Rabbanit `Hanna
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Rabbanit `Hanna
5725 • 5775 50 ans de la Histalkout de la Rebetzen 'Hanna נ"ע זי"ע Jour après jour, le Rabbi avait l’habitude de rendre visite à sa mère, la Rabbanit ‘Hanna. Voici comment cela commença et se déroula par la suite : En ce jour spécial du 28 Sivan 5707 (1947), après une longue période de souffrances et d’errance en Russie, en exil en Asie centrale puis en Europe libérée, la mère du Rabbi, la Rabbanit ‘Hanna, arriva aux Etats-Unis et s’installa dans le quartier de Crown Heights à Brooklyn, non loin de son fils aîné, à proximité du 770. C’est là que débuta dans sa vie une nouvelle époque de bonheur et de réelle satisfaction ; cette période bénie dura 17 ans. Depuis le jour où la Rabbanit arriva aux Etats-Unis jusqu’à sa disparition, le Rabbi prit l’habitude de lui rendre visite chaque jour, sans exception. Malgré un programme quotidien surchargé, alors que chaque minute lui était plus que précieuse, il ne se passa pas un jour sans que le Rabbi n’honore sa mère, la Rabbanit, d’une visite ! Ainsi, jour après jour, dans n’importe quelle situation, sous le soleil ardent ou sous la neige, le Rabbi marchait jusqu’à Kingston Avenue pour effectuer sa visite quotidienne et réaliser ainsi son devoir de respect envers la mère. N° 6 | Tichri 5775 - Septembre 2014 11 L’ORGANISATION DE LA VISITE Les visites qui avaient lieu aux heures du soir se tenaient habituellement entre 18h et 19h et duraient un court moment (de 5 à 15 minutes). Lors de ces visites, le Rabbi discutait avec sa mère et prenait de ses nouvelles. Les soirs de Chabat et des fêtes, les visites se déroulaient à un moment proche de l’allumage des bougies. Une rencontre supplémentaire se passait chaque vendredi soir après la prière pendant laquelle le Rabbi restait dans la maison de la Rabbanit un plus long moment. Il arriva plusieurs fois que le Rabbi fit une autre visite le jour du Chabat ; et à des périodes particulières, à la sortie de Chabat également. Rav Leib Pachkess raconte qu’un ‘Hassid qui habitait à cette période au numéro 1418 de President Street (l’immeuble dans lequel habitait la Rabbanit), raconta : « Nous avions eu moi-même ou un de mes fils, à plusieurs reprises, le mérite de descendre ouvrir la porte d’entrée au Rabbi lorsqu’il venait rendre visite à sa mère. Le Rabbi nous remerciait toujours. Parfois, il souriait aussi à mes enfants ou s’intéressaient à l’endroit où ils étudiaient, à ce qu’ils apprenaient… » Rav Chmouel (Moulé) Lipsker ajoute que sa famille habitait aussi dans le voisinage de la Rabbanit ; il s’avéra que la Rabbanit évoqua une fois le fait que nous avions ouvert la porte de l’immeuble au Rabbi, sous-entendant par-là que ce dernier n’en était pas satisfait. (Selon une autre source, la Rabbanit demanda de ne pas le faire, exprimant un désir personnel à ce que le Rabbi – qui n’effectuait presqu’aucun effort physique – ait au-moins cette « gymnastique » à réaliser : celle d’ouvrir la lourde porte…) Afin de prévenir sa mère de son arrivée, le Rabbi lui téléphonait avant. Il avait dans sa poche la clé de la porte de l’appartement qu’il ouvrait lui-même pour ne pas la fatiguer. Il arriva plus d’une fois que la Rabbanit sortit dans la rue, devant sa maison, à la rencontre du Rabbi. A ces occasions, ils restaient un petit moment à l’extérieur, discutaient et rentraient ensuite à la maison. « C’était impressionnant de voir le Rabbi et sa mère, la Rabbanit debout, dehors, en train de discuter », racontent des témoins. La famille Friedman habitait l’immeuble voisin, au 1414. Il s’avéra à plusieurs reprises que le fils Avraham (devenu depuis le célèbre chanteur ‘hassidique Avraham Fried) doué d’un talent musical remarquable, regardait 12 La Rabbanit Hanna