les nombreux rôles des forêts, véritables usines produisant une variété de produits allant du bois aux aliments, infrastructure écologique régulant le climat et les cycles de l’eau, et prestataires de services d’innovation et d’assurance grâce à la résilience de la biodiversité des forêts. La portée économique des forêts s’étendrait à d’autres secteurs que les industries du bois et du papier, qui auraient une empreinte écologique plus faible grâce au remplacement des métaux non renouvelables, du béton et des matières plastiques par des fibres forestières renouvelables, et des combustibles fossiles par du bois de feu neutre en carbone. Le contrôle et la gestion efficaces des forêts à l’échelon local pourraient être encouragés par plus d’incitations financières dans le cadre d’un système international solide et équitable destiné à rémunérer les services dispensés par les forêts au niveau mondial. Ces paiements favoriseraient et récompenseraient les partenariats avec les acteurs locaux et communautaires tributaires de la santé des forêts. Avec de telles incitations et la promesse d’avantages nombreux, les acteurs de la foresterie procéderont à une évaluation régulière de la valeur de l’ensemble des biens et services forestiers et pourront, ainsi, mieux la refléter. PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service 27 © Bill Ross/Corbis Andrew W. Mitchell Fondateur et directeur du programme mondial pour la canopée et président du projet sur la divulgation de l’empreinte forestière Le dramaturge anglais, Oscar Wilde, a un jour déclaré : le cynique est celui qui connaît le prix de tout et la valeur de rien. Aujourd’hui, beaucoup affirment que la biodiversité a une valeur « inestimable », mais peu semblent prêts à en payer le prix. La valeur de son existence seule n’a pas été en mesure d’endiguer les forces économiques du XXe siècle, responsables de la destruction de la biodiversité et de dommages collatéraux jugés acceptables au nom de la prospérité. Et, trop souvent, l’augmentation de la population n’a guère laissé d’autre choix aux pauvres que de piller la biodiversité pour assurer leur survie. Une vision très différente de la conservation est nécessaire si l’on veut avoir une chance d’atteindre, durant ce siècle, l’Objectif du millénaire pour le développement consistant à réduire immédiatement la perte de biodiversité. À la pointe du débat, la biodiversité elle-même devrait être remplacée par les services écosystémiques qu’elle fournit à l’humanité. Les forêts nous font prendre conscience à quel point le capital naturel est indispensable à nos besoins les plus élémentaires : climat, eau, nourriture, énergie, santé et sécurité alimentaire. Dans mon tout jeune âge, le monde inconnu de la canopée de la forêt tropicale de Bornéo fascinait déjà le jeune zoologiste que j’étais. Atteindre la cime des arbres - où les plus hauts diptérocarpacées s’élèvent a plus de 90 mètres - était une opération dangereuse impliquant soit des catapultes et des cordes d’escalade, soit des ballons à air chaud, selon que l’on partait du sol ou du ciel. C’est pourquoi j’ai depuis lors construit de précaires passerelles aériennes pour permettre aux équipes scientifiques d’étudier aisément. Ce que nous avons découvert nous a stupéfaits, nous 28 PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service Investir dans le capital naturel révélant l’étendue de notre ignorance. Peut-être que la moitié de la vie terrestre s’y concentre, ne touchant jamais le sol. Quelque 80 % des insectes que les entomologistes ont découverts dans la canopée d’Asie n’avaient pas de nom, et environ 60 % en Amérique centrale étaient encore inconnus des scientifiques. Trente ans plus tard, nous en savons beaucoup plus, et ce nouveau savoir est peut-être plus important encore. Des experts en sciences de l’atmosphère, des éco-physiologistes brésiliens et la NASA ont financé une expérience à grande échelle sur l’atmosphère et la biosphère. Des tours disséminées dans les forêts de l’Amazonie mesurent les flux de gaz, tels que le carbone et l’oxygène, qui entrent et sortent de la canopée. Cette étude a révélé que les forêts éliminent de l’atmosphère environ une tonne de carbone par hectare et par an, en le stockant dans les troncs et les racines. En outre, les arbres rejettent dans l’air de grandes quantités d’un riche mélange de composés organiques volatils. Des produits chimiques s’y oxydent au contact de la lumière du soleil pour créer de minuscules noyaux autour desquels se forment des gouttelettes