ICWACTUALITÉ
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NUMÉRO 28 JANVIER-FÉVRIER 2005 ICW ACTUALITÉ ❛Ensemble et unies pour que nos rêves deviennent réalité.❜ Alice Welbourn Défendre, collaborer, organiser : rien pour nous sans nous Dans ce numéro: les moments forts de 2004; s’organiser et se soutenir les unes les autres en Tanzanie, en Amérique latine, en Ouganda ; des jeunes femmes swazies ; la transmission du virus de la mère à l’enfant ; des lettres ; et plus encore. »»» L A C O M M U N A U T É I N T E R N AT I O N A L E D E S F E M M E S V I V A N T A V E C L E V I H - S I D A ( I C W ) 02 (nouvelles) Succès et conférences Bienvenue à bord Beri Hull ICW a le plaisir d’annoncer la nomination de l’Américaine Beri Hull en qualité de nouvelle Conseillère pour l’accès universel aux soins et aux traitements (Global Advocacy Officer for Access to Care, Treatment and Support : ACTS). Ce poste fut créé avec le soutien de l’Onusida, avec ICW en tant que co-responsable avec l’OMS (Organisation mondiale de la Santé) de la branche Accès aux traitements et aux soins (ACTS) de la Coalition mondiale sur les femmes et le sida (Global Coalition on Women and AIDS). ’arrive à ce poste en tant qu’adhérente de longue date d’ICW et militante et éducatrice de santé pour les personnes vivant avec le VIH et l’hépatite C. Ancienne usagère de drogue par voie intraveineuse, j’ai été diagnostiquée séropositive en 1993. Je possède une licence en gestion des affaires. J’ai commencé en militant pour les usagers de drogues et les personnes vivant avec le VIH. Au début, je me suis focalisée sur la prévention du VIH puis, par la suite, je me suis orientée vers la question des soins, traitements holistiques, traitements et longévité des personnes vivant avec le VIH à travers le monde. Je siège au sein d’une commission de prévention, ‘Prevention Works’, un programme d’échange de seringues à J Washington. Je siège également au sein d’un groupe des Nations unies (United Nations reference Group on HIV prevention and care among injection drug users) qui conseille le Secrétariat de l’Onusida et cosponsorise des actions de prévention et de soutien pour les usagers de drogues par voie intraveineuse dans les pays en développement. Je pense que le rôle des femmes séropositives en tant que militantes a été sous-représenté dans le domaine du soin, du traitement et du soutien. En tant que femme noire vivant avec le VIH, j’espère pouvoir aider à modifier cette situation et je continuerai à militer pour l’amour et la tolérance envers toutes les personnes vivant avec le VIH. ● Deux conférences Lima, Pérou La 12ème conférence internationale pour les personnes vivant avec le VIHsida et la 7ème conférence internationale sur la prise en charge communautaire et à domicile des personnes vivant avec le VIH-sida (Home and Community Care for Poeple Living with HIV-AIDS) ont franchi une nouvelle étape en décidant de joindre leurs efforts. Ces deux conférences se dérouleront en même temps, du 9 au 14 octobre 2005, à Lima, au Pérou. ICW est l’un des partenaires de cette entreprise. La conférence internationale pour les personnes vivant avec le VIH-sida est la seule conférence dans laquelle nous, la communauté entière, planifions complètement l’agenda. La conférence internationale sur la prise en charge communautaire et à domicile se focalisera sur des questions très souvent négligées et encouragera le travail en partenariat d’associations et de militants de terrain. Fin 2005, ces conférences conjointes donneront l’opportunité aux personnes vivant avec le VIH et à leurs communautés de mesurer les progrès accomplis, non seulement en regard de l’objectif de l’OMS de soigner trois millions de personnes d’ici la fin 2005 dans les pays en développement, mais également en regard de la manière dont les États auront répondu à la pandémie du VIH dans le cadre de la Déclaration d’engagement sur le VIH-sida adoptée à l’unanimité par les Etats membres de l’Assemblée générale des Nations unies en juin 2001 (UNGASS-United Nations General Assembly Special Session). Dans les prochains mois, ICW vous informera sur cette conférence et les modalités d’inscription.● De beaux succès ! Martine Somda e veux partager avec vous toutes le fait d’avoir été faite, par le Président du Burkina Faso, Knight of Order of Merit (Chevalier de l’Ordre du Mérite), le 1er décembre dernier à Dedougou. C’est un grand honneur d’obtenir cette distinction officielle pour mon action contre le VIH. Je suis extrêmement fière et je voulais partager cette joie avec vous ainsi qu’avec toutes les adhérentes d’ICW. J Angeline Chiwetani ngeline, adhérente d’ICW et l’une des militantes zimbabwéennes les plus déterminées pour l’accès aux traitements a reçu la récompense 2004 de la Fondation Letten (Letten Foundation Award 2004) en reconnaissance du rôle-clé qu’elle a joué pour la réduction de la stigmatisation et des discriminations ainsi que pour la défense des thérapies antirétrovirales. Cette récompense lui a été décernée en novembre 2004, à Barcelone, en Espagne. ● A 2006 Conférence internationale sur le sida de 2006 ela peut paraître difficile d’y penser alors que la conférence de Bangkok commence seulement à s’effacer des mémoires. Pourtant, ICW est déjà en train de discuter de son implication dans cet événement prévu en août 2006 à Toronto, Canada. La vice-présidente d’ICW, Ale Trossero, siège au comité organisateur. Ce comité s’est récemment réuni et des représentants des associations ICASO, GNP+, International AIDS Society (IAS) ainsi que du gouvernement canadien étaient présents. ICW adresse un message important aux femmes séropositives du monde entier : si vous voulez être à Toronto en août 2006, organisez-vous et rassemblez des fonds dès maintenant ! ICW concentrera ses efforts afin d’aider des femmes séropositives à soumettre des propositions d’intervention pour cette conférence. Pour des nouvelles fraîches sur Toronto 2006, consultez nos prochains numéros. C Photo de couverture : une séance à Buenos Aires en octobre 2004 (formation pour la région Amérique latine et Caraïbes). (moments forts de 2004) 03 Visibilité, voix, visions : 2004, une année qui fera date Chères adhérentes d’ICW, vient de vivre une année bien remplie et intense avec des progrès sur plusieurs fronts, dont une meilleure sensibilisation du grand public aux nombreux problèmes rencontrés par les femmes séropositives, mais également une année pleine d’une profonde tristesse devant le continuel déferlement de droits de la personne bafoués, de maladies et de décès de millions de femmes séropositives dans le monde entier. ICW Le premier de nos progrès est qu’ICW a grossi en nombre grâce au fort engagement et à l’énorme travail du staff international et de l’équipe des volontaires. Grâce à leur soutien, nous avons produit plus de publications, organisé plus de rencontres internationales, rassemblé plus de fonds, acquis de nouveaux membres, et sommes devenues plus visibles et mieux impliquées sur la scène internationale. Les moments forts de 2004 ont vu la publication d’un nouveau document sur les ‘Visions d’ICW’ (document que j’espère vous avez toutes reçu), l’organisation de rencontres de jeunes femmes (Young women’s dialogue) en Afrique australe et subsaharienne, la rédaction de rapports consacrés aux rencontres latino-américaines “Voces Positivas” et “Voices and Choices” (il en sera de même bientôt pour l’Afrique francophone et la Thaïlande), la parution régulière de notre Lettre d’information avec une pagination doublée, le lancement du projet de recherche “Silent Voices” (Les Voix silencieuses) sur les problématiques des usagères de drogues séropositives, la nomination d’une nouvelle coordinatrice régionale à plein temps pour l’Afrique subsaharienne (et bientôt pour l’Afrique australe) ainsi que d’une nouvelle conseillère pour un accès universel aux traitements (Global Advocacy Officer for Access to Treatment), et enfin notre implication directe en qualité de co-responsable avec l’OMS (Organisation mondiale de la Santé) de la branche Accès aux traitements et aux soins (ACTS) de la Coalition mondiale sur les femmes et le sida (Global Coalition on Women and AIDS : GCWA). ICW a co-organisé la conférence internationale de Bangkok, rencontre où les problématiques hommes-femmes furent mieux abordées que par le passé. Des membres d’ICW ont participé à de nombreux meetings-clé à travers le monde, dont le UN Secretary-General’s Task Force on Women and AIDS in Southern Africa et des rencontres spécifiques appelant à une coopération plus étroite entre les services consacrés au VIH et les actions pour une sexualité et une procréation sans risque. Le partenariat d’ICW avec d’autres associations a commencé à porter ses fruits. Les associations World Girl Guides et Girl Scouts nous ont généreusement offert leurs locaux de conférence à Londres pour notre rencontre stratégique. L’Ecumenical Advocacy Alliance a inclus des membres d’ICW d’Amérique Latine, d’Afrique et d’Asie dans leur pré-rencontre de Bangkok, pour s’assurer que leurs voix seraient entendues dans les discussions des organisations spiritualistes. La parole des membres d’ICW commence aussi à être écoutée de manière plus consistante par les décideurs politiques internationaux. L’Onusida, en particulier, a pris la tête de ce mouvement en lançant la Coalition mondiale femmes et sida (GCWA), un groupe international composé de représentants des Nations unies, d’ONG