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NUMÉRO 26 • JUILLET-AOÛT 2004 ICW Actualité L A C O M M U N A U T É I N T E R N AT I O N A L E D E S F E M M E S V I VA N T AV E C L E V I H - s i d a VISIBILITÉ,VOIX ET VISIONS Un Appel pour une Action À BANGKOK Les associations ‘The Thai Women and HIV/AIDS Task Force’,‘la Communauté Internationale des Femmes vivant avec le VIHsida (The International Community of Women Living with HIV/AIDS : ICW)’,‘the Women’s Caucus of the International AIDS Society (WCIAS)’ et ‘the United Nations Development Fund for Women (UNIFEM)’ vous invitent à participer activement à la 15ème conférence internationale sur le sida (Bangkok) pour une égalité hommes-femmes. N ous vous demandons de vous engager clairement sur les actions suivantes à la fois lors de votre préparation pour la conférence et durant votre participation aux réunions et séances. En particulier, nous vous pressons de nous rejoindre en vous engageant sur les actions suivantes : ■ faire pression tout au long de la conférence pour que la question de la parité hommes-femmes soit abordée au cours de toutes les réunions, séances et activités, et particulièrement en référence aux points suivants : inégal accès aux soins • traitements et Planifier l’action future d’ICW: une réunion des Administratrices, du staff et des bénévoles d’ICW en avril dernier à Londres (voir en page 6) soutien • participation aux essais thérapeutiques et autres dans un cadre éthique • droits à une sexualité et une procréation sans risque • financements pour les microbicides • accès aux préservatifs féminins. ■ rappeler avec insistance le lien de cause à effet entre la progression rapide de l’épidémie et des réalités spécifiques (économiques, politiques, sociales). Pauvreté, violences contre les femmes, inégal accès à la propriété et à l’héritage, tout cela est exacerbé par les inégalités de pouvoir entre les hommes et les femmes, le niveau élevé d’illettrisme, le manque d’accès au marché du travail pour les femmes, les discriminations et les stigmates subis, ■ identifier les initiatives déjà mises en place par les femmes et les jeunes filles, identifier des façons de les soutenir. Faire preuve de solidarité envers les femmes vivant avec le VIH-sida, que ce soit à un niveau individuel ou par le biais de réseaux locaux, régionaux ou internationaux, ■ promouvoir avec les médias une égalité hommes-femmes et rappeler toutes les inégalités subies. Bien que cette déclaration soit publiée pour la conférence de Bangkok, cet Appel pour une Action constituera une plate-forme conceptuelle pour les militantes d’ICW dans le cadre de nombreuses autres situations, bien après la clôture de la conférence. DANS LE MONDE ENTIER, les femmes et les jeunes filles sont plus à risque d’être infectées et affectées par la pandémie du sida. Cette situation a pour principale raison les inégalités hommes-femmes, inégalités qui ne cessent de nourrir la rapide progression de l’épidémie : 50 % des personnes infectées dans le monde sont des femmes, 58 % vivent en Afrique, et dans certains des pays les plus touchés, les jeunes filles ont six fois plus de risque d’être contaminées que les garçons de leur âge. Un large éventail d’inégalités (inégalités devant la loi, inégalités économiques, culturelles, sexuelles, religieuses, politiques) font le lit de cette épidémie. Trop souvent, les femmes sont invisibles, réduites au silence, ignorées. Les stigmates et les discriminations ne cessent de favoriser les nouvelles contaminations jour après jour. Cela a pour conséquence directe une impossibilité des femmes et des jeunes filles à accéder aux soins, aux traitements, aux soutiens, ou bien encore à être incluses dans les essais thérapeutiques. Aussi le besoin de mettre au point des microbicides et d’autres méthodes de protection économiquement viables pour les femmes est des plus urgent. dans ce numéro: femmes thaïs, dialogue de jeunes femmes, transsexualité, microbicides, rôle des hommes, et plus encore NOUVELLES D’ICW Une nouvelle Administratrice internationale originaire du continent indien Présentation Kousalya a rejoint le Conseil d’Administration DE KOUSALYA ET GCEBILE Des nouvelles encourageantes pour l’Afrique australe Fiona Hale présente Gcebile Ndlovu ICW souhaite une chaleureuse bienvenue à Gcebile Ndlovu, Coordinatrice régionale d’ICW pour l’Afrique australe depuis avril dernier. Gcebile vit au Swaziland et devra au cours des six prochains mois établir une antenne régionale d’ICW pour l’Afrique australe. Sa tâche consistera à nouer des contacts avec les membres africains d’ICW et avec des associations nationales de femmes séropositives d’Afrique australe, afin de mettre en lumière les voix, les visions et la visibilité des femmes vivant avec le VIHsida dans cette partie du continent africain. Gcedbile, une nouvelle Administratrice internationale d’ICW Gcebile J’attends beaucoup de cette position de Coordinatrice régionale car c’est une opportunité unique pour établir des contacts avec les milliers de femmes vivant avec le VIH-sida en Afrique australe. J’espère que nous pourrons partager nos joies et nos tristesses à mesure que nous continuons avec dignité à défier les challenges posés par cette épidémie. Bien qu’il soit impossible d’éradiquer le virus, nos vies, nous devons continuer à tirer les leçons de cette situation et nous devons continuer à prendre la vie à bras le corps. Cela n’est pas toujours facile car nous savons par expérience que trop souvent, nous ne sommes que statistiques et exclues des décisions nous concernant. Comme si le virus avait fait de nous des êtres sans cerveau! Merci à ICW pour avoir sélectionné l’Afrique australe en tant que région pilote pour le renforcement des antennes régionales d’ICW. Rappelons que cette région connaît l’un des taux les plus élevés d’infections. En privilégiant les questions concernant les femmes, des conséquences positives s’ensuivront : l’impact du sida et le nombre des nouvelles infections diminuera. Mon rêve pour les six prochains mois est de doubler le nombre des adhérentes d’ICW mais cela demandera un investissement important de la part de celles en place. Nous créerons un forum de rencontre pour réfléchir aux meilleures façons de nous investir sur les questions nous concernant. J’espère également que nous apprendrons les unes des autres. Aucune opportunité pour répercuter la vision et les valeurs d’ICW dans cette région du monde ne sera ignorée. ■ Un entretien entre Fiona Hale (Chargée de projet internationale pour ICW) et Kousalya sur la situation des femmes séropositives indiennes et leur bataille contre les discriminations. Q: Tu es une des nouvelles Administratrices internationales d’ICW. Peux-tu te présenter? Je suis Indienne, de Chennai (Madras), la capitale de l’Etat du Tamil Nadu. Je suis une des membres fondatrices de l’association ‘Positive Women’s Network’ et j’en suis aujourd’hui Présidente. Cette association au début implantée dans le sud de l’Inde a aujourd’hui une résonance nationale. Q: Quels