d’eau. Oui, la canopée amazonienne génère sa propre pluie. Ainsi, la biodiversité pourvoit d’immenses services de régulation à notre atmosphère. Il faut imaginer les forêts tropicales de la planète comme des éco-services géants, telle une centrale électrique ou une usine de traitement de l’eau, fournissant les services écosystémiques que nous utilisons tous, mais pour lesquels personne ne paie encore. Elles sont le plus grand système de capture et de stockage du carbone (CSC) existant sur la planète, débarrassant l’atmosphère d’un milliard de tonnes de polluants par an. Elles le font gratuitement, tandis que les installations industrielles comparables peuvent demander jusqu’à 300 dollars par tonne pour faire le même travail. La déforestation et le brûlage des forêts tropicales détruisent ce système © Vaara/iStockphoto unique en même temps qu’ils répandent de la fumée, équivalente en quantité aux émissions annuelles de carbone de tous les transports dans le monde. L’idée de payer pour enrayer la perte de forêts a donné lieu à l’initiative REDD, mécanisme proposé par la Conventioncadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) pour réduire les émissions liées à la déforestation et à la dégradation des forêts, qui pourrait générer des milliards de dollars pour les nations pauvres propriétaires de forêts. La lenteur des négociations au sein de l’ONU a certes engendré un certain cynisme sur les marchés du carbone, mais la Norvège a offert 2,5 milliards de dollars pour fixer le calendrier de la mise en œuvre de ce qui promet d’être le moyen le plus important, le moins cher et le plus rapide de cette décennie pour lutter contre les changements climatiques. Les forêts fournissent également un autre service écosystémique qui pourrait s’avérer encore plus profitable. Selon le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, les couronnes des arbres d’Amazonie libèrent 8 000 milliards de tonnes de vapeur d’eau par an. Elles sont recyclées à plusieurs reprises par le couvert forestier, qui agit comme une pompe à eau, avant d’atteindre la Cordillère des Andes. Une partie tombe sous forme de neige, alimentant l’eau provenant de la fonte des neiges dans les vastes bassins fluviaux de l’Amazonie occidentale. Les scientifiques conjecturent qu’un courant d’air de basse altitude transporte l’humidité qui se transforme en pluie s’abattant sur les élevages de bovins et les exploitations de soja dans le Sud du Brésil, et éventuellement sur le grenier économique que constitue le bassin de La Plata. et 4 500 milliards de dollars par an. Les investisseurs prennent conscience du fait que certaines entreprises accroissent les risques par leurs activités, parce qu’elles ne prennent pas en considération, dans leurs modèles d’entreprises, l’utilisation qu’elles font du capital naturel et des services écosystémiques qu’il rend. Le Projet sur la divulgation de l’empreinte forestière invite les entreprises à signaler leur utilisation de produits de base responsables de la déforestation tels que le bœuf et le cuir, le soja, l’huile de palme et le papier ou la pâte à papier. En deux ans seulement, 57 grosses sociétés d’investissements gérant 5 700 milliards de dollars d’actifs aux États-Unis, ont approuvé ce projet. D’ailleurs, un rapport du PNUD intitulé L’Amérique latine et les Caraïbes – une superpuissance de la biodiversité – montre que la région a une grande opportunité économique dans le commerce des services écosystémiques. Qu’arriverait-il si cette pompe devait perdre à jamais de son efficacité? Est-ce que les lumières s’éteindraient à São Paulo parce que les barrages géants cesseraient de fonctionner L’investissement proactif dans le capital faute d’eau, est-ce que les prix des naturel (PINC), expliqué dans le Petit denrées alimentaires s’envoleraient livre des finances de la biodiversité en Europe du fait qu’elle n’aurait du Programme mondial pour la plus le soja d’Amazonie pour nourrir canopée, offre une nouvelle vision ses poulets, ses porcs et ses vaches? économique pour la nature. Si la REDD Les grandes sécheresses sont en est inexorablement liée aux marchés augmentation émergents du carbone, et ont été sans le cadre PINC dispose, « Valoriser le capital précédent en lui, de 17 mécanismes Amazonie, naturel et payer pour son qui pourraient procurer notamment celles à des investissements de 2005 et 2010 entretien, sa disparition annuels pouvant atteindre nous donnant jusqu’à 140 milliards ou sa restauration, devrait de dollars en 2020 la un avant-goût de