et d’autres associations, tous décidés à relever le défi mondial posé par les énormes inégalités hommes-femmes qui attisent et alimentent la pandémie du VIH-sida. Enfin, l’OMS et l’Onusida ont fait appel aux compétences d’ICW pour la nouvelle formulation de leur politique sur l’égalité d’accès aux traitements pour les femmes. Pourtant beaucoup reste à faire. Répercutant tous vos témoignages, le dernier rapport de l’Onusida met en lumière la progression continue des infections, les inégalités hommes-femmes, les violations scandaleuses des droits des femmes séropositives et les positions trop simplistes de l’approche dite ABC (Abstain, Be faithful, Use a Condom – Abstinence, fidélité, préservatif). De plus, nous continuons à rencontrer une énorme résistance de la part de nombreuses personnes, organisations et gouvernements quant à accepter que la question hommes-femmes est énorme et extrêmement complexe, qu’elle doit être traitée comme un problème de Droits de l’homme et que l’implication et l’expérience des associations de femmes séropositives ne peuvent être que déterminantes pour l’efficacité de leurs réponses. ICW doit toujours faire face à des problèmes financiers et de capacité. En tant que réseau, bien plus doit être entrepris pour soutenir celles d’entre-nous usagères de drogues par voie intraveineuse, travailleuses de l’industrie du sexe, détenues, réfugiées, Meilleurs vœux pour 2005 à tous les membres d’ICW vivant en zones de guerre, ou subissant tout autre handicap ou situation mal acceptée (lesbianisme, bisexualité). Nous ne sommes toujours pas parvenues à convaincre les médias internationaux que les maladies et les morts causées par le sida sont les conséquences de décisions politiques et financières des pays du Nord, non le résultat de comportements librement choisis de la part de femmes. Pire que tout, chaque année, nous continuons d’assister à la mort d’un million de femmes à cause d’un manque d’accès aux soins, aux traitements, à un soutien. Pour autant, nous trouvons le réconfort en sachant que nous faisons ce voyage toutes ensemble, que ce merveilleux travail, accompli par chacune d’entre vous, au sein de vos foyers, de vos communautés, fera de notre rêve collectif, une réalité pour nous toutes. Avec tous mes meilleurs vœux, Alice Welbourn, présidente du comité d’administration. ● Mary Robinson : première protectrice d’ICW est très honorée d’avoir pour première protectrice, Mary Robinson, avocate des Droits de l’homme, ancienne présidente d’Irlande, ancienne Haut Commissaire des Nations unies aux Droits de l’homme, et à présent directrice de l’Ethical Globalization Initiative (Initiative pour une mondialisation éthique). Nous accueillons chaleureusement et apprécions la solidarité que Mary et les associations mentionnées ici, montrent envers ICW. ICW Mary Robinson sur le stand d’ICW à Bangkok 04 (défendre, collaborer) Défendre, collabore rien pour nous sans Pour le numéro 28 d’ICW Actualité, nous avions demandé des articles sur les méthodes d’action des femmes séropositives dans leurs communautés, leurs pays, dans le monde. Les articles ci-dessous reflètent la riche diversité des projets et des perspectives au sein desquels nous sommes engagées. Les déplacements de Gcebile en Tanzanie: établir des liens Du 9 au 15 août, Gcebile Ndlovu, coordinatrice régionale d’ICW pour l’Afrique subsaharienne, parcourut la Tanzanie pour rencontrer des membres d’ICW et pour faire connaître ICW à d’autres femmes séropositives. 10 août : des participantes à la première rencontre de Dar es Salaam 10 août Rencontre d’une officielle de l’Onusida et de l’association UNDP et de son équipe. Je leur fais connaître la vision et la mission d’ICW. Elles s’engagent à soutenir les actions d’ICW en Tanzanie. 11 août: Des femmes vivant avec le VIH au ‘Moshi Centre of Hope’ (KIWAKKUKI). 75 participantes ont exprimé le désir de rejoindre ICW Rencontre avec TACAIDS (commission tanzanienne de lutte contre le sida) Le Docteur Temba apprécie nos vues sur les questions des femmes en affirmant que l’inégalité des genres a définitivement besoin d’être abordée. Dar es Salaam Mon premier meeting avec des femmes séropositives. Elles sont plus de 62. Trois d’entre elles sont déjà membres d’ICW. Les femmes sont enthousiastes et toutes veulent adhérer. Elles ont besoin de matériel (dont le Kit de survie) traduit dans leurs langues. De nombreuses autres femmes auraient voulu venir mais peu avaient les moyens de payer le prix du trajet en bus. Après cette rencontre, six furent sélectionnées afin de rester en contact avec moi et d’obtenir tous les numéros d’ICW Actualité. SHEDEPHA+ Quarante-trois femmes séropositives sont présentes. Les préoccupations prioritaires sont la pauvreté et l’impossibilité d’avoir accès aux médicaments. Elles s’inquiètent qu’il y ait encore beaucoup de femmes qui restent isolées. 11 août ZACAIDS (commission du Zanzibar de lutte contre le sida) Les préjudices sont encore très forts. Une association de personnes séropositives existe mais elle manque de moyens. Nous rencontrons quinze femmes vivant avec le VIH. Elles expliquent que c’est la première fois que d’autres personnes séropositives leur rendent visite. Les visiteurs habituels viennent seulement lire des livres concernant le virus. Elles me disent que ma visite symbolise l’espoir. Elles me racontent qu’en tant que femmes, elles sont continuellement blâmées à cause de cette épidémie. Quand elles vont faire des tests, elles y vont seules car les hommes refusent. Elles débordent d’affection pour les malades de la communauté. Si seulement elles pouvaient être assurées de trois repas par jour, elles retrouveraient la paix de l’esprit. Ces femmes fabriquent un savon qu’elles vendent difficilement car les gens ne veulent rien acheter aux personnes séropositives par peur d’être infectés. A la fin de la rencontre, les 11 août : femmes remplissent des des femmes formulaires d’adhésion à séropositives du ICW. Zanzibar rencontrent la coordinatrice régionale (défendre, collaborer) 05 er, organiser : nous 11 août Arusha ALPHA+ Des 25 femmes que je rencontre et qui nous attendent depuis 10 heures du matin, aucune n’a entendu parler d’ICW. Elles s’inquiètent du paiement de la cotisation à ICW. Mes explications sur la gratuité de l’adhésion pour les femmes séropositives sont chaleureusement accueillies. Cet autre groupe est majoritairement composé de veuves. Beaucoup ont été chassées loin de chez elle après la mort de leur mari. 13 août Ministère du développement communautaire, du genre et des enfants (Ministry of Community Development, Gender and Children) Je rencontre le Directeur des ressources humaines et le Directeur de la planification et du contrôle. J’explique ce que je suis allée faire en Tanzanie et j’indique mon espoir d’une collaboration avec eux. Gcebile 14 août Dar es Salaam Les femmes que je rencontre demande une réunion avec ICW afin de rencontrer des femmes d’autres pays. En résumé À part avoir affronté les réalités de la pauvreté, de la stigmatisation, de l’analphabétisme, du veuvage et de l’inaccessibilité aux antirétroviraux, je retiens plusieurs leçons de cette visite. Le soutien du programme de l’Onusida (UNAIDS Programme Associate) fût utile et permit de gagner du temps. Il est clair que le Kit de survie de la femme positive d’ICW profiterait à beaucoup s’il était traduit dans les langues locales. Les femmes désirent un forum où elles pourraient rencontrer d’autres femmes et discuter de leurs problèmes. Il me fut impossible de couvrir toute la Tanzanie mais le comité de six femmes s’assurera qu’ICW continuera d’établir des contacts avec les femmes tanzaniennes séropositives. Si les femmes vivant avec le VIH-sida étaient pourvues de formations leur permettant de militer pour leurs droits, on n’aurait plus besoin de se demander de quelles façons accroître leurs compétences. Je salue toutes les femmes qui ont laissé tout de côté pour assister à ces rencontres d’ICW. Je leur promets que nous travaillerons ensemble pour nous faire entendre d’une seule voix et pour donner aux femmes séropositives une meilleure place dans le monde. Unies, nos voix portent plus. Merci à l’Onusida : ils ont agi dans le cadre d’un véritable partenariat. ● »» 06 (défendre, collaborer) Nos expériences : du militantisme de base à des positions de haut niveau Kate Thomson et Philippa Lawson se sont rencontrées par le biais d’ICW : Kate est une des membres fondatrice de 1992 et Philippa adhère à l’association en 1994 lors de la conférence internationale de Yokohama. Par la suite, Kate devient Administratrice et volontaire et Philippa prend les fonctions de Responsable du développement au bureau de Londres de 1997 jusqu’en décembre 2000. Bien que toutes deux occupent à présent des postes dans le cadre de la lutte contre le sida, elles restent des membres engagés d’ICW. Lors d’une rencontre récente à Londres, elles ont accepté de parler d’ICW et de leur implication dans des organisations de lutte contre le sida. “Les femmes séropositives ont tendance à militer différemment des hommes. Pour les femmes, il s’agit plus de se connecter à d’autres femmes. Pour les hommes, il s’agit plus de se connecter aux ‘mecs importants”, là où semble résider le pouvoir.” Kate Kate : En 1992, quelques femmes néerlandaises séropositives liées à un petit groupe épars international de femmes séropositives organisent une rencontre pour nous toutes en dehors d’Amsterdam. Nous y allons dans