sont les problèmes rencontrés par les femmes séropositives de ton pays? Dans mon pays, les femmes subissent de nombreuses discriminations dans le secteur de la santé, au sein de leur famille (droits à la propriété) et avec leurs enfants. Ces derniers sont discriminés à l’école – un problème majeur! – et c’est pourquoi mon action est une meilleure implication des personnes dans le système éducatif. Q: Quels sont tes objectifs à long terme, tes rêves? Je suis séropositive et c’est pourquoi je milite activement, c’est un engagement personnel. Je peux agir dans mon pays, agir pour la cause des femmes. Après, j’espère pouvoir partager mon expérience dans d’autres pays. C’est mon ambition. Q: Comment ICW peux t’aider à transformer ce rêve une réalité? Par le biais de formations. Je ne connaissais pas un mot d’anglais mais après avoir été infectée, j’ai appris à le parler. J’apprends à présent à l’écrire. ICW doit agir pour que la langue ne soit pas une barrière. Avec le soutien de UNIFEM, nous organisons en ce moment une formation en alphabétisation dans quatre Etats. Nous prévoyons différentes formations et nous avons produit un document intitulé CEDAW : Convention on the Elimination of All Forms of Discrimination Against Women (Convention pour une élimination de toutes les formes de discriminations contre les femmes). Ce rapport sera en circulation dans le pays cette année. Nous avons également publié des recommandations sur la question de la parité hommes-femmes pour les professionnels des médias. Je serais ravie de partager cela avec des personnes d’autres pays. Q. Quel message voudrais-tu lancer au sujet de la situation des femmes séropositives? Nous devons nous regrouper: ainsi nous pourrons changer la situation dans le monde. Cette interview est incluse dans une vidéo enregistrée à Londres en novembre 2003. ICW Actualité • 2 • Juillet/Août 2004 • Numéro 26 FEMMES THAIS SEROPOSITIVES L’HISTOIRE DE Rung Rung est une femme thaï vivant avec le VIH depuis 1995. Agée de 37 ans, elle est mère d’une jeune fille âgée de 7 ans. Jiranuch Premchaiporn (Jiew) l’a interviewée pour ICW Actualité. Rung S i comme on le dit et nous catégorise, il y a réellement des ‘femmes bonnes’ et des ‘femmes mauvaises’, je proclame faire partie de la première catégorie, m’étant toujours conduite de la façon dont les ‘femmes bonnes’ sont supposées le faire. J’ai grandi au sein d’une famille où le père avait un pouvoir absolu. Comme souvent au sein de la culture chinoise (j’étais la fille), je n’ai pas eu accès à une éducation supérieure. Néanmoins, j’ai été élevée dans des principes très stricts car mes parents craignaient que leur fille ne salisse l’honneur de la famille. Comme une ancienne devise le dit, ‘avoir une fille est comme avoir des toilettes devant chez soi’. J’ai agi afin d’être comme des toilettes de haute qualité, propres et sans odeur. J’ai adhéré à la règle thaï et conservé ma virginité jusqu’au mariage. J’ai eu mon premier rapport quand je me suis mariée à l’âge de 28 ans avec un homme que je considérais responsable et attentionné. Nous pensions être protégés Avant le mariage, j’ai demandé à mon ami de faire un test sanguin et de me montrer le résultat. A cette époque, le gouvernement avait lancé une campagne percutante. Je me rappelle clairement un spot télé martelant ‘L’important n’est pas le volume de la dot, l’important est le résultat du test VIH’. Cependant, ce que nous ignorions, c’est qu’un test sanguin n’inclut pas nécessairement un test du VIH, sauf si vous le demandez. Mon ami a fait le test. Le résultat n’indiquait aucun problème. Nous nous sommes donc mariés en 1995. Il a dû emprunter de l’argent pour la dot et les frais de cérémonie. Puis, début 1996, enceinte de quatre mois, je suis allée à l’hôpital pour un examen prénatal. C’est là qu’une infirmière m’a appris ma séropositivité. Ma vie s’écroulait. L’avortement était la seule solution. Je pensais que le bébé serait infecté. Et dans ❛J’ai été élevée principes très stricts par mes parents.❜ dans des un cas contraire, combien de temps me restait-il à vivre? Un avortement à quatre mois coûte 3,000 Baht (US$75). Cela peut sembler une somme ridicule, mais c’était encore trop, j’avais toujours des dettes de mon mariage. J’ai décidé de m’auto avorter en prenant des médicaments mais ça a raté. J’ai dû garder le bébé. J’ai tenté de me suicider Puis, mon mari est tombé malade. Assumer sa séropositivité et savoir qu’il m’avait transmis le virus a aggravé sa situation. J’étais furieuse. Pour autant, je n’avais pas d’autre choix que de rester à ses côtés et l’encourager à faire front ensemble. Je vivais dans un stress énorme : prendre soin de lui, le remplacer à l’école en tant que concierge. J’ai fait trois tentatives de suicide avec des médicaments mais à chaque fois sans succès. Mon mari est décédé quand ma fille avait 15 mois. Après son décès, les bénéfices de notre police d’assurance m’ont permis d’éponger nos dettes. J’avais également mis de côté de l’argent pour le future de ma fille, cette fille envers laquelle je ne ressentais aucun ‘amour’. Après sa naissance, à chaque fois que je l’observais, je ne voyais que la tristesse et le désespoir de ma situation. J’aurais continué à être cette mère ‘étrange’ si un jour – à cette époque, ma fille parlait- elle ne m’avait dit ‘je t’aime et tu es importante pour moi, je veux avoir une mère.’ Je suis restée sans voix et j’ai compris ce qu’elle voulait. En la regardant, j’ai pensé : ‘est-ce là la petite fille que j’ai une fois désiré tuer?’ Dix années Je vis avec le VIH-sida depuis dix ans. Nombre de mauvais rêves sont derrière moi et je sais aujourd’hui que le sida n’est pas juste une chose effrayante ou une punition divine. J’ai énormément appris sur la vie en partageant mes peurs, mes chagrins et mes joies avec mes amies séropositives, la majorité veuves comme moi. Je suis une militante active du réseau national thaï des personnes vivant avec le VIH-sida (Thai National Network of People Living with HIV/AIDS). J’y travaille à plein temps sur un projet de mobilisation de groupes de personnes vivant avec le VIH-sida afin de leur faciliter l’accès aux traitements antirétroviraux et à des systèmes de soins et de santé complet. Je fais aussi partie de l’association ‘Thai Women and HIV/AIDS Task Force’ car je sais ce qu’il en est des inégalités hommesfemmes et de leur non-sens. Je me suis beaucoup informée sur le VIH-sida. Je sais à présent que quand mon mari a fait une prise de sang, cela était un simple check-up et non un test du VIH. Beaucoup de personnes ignorent toujours tout du VIH-sida. Comme moi auparavant! Je voudrais qu’ils soient informés, qu’ils sachent qu’il n’est jamais trop tard. ■ ICW Actualité • 3 • Juillet/Août 2004 • Numéro 26 Remerciements à Mme Waranuch Chinvorasopak, une responsable de l’association PATH pour avoir généreusement traduit ce témoignage. FEMMES THAIS ET SIDA Des femmes thaïs EN VUE Monruedee Laphimon (Pat) et Supecha Baothip (Chompoo) de l’association ‘the Thai Women & AIDS Task