parle au Rabbi a la parade de Lag Baomer par la fenêtre du troisième étage, chantait « Oufarasta », « Hochia Ete Amé’ha » ainsi que d’autres chants au moment où le Rabbi venait rendre visite à sa mère. Le Rabbi levait alors les yeux dans sa direction et agitait vers l’enfant, en signe d’encouragement. LE DÉROULEMENT DE LA VISITE Lorsqu'il entrait dans la maison, le Rabbi et sa mère, la Rabbanit ‘Hanna s'asseyaient au salon et discutaient la plupart du temps en buvant du thé. Le Rabbi faisait toujours attention à ne pas s'asseoir tant que sa mère ne s'était pas elle-même assise. Quelques fois, le Rabbi préparait lui-même les tasses de thé. Durant la discussion, le Rabbi prenait de ses nouvelles et s'enquérait à propos des évènements la concernant. Il s'intéressait même à des détails « secondaires », comme ‘HABAD magazine par exemple : « est-ce que la femme de ménage est venue ce matin ? ». Tout ceci avait pour objectif de faire en sorte que sa mère soit confortablement installée. A part cela, le Rabbi s'efforçait de lui parler d’événements qui lui faisaient plaisir ; il lui apportait de la lecture (comme le quotidien « Morguène journal » (journal du matin) et différents objets susceptibles de l'intéresser et de lui plaire. La Rabbanit, de son côté, lui répondait de la même façon. Elle lui rapportait des bonnes nouvelles, consciente de le réjouir ainsi. Elle profitait également de ce moment passé avec son fils aîné pour le consulter sur différents sujets personnels. Plus d'une fois, certaines de ses connaissances lui exposaient leurs problèmes afin qu'elle les soumette au Rabbi. La Rabbanit les évoquait au cours de la visite afin d'entendre l'avis du Rabbi et transmettait ensuite la réponse à ceux qui l'avaient sollicitée. Durant la visite et la discussion avec le Rabbi, elle s'efforçait d'avoir toujours un visage souriant ; même si quelque chose la peinait ou l'attristait, elle tentait de ne pas en parler du tout. L'événement le plus connu et le plus surprenant est sans doute celui du décès de son fils, Reb Israël Arié Leib en 5712 (1952). Bien que ceci lui ait été tout le temps caché, elle finit par se douter que les choses n’allaient pas bien avec ce fils. Malgré cela, jamais elle n’en fit part au Rabbi et elle cacha ses craintes à ce sujet. Vers la fin de sa vie, la Rabbanit ‘Hanna était aidée par Madame Haya Sarah Weiner. Le fils de cette dernière, Rav Bentsion, raconte : « Lorsque le Rabbi venait rendre visite à sa mère, ma mère avait l’habitude de leur préparer des tasses de thé. A l’une de ces occasions, le Rabbi se tourna vers elle et la questionna : « Et pour vous ? Ne buvez-vous pas de thé ? » Ma mère répondit : « J’en ai une à la cuisine. » Le Rabbi rétorqua : « Vous pouvez la boire en notre compagnie », ce à quoi elle répondit : « Non, merci beaucoup. Une maman et son fils n’ont besoin d’aucun étranger… » Lorsque la rencontre touchait à sa fin, le Rabbi souhaitait à sa mère : « tout le meilleur » ou : « Puisses-tu mériter d’accueillir Machia’h » (de vivre avec Machia’h) ou d’autres souhaits semblables. Par ailleurs, quand la Rabbanit ne se sentait pas bien, le Rabbi ne lui souhaitait pas « bonne guérison ». La Rabbanit expliqua que le Rabbi agissait ainsi afin de ne pas laisser de place à Une lettre de Rav Y. Y. Raskin : "la Rabanit lui a dit une fois que elle a du plaisir quand je lui écrit "la mère du roi" une pensée qui laisserait supposer qu’elle ne se portait pas bien. En sortant de la maison, le Rabbi entamait une marche rapide en direction du 770. Même si chaque minute lui était très précieuse, le Rabbi faisait preuve d’une patience débordante envers sa mère, durant la visite, comme s’il n’était pas du tout pressé. IL N’A JAMAIS TOURNÉ LE DOS Voici un témoignage particulier au sujet de la conduite