ce qui pourrait biodiversité et aux services devenir aussi banal arriver. Des écosystémiques. Beaucoup rivières s’étaient de ces mécanismes sont que d’utiliser le capital maintenant disponibles. alors asséchées : les barges utilisées Valoriser le capital financier ou social » pour le transport du naturel et payer pour son soja, immobilisées entretien, sa disparition au sol, avaient dû faire un détour de ou sa restauration, devrait devenir aussi 2 000 kilomètres pour atteindre les banal que d’utiliser le capital financier marchés; les poissons suffoquaient ou social. Les garanties et le partage sur les rives alors que des villages équitable des bénéfices de ce processus reculés souffraient de la faim; les sont source de difficultés, mais le risque admissions à l’hôpital augmentaient de statu quo l’est encore davantage. Les et les aéroports fermaient à cause de nations possédant des forêts tropicales la fumée due aux incendies de forêt. et leurs peuples disposent de richesses en capital naturel, et ils doivent être Selon le rapport du PNUE intitulé dûment récompensés pour l’entretien des L’économie des écosystèmes et de services écosystémiques. Si un moyen la biodiversité, le coût de la perte peut être trouvé pour faire cela, un des services écosystémiques due à la jour leurs forêts auront plus de valeur, déforestation s’établirait entre 1 400 économiquement, sur pied, que mortes. PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service 29 Nettoyons la Terre événements Prix Sasakawa du PNUE prix et Prix du jeune journaliste de l’environnement Le Prix prestigieux du jeune journaliste de l’environnement a été décerné par le PNUE à la journaliste de la radio ougandaise, Patricia Okoed-Bukumunhe, pour son rapport sur les changements climatiques et l’Ouganda diffusé sur Radio France International. Les membres du jury ont qualifié cet article de « reportage original à la pointe des questions environnementales ». Le Prix du jeune journaliste de l’environnement a été lancé en novembre 2010 par le PNUE pour servir de vitrine d’excellence dans le domaine du reportage sur les questions environnementales et favoriser le développement de nouveaux talents qui aideront à former l’opinion publique, en Afrique et ailleurs, au sujet de l’environnement, pendant les années à venir. www.unep.org/yeja/ Journée mondiale de l’environnement www.unep.org/sasakawa/ La Journée mondiale de l’environnement est célébrée le 5 juin. C’est une journée mondiale destinée à prendre des mesures positives en faveur de l’environnement et l’une des principales initiatives de l’Organisation des Nations Unies ayant pour but de mieux sensibiliser l’opinion mondiale aux problèmes environnementaux et d’inciter les hommes politiques à agir. La Journée mondiale de l’environnement 2011 devrait être la plus importante de tous les temps et les communautés du monde entier sont encouragées à prendre des mesures pour prendre soin de leur environnement local. Cette année, l’Inde est l’hôte de la Journée mondiale dont le thème, dans l’esprit de l’Année internationale des forêts 2011, est « Les forêts : la Nature à votre service ». Prix SEED 2010 www.unep.org/wed Des projets environnementaux conçus par de simples citoyens au Burkina Faso, en Chine, en Colombie, au Ghana, au Kenya, au Rwanda, au Sénégal, en Afrique du Sud et au Sri Lanka ont reçu le Prix SEED 2010. Cette année, ces prix ont été décernés en février par l’Initiative SEED qui a pour mission de soutenir des entreprises de développement durable. Ce Prix récompense des start up locales prometteuses de pays en développement qui s’efforcent d’améliorer les moyens de subsistance, de lutter contre la pauvreté et de gérer durablement les ressources naturelles. Chacun des lauréats bénéficiera de services de soutien adaptés à ses besoins et de l’appui de partenariats, d’une valeur de 35 000 dollars pour lui permettre de s’implanter et d’étendre son influence. www.seedinit.org Green Awards pour la créativité et la viabilité Nettoyons la Terre est une campagne écologique communautaire, organisée en partenariat avec le PNUE. Cette campagne a pour but d’inspirer les particuliers et les communautés de tous les coins du globe et de leur donner les moyens de nettoyer, remettre en état et conserver leur environnement. Le slogan de la campagne 2011, conforme au thème de la Journée mondiale de l’environnement, est le suivant « Notre pays… Notre planète. Notre responsabilité ». Pour découvrir comment participer au week-end Nettoyons la Terre, du 16 au 18 septembre, et