Force’, présentent ci-dessous le travail de cette association en rassemblant des femmes et en abordant les questions hommes-femmes et sexualité. L ’association ‘The Thai Women and AIDS Task Force (TWAT)’ est un réseau national informel de femmes vivant avec le VIH-sida composé de militantes d’ONGs et de militantes individuelles engagées dans la lutte contre le VIH-sida et ses conséquences en Thaïlande. Ce mouvement a débuté fin 2002, avec le support d’associations membres de la coalition thaï des organisations de lutte contre le sida (the Thai NGO Coalition on AIDS :TNCA). La méthodologie de TWAT comprend l’organisation de réunions dans le cadre d’un environnement amical et participatif. Cela aide grandement les participantes à comprendre en détail les complexités et spécificités de l’infection chez la femme. Cela nous permet ensuite d’inclure dans notre programme des activités sur la prévention du VIH-sida et l’accès aux services de santé pour les femmes et les jeunes filles. Nous pensons que les femmes et les jeunes filles ont des capacités qu’il faut renforcer, ainsi elles sont plus fortes pour prendre position face à leur famille et à la société. ❛Elle organisa dans un climat très amical une discussion animée sur les femmes et les plaisirs du sexe.❜ Apprendre plus de nos vies A TWAT, nous avons toujours un partenariat avec une des organisations locales de nos membres. Au cours du 9ème séminaire national (9th National Seminar) en juillet 2003, Jiranuch Premchaiporn de l’association ‘AIDS Access Foundation’ a lancé une séance de travail sur le thème ‘femmes vivant avec le VIH-sida et accès aux services’. Une étude informelle fut réalisée afin de mieux connaître l’impact du VIH-sida sur la vie des femmes vivant avec le VIH-sida. En août 2003, Supecha Baothip, membre de TWAT, organisa dans un climat très amical une discussion animée sur les femmes, les plaisirs du sexe et la masturbation. Bien que seul dix participantes étaient présentes, nous avons constaté l’importance de l’échange et du dialogue basé sur des expériences personnelles. Ces deux méthodes sont des outils très puissants pour aider les femmes à comprendre la vie qu’elles vivent et les réalités auxquelles elles doivent faire face. TWAT a continué à organiser des forums de discussion sur la base de recommandations issues de réunions précédentes. De plus en plus de femmes y prennent part. Les thèmes abordés incluent la position des femmes dans la société, les femmes et le VIH-sida, le droit à une sexualité sans risque. Le forum sur l’impact des pratiques religieuses et des croyances sur la vie des femmes a permis de mettre en lumière l’impact négatif de certaines pratiques religieuses et comment l’enseignement des principales religions (Bouddhisme, Islam et Christianisme) sont souvent interprétées avec un parti pris contre les femmes.Toutes nos discussions nous ont permis de mieux comprendre la complexité des relations hommes-femmes et des dynamiques de pouvoir. En tant que groupe, nous avons exploré comment les méthodes de socialisation et les stéréotypes contre les femmes influencent les valeurs et les rôles des femmes. La question des réalités sexuelles 62 membres du TWAT se sont réunis en mai dernier à Chiang Mai pour un forum bimensuel.Au cours de ce forum, nous avons abordé la question sexualité et santé chez la femme. Nous avons pu débattre de la diversité de nos vies et de nos pratiques sexuelles. Nous avons examiné en détail comment les femmes deviennent dépendantes spirituellement des hommes, comment nous dialoguons avec nos compagnons, comment les femmes sont divisées. Nos discussions ont révélé que ces aspects de nos vies (nos relations sexuelles avec nos compagnons, notre orientation ou identité sexuelle (hétérosexuelle, lesbienne, mariée, célibataire)) sont des critères fondamentaux pour comprendre pourquoi quelque fois les communautés des femmes se fragmentent. Les femmes ne réalisent pas toujours que nous rejetons la responsabilité ou nous attaquons d’autres femmes pour la seule satisfaction des besoins des hommes. ICW Actualité • 4 • Juillet/Août 2004 • Numéro 26 Nos discussions nous ont également permis de réaliser que les femmes célibataires ont plus de liberté de choix car elles peuvent ignorer les jugements de leur communauté et continuer à vivre leur vie. En ce qui concerne la question de la sexualité, elles sont plus à même d’explorer des méthodes de prévention et plus au fait des façons de se protéger des MST, du VIH-sida et d’autres complications quant à la procréation. ❛Toutes nos discussions ont débouché sur une meilleure compréhension des inégalités hommesfemmes et des dynamiques de pouvoir au sein des relations intimes.❜ Nous avons également réalisé que les femmes vivant avec le VIH-sida continuent de rencontrer des difficultés avec leurs compagnons jour après jour afin de se protéger. Une des membres nous a dit ‘il insistait pour faire l’amour sans mettre de préservatif. Et pourtant je lui ai dit plusieurs fois que j’étais infectée par le VIH.’ Quand un homme insiste pour une relation sexuelle non protégée, les femmes ont tendance à reporter la faute sur elles au lieu de voir que nous avons tous à prendre nos responsabilités dans ce domaine. Cette discussion illustre la façon dont TWAT essaie de renforcer les capacités des femmes et des jeunes filles et essaie de les amener à une meilleure compréhension de l’impact du VIH-sida sur les relations hommes-femmes et les dynamiques de pouvoir dans les relations intimes. Le fait que plus de 200 femmes originaires de toutes les régions du pays ont participé à ces réunions et ateliers, démontre que ces espaces de dialogue sont nécessaires. Un environnement qui permet un débat ouvert et participatif sur comment lutter contre certaines pratiques qui sont la base d’une société inégale est important pour les femmes et une opportunité unique pour apprendre dans le cadre d’un échange équitable. ■ DIALOGUE DE JEUNES FEMMES Du dialogue à l’action ❛J’ai une nouvelle identité : je ne suis pas une personne vivant avec le VIH, je suis une jeune femme vivant avec le VIH.