Protocol 913 - Département de chimie
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Protocol 913 - Département de chimie
Protocol 913 Synthèse de silice mésoporeuse de type MCM-41 et caractérisation de la porosité du matériau par physisorption de N2 à -196°C Introduction : Bien que les zéolithes possèdent d’excellentes propriétés catalytiques dues entre autres à leur nature cristalline ainsi qu’à leur structure poreuse unique, leur faible taille de pores limite leur potentiel d’application dans plusieurs domaines. Ainsi, un effort considérable de recherche scientifique a été déployé vers l’augmentation de la taille des pores de matériaux aux pores organisés, stimulé notamment par les compagnies pétrolières. C’est ainsi qu’au début des années 1990, des scientifiques de la compagnie Mobil ont proposé les premières synthèses de silicates mésostructurés, soit des matériaux possédant un système poreux organisé constitué de mésopores (visible par microscopie électronique, Figure 1a). Par contre, contrairement aux zéolithes, ces silices restent amorphes, et seul le réseau poreux est organisé. Les membres de la famille des M41S1,2 étaient obtenus originalement par synthèse hydrothermale, en milieu basique, à partir de gels inorganiques contenant des silicates en présence de cations triméthylammonium quaternaires, CnH2n+1(CH3)3N+ (CnTMA+, 8<n<18), dont le C16TMABr (bromure d’hexadécyltriméthylammonium) est le plus utilisé. Ces nouveaux matériaux présentent des isothermes d’adsorption d’azote très distinctes er réversibles (type IV, Figure 1b) sur lesquelles une condensation capillaire prononcée est observée. Les matériaux de type MCM-41 possèdent des surfaces spécifiques supérieures à 1000 m2/g, des volumes poreux autour de 1 cm3/g et des tailles de pores de l’ordre de 24 nm.3 Figure 2: a) Transmission electron microscopy image of ordered mesoporous MCM41 silica. b) Type IV nitrogen physisorption isotherm measured at 77 K for calcined MCM-41. 1 Protocol 913 Malgré la vaste gamme de matériaux mésoporeux disponible à ce jour, le principe de synthèse de ces silices poreuses demeure relativement le même, basé sur l’autoassemblage coopératif4 d’un précurseur de silice inorganique, généralement un alkoxyde (le tétraéthoxysilane, TEOS, étant le plus utilisé) avec un agent de structuration, souvent un tensioactif. L’hydrolyse du précurseur inorganique, catalysée en milieu basique ou acide, conduit à la formation d’un réseau silicique, de manière à former un réseau hybride mésoporeux silice-agent de structuration (Figure 2). Par la suite, une phase de consolidation, aussi appelé vieillissement ou mûrissement, est généralement ajoutée pour permettre une condensation accrue du réseau de silice pour mener à l’obtention d’une structure plus solide. Le solide est par la suite recueilli par filtration et séché. Finalement, le retrait de l’agent de structuration par calcination ou extraction à l’aide d’un solvant organique permet de libérer le système poreux, et d’obtenir la silice mésoporeuse. Figure 2 Représentation schématique de la synthèse de matériaux mésoporeux organisés. Ainsi, l’auto-assemblage de l’agent tensioactif est crucial pour la formation de mésostructures ordonnées d’excellente qualité. Compte tenu des connaissances actuelles en chimie et de l’assemblage des agents tensioactifs en solution, il est possible de contrôler les synthèses et d’effectuer un design de matériaux mésoporeux.5 Références 1 Kresge, C.T.; Leonowicz, M.E.; Roth, W.J.; Vartuli, J.C.; Beck, J.S. Nature 1992, 359, 710. Beck, J.S.; Vartuli, J.C.; Roth, W.J.; Leonowicz, M.E.; Kresgfe, C.T.;Schmitt, K.D.; Chu, C.T.W.; Olson, D.H.; Sheppard, E.W.; McCullen, S.B.; Higgins, J.B.; Schlenker, J.L. J. Am. Chem. Soc. 1992, 114, 10834. 