exceptionnelle du Rabbi lorsqu’il sortait de la maison de la Rabbanit, rapporté par Rav Tsvi Hirsch qui avait eu souvent l’habitude de visiter la maison de la Rabbanit. Il fut présent à plusieurs reprises lors de la visite du Rabbi. « La première fois que je vis le Rabbi sortir de la maison, je remarquai quelque chose d’inhabituel : la démarche du Rabbi était très « étrange » à mes yeux. Tout en marchant vers l’extérieur, il rangeait les chaises, redressait les cadres suspendus au mur. Lorsque j’assistai à cela pour la première fois, je pensais : Ah bon ? Il y a des personnes qui quittent une maison de cette manière ? Mais quand cet épisode se répéta deux, trois fois, cela me parut extrêmement étonnant. La Rabbanit qui avait lu l’impression d’étonnement sur mon visage, attendit le départ du Rabbi, puis s’adressa à moi : « je vois que tu as observé la manière avec laquelle mon fils part. Pas tout le monde n’y prête attention, mais toi tu l’as fait. Permets-moi alors de te raconter quelque chose … Depuis que mon fils est devenu Bar Mitsva, je n’ai jamais vu ses épaules. Il ne m’a jamais tourné le dos, et il pense que je ne m’en rends pas compte ! » Là, tout devint clair pour moi. Le Rabbi ne voulait pas sortir en tournant le dos, à la manière dont un Juif quitte le lieu de l’Arche Sainte ; afin que son comportement minutieux passe inaperçu, il tentait de ranger les chaises et sortait en marchant de côté. qu’elle « vivait » toute la journée à travers la rencontre avec son fils, le Rabbi. A l’approche de la visite, elle se préparait à sa venue, même matériellement : elle se revêtait une belle robe et s’asseyait en attendant son arrivée … Durant toutes les discussions, elle cherchait à lui apporter de la satisfaction. Par nature, elle s’intéressait beaucoup au sort des ‘Hassidim et de leurs familles, des activités publiques ‘Habad … Elle allait toujours glaner de telles informations auprès de ses connaissances ou de ses lectures, puis les mentionnait au Rabbi pour lui faire plaisir. » Rav Bentsion Weiner raconte : « Ma mère était très impressionnée par les visites du Rabbi, elle complimenta son comportement devant la Rabbanit : « Il est tellement occupé, il trouve le temps de venir et de repartir… Un tel fils qui rend visite chaque jour sans exception… ! « La Rabbanit réagit : « Effectivement, il accomplit l’injonction « honore ton père et mère » avec beaucoup d’embellissement, au-delà de ce qui est imaginable ! ». L’ATTITUDE DE LA RABBANIT « Ces visites me font vivre », « Sa visite me procure de la vitalité pour vingt-quatre heures », «Je vis avec la force que m’apportent ses visites » font parties des expressions notées par la Rabbanit ‘Hanna dans ses mémoires, nous informant de la place importante qu’occupaient ces visites dans sa vie. A la suite d’une période remplie de souffrances et de tribulations, d’une vie de solitude sans son éminent mari, ces visites représentaient pour elle une source de consolation. Qui mieux qu’elle était à même de le décrire comme elle le nota dans ses mémoires : « La chambre dans laquelle j’habite maintenant n’est pas du tout grande (à ce moment-là, elle habitait à la rue Lincoln), mais pour une certaine raison lorsqu’il se trouve ici, la chambre me paraît plus grande. Beaucoup de sujets dont l’objet est source d’inconfort, s’atténuent tout d’un coup à ce moment. » A une autre occasion, elle écrivit : « Lorsque les nuages de mon cœur s’assombrissent, au point qu’il est presque possible de les couper au couteau, après avoir vu mon fils, ils s’affaiblissent considérablement ». Voici le témoignage du secrétaire de la Rabbanit, Rav Dovber Younik, qui comptait parmi les habitués de la maison : « Les visites du Rabbi étaient pour la Rabbanit le moment le plus spécial de la journée. On