❜ (Kanjoo Mbaindjikua, participante à la formation organisée en Namibie) Rappel Au cours des années passées, l’attention internationale s’est portée sur la vulnérabilité de la jeunesse face au sida. Par ailleurs, une attention plus soutenue s’est portée sur les stigmates et discriminations rencontrés par les personnes vivant avec le VIH-sida dans différentes communautés à travers le monde. Néanmoins, peu d’attention a été portée aux problèmes rencontrés par les personnes dont les identités sont à l’intersection de ces différentes catégories : les jeunes femmes vivant avec le VIH-sida. Bien que des efforts aient été entrepris pour la sur la prévention de la jeunesse, la réalité est des millions de jeunes femmes infectées par le VIH. Les jeunes femmes ne sont pas simplement des femmes mûres dans des corps plus petits. Elles sont une part vitale du mouvement de la jeunesse et elles jouent un rôle significatif dans les mouvements de femmes africaines. Pour autant, leur rôle est peu reconnu, que ce soit dans leur lutte et leur engagement contre le sida, l’éducation de leurs frères, sœurs et enfants, l’éducation de leurs communautés sur les stigmates et les discriminations, ou encore leur apport à la richesse de leurs pays. Pour adresser ce manque de visibilité et de reconnaissance, les associations ICW, the Youth Against AIDS Network (YAAN) et the Gender AIDS Forum organisèrent une rencontre de jeunes femmes vivant avec le VIH-sida (A Dialogue for Young Women living with HIV/AIDS). Cette rencontre organisée à Durban du 18 au 23 avril 2004 rassembla des jeunes femmes africaines vivant avec le VIH-sida et leur permit dans un espace amical et protégé de partager leurs expériences quant aux challenges posés par l’épidémie du VIH-sida et de développer des campagnes de lutte pour mettre l’accent sur les spécificités et le besoin de respect des droits de l’homme rencontrés par les différentes participantes dans leur pays respectif. soutien de leur association. Il était également important d’avoir une large représentation géographique du continent africain. Un comité de sélection établi par ICW étudia les candidatures : 18 jeunes femmes vivant avec le VIH-sida furent sélectionnées. A la dernière minute et des suites de raisons imprévues, quatre ne purent se déplacer. Les 14 jeunes femmes vivant avec le VIH-sida représentaient huit pays d’Afrique australe et orientale : Kenya, Lesotho, Malawi, Namibie, Afrique du sud, Swaziland, Ouganda et Zimbabwe. Les participantes représentaient un large éventail de jeunes femmes vivant avec le VIH-sida. Les identités déclarées comprenaient : soutien de famille, hétérosexuelle, mariée, célibataire, lesbienne, activiste, travailleuse communautaire, conseillère psychologique, modèle (à imiter), noire, blanche, fille, sœur. Les participantes avaient différentes attentes : être formée pour militer et agir au nom des femmes ; connaître les traitements appropriés à la situation des jeunes femmes ; les nouvelles avancées thérapeutiques, dont les microbicides et les vaccins. Le processus Au cours de la phase préparatoire de cette rencontre, les objectifs suivants furent identifiés : ■ renforcer les capacités de mobilisation (techniques d’advocacy) par le biais d’une mise en place de campagnes point par point, ■ incorporer les analyses sur les spécificités féminines de l’infection dans la préparation des campagnes de mobilisation, ■ écouter et documenter les expériences des jeunes femmes vivant avec le VIH et le sida, ■ construire les capacités d’actions dans le cadre d’une action en direction des médias en vue d’autres stratégies d’advocacy, ■ une meilleure compréhension des budgets et de l’action des gouvernements et parlements. Les séances pratiques conduites par des animatrices couvrirent : ■ féminiser nos réponses aux problèmes posés, ■ pourquoi les femmes sont à risque, ■ besoins pratiques et intérêts stratégiques, ■ Advocacy (mobilisation). Les résultats Sur la base de la liste des questions identifiées, des thèmes furent choisis. De ces thèmes, le groupe sélectionna trois aspects critiques des stratégies d’advocacy pour les jeunes femmes vivant avec le VIH-sida. Premier aspect: ■ les jeunes femmes vivant avec le VIH et le sida sont peu associées au développement, à l’implémentation et à l’évaluation des politiques et des programmes; que ce soit à un niveau local, national ou international. ➜ Les participantes Les participantes furent sélectionnées d’après des critères bien définis et des motivations personnelles.Toutes avaient le ICW Actualité • 5 • Juillet/Août 2004 • Numéro 26 DIALOGUE DE JEUNES FEMMES Second aspect: ■ les jeunes femmes vivant avec le VIH et le sida n’ont pas accès aux traitements appropriés (y compris pour les infections opportunistes), aux antirétroviraux ou aux traitements de prévention. Troisième aspect: ■ les jeunes femmes vivant avec le VIH et le sida n’ont pas la possibilité de jouir de leurs droits à une procréation et une sexualité sans risque, que ce soit à un niveau personnel, programmatique ou sociétal. Des stratégies d’action (Advocacy) furent développées pour chacun de ces aspects. Les groupes travaillèrent sur des buts précis, une analyse du problème, des objectifs et des messages. Ces stratégies d’action seront développées par ICW et formeront des plans d’actions pour les jeunes femmes d’Afrique australe et orientale vivant avec le VIH et le sida. En Afrique australe, des organisations comme l’UNIFEM se sont engagées à financer ces plans. Pour chaque pays et sur la base de ce dialogue, des réunions furent organisées pour réfléchir au développement d’actions futures et identifier les besoins inhérents à la réalisation des plans et formations. L’évaluation de la rencontre fut globalement positive. ■ RÉACTIONS À CE DIALOGUE En tant que jeune femme vivant avec le VIH et le sida, je dois connaître mes droits et m’en servir pour aider les autres. ‘Il y a un tel capital de pouvoir dans cette salle.’ Les gens agissent contre les personnes vivant avec le VIH et le sida car nous agissons contre d’autres groupes minoritaires. Les choses ne nous sont pas données sur un plat d’argent : nous devons parfois revendiquer ce que nous voulons. ‘J’ai une identité bien au-delà de tout ce qui peut être dit.’ Même si ma contribution est minime, je peux toujours être en désaccord et lutter pour les droits des jeunes filles vivant avec le VIH et le sida. ‘Militer est mon droit.’ Je ne crains plus de revendiquer mon identité, mon identité de jeune femme vivant avec le VIH et le sida. ‘Tout le monde était pris au sérieux.’ Cette rencontre m’a donné les moyens de surmonter mes peurs. Et je sais que si je n’y parviens pas, d’autres souffriront en silence. ‘Il était passionnant que cette rencontre soit organisée uniquement pour des jeunes femmes vivant avec le VIH et le sida.’ Remerciements à Vicci Tallis et Sisonke Msimang pour avoir facilité ce dialogue. Un rapport complet est disponible sur le site d’ICW : www.icw.org Pour des détails, contactez Promise Mthembu à : [email protected] ‘Nous avons une voix et nous devons nous en servir.’ Le travail d’ICW: réussites et nouvelles priorités Du 26 au 30 avril dernier, ICW organisa une réunionformation pour l’ensemble de son staff et de ses Administratrices : 25 personnes participèrent à cette rencontre, dont 13 des 15 membres du Conseil d’administration. Le but de cette réunion était de revoir la stratégie internationale d’ICW pour 2003-2007, une année exactement après son lancement en janvier 2003, mesurer ses progrès et identifier les secteurs nécessitant plus de travail. Ce fut aussi une occasion de considérer le contexte général dans lequel s’inscrit notre action et de répondre aux changements et événements dans le monde nécessitant une réponse urgente de notre part. Enfin, ce fut une opportunité de revoir d’anciennes connaissances (membres fondatrices d’ICW) et de nouer des contacts avec de nouvelles personnes (nouvelles administratrices). Cette semaine nous permit de tisser des liens par delà nos histoires individuelles et nos origines géographiques diverses. Cette formation déboucha sur la production d’un plan de travail pour l’année à venir. Beaucoup fut accompli en ce qui concerne l’autonomie des régions, question importante pour l’ensemble des participantes qui nécessitera plus d’efforts au cours des prochains mois. Des séances furent organisées afin de réfléchir à la structure de l’association et aux différentes possibilités de la développer plus avant. Le rôle et les responsabilités de toutes les personnes impliquées dans le réseau (adhérentes, bénévoles, administratrices) furent l’occasion de vifs débats. Luisa Orza, Responsable de projet ICW remercie le Departement for International Development pour son soutien, l’association WAGGGS pour l’utilisation de leurs locaux (World Center), et enfin Pax Lodge pour nous avoir accueilli. Faire lien ICW Actualité • 6 • Juillet/Août 2004 • Numéro 26 COMPRENDRE LA TRANSSEXUALITÉ Une ‘nouvelle’ identité POUR UNE FEMME ‘DEPUIS TOUJOURS’ Apprendre est parallèle au processus de vie. Il y a toujours quelque chose de nouveau à apprendre, les expériences positives de l’humanité sont illimitées. Si nous pouvions ouvrir notre âme et notre cœur comme nous aimerions que les autres le fassent à notre égard, le monde ne serait-il pas plus harmonieux? Nous ne sommes pas tous identiques, tout comme nous n’avons pas besoin de l’être. Mais nous sommes tous des êtres humains et cela doit nous rassembler. L’article ci-dessous a été écrit par Jacqueline Rocha Côrtes, une femme brésilienne séropositive courageuse. Jacqueline est née biologiquement garçon mais depuis un très jeune âge, elle se sentait femme dans tous les sens du terme. L a compréhension de la transsexualité n’est pas une ou clairement définie. Les gens pensent qu’une personne transsexuelle est un homme avec un sexe de femme ou une femme ayant opté pour un sexe male. C’est inexact. Nous, femmes transgenre, et plus précisément transsexuées (ou transsexuelles homme-vers-femme si vous préférez la terminologie traditionnelle, que nous ne trouvons pas bien adaptée à nos cas), nous nous sommes toujours ressenties et perçues comme des femmes. Nous voyons le monde à travers des yeux de femmes, et plus que ça, nous vivons nos vies en tant qu’être femme. C’est pourquoi nous ne nous considérons pas comme des hommes ayant décidé de devenir des femmes : nous sommes des femmes qui avons réadapté notre appareil génital pour qu’il soit conforme à notre identité psychologique et entière.Au Brésil, nous n’utilisons pas le terme ‘changer de sexe’ car une femme transsexuée ne change pas de sexe, elle l’adapte à sa véritable et correcte identité. Ici au Brésil, les transsexuelles, nous pensons qu’il existe une différence entre les personnes transgenre et les personnes transexuelles. Ce que l’ensemble des gens croient, c’est que si vous êtes une drag queen, un travesti ou un transsexuel, vous êtes une personne transgenre. Bien que nous soyons considérées comme des personnes transsexuelles pendant une partie de notre vie, dès notre identité anatomique corrigée, nous ne considérons plus faire partie de cette ‘catégorie’. C’est ce que nous pensons, ressentons, et notre position. Une personne est ce qu’elle ressent, ce qu’elle vit et croit, tout autant qu’une histoire et une mémoire pour les autres. Notre legs, c’est que nous sommes des femmes ‘spéciales’ faisant continuellement face à une incompréhension générale, des préjudices et un manque de respect. Nous sommes des femmes vivant une enfance ‘spéciale’ enfermées dans un ‘corps’ d’homme. Peu de groupes nous comprennent vraiment et quelquefois nous ne sommes pas prises au sérieux. Pourtant, comme les autres femmes, nous sommes sensibles, courageuses et dynamiques. Nous souffrons des discriminations et luttons pour notre inclusion dans le monde. Disons le ainsi : en général, une femme transsexuée vit une vie ordinaire de femme. Ce que je veux dire, c’est que nous travaillons (si la possibilité nous en est donnée), nous avons nos propres familles, une vie sociale et une énorme capacité d’amour. Nous allons chez le docteur, nous allons souvent chez le gynécologiste, nous prenons soin de nous comme les autres femmes, nous passons des tests de routine, des mammographies, nous suivons des thérapies hormonales. ‘Nous, femmes transgenre infectées par le VIH, vivons une réalité similaire à celle des autres femmes vivant avec le VIH-sida.’ ❛Nous, femmes transgenre infectées par le VIH, vivons une réalité similaire à celle des autres femmes vivant avec le VIH-sida.❜ Une fois que nos papiers officiels et légaux reconnaissent notre nouvelle identité (quand cela est possible dans le pays où nous vivons), nous appartenons pleinement à la catégorie des femmes. Cela inclut faire face à tous les challenges et les difficultés rencontrés par les femmes, par exemple les préjudices et attitudes machistes. Je peux également citer cette croyance populaire qui veut qu’’être femme signifie être du sexe faible’. C’est bien entendu inexact! Politiquement, nous désirons être impliquées dans les mouvements sociaux pour les femmes, des mouvements dirigés par des femmes ayant pour buts des changements pour la cause des femmes. Nous espérons qu’un jour viendra où parmi la communauté des femmes, un ‘nouveau style’ de femme sera inclut : la femme transsexuée, une femme dotée d’un sexe, d’une identité et d’une vie de femme. Cette femme est une nouvelle femme avec toutes les questions et les challenges rencontrés par les femmes en général. Elle a besoin d’être incluse et respectée comme toute autre femme en a le besoin, le désire, le mérite, et se bat pour. Les hommes se croient supérieurs. En tant que femmes, nos opportunités de travail et nos salaires sont moindres que ceux des hommes. Les tâches domestiques ne sont pas partagées équitablement. Les femmes se sont battues pour une égalité hommes-femmes et les femmes transsexuées se battent pour la même cause. Nous voulons être entendues et avons besoin d’être comprises dans le monde entier. ■ Jacqueline Rocha Côrtes est éducatrice, une femme transgenre séropositive depuis 1994.Agée de 44 ans, elle est légalement mariée à Victor Côrtes. Leur mariage prit place en février 2004. Jacqueline est membre du réseau brésilien des personnes vivant avec le VIH-sida (Brazilian Network of PLWA (RNP+)). Elle représente l’Amérique latine (Latin American Network of PLWA (REDLA+)) au sein du réseau GNP+ et elle a été associée à de nombreux projets pour des personnes infectées par le VIH au Brésil. Militante active pour un accès global aux antirétroviraux en Amérique latine, elle a défendu le droit de son pays à produire des antirétroviraux génériques au cours de la 58ème sessi0on des Nations unies sur les droits de l’homme. Elle est actuellement membre de UNAIDS PCB en tant que représentante de la société civile pour la région Amérique latine. Jacqueline serait ravie de rejoindre des réseaux de femmes séropositives, notamment ICW. Etre