le but de partager et d’apprendre de chacune d’entre-nous à travers nos diverses expériences, nos différences culturelles, linguistiques. Nous décidons de former une association. Rédiger les 12 articles fondant ICW fut une tentative de clarifier ce que nous voulions accomplir et ce que cette nouvelle association devait être. Nous pouvions voir le besoin énorme des femmes en matière de soutien de la part d’autres femmes. Nombre d’entre nous n’avions aucun groupe auprès duquel obtenir un soutien. Mais ceux que nous connaissions furent d’importants modèles. En tentant l’expérience, les femmes séropositives, y compris moi-même, ont trouvé la confiance et la compréhension auprès de ces groupes de soutien. C’est ce qui a fait que nous avons pu explorer d’autres niveaux de militantisme. Les bases que les groupes de soutien procurent à quelqu’un qui démarre ne doivent pas être sous-estimées. Sans cela, il est facile en tant que militante de devenir individualiste et d’agir au nom d’opinions personnelles. Un réel contact avec le groupe confère une légitimité pour militer à un niveau supérieur. Depuis le début, toute femme séropositive dans le monde est la bienvenue lorsqu’elle rejoint ICW. Nous savions que nous serions plus fortes ensemble. Une implication positive Kate : Bien souvent, des femmes sont amenées à Des amies de longue date s’engager plus avant dans ICW par le biais d’une rencontre avec d’autres femmes, de la mise en place d’une formation, en assurant un espace de dialogue pour explorer des questions. Il s’agit d’encourager des femmes à désirer découvrir ce qu’elles sont capables de faire pour elles-mêmes. ICW doit être visible, à un niveau national. Les premières adhérentes d’ICW firent ce travail à un niveau national de façon naturelle. D’une certaine façon, vous vous sentiez ICW et vous pouviez faire en sorte que les choses arrivent. Des femmes sentaient qu’elles pouvaient faire des choses au niveau de leur communauté au nom d’ICW, sans la permission du bureau de Londres. C’était très excitant et important et j’espère que cela continue de se passer. ❛Il faut consulter les femmes au sein de leurs communautés.❜ Philippa : Je crois qu’il est possible pour un réseau grandissant comme ICW à la fois de développer et de nourrir l’activisme de femmes à un niveau communautaire et à un niveau plus courant, et par ailleurs de leur donner une importance égale au sein de l’association. La difficulté réside dans la coordination de ces différents styles et lieux d’action. Le contrôle et l’évaluation sont des outils essentiels pour responsabiliser les personnes. Par exemple, dans de nombreux pays, l’accès aux traitements antirétroviraux est en train de devenir une réalité politique. Mais quand nous allons sur le terrain et parlons aux femmes, nous découvrons aisément que les antirétroviraux sont refusés aux usagères de drogues. Aussi, l’accès universel aux antirétroviraux, même si cela sonne bien, n’inclut pas les usagères de drogues séropositives. Travail général de lutte contre le sida Philippa : Je suis actuellement agacée par ce qu’on appelle le GIPA*. Nombre d’organisations emploient quelques personnes séropositives et revendiquent ainsi qu’elles satisfont aux principes du GIPA. Les donateurs et les organisations décident des programmes et des priorités concernant nos vies, et pourtant, il est rare que nous parvenions à des décisions ou à l’autorisation de leur exécution. Parfois, je me retrouve être la seule femme séropositive dans un forum de haut niveau. Mais je suis toujours consciente de mes contacts essentiels avec les autres femmes vivant avec le VIH-sida. En tant que “professionnelles”, nous ne sommes pas toujours en contact avec les “populations” que nous sommes sensées représenter, nous plus que les associations parlant en leur nom pour lesquelles nous travaillons. Je suis fière d’ICW et mon appartenance à cette association me tient à cœur. Mon sens des responsabilités me vient avec force de tous mes proches qui sont décédés. Ces femmes continuent d’être pour moi des mentors. Honnêtement, je ne sais pas pourquoi je suis toujours en vie aujourd’hui et pourquoi elles sont toutes mortes. Leur présence continuelle m’aide, dans ma vie, à me préserver de tout repli égocentrique dans lequel je pourrais facilement tomber. Cela et des amies comme Kate. ● * GIPA : Greater Involvement of People Living with HIV/AIDS (Pour une plus grande implication des personnes vivant avec le VIHsida). Cet engagement proclamé au sommet de Paris en 1994 a été signé par 42 pays. Son but est d’assurer à tous les niveaux la participation et la consultation des personnes vivant avec le VIH-sida dans les initiatives de lutte contre le VIH-sida. (défendre, collaborer) 07 Programme kenyan de lutte contre le sida : ‘Rien pour nous sans nous’ d’ICW et de WOFAK, Monique Wanjala décrit à Fiona Hale, le programme kenyan (en instance de ratification) de prévention et de contrôle du VIH-sida (HIV/AIDS Prevention and Control Bill). Elle explique pourquoi les femmes séropositives font pression en faveur d’une prise en compte de leurs questions. Membre Parle-nous de ton récent travail sur ce programme ? En septembre 2004, vingt-sept femmes venues de toutes les régions du Kenya participèrent à un atelier de travail à Kisumu afin d’étudier de près cette proposition. Cet atelier organisé par les associations WOFAK, NEPHAK, SWAK, KENWA et KANCO* bénéficiait du soutien du gouvernement japonais et de l’UNIFEM (United Nations Development Fund for Women). En tant que femmes séropositives, nous soutenons les buts de ce programme, particulièrement son volet préventif. Mais nous ressentons (nous disons cela avec humilité) également une insuffisante prise en compte de nos positions et de nos aspirations. C’est pourquoi nous nous sommes rassemblées et avons étudié ses manques et ses silences. Comment avez-vous eu connaissance de ce texte ? En 1997, le consortium des ONG kenyanes de lutte contre le sida (Kenya AIDS NGO Consortium) dont WOFAK était membre, créa une branche spéciale chargée d’examiner les questions relatives au VIH-sida. Dorothy Odiambo fut choisie pour y siéger en tant que représentante des personnes vivant avec le VIH-sida. C’est ainsi que nous avons suivi la genèse de cette initiative. Par ailleurs, comme son entrée en vigueur tardait, nous décidâmes en tant que femmes vivant avec le VIH-sida, d’étudier de près si elle répondait à nos besoins. Jusque là, nous ne l’avions pas étudiée en détail. Quand sera promulgué ce programme ? Il devait entrer en vigueur fin 2003. Nous sommes en 2004 et ce n’est toujours qu’une proposition. Nous espérons que grâce aux pressions, une fois en place, ce programme nous aidera dans notre combat contre le VIH et le sida. Que recouvre ce texte ? Notre principale critique est qu’il criminalise la transmission en connaissance de cause du VIH-sida. Si cela reste en l’état, nombre continueront de cacher leur statut sérologique et les personnes comme nous, contaminées et en parlant ouvertement, seront réellement stigmatisées. Nous avons fait des recommandations. Nous disons : “Rien pour nous sans nous!” Ce programme recommande la mise en place d’une Commission équitable sur le VIH-sida qui devra statuer sur les plaintes et les appels déposés une fois que ce programme sera texte de loi. Pour une prise en compte de nos problèmes, nous recommandons une représentation des femmes vivant avec le VIH-sida au sein de cette commission. Quelles sont les principales craintes des femmes vivant avec le VIH-sida au sujet de ce texte ? Les personnes infectées et le vivant ouvertement pourraient être criminalisées si elles infectent d’autres personnes en toute connaissance de cause. Les mères séropositives enceintes pourraient aussi être criminalisées. Pour les jeunes gens séropositifs, est-ce que cela signifie qu’ils n’auront pas le droit de se marier ou de fonder une famille ? Pour moi, cette situation serait une violation flagrante des Droits de l’homme. Le consentement avisé est une autre question. Les femmes associées à des recherches biomédicales ont besoin d’être correctement informées si nous voulons qu’elles puissent donner leur accord en toute connaissance de cause. Cela n’est pas le cas. Les informations personnelles générées par la recherche doivent être traitées confidentiellement et nos droits doivent être respectés. Le soutien à domicile est un autre problème car le plus souvent, ce sont les femmes qui l’assument. Pour autant, ce rôle n’est pas reconnu par le gouvernement ou ce texte. D’après la loi, même les conseillers des services de conseil et de test volontaire ne sont pas reconnus comme des prestataires de services de santé. Aussi, nombre d’entre eux perdront leur emploi si la loi est votée en l’état. Que se passe-t-il à présent ? Nous avons organisé une conférence de presse et rendu publique nos recommandations. Des journalistes de Nation, East Africa Standard et Kenya News Agency étaient présents. Nous espérons que nos recommandations seront entendues avant la promulgation du texte. Toutes les femmes ayant participé à l’atelier de travail se sont engagées à mobiliser d’autres femmes infectées afin d’expliquer le texte et ses lacunes. Ainsi, ensemble, nous aurons plus de poids. ● * National Network of People Living with HIV/AIDS in Kenya (NEPHAK) Women Fighting AIDS in Kenya (WOFAK) Society for Woman and AIDS in Kenya (SWAK) Kenya Network of Women with AIDS (KENWA) Kenya AIDS NGOs Consortium (KANCO) Kenya: une rencontre de femmes 08 (défendre, collaborer) Travailleuses de l’industrie du sexe en Amérique latine : sans Droits de l’homme, nous n’aurons aucun pouvoir Elena Reinaga, Argentine, a rencontré Carmen Tarrades. Elle lui parle des travailleuses de l’industrie du sexe, de leur lutte pour l’autonomie et leurs droits en Amérique latine, deux attitudes vitales pour la prévention du VIH parmi cette catégorie de la population. suis une travailleuse de l’industrie du sexe. Je suis Secrétaire générale du syndicat des travailleuses de l’industrie du sexe en Argentine et Présidente du réseau latino-américain des travailleuses de l’industrie du sexe. Nous nous sommes organisées afin de défendre les droits de ces femmes en âge de travailler et exerçant leur activité de leur plein gré. Notre action vise à l’amélioration de la qualité de vie de nos camarades par le biais d’ateliers sur la prévention des MST (maladies sexuellement transmissibles) et du VIH-sida, sur l’estime de soi, l’autonomie, l’action politique et syndicale. Nous agissons sur le terrain par le biais d’ateliers : nous n’attendons pas que les gens viennent à nous. Il y a énormément de discriminations et d’exclusion et il est parfois difficile pour ces personnes de venir à nous. Je ‘A cause de la répression, nous n’osons pas être libres.’ Le droit à la liberté Pendant deux ans, j’ai travaillé en tant que consultante et j’ai facilité des ateliers sur l’autonomie pour des travailleuses de l’industrie du sexe au Honduras, au Pérou, en Équateur, au Salvador. Je me sers de cette expérience pour renforcer le réseau latino-américain. Dans la majorité des pays, nos camarades travaillent intensément sur les questions des Droits de l’homme et de l’engagement militant. Pendant de nombreuses années, la priorité était l’utilisation des préservatifs. Mais en Argentine, nous pensons que sans le droit fondamental à la liberté, il est illusoire d’aborder le droit à la santé. Nous avons organisé nombre de formations sur le militantisme. Nous faisons pression sur les législateurs pour des changements politiques et nous sensibilisons les organisations des droits de l’Homme afin d’obtenir leur soutien. Nous nous servons de ces expériences dans les autres pays du continent afin d’obtenir les mêmes droits que les autres travailleurs. Aussi longtemps que la prostitution restera clandestine, l’exploitation et le trafic des femmes continueront. Au regard de l’épidémie du VIH-sida, nous n’avançons pas. La société, avec ses vues fantasques et morbides sur les travailleuses de l’industrie du sexe, croit que la majorité d’entre nous sommes infectées par le VIH. C’est curieux, car les travailleuses de l’industrie du sexe ont une bonne connaissance du VIH, même si elles ne savent ni lire, ni écrire : comme notre corps est notre instrument de travail, nous savons que nous devons prendre soin de nous. ❛Les jeunes filles contaminées le sont par le biais de l’amour.❜ Infectée à travers l’amour, pas à travers le travail Pourquoi insistons-nous si fortement sur la question des Droits de l’homme et du respect de soi? En général, je crois que nous ne prenons pas soin de nous quand nous tombons amoureuses. Nous pensons que l’amour immunise contre le sida. Nous avons tant d’exemples de camarades contaminées par leur partenaire. Elles n’ont pas été infectées au travers de leur travail. La même situation est visible dans les autres pays d’Amérique latine. Je ne peux pas parler pour le reste du monde mais je peux parler de ce que je sais. Elles n’ont pas une grande estime d’ellesmêmes. Elles ont confiance en leur partenaire et puis, souvent, celui-ci finit par être infidèle, il ne se protège pas, il ment. Ici, en Argentine, Elena Reinaga beaucoup de femmes découvrent leur infection quand leur mari entre à l’hôpital et est déjà au plus mal. C’est pourquoi nous insistons sur l’importance de devenir réellement autonome et d’agir avec d’autres associations de femmes. Même si nous avons progressé, la société argentine reste une société machiste. En ce moment, une proposition de loi recommande des programmes d’éducation sexuelle à l’école primaire. Evidemment, l’Église a protesté. Cette situation est similaire dans tous les pays d’Amérique latine mais surtout en Équateur, au Salvador et en Amérique centrale, là où l’Église a un grand pouvoir. Je souris quand on dit que “le sida est une punition de Dieu” ou qu’être homosexuel ou travailleuse de l’industrie du sexe sont “une punition de Dieu”. Je suis certaine que non : Dieu est Amour, il ne nous punit pas. Nous ne sommes pas autonomes et nous ne demandons pas à nos partenaires d’utiliser des préservatifs car nous taisons ce qui nous arrive, nous ne disons rien de ce que nous voulons, de la façon dont nous le voulons. Nous avons besoin d’éducation sexuelle. Si nous ne sommes pas libres en tant qu’adultes, imaginez ce que nous allons transmettre à notre jeunesse, aux enfants, aux adolescents. Nous ne pouvons pas lutter contre l’épidémie du VIH sans éducation sexuelle et sans franchise. ● (défendre, collaborer) 09 Intense et exemplaire : des femmes séropositives latino-américaines et caraibéennes s’organisent pour progresser La récente formation pour les femmes d’Amérique latine vivant avec le VIH-sida (Buenos Aires, octobre 2004) est la manifestation la plus récente de l’action soutenue et innovatrice d’ICW dans cette région du monde. Carmen Tarrades y assistait en tant qu’observatrice internationale. Elle décrit le succès de cet événement qui s’inscrit dans un projet de mise en place de centres de conseil pour des femmes séropositives. but de cette rencontre était double : d’une part, arriver à des accords nationaux et régionaux sur les meilleurs moyens de combattre les problèmes sociaux liés au VIH-sida, d’autre part, former les participantes aux techniques de défense et d’application des droits de la personne humaine. Cette rencontre s’inscrit dans le cadre d’un accord de coopération entre la Fondation Ford et la branche latino-américaine d’ICW afin de lutter contre le VIH-sida. Ensemble, ces deux associations ont pour but de développer dans 17 pays un programme intitulé “Femmes, Droits de l’homme et sida”. Les deux premiers jours étaient consacrés à l’information sous la forme de lectures structurées et conduites par quatre expertes de la question ‘sida, Droits de l’homme et loi’. Toutes ont insisté sur les diverses déclarations internationales des Droits de l’homme rappelant les droits des personnes vivant avec le VIH-sida, ainsi que sur les mécanismes locaux et régionaux pouvant être utilisés pour revendiquer une totale application de ces droits. Toutes ont également rappelé la nécessité d’une volonté politique et d’une participation des personnes vivant avec le VIH-sida et des acteurs de la société civile à toutes les discussions concernant ces droits. Le troisième jour était consacré au développement de nos nouvelles connaissances en un guide pratique pour les projets de la branche latinoaméricaine d’ICW dans les 17 pays concernés. Patricia Perez, administratrice internationale d’ICW, présenta le projet dans le détail (financement, questions de temps). S’ensuivit un débat sur la meilleure façon de considérer le rôle d’un Le Un atelier en Amérique latine soutien aux femmes séropositives dans le cadre général des Droits de l’homme. Mery, Péruvienne, présenta un projet de son pays en accord avec nos plans, et Irene dirigea un débat sur le travail restant à accomplir, dont la nomination des personnes responsables des services de conseil. Le quatrième jour fut une autre journée de travail intense pour toutes les déléguées séropositives. Toutes présentèrent leurs réalisations et évaluèrent le travail accompli. Des femmes du Mexique, du Guatemala, de l’Honduras, du Salvador, du Nicaragua, du Costa Rica, de Panama, de Colombie, du Brésil, du Venezuela, du Pérou, de la Bolivie, de la République dominicaine, du Chili, d’Uruguay, de l’Équateur et d’Argentine s’exprimèrent. Il fut réconfortant d’apprendre que la majorité des pays envisagent un début des projets dès janvier 2005. Enfin, nous revîmes une première version d’une Déclaration et cette dernière reçut une large couverture médiatique en conférence de presse. Le dernier jour, les participantes étaient fatiguées mais revigorées. Comme l’atelier de travail touchait à son terme, beaucoup de larmes se virent sur le visage des participantes lorsque nous contemplâmes tout ce que nous avions réussi et réalisâmes combien notre collaboration avait été étroite. Patricia eut quelques mots éloquents pour chacune, puis l’Argentine Teresita entonna l’Abrazo Caracol sur la musique de l’hymne de la branche latino-américaine d’ICW. Ceci fut un grand moment d’émotion. L’Onusida, FEIM, des groupes de femmes, des associations féministes, les ONG engagées dans la lutte contre le VIH-sida et Oscar Carson du Global Trade Union assistèrent à la cérémonie de clôture. Après l’interprétation du chant latino d’ICW, nous nous saluâmes et embrassâmes, et cette extraordinaire rencontre ferma ses portes. ● 10 (défendre, collaborer) ICW et World YWCA : travailler en partenariat Ennita Manyumwa est une jeune adhérente zimbabwéenne de l’association World YWCA basée à Genève. Elle vient juste de terminer un stage au bureau international d’ICW (ICW International Support Office). Elle dialogue ci-dessous avec Kanjoo Mbaidjikua, jeune adhérente namibienne d’ICW à présent associée pour un an à l’association