peut dire AVEC LE RABBI ET LA RABBANIT Nombreux furent les ‘Hassidim et les élèves de la Yechiva qui avaient l’habitude de rendre visite à la Rabbanit ‘Hanna chez elle. La Rabbanit, de son côté, avait exprimé le plaisir que cela lui procurait ; de leur côté ceux qui étaient présents chérissaient particulièrement le mérite de rester un moment auprès de cette dame si distinguée et intelligente. C’est ainsi qu’il leur arriva de rencontrer le Rabbi au moment de sa visite quotidienne. Parfois, c’est le Rabbi qui apparaissait au moment de leur visite et d’autres fois, c’était l’inverse. Rav Chalom Dovber Fouterfass raconte : « Très souvent, je rendais visite à la Rabbanit et nombre de fois, le Rabbi apparut au moment où je m’y trouvais. A l’une de ces occasions, lorsque j’entendis le Rabbi approcher, je me dépêchai de me cacher à la cuisine. Tout à coup, le Rabbi demanda à sa mère : « Où est-il ? » La Rabbanit dit : « Fouterfass ? » Le Rabbi dit : « Je dois lui passer le bonjour de la part de son père ! » En sortant de la cuisine, le Rabbi me transmit de la part de Rav Holland, qui était venu le voir à son retour de Russie, le bonjour de mon père que je n’avais pas vu depuis des années et dont j’avais très peu de nouvelles à cause du Rideau de fer qui nous séparait des Juifs d’URSS. » Rav Yehouda Leib Raskin, l’émissaire du Rabbi au Maroc rapporta : « Durant ma jeunesse, je m’efforçais de rendre visite à la Rabbanit ‘Hanna pratiquement chaque jour. Une fois, en arrivant, j’aperçus le Rabbi lors de sa visite quotidienne. Bien entendu, je quittai les lieux immédiatement. » Rav ‘Hitrik raconte : « Conscient de réaliser le souhait du Rabbi, j’avais l’habitude de rendre visite à la Rabbanit ‘Hanna ; en effet, elle avait besoin de compagnie, vu les nombreuses heures qu’elle passait dans la solitude. Elle aimait parler en Russe, elle le parlait bien et voulait parler avec moi. Je passais toujours une demi-heure, voire une heure avec elle. York ; la Rabbanit l’invita chez elle un soir. Lorsque ma mère en parla à son amie, cette dernière réagit : «C’est impossible. C’est le moment où le Rabbi lui rend visite ; elle ne fixe aucune rencontre à ce moment-là » Ma mère pensa alors s’être trompée, appela la Rabbanit en s’excusant : j’ai cru comprendre que vous m’aviez fixé un rendez-vous à tel et tel moment. Il s’agit peut-être d’une erreur. Mais la Rabbanit lui répondit: « Non, non, il ne s’agit pas d’une erreur, je souhaite vous voir à ce moment-là ! » C’est ainsi que ma mère se présenta au rendez-vous à l’heure dite. NOUS AVONS UN INVITÉ Au milieu de la conversation, le Rabbi entra. Ma mère ne savait que faire ; la Rabbanit lui dit : « Reste-ici », se tourna vers le Rabbi en lui présentant ma mère : « Voici la Rabbanit dont je t’ai parlée. » C’est alors que ma mère comprit la raison pour laquelle la Rabbanit avait fixé la rencontre à ce moment précis : elle avait tenu à la présenter à son fils pour qu’il puisse lui aussi la remercier pour son aide. Rav Zalman Chmoulker rapporte une ‘visite’ semblable mais ‘prévue d’avance’ : « Ma mère connaissait la Rabbanit ‘Hanna du camp de réfugiés Pouking en Allemagne où elle lui apporta son aide autant que possible. En 5713 (1953), elle arriva elle aussi à New La Rabbanit Sarah Raskin raconte une histoire semblable : « Cela se passa au cours d’une visite de mon mari Rav Mena’hem Mendel à New York. Avant d’être reçu en audience privée avec le Rabbi, il fut invité à rendre visite à la Rabbanit ‘Hanna. Mon mari répondit à Le Rabbi m’ouvrit plusieurs fois la porte. Je tentais de savoir à quel moment le Rabbi repartait car tant que le Rabbi était là, elle n’avait besoin d’aucune visite. Lorsque le Rabbi ouvrait la porte, il avait coutume de dire : « Merci de venir passer du temps avec ma mère »