membre d’ICW serait pour elle une opportunité d’agir ensemble. ICW Actualité • 7 • Juillet/Août 2004 • Numéro 26 ICW Actualité attend vos commentaires sur cet article. Un mariage le jour de la Saint Valentin MICROBICIDES Microbicides: SI PROCHE ET POURTANT SI LOIN La 3ème conférence internationale sur les microbicides s’est tenue à Londres à la fin mars 2004. Les administratrices d’ICW Angelina Namiba et MariJo Vazquez – Responsables de projet pour une sexualité et une procréation sans risque- et Promise Mthembu présentent cet événement. L e mouvement pour mettre au point avec succès un microbicide est à un stade critique. Personne n’attend pour bientôt un produit disponible sur le marché et pourtant le mouvement de recherche a besoin d’être développé et poursuivi. A la fin de la conférence, les femmes séropositives présentes se demandaient si leurs besoins avaient été entendus. C’est ce point que Promise étudie ci-dessous, tandis que MariJo nous dit pourquoi les microbicides anaux sont d’une égale importance pour les hommes et les femmes. Pourquoi des microbicides pour les femmes infectées par le VIH? Angelina Namiba Angelina Le développement d’agents microbicides efficaces est d’une extrême importance pour l’ensemble des femmes mais bien plus encore plus pour celles vivant avec le VIH-sida. Les inégalités hommes-femmes sont au cœur de l’épidémie du VIH-sida, tout comme de la rapide progression d’autres infections sexuellement transmissibles ou de maladies potentiellement mortelles tel la tuberculose et la malaria. Les violences contre les femmes, l’inégal accès à la propriété, l’inégale répartition de la prise en charge des malades, l’inégal accès aux traitements et aux informations de prévention, tout cela rend les femmes plus vulnérables au VIH et plus touchées par l’épidémie. Le manque d’une réelle prise en compte des besoins spécifiques et différents des hommes et des femmes dans la lutte contre le VIH-sida entraîne une moindre efficacité des techniques de prévention en place ou à venir. Le développement d’agents microbicides efficaces est un espoir pour adresser les spécificités féminines de l’épidémie, spécificités à présent sous-estimées. Ce texte est extrait d’un article publié dans ‘Positively Women’. De nouvelles questions Promise Mthembu Pour la première fois dans l’histoire d’une conférence sur les microbicides, une réunion satellite fut organisée pour des femmes vivant avec le VIH-sida. Bien que peu y participèrent, les débats furent denses et ce fut une occasion fantastique de nouer des contacts avec toutes celles présentes. Surtout, cette réunion nous permit de rejoindre la conférence en parlant d’une même voix, celle de femmes vivant avec le VIH. J’ai par ailleurs constaté une représentation acceptable d’organisations de la société civile et il était évident que la question d’une campagne pour les microbicides suscitait plus d’intérêts que de coutume, notamment de la part des communautés du ‘Global South’ présentes. Cette meilleure prise en compte et cet engagement en faveur d’une campagne pour les microbicides furent clairement confirmés par le succès de la réunion satellite du groupe africain pour les microbicides (African Microbicides Group (AMAG)), réunion conjointement organisée par ICW. La qualité des débats et des problèmes soulevés démontra clairement que le message a finalement été entendu, message que les activistes et les associations de femmes contre le sida, ainsi que toutes celles et ceux agissant pour leur cause, doivent répercuter. Les questions urgentes soulevées furent liées aux questions éthiques, à l’accès aux microbicides une fois ces agents disponibles, et bien entendu aux besoins des femmes infectées. ICW Actualité • 8 • Juillet/Août 2004 • Numéro 26 Une rencontre avec des chercheurs ICW a rencontré des chercheurs de qualité des secteurs scientifique et social. Notre objectif était d’aborder la spécificité féminine de l’infection dans le cadre de la recherche sur les microbicides. Les points suivants furent débattus : ■ la participation des femmes à tous les niveaux et toutes les phases de recherche, ■ les interactions possibles entre les microbicides, les antirétroviraux et autres traitements contre le VIH, ■ la possibilité pour des femmes séropositives d’utiliser des microbicides et l’impact de ces microbicides, ■ le soutien et les traitements disponibles pour les femmes qui deviendraient séropositives au cours des essais et celles testées séropositives avant les essais. A notre grand étonnement, nous avons réalisé qu’encore moins de recherches sont entreprises sur le système procréateur de la femme séropositive. Nous avions toujours imaginé que c’était le cas mais la situation est plus sombre que nous le pensions. ➜ UN DÉBAT SUR LE RÔLE DES HOMMES Réflexions sur les microbicides MariJo Vazquez Je voudrais mentionner la séance fantastique sur la biologie anale et rectale. Les discussions sur les pratiques hétérosexuelles mentionnent rarement la pénétration anale, bien que quelques études sur ce sujet indiquent une incidence courante de cette pratique. En général, la sexualité anale est considérée exclusivement comme une pratique masculine homosexuelle, reléguant encore une fois les pratiques sexuelles des femmes dans des stéréotypes. Cela entraîne de sérieux retards dans l’adoption de mesures de prévention adéquates. C’est pourquoi nous devons promouvoir et encourager les programmes de recherche sur les microbicides anaux en tant que méthode de prévention pour les femmes, tout comme pour les hommes sexuellement actifs avec d’autres hommes. ➜ En réponse à ce constat, ICW a décidé d’agir pour que les chercheurs soient plus au fait de ce qui se passe dans nos vagins! Nous avons entamé des négociations avec des agences de recherche médicales et physiologiques afin d’adresser cette lacune dans la recherche sur le VIH et le sida. De nouvelles questions éthiques se posent aux chercheurs et ICW ne manquera pas de les leur poser. La population féminine dans le monde touchée par le VIH est estimée à quarante millions. Comment entreprendre des programmes de recherche tel que celui sur les microbicides en ignorant les besoins d’une telle population? ■ Que soit remercié le Programme pour une campagne globale pour les microbicides (Global Campaign for Microbicides and International Family Health) pour son soutien, ses ressources et son invitation à la table des discussions, invitation qui nous a permis de dire nos questions et inquiétudes. ❛Nous savons peu de choses sur l’incidence du VIH sur le vagin des femmes séropositives.