YWCA à Genève. Toutes deux discutent de leur implication respective dans les deux associations. Ennita est séronégative. Kanjoo est séropositive. Toutes deux ont vingt-six ans. Quand avez-vous pour la première fois entendu parler du VIH ? Kanjoo : Au début des années 1990 quand une troupe théâtrale est venue dans notre école primaire. Leur slogan était ‘le sida est l’ennemi’ et leur message, le sida une maladie de la prostitution. Aussi, on chantait et dansait, pensant être à l’abri de cette maladie. Ennita Ennita : J’avais 18 ans quand je me suis renseignée sur le VIH-sida. J’étais en formation auprès de l’association YCWA pour devenir conseillère. Je pensais qu’il n’était pas nécessaire de faire un test car je n’avais pas de relation sexuelle. Puis en 2001, j’ai rencontré ce garçon. Je l’aimais, et bien que très informée sur les dangers du VIH-sida, nous avons eu des rapports non protégés. Immédiatement, je suis allée faire un test, et une seconde fois quand je suis arrivée à Genève en 2003. L’un et l’autre étaient négatifs. Quand avez-vous décidé de faire le test ? Kanjoo : Tout commence en avril 2000 quand je rencontre un garçon et commence une relation avec lui. Fin octobre, nous sommes un couple très soudé. Je propose donc d’aller faire un test. Quand je vais chercher les résultats deux semaines plus tard, la religieuse commence un entretien psychologique. Je ne suis pas intéressée car je veux prendre mes résultats et partir : dans l’après-midi, je dois passer une épreuve de mathématique. Pour capter mon attention, elle répète plusieurs fois que je suis séropositive. Je ne peux pas décrire le choc et la peur paralysante. Le soir même, je mettais fin à ma relation car j’allais mourir. Pendant deux ans, j’ai vécu isolée, seule, dans la peur, la honte, la confusion, la colère. C’est seulement l’année dernière que j’ai pu me confier à ma sœur. Ennita : Je me souviens quand je suis allée faire mon premier test. J’ai pensé : “O.K., j’ai toujours prêché et distribué les préservatifs. Maintenant, si je suis séropositive, que va dire la société ?” Je me rappelle aussi le slogan “le sida est une maladie qui tue”. La prise de conscience du VIH et du sida dans les années 1980 s’est faîte avec beaucoup de stigmatisation, et pas assez d’information pour que les personnes puissent prendre des décisions avisées. Comment en es-tu arrivée à militer, Kanjoo ? Qu’estce qui t’a fait croire que tu pouvais devenir une activiste et qu’est-ce qui te donne cette force ? Kanjoo : A la fin 2002, je suis allée au centre de Lilonga Eparu. Je cherchais quelque chose à faire. J’étais très fragile. Aussi ils m’ont soutenue psychologiquement et je suis devenue une volontaire. Promise Mthembu m’avait renseignée et ce fut le début de mon engagement significatif dans la lutte contre le VIH-sida et auprès d’ICW. Je suis vraiment sortie renforcée du Dialogue des Jeunes Femmes (Young’s Women Dialogue) auquel j’ai assisté en Afrique du sud, en avril 2004. Nous avons toutes réalisé la nécessité d’écouter les jeunes femmes. Ce qu’elles ont besoin, c’est d’être motivées, informées, d’avoir un espace de parole et des opportunités. Être une militante demande de la responsabilité, de la patience et de la créativité. Je suis rentrée chez moi et j’ai demandé un entretien avec l’épouse du Premier ministre. En Namibie, stigmatisation et discrimination sont toujours un gros problème. C’est pourquoi une action gouvernementale contribuerait à démystifier la maladie. A la fin, nous avons obtenu une audience avec le Premier ministre et il a répondu positivement à nos demandes. J’ai eu ensuite l’opportunité d’aller au parlement kenyan et de prendre connaissance de leur programme de lutte (AIDS Bill). Cela m’a donné l’idée d’une telle initiative légale en Namibie. Je suis rentrée chez moi et j’ai proposé à plusieurs partenaires une action commune pour la mise en place d’un programme national namibien de lutte (Namibien AIDS Bill). Nous avons lancé notre action au cours de la Journée mondiale du sida 2004. Croyez-vous que le fait de vous associer à YWCA International, en étant déjà membres d’ICW, augmentera vos capacités de leaders et votre engagement à soutenir d’autres femmes séropositives pour des changements ? Kanjoo : Si je regarde en arrière, je sais qu’ICW m’a donné l’opportunité et l’espace pour grandir. Le programme de YWCA Internationale met en valeur ce qui a déjà été entrepris. Je crois que leur programme me donnera la possibilité de reconnaître et de développer les capacités d’action d’autres femmes. Ennita : L’une de nous est infectée, l’autre est affectée. Mais nous travaillons toutes deux pour le changement. A travers le partenariat, nous renforçons nos voix. C’est pourquoi, je respecte tant le partenariat entre ICW et YWCA Internationale. Où vous situez-vous dans le mouvement global de lutte ? Ennita : J’ai décidé de m’exprimer et de travailler pour que ça change. En Shona, nous disons “Mwana askinga chemeanofira mumbereko.” Cela signifie : ‘Personne ne viendra et ne nous aidera si nous ne faisons pas de bruit.” Kanjoo Kanjoo : Je croirai toujours au changement. Je veux être là où je peux agir avec l’audace nécessaire, où je sais pouvoir atteindre les décideurs politiques et les personnes influentes pour des changements. L’égalité doit devenir une réalité. ● (défendre, collaborer) 11 Un dialogue de jeunes femmes swazies : résoudre les problèmes, aller de l’avant responsable de projet d’ICW Luisa Orza nous présente un dialogue récent de jeunes femmes du Swaziland. La En novembre dernier, le premier forum national pour les personnes vivant avec le VIH-sida au Swaziland (Young Women’s Dialogue) a rassemblé 19 femmes vivant avec le VIH âgées de 18 à 30 ans et six bébés de moins d’un an. Cette rencontre était une opportunité pour ces jeunes femmes de parler de leurs expériences et de leur réalité quotidienne. Par le biais de grandes affiches, ces femmes ont parlé de leur éducation et de leur enfance, de leurs relations avec leurs parents ou tuteurs, de la mort des proches ou de la séparation d’avec des membres de leur cercle intime, de la pauvreté, du diagnostic et des périodes de maladie, du décès des enfants, amies ou partenaires, des périodes de colère, d’aigreur ou de dépression, et enfin de l’acceptation de leur sérologie, bien souvent grâce à leur participation à un groupe de soutien Réalités quotidiennes Elles ont évoqué également la réalité quotidienne des jeunes femmes séropositives au Swaziland : difficultés de dire sa séropositivité, relations amoureuses, négocier des relations sexuelles protégées, allaitement, coût exorbitant des médicaments, manque d’accès à l’information, chômage et stress, préjudices, discriminations des femmes pour soi-disant être les vecteurs de l’épidémie. Il a été aussi question des pratiques culturelles et de la question du droit à l’héritage, du mariage forcé et de la pression des belles-familles pour qu’elles aient des enfants. Pour la majorité, les questions les plus pressantes sont les problèmes quotidiens : prise en charge de l’enfant, création de revenus, rester en bonne santé, bonne nutrition, accéder à des centres d’aide et des services de soutien psychologique. Pour certaines s’y ajoutent deux autres problématiques : comment maintenir la satisfaction du partenaire afin de ne pas être battues, comment protéger les filles des pères afin de ne pas être violées ? Pour affronter ces problèmes, les femmes ont besoin de connaissances, d’information, de propositions de financement, d’argent, de formations professionnelles, de soutien psychologique et de groupes de soutien. Droits des femmes, besoins des femmes ICW agit pour une société sans violation des droits des femmes. Cela nécessite un changement “stratégique” et cela est encore plus difficile que d’exposer nos problèmes quotidiens. Pourtant, à la fin de la semaine, les jeunes femmes swazies ont identifié trois domaines-clé pour lesquels se mobiliser : droits sexuels et reproductifs, accès aux soins, traitements et soutien, et réelle participation des femmes séropositives aux décisions affectant leurs vies. Toutes ont reconnu qu’il s’agit là des questions affectant la vie de toutes les jeunes femmes vivant avec le VIH au Swaziland. Mais les premières étapes en vue d’une telle mobilisation ont besoin d’inclure de nombreuses formations : nutrition, soins à domicile, questions pratiques concernant la divulgation d’une séropositivité et l’aide aux autres femmes pour une telle action, soutien psychologique, création de groupes de soutien, mise en place de projets viables générateurs de ressources, prévention de la transmission du virus de la mère à l’enfant (PMTCT : Preventing Mother-toChild Transmission), droits des femmes. Notre marche sera longue mais nous avons commencé à avancer. Et ce commentaire ne cesse de me revenir : “pour la façon dont nous autres mères, nous avons été traitées, pour la manière dont nous avons eu accès à ce dont nous avions besoin, nourriture pour les bébés, commodités pour la toilette, baby-sitters : merci ! Que Dieu vous protège !” Ce qu’ICW peut espérer, c’est qu’en prenant soin des besoins des nourrissons pendant cette formation, les mères ont pu réfléchir à leurs droits. ● Les adhérentes d’ICW Gcebile, Promise et Luisa Orza assistaient à cette rencontre. Elle était animée par Vicci Tallis, consultante indépendante sur la parité hommes-femmes et le sida. Cet événement était financé par l’UNIFEM. Réunion