en savoir davantage, consultez le site www.cleanuptheworld. org et trouvez-nous sur : Deux projets très prometteurs se sont partagé les honneurs du Prix Sasakawa 2011 pour des initiatives de développement durable prises par de simples citoyens. Les deux projets ont été récompensés pour leurs travaux de conservation des forêts et de promotion du développement durable dans des communautés rurales éloignées d’Amérique latine et d’Asie. La Asociación Forestal Integral San Andrés, Petén (AFISAP) au Guatémala et le Manahari Development Institute au Népal (MDINepal) sont les deux lauréats du prix de cette année dont le thème « Des forêts pour les peuples, des forêts pour une croissance verte » correspond à celui de l’Année internationale des forêts 2011. Les noms des lauréats ont été annoncés en février et ils ont reçu chacun un prix en espèces de 100 000 dollars pour poursuivre le développement de leurs projets innovants. Les Green Awards mettent en lumière les meilleurs exemples de communication en matière de commercialisation et de viabilité dans le domaine de l’environnement qui ont réellement contribué à la lutte contre le réchauffement de la planète. Les Green Awards récompensent l’excellence dans 16 catégories, depuis la Campagne internationale Best Green, pour les candidats au niveau mondial, jusqu’au Best Green Campaigner, pour des particuliers et de petits groupes défenseurs de la viabilité. La Fondation chinoise pour la protection de l’environnement a été le lauréat 2010, en raison d’une campagne novatrice et de plein air efficace lancée par DDB Chine qui exhortait les gens à se déplacer à pied plutôt qu’en voiture. www.greenawards.co.uk/home 30 PNUE NOTRE PLANÈTE la lanature natureààvotre votreservice service © Pacuare lodge © Huaorani Ecolodge Tensie Whelan Président de Rainforest Alliance Pas moins de 1,6 milliard de personnes - soit près d’un quart de la population mondiale - dépendent des forêts pour assurer leurs moyens de subsistance. Les forêts ont également une importance critique pour maintenir la diversité biologique, atténuer les effets des changements climatiques et permettre aux principaux écosystèmes de fonctionner comme régulateurs de la biosphère. De plus, comme le reconnaît la résolution des Nations Unies déclarant 2011 Année internationale des forêts, la gestion durable des forêts peut contribuer de manière significative au développement durable, à l’élimination de la pauvreté et à la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement. Et pourtant, environ 45 % des forêts de la planète ont déjà disparu. PNUE NOTRE PLANÈTE PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service 31 © Paul Souders/Getty Images Visiter les forêts, c’est aussi les conserver Le tourisme durable fondé sur la visite des forêts est un excellent moyen de constater leurs contributions et d’exercer une influence. Si ceci peut sembler quelque peu futile comparé aux enjeux planétaires de la conservation des forêts qui restent encore, il suffit de considérer les éléments économiques suivants. Le commerce mondial du bois d’œuvre représente plus de 150 milliards de dollars par an. Ce montant a souvent des effets pervers à court terme - en particulier dans les pays en développement - en les incitant à abattre les forêts même si, à long terme, leur gestion durable renforce les économies nationales. La valeur des forêts dépasse de loin celle du commerce du bois. La valeur totale des services écosystémiques qu’elles fournissent – capture du carbone, filtration de l’eau, fertilité des sols et gestion des parasites par exemple – est estimée à 4,7 trillions de dollars par an. Plus de la moitié de la biodiversité de la planète se trouve dans les forêts, et environ 40 % de l’économie mondiale – en particulier l’agriculture, la foresterie et l’industrie pharmaceutique – en dépendent directement. La valeur des forêts, tout comme celle de la survie, ne peut se calculer monétairement; mais si nous les comparons à l’activité économique de l’homme, elles ne pourraient pas « valoir » moins de 20 % du produit mondial brut, ou au moins 15 trillions de dollars – deux ordres de grandeur supérieurs à la valeur du bois qu’elles produisent. Voyons maintenant quelle est la valeur du secteur voyage et tourisme : c’est l’un des plus importants du monde et son développement est extrêmement rapide. Il génère environ 6 trillions de dollars au niveau mondial – soit plus de 9 % du produit mondial brut – et emploie 235 millions de personnes. Il est particulièrement important