3 U. Ciesla, F. Schüth, Microporous Mesoporous Mater. 1999, 27, 131. 4 a) A. Monnier, F. Schüth, Q. Huo, D. Kumar, D. Margolese, R. S. Maxwell, G. D. Stucky, M. Krishnamurty, P. Petroff, A. Firouzi, M. Janicke, B. F. Chmelka, Science 1993, 261, 1299. b) Q. Huo, D.I. Margolese, U. Ciesla, P. Feng, T.E. Gier, P. Sieger, R. Leon, P.M. Petroff, F. Schüth, G.D. Stucky, Nature 1994, 368, 317. c) Q. Huo, R. Leon, P.M. Petroff, G.D. Stucky, Science 1995, 268, 1324. 5 G. J. A. A. Soler-Illia, C. Sanchez, B. Lebeau, J. Patarin, Chem. Rev. 2002, 102, 4093 2 2 Protocol 913 Quelques protocoles standards : 1) 3 Protocol 913 2) 4 Protocol 913 Physisorption de gaz inerte 6-13 L’adsorption de gaz est une des nombreuses méthodes expérimentales disponibles pour la caractérisation des matériaux mésoporeux, comme la diffraction des rayons X aux petits angles, la microscopie électronique (à balayage et en transmission), les différentes méthodes de RMN, etc. De celles-ci, l’adsorption de gaz est probablement la méthode la plus répandue. Cette technique permet de déterminer plusieurs caractéristiques importantes des matériaux poreux, dont la surface spécifique, le volume poreux ainsi qu’une gamme importante de taille de pores, soit de l’ordre de 0,35 jusqu’à plus de 100 nm. Les mécanismes d’adsorption et de condensation des gaz à l’intérieur des matériaux poreux sont fort complexes. Classification de l’IUPAC des isothermes de physisorption de gaz Dans un document publié en 1985, l’IUPAC a formulé des recommandations quant aux méthodes et à l’évaluation des données d’adsorption de gaz. Il a été proposé de regrouper les isothermes de physisorption en 6 catégories, classification présentée à la Figure 3.14 Type I : Adsorbant microporeux ayant une petite surface externe (ex. zéolithes) Type II : Adsorbant non poreux ou macroporeux Type III : Adsorbant non poreux présentant une interaction faible avec l’adsorbat Type IV : Adsorbant mésoporeux Type V : Adsorbant mésoporeux présentant une interaction faible avec l’adsorbat Type VI : Adsorbant présentant une adsorption multicouche par paliers Figure 3 Catégories d’isothermes et d’hystérèses selon l’IUPAC 5 Protocol 913 La mesure de physisorption L’adsorption des gaz sur une surface solide est causée par des forces d’attraction de van der Waals des molécules de gaz, l’adsorbat, sur un substrat, l’adsorbant. Bien que plusieurs gaz puissent être utilisés, l’azote est de loin le plus répandu. À des températures suffisamment basses, généralement à ou sous la température d’ébullition de l’adsorbat, l’adsorption des gaz peut être considérée comme un modèle à 2 phases où l’adsorbat coexiste avec sa phase liquide. La méthode est basée sur la mesure, dans un volume constant et calibré et à une température fixe, de la pression de gaz. L’instrument est équipé de capteurs de pression très sensibles du côté de l’échantillon (P) et de la référence (P0). La pression de vapeur saturante, P0, est mesurée en continue, ce qui permet d’obtenir des valeurs très précises de pression relative (P/P0). E F D B A C Figure 4 Représentation schématique des différentes sections d’une isotherme d’adsorption d’azote de type IV. Lors d’une mesure, l’instrument effectue l’ajout à température constante de quantités dosées de gaz dans la cellule à échantillon et mesure l’augmentation de pression relative à l’ajout de chacune des doses, ce qui permet de construire une isotherme. Il est à noter que l’isotherme est mesurée dans les 2 sens, soit en