de jeunes femmes swazies 12 (défendre, collaborer) Préparation au traitement : Un exemple en Amérique latine premier sommet international sur la préparation au traitement (International Treatment Preparedness Summit : ITPS) a eu lieu au cours de la conférence internationale de Barcelone sur le sida, en 2002. Bertha Chete, contact guatémaltèque d’ICW, nous parle d’une récente rencontre latinoaméricaine consacrée à la préparation au traitement. Cette rencontre était organisée par des associations latino-américaines, dont ESVIHSIDA Advocacy, Red Hispana de PVVIH (Hispanic Network of People Living with HIV/AIDS : Réseau hispanique des personnes vivant avec le VIH-sida), et REDLA+ (Latin American Network of People Living with HIV/AIDS : Réseau latino-américain des personnes vivant avec le VIH-sida). Le Le processus de sélection Le comité de sélection comprenait Oswaldo Rada (Colombie), Patricia Pérez (Argentine), Odir Miranda (Salvador), Violeta Ross (Bolivie), Rodrigo Pascal (Chili). Trente-deux personnes originaires de 17 pays d’Amérique latine ont été sélectionnées. Stu Flavell (de l’association GNP+) et Nina Ferendic (de l’Onusida) agissaient en qualité d’observatrices. Des experts sur des thèmes spécifiques étaient également invités. Le programme Le programme couvraient : ● Accès aux traitements et aux soins ● Fonds mondial ● Initiative ‘3 millions d’ici 2005’ ● Accords de libre commerce, propriété intellectuelle et brevets ● Militantisme (Advocacy) Cette rencontre n’était pas une formation ou un atelier de développement. Cette rencontre était une opportunité d’organiser une action militante en faveur de l’accès aux traitements, d’une qualité des médicaments à bas prix, de la continuité de la prise en charge, et enfin de la réalisation des engagements et des accords ratifiés par nos pays respectifs en relation avec les Droits de l’homme et le VIH-sida. Un groupe de travail en ligne sur les accords de libre commerce a été mis en place car nous pensons que ces accords sont mauvais pour la qualité de vie de tous, particulièrement pour celle des personnes vivant avec le VIH-sida. Nous avons rédigé une déclaration sur l’accord de libre commerce pour l’Amérique centrale (Central America Free Trade Agreement). Nous avons adressé cette déclaration au Dr Peter Piot (Directeur exécutif de l’Onusida) et à Kofi Annan. Enfin, nous avons convenu de plans et de délais d’action. ● Europe et VIH-sida : nouveaux défis, nouvelles opportunités Cette seconde conférence s’est tenue en septembre 2004 à Vilnius, en Lituanie. Carmen Tarrades y assistait. Elle nous livre ses impressions. J’ai été diagnostiquée séropositive en 1989 et la question de la prévention de l’infection par le biais de méthodes spécifiques me tient particulièrement à cœur. Je suis allée à cette conférence afin d’obtenir d’associations de lutte des informations sur la consommation de drogues et les techniques de réduction des risques, les programmes de réduction des risques et la façon dont -s’ils le sont- ils sont adaptés aux besoins des femmes vivant avec le VIHsida. Il est positif de constater que l’OMS, l’Onusida et l’Union européenne agissent, développant à une plus grande échelle des traitements pour les usager(ère)s de drogues, la prévention de nouvelles infections, l’amélioration des soins et du soutien. Les responsables politiques semblent admettre le besoin criant d’un meilleur accès aux soins et aux traitements pour les usager(ère)s de drogues par voie intraveineuse. Plus de pays de l’Europe de l’Est doivent bénéficier des fonds du Fonds mondial, fournir des thérapies de substitution pour les usager(ère)s de drogues, s’attaquer à la stigmatisation et à la discrimination, et enfin sensibiliser et former les communautés touchées aux traitements, thérapies et stratégies de prévention. Mais l’aspect le plus intéressant de cette conférence fut une réunion d’usager(ère)s de drogues venus de toute l’Europe de l’Est à laquelle j’ai assisté après la conférence. De leur point de vue, peu de choses sont en place pour répondre à leurs besoins –cela en contradiction avec ce qui venait d’être dit pendant la conférence- et nombre de législations de leurs pays contredisent les positives recommandations de l’OMS. J’ai été choquée d’entendre que les usagères de drogue sont discriminées par les usagers de drogues quand elles continuent l’usage de drogues durant leur grossesse. Pendant des années, une grossesse m’a semblé totalement inenvisageable. A présent, je sais que je pourrais avoir des enfants si je le voulais. Nous avons toutes ce droit. Et nous pouvons toutes être de bonnes mères si nous sommes informées et soutenues pour une grossesse sans risque et un résultat positif. Il existe beaucoup de mythes autour des usager(ère)s de drogues par voie intraveineuse. Nous avons besoin d’une information sérieuse sur les effets ‘peutêtre’ nuisibles des drogues, légales ou illégales, et sur la prise de drogues au cours de la grossesse. Nous avons besoin de combattre les idées préconçues sur les usager(ère)s de drogues par voie intraveineuse. ● Déclaration de Vilnius : www.aidsfonds.nl/aids actioneurope In Memoriam L’Ougandaise Faith Akiiki, une grande militante pour la parité Lydia Mungherera, membre d’ICW, nous a écrit le 28 novembre. J’ai de mauvaises nouvelles. Faith Akiiki a été renversée par une voiture la nuit dernière. Elle est morte sur le coup près de chez elle à Jinja. Faith siégeait au comité du Forum national des personnes vivant avec le VIH-sida en Ouganda. Elle était également adhérente des associations NACWOLA et ICW. Conseillère psychologique, elle était une grande militante pour la cause des femmes. On se souviendra de son soutien sans faille envers ses camarades vivant avec le VIH-sida. Même sans moyens suffisants, elle s’efforçait d’accomplir sa tâche. Elle était connue du gouvernement et de tous les officiels des Nations unies en Ouganda pour son combat obstine en faveur d’une présence des personnes vivant avec le VIH-sida. Elle se battait avec détermination pour que le principe d’une plus grande implication des personnes infectées (GIPA) devienne une réalité. Que son âme repose en paix pour l’éternité ! ICW présente toutes ses condoléances à sa famille ainsi qu’à ses amies et collègues. ● ✑ Lettres ✎ (défendre, collaborer) 13 ✒ ✉ Chères amies d’ICW, Chère ICW, Merci de l’intérêt que vous nous témoigné, à nous, femmes vivant avec le VIH-sida. Nous apprécions vos efforts pour que nos voix soient entendues. Je suis veuve depuis juin 1990. Mon mari m’a laissée avec quatre enfants : un garçon et trois filles. Je suis heureuse d’être toujours en vie. Et je sais qu’il me reste encore de nombreuses années à vivre, que je verrai mes arrières petits enfants. Je prie Dieu pour le cadeau de la vie. J’ai rejoint Reach Out en tant que cliente. Puis nous avons mis en place un atelier de confection, The Roses of Mbuya. J’ai débuté comme stagiaire avant d’être promue superviseur. A présent, je suis la coordinatrice principale de l’ensemble de l’atelier. Nous confectionnons différents articles : des vêtements pour dames, des chemises d’hommes, des tenues d’intérieur, des vêtements d’enfants. Nous voudrions juste mieux les vendre. Le projet a débuté en novembre 2002. Nous sommes en train de le transformer en centre de formation pratique. Ainsi, d’autres clientes sont formées et peuvent ensuite travailler indépendamment grâce à des machines à coudre mises à leur disposition. Cela les aide à ne dépendre que d’elles-mêmes. Celles particulièrement douées sont sélectionnées pour devenir formatrice. J’ai une expérience à partager avec vous. J’étais invitée à une réunion organisée dans un institut médical (Médical National Institute) à Washington en juin 2004. Je bénéficiais d’une bourse et d’un billet d’avion. Les frais d’hôtel et de conférence étaient pris en charge. Quand je suis allée à l’ambassade américaine pour le visa, il m’a été refusé. Trois fois ! Ils m’ont dit que si j’allais aux Etats-Unis, je risquais de contaminer des gens, ou alors que j’avais l’intention de rester dans le pays. J’ai écrit pour dire que j’étais sous antirétroviraux en Ouganda et par conséquent, ne pouvais pas rester aux Etats-Unis. J’aime mon travail, mes quatre enfants et ma communauté. J’ai finalement réussi à partir le 15 juin (avec un jour de retard) après une longue bataille et l’appui de mon docteur qui a contacté des personnes influentes. Je veux juste rassurer le monde entier. J’ai reçu suffisamment de soutien psychologique et je connais suffisamment les risques liés au VIH-sida pour refuser de faire courir un risque à quiconque. Nous devons bénéficier de la liberté de déplacement quand une occasion comme celle-là se présente, exactement comme les personnes séronégatives. J’ai été très gênée que mon visa soit refuser du seul fait de ma séropositivité. Une telle attitude ne fait qu’encourager les gens à cacher leur statut. Toutes ces discriminations contre nous doivent cesser. Je suis une infirmière du secteur publique au Nigeria. Je travaille à l’Army Barracks Clinic. Dans cette clinique, il y a de nombreux patients, hospitalisés ou non, qui sont soignés ainsi que des personnes vivant avec le VIH-sida. Ces personnes ont aussi besoin d’information, de soutien psychologique, de soins et de soutien. En principe, on leur conseille de se protéger contre toute forme d’infections sexuellement transmissibles et d’éviter de contaminer d’autres personnes au cours de rapports