pour les économies des pays en développement qui abritent la plus grande partie de la diversité biologique forestière du monde. De 1990 à 2006, les recettes du tourisme international des pays en développement ont quintuplé, passant de 43 milliards à 222 milliards de dollars. Globalement, le secteur voyage et tourisme a continué de se développer avec vigueur pendant la récession économique : selon les prévisions, il devrait d’ici à 2021 générer 32 PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service plus de 13 % du produit mondial brut ou 9,2 trillions de dollars et employer un travailleur sur dix dans le monde. possibilités génératrices de revenus ». Bien entendu, le tourisme des forêts, de masse peut aussi décimer les écosystèmes, tout comme celle de depuis les récifs coralliens On estime que jusqu’aux forêts tropicales la survie, l’écotourisme augmente humides; il est donc de trois fois plus vite la plus haute importance ne peut se calculer parmi ceux qui que, comme la foresterie, voyagent pour leur il soit géré de manière monétairement; plaisir que le secteur durable. La certification dans son ensemble : il du Forest Stewardship englobe naturellement Council (FSC) a un impact mais le tourisme axé sur la considérable et positif sur forêt – notamment l’hébergement la gestion des forêts. Jusqu’à présent, 334 dans des lodges appartenant à millions d’acres de terres boisées – soit des zones protégées ou à des environ 1 % de la superficie terrestre de communautés forestières ayant la planète, en gros deux fois la superficie des activités du Texas - relèvent touristiques, situées de l’administration si à proximité ou responsable du FSC à l’intérieur de la moitié nous les comparons (àdepeine parcs nationaux cette étendue est et de réserves de par Rainforest à l’activité économique certifiée biosphère. Bien que Alliance). Le FSC se ceci ne représente développe rapidement de l’ homme, qu’une fraction du et ses méthodes marché total, la influencent elles ne pourraient durables valeur économique profondément et potentielle des forêts les pratiques pas ‹ valoir › moins rapidement comme destinations du secteur – notamment touristiques abattage sélectif de de 20 % du produit moins grandes quantités pourrait nettement dépasser leur valeur de bois, replantation, mondial brut, marchande comme établissement de grandes stocks de bois, zones de conservation, ou au moins 15 trillions préservation des et elles seraient exploitées de manière écosystèmes sensibles, de dollars – deux ordres protection de l’habitat beaucoup moins destructrice et plus des espèces menacées de grandeur supérieurs d’extinction et maintien rentable. Au niveau de la conservation, le du piégeage du carbone à la valeur du bois pour réduire les émissions. tourisme peut générer des investissements Aider les communautés qu’elles produisent » à gagner leur vie tout en massifs ayant une forte rentabilité. maintenant des forêts productives et saines : c’est l’étalonLes valeurs du marché du tourisme or de la foresterie écologiquement et sont beaucoup plus en rapport avec socialement responsable. une vue plus large de ce que « valent » les forêts (beaucoup de trillions de Étant donné la valeur du secteur du dollars). L’exploitation de ces valeurs tourisme et la croissance rapide de peut préserver la biodiversité des l’écotourisme, un système analogue forêts, les services écosystémiques pour le tourisme durable pourrait et d’autres actifs précieux. Selon constituer un outil puissant en offrant l’équipe de l’USAID pour les aux communautés un moyen additionnel forêts, le tourisme axé sur la nature de bien gagner leur vie en conservant contribue à la protection des forêts leurs forêts sur pied. Le tourisme fait « en faisant mieux prendre appel à une main-d’œuvre relativement conscience des ressources abondante et peut donc aider à réduire biologiques et de l’existence d’autres la pauvreté et à assurer une plus grande « La valeur © Explorer’s Inn © El Sombrero Au Guatemala, l’écolodge El Sombrero dans la région du Petén aide les communautés locales et des projets de conservation du parc national de Yaxha-Nakum-Naranjo, tandis que la Tak’alik Maya Lodge protège la forêt subtropicale humide qui l’entoure et qui est l’habitat de 29 espèces connues d’amphibiens et de reptiles, de neuf sources de montagne, de rongeurs, chauvesouris, carnivores et ongulés, de la loutre, du paca, du coati et de l’ocelot. La Pacuare Lodge sur le Pacuare, est située au cœur d’une forêt primaire de 25 000 km2 qui héberge des