❜ (déclaration d’un chercheur membre d’un institut de recherche crédible) Transformer la société: QU’EN EST-IL DU RÔLE DES HOMMES? E n 1992, environ 60 femmes séropositives se regroupaient pour former un réseau indépendant et international de femmes infectées par le VIH. Ce faisant, les fondatrices d’ICW inscrivaient leur action dans la continuité d’un mouvement de femmes de plus de trente ans. Des femmes fortes ont quitté des organisations qu’elles avaient fondées, déterminées à bâtir de nouvelles associations au sein desquelles d’autres femmes seraient à même d’agir. Où en sommes nous aujourd’hui? Estce que les hommes et les femmes travaillent ensemble efficacement et à égalité? Dans de nombreuses sociétés, les femmes sont toujours dominées et se voient refuser certains droits sociaux et économiques. Pourtant, les femmes séropositives et leurs organisations n’ont cessé de se renforcer. Comment, quand et sous quelles conditions devons nous travailler avec les hommes? Pour ouvrir ce débat, MariJo Vazquez et Promise Mthembu ont échangé leurs opinions. Nous devons tous être associés aux changements MariJo Après plus de vingt ans de lutte, l’épidémie de sida continue inexorablement son avancée, notamment parmi la population féminine. Les inégalités hommes-femmes qui accroissent la vulnérabilité des femmes sont une raison-clé de cette progression. Aussi, le sida connaît ses effets les plus dévastateurs dans les sociétés dominées par les hommes. La lutte contre le VIH doit changer. Une nouvelle approche doit être adoptée : accent sur les responsabilités individuelles et collectives, implication de tous les secteurs de la société, actions à la fois séparées et collectives. Par-dessous tout, il est vital que des hommes dans des positions de pouvoir et de décision soient à nos côtés. Pas nécessairement au sein d’ICW, mais certainement engagés sur ce que nous considérons crucial pour les femmes et la société dans son ensemble. Cette plus grande vulnérabilité à l’infection a fait que de nombreuses femmes dans le monde se sont unies pour lutter pour leurs droits, pour être informées, soutenues, formées, et ce afin de se prendre en charge. Mais les changements proposés ne se limitent pas à modifier les attitudes de certains groupes en certaines occasions. Ce que nous proposons, c’est transformer la société, et pour cela, tous doivent être impliqués. Cela signifie de la part des hommes et des femmes dans le monde une prise de responsabilité et une action de concert pour une cause commune. Nous ne parlons pas seulement d’une amélioration de la qualité de vie des femmes, nous parlons de la survie de l’humanité. Il est insuffisant de continuer à former les femmes, il faut aussi que les hommes se libèrent de leurs propres stéréotypes. Et pour cela, ils doivent comprendre que les bénéfices seront partagés : eux aussi découvriront de nouvelles opportunités. Il est donc primordial pour les hommes d’assumer l’éducation de leurs enfants, de repenser leur masculinité, d’adopter de nouvelles valeurs basées sur le respect et l’égalité et non sur les abus de pouvoir. Les jeunes garçons ont besoin de rôles modèles, mais cela restera inefficace tant que les hommes resteront aux marges ou en opposition à la construction d’une nouvelle équité sociale. Bien que notre rôle continue d’être une lutte pour une pleine jouissance de nos droits, je pense qu’il est approprié de demander un partage des responsabilités pour cette tâche. Les hommes font partie du problème, ils doivent aussi faire partie de sa solution. ■ ICW Actualité • 9 • Juillet/Août 2004 • Numéro 26 MariJo UN DÉBAT SUR LE RÔLE DES HOMMES Indépendante et séropositive Promise ICW a été fondée pour deux choses : une autonomie des femmes infectées par le VIH, et la création de lieu de parole où elles peuvent s’exprimer sans crainte. Je n’oublie jamais ça quand je réfléchis au rôle des hommes. Pour créer une égalité, nous devons regarder les inégalités existantes.Vous ne pouvez clamer une équité tant que de nombreuses inégalités existent. En d’autres termes, pour une égalité hommes-femmes, vous devez créer un espace indépendant où les femmes peuvent être elles-mêmes, développer et décupler leurs forces. Comment négocier avec le pouvoir si vous ne l’avez pas? Oui, tous les hommes ne sont pas égaux, ni ont-ils un même accès au pouvoir. Cependant, en comparaison avec les femmes, nombre accèdent plus facilement au pouvoir et avec un certain sentiment que cela leur est ‘naturellement’ dû. Un exemple. En 2002 à Nairobi, j’ai rencontré une association de femmes séropositives ouvertes aux hommes. J’ai assisté à une séance d’une heure sur les microbicides : un homme à monopoliser la parole pour environ 45 minutes. Les voix des femmes étaient éclipsées, au sein même de leur organisation. D’expérience, je sais que cette situation est courante au sein des groupes mixtes de soutien pour les personnes séropositives. C’est seulement entre femmes que les femmes abordent en sécurité leurs problèmes, s’expriment en confiance, définissent leurs besoins, décident. ICW doit rester une organisation forte et indépendante, sans participation directe des hommes. Bien sûr, ICW doit continuer ses stratégies d’influence sur les hommes et leurs associations. Et cela ne signifie nullement être une organisation contre les hommes. Continuons à agir avec des hommes au sein d’alliances spécifiques et continuons à nous enrichir les uns les autres dans le cadre de ces alliances. Nous oeuvrons pour la cause des femmes infectées par le VIH, leur combat pour l’égalité et leurs droits, et ces objectifs seront atteints en demeurant une organisation de femmes séropositives. Pour être entendues, de façon claire et forte, restons un réseau de femmes. Ainsi, notre influence sur les autres organisations – à tous les niveaux – et leurs membres – hommes ou femmes- sera décuplée. Ainsi, les femmes parviendront à plus d’autonomie. Ne nous excusons pas. Oui, nous excluons les hommes de nos adhésions, mais pas de nos vies, de nos alliances, de nos inquiétudes. ICW est la Communauté Internationale des Femmes vivant avec le VIH-sida et je suis en total accord avec cela. ■ Lectrices et lecteurs, vos commentaires sont les bienvenus. Promise ANNONCES Accès aux traitements : un nouveau rôle global pour ICW Nous sommes heureuses d’annoncer la sélection d’ICW comme principale agence pour la branche ‘traitements et soins’ du programme ‘The Global Coalition on Women and AIDS’. ‘The Global Coalition on Women and AIDS’ est une initiative récente de l’Onusida. Composée d’activistes, de représentants gouvernementaux, de travailleurs communautaires et de célébrités, elle vise à favoriser les actions de proximité afin d’améliorer la vie des fillettes et femmes infectées. Ses efforts se concentreront sur la prévention de nouvelles infections au sein de la communauté des femmes et des jeunes filles, la promotion d’un égal accès aux soins et traitements contre le VIH, l’accélération des recherches sur les microbicides, la promotion des droits à l’héritage et économiques pour les femmes, et la réduction des violences à leur encontre. Région Asie-Pacifique: un rapport de femmes séropositives Intitulé ‘Oh,This one is infected!’:Women, HIV & Human Rights in the Asia-Pacific Region, ce rapport préparé pour le bureau du Haut Commissaire aux droits de l’homme des Nations unies, vient d’être publié. Rédigé par Susan Paxton, avec la collaboration d’Alice Welbourn, P. Kousalya, Anandi Yuvaraj, Sapana Pradhan