Morue de mer Celtique

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Morue de mer Celtique
LA FICHE
Morue
DU MOIS
juillet 2000 n° 17
(Gadus morhua)
Stock de mer Celtique
(Divisions VIIe-k du CIEM)
COMMENT VIT-ELLE ?
Un prédateur très actif
Distribuée dans l'Atlantique nordest, du Groenland, du nord de la Norvège au golfe de Gascogne (où elle est
rare) la morue vit de la côte jusqu'à plus
de 600 m de profondeur, les concentrations les plus élevées se trouvant entre
150 et 200 m. Poisson démersal (vivant
à proximité du fond), elle fréquente
aussi bien les fonds sablo-vaseux que
rocheux.
La morue est un prédateur très actif et
se nourrit de proies très diverses (bivalves, crustacés et poissons). Une des
originalités de l'espèce dans la zone étudiée est une croissance très rapide avec
un taux record parmi les stocks de morue
européens : elle passe de 0.5 kg à un an à
près de 8 kg à quat re ans et peut atteindre 20 kg en moins de 10 ans. Sa taille
dépasse exceptionnellement 1 m 20.
Une étude récente à montré qu'en
mer Celtique environ 40% des morues
de 2 ans atteignent leur première maturité sexuelle. Une proportion qui augmente rapidement avec l'âge : près de
90% à 3 ans et 100% à 5 ans et plus. La
femelle porte un grand nombre d'ovules
: de 2,5 millions pour une morue de 5
kg à plus de 7 millions à 15 kg. Les aires
de re p roduction des populations de
morue sont bien indiv i d u a l i s é e s. La
plupart des morues de mer Celtique
pondent en mars au large de la côte
nord de Cornouaille. Des pontes not ables sont également observées au
large de la côte sud-est de l'Irlande et un
peu en Manche Ouest.
L'essentiel des migrations des morues
adultes sont liées à la reproduction.
Les morues juvéniles de mer Celtique
se dispersent vers le sud et l'ouest et au
printemps suivant, deve nues adultes,
elles sont largement réparties dans
toute la mer Celtique. D'éventuelles mig rations entre la mer Celtique et la
Manche Ouest n'ont pas été démontrées, alors que des marquages ont en
revanche révélé des migrations rapides
entre le nord-est et le sud-est de l'Irlande. Marquées dans le nord-est de la mer
d'Irlande, des morues de moins d'un an
ont été recapturées l'année suivante en
mer Celtique.
COMMENT EST-ELLE EXPLOITEE ?
Une forte mésexploitation
En mer Celtique, la morue est essentiellement capturée par des chalutiers et
principalement par la France qui assure
près des 3/4 des apports. L'Irlande, le
Royaume Uni et la Belgique constituent les autres pays ex p l o i t a n t s. La
part de la France dans les débarq u ements internationaux tend à diminuer
depuis le début des années 90.
E n t re 1971 et 1998, les débarq u ements internationaux montrent une
tendance à la hausse : de 5 000 à 11 000
t/an. Le fait marquant dans l'exploitation récente de la morue de mer Celtique et Manche Ouest est l'augmentation très importante des débarq u ements en 1988 et 1989 due à la très forte
classe 1986, suivie d'un effondrement
jusqu'en 1991 (9 300 t contre 20 300 t en
1989). Les études récentes d'évaluation
des rejets des chalutiers français et ir-
Correspondance âge, taille, poids
ÂGE
TAILLE (cm)
POIDS (g)
I f re m e r
1
34
500
2
50
1 600
3
72
4 700
4
86
7 900
5
94
10 200
6
101
12 500
7+
107
14 800
landais ont montré que les rejets pondéraux sont faibles (moins de 0.5%).
Après avoir passé par un maximum
historique en 1988, les rendements des
chalutiers semi-industriels de Lorient
ont chuté rapidement jusqu'en 1992
puis ont fluctué autour de la va l e u r
moyenne. De 1996 à 1998, ils ont encore décliné de 33%. L'évolution des rendements des chalutiers langoustiniers
bigoudens (chalut unique et chaluts ju meaux combinés) est similaire pour la
période considérée.
L ' ex p l o i t ation porte généra l e m e n t
sur les jeunes morues âgées de 1, 2 et 3
ans qui représentent 80 à 90% des débarquements. Un nombre important de
morues immat u res (1 an) dépasse la
taille minimum commerciale de 35 cm.
Les captures sont plafonnées par un
TAC annuel fixé à 16 000 t en 2000. Ce
TAC couvre l'ensemble des sous-zones
VII à X, à l'exception de la div i s i o n
VIIa. Le quota français pour 2000 est
de 12 230 tonnes.
Le stock de morue est fortement mésexploité, c'est à dire que les jeunes morues sont capturées trop petites. Il serait
possible de tirer un meilleur profit du
recrutement en pêchant moins et/ou en
améliorant la sélectivité.
Les gains de production à long terme
pourraient alors atteindre 25%.
QUEL DIAGNOSTIC ?
Une exploitation fragile
Jusqu'en 1981, la biomasse des géniteurs est restée inférieure à la moyenne
(10 900t). En 1989, elle a atteint 24 700
t grâce à l'effet de la très bonne classe
1986. Elle a rapidement décliné jusqu'à
8 600 t en 1992 en raison des fo r t e s
mortalités par pêche observées et des
faibles classes 1988 et 1989.
Dans les années récentes, la biomasse
féconde tend à décliner tout en restant
légèrement supérieure à la moyenne et à
la valeur du seuil correspondant à une
approche de précaution.
L'exploitation du stock de morue est
fragile car elle repose essentiellement
sur deux ou trois classes d'âge. Pour ce
stock, il a été clairement montré que
des bas niveaux de biomasse féconde
(inférieurs à 10 000 t) peuvent induire
de très faibles recrutements impliquant
des années de «disette». A l'inve r s e,
l ' a m é l i o ration due à un bon re c r u t ement est très passagère en raison des
fortes mortalités par pêche. Une biomasse féconde de 10 000t (Bpa) est
considérée dans le cadre de l'approche
de précaution comme un minimum biologique en deçà duquel la restauration
du stock aurait une forte pro b ab i l i t é
d'être compromise.
Sous l'hypothèse d'une mortalité par
pêche égale à la moyenne des 3 dern i è res anné es et d'un re c r u t e m e n t
moyen issu de la série 1971-1998 pour
les prochaines années, les débarq u ements totaux provenant des divisions
VIIe-k devraient être stables en 1999
puis diminuer en 2000. La biomasse de
géniteurs est estimée en légère augmentation en 1999, puis elle devrait diminuer en 2000 et 2001 en raison de s
fortes mortalités par pêche.
Continuer à pêcher avec le niveau de
mortalité par pêche actuel signifie qu'à
moyen terme il y a un risque d'environ
20% que la biomasse de géniteurs
tombe en dessous de la biomasse de
précaution.
Les nouvelles de l’Ifremer - n°17 - Juillet 2000 • 4