non-protégés. On leur conseille de dire leur séropositivité à leurs conjoints et à ceux qu’elles respectent, tout comme de se nourrir correctement et de se reposer. Il leur est également conseillé de recevoir un soutien psychologique pendant la grossesse, et ce pour la santé à la fois de la mère et de l’enfant à naître. La discrimination et la stigmatisation des femmes vivant avec le VIH-sida devraient être évitées. Les femmes ont besoin de soins et de soutien, et leurs droits doivent être respectés. Elles doivent être associées aux décisions et aux actions qui affectent leurs vies. Le sida n’est pas une question morale. C’est une question de santé publique et un problème de développement. Les personnes vivant avec le VIH-sida ont les mêmes droits fondamentaux que toute autre personne. Les éducateurs de la santé, comme moi, doivent militer pour les droits humains des personnes vivant avec le VIH-sida. Que Dieu vous bénisse ! Vôtre, Jane Nabwire, Ouganda. P.S. : A Washington, j’ai rencontré plusieurs dames qui ont été très amicales avec moi. ● Mwo Nasidi Ado, Nigeria. ● Ecrivez-nous ! Vos contributions à ICW Actualité sont les bienvenues! Soyez concise et indiquez clairement votre accord pour une publication. Autrement, nous serons dans l’impossibilité de publier votre texte. Dites-nous sous quel nom vous souhaitez voir votre texte être publié car de nombreuses personnes seront amenées à le lire. N’hésitez pas à utiliser un pseudonyme si vous le désirez. Ecrivez à ‘ICW News Letters’, soit à l’adresse d’ICW, soit par e-mail à [email protected] en indiquant sur la ligne sujet ‘ICW News Letters’. *Nous ne pouvons garantir à l’avance une publication et nous nous réservons le droit d’effectuer des coupures. Vient d’être publié ! Un livre remarquable intitulé “Human Rights and AIDS in Latin America and the Caribbean – from the perspective of HIV women in the region’ (Droits de l’homme et sida en Amérique latine et dans les Caraïbes – une réflexion de femmes séropositives) vient d’être publié par Patricia Perez et une collègue. Ce livre de la branche latino-américaine d’ICW aborde les droits de la personne humaine dans le cadre de l’épidémie du sida. Il contient également des informations pratiques, des listes d’associations, ainsi qu’une législation détaillée pays par pays. Un nouveau partenariat entre les branches nordaméricaines d’ICW et de GNP+ NA (ICW Amérique du Nord) et le Global Network of Poeple Living with HIV-AIDS – North America : GNP+NA (Réseau mondial des personnes vivant avec le VIH-sida – Amérique du Nord) ont passé un accord afin de favoriser l’organisation d’activités, de projets et de programmes en Amérique du Nord. GNP+NA, basée à Amsterdam, est la filiale nord-américaine de l’association GNP+. L’administratrice internationale d’ICW, Antigone Hodgins, fait partie du groupe d’activistes convaincus de la nécessité d’une telle collaboration. Beri Hull, d’ICW, assistait également à la première réunion stratégique. Elle nous annonce les trois priorités de cet accord : comment l’Amérique du Nord s’intègre dans l’agenda mondial, quel est son rôle dans l’éducation des autres personnes vivant avec le VIH-sida sur le continent, comment mieux l’impliquer dans les forums internationaux de lutte contre le sida. ICW 14 (soutien et maternité) Grossesse et principes moraux, test et discrimination : un dilemme pour les femmes séropositives nombre d’entre vous le savent, bien souvent, les femmes infectées par le VIH découvrent leur séropositivité lors d’un examen prénatal. Tout d’un coup, on vous dit que vous êtes atteinte d’une maladie mortelle et que votre bébé est peut-être également infecté. Pire, le mari ou les beaux-parents sont informés en premier, cela en complète violation de vos droits. Le personnel hospitalier peut également ne pas vous ménager, comme si votre séropositivité était de votre “faute”. On peut vous menacer d’un avortement ou d’une stérilisation, que vous désiriez ou non l’enfant. Et cela par les personnes qui devraient vous informer afin de vous aider à décider de ce qui est le mieux pour vous. Cette situation est particulièrement dévastatrice pour celles d’entre nous qui avons été mariées par nos parents à des hommes mûrs, ou qui n’ont pas eu d’autres relations sexuelles avant le mariage. Dans la grande majorité des cas, il s’avère que le mari est également séropositif. Et pourtant, on continue d’assumer –de façon illogique et injuste- que puisque vous avez été testée en premier, vous êtes le vecteur de l’infection. Ci dessous, Alice Welbourn rappelle la réalité des femmes séropositives enceintes ainsi que les revendications d’ICW. Puis, Asha relate son histoire de femme népalaise. Comme Pour que l’accès aux traitements soit un succès, nous avons aussi besoin de soins et de soutien a récemment pris la coprésidence de la branche Accès aux traitements et aux soins (ACTS) de la Coalition mondiale sur les femmes et le sida (Global Coalition on Women and AIDS). Dans le cadre de ce rôle, l’une de nos préoccupations majeures est d’assurer non seulement l’accès aux traitements pour les femmes séropositives mais également le suivi des soins et le soutien nécessaire. Et bien évidemment, tout ce qui concerne les façons d’éviter une infection du bébé. A présent, le principal point d’entrée identifié par l’OMS, pour les femmes récemment diagnostiquées ou débutant un traitement, est les examens prénataux : c’est le moment le plus susceptible pour une femme d’être en contact avec les services de santé. Malheureusement, les services de santé dans le monde manquent si cruellement de moyens qu’il est improbable que de tels examens de routine soient offerts à l’ensemble ICW Alice de la population féminine, ou encore que la majorité des femmes de tout âge et nonenceintes en bénéficient. Même si les femmes enceintes veulent protéger leur futur enfant du VIH, nombre d’entre elles ne retournent pas chercher leurs résultats ou ne débutent pas un traitement du fait de l’attitude irrespectueuse et sans compassion du personnel des cliniques. Dans le cadre de notre nouveau rôle, nous demandons donc aux prestataires de santé du monde entier de prendre en compte la santé aussi bien mentale que physique des femmes, et de promouvoir : a) des services de dépistage pour les futures mères avant qu’elles ne conçoivent ; cela afin qu’elles puissent décider si oui ou non, elles veulent un enfant. b) des services de dépistage pour les futurs pères ainsi que pour les futures mères ; cela afin qu’ils comprennent leurs responsabilités communes au regard du VIH. c) des services de dépistage à la fois pour les futures mères et pour leurs partenaires ; cela afin de les amener à conjointement assumer la responsabilité d’un diagnostic positif. d) une information complète et objective, un soutien et des soins pour toutes les femmes enceintes séropositives ; cela afin qu’elles puissent décider pour ellesmêmes, si oui ou non, elles désirent continuer leur grossesse. En Afrique subsaharienne et ailleurs, le programme de l’université de Columbia sur la transmission verticale du virus (de la mère à l’enfant) promeut soins et soutien non seulement aux femmes enceintes et aux futurs nourrissons, mais également soins et traitements, selon les besoins, aux partenaires et aux autres enfants de la famille. En attendant que le test prénatal devienne une option réalisable, une telle approche permet aux femmes séropositives d’une part d’être moins blâmées pour soi-disant être les vecteurs du VIH dans la famille, d’autre part de ne pas être les seules à bénéficier de traitements. ICW est consciente que nombre d’agents hospitaliers dans le monde sont des femmes : bien souvent elles anticipent ce qui va leur arriver dans leur lit conjugal, mais de peur de perdre leur emploi, elles refusent de faire le test. Est-il possible que certaines projettent leur anxiété sur leurs patientes quant à la façon dont elles seraient traitées si ellesmêmes se révélaient séropositives ? En ne perdant de vue aucun de ces éléments, ICW demande aux prestataires de santé du monde entier de développer des politiques de soutien en milieu professionnel, cela afin d’assurer le respect, le soutien et la sauvegarde des emplois du personnel hospitalier séropositif. Quand le personnel hospitalier se sentira valorisé et respecté, quel que soit son statut, il sera à même de répondre positivement aux tensions et au stress inhérents au soutien et à la prise en charge respectueuse des personnes infectées par le VIH. ● (soutien et maternité) 15 Asha: Quand les choix ne sont pas disponibles ! Asha a 28 ans et est née à Katmandu au Népal, pays où elle continue de résider. Elle est séropositive depuis huit ans. majorité des femmes séropositives au Népal sont veuves et/ou abandonnées par leur famille. Cela signifie qu’elles ont de nombreux soucis en plus de leur santé sexuelle et procréatrice. Rester en vie et en bonne santé est leur priorité. Dans mon cas, deux ans après mon diagnostic, j’ai épousé un homme séropositif. J’ai de la chance car il me soutient et coopère avec moi : nous pouvons parler de la sexualité et de la procréation à moindre risque. Malheureusement, peu de choix nous sont offerts. Même si je désirais un enfant, je n’en aurais pas. Avant, je pensais que sans névirapine pour combattre une contamination de la mère à l’enfant, le bébé serait infecté. Pourtant, bien que ce médicament soit depuis peu disponible à Katmandu (ce n’est pas le cas dans le reste