adsorption ainsi qu’en désorption de gaz, ce qui donne naissance aux branches d’adsorption et de désorption de l’isotherme. Chacune des sections de l’isotherme permet d’obtenir de l’information sur la porosité du matériau. Au départ de la mesure de physisorption, l’adsorbant doit d’abord être sous un vide (de l’ordre de 10-5 torr). Ainsi, l’ajout d’adsorbat se traduit initialement par une absorption monocouche des molécules de gaz sur les parois du solide (Figure 4, section A). Lorsqu’une monocouche de l’adsorbat recouvre toute la surface disponible du matériau, une adsorption multicouche se produit (section B). Le point auquel le régime passe de monocouche à multicouche correspond au point d’inflexion dans la courbe (point C). Dans le cas des matériaux mésoporeux, les molécules de gaz sont confinées à l’intérieur du pore. Ainsi, à des valeurs de pression relative entre 0,3 et 0,8, il y aura 6 Protocol 913 condensation du gaz à l’intérieur des pores, soit la condensation capillaire (section D) (le confinement dans les nanopores va déplacer les valeurs du point triple T dans le diagramme d’état du corps pur simple N2). Les pores se rempliront ainsi de l’adsorbant sous forme liquide. Lorsque les pores sont remplis, l’adsorption se poursuit à l’extérieur des pores, notamment entre les particules. On arrive ensuite au point où il y a condensation de l’adsorbat (P/P0 est près de 1, point E), ce qui complète la branche d’adsorption. Par la suite, le gaz est retiré par petits incrément jusqu’au retour à l’état initial, ce qui constitue la branche de désorption. Le gaz se retirera d’abord de la surface externe, puis des pores. La désorption du gaz (section F) dans les pores peut cependant être décalée par rapport à l’adsorption, se qui peut produire une hystérèse, selon la taille et de la forme des pores. La zone située à des valeurs de pression relative entre 0 et 0,05 correspond à l’adsorption dans les micropores (lorsque le matériau contient des micropores) et permet de déterminer le volume microporeux. La zone située à des valeurs de pression relative entre 0,05 et 0,3, correspond aux phases d’adsorption mononouche/multicouche. La surface spécifique est déterminée à partir des données de cet intervalle. Située entre 0,3 et 0,8, la zone de condensation capillaire permet de déterminer la taille des pores. À P/P0 > 0,80, on assiste habituellement à un remplissage interparticulaire. Comme la surface externe est souvent bien faible comparativement à la surface interne pour les matériaux mésoporeux, cette section de l’isotherme est pratiquement plate. Le point à P/P0 = 0,95 est utilisé pour déterminer le volume poreux total du matériau. Références 6 Gregg, S.J., Sing, K.S.W., Adsorption, Surface Area and Porosity, Academic Press, London, 1995. 7 Rouquerol, F., Rouquerol, J., Sing, K.S.W. Adsorption by powders and porous solids, Academic Press, London, 1999. 8 Neimark, A.V., Ravikovitch, P. I. Microporous Mesoporous Mater. 2001, 44, 697. 9 Ravikovitch, P. I., Neimark, A. V. Colloids Surf. A: Phys. Eng. Aspects 2001, 187, 11. 10 Ravikovitch, P. I., Neimark, A. V. J. Phys. Chem. B 2001, 105, 6817. 11 Thommes, M. in Nanoporous Materials; Science and Engineering; Lu, G. Q.; Zhao, X.S., Eds.; Imperial College Press: London, U.K., 2004, 317. 12 Neimark, A. V., Ravikovitch, P. I., Vishnyakov, A. J. Phys. Condensed Matter. 2003, 15, 347. 13 Kleitz, F., Bérubé, F., Guillet-Nicolas, R., Yang C.-M., Thommes, M. J. Phys. Chem. C 2010, 114, 9344. 14 Sing, K.S.W.; Everett, D.H.; Haul, R.H.W.; Moscou, L.; Pierotti, R.A.; Rouquerol, J.; Siemieniewska, T. Pure Appl. Chem. 1985, 57, 603. 7