jaguars, des ocelots, des singes, des paresseux et beaucoup d’autres espèces de mammifères et d’oiseaux. © Pacuare lodge © Huaorani Ecolodge © Huaorani Ecolodge La certification du tourisme durable en est encore à ses premiers balbutiements mais elle a déjà donné la preuve de son potentiel pour exploiter les forces du marché et de la nécessité d’un développement durable pour inciter à conserver les forêts. L’Auberge de l’explorateur a conservé une forêt qui abrite une biodiversité record d’oiseaux et de papillons le long de la rivière Tambopata au Pérou. © Kapawi Ecolodge Pour toutes ces raisons, Rainforest Alliance encourage le tourisme durable parallèlement à la foresterie et à l’agriculture durables. Elle aide les entreprises touristiques à se développer en leur fournissant formation et assistance technique et s’assure qu’elles respectent les prescriptions en matière de viabilité, de façon à ce qu’elles puissent obtenir leurs certificats d’accréditation. Nous avons soutenu le lancement du Conseil mondial pour le tourisme durable qui défend des principes et critères universels, en connectant entre eux diverses entreprises, des gouvernements, des institutions des Nations Unies, des instituts scientifiques et universitaires, des organisations non gouvernementales dans les domaines social et environnemental et des programmes de certification du monde entier. Nous avons aussi lancé le site Internet SustainableTrip.org, qui rassemble des entreprises vérifiées par des programmes de certification de tourisme durable indépendants sur une base de données accessible où les voyageurs peuvent trouver des destinations de forêt durables. © Explorer’s Inn égalité économique des femmes qui représentent 46 % des employés de ce secteur, soit plus que la moyenne mondiale. Les emplois dans le secteur du tourisme sont relativement bien rémunérés et ont un effet multiplicateur. Ainsi, une étude récente du Center for Responsible Travel a relevé que les salariés des écolodges de la péninsule d’Osa au Costa Rica – dont le National Geographic dit que c’est l’endroit de la terre « biologiquement le plus riche » mais aussi l’une des régions les plus pauvres du pays – gagnent le double (710 dollars par mois) des travailleurs dans bien d’autres domaines. Au Nicaragua, où le tourisme est axé essentiellement sur l’environnement naturel, Rainforest Alliance estime que chaque emploi dans le secteur du tourisme crée un emploi local supplémentaire dans un autre secteur, avec un salaire supérieur à la moyenne nationale. En Équateur, les écolodges Kapawi et Huaorani sont situées dans des régions éloignées et bien protégées de l’Amazonie, au cœur des grands territoires de la première nation des Achuar et des Huaorani, respectivement. Ces deux peuples ont choisi le tourisme comme un autre moyen efficace de protéger leur terre et leur patrimoine, et – dans le cas des Huaorani – de la sauver de l’exploitation pétrolière. PNUE 33 NOTRE PLANÈTE la la nature nature àà votre votre service service 33 « Il nous faut commencer même avec de petits changements dans notre façon de vivre » 34 PNUE NOTRE PLANÈTE la lanature natureààvotre votreservice service LI BING « Si vous détruisez les forêts aujourd’hui, les déserts vous engloutiront demain ». L’actrice chinoise bien connue, Li Bingbing, rappelle cette phrase lorsqu’on l’interroge sur l’importance des forêts. « C’est très simple mais tellement vrai », dit-elle. Et ses actes sous-tendent ses déclarations. L’année dernière, désignée Ambassadrice itinérante de bonne volonté du PNUE, elle a créé sa propre association philanthropique, Love Green, « pour promouvoir des écosystèmes verts, une économie verte et un mode de vie écologique ». Son premier projet - lancé avec l’ancien Premier Ministre britannique, Tony Blair, et réalisé en collaboration avec le Groupe sur le climat – consistait à planter des arbres pour lutter contre la désertification dans le nord-ouest de la Chine. Ce projet dépasse ses espérances. « Il n’a fallu que neuf mois, au lieu des deux années prévues, pour planter le premier million d’arbres » dit-elle à Notre Planète. Depuis son plus jeune âge, elle est écolo. « Lorsque j’étais jeune, je veillais à éteindre le climatiseur lorsque nous quittions la maison. Adolescente, j’ai choisi de marcher ou d’utiliser les transports publics dans toute la mesure du possible et, depuis, je trie mes déchets pour les recycler. Je crois que si nous assumons tous sérieusement nos responsabilités à l’égard de la Terre et si nous prenons soin de notre