du pays), je crains toujours un mauvais accouchement suite à mon état de santé. De plus, mon mari et moi n’avons pas les moyens d’avoir un bébé. C’est déjà difficile pour nous deux de survivre. De toutes façons, je suis très affaiblie et j’ai développé une allergie à la plupart des aliments que je peux acheter. Les soins constants que nécessite une infection sont impossibles pour la majorité des femmes séropositive au Népal, y compris pour moi. Prendre correctement soin de soi est trop onéreux. J’ai peur de prendre des antirétroviraux car cela demande un engagement sur une longue durée. En tant que femme séropositive népalaise, je ne suis pas certaine de pouvoir bénéficier d’un tel traitement de façon permanente. Il y a à présent 25 personnes vivant avec le VIH-sida qui sont enrôlées dans un nouveau programme gouvernemental de La délivrance gratuite d’antirétroviraux. Je ne peux pas acheter de tels traitements. Si j’accepte de m’enrôler dans un tel programme et que le gouvernement décide de l’arrêter, que ferai-je? Récemment, une amie, une autre femme séropositive, a commencé une thérapie antirétrovirale dans le cadre d’une initiative gouvernementale. Elle ne l’a pas tolérée et aucune alternative n’était disponible. A présent, obligée de se procurer de nouveaux traitements, elle doit les payer. Elle ne pourra pas se le permettre pendant longtemps sauf si quelqu’un accepte de l’aider financièrement. Ma vie a été complètement bouleversée quand j’ai appris ma séropositivité. Je n’envisage pas le long terme, mais tant que je suis en vie, je désire agir pour aider les autres femmes séropositives népalaises. Grâce à mes compétences intellectuelles et manuelles, j’aide d’autres femmes séropositives. J’espère que cela leur permettra de générer un peu d’argent afin de survivre. Les centres de soins familiaux pourraient nous faciliter l’accès à la névirapine ou à d’autres traitements contre les infections opportunistes. Ils pourraient aussi sensibiliser et renforcer les femmes comme moi. Ainsi, nous pourrions choisir si oui ou non, nous désirons un enfant, si oui ou non, nous acceptons des rapports sexuels avec un homme. Ce serait bien si les femmes népalaises pouvaient faire ces choix.● Asha associations ‘The International Planned Parenthood Federation’ et ‘ICW’ ont lancé de concert au cours de la Journée mondiale du sida 2004 un bel et nouveau document intitulé ‘Rêves et désirs’. Ce document porte sur le droit à une santé sexuelle et procréatrice pour les femmes infectées par le VIH. Le témoignage d’Asha est repris avec sa permission de ce document. www.ippf.org Les Merci à Abbott International pour leur soutien aux pages de cette lettre d’information consacrées à la prévention de l’infection de la mère à l’enfant. Remerciements à: Fiona Hale, Luisa Orza, Alice Welbourn, Fiona Pettitt, Philippa Lawson, Kate Thomson, Carmen Tarrades. ICW ACTUALITÉ 28 Sue O’Sullivan : Directrice de la publication DS Print & Redesign : Impression et conception graphique Appel aux jeunes femmes séropositives du monde entier La prochaine lettre d’information sera consacrée aux jeunes filles vivant avec le VIH-sida et inclura 1) des articles sur les méthodes d’advocacy et de formation 2) des exemples de soutien entre jeunes femmes 3) des témoignages personnels sur la vie, l’amour, les peurs et les espoirs. Nous recherchons des articles courts (200 à 400 mots) et nous devons les recevoir à ICW Actualité au plus tard le 22 février. Nous ne pouvons garantir à l’avance une publication. Envoyez vos contributions par poste ou email à Sue O’Sullivan à ICW : [email protected] Date limite : 22 février 2005 16 Administratrices de région internationales/ Contact & Information Antennes d’ICW La Communauté Internationale des Femmes vivant avec le VIH-sida (ICW) est le seul réseau international animé par et pour des femmes séropositives. ICW fut fondée d’une part pour répondre à un manque de soutien, d’informations et de services adéquates pour les femmes séropositives du monde entier, d’autre part pour agir et peser sur le développement des politiques en leur faveur. ICW est une association à but non lucratif enregistrée au Royaume-Uni. Administratrices Asie-Pacifique de région Afrique MARTINE SOMDA REVS+ 01 BP 382 Bobo-dioulasso, BURKINA FASO Tél./Fax: 002 269 70517 (bureau) E-mail: [email protected] [email protected] LYNDE FRANCIS The Centre PO Box A930, 24 Van Praagh Avenue Harare, ZIMBABWE Tél.: 263 4724 494 (bureau) Fax: 263 4732 965/6 E-mail: [email protected] DOROTHY ONYANGO c/o WOFAK PO Box 35168 00200 City Square Nairobi, KENYA Tél.: 254 020 2730952 Fax: 254 020 2725455 E-mail: [email protected] BEV GREET c/o VACHO PO Box 1328, Collingwood Victoria 3066, AUSTRALIE Tél.: 613 9419 3350 Fax: 613 9381 2447 E-mail: [email protected] P. KOUSALYA Positive Women Network (PWN+) 23, Brindavan Street West Mambalam Chennai – 600033 Tamil Nadu, INDE Tél.: +91 44 23711176, 24717363 E-mail: [email protected] HILDA ESQUIVEL Aramberri 706 ote. Centro de Monterrey, Nuevo León, MEXIQUE Tél./Fax: (0181) 83-42-06-34 E-mail 1: [email protected] E-mail 2: [email protected] Europe MARIJO VAZQUEZ SANTS no 2-4 1st Floor 08014 Barcelone ESPAGNE Tél./Fax: +34 9343 14548 E-mail: [email protected] Amérique Caraïbes/ du Nord Amérique latine PATRICIA PEREZ Sarandi 215 1o “A” (1081) Buenos Aires, ARGENTINE Tél.: 54 11 4951 0651/4951 5037 E-mail 1: [email protected] E-mail 2: [email protected] Site Internet: www.icwlatina.org ANTIGONE HODGINS 4831 36th Street, NW Apt 206, Washington, DC 20008, ETATS-UNIS Tél.1: 202 363 00121 (personnel) Tél.2: 202 232 6749 (bureau) Tél.3: 202 4228551 (portable) E-mail: [email protected] Membres d’ICW • L’adhésion à ICW est ouverte et gratuite pour toutes les femmes vivant avec le VIHsida. Tous les membres reçoivent régulièrement et gratuitement la lettre d’information ainsi que les autres publications d’ICW. • Si vous souhaitez adhérer, remplissez le coupon détachable ci-dessous et retournez-le à Carmen Tarrades à : London International Support Office. Vous recevrez en retour un formulaire d’adhésion plus détaillé. • Si vous êtes membre et souhaitez mettre à jour des informations ou obtenir des renseignements sur votre adhésion, cochez la case appropriée et retournez le coupon à Carmen à la même adresse. Si vous n’avez pas encore reçu notre lettre d’information et désirez que cette erreur soit rectifiée, retournez le coupon détachable en indiquant en quelle langue vous désirez recevoir la lettre d’information. Je désire adhérer à ICW. Veuillez m’envoyez un formulaire d’adhésion. Je suis membre d’ICW et j’aimerais recevoir la lettre d’information en : anglais espagnol français NOM ADRESSE PAYS Retournez ce coupon à : Carmen Tarrades, ICW International Support Office, Unit 6, Canonbury Yard, 190a New North Road, London N1 7BJ, Royaume-Uni. E-mail: [email protected] ✂ Unit 6, Canonbury Yard, 190a New North Road, London N1 7BJ, ROYAUME-UNI Tél.: +44 20 7704 0606 Fax: +44 20 7704 8070 E-mail: [email protected] Afrique subsaharienne RENSEIGNEMENTS: GCEBILE NDOVLU 13 Jenden Building, Coventry Crescent, Industrial Sites, PO Box 2107 Mbabane, SWAZILAND Tél.: +268 6113727 Fax: +268 4047701 E-mail: [email protected] Campagne mondiale pour les droits sexuels et génésiques RENSEIGNEMENTS: PROMISE MTHEMBU 1 Windsor Dales, 2 Keary Place New Germany, 3610, AFRIQUE DU SUD Tél./Fax: + 27 705 63 88 Portable: + 27 82 628 27 46 E-mail: [email protected] Accès aux soins, traitements, et soutien RENSEIGNEMENTS: BERI HULL Tél./Fax: + 1 202 397 8488 E-mail: [email protected] ICW a besoin de votre soutien Les membres d’ICW reçoivent gratuitement la lettre d’information. ICW accueille, en tant que membres, les femmes séropositives du monde entier. CODE POSTAL International Support Office Note: ICW peut envoyer plusieurs exemplaires de la lettre d’information aux associations et groupes de soutien de personnes séropositives. Si vous êtes interéssée, veuillez contacter Carmen. Les amies* et supporters d’ICW Le but d’ICW est une information accessible à toutes les femmes séropositives La lettre d’information, comme toutes les publications d’ICW, est distribuée gratuitement en anglais, espagnol et français aux femmes séropositives du monde entier, membres ou non de l’association. Cette lettre d’information est le reflet de leur vie, de leurs opinions, de leurs aspirations. Si vous désirez soutenir notre action, n’hésitez pas à faire un don. Avec simplement £20 (ou 30 dollars US ou 30 euros), nous pouvons envoyer notre lettre d’information à 20 femmes séropositives. Tous les dons sont les bienvenus. Pour des dons en ligne en toute sécurité, vous pouvez nous les faire parvenir en Livres Sterling, en Euros, en Dollars américains par l’intermédiaire de notre site www.icw.org en cliquant sur “Donate Now”. Pour des dons par le biais de la poste, envoyez vos contributions à Corinne Miele : ICW Donations, Unit 6, Canonbury Yard, 190a New North Road, London N1 7BJ, Royaume-Uni (chèques libellés au nom d’ ‘ICW’). Joignez vos coordonnées afin que nous puissions rester en contact et vous tenir informée des dernières activités d’ICW. Pour toutes questions concernant les dons, contactez Corinne : [email protected] *Les amies : La liste grandissante des personnes qui nous soutiennent comprend des personnes qui ne sont pas directement infectées par le VIH (par exemple des personnes affectées par l’épidémie, tels des proches ou des membres de la famille) www.icw.org