Malla et Motoko Seko, ce document est une contribution importante à la situation des femmes séropositives de cette région du monde. Publications! Le document Vision d’ICW est à présent disponible ICW a le plaisir d’annoncer le lancement à Bangkok de six publications. Les cinq premiers documents détaillent la vision d’ICW et sont destinés aux membres séropositifs et supporters de l’association afin de les équiper dans leur action en faveur des buts et des objectifs de l’organisation. Ces documents sur les positions d’ICW vous permettront d’être mieux équipées pour représenter l’association lors de votre participation à des réunions ou des groupes, et d’être mieux armées pour répondre aux questions sur l’organisation. Cette série de publications couvre les thèmes suivants : accès aux traitements et aux soins, droits politiques et inclusion, équité et inégalités économiques, droits de l’homme, jeunes femmes et fillettes. La sixième publication est destinée aux décideurs politiques :Visibilité,Voix et Visions : Un appel de femmes séropositives aux décideurs politiques pour une action. Ces publications sont disponibles en anglais, français, espagnol, ainsi que sur notre site Internet : www.icw.org (des copies en ligne sont disponibles sur demande). ICW Actualité • 10 • Juillet/Août 2004 • Numéro 26 NOUVELLES NOUVELLES DE LA RÉGION Australie/Asie-Pacifique Un article de Bev Greet, Administratrice internationale: Avec la 15ème conférence internationale sur le sida organisée à Bangkok, une importance particulière sera accordée à la région Asie-Pacifique dont la situation a souvent été minimisée ou oubliée lors de précédentes rencontres. M embre du Comité chargé du programme communautaire (Community Program Committee (CPC)), j’ai assisté à diverses réunions à Bangkok et été en contact intensif via e-mail avec l’équipe du Comité de la communauté thaï. Passionnés par cette rencontre, ils sont déterminés à aborder les thèmes suivants: femmes, activisme, jeunes gens, usage de drogues, accès aux traitements. Je suis impatiente de rencontrer toutes celles qui auront la chance d’être présentes pour partager les résultats du travail continu et enthousiaste de cette équipe. Nouvelles d’Australie Bev L’Australie a connu un ‘baby boom’ parmi les femmes séropositives privilégiées bénéficiant des traitements et des soins réduisant grandement les risques d’une transmission du virus durant la grossesse. Un groupe national de femmes séropositives opérant via e-mail a été créé pour lutter contre l’isolement subi par de nombreuses femmes, et discuter de l’organisation et des thèmes de la prochaine Conférence Nationale des Femmes Séropositives (National Positive Women’s Conference). Nous espérons que cette rencontre prévue pour 2005 impliquera la présence de nombreuses femmes séropositives de cette région. Les statistiques sont de plus en plus alarmantes pour les femmes australiennes aborigènes: les femmes y constituent 26% des nouvelles infections alors que ce taux est de 8% pour l’ensemble de la communauté. Nombre d’entre elles vivent dans des communautés extrêmement isolées et font face à de longues distances pour accéder aux traitements et services. Je suis fière d’annoncer Réunion d’ICW à Londres : apprendre à être ensemble l’initiative SNAKE COMDOMS, une initiative de l’organisation de santé ‘the Victorian Aboriginal Community Controlled Health Organisation’ en partenariat avec la branche australienne de ‘Marie Stopes International’. Nous avons travaillé avec des jeunes gens indigènes d’une communauté rurale afin de dessiner, nommer, promouvoir et vendre la première marque de préservatif ‘Koori youth-friendly’. Cette initiative vise à réduire le nombre de grossesses non désirées et la transmission des MST et du VIH. Ce programme pilote qui rencontre un grand succès sera étendu au niveau national. SNAKE CONDOMS sera présenté à Bangkok par les jeunes gens eux-mêmes. ■ J’attends beaucoup de la présence à Bangkok des femmes de notre région ainsi que celles de la Communauté. ICW Actualité • 11 • Juillet/Août 2004 • Numéro 26 ICW Actualité – numéro 26 Remerciements à: Promise Mthembu, Bev Greet, Fiona Hale, Luisa Orza, Alice Welbourn, Emma Bell, Ennita Manyumwa, Gcebile Ndlovu, MariJo Vazquez, toutes les participantes de YWD, Jacqueline Rocha Côrtes, Carmen Tarrades et Franck Pertois. Sue O’Sullivan : Directrice de la publication DS Print & Redesign : Impression et conception graphique Bientôt : Rapport sur la conférence de Bangkok Date limite : 26 juillet 2004 ICW Actualité souhaite vos commentaires. Nous recherchons des articles courts de la part de femmes touchées par le VIH (expériences personnelles, nouvelles, opinions, infos, suggestions pour les prochains numéros), ainsi que des lettres et des photos. Nous ne pouvons garantir à l’avance une publication. Veuillez envoyer vos contributions par courrier à Sue O’Sullivan à ICW: [email protected] ICW Canonbury Yard, 190a New North Road, London N1 7BJ Tél.: 44 20 7704 0606 Fax: 44 20 7704 8070 e-mail: [email protected] Site Internet: www.icw.org CONTACTS DE RÉGION/ ADMINISTRATRICES Pour des informations locales, contactez votre correspondante d’ICW la plus proche CARAÏBES/AMERIQUE LATINE MARTINE SOMDA REVS+ 01 BP 382 BOBO-DIOULASSO BURKINA FASO Tél/Fax: 002 269 70517 (office) e-mail: [email protected] [email protected] PATRICIA PEREZ Sarandi 215 1o “A” (1081) Buenos Aires ARGENTINE Tél: 54 11 4951 0651/4951 5037 e-mail 1: [email protected] e-mail 2: [email protected] Site Internet: www.icwlatina.org LYNDE FRANCIS The Centre PO Box A930, 24 Van Praagh Avenue Harare ZIMBABWE Tél: 263 4724 494 (travail) Fax: 263 4732 965/6 e-mail: [email protected] HILDA ESQUIVEL C. Aramberri 706 ote. Centro de Monterrey, Nuevo León MEXIQUE Tél/Fax: (0181) 83-42-06-34 e-mail 1: [email protected] e-mail 2: [email protected] DOROTHY ONYANGO c/o WOFAK PO Box 35168 00200 City Square Nairobi KENYA Tél: 254 020 273 0952 Fax: 254 020 272 5455 ASIE/PACIFIQUE BEV GREET c/o VACCHO PO Box 1328, Collingwood Victoria 3066 AUSTRALIE Tél: 613 9419 3350 Fax: 613 9381 2447 e-mail: [email protected] P. KOUSALYA Positive Women Network (PWN+) 23, Brindavan Street West Mambalam Chennai – 600033 Tamil Nadu INDE Tél: +91 44 23711176, 24717363 e-mail: [email protected] EUROPE MARIJO VAZQUEZ SANTS no 2-4 1st Floor 08014 Barcelona ESPAGNE Tél/Fax: +34 9343 14548 e-mail: [email protected] AMERIQUE DU NORD ANTIGONE HODGINS 4831 36th Street, NW Apt 206 Washington DC 20008 ETATS-UNIS Tél: 1: 202 363 00121 (domicile) Tél: 2: 202 232 6749 (travail) Tél: 3: 202 4228551 (portable) e-mail: [email protected] ★ NOUVELLE ADRESSE D’ICW ★ ICW ADMINISTRATION ICW, Unit 6 Canonbury Yard, 190a New North Road, London N1 7BJ Royaume-Uni Tél.: 44 20 7704 0606 Fax: 44 20 7704 8070 e-mail: [email protected] Site Internet: www.icw.org ICW est un réseau international de femmes vivant avec le VIH. ICW fut créé pour combler un manque d’aide et d’information qui pénalisait les femmes du monde entier. 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