planète dans notre vie quotidienne, nous pourrions faire de grands progrès pour la préserver pour les générations futures. Il nous faut commencer même avec de petits changements dans notre façon de vivre ». Née en février 1973 dans la province de Heilongjiang, dans le nord-ouest de la Chine, Li Bingbing n’avait à l’origine aucune intention de devenir actrice; elle s’était inscrite dans une école de formation de futurs enseignants. Mais après avoir obtenu son diplôme, elle n’était pas satisfaite de cette carrière et, en 1993, une amie a fini par la persuader de s’inscrire à l’Institut dramatique de Shanghai. En 1999, elle a gagné le premier des nombreux prix de la « meilleure actrice » au Festival du film de Singapour pour son premier film et, par la suite, elle en a reçu bien d’autres : le Golden Rooster Awards en 2005, le Huabiao Awards en 2007, GBING le Hundred Flowers Awards en 2008 et le Golden Horse Film Awards en 2009. Mais les forêts restent sa véritable passion. « Chaque fois que je voyage le long du Yangtze » dit-elle, « je me souviens de l’été 1998. Pendant trois mois, la région a été ravagée par de terribles inondations qui ont balayé treize millions d’habitations et causé 26 milliards de dollars de dommages. Ces inondations ont montré combien la nature peut être destructrice lorsqu’il n’y a pas de forêts. Et pourtant, pendant des décennies nous avons essayé de récolter des avantages économiques au prix de l’exploitation non viable des forêts, l’atout le plus précieux de notre environnement ». Le Gouvernement chinois a pris bonne note des inondations de 1998, dit-elle, et un peu plus tard dans l’année il a diligenté une campagne nationale pour mettre fin au déboisement; le résultat c’est que plus de la moitié des forêts naturelles du pays sont maintenant protégées. « Nous avons appris à nos dépens que nos forêts soutiennent notre style de vie moderne. Sans elles, la nature peut causer des ravages. Avec elles, la nature peut nous protéger et enrichir nos écosystèmes. « Les forêts nous rendent tant de services. J’ai vu de mes propres yeux la beauté et la force d’une forêt saine qui fournit l’eau que nous buvons et nous protège pendant les saisons des pluies contre les glissements de terrain et les inondations. Et une forêt saine ramène la faune et la flore sauvages ». Elle aime citer la déclaration restée célèbre du Mahatma Gandhi : « vos croyances deviennent vos pensées, vos pensées deviennent vos paroles, vos paroles deviennent vos actions, vos actions deviennent vos habitudes, vos habitudes deviennent vos valeurs, vos valeurs deviennent votre destinée ». « Nous pouvons changer le destin de notre planète, un pays à la fois, une communauté à la fois, une personne à la fois, une action à la fois. Chacun peut avoir une influence sur ceux qui l’entourent. Ceci aura un effet positif et exponentiel et pourra attirer de plus en plus de gens qui viendront se joindre à nous ». PNUE NOTRE PLANÈTE la nature à votre service 35 Le PNUE encourage les pratiques respectueuses de l’environnement au niveau mondial et dans ses propres activités. Cette revue est imprimée sur du papier 100 % recyclé, en utilisant des encres d’origine végétale et d’autres pratiques respectueuses de l’environnement. Notre politique de distribution a pour objectif de réduire l’empreinte carbone du PNUE. www.unep.org/ourplanet Notre Planète, la revue du Programme des Nations Unies pour l‘environnement (PNUE) P.O. Box 30552 Nairobi (Kenya) Tél. : (254 20) 762 1234 Fax : (254 20) 762 3927 Mél : [email protected] Les numéros de Notre Planète peuvent être consultés sur le site du PNUE www.unep.org/ourplanet ISSN 1013 - 7394 Directeur de publication : Satinder Bindra Rédacteur : Geoffrey Lean Coordonnatrice : Mia Turner Collaborateur spécial : Nick Nuttall Responsable marketing : Manyahleshal Kebede Graphisme : Amina Darani Éditeur : Division de la communication et de l‘information du PNUE Impression : Progress Press Distribution : SMI Books Les articles figurant dans cette revue ne reflètent pas nécessairement les opinions ou les politiques du PNUE ou des rédacteurs; ils ne constituent pas non plus un compte rendu officiel. Les appellations employées dans la présente publication et la présentation des données qui y figurent n‘impliquent de la part du PNUE aucune prise de position quant au statut juridique des pays, territoires, ou zones ou de leurs autorités, ni quant au tracé de leurs frontières ou limites. * Dollars ($) s‘entend des